Mauro Forghieri
Mauro Forghieri, nĂ© le [1] Ă ModĂšne en Ămilie-Romagne et mort le dans la mĂȘme ville, est un ingĂ©nieur italien.
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(Ă 87 ans) ModĂšne |
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Furia |
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Spécialisé dans la conception des voitures de course, Mauro Forghieri est célÚbre pour avoir dirigé le département technique de la Scuderia Ferrari pendant plus de 20 ans. Surnommé Furia en raison de son énergie débordante, de ses extraordinaires capacités de travail, de ses créations pétillantes, de sa flamboyance et de ses grosses colÚres, il a inspiré des générations d'ingénieurs, tant dans le sport automobile que dans l'industrie automobile.
Biographie
Jeunesse
Le grand-pĂšre paternel de Mauro Forghieri Ă©tait un ami de Benito Mussolini quand celui-ci Ă©tait encore socialiste. L'aĂŻeul Ă©tait Ă©galement ami avec Sandro Pertini (futur rĂ©sistant et septiĂšme prĂ©sident de la RĂ©publique italienne de 1978 Ă 1985) qui, lui, est toujours restĂ© socialiste. Lorsque Mussolini change de âfoiâ, le pĂšre de Reclus Forghieri part en France oĂč il commence Ă Ă©crire des articles pour Avanti!, ce qui provoque la fin de ses relations avec le fondateur du fascisme, mĂȘme si l'inimitiĂ© est toujours restĂ©e contenue. Retourner en Italie n'est alors plus possible pour le grand-pĂšre. Il finit par s'enraciner dans l'hexagone pendant de nombreuses annĂ©es, et avec lui son fils Reclus, le futur pĂšre de Mauro. Le grand-pĂšre s'installe ensuite Ă Paris tandis que Reclus part Ă Monte-Carlo. Celui-ci est un trĂšs bon technicien et se trouve trĂšs recherchĂ© par les clients locaux, propriĂ©taires de voitures de luxe[2]. Mauro Forghieri est le fils unique de Reclus Forghieri, mĂ©canicien-tourneur spĂ©cialisĂ© qui, une fois revenu en Italie, travaille Ă l'assemblage des moteurs de l'Alfa Romeo « Alfetta 158 » au sein de l'Ă©curie crĂ©Ă©e par Enzo Ferrari, devenue au fil des annĂ©es le bras armĂ© de la firme milanaise en compĂ©tition. Connu pour ĂȘtre un excellent technicien, Reclus est militarisĂ© pendant la Seconde Guerre mondiale Ă Naples oĂč Ansaldo le coopte pour ses ateliers mĂ©caniques. Pendant cette pĂ©riode difficile, Reclus est Ă©galement responsable dâun bataillon de rĂ©sistance antifasciste et aide Enzo Ferrari qui, comme tous les patrons et industriels, pouvaient ĂȘtre mis en difficultĂ©. Cela a nouĂ© des liens forts entre eux deux. Durant cette pĂ©riode sombre, Ferrari continue Ă penser dâabord et avant tout Ă ses voitures. Il nâest ni fasciste ni rĂ©sistant, il garde toujours une position neutre sans toutefois oublier ceux qui l'aident. C'est entre autres pour cette raison que les liens avec le fils Forghieri, Mauro, seront forts, anciens et ancrĂ©s[3]. L'arrivĂ©e des AmĂ©ricains rebat cependant les cartes, ce qui provoque une bousculade gĂ©nĂ©rale. Parmi ceux qui choisissent de fuir, il y a un colonel qui, avant de partir, confie Ă Reclus les clĂ©s du Parco Caruso, oĂč l'intĂ©gralitĂ© de l'Ă©quipement du GĂ©nie italien est dĂ©posĂ©. Lorsque les AlliĂ©s arrivent, Reclus Forghieri prĂ©fĂšre ne pas garder ces clĂ©s dans sa poche et dĂ©cide de les remettre aux nouveaux arrivants. AprĂšs la guerre, la situation se stabilise et Reclus retourne Ă ModĂšne oĂč Enzo Ferrari est content de le reprendre, Ă partir de 1947, pour ses ateliers de Maranello[2] - [4]. ĂlevĂ© par sa mĂšre, Afra Gori[5], Mauro a vĂ©cu Ă Naples, Milan, ModĂšne et Abbiategrasso. Il a une enfance itinĂ©rante comme tous ceux qui vivent les annĂ©es de guerre. Ă l'Ă©poque, s'enraciner est un luxe que peu de gens peuvent se permettre. Une maison n'est alors qu'une âtenteâ oĂč sĂ©journer avant de repartir vers une nouvelle destination[2]. Mauro n'a pas beaucoup hĂ©ritĂ© de son pĂšre et de son grand-pĂšre paternel. Pendant la guerre, il vit Ă la Villa Clementina avec sa mĂšre et ses oncles[2]. Enfant, Mauro Forghieri aime construire des galions miniatures, « les Espagnols, Ă voiles carrĂ©es », mais sa grande passion, ce sont les avions, et plus spĂ©cifiquement les avions de chasse. Il les dessine, les construit en modĂšle rĂ©duit, et les rĂȘve[2]. Cependant, ce n'est qu'une fois Ă l'universitĂ© qu'il dĂ©cide concrĂštement de travailler dans l'industrie aĂ©ronautique. Cette dĂ©cision survient lors d'un voyage aux Ătats-Unis alors qu'il visite une usine de moteurs d'avions, Northrop. Devant l'entrĂ©e, il y a une dalle de marbre sur laquelle est Ă©crite en anglais une phrase qui frappe l'Ă©tudiant italien et qui signifie : « le frelon, selon les thĂ©ories, ne devrait pas pouvoir voler car il est trop lourd et a des surfaces d'ailes trop petites. Mais il ne le sait pas et vole quand mĂȘme ». Mauro Forghieri trouve cette phrase magnifique et se dit alors « Je veux venir travailler ici ! ». Mais Ă l'Ă©poque, un dĂ©mĂ©nagement aux Ătats-Unis n'est pas chose facile[2]. L'automobile, quant Ă elle, l'attire Ă©galement. Quand il Ă©tait petit Ă Milan, debout sur le balcon, il regardait les voitures passer en essayant de les reconnaĂźtre de dos. Celles sur lesquelles il ne se trompait jamais Ă©taient l'Aprilia et l'Ardea[2].
En 1959, il effectue une licence en ingĂ©nierie Ă l'universitĂ© de Bologne[6] - [7] - [8]. Il obtient son diplĂŽme d'ingĂ©nieur avec une thĂšse sur les voitures. Ă l'Ă©poque, il parle beaucoup de l'Europe avec son professeur, raison pour laquelle Mauro Forghieri lui propose une thĂšse sur ce qu'il pense alors devenir la voiture europĂ©enne par excellence (mĂȘme si l'avenir lui donnera tord sur ce sujet). Pour sa thĂšse, il mise sur une voiture pas chĂšre et rapide, avec un moteur simple. Il conçoit le moteur Ă partir de zĂ©ro, en s'inspirant du moteur âTigreâ de la Panhard Dyna X, alors que pour le reste de la voiture, il n'imagine finalement pas grand-chose afin que son travail n'aboutisse pas Ă une thĂšse trop substantielle. L'objet principal de la thĂšse est donc le moteur, un bicylindre comme celui de la Fiat 500, la Cinquecento (ou Nuova 500) qui a mis le plus d'Italiens en voiture aprĂšs guerre[9].
CarriĂšre chez Ferrari
FraĂźchement diplĂŽmĂ© en gĂ©nie mĂ©canique, Mauro Forghieri envisage donc, dans un premier temps, de faire carriĂšre dans l'aĂ©ronautique mais regarde aussi du cĂŽtĂ© de l'industrie automobile de compĂ©tition et ne laisse pas passer l'opportunitĂ© d'intĂ©grer la Scuderia Ferrari en 1960 en acceptant une proposition de stage au sein du dĂ©partement moteur. Ă la suite d'une demande de son pĂšre, collaborateur de la premiĂšre heure d'Enzo Ferrari, les portes de Maranello sâouvre toutes grandes pour le jeune Mauro[10]. Il y cĂŽtoie d'autres ingĂ©nieurs qui feront la rĂ©putation du constructeur tels Carlo Chiti, Vittorio Jano, Luigi Bazzi ainsi que le directeur de course Romolo Tavoni. Il a Ă©galement travaillĂ© aux cĂŽtĂ©s de Gian Paolo Dallara qui a rejoint Ferrari peu de temps aprĂšs lui en 1960. Avec un tel entourage, Mauro Forghieri apprend vite[11]. Les premiers travaux de Forghieri Ă l'usine implique Ă la fois des voitures de course et des voitures de sĂ©rie[7] - [8]. Son tout premier projet est de rĂ©gler les Ă©normes problĂšmes de tenue de route des prototypes de la 250 GTO[10] qui souffrent de survirage[12]. Il nâa pas peur dâĂȘtre audacieux et redessine l'arriĂšre de la GTO, augmente sa puissance et permet ainsi Ă la voiture de passer du statut de « voiture tueuse » Ă celui dâ« arme victorieuse » dans de nombreuses courses des annĂ©es 1960[13]. Il fait ensuite partie de l'Ă©quipe qui crĂ©e la monoplace Ă moteur arriĂšre Ferrari 156. Cette voiture innovante domine la saison 1961 et remporte le titre pilote avec Phil Hill, aprĂšs l'accident mortel de son Ă©quipier Wolfgang von Trips Ă Monza, ainsi que celui des constructeurs.
Pourtant, en fin de saison, la Scuderia est dĂ©chirĂ©e par de graves dissensions internes entre Enzo Ferrari et une partie de la direction, qui ne supporte pas lâingĂ©rence dans leurs affaire de Laura Ferrari, l'Ă©pouse du Commendatore. Girolamo Gardini, le directeur des ventes, pose un ultimatum Ă Ferrari qui l'invite Ă faire ses valises. Ce renvoi dĂ©clenche en contrecoup le « schisme de 1961 » (appelĂ© aussi le « grand dĂ©brayage »), un vent de rĂ©volte suivi du dĂ©part du directeur technique Carlo Chiti parti fonder Automobili Turismo e Sport avec le directeur sportif Romolo Tavoni et lâingĂ©nieur Giotto Bizzarrini[10] - [14] - [15] ; de son cĂŽtĂ©, Gian Paolo Dallara passe chez Maserati[16]. Les turbulences engendrĂ©es par cette scission ont fortement ralenti le dĂ©veloppement des Ferrari 156 au cours de la saison 1962, ce que la concurrence britannique met Ă profit pour reprendre lâascendant, notamment Lotus qui sort une rĂ©volutionnaire monocoque. Totalement submergĂ©es, les Ferrari font de la figuration tout au long de lâannĂ©e, entraĂźnant en fin de saison le dĂ©part pour ATS des pilotes Phil Hill et Giancarlo Baghetti[10]. Juste aprĂšs le schisme, Mauro Forghieri est invitĂ© par Enzo Ferrari Ă commencer Ă Ă©tudier les « questions techniques complĂštes de l'usine » (paroles de Forghieri). Pour l'aider dans cette tĂąche, Forghieri reçoit les conseils d'autres ingĂ©nieurs plus expĂ©rimentĂ©s, dont Franco Rocchi, Walter Salvarani et Angelo Bellei[17]. Le lundi , Enzo Ferrari convoque son jeune ingĂ©nieur dans son bureau pour lui dĂ©clarer « Tu es maintenant responsable de toutes nos activitĂ©s course et des essais. »[18]. Le Commendatore nomme ainsi Mauro Forghieri Ă la tĂȘte du dĂ©partement technique et de toutes les activitĂ©s sportives et expĂ©rimentales de la scuderia alors qu'il n'a que 26 ans[19], en le rassurant quant Ă son manque d'expĂ©rience nĂ©cessaire : « Ăcoute, fais juste ton job et je m'occupe du reste. Tu penses Ă ĂȘtre technicien et tu ne t'occupes de rien d'autre. Je resterai prĂšs de toi. »[18] Enzo Ferrari joint ensuite les actes Ă la parole en suivant toujours Mauro Forghieri dans les bons comme dans les mauvais moments, mĂȘme quand il sait que son protĂ©gĂ© a tort, car il s'est rendu compte que lorsque l'on est un patron Ă qui on montre qu'il se trompe, le patron perd automatiquement son autoritĂ©[9]. Une relation de confiance et d'estime trĂšs forte se noue alors entre Enzo Ferrari et Mauro Forghieri ; elle durera jusqu'au bout malgrĂ© des disputes entre ces deux forts caractĂšres, mais Ferrari le soutiendra souvent pour dĂ©fendre des choix techniques face Ă certains pilotes ou dĂ©cideurs de Fiat qui tiennent les cordons de la bourse[10]. Il occupe ce poste pendant plus de deux dĂ©cennies. Ses responsabilitĂ©s comprennent la supervision du dĂ©veloppement technique, la gestion de la section technique pendant les courses et la collaboration avec d'autres dĂ©partements de Ferrari, y compris celui des essais et celui de la rĂ©daction[17]. Devenir chef du dĂ©partement technique de Ferrari n'est pas facile, mĂȘme si vous ĂȘtes sous l'Ćil attentif et l'aile protectrice d'Enzo Ferrari en personne. Mauro Forghieri y parvient, malgrĂ© son inexpĂ©rience et son jeune Ăąge, grĂące Ă une extraordinaire capacitĂ© d'assimilation qui va bien au-delĂ du cĂŽtĂ© purement technique et relĂšve de quelque chose de plus structurel : sa capacitĂ© Ă ĂȘtre le patron, et de bien le faire. En ce sens, Mauro Forghieri dit avoir reçu des leçons de la vie. La premiĂšre lui a Ă©tĂ© transmis indirectement par son prĂ©dĂ©cesseur, Carlo Chiti. Celui-ci Ă©tait quelqu'un de bien mais Ă©tait extrĂȘmement centralisateur. Ainsi, Forghieri apprend Ă ne pas l'ĂȘtre Ă son tour et quand il devient responsable, il comprend que le mieux est de mettre en place de l'autoritĂ©, mais aussi de la sensibilitĂ©. La tendance Ă la centralisation de Chiti n'a pas permis aux jeunes de dĂ©velopper pleinement leurs compĂ©tences, les poussant peut-ĂȘtre mĂȘme Ă faire des erreurs. Ă l'Ă©poque, sous la responsabilitĂ© de Carlo Chiti, Mauro Forghieri avais lui aussi pensĂ© Ă partir. Sa sensibilitĂ© envers les jeunes permet Ă©galement d'avoir rapidement une valeur programmatique trĂšs forte, qui rajeunit et remodĂšle progressivement le dĂ©partement technique de Ferrari depuis les racines[20]. Quand il devient responsable du service course, il se retrouve Ă travailler avec de trĂšs bons mĂ©caniciens, mais ancrĂ©s dans le passĂ©. Un monde qui jusque-lĂ avait mis la main sur des voitures Ă moteur avant, des voitures qui avaient leur propre philosophie, leur propre façon d'ĂȘtre. Il est alors difficile Ă Mauro Forghieri de faire comprendre Ă ces hommes que tout ce qu'ils ont vĂ©cu auparavant n'est plus d'actualitĂ©. Il en parle avec Enzo Ferrari, avec Cavalier Giberti, avec tout le monde, et il les convainc lentement qu'ils doivent changer. Non pas parce que leur modus operandi n'est pas valable en soi mais parce qu'il n'est alors plus en phase avec son temps[20]. Le travail de Mauro Forghieri ne tarde pas Ă payer puisqu'en 1964, John Surtees est sacrĂ© aprĂšs un final Ă suspense au Mexique, au volant de l'une de ses premiĂšres crĂ©ations, la Ferrari 158 qui est une Ă©volution de la 156[10] - [21]. PremiĂšre monoplace monocoque de Ferrari, elle est dĂ©veloppĂ©e Ă la fois avec un moteur V8 1,5 litre et un moteur Ferrari 12 cylindres Ă plat pour les circuits nĂ©cessitant plus de puissance[10]. La 158 coiffe les deux couronnes mondiales grĂące Ă Lorenzo Bandini et John Surtees[22]. En 1965, Ferrari ne parvient cependant pas Ă confirmer ; enlisĂ©e dans ses choix de motorisation, l'Ă©quipe ne remporte aucune victoire.
ImpliquĂ© aussi bien dans la conception des chĂąssis que des moteurs, Mauro Forghieri est Ă©galement dĂ©cisif dans le succĂšs des Ferrari en championnat du monde des voitures de sport avec la Ferrari 250 GTO dont il poursuit le dĂ©veloppement entamĂ© par Chiti et son Ă©quipe, puis les versions sportives de la 275 GTB, la 250 LM, la 330 LMB et la 330 P2 (et la dynastie des 330 P). HĂ©ritiĂšre de la 250P et construite autour dâun chĂąssis surbaissĂ© plus lĂ©ger et aĂ©rodynamique, la 330 P2 est propulsĂ©e par un moteur V12 de 410 ch. Ce modĂšle, dans son Ă©volution P4 Ă©quipĂ© d'un V12 revu de fond en comble par Franco Rocchiqui, remporte un triplĂ© aux 24 Heures de Daytona avec les Ă©quipages Lorenzo Bandini-Chris Amon, Ludovico Scarfiotti-Mike Parkes et Pedro Rodriguez-Jean Guichet[10] - [23] - [24]. Ce fut en quelques sorte la ârĂ©ponse du berger Ă la bergĂšreâ aprĂšs le triplĂ© des Ford GT40 l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente au Mans[25].
Forghieri est aussi à l'origine de la Dino 156P de 1965, de la 250P de 1963 (victorieuse aux 24 Heures du Mans avec le duo transalpin Ludovico Scarfiotti-Lorenzo Bandini, des 312 P et PB qui, à la fin des années 1960 et au début des années 1970, aux mains des Chris Amon, Mario Andretti, Jacky Ickx, Clay Regazzoni, Ronnie Peterson, Brian Redman, Arturo Merzario et autres Tim Schenken, affrontÚrent les Porsche 917, Matra et Alfa Romeo au sein de championnats trÚs relevés. La PB remporte également la Targa Florio en 1972 avec Arturo Merzario et Sandro Munari[26].
Avant de se retirer des Sports-Protos en 1973, Ferrari remporte, en 1969, le titre européen de la montagne grùce à la 212E, une barquette propulsée par un moteur Ferrari 12 cylindres à plat et pilotée par Peter Schetty[27].
Tout au long des années 1960 et 1970, Mauro Forghieri est, aprÚs Enzo Ferrari, le personnage le plus influent de la Scuderia ; alternant idées lumineuses et bides retentissants, il est réguliÚrement mis au placard mais invariablement rappelé à l'aide. En Formule 1, ce tournant des années 60-70 est plus compliqué pour la Scuderia qui peine face à Brabham, Matra, Tyrrell et Lotus. Si les 312 sont belles, le V8 Cosworth est une arme redoutable entre les mains des « garagistes » britanniques. Au Grand Prix de Belgique 1968, un aileron arriÚre haut perché apparaßt sur celle de Chris Amon : cette invention de Mauro Forghieri fera école. Le Néo-Zélandais réalise d'emblée la pole position avec quatre secondes d'avance sur Jackie Stewart. Forghieri imagine également le premier engrenage automatique transversal, connu sous le nom de rapport T[28].
En 1970, Jacky Ickx et Clay Regazzoni terminent le championnat respectivement deuxiÚme et troisiÚme derriÚre Jochen Rindt sur Lotus. Le Belge remporte les Grand Prix d'Autriche, du Canada et du Mexique, tandis que le Suisse s'impose à Monza. Précédée par le Team Lotus, mais devant March, la Scuderia Ferrari termine deuxiÚme du championnat constructeurs avec quatre victoires pour la 312B[29].
Pour la saison 1971, Mauro Forghieri conçoit la Ferrari 312 B2, qui fait sa premiÚre apparition au Grand Prix de Monaco ; Jacky Ickx monte sur la troisiÚme marche du podium puis mÚne sa monture à la victoire dÚs le Grand Prix suivant, sur le circuit de Zandvoort. Ce modÚle reste en service jusqu'au Grand Prix d'Afrique du Sud 1973, disputant 24 courses (48 départs) entre les mains, outre Jacky Ickx, de Mario Andretti, Nanni Galli, Arturo Merzario et Clay Regazzoni.
La Ferrari 312 B3, surnommĂ©e « Spazzaneve » (chasse-neige) en raison de son imposant aileron avant en forme de pelle Ă neige supposĂ© lui confĂ©rer un appui aĂ©rodynamique redoutable, est un tel fiasco qu'elle n'est jamais alignĂ©e en compĂ©tition et conduit Mauro Forghieri Ă ĂȘtre confinĂ© dans son rĂŽle de directeur technique, sa place de responsable de la Scuderia revenant Ă Luca di Montezemolo, jeune aristocrate protĂ©gĂ© dâEnzo Ferrari[30]. La 312 B3 expĂ©rimentale permait cependant Ă Mauro Forghieri de mieux apprĂ©hender lâeffet de sol sur une monoplace large et de concevoir la future B3/B4 de 1974 qui frĂŽlera le titre de championne du monde avec Clay Regazzoni[31].
L'apothĂ©ose de sa carriĂšre a lieu, dans les annĂ©es 1970, avec la sĂ©rie des Ferrari 312 T (3 000 cm3, 12 cylindres, boĂźte de vitesses transversale[33]) qui remportent quatre titres des constructeurs (1975, 1976, 1977 et 1979) et trois titres des pilotes (1975 et 1977 avec Niki Lauda puis 1979 avec Jody Scheckter), totalisant 27 victoires grĂące Ă©galement Ă Clay Regazzoni, Carlos Reutemann et Gilles Villeneuve. Les 312T disposent d'un moteur 12 cylindres Ă plat dont la boĂźte de vitesses n'est plus longitudinale mais transversale (dâoĂč le T), ce qui permet une excellente rĂ©partition des masses et un comportement sain[10] - [34].
Durant l'hiver 78-79, Mauro Forghieri teste une boĂźte de vitesses semi-automatique. L'ingĂ©nieur italien estime que les pilotes perdraient moins de temps Ă changer les rapports, seraient moins enclins Ă commettre des erreurs de pilotage et ne gĂ©nĂ©reraient pas de sur-rĂ©gimes destructeurs si les voitures sont munies dâune transmission oĂč tout sâeffectue automatiquement. Forghieri ne dispose pas dâun budget important pour produire une boĂźte de vitesses automatisĂ©e, mais il parvient Ă greffer une premiĂšre version de cette boĂźte sur une Ferrari 312 T3. LâarriĂšre du volant est muni dâun long balancier en acier fixĂ© en son milieu. Le pilote tire Ă droite avec ses doigts pour monter un rapport et tire Ă gauche pour rĂ©trograder[35]. En janvier 1979 Ă Fiorano, le pilote-essayeur Giorgio Enrico et Jody Scheckter essaient cette T3 modifiĂ©e qui combine une centrale Ă©lectronique et une commande hydraulique. MalgrĂ© des dĂ©fauts de jeunesse, la boĂźte fonctionne bien. Les changements de rapports sâeffectuent rapidement et le pilote conserve en permanence ses deux mains sur le volant. En revanche, la transmission complĂšte est trop lourde d'une vingtaine de kilos. Mauro Forghieri parvient cependant Ă rogner quelques kilos puis confie son dĂ©veloppement aux pilotes titulaires, Jody Scheckter et Gilles Villeneuve. AprĂšs des essais au dĂ©but de la saison 1980, l'ingĂ©nieur apporte deux modifications Ă sa transmission. Il ajoute un sixiĂšme rapport et remplace le balancier par deux boutons fixĂ©s aux branches horizontales du volant. Cette boĂźte est installĂ©e Ă lâarriĂšre dâune 312 T5 et Villeneuve effectue quelques essais. Toutefois, la Scuderia doit effectuer des choix cruciaux et la production de la premiĂšre Ferrari F1 Ă moteur turbo est jugĂ©e prioritaire, ce qui force Mauro Forghieri Ă stopper le dĂ©veloppement de sa transmission semi-automatique[35]. Ce systĂšme, est repris en 1987 avec Michele Alboreto, mais de nouveau abandonnĂ© avant le dĂ©part de Mauro Forghieri et l'arrivĂ©e de John Barnard[36]. Ces transmissions semi-automatiques, ou robotisĂ©es, que l'on retrouve dans pratiquement toutes les voitures de compĂ©tition, des premiĂšres formules de promotion jusqu'Ă la Formule 1, avec les changements de rapports effectuĂ©s grĂące Ă des palettes situĂ©es derriĂšre le volant, sont devenues communes aujourd'hui. EntiĂšrement pilotĂ©es par une centrale de gestion Ă©lectronique, elles coupent lâallumage du moteur, dĂ©sengagent lâembrayage, changent les pignons de la boĂźte, relĂąchent lâembrayage et remettent lâallumage, le tout effectuĂ© entre 30 et 50 milliĂšmes de seconde[35]. En 1987, quand John Barnard arrive chez Ferrari en provenance de McLaren, il fait lâĂ©tat des lieux et dĂ©couvre une vieille transmission sous une bĂąche. Cette piĂšce de fonderie est le vestige des recherches effectuĂ©es par Mauro Forghieri presque dix ans auparavant[35]. LâAnglais est alors convaincu quâavec les importants dĂ©veloppements effectuĂ©s sur les Ă©lectrovannes, les circuits hydrauliques Ă trĂšs haute pression et lâĂ©lectronique, il peut adapter cette boĂźte semi-automatique Ă sa prochaine F1, la Ferrari 640 de 1989, appelĂ©e parfois Ferrari F1-89, qu'il conçoit avec son Ă©quipe basĂ©e en Grande-Bretagne[35] - [36].
Pour la saison 1980, Mauro Forghieri conçoit la Ferrari 312 T5, pilotée par Jody Scheckter, champion du monde en titre, et Gilles Villeneuve. Leur voiture manquant de performance et de fiabilité, les pilotes sont contraints onze fois à l'abandon et ne remportent aucune victoire au cours d'une saison calamiteuse. La mise au point du turbo est difficile et surtout Ferrari a pris du retard sur la révolution aérodynamique des jupes, introduites par Lotus en 1977 et dont les écuries anglaises se sont faites une spécialité[10].
AprĂšs avoir conçu la Ferrari 126 CK de 1981, son influence au sein de la Scuderia diminue au profit d'ingĂ©nieurs Ă©trangers comme Harvey Postlethwaite, le concepteur des Ferrari 126 C2 et 126 C3 Ă moteur V6 turbo sacrĂ©es en 1982 et 1983, ce qui le conduit Ă quitter Ferrari en 1987. Mauro Forghieri explique qu'il quitta Ferrari voyant Enzo Ferrari malade et ne voulant pas rester aprĂšs sa disparition[37]. De plus, Ă©tant un ingĂ©nieur Ă lâancienne pensant qu'il faut un seul chef Ă la direction technique, il nâest pas du genre Ă partager. Lâinternationalisation du dĂ©partement technique ainsi que la mainmise des hommes de Fiat le poussent Ă©galement Ă partir[10]. Mauro Forghieri annonce sa dĂ©mission en dĂ©clarant « Je mâen vais » Ă Enzo Ferrari, qui lui rĂ©pond « Ok, bien, va-tâen alors, car je ne tarderai pas Ă mâen aller aussi... »[13]
En 1987, avant son départ, Mauro Forghieri planche sur la Ferrari 408 4RM, un projet de voiture de route à quatre roues motrices gérées par un systÚme hydraulique. Conçue et dessinée sur ordinateur, elle a vu le jour en tant que prototype expérimental pour tester de nouveaux matériaux et composants, avec un systÚme de traction intégrale à la pointe de la technologie[38]. Deux prototypes sont construits mais l'accueil mitigé du public et un design jugé peu attrayant sonnent le glas de cette voiture[39].
Furia
SurnommĂ© Furia en raison de son Ă©nergie dĂ©bordante, de ses extraordinaires capacitĂ©s de travail, de ses crĂ©ations pĂ©tillantes, de sa flamboyance et de ses grosses colĂšres[10], il a inspirĂ© des gĂ©nĂ©rations d'ingĂ©nieurs, tant dans le sport automobile que dans l'industrie automobile[40]. Sur le terrain, il peut ĂȘtre provocateur, mais il est aussi une rĂ©fĂ©rence qui sait jouer un rĂŽle dans une Ă©quipe, tant avec les ingĂ©nieurs qu'avec les mĂ©caniciens, Ă qui il sâadresse en dialecte modĂ©nais[13]. Dans le dĂ©partement course et dans les stands au bord de la piste, Mauro Forghieri est aussi brillant qu'inflammable. Il a des explosions de colĂšre qui prĂ©cĂšdent ou accompagnent des coups de gĂ©nie. Au travail, il est un artiste agitateur de talents, dans la mesure oĂč il est rĂ©servĂ©, affable, ouvert, disponible, toujours prĂȘt Ă prĂȘter main-forte Ă qui le demande, notamment sur les circuits oĂč l'ambiance est toujours tendue pendant les courses[41].
Les dĂ©bordements de Mauro Forghieri avec certains mĂ©caniciens et divers collaborateurs provenaient de lâexĂ©cution de travaux qui nâĂ©taient pas conformes Ă ses indications : « dans un travail dâĂ©quipe, dans la façon dont on est Ă©valuĂ© par le monde extĂ©rieur, le patron est responsable de lâactivitĂ© de chacun ; mais en interne, il ne peut ignorer les responsabilitĂ©s des individus. En tout cas, je ne pense pas avoir jamais manquĂ© de respect Ă qui que ce soit. De temps en temps, je criais, oui. CâĂ©tait plus fort que moi. »[38] Cependant, il ne criait pas seulement aprĂšs ses mĂ©caniciens ou plus gĂ©nĂ©ralement aprĂšs ceux qui Ă©taient sous sa responsabilitĂ© : « cela aurait Ă©tĂ© un peu trop facile, pas trĂšs loyal. Si Enzo Ferrari lui-mĂȘme me faisait perdre patience, je criais aussi aprĂšs lui. » Le Commendatore et l'Ingeniere avaient deux tempĂ©raments trĂšs similaires et câest pourquoi ils se sont affrontĂ©s de temps en temps quand ils ne pouvaient pas s'en empĂȘcher.
« Il m'a crié dessus et quand il a trop crié, j'ai crié aussi pour me défendre. Je lui ai dit : mais tu n'es pas un ingénieur, tu es un ingénieur fait avec un crayon[33]. »
Quand on lui demande si ça l'a mis en colĂšre quand ses mĂ©caniciens lâont surnommĂ© Furia, Mauro Forghieri rĂ©pond « Non, câest le contraire. Ils mâappelaient Furia parce que, câest vrai, parfois je me mettais en colĂšre. » Puis il rappelle qui Ă©tait Ă l'origine Furia : « CâĂ©tait un beau cheval noir et fougueux, le protagoniste dâune sĂ©rie tĂ©lĂ©visĂ©e diffusĂ©e en Italie Ă la fin des annĂ©es 50, trĂšs populaire parmi les enfants avant lâinvasion des dessins animĂ©s japonais. Cependant, la comparaison avec un cheval me convenait. Si ça avait Ă©tĂ© un Ăąne, peut-ĂȘtre que je lâaurais moins aimé⊠»[38].
Bilan de l'Ăšre Forghieri chez Ferrari
Sous lâĂšre Forghieri, Ferrari a gagnĂ© 54 Grand Prix de Formule 1, 4 titres de Champion du Monde Pilotes F1, 7 titres de Champion du monde des Constructeurs F1, ainsi que 9 championnats de Sports-Protos[42], et ce grĂące Ă son brillant ingĂ©nieur.
Sous sa direction, des pilotes de légende ont roulé pour la Scudetia Ferrari : les champions du monde John Surtees, Niki Lauda et Jody Scheckter mais aussi les vainqueurs de Grand Prix Lorenzo Bandini, Chris Amon, Jacky Ickx, Clay Regazzoni, Carlos Reutemann, Mario Andretti, Gilles Villeneuve, Didier Pironi, René Arnoux, Patrick Tambay et Michele Alboreto[16].
L'aprĂšs Ferrari
En septembre 1987, Mauro Forghieri rejoint Lamborghini Engineering, un dĂ©partement crĂ©Ă© par Lee Iacocca, devenu ensuite PDG de Chrysler qui a achetĂ© Lamborghini. Ce dĂ©partement d'ingĂ©nierie a l'ex-Ferrari Daniele Audetto comme directeur sportif[17]. On confie rapidement Ă Mauro Forghieri des projets relatifs Ă la Formule 1 : d'abord le programme moteur, avec la conception du V12 Lamborghini atmosphĂ©rique 3512 qui fait ses dĂ©buts en 1989 lors du Grand Prix du BrĂ©sil avec l'Ă©curie française Larrousse et Philippe Alliot au volant puis avec Ligier et Lotus en 1990[17]. McLaren faillit Ă©galement le choisir pour la saison 1993 aprĂšs un essai qui avait convaincu Ayrton Senna, mais le moteur italien est rejetĂ© en raison d'un accord avec Peugeot[33]. Mauro Forghieri est ensuite chargĂ© de l'ambitieux programme chĂąssis-moteur que Lamborghini monte en collaboration avec l'industriel mexicain Fernando GonzĂĄlez Luna. Celui-ci constitue un groupe dâentrepreneurs de son pays intĂ©ressĂ©s Ă voir une Ă©curie mexicaine et un pilote mexicain disputer le Championnat du monde de F1 en Ă©change dâune visibilitĂ© sans pareille. Le , GonzĂĄlez Luna conclue une entente avec Emile Navarro, le patron de Lamborghini Engineering[43]. Un projet de nouvelle Ă©curie est mis sur pied sous le nom de GLAS F1, d'une abrĂ©viation de Gonzalez Luna Associates[43]. L'ancien journaliste Leopoldo Canettoli est choisi pour diriger l'Ă©quipe. Il est prĂ©vu que lâĂ©curie soit basĂ©e au 97 Viale delle Nazioni Ă ModĂšne. Le premier pilote pressenti est Giovanni Aloi, un Mexicain qui a couru en Sport-prototypes ainsi quâen Formule 3000[43]. La suspension et la boĂźte de vitesses de la voiture sont conçues par Forghieri tandis que la carrosserie est conçue par Mario Tolentino. Le duo et leurs ingĂ©nieurs conçoivent la Lambo 1 Ă lâaide des premiers logiciels de conception assistĂ©e par ordinateur[43]. AprĂšs quatre mois de travail, le premier chĂąssis est complĂ©tĂ©. LâĂ©quipe prĂ©voit d'effectuer les premiers essais entre juillet et dĂ©cembre 1990 sur les circuits dâImola, Monza, Paul-Ricard, Hockenheim, Jerez et Estoril pour ensuite participer Ă la saison 1991. GonzĂĄlez Luna garantit un investissement de 20 millions de dollars dans lâĂ©curie et la sociĂ©tĂ© pĂ©troliĂšre nationale mexicaine Pemex va devenir un commanditaire majeur de GLAS F1[43]. La premiĂšre voiture complĂšte, la GLAS 001, doit ĂȘtre prĂ©sentĂ©e le au grand public et faire ses dĂ©buts au GP du Mexique[43]. Comme prĂ©vu, la monoplace est transportĂ©e par camion de ModĂšne Ă Paris pour ĂȘtre expĂ©diĂ©e par avion. Mais lĂ , la veille de la prĂ©sentation officielle Ă la presse, Gonzalez Luna, qui s'est avĂ©rĂ© ĂȘtre un escroc, disparaĂźt avec l'argent des sponsors. La voiture reprend aussitĂŽt le chemin de lâItalie et la prĂ©sentation est annulĂ©e[43]. Encore plus mystĂ©rieux, les factures continuent dâĂȘtre payĂ©es. LâĂ©quipe dĂ©cide alors dâeffectuer un premier essai de la voiture Ă Imola, mais lĂ , surprise supplĂ©mentaire, ce nâest pas Giovanni Aloi qui est au volant, mais Mauro Baldi, qui a couru en Formule 1 dans les annĂ©es 80 avec les Ă©curies Arrows, Alfa Romeo et Spirit. Le pilote italien parcourt 68 tours de l'Autodrome Enzo et Dino Ferrari mais signe des chronos trĂšs mĂ©diocres. Deux semaines plus tard, GonzĂĄlez Luna est toujours introuvable et le compte en banque de l'Ă©curie est dĂ©sormais vide. Lamborghini dĂ©cide de couper les liens avec le Mexique et le contrat est rendu caduque. La voiture et l'Ă©quipe, restĂ©es dans les limbes financiers, deviennent la pleine propriĂ©tĂ© de Lamborghini qui cherche un repreneur au projet. Les frĂšres Abed, propriĂ©taires du circuit de Mexico City, semblent un temps ĂȘtre intĂ©ressĂ©s, mais en juillet 1990, câest finalement Carlo Patrucco, industriel et ancien grand patron de la marque de vĂȘtement de sport Fila, qui rachĂšte le tout et crĂ©e une Ă©curie italienne, la Scuderia Modena SpA (Ă©galement connu sous le nom de Modena Team, Lamborghini, Ă©quipe âLamboâ, ou encore Lambo-Modena), et qui fera courir la Lamborghini 291 conçue par le duo Forghieri/Tolentino[43]. La voiture fait finalement ses dĂ©buts au Grand Prix des Ătats-Unis en 1991[17]. MalgrĂ© des premiers pas encourageants, avec le duo Eric van de Poele-Nicola Larini et le rĂ©serviste Marco Apicella, les Lambo 291 du Modena Team sont rapidement condamnĂ©es aux non-qualifications et l'Ă©quipe disparait en fin d'annĂ©e[44].
En 1991, le département d'ingénierie de Lamborghini est complÚtement réorganisé par Chrysler et Mauro Forghieri remplacé par Mike Royce[45].
En 1992, recruté par Bugatti, il devient directeur technique chargé du développement de la Bugatti EB110 et de la Bugatti EB112[46] - [47]. Il participe à la premiÚre renaissance de la marque française en Italie sous l'impulsion de son nouveau propriétaire, l'homme d'affaires italien Romano Artioli. Il s'investit dans le développement de la supercar EB110 mais n'est pas convaincu par la sophistication trop poussée du modÚle. Il ne réussit pas à imposer ses vues et constate que l'outil industriel pour mener à bien le projet n'est pas assez viable. Il quitte ses fonctions au bout de deux ans[39] - [48] - [14].
En 1994, il est appelé comme expert dans le procÚs relatif à la mort d'Ayrton Senna lors du Grand Prix de Saint-Marin 1994[49].
Le , Mauro Forghieri fonde, avec Franco Antoniazzi et Sergio Lugli, Oral Engineering Group, une firme qui travaille sur la conception, la recherche et le dĂ©veloppement de moteurs et de composants pour automobiles, motocyclettes et kartings. Elle compte alors BMW (notamment pour la construction du moteur atmosphĂ©rique BMW de Formule 1[50]), Bugatti et Aprilia parmi ses clients. Pour le constructeur de motos basĂ© Ă Noale prĂšs de Venise, Oral Engineering prĂ©sente en 2011 son prototype Moto3 250cm3 4-temps. Ce moteur, baptisĂ© OE-250M3R, peut ĂȘtre montĂ© sans modification sur les chĂąssis Aprilia, notamment sur le cadre RSV 125GP pour lequel il a Ă©tĂ© spĂ©cialement conçu. Il est fourni avec le rĂ©servoir, le carburateur, les systĂšmes de refroidissement et d'Ă©chappement ainsi qu'un carĂ©nage qui peuvent directement ĂȘtre installĂ©s sur un cadre d'Aprilia 125. Oral Engineering fournit aussi un kit d'installation pour l'Aprilia RSA 125GP pour permettre aux Ă©quipes de Moto3 d'avoir d'avantage d'options[51]. La nouvelle entreprise de Mauro Forghieri est Ă©galement chargĂ©e de convertir le prototype Ferrari Pinin de voiture-maquette statique en vĂ©hicule pouvant ĂȘtre conduit[17]. Dix ans plus tard, Ă 70 ans, Mauro Forghieri rejoint Project 1221, une sociĂ©tĂ© italienne chargĂ©e de dĂ©velopper la MF1, une voiture de sport censĂ©e utiliser une turbine d'avion comme les prototypes Firebird de General Motors dans les annĂ©es 1950[52].
Le , par une journĂ©e de printemps ensoleillĂ©e, la lĂ©gendaire Ferrari 312B avec laquelle Clay Regazzoni a remportĂ© le Grand Prix d'Italie 1970, a de nouveau rugi et mordu l'asphalte pour la premiĂšre fois en 46 ans. Cette monoplace presque unique - il n'y a que trois exemplaires qui ont survĂ©cu (dont un se trouvait dans le MusĂ©e de Donington Park, dĂ©sormais dĂ©finitivement fermĂ©) - est particuliĂšre car c'est Mauro Forghieri, son crĂ©ateur, qui l'a ramenĂ©e Ă la vie avec le concours et la passion religieuse de son ami Paolo Barilla, ancien pilote de Formule 1 et fier propriĂ©taire de ce bolide. Le long travail de restauration effectuĂ© sous la direction de son concepteur est d'une trĂšs grande qualitĂ©. La Rossa est arrivĂ©e impeccablement polie Ă l'autodrome de Brescian Franciacorta Ă Castrezzato oĂč a eu lieu son deuxiĂšme baptĂȘme, remettant son cĆur en mouvement, un 12 cylindres Ă plat Ă 180 degrĂ©s, aprĂšs presque un demi siĂšcle[53]. Ce jour-lĂ , Mauro Forghieri est dans les stands au bord de la piste. Il ne s'Ă©pargne pas avec la mĂ©canique : tourner l'Ă©crou, tirer le ressort, vĂ©rifier les niveaux, vĂ©rifier le set-up⊠C'est un moment de dĂ©tente, il n'y a pas de concours ou de compĂ©tition Ă prĂ©parer, mais l'ingĂ©nieur Forghieri est attentif aux dĂ©tails comme si la voiture Ă©tait sur le point de commencer une manche de qualification dĂ©cisive ou un Ă©chauffement pour la configuration d'une course. Comme autrefois, âFuriaâ est toujours le mĂȘme, mĂ©ticuleux, intransigeant, sanguin et âamoureuxâ de sa crĂ©ature, faisant revivre les actes de Clay Regazzoni, de Jacky Ickx et d'Ignazio Giunti, pilotes d'une Ă©poque oĂč les hommes dominaient la machine, quand ils Ă©taient d'authentiques âchevaliers du risqueâ[53].
Quant Ă la Scuderia Ferrari, quâelle Ă©volue au sommet ou dans lâanonymat, elle demeure la valeur absolue Ă ses yeux : « Je suis trĂšs fier dâavoir apportĂ© ma petite pierre Ă lâĂ©difice en mettant en place une organisation moderne, en donnant une nouvelle approche au design et Ă la gestion du dĂ©partement Course. Câest Ă la Scuderia que jâai dĂ©diĂ© une bonne partie de ma vie. »[10] La Ferrari 330 P4 de 1967 restera la prĂ©fĂ©rĂ©e de Mauro Forghieri parmi toutes les voitures qu'il a conçues[17].
Relations particuliĂšres avec ses pilotes
Pour Mauro Forghieri, ce qui compte le plus chez un pilote est une chose trÚs difficile à définir. Pour lui, c'est la sensibilité dont fait preuve le pilote lorsqu'il pousse la voiture à la limite[54].
Quant Ă savoir qui du pilote ou de la voiture est le plus important, la rĂ©ponse de Mauro Forghieri est assez simple : le pilote. Si la voiture en vaut la peine, c'est le pilote qui la rend performante. Les ingĂ©nieurs conçoivent la voiture mais c'est le pilote qui leur dĂ©crit ses dĂ©fauts. Il faut que le pilote sache aller Ă la limite de ce que les ingĂ©nieurs ont fait et qu'il puisse dire avec des mots clairs, sans se laisser distraire ni penser Ă autre chose, quels sont les points positifs et nĂ©gatifs. Quand un bon pilote gagne, c'est parce qu'il a su âfaire grandirâ la voiture[54].
Parmi tous les pilotes avec qui Mauro Forghieri a collaboré, quelques-uns ont particuliÚrement retenu son attention. Il avouait une préférence pour Chris Amon.
Pour Forghieri, Lorenzo Bandini, mort lors du Grand Prix de Monaco 1967, Ă©tait un Ă©quipier trĂšs engagĂ© et un compagnon dont la disparition l'a beaucoup touchĂ© parce qu'ils avaient le mĂȘme Ăąge. Il considĂ©rait Clay Regazzoni comme « un travailleur acharnĂ© et excellent metteur au point contrairement Ă sa rĂ©putation ». Quant Ă Willy Mairesse, il Ă©tait « le plus courageux de tous ». Du passage de Patrick Tambay chez Ferrari, l'ingĂ©nieur italien dit que le Français Ă©tait « un homme intelligent, [avec] un corps et un esprit sain » et que c'Ă©tait « un vrai bonheur de travailler avec un garçon aussi mĂ©ticuleux. »[55].
Deux pilotes tenaient une place Ă part dans le cĆur de Forghieri : Niki Lauda et Gilles Villeneuve[10].
« N'oublie pas, il faut faire des kilomÚtres. Gilles me répond : Bien sûr, je sais. Et il s'est écrasé aprÚs 500 mÚtres[33]. »
Lors d'une interview avec le magazine français Auto Hebdo en 2018, quand on lui demande de choisir la victoire d'une de ses Ferrari, la plus belle entre toutes Ă ses yeux, Mauro Forghieri n'a aucune hĂ©sitation : « Monte Carlo 1981, quand Gilles Villeneuve tenait tout le monde Ă distance avec une voiture aussi lourde et surpuissante que la 126 C, pas du tout adaptĂ©e pour un circuit urbain. Je me suis senti particuliĂšrement fier, lorsque Colin Chapman est venu me fĂ©liciter aprĂšs la course, aussi parce que jâai toujours eu beaucoup dâestime pour la philosophie dâinnovation de Colin et Lotus. » Une philosophie quâil avait lui aussi fait sienne[10].
A contrario, Mauro Forghieri conserve un regret qui ne s'est jamais dissipĂ© sur le fait qu'il Ă©tait absent Ă Imola en 1982, le jour oĂč Didier Pironi a grillĂ© la politesse Ă Gilles Villeneuve, ce qui aboutira Ă la mort du QuĂ©bĂ©cois deux semaines plus tard Ă Zolder : « Peut-ĂȘtre que les choses se seraient passĂ©es diffĂ©remment. »[33]
Niki Lauda, mort le , connu pour son langage direct, disait de Mauro Forghieri : « Forghieri était à l'évidence un ingénieur phénoménal. »[56]. Dans une autobiographie, le champion autrichien explique comment la combinaison de Mauro Forgieri avec le chef de la Scuderia Ferrari Luca di Montezemolo a contribué à créer une équipe gagnante, aprÚs l'arrivée de ce dernier à Maranello en 1974 : « Forgieri était clairement un formidable ingénieur et Luca était trÚs doué pour dire au vieil homme (Ferrari) ce qui se passait. »[57].
Critiques de la Formule 1 moderne
Dans les annĂ©es 2010, Mauro Forghieri, comme d'autres puristes de la F1, est critique vis-Ă -vis du systĂšme de rĂ©duction de la traĂźnĂ©e introduit Ă l'Ă©poque en Formule 1[58] : « Supprimez ce DRS. Le DRS est ri-di-cu-le ! Je dĂ©teste l'ensemble aĂ©rodynamique des voitures actuelles. Je ne comprends pas pourquoi il n'est pas rĂ©duit afin de permettre les dĂ©passements normaux, sans DRS. Si l'adversaire est Ă moins d'une seconde derriĂšre, il va regarder son poursuivant le dĂ©passer, ce n'est pas correct. Un champion du monde doit ĂȘtre capable de dĂ©passer son adversaire sans aide, sinon il n'est pas champion du monde Ă mes yeux. »[59] L'Italien suggĂšre un changement qui permettrait d'amĂ©liorer la course dans les zones de freinage : « Combien de voitures de sĂ©rie utilisent des disques en carbone ? Alors pourquoi les utiliser en Formule 1 ? Si la Formule 1 utilisait des disques normaux, les distances de freinage seraient doublĂ©es et les dĂ©passements seraient bien plus faciles. »[59]
Vivant une retraite paisible Ă ModĂšne, il se montre sĂ©vĂšre envers la discipline reine du sport automobile, mĂȘme sâil continue de la regarder assidĂ»ment : « Je regrette les aspects nĂ©gatifs de la rĂšglementation technico-sportive. Le progrĂšs technique se fait par la recherche, les essais et les ajustements. Les rĂšgles actuelles visent Ă geler tout ça pour tenter de concilier sport et divertissement, mais câest la bonne technique qui donne le bon spectacle ! »[10]
Alors que les audiences de tĂ©lĂ©vision sont en baisse au milieu des annĂ©es 2010, Mauro Forghieri propose des pistes pour pimenter la Formule 1. Le mĂ©contentement du public se porte surtout sur les nouvelles rĂšglementations concernant la motorisation, des V6 plus petits et moins bruyants que les V8 prĂ©cĂ©dents. L'ingĂ©nieur italien soutient quant Ă lui la nouvelle Ăšre hybride : « Tous les constructeurs veulent des hybrides, et je pense que c'est bon car il y a besoin de 70 % du carburant, ou mĂȘme moins, pour la mĂȘme distance, par rapport Ă avant. »[59]. « LĂ oĂč je ne peux ĂȘtre d'accord avec la FIA, c'est avec le suivi de la consommation tour aprĂšs tour. Ă mon avis trĂšs personnel, la Formule 1 est une dĂ©monstration de puissance, cette rĂšgle est inacceptable d'un point de vue sportif. »[59]
Citoyen d'honneur de ModĂšne
Le , à l'occasion de son 87e anniversaire, Mauro Forghieri est déclaré citoyen d'honneur de ModÚne[58] et reçoit les clés de la ville au sein de la mairie, lors de la séance du conseil municipal[60].
La cérémonie s'est ouverte par le discours de Fabio Poggi qui a rappelé à quel point la nature extraordinaire de Mauro Forghieri réside dans la capacité de transformer « la passion en un métier et donc en une expérience réussie, avec des compétences uniques et des produits inimitables, processus de visibilité internationale. Mauro Forghieri est donc l'exemple de "la ModÚne 'normale' qui devient 'exceptionnelle'" ». Une vidéo centrée sur l'histoire professionnelle et personnelle de l'ingénieur a ensuite été projetée dans la salle du conseil municipal : le film, d'une durée d'environ quatre minutes, retrace quelques moments de sa carriÚre à travers des images historiques et des interviews, s'attardant également sur la relation avec des personnages comme le pilote Gilles Villeneuve et Enzo Ferrari[60].
Le parcours de Mauro Forghieri a également été souligné par le discours du journaliste, spécialiste de l'automobile, Leo Turrini, évoquant son lien avec le territoire : « il n'a jamais renoncé à son identité modénaise. » Il a également rappelé le choix d'Enzo Ferrari de le nommer responsable du département course malgré son manque d'expérience : « à l'époque on croyait aux jeunes et on investissait dans les nouvelles générations, aujourd'hui ça n'arriverait plus. C'était une autre Italie, une société à récupérer, dans laquelle l'ascenseur social fonctionnait vraiment. » Il a terminé en mettant l'accent sur la capacité de l'ingénieur à se tourner vers l'avenir : « Beaucoup des innovations qu'il a introduites ont ensuite été adoptées par tout le monde. Il avait une vision. Par exemple, en 1990, il a créé le premier fourgon électrique pour Lamborghini. »[60]
Mauro Forghieri Ă©tait accompagnĂ© de sa femme Elisabetta Maurizzi et de l'ancien prĂ©sident du conseil municipal, Ennio Cottafavi. Des amis et connaissances de l'ingĂ©nieur Ă©taient connectĂ©s Ă distance Ă la chambre du conseil, via un Ă©cran gĂ©ant, ainsi que des autoritĂ©s locales : Giandomenico Tomei, prĂ©sident de la Province de ModĂšne, Maria Costi, maire de Formigine, Monseigneur Luigi Biagini reprĂ©sentant l'Ă©vĂȘque, Gianluca Marchi, pro-recteur d'Unimore, Silvia Burdese, la commissaire de police, Adriano D'Elia, commandant provincial de la Guardia di Finanza, le gĂ©nĂ©ral de brigade Davide Scalabrin, commandant de l'AcadĂ©mie militaire de ModĂšne, et Gian Paolo Dallara, homme d'affaires, ingĂ©nieur automobile et ami de Forghieri[60].
Mort et hommages
Mauro Forghieri meurt le Ă ModĂšne Ă l'Ăąge de 87 ans[61] - [62] - [63]. Ses obsĂšques ont lieu le vendredi en l'Ă©glise San Pietro de ModĂšne en prĂ©sence de Piero Ferrari, le fils d'Enzo Ferrari, de RenĂ© Arnoux, de Bruno Giacomelli, de Pierluigi Martini, lâingĂ©nieur Gabriele Tredozi, le collectionneur Gaetano Passarelli, grand ami de Forghieri, de Luigi âPasticcinoâ Montanini, chef cuisinier du restaurant La Scuderia Ă Maranello[64], de Mattia Binotto venu Ă titre personnel, de Gian Paolo Dallara, de Gian Carlo Muzzarelli, maire de ModĂšne, de Luigi Zironi, maire de Maranello, de Maria Costi, maire de Formigine et de Pietro De Franchi, l'avocat et assistant personnel de Forghieri de 1969 Ă 1976. Il y a beaucoup de monde de la Formule 1, mais aussi beaucoup de citoyens ordinaires, ainsi que les employĂ©s (parmi lesquels de nombreux retraitĂ©s) du dĂ©partement compĂ©tition de Ferrari qui sont venu rejoindre Elisabetta, l'Ă©pouse de Mauro, et leurs deux enfants[64]. Jody Scheckter, le dernier champion du monde Ferrari de l'Ăšre Forghieri en 1979, a annoncĂ© sa prĂ©sence Ă la cĂ©rĂ©monie mais n'a pas pu venir de Londres car son passeport (devenu indispensable depuis le Brexit) est pĂ©rimĂ©[65].
Ă l'occasion du Grand Prix du BrĂ©sil 2022, la Scuderia Ferrari rend hommage au plus grand directeur technique de son histoire. Dans un communiquĂ©, l'Ă©quipe italienne rĂ©agit par les voix de Piero Ferrari, de Mattia Binotto et dâAntonello Coletta au dĂ©cĂšs de lâune des lĂ©gendes de la marque, et pense fort Ă Mauro Forghieri et Ă sa famille. Sur le circuit d'Interlagos, les F1-75 de Charles Leclerc et Carlos Sainz arborent des autocollants portant le message « Ciao Furia », le surnom affectueux que lui avaient donnĂ© les mĂ©caniciens de la Scuderia en rĂ©fĂ©rence Ă son tempĂ©rament fougueux[42]. Outre les deux F1-75 en piste Ă SĂŁo Paulo, lâautocollant figure Ă©galement sur les Ferrari 488 GTE Evo dâusine dâAF Corse qui participent le mĂȘme week-end des 12 et Ă la derniĂšre manche du Championnat du Monde dâEndurance Ă BahreĂŻn : la voiture n°51 dâAlessandro Pier Guidi et James Calado et la n°52 de Miguel Molina et Antonio Fuoco[42].
Vie privée
Mauro Forghieri, en plus d'ĂȘtre un ingĂ©nieur talentueux, avait une grande culture gĂ©nĂ©rale, notamment littĂ©raire et Ćnologique. Il maĂźtrisait, en plus de l'italien, l'anglais, le français et le dialecte de ModĂšne dans lequel il s'entretenait avec Enzo Ferrari au cours de leurs discussions Ă l'usine de Maranello[66]. Avant tout, l'ingĂ©nieur Mauro Forghieri Ă©tait un crĂ©atif et un rĂȘveur habituĂ© Ă se salir les mains. Il s'est aussi aventurĂ© dans des domaines qui n'ont que trĂšs peu Ă voir avec les moteurs comme concevoir des meubles, des bijoux et mettre personnellement la main Ă la restauration de sa propriĂ©tĂ©, la Villa Clementina[54], appelĂ©e aussi Villa Carbonieri, Ă Formigine prĂšs de ModĂšne[67], oĂč il a vĂ©cu pendant la Seconde guerre mondiale avec sa mĂšre Afra et ses oncles. Mauro Forghieri a ainsi nommĂ© sa villa, construite au dĂ©but du XVIIIe siĂšcle par l'architecte Spezzani, en hommage Ă Clementina Carbonieri, dont la villa fut jadis la dot, en raison de sa qualitĂ© et de son bon goĂ»t. C'est une dame qu'il admirait et qu'il aimait dans son enfance, non seulement Ă cause de sa beautĂ© mais aussi parce qu'elle Ă©tait cultivĂ©e et amoureuse de la beautĂ©[68]. Le nom de Clementina Carbonieri a par ailleurs Ă©tĂ© donnĂ© Ă une rose-thĂ©, au colori saumon rosĂ©, crĂ©Ă©e en 1913 par Massimiliano Lodi et produite par la sociĂ©tĂ© Bonfiglioli de Bologne[67].
Mauro Forghieri a eu trois fils avec sa premiÚre épouse (il a divorcé par la suite) : Alessandro, Michele et Marco (né le et mort le à 46 ans[69]). Il s'était remarié avec Elisabetta Maurizzi[64]. Il était fier de son fils Alessandro, devenu ingénieur comme lui mais aussi musicien[54] - [58].
Bibliographie
- M. Forghieri, D. Buzzonetti, Mauro Forghieri. 30 anni di Ferrari e oltre, Prato, Giunti Editore, 2008. (ISBN 978-88-0906-209-2)
- M. Forghieri, D. Buzzonetti, La Ferrari secondo Forghieri. Dal 1947 ad oggi, Vimodrone (MI), Giorgio Nada Editore, 2012. (ISBN 978-88-7911-537-7)
- M. Forghieri, M. Giachi, D. Buzzonetti, Capire la Formula 1: i segreti della sua evoluzione dagli anni '60 a oggi, Argelato (BO), Minerva, 2017. (ISBN 978-88-7381-943-1)
- Mauro Forghieri : 30 anni di Ferrari, de Mauro Forghieri et Daniele Buzzonetti aux Ă©ditions Giunti Editore (Florence), 2008 - (ISBN 978-88-0906-209-2)
Articles connexes
Notes et références
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