Allaitement maternel
L'allaitement maternel consiste pour une femme, Ă nourrir son propre enfant grĂące au lait produit par les seins.
Les bébés possÚdent un réflexe de succion et de déglutition leur permettant de téter et d'avaler le lait. Dans la médecine moderne, le lait maternel est considéré comme la forme la plus saine du lait pour bébés[3]. L'allaitement possÚde des avantages aussi bien pour la mÚre que pour le bébé car il aide à la prévention des maladies[4] - [5] - [6]. Un allaitement de plus de 6 mois est souvent associé à une meilleure santé mentale durant l'enfance et l'adolescence[7].
L'allaitement par d'autres femmes que la mÚre biologique a fréquemment été utilisé dans l'Histoire, qu'il s'agisse de nourrices mercenaires, de proches de la mÚre ou plus récemment, via la lactation induite.
Vue d'ensemble
Ă la naissance, la composition du lait maternel correspond en qualitĂ©s aux nĂ©cessitĂ©s spĂ©cifiques du nourrisson. DĂ©veloppĂ©e en cours de gestation maternelle, la lactation des seins s'enclenche dĂšs la naissance du nouveau-nĂ©. Sous les tĂ©tĂ©es au sein ou l'extraction rĂ©guliĂšre du lait, la lactation se continue aussi longtemps que la stimulation des seins reste effective. Le lait maternel humain peut nourrir l'enfant jusqu'Ă trois ans et mĂȘme davantage. Le recours Ă une autre nourrice que la mĂšre est tombĂ© en dĂ©suĂ©tude dans beaucoup de pays.
Le colostrum des premiers jours, puis le lait Ă maturitĂ© rĂ©pondent naturellement Ă l'alimentation exclusive des six premiers mois de vie du nouveau-nĂ© humain (digestion facile, apport dâĂ©nergie optimal), Ă terme et en santĂ©. La tĂ©tĂ©e et la combinaison du lait maternel comblent les besoins nutritifs, immunologiques et affectifs liĂ©s Ă la croissance optimale des mutations du nourrisson. Lâallaitement au sein assiste le dĂ©veloppement neurologique et les dĂ©fenses immunitaires de lâenfant et confĂšre une dĂ©fense additionnelle contre les infections gastro-intestinales.
L'aliment maternel peut Ă©galement ĂȘtre extrait mĂ©caniquement (extraction manuelle, tire-lait), transportĂ©, stockĂ© (Ă titre personnel ou par un lactarium) et administrĂ© au bĂ©bĂ© par diffĂ©rents moyens (sonde, dispositif d'aide Ă la lactation, cuillĂšre, tasse, biberonâŠ) Ă dĂ©faut de lâaliment maternel, le lait naturel est remplacĂ© par un substitut, une prĂ©paration lactĂ©e commerciale gĂ©nĂ©ralement Ă base de lait de vache (de zĂ©ro Ă six mois : prĂ©paration pour nourrisson, de six mois Ă un an : lait de suite). Selon l'OMS, l'introduction d'aliments solides n'est conseillĂ©e qu'aprĂšs l'Ăąge de six mois.
Physiologie
Dispositif de lactation
La structure interne de base du sein, constituĂ©e de 15 Ă 25 canaux galactophores (ou lactifĂšres, du latin lactifer « qui transporte le lait ») dĂ©bouchant Ă la surface du mamelon par des pores indĂ©pendants, est prĂ©sente Ă lâĂ©tat rudimentaire dans les deux sexes, de lâĂąge embryonnaire Ă lâĂąge adulte. Chez la femme pubĂšre, la glande mammaire se dĂ©veloppe sous lâinfluence hormonale : stĂ©roĂŻdes ovariens, prolactine, hormone de croissance, glyco-corticoĂŻdes, etc. Les ĆstrogĂšnes dĂ©veloppent les canaux galactophores et la progestĂ©rone dĂ©veloppe les bourgeons glandulaires, les futures cellules productrices, les acini.
Chez la femme enceinte, les ĆstrogĂšnes induisent un allongement des canaux galactophores, la progestĂ©rone, la prolactine et l'hormone lactogĂšne placentaire la multiplication et le dĂ©veloppement des acini. La progestĂ©rone inhibe la prolactine, empĂȘchant la sĂ©crĂ©tion du lait. Mais les hormones produites pendant la grossesse dĂ©pendent aussi du placenta. En fin de grossesse, les rameaux galactophores sont largement garnis dâacini, au total entre 6 000 et 200 000 unitĂ©s microscopiques, disposĂ©es par grappes de 10 Ă 100 et constituant ainsi des lobules ou unitĂ©s ducto-lobulaires de 0,1 Ă 1 mm de diamĂštre chacun. De 20 Ă 40 de ces lobules sont regroupĂ©s en rameaux autour dâun des canaux galactophores, formant ainsi un lobe. Les canaux des 15 Ă 25 lobes de tissu glandulaire convergent vers de plus grands canaux Ă l'arriĂšre du mamelon. Ces canaux s'ouvrent sur le mamelon par 4 Ă 18 orifices.
Ă l'accouchement, la chute du taux sanguin d'ĆstrogĂšnes et de progestĂ©rones sâaccompagne dâune libĂ©ration massive de prolactine pour la fabrication de lait dans les acini. Aussi longtemps que la mĂšre allaite, les acini continuent Ă se dĂ©velopper. AprĂšs le sevrage, les acini disparaissent et les canaux galactophores s'atrophient. Les rameaux se regarnissent Ă nouveau dâacini au cours de la grossesse suivante.
Processus
L'acinus est l'unitĂ© de base de production du lait maternel. Câest une sphĂšre creuse aux dimensions microscopiques connectĂ©e Ă un petit canal galactophore. Elle est tapissĂ©e d'une seule couche de cellules productrices. On appelle « lumiĂšre » de l'acinus la cavitĂ© dans laquelle est sĂ©crĂ©tĂ© le lait. La paroi extĂ©rieure des cellules de lâacinus est en contact avec de nombreux capillaires. AprĂšs la naissance et avec les tĂ©tĂ©es du bĂ©bĂ©, sous l'impulsion de l'hormone de la lactation, la prolactine, le dĂ©bit sanguin est augmentĂ© en prioritĂ© dans la zone du sein. Lâaugmentation de pression dans ces capillaires permet le passage, de la paroi des capillaires vers les cellules de lâacinus, de tous les Ă©lĂ©ments nĂ©cessaires Ă la fabrication du lait. Chaque cellule traite cette matiĂšre premiĂšre. Une partie des composants du lait rĂ©sulte directement de la filtration du sang, lâautre est synthĂ©tisĂ©e par les cellules de lâacinus. Le lait est ainsi sĂ©crĂ©tĂ© goutte Ă goutte dans la lumiĂšre de lâacinus.
Toujours Ă la suite de la naissance et sous lâeffet de la succion du sein par le bĂ©bĂ©, sous l'effet de l'ocytocine â la mĂȘme hormone qui prĂ©side aux contractions pendant l'accouchement â les cellules myoĂ©pithĂ©liales, qui sont des fibres musculaires microscopiques enveloppant l'acinus, sont mises en action et se contractent, pressant lâacinus pour le vider. Les gouttes de lait sĂ©crĂ©tĂ©es sont maintenant expulsĂ©es vers le canal galactophore. L'ocytocine provoque la contraction des fibres musculaires tout au long des canaux galactophores qui pulsent le lait vers la sortie par un mouvement pĂ©ristaltique. C'est le rĂ©flexe d'Ă©jection. Chez la mĂšre, il sâexprime sous la forme dâune tension dirigĂ©e de lâintĂ©rieur du sein vers la pointe. Lorsque le bĂ©bĂ© commence une tĂ©tĂ©e, le rĂ©flexe dâĂ©jection nâapparaĂźt quâau bout de quelques instants, le temps de la mise en route des contractions musculaires.
Avant la sortie dans le mamelon, les canaux galactophores prĂ©sentent un Ă©vasement lors du rĂ©flexe d'Ă©jection (qui se comporte alors comme un sinus, sans en ĂȘtre un/rĂ©f. Dr Peter Hartmann). Ces petits « rĂ©servoirs » ont une taille relativement modeste chez lâhumain et ne reprĂ©sentent quâune amorce de lait dans la tĂ©tĂ©e dont lâessentiel est fourni en cours de succion par le rĂ©flexe dâĂ©jection de la mĂšre.
Lait humain
Du colostrum au lait à maturité
Le premier lait sĂ©crĂ©tĂ© par la mĂšre aprĂšs lâaccouchement sâappelle le colostrum. Câest un lait Ă©pais, translucide ou colorĂ© (parfois presque orangĂ©). Le colostrum rĂ©pond tout de suite aux besoins essentiels du bĂ©bĂ© qui vient de naĂźtre. Il apporte sous un faible volume et dans les bonnes proportions tous les Ă©lĂ©ments complexes dont le nouveau-nĂ© a besoin. Le colostrum est naturellement peu abondant, entre 20 et 50 ml par tĂ©tĂ©e au dĂ©but, une quantitĂ© qui augmente rapidement. Il convient au trĂšs petit estomac du nouveau-nĂ©. Il est trĂšs bien assimilĂ©, nâoccasionne pas de surcharge rĂ©nale et produit peu de dĂ©chets non digĂ©rĂ©s. Le colostrum est abondant en cellules vivantes et anticorps qui protĂšgent le bĂ©bĂ© contre les agressions microbiennes du milieu ambiant. Il contient beaucoup de protĂ©ines (23 g·l-1), des facteurs de croissance, des sucres directement assimilables (oligosaccharides), des vitamines, des sels minĂ©raux et des acides aminĂ©s libres (20 %).
AprĂšs les premiers jours, la consistance se fluidifie, le volume augmente lĂ©gĂšrement, la proportion des composants se modifie. Câest le lait de transition (ou colostral), un mĂ©lange de colostrum et de lait Ă maturitĂ©. Au bout de deux Ă trois jours, au moment de ce quâon appelle la « montĂ©e de lait », le volume de lait produit augmente brusquement. Le lait devient plus blanc. Environ 14 jours aprĂšs la naissance, câest le lait Ă maturitĂ© qui est produit (qui prend souvent un aspect bleutĂ©, parfois translucide, ce qui ne signifie pas une baisse des qualitĂ©s nutritives). Avec lâĂąge du bĂ©bĂ©, le lait continue Ă augmenter en volume (mais mĂȘme plus grand, il ne boira guĂšre plus de 180 ml Ă chaque tĂ©tĂ©e, chaque femme produisant environ 750 ml de lait/24 h). La composition correspond Ă lâĂąge et aux besoins du bĂ©bĂ©.
Composition du lait humain
Les composants majeurs du lait maternel sont : l'eau (87,5 % environ), les glucides (7 % environ), les lipides (4 % environ), les protides (1 % environ), les micronutriments (0,5 % environ). Mais ces proportions et ces composants sont amenĂ©s Ă se modifier constamment en fonction des besoins et de lâĂąge du bĂ©bĂ©, de l'heure de tĂ©tĂ©e ou des dĂ©buts et fins de la tĂ©tĂ©e. Le lait maternel subit une Ă©volution importante entre le colostrum des premiers jours et le lait Ă maturitĂ© vers trois semaines.
La teneur des diffĂ©rents composants du lait maternel est Ă©galement propre Ă lâespĂšce et directement proportionnelle Ă la vitesse de croissance du nouveau-nĂ© et au poids du cerveau. Chez lâhumain qui a une croissance lente (140 jours pour doubler de poids) et un cerveau Ă©norme (1 200 g), le profil du lait est faible en protides et lipides, mais prĂ©sente un taux Ă©levĂ© de glucides nĂ©cessaires au dĂ©veloppement cĂ©rĂ©bral. Le profil de composition du lait maternel est relativement stable de par le monde et ne varie que dans une faible proportion en fonction du mode de vie et de lâalimentation de la mĂšre. De par la spĂ©cificitĂ© de sa composition, et contrairement au lait de vache, le lait humain se conserve relativement bien.
Pratique
Préparation
Une bonne information sur lâallaitement et le lait maternel[9] ainsi qu'une bonne connaissance de son corps aident une future mĂšre Ă bien guider son allaitement et le pĂšre du bĂ©bĂ© Ă bien comprendre le processus de la lactation, et de ses implications. Il existe actuellement de nombreuses sources dâinformation (internet, livres, brochures, rĂ©unions, conseils tĂ©lĂ©phoniques, etc.) qui permettent aux futurs parents de se familiariser avec une pratique pour laquelle il leur faut un minimum de rĂ©fĂ©rences.
Plusieurs mythes courent quant Ă la prĂ©paration concrĂšte qu'une femme doit entreprendre avant de pouvoir allaiter correctement. En rĂ©alitĂ©, les seins n'ont besoin d'aucune prĂ©paration : ni crĂšme, ni massage, ni changements dans le style de vie de la femme. Le processus de lactation dĂ©butera sans intervention extĂ©rieure. Le principal problĂšme rencontrĂ© dans les dĂ©buts de l'allaitement provient de la mauvaise information courante dans les milieux oĂč l'allaitement maternel a Ă©tĂ© dĂ©laissĂ© au profit des prĂ©parations industrielles.
Positions
Il n'y a pas de position idĂ©ale unique pour allaiter. L'important est d'abord d'ĂȘtre confortablement installĂ©e et de se sentir Ă l'aise. La pratique et le temps permettront de trouver les positions qui conviennent le mieux. La mĂšre ne doit pas sentir de tension. Un tabouret sous les pieds et des coussins derriĂšre le dos peuvent aider Ă diminuer les tensions. Un coussin sur les genoux peut Ă©galement aider Ă bien s'installer avec bĂ©bĂ© et Ă©viter que la mĂšre n'ait Ă soutenir le poids de son enfant toute la durĂ©e de la tĂ©tĂ©e.
Un bon positionnement du bĂ©bĂ© qui tĂšte est un facteur de rĂ©ussite de lâallaitement car il permet une succion adĂ©quate nĂ©cessaire Ă un nourrissage correct. De nombreuses difficultĂ©s de mise en route dâallaitement proviennent dâun mauvais positionnement du bĂ©bĂ© provoquant une succion inadĂ©quate. Dans une position de sĂ©curitĂ©, le dos du bĂ©bĂ© repose contre lâavant-bras de la mĂšre, sa tĂȘte est mobile dans le creux de son coude, son Ă©paule est dans lâaxe de lâoreille et de la hanche. Le bout du nez et la pointe du menton sont tous les deux en contact Ă©gal avec le sein. Lorsque le bĂ©bĂ© tĂšte, son menton doit ĂȘtre contre le sein et le bĂ©bĂ© doit tĂ©ter fermement l'ensemble de l'arĂ©ole et du mamelon. Si le nez du bĂ©bĂ© est enfoncĂ© dans le sein alors que le menton est dĂ©tachĂ©, il faut rapprocher le corps du bĂ©bĂ© vers soi. Si le menton du bĂ©bĂ© ne touche pas le sein, il faut remonter le bĂ©bĂ© un peu plus haut. Sauf chez les prĂ©maturĂ©s dont la tĂȘte doit ĂȘtre soutenue, il faut Ă©viter de tenir la tĂȘte du bĂ©bĂ© avec la main ou de pousser sa tĂȘte pour lâaider Ă prendre le sein. Cela bloquerait sa nuque et provoquerait chez lui un rĂ©flexe de recul.
Aliments et plantes galactogĂšnes
Les aliments galactogĂšnes (ou galactogogues[10]) sont les aliments qui favorisent la lactation, en cas de baisse de lait due Ă la fatigue par exemple. Il est recommandĂ© de manger variĂ© et Ă©quilibrĂ©. Le fenouil peut aider Ă©galement[11]. Des poussĂ©es de croissance du bĂ©bĂ© (vers trois semaines, six semaines, etc.) peuvent faire penser Ă une diminution de l'allaitement alors qu'il suffit de mettre le bĂ©bĂ© au sein plus souvent et de prendre du repos pour que l'allaitement continue normalement. Ă l'inverse certains aliments diminuent la lactation. Ăviter le persil, la menthe, et surtout la sauge et le soja de par leur teneur en phyto-ĆstrogĂšnes. Chaque culture a ses aliments Ă consommer et Ă Ă©viter pour avoir une bonne production de lait. Il faut donc se mĂ©fier des ouĂŻ-dire sur le sujet : il n'est pas rare de voir un aliment Ă Ă©viter dans un pays ĂȘtre l'aliment que toute femme allaitante se doit de consommer dans un autre pays.
Le fenugrec[12] - [13] et le chardon bĂ©ni sont deux plantes frĂ©quemment recommandĂ©es pour faire augmenter la production lactĂ©e. Plusieurs spĂ©cialistes de l'allaitement, dont le Dr Jack Newman, pĂ©diatre canadien et consultant pour lâInitiative HĂŽpital Ami des bĂ©bĂ©s de lâUNICEF, recommandent trois gĂ©lules de chaque plante, trois fois par jour aux mĂšres qui doivent faire augmenter leur production lactĂ©e. Le fenugrec ne convient parfois pas aux personnes allergiques aux graminĂ©es (il a aussi la propriĂ©tĂ© de faire baisser la glycĂ©mie[14] - [15] - [16]). Aucune Ă©tude scientifique ne confirme actuellement les supposĂ©es propriĂ©tĂ©s galactogĂšnes de ces produits[17].
Mécanisme et vérification de la succion
La tĂ©tĂ©e ne consiste pas à « vider » le sein, mais Ă le stimuler. La succion du bĂ©bĂ© crĂ©e chez la mĂšre un rĂ©flexe de fabrication/Ă©jection qui fournit Ă la demande le lait maternel au bĂ©bĂ©. Câest le bĂ©bĂ© qui, par son action de succion, crĂ©e le lait chez sa mĂšre. Câest pourquoi il faut Ă©viter toutes les maladresses ou intrusions qui pourraient perturber le mĂ©canisme de lactation suscitĂ© par les tĂ©tĂ©es rĂ©pĂ©tĂ©es du bĂ©bĂ©. Le dispositif de la bouche du bĂ©bĂ© et celui du sein maternel sont complĂ©mentaires. L'arĂ©ole du sein est granuleuse et lubrifiĂ©e (tubercules de Montgomery). Les gencives supĂ©rieures du nouveau-nĂ© ont des vĂ©sicules qui accrochent lâarriĂšre de lâarĂ©ole. GrĂące au rĂ©flexe dâextrusion, l'arĂ©ole est plaquĂ©e contre le palais du bĂ©bĂ© qui peut extraire le lait de toutes ses forces sans pour autant endommager les tissus du sein. La langue ondule de lâavant vers lâarriĂšre pour masser le sein et amener le lait Ă gicler. Les muscles des joues des nouveau-nĂ©s sont renforcĂ©s par des bourrelets de succion, les boules de Bichat qui assurent la stabilitĂ© latĂ©rale du mamelon et amĂ©liorent lâefficacitĂ© de la succion.
Une succion efficace met en route et active puissamment la lactation de la mĂšre sur l'ensemble de la tĂ©tĂ©e. C'est la garantie que le bĂ©bĂ© sera bien nourri. Il faut laisser tranquillement le bĂ©bĂ© prendre le sein bien en face, bouche grande ouverte, la langue bien tirĂ©e, happant le sein jusquâĂ l'arriĂšre de l'arĂ©ole. On voit plus d'arĂ©ole au-dessus de la bouche du bĂ©bĂ© qu'en dessous. Lorsque le bĂ©bĂ© avale du lait maternel, il effectue des mouvements de dĂ©glutition que la mĂšre peut distinguer dâun simple suçotement. Le bĂ©bĂ© doit pouvoir tĂ©ter chaque sein entre dix et vingt minutes pour aller jusquâau bout du cycle de la lactation. Les tĂ©tĂ©es durent en moyenne de cinq Ă 45 minutes suivant l'Ăąge et la faim du nourrisson. Le lait change de composition tout au long de la tĂ©tĂ©e et devient de plus en plus riche en lipides. On conseille de donner les deux seins au dĂ©but pour stimuler la lactation mais il faut bien vider chaque sein pour que le bĂ©bĂ© puisse profiter du lait gras de fin de tĂ©tĂ©e. Un bĂ©bĂ© qui mouille cinq ou six couches par jour a une bonne succion. Les selles sont de couleur jaune dorĂ© et liquides. Si elles deviennent verdĂątres, cela peut ĂȘtre le signe que l'enfant boit plus de lait riche en lactose (lait de dĂ©but de tĂ©tĂ©e) et pas suffisamment de lait de fin de tĂ©tĂ©e (riche en lipides). Il faut alors donner le premier sein Ă volontĂ© avant de passer au second sein.
Rythme
La lactation de la mĂšre se met en place grĂące Ă des tĂ©tĂ©es complĂštes, frĂ©quentes et exclusives. Ces tĂ©tĂ©es se dĂ©roulent, au moins dans les premiĂšres semaines, le long des vingt-quatre heures de la journĂ©e. Le nombre des tĂ©tĂ©es va de huit Ă douze les premiĂšres semaines (voire plus). Ce rythme est nĂ©cessaire Ă la mĂšre pour stabiliser le taux de prolactine dans le sang et permettre un ajustement de la lactation rapide et efficace. Les tĂ©tĂ©es frĂ©quentes mettent en place une relation mĂšre-enfant suivie et individuelle et permettent un contact corporel rĂ©pĂ©tĂ©, bĂ©nĂ©fique Ă la sĂ©curitĂ© intĂ©rieure du bĂ©bĂ©. Un allaitement exclusif au lait de mĂšre permet de faire bĂ©nĂ©ficier lâenfant des qualitĂ©s exceptionnelles du lait maternel. La succion de tĂ©tines (sucettes) ou lâadjonction de substituts du lait maternel (biberons de complĂ©ment) perturbent la lactation de la mĂšre et risquent de faire perdre au bĂ©bĂ© sa capacitĂ© Ă stimuler le sein maternel et, a fortiori, celle dâĂȘtre nourri correctement par les tĂ©tĂ©es de lait maternel. Elles peuvent induire un sevrage involontaire. En cas d'absence de la mĂšre on prĂ©fĂ©rera donner Ă boire Ă la tasse ou Ă la cuillĂšre pour Ă©viter une confusion sein-tĂ©tine qui entraĂźnerait une mauvaise succion du nourrisson.
DurĂ©e de lâallaitement
L'Organisation mondiale de la santĂ© (OMS), la Haute autoritĂ© de santĂ© (HAS, ex-ANAES) et l'Unicef recommandent l'allaitement exclusif jusqu'Ă l'Ăąge de six mois, suivi d'une poursuite de celui-ci jusqu'Ă l'Ăąge de deux ans ou plus[18] parallĂšlement Ă une alimentation diversifiĂ©e[19]. En outre, des Ă©tudes anthropologiques et archĂ©ologiques ont montrĂ© que le sevrage naturel intervient entre deux ans et demi et six ans[20]. Une Ă©tude indique que les humains, comme les grands singes, doivent, pour atteindre une santĂ© optimale, ĂȘtre allaitĂ©s entre deux et sept annĂ©es. Les femmes prĂ©historiques allaitaient en moyenne cinq annĂ©es[21]. Chez les inuits, les enfants Ă©taient allaitĂ©s 3 ans en moyenne[22].
Allaitement en public
La gĂȘne Ă allaiter en public est un facteur important qui varie selon les cultures[23]. D'aprĂšs des Ă©tudes[24] - [25], une minoritĂ© de femmes se sent Ă lâaise dâallaiter en public, craignant que leur geste soit interprĂ©tĂ© comme une invitation sexuelle, de l'exhibitionnisme ou un comportement sexuellement dĂ©viant. La plupart Ă©prouve la nĂ©cessitĂ© de se cacher ; certaines se rĂ©fugient aux toilettes ou Ă©vitent de sortir de chez elles, par crainte de devoir allaiter Ă lâextĂ©rieur.
Au Canada, il existe des « salles dâallaitement » dans les lieux publics comme les stations de transport public ou les centres commerciaux. Un sondage effectuĂ© dans ce pays auprĂšs de cent femmes au sujet de leurs habitudes et leurs prĂ©fĂ©rences que 99 % des femmes interrogĂ©es avaient dĂ©jĂ allaitĂ© dans un lieu public ; parmi elles, la moitiĂ© Ă©voquait un malaise et une gĂȘne et 82 % prĂ©fĂ©raient utiliser les salles dâallaitement lors de leurs achats. Les quatre principales raisons Ă©voquĂ©es Ă©taient le confort et lâĂ©quipement de la salle, le calme et lâintimitĂ©, lâinconfort face au regard des gens, la sĂ©curitĂ© des enfants plus ĂągĂ©s[26]. En Suisse, Ă GenĂšve, il existe des espaces d'allaitement[27].
Problématique culturelle
La pratique de l'allaitement a beaucoup varié selon les périodes, et notamment en fonction de la place des femmes dans la population active. Encouragé depuis le début des années 2000, il l'a été beaucoup moins dans les années 1960 jusqu'au milieu des années 1980, périodes fastes pour l'emploi des cadres féminins. Les différentes études concordantes sur les bénéfices de l'allaitement sur la santé et le développement du nouveau-né et la prise de conscience écologique depuis le début des années 1990 a amené l'HAS et l'OMS[19] à faire de l'allaitement une mesure de santé publique de premier ordre.
C'est le retour de l'essentialisme et du maternalisme. Certaines fĂ©ministes voient dans ce retour un recul des mentalitĂ©s et de la position des femmes dans la sociĂ©tĂ© et dĂ©noncent la pression exercĂ©e par les organismes dâĂtat et les promoteurs de l'allaitement sur l'ensemble des femmes qui s'apprĂȘtent Ă avoir ou ont des enfants[28]. D'autres y voient un remĂšde mĂ©diocre Ă la crise Ă©conomique actuelle, et dĂ©noncent le couvert d'arguments fallacieux pour culpabiliser les mĂšres qui n'allaitent pas, arguant que l'allaitement au sein est un choix strictement personnel et Ă©clairĂ©[29]. Cependant, on peut remarquer que certains des pays europĂ©ens ayant le plus fort taux d'allaitement maternel (NorvĂšge, SuĂšde) sont aussi des pays oĂč le taux d'activitĂ© fĂ©minine est particuliĂšrement Ă©levĂ© (hormis pendant la premiĂšre annĂ©e aprĂšs la naissance d'un enfant) et oĂč la condition fĂ©minine est gĂ©nĂ©ralement considĂ©rĂ©e comme favorable et le sexisme peu prĂ©sent. Ce point souligne les diffĂ©rences doctrinales des mouvements fĂ©ministes selon qu'ils proviennent de pays de cultures catholique ou protestante. Il a d'ailleurs Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© que les taux d'allaitement maternel sont plus faibles dans les pays occidentaux de culture catholique (Irlande, France et Belgique en particulier) que dans les pays occidentaux de culture protestante (pays scandinaves, notamment)[30]. Aux Ătats-Unis, des diffĂ©rences de pratique de l'allaitement maternel sont Ă©galement observĂ©es en fonction de la religion de la femme allaitante[31] - [32].
Cette promotion de l'allaitement maternel « meilleur pour la santĂ© » (d'oĂč le slogan anglophone « breast is best », littĂ©ralement « le sein est meilleur »)[33], est basĂ© sur une rĂ©pĂ©tition des mĂȘmes arguments et sur la culpabilisation des femmes[34]. Cela a pour consĂ©quence que cette pratique est ressentie par certaines femmes comme une obligation morale pour correspondre Ă l'image idĂ©alisĂ©e de la « bonne mĂšre », quand bien mĂȘme elle est difficilement compatible avec leur activitĂ© professionnelle. Le discours institutionnel construit ainsi l'image d'une dĂ©viance maternelle, certaines femmes qui dĂ©cident de ne pas allaiter, pour des raisons qui leur sont propres dont la plus frĂ©quente est la reprise d'un travail, pouvant se percevoir comme de « mauvaises mĂšres ». Cette culture d'allaitement forte a pour effet aussi sur d'autres femmes qui n'allaitent pas pour des raisons mĂ©dicales, qu'elles ressentent de la honte[25].
Cas particuliers
De multiples cas particuliers dâallaitement existent, on peut mĂȘme dire que chaque allaitement est un cas particulier. Le cursus de la nutrition infantile, allaitement-sevrage-diversification est propre Ă chaque individu et fait partie de son histoire. Dans la nutrition infantile, la possibilitĂ© de lâallaitement est une option ouverte, variable, et ce processus gagne Ă ĂȘtre guidĂ© et maĂźtrisĂ© grĂące Ă une bonne information et un suivi attentif. Une cĂ©sarienne, des naissances multiples, un bĂ©bĂ© prĂ©maturĂ©, une affection plus ou moins grave chez la mĂšre ou lâenfant, chaque cas possĂšde des indications prĂ©cises en matiĂšre dâallaitement.
Le dĂ©veloppement de techniques permettant de donner indirectement le lait maternel a Ă©largi les possibilitĂ©s pour la mĂšre de faire bĂ©nĂ©ficier son enfant du lait maternel mĂȘme dans des situations particuliĂšres. Les pratiques adĂ©quates dâextraction (manuelle ou avec tire-lait mĂ©canique ou Ă©lectrique), de transport, stockage et conservation du lait maternel ainsi que les mĂ©thodes dâadministration indirectes du lait au bĂ©bĂ© (nourrissage par sonde, dispositif dâaide Ă lâallaitement, tasse, cuillĂšre, biberonâŠ) sont actuellement parfaitement dĂ©crites et transmissibles. La maĂźtrise de ces techniques est relativement rĂ©cente (fin du XXe siĂšcle) et nâest pas encore bien connue du grand public.
Indications
L'allaitement est un prolongement de la grossesse. Celui-ci peut ĂȘtre interrompu volontairement, sur indication mĂ©dicale dans certains cas particuliers (cancer, sĂ©ropositivitĂ©, trouble de l'addiction chez la mĂšre, galactosĂ©mie du nourrisson, prise de mĂ©dicaments incompatibles avec la lactation) ou par choix personnel lorsque l'environnement s'y prĂȘte (eau potable et lait infantile disponibles Ă un coĂ»t abordable). Une indication de sevrage ne doit ĂȘtre donnĂ©e que si les avantages de lâallaitement ne reprĂ©sentent pas un gain supĂ©rieur Ă lâutilisation dâun substitut.
Le recours Ă des substituts rendant souvent difficile la possibilitĂ© de revenir Ă un allaitement maternel par la suite, la dĂ©cision de sevrage doit ĂȘtre prise en toute connaissance de cause. Dans le cas d'une consommation de toxiques ou de mĂ©dicaments (mĂ©dicaments et allaitement), de pathologies lourdes, de maladies rares, de cas complexes, il existe des bases de donnĂ©es mĂ©dicales (LLL, par exemple) permettant de donner des indications adĂ©quates et les conditions de la poursuite, de l'arrĂȘt temporaire ou dĂ©finitif de l'allaitement maternel. Dans un environnement peu favorable, en cas de problĂšme environnemental majeur, de mauvaise santĂ© de la mĂšre, notamment le SIDA, les recommandations de lâOrganisation mondiale de la santĂ© doivent ĂȘtre prises en compte, les qualitĂ©s gĂ©nĂ©rales de protection de lâallaitement maternel restant gĂ©nĂ©ralement effectives pour l'enfant, mĂȘme dans des conditions limites, et contribuant de maniĂšre significative Ă faire baisser la mortalitĂ© et la morbiditĂ© infantiles.
L'arrĂȘt de l'allaitement maternel avant la fin de la pĂ©riode de diversification, ou le fait d'y renoncer dĂšs le dĂ©but, exige le recours Ă une nourrice ou Ă des substituts du lait maternel (lait infantile en poudre mĂ©langĂ© Ă de l'eau minĂ©rale, donnĂ© avec un biberon). De 0 Ă 6 mois, Ă des prĂ©parations pour nourrissons, de 6 Ă 12 mois, Ă des laits de suite.
Contre-indications
Certaines maladies, intoxications ou contaminations contre-indiquent l'allaitement maternel.
Les contre-indications provenant de la mĂšre sont :
- une infection par le VIH, la transmission au nourrisson augmentant avec la durée de l'allaitement. L'allaitement mixte augmente aussi la transmission par rapport à l'allaitement maternel exclusif. Par contre, dans les pays démunis, il est conseillé de poursuivre l'allaitement maternel, en raison d'une mortalité infantile accrue chez les nourrissons lorsqu'un allaitement artificiel leur est donné (eau potable, approvisionnement en lait artificiel non garanti) ;
- une infection par le virus de l'hépatite C avec virémie importante ;
- une infection par HTLV-1 ;
- certaines infections cutanées (staphylocoque doré, streptocoque B, salmonelles) ;
- la consommation de certains médicaments ;
- l'exposition Ă des contaminants indĂ©sirables ou toxiques â mĂ©taux lourds et mĂ©talloĂŻdes, perturbateurs endocriniens, polluants organiques persistants, etc. â pouvant se retrouver dans le lait maternel[35]. Certains de ces contaminants â plomb ou mercure par exemple â peuvent gravement affecter le dĂ©veloppement physique ou psychomoteur ou mental de l'enfant. Parfois, Ă la suite d'une pollution un grand nombre de mĂšres peuvent ĂȘtre concernĂ©es. On peut alors parler d'Ă©pidĂ©mie comme lors de la « catastrophe de Minamata »[36] ou lors d'un empoisonnement mercuriel dĂ» Ă un pesticide utilisĂ© sur le blĂ© en Irak en 1972[37]. Une analyse de sang de la mĂšre, une analyse du lait maternel ou encore une analyse du sang de cordon ombilical Ă la naissance peuvent aider Ă dĂ©tecter ou confirmer ce type de risque.
Les contre-indications provenant de l'enfant sont : la présence d'une galactosémie congénitale ou d'une la phénylcétonurie (un allaitement mixte est préconisé).
Complications
Les douleurs du mamelon sont trĂšs frĂ©quentes peu aprĂšs l'accouchement (huit femmes sur dix) et diminuent fortement avec le temps (une femme sur cinq s'en plaint aprĂšs le deuxiĂšme mois)[38]. De mĂȘme la frĂ©quence des lĂ©sions du mamelon, dont les crevasses, passe de 60 % aprĂšs l'accouchement Ă moins de 10 % aprĂšs deux mois. Ces lĂ©sions peuvent s'infecter. La protection des arĂ©oles ainsi que l'application de crĂšme Ă base de lanoline peuvent amĂ©liorer l'Ă©volution[39].
La mastite (inflammation du sein) est une complication assez frĂ©quente : son incidence est variable, comprise entre 2 et 33 %[40]. Sa cause principale est la stagnation du lait dans le sein. Elle peut aller d'une simple inflammation jusqu'Ă la formation d'un abcĂšs, cette Ă©volution concernant moins de 0,5 % des femmes allaitantes[41]. Sauf exception, elle ne nĂ©cessite pas l'arrĂȘt de l'allaitement.
Parmi les causes possibles des douleurs du mamelon, on peut envisager la prĂ©sence d'une candidose mammaire, due au Candida Albicans, qui est aussi le champignon responsable du muguet dans la bouche des bĂ©bĂ©s. La candidose mammaire peut gĂ©nĂ©ralement ĂȘtre traitĂ©e Ă l'aide d'antifongiques, sous forme de gel, ou par voie orale[42] - [43]. Une autre cause de douleur est due au virus herpĂšs simplex avec formation de quelques vĂ©sicules autour de l'arĂ©ole et contre indiquant formellement la poursuite de l'allaitement maternel.
Une autre pathologie, le vasospasme du mamelon, qui est un problĂšme circulatoire proche de la maladie de Raynaud, peut aussi provoquer des douleurs du mĂȘme type, qui commencent en gĂ©nĂ©ral aprĂšs la tĂ©tĂ©e[44]. On constate en gĂ©nĂ©ral un blanchissement du mamelon aprĂšs la tĂ©tĂ©e, et il est gĂ©nĂ©ralement aggravĂ© par le froid[45]. Il concerne environ un quart des femmes[38]. Il doit ĂȘtre traitĂ© par l'Ă©vitement du froid (recouvrement du sein immĂ©diatement aprĂšs la tĂ©tĂ©e). Un traitement par nifĂ©dipine, un inhibiteur calcique compatible avec la poursuite de l'allaitement, peut ĂȘtre proposĂ©[46].
L'insuffisance de production de lait est un problĂšme frĂ©quent et suspectĂ©e devant une insuffisance de prise de poids de l'enfant allaitĂ©. Elle est souvent due Ă un nombre insuffisant de tĂ©tĂ©es, ou Ă une limitation des tĂ©tĂ©es dans le temps, ou Ă une succion inefficace du bĂ©bĂ©. Elle doit ĂȘtre Ă©valuĂ©e rapidement et des mesures de corrections doivent ĂȘtre apportĂ©es rapidement pour Ă©viter la dĂ©shydratation de l'enfant et le sevrage inopinĂ©. La production de lait peut ĂȘtre stimulĂ©e par le massage du sein, voire l'emploi d'un tire-lait[47]. En cas d'Ă©chec, certains pays permettent la prescription de dompĂ©ridone qui augmente la lactation sans passage du mĂ©dicament dans le lait[46].
Histoire
L'allaitement maternel, fait biologique et naturel, a connu au cours de l'histoire le recours aux nourrices dans les cas de dĂ©cĂšs postpartum de la mĂšre, comme ce fut frĂ©quent durant des siĂšcles, ou dans les cas oĂč la mĂšre n'avait pas suffisamment de lait pour nourrir l'enfant. Mais, Ă partir de la fin du XVIe siĂšcle, la pratique de l'allaitement mercenaire s'est diffusĂ©e dans l'aristocratie d'abord, puis dans la bourgeoisie, afin de s'affranchir de cette servitude. Jusqu'au XVIIIe siĂšcle, cette pratique fut gĂ©nĂ©ralisĂ©e et les femmes d'artisans aisĂ©s pouvant se permettre de louer les services d'une nourrice y eurent recours. Les nourrices Ă©taient en gĂ©nĂ©ral des femmes des classes populaires les moins aisĂ©es. Le retour Ă l'allaitement maternel n'eut lieu qu'au dĂ©but du XIXe siĂšcle ; quand madame d'Ăpinay prĂ©tendit allaiter elle-mĂȘme ses enfants, cette idĂ©e fut considĂ©rĂ©e extravagante par les gens de son milieu. En effet, les femmes allaitantes ne sont pas toutes considĂ©rĂ©es de la mĂȘme maniĂšre. Les femmes comme madame d'Ăpinay d'une classe aisĂ©e, Ă©taient les mois considĂ©rĂ©es comme aptes Ă allaiter leurs enfants, du fait de leur grande oisivetĂ©. Ainsi les femmes de la campagne Ă©taient considĂ©rĂ©es comme les meilleures allaitantes, suivies des femmes des classes populaires[48].
L'utilisation de lait de vache plus ou moins modifiĂ© date de la fin du XIXe siĂšcle, aboutissant Ă une baisse trĂšs sensible de l'allaitement maternel, le taux le plus bas Ă©tant vers les annĂ©es 1960[49]. Depuis, ce taux semble Ă nouveau augmenter, mais reste trĂšs variable selon le pays (seulement 7 % en Grande-Bretagne contre 64 % en NorvĂšge[49]. Câest vers la fin du XXe siĂšcle, dans les annĂ©es 1980, quâon voit apparaĂźtre et se dĂ©velopper des associations dâaide aux mĂšres et des mesures de protection de lâallaitement maternel. Ce moment marque un tournant pour la nutrition infantile. Depuis plusieurs dĂ©cennies, lâaccouchement gĂ©nĂ©ralisĂ© en Ă©tablissements de santĂ© et le dĂ©veloppement des aliments infantiles industriels portĂ©s par la publicitĂ© avaient mis Ă mal la pratique de lâallaitement maternel dâabord dans les pays industrialisĂ©s, puis dans les pays en voie de dĂ©veloppement.
LâĂ©volution des techniques dâaide Ă lâallaitement, de maniĂšre gĂ©nĂ©rale comme dans les cas particuliers, lâaccĂšs du public Ă une information de qualitĂ©, la formation des professionnels de santĂ© et le dĂ©veloppement des rĂ©seaux dâinformation et dâentraide, les mesures de santĂ© publique faisant la promotion et protĂ©geant lâallaitement maternel nâont pas seulement entraĂźnĂ© une inversion de la tendance en faveur de lâallaitement maternel. Ces Ă©volutions ont aussi amĂ©liorĂ© les conditions dâallaitement et rendu ainsi cette pratique plus confortable pour la mĂšre, aussi bien dâun point de vue social que corporel.
Dans certaines sociétés, la promotion de l'allaitement maternel, alors que l'allaitement artificiel ne pose pas de problÚmes graves (lait maternisé et eau minérale saine disponibles à coût raisonnable, services médicaux à proximité), est parfois perçu comme une pression sociale et non plus comme un choix[50]. Toutefois ce phénomÚne n'est pas quantifié en France et semble minoritaire puisque 75 % des femmes aimeraient allaiter pendant au moins quelques semaines[51].
Statistiques
Aux Ătats-Unis, en 2005, les trois quarts des mĂšres allaitent leur enfant, durant plus de 6 mois dans 40 % des cas, mais il n'est exclusif Ă trois mois que dans moins d'un tiers des cas[52]. En Europe, la mĂȘme annĂ©e, la part de femmes allaitant Ă©tait la plus Ă©levĂ©e en Scandinavie (NorvĂšge : 99 % ; Finlande : 95 % ; SuĂšde : 90 %), oĂč les congĂ©s de maternitĂ© sont plus longs[53].
En France, en 1995, 45,6 % des mĂšres seulement allaitent Ă leur sortie de la maternitĂ©, un des plus bas taux du monde[53] - [54]. En 2005, elles sont 60 %, mais les 2/3 abandonnent au cours du premier mois[53]. Au quatriĂšme mois de l'enfant, le taux d'allaitement n'est plus que de 5 %. Pour 2010, l'objectif visĂ© par le Programme national nutrition santĂ© lancĂ© en 2001, Ă©tait que 70 % des françaises allaitent au moins 4 mois leur bĂ©bĂ©[53]. En 2011, selon l'Ă©tude Ăpifane de l'InVS qui pĂ©riodiquement fait le point sur lâalimentation et lâĂ©tat nutritionnel des bĂ©bĂ©s de 0 Ă 1 an[55]. En elle montrait que lâallaitement restait trĂšs peu pratiquĂ© en France, et trĂšs en deçà des taux rapportĂ©s dans dâautres pays europĂ©ens[56]. Selon Ăpifane (2012), plus de deux tiers des nourrissons (69,1 %) ont Ă©tĂ© allaitĂ©s Ă la maternitĂ©, mais seulement pour 59,7 % de façon exclusive (et 9,3 % en association avec des formules lactĂ©es). PrĂšs d'un tiers des mĂšres (30,9 %) ne donnent que des biberons de formules lactĂ©es Ă leur nourrisson. Ă 1 mois, seuls 54,4 % Ă©taient encore allaitĂ©s, et 35,4 % de façon exclusive et 19,0 % en allaitement mixte. PrĂšs de la moitiĂ© des mĂšres (45,6 %) utilisent des formules lactĂ©es seules pour nourrir leur enfant. Les facteurs qui influencent le taux dâallaitement maternel sont lâĂąge, le statut marital, le niveau dâĂ©tudes, le lieu de naissance, lâindice de masse corporelle et le tabagisme lors de la grossesse, ainsi que la participation aux sĂ©ances de prĂ©paration Ă lâaccouchement, le contact peau Ă peau juste aprĂšs la naissance et le fait que le conjoint perçoive positivement l'allaitement[57]. Ces moyennes recouvrent de grandes disparitĂ©s sociologiques et gĂ©ographiques[53] : celles qui allaitent le plus sont les mĂšres diplĂŽmĂ©es ; elles sont aussi plus nombreuses Ă Paris, dans l'est de la France et dans la rĂ©gion RhĂŽne-Alpes.
Le taux dâinitiation de lâallaitement maternel Ă la maternitĂ© tend Ă augmenter, mais il reste bas (passĂ© de 37 % en 1972, Ă 53 % en 1998, puis 69 % en 2010). En 2012, Ă l'Ăąge dâun mois seuls 54 % des bĂ©bĂ©s Ă©taient encore allaitĂ©s, et 35 % seulement de façon exclusive[55].
Protection et mesures incitatives
Lâallaitement maternel est protĂ©gĂ© par des recommandations internationales de lâUnicef et de lâOMS (Organisation mondiale de la santĂ©) dont certains Ă©lĂ©ments ont Ă©tĂ© transcrits dans des directives europĂ©ennes . Le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel, Ă©noncĂ© en 1981 par lâOMS, rĂ©glemente la commercialisation des laits pour nourrissons, biberons, tĂ©tines et aliments pour nourrissons[58]. Il interdit notamment la publicitĂ© et promotion auprĂšs du public, la promotion et distribution de cadeaux et dâĂ©chantillons dans les services de santĂ© ainsi que la promotion de produits inadaptĂ©s.
Lâapplication par des services de santĂ© des « Dix recommandations pour le succĂšs de l'allaitement maternel » Ă©noncĂ©es en 1989 dans la DĂ©claration Conjointe OMS/UNICEF sur la Protection, lâencouragement et le soutien de l'allaitement maternel, permet dâobtenir le label « HĂŽpital Ami des BĂ©bĂ©s ».
L'allaitement est favorisé au Québec et en Belgique par la Sécurité sociale. Ainsi, au Québec, depuis 1994, les femmes en situation de pauvreté et de dénuement reçoivent une allocation supplémentaire de 55 dollars par mois si elles nourrissent au sein leurs bébés (ceci pour améliorer leur santé)[59]. En Belgique, l'Institut national d'assurance maladie invalidité (INAMI) favorise depuis la poursuite de l'allaitement à la reprise du travail, par la convention collective relative à la protection de la maternité. Entre 2003 et 2006, le nombre de bénéficiaires est passé de 434 à 588, tandis que le budget consacré à ces indemnités est monté de 13.317 à 16 476 euros[60].
Plusieurs travaux avancent une estimation, retenue par l'OMS, d'environ 800 000 dĂ©cĂšs annuels dâenfants en bas Ăąge Ă©vitables si l'allaitement Ă©tait gĂ©nĂ©ralisĂ© dans le monde[61]. En , une Ă©tude internationale publiĂ©e dans la revue mĂ©dicale The Lancet confirme cette estimation, prĂ©cisant que la gĂ©nĂ©ralisation de l'allaitement permettrait aussi de prĂ©venir plusieurs pathologies infantiles et bĂ©nĂ©ficierait aussi bien aux pays riches qu'aux pays pauvres[61]. L'Ă©tude avance Ă©galement que la gĂ©nĂ©ralisation de l'allaitement permettrait dâĂ©viter 20 000 dĂ©cĂšs annuels par cancer du sein et de protĂ©ger les femmes contre le cancer de l'ovaire[61].
Avantages
Chez l'enfant
La durĂ©e d'allaitement est liĂ©e au dĂ©veloppement du cerveau, Ă ses facultĂ©s, et Ă sa taille[62] - [63]. La durĂ©e de l'allaitement humain Ă©tant liĂ©e au dĂ©veloppement du cerveau chez les ancĂȘtres (genre Homo) de l'homme[64] - [65]. La croissance la plus rapide du cerveau intervenant dans les 3 premiĂšres annĂ©es de vie[66].
L'Ă©tude des coĂ»ts-bĂ©nĂ©fices sanitaire et psychologiques de l'allaitement est particuliĂšrement difficile en raison de nombreux facteurs socio-Ă©conomiques et psychosociaux, et parce que selon l'environnement professionnel et de vie de la mĂšre, le lait maternel a une composition variable (il peut lui-mĂȘme accumuler divers polluants susceptibles d'inhiber certains bĂ©nĂ©fices de l'allaitement).
Selon la littérature scientifique, allaiter le bébé au sein présente de nombreux avantages.
L'allaitement maternel diminue le risque d'allergies primaires chez l'enfant, sauf peut-ĂȘtre pour les enfants prĂ©disposĂ©s aux allergies[67]. Le risque d'asthme, de dermatite atopique, de rhinite allergique et d'allergie aux protĂ©ines de lait de vache augmenterait en l'absence d'allaitement, tout comme le risque infectieux[68].
Grùce au colostrum (et parce que l'allaitement ne fait pas appel à de l'eau non-potable pour préparer un lait artificiel), l'allaitement au sein diminue le risque d'infections des voies aériennes supérieures[69] et le risque d'otites moyennes aiguës[69]. Dans les pays dits développés, un allaitement de plus de 4 mois diminue le risque d'infections respiratoires sévÚres nécessitant une hospitalisation[70]. Dans les pays en voie de développement, les bénéfices de l'allaitement sont encore plus marqués, diminuant fortement la mortalité par pneumonie ou infection respiratoire basse et la mortalité générale de l'enfant (et du nourrisson de moins de six mois par cause de diarrhée)[68]. En effet, l'accÚs à une source d'eau potable de bonne qualité, préalable indispensable à l'utilisation de substituts de lait humain, est souvent peu aisé, avec un risque de contamination infectieuse important. L'allaitement maternel est d'autant plus recommandé dans ce contexte, avec la possibilité de sauver prÚs de 1,3 million d'enfants chaque année si l'allaitement était massivement utilisé[71].
Les selles seraient moins acides, ce qui limiterait l'érythÚme fessier. Le lait maternel se digérerait plus facilement (entre 20 minutes et 2 heures). La mécanique de succion au sein (« tétée physiologique ») permettrait un meilleur développement de la mùchoire, et diminuerait le risque de malocclusion dentaire ou leur gravité, indépendamment de la qualité du lait ; à condition toutefois de ne pas poursuivre au-delà de l'ùge d'évolution physiologique de la déglutition, soit vers 1 an et demi à deux ans[72].
S'il dure plus de 4 mois, l'allaitement diminue aussi les risques de pathologie digestive (les études faites dans les pays développés, un moindre risque de diarrhée et d'hospitalisations pour ce motif). Il semble aussi diminuer le risque d'obésité[73] - [74], mais cela reste discuté[75]. Il semble également réduire la fréquence des diabÚtes de type 1 et 2 chez les enfants ayant reçu un allaitement au sein de plus de 4 mois. La réduction du risque pour le type 2 chez l'adulte serait de 39 % et de 19 à 27 % pour celui de type 1 en fonction des études[69]. Il semble légÚrement diminuer le risque de lymphome[76], de cancers, d'hypercholestérolémie[77] chez les enfants plus ùgés et chez les adultes ayant été allaités, mais non le risque de leucémie[76].
L'allaitement au sein semble diminuer le risque de troubles du dĂ©ficit de l'attention et d'hyperactivitĂ© (TDAH) chez lâenfant[78] - [79].
De façon gĂ©nĂ©rale, chez le nouveau-nĂ© de petit poids de naissance (moins de 2 500 g), l'allaitement maternel diminue la mortalitĂ© et la morbiditĂ©, et amĂ©liore la croissance et le dĂ©veloppement cĂ©rĂ©bral[80]. Une Ă©tude britannique de 1992 a montrĂ© que des prĂ©maturĂ©s alimentĂ©s par voie nasale et sans contact direct avec leur mĂšre durant quelques semaines avec du lait maternel prĂ©sentaient Ă lâĂąge de 8 ans un quotient intellectuel de 8 points plus Ă©levĂ© que la moyenne qu'un groupe d'enfants nourris de la mĂȘme maniĂšre, mais avec du lait artificiel.
Les enfants allaités présentent en moyenne un meilleur développement psychomoteur, et cette relation semble aussi liée proportionnellement à la durée d'allaitement maternel[81] - [82]. De nombreuses études épidémiologiques ont montré que les enfants allaités ont un quotient intellectuel plus élevé d'en moyenne 1,5 à 2 points[83] - [84] - [85] - [86]. Une étude américaine a également observé une relation dose-effet entre la durée d'allaitement maternel et le QI[87]. Cette relation pourrait persister jusqu'à l'ùge adulte[88]. Néanmoins, l'effet direct de l'allaitement maternel sur les capacités cognitives de l'enfant est trÚs discuté dans la communauté scientifique. En effet, la catégorie socio-économique ou le QI de la mÚre pourraient confondre cette relation[89] - [90]. Le DHA (acide gras oméga-3) présent dans le lait maternel, et absent du lait de vache, pourrait néanmoins expliquer un effet du lait maternel sur le développement cérébral et rétinien.
Différences entre allaitement direct au sein ou via un tire-lait.
Lâallaitement maternel direct diffĂšre nettement en matiĂšre de sĂ©curitĂ© de celui aprĂšs avoir utilisĂ© un tire-lait[91].
Le sĂ©quençage de gĂšnes bactĂ©riens sur des Ă©chantillons de lait de 393 mĂšres en bonne santĂ© trois Ă quatre mois aprĂšs la naissance a montrĂ© un degrĂ© Ă©levĂ© de variabilitĂ© dans le microbiote du lait chez les mĂšres, selon que les mĂšres aient fourni du lait avec ou sans tire-lait. L'allaitement maternel indirect (dĂ©fini comme au moins une portion de lait pompĂ© au cours des deux semaines prĂ©cĂ©dentes) a Ă©tĂ© associĂ© Ă une plus grande abondance d'agents pathogĂšnes opportunistes potentiels, ainsi qu'une dĂ©plĂ©tion de germes bĂ©nĂ©fiques tels que les bifidobactĂ©ries. Ceci explique que les enfants nourris au lait maternel via un tire-lait prĂ©sentent, par exemple, un risque accru dâasthme, par rapport Ă ceux nourris exclusivement au sein[91].
Ainsi, l'allaitement maternel direct sans tire-lait est associé à des microbes typiquement présents dans la bouche, ainsi qu'à une plus grande richesse et diversité bactérienne globale. L'allaitement maternel direct facilite l'acquisition d'un microbiote oral favorable chez les nourrissons, alors que l'allaitement indirect conduit à la présence de bactéries environnementales, qui sont associées au tire-lait[91].
Chez la mĂšre
- Une femme est moins susceptible de tomber en dépression post-partum lors de l'allaitement[92] - [93].
- L'allaitement entraine une continuité avec la sécrétion des hormones de grossesse ;
- Il provoque une élévation du taux d'ocytocine ce qui induit la contraction de l'utérus aprÚs l'accouchement, et diminue les hémorragies du post-partum et permet à l'utérus de retrouver ses dimensions habituelles plus rapidement[94] ;
- La prolactine qui induit la sécrétion de lait provoque un apaisement et une somnolence chez la mÚre et le nourrisson ;
- Il permet souvent à la mÚre de revenir à son poids d'avant la grossesse en utilisant les réserves accumulées[95] ;
- Il retarde l'arrivée du retour de couches (reprise des menstruations aprÚs la grossesse) : sans allaitement, les rÚgles reviennent en général sous six semaines. Un allaitement dit « exclusif » peut porter ce délai à six mois, voire plus. Pendant cette période, et sous certaines conditions (notamment que l'enfant tÚte au moins 6 fois par 24 heures[96]), la femme n'est pas fertile. L'aménorrhée de lactation est donc une méthode de planification familiale naturelle considérée comme efficace si elle est correctement appliquée, avec un taux d'échec de 2 % dans les meilleures conditions ;
- Il améliorerait la minéralisation osseuse et diminuerait le risque de cancer ovarien et du sein[97] ;
- Le bénéfice financier et la diminution des charges ménagÚres (préparation et nettoyage des biberons) durent le temps de l'allaitement ;
- L'allaitement maternel réduit le risque de cancer du sein, de cancer de l'ovaire et de diabÚte[95] ;
- L'allaitement aide Ă renforcer le lien entre la mĂšre et l'enfant[98].
Pour la collectivité
Selon le pédiatre Bitoun, l'allaitement généralisé permettait, en France en 1994, de réduire de 1,071 milliard de francs (environ 163 millions d'euros) les frais de santé supportés par l'assurance maladie, par le seul effet préventif de l'allaitement sur les otites, les diarrhées et les rhinopharyngites[99]. D'autres études n'ont pas confirmé ce chiffre.
De plus, l'allaitement naturel est économique et écologique. C'est une suite de solutions simples à la préservation de ressources planétaires, aux grands problÚmes d'exploitations industrielles et de pollutions environnementales, via les cultures industrielles pour l'exploitation laitiÚre, via la commercialisation de tous les produits des marchés de l'allaitement : plastique, verre, caoutchouc, silicone, métaux, pétrole pour transports de toutes sortes.
Contraintes pratiques
- La mĂšre doit rester Ă proximitĂ© de lâenfant, toutefois, elle peut tirer son lait et le stocker, pour que les personnes gardant l'enfant puissent lui donner par biberon, tasse, cuillĂšre, etc. ce qui lui permet d'avoir des activitĂ©s Ă l'extĂ©rieur, notamment professionnelles. En cas d'utilisation ultĂ©rieure du lait maternel, celui-ci peut-ĂȘtre conservĂ© au rĂ©frigĂ©rateur (48 h maximum pour une tempĂ©rature infĂ©rieure ou Ă©gale Ă 4 °C), ou au congĂ©lateur (maximum 4 mois Ă â18 °C)[100].
- Allaiter est un processus naturel, mais dans les sociĂ©tĂ©s modernes oĂč les femmes ont peu d'exemples de femmes allaitant, une mĂšre inexpĂ©rimentĂ©e devra prendre conseils et exemples auprĂšs de professionnels de santĂ© connaissant l'allaitement, d'associations, d'autres mĂšres allaitant. Si elle choisit d'allaiter au sein, cela lui permettra de connaĂźtre les bons gestes pour rĂ©ussir son allaitement.
- La reprise de l'activitĂ© sexuelle entre partenaires peut se retarder d'autant que l'allaitement est long et la mĂšre sollicitĂ©e par un nourrissage au sein exclusif, d'autant que la sĂ©crĂ©tion de prolactine inhibe la synthĂšse des LH et FSH par l'hypothalamus, hormones elles-mĂȘmes essentielles Ă la production d'hormones sexuelles.
- Le sentiment d'exclusion du pĂšre qui n'aura pas su s'inclure dans la dyade par d'autres moyens.
Divers
Dans lâĂgypte ancienne, la dĂ©esse Isis est reprĂ©sentĂ©e, tantĂŽt en dĂ©esse-vache nourrissant le roi de son lait, tantĂŽt en dĂ©esse-arbre tendant le sein de lâeau rĂ©gĂ©nĂ©ratrice au roi dĂ©funt, tantĂŽt en dĂ©esse-mĂšre allaitant le roi-enfant. Ă Sumer, en MĂ©sopotamie, le Code de Hammurabi (-1750) rĂ©glementait dĂ©jĂ la pratique des nourrices Ă qui on coupait un sein si elles n'Ă©taient pas obĂ©issantes.
Dans la Kabbale, lâallaitement est une mĂ©taphore utilisĂ©e pour dĂ©signer le mode de relation entre les Ă©manations divines (sefirot) et lâhumain, un contact intime qui ne peut pas ĂȘtre formulĂ© en termes de connaissance. Dans la religion musulmane, deux enfants nourris par la mĂȘme nourrice deviennent automatiquement des « frĂšres de lait » et ne peuvent se marier entre eux.
Depuis toujours, dans les forĂȘts nordiques, les hommes utilisent la sĂšve de bouleau pour supplĂ©er l'allaitement maternel[101].
Arts
L'allaitement a inspiré de nombreux artistes à travers de nombreuses cultures.
- Jeune femme allaitant son enfant. Louis-Roland Trinquesse, 1777.
- La République nourrissant ses enfants. Honoré Daumier, 1848.
- Auguste Renoir, 1885.
- Allaitement, Achiam (1916-2005), bronze.
- Statue originaire du Nigéria
- Princesse Ă©gyptienne allaitant son enfant
- ScĂšne d'allaitement Ă©gyptienne
- scĂšne d'allaitement japonaise
Notes et références
- Panneau des femmes sculptĂ©es du Roc-aux-Sorciers. CrĂ©dits G. Pinçon, MC, clichĂ© A. Maulny, relevĂ© G. Pinçon, L. Iakovleva et O. Fuentes, tirĂ© d'Oscar Fuentes & GeneviĂšve Pinçon, « Essai dâune anthropologie des images palĂ©olithiques du Roc-aux-Sorciers (Angles-sur-lâAnglin, Vienne, France) : entre continuitĂ©s et discontinuitĂ©s », PalĂ©o, n°29, 2018, 137-149.
- Ludmila Iakovleva, GeneviÚve Pinçon, La frise sculptée du Roc-aux-Sorciers: Angles-sur-l'Anglin (Vienne), Comité des travaux historiques et scientifiques, , p. 141.
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Annexes
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- Yasmina Foehr-Janssens, Daniela Solfaroli Camillocci (dir.), Allaiter. Histoire/s et cultures d'une pratique, études rassemblées par Francesca Arena, Véronique Dasen, Yasmina Foehr-Janssens, Irene Maffi, Daniela Solfaroli Camillocci, Brepols 2020, 2 volumes (à paraßtre, oct. 2020).
Filmographie
- Conseils aux nouvelles mamans : soins aux nouveau-nés, film documentaire réalisé par Patricia Gugelot, Assistance publique HÎpitaux de Paris, Paris, 1998, 23 min (VHS)
- Le Lait, c'est sein..., film documentaire réalisé par Olivier Frei, Centre hospitalier universitaire vaudois. Centre d'enseignement médical et de communication audiovisuelle, Lausanne, 2001, 23 min (VHS)
- Allaiter : une relation fondamentale, film documentaire réalisé par Alain Casanova et Monique Saladin, DID, Paris, 2004, 310 min (2 DVD)
- Allaiter, ça fait mal ?, conférence de Régine Prieur (25 min) dans Ces bébés qui nous font mal, 2e journée Spirale, Ramonville, 27-, films documentaires réalisés par Patrick Ben Soussan, ErÚs, Toulouse, 2008 (série de 5 DVD)
Articles connexes
Liens externes
- [PDF] Guide de l'allaitement maternel, INPES
- [PDF] Allaitement maternel, les bénéfices pour la santé de l'enfant et de sa mÚre par le ministÚre français des Solidarités, de la Santé et de la Famille et l'Agence française de pédiatrie
- Code international de commercialisation des substituts du lait maternel
- Page de référence de l'OMS sur l'allaitement
- Dicopolhis