Oméga-3
Les acides gras omĂ©ga-3, notĂ©s Ă©galement Ï3 (ou encore n-3), sont des acides gras polyinsaturĂ©s que l'on trouve en grande quantitĂ© dans certains poissons gras (principalement les salmonidĂ©s tels que le saumon ou la truite mais aussi l'anchois, le hareng, le maquereau et la sardine), dans les graines de chia, le lin, la noix, la cameline, le colza et le soja. Des rĂ©gimes alimentaires apportant une bonne quantitĂ© de ces aliments riches en omĂ©ga-3 sont le rĂ©gime mĂ©diterranĂ©en, le rĂ©gime palĂ©olithique et le rĂ©gime Okinawa.
Les omĂ©ga-3 et les omĂ©ga-6 sont classĂ©s acides gras essentiels car l'organisme humain en a absolument besoin et ne peut les produire lui-mĂȘme ; il doit donc les trouver tels quels dans son alimentation. On commença Ă les Ă©tudier dĂšs les annĂ©es 1970, Ă©poque oĂč ils furent appelĂ©s provisoirement « vitamine F ». Aujourd'hui ils ne sont plus classĂ©s parmi les vitamines, du fait de la quantitĂ© journaliĂšre recommandĂ©e, entre deux et trois grammes par jour en moyenne pour l'adulte, bien supĂ©rieure aux apports en vitamines.
Chimie
Les acides gras oméga-3 sont dits polyinsaturés car leur chaßne carbonée comprend plusieurs liaisons doubles[1].
Le terme « oméga-3 » vient du fait que la premiÚre double liaison de la chaßne carbonée de l'acide, en comptant depuis l'extrémité opposée au carboxyle, est située sur la troisiÚme liaison carbone-carbone.
Les principaux acides gras du groupe oméga-3 sont :
- l'acide alpha-linolĂ©nique ou Ï3α (18:3 ; ALA) ;
- l'acide eicosapentaénoïque (20:5 ; EPA) ou acide timnodonique ;
- l'acide docosahexaénoïque (22:6 ; DHA) ou acide cervonique.
Les nombres entre parenthĂšses signifient que ces trois acides ont respectivement 3, 5 et 6 doubles liaisons dans leur chaĂźne composĂ©e de 18, 20 et 22 atomes de carbone. Toutes ces doubles liaisons sont en configuration cis (« du mĂȘme cĂŽtĂ© »), c'est-Ă -dire que leurs deux atomes d'hydrogĂšne se trouvent du mĂȘme cĂŽtĂ© du plan formĂ© par la double liaison carbone-carbone.
Ces doubles liaisons cis séparées par un groupe méthyle donnent une forme hélicoïdale à l'acide cervonique qui en possÚde six.
MĂ©canismes d'action
Les omĂ©ga-3 peuvent ĂȘtre transformĂ©es[2], par intermĂ©diaire de la cyclooxygĂ©nase et de la lipoxygĂ©nase en diffĂ©rentes molĂ©cules servant comme agents de signalisation comme les prostaglandines, les thromboxanes ou les leucotriĂšnes[3]. D'autres composĂ©s produits ont un rĂŽle anti-inflammatoire[4] et anti thrombotique. Les omĂ©ga-3 peuvent Ă©galement agir directement au niveau cellulaire sans subir de transformation : ils agissent ainsi sur certains canaux ioniques[5], ce qui pourrait diminuer le risque de troubles du rythme cardiaque[6].
Conversion de l'ALA en EPA et DHA
Le corps humain peut convertir les omĂ©ga-3 Ă chaine courte nommĂ© ALA en omĂ©ga-3 Ă chaine longue nommĂ© EPA et DHA par l'action de deux enzymes appelĂ©es l'Ă©longase (qui allonge la chaĂźne carbonĂ©e de deux carbones) et la dĂ©saturase (qui crĂ©e une insaturation). La communautĂ© scientifique s'accorde assez largement sur le fait que cette conversion semble ĂȘtre faible[7] - [8] et dĂ©pend de divers facteurs comme le sexe, l'Ăąge ou encore l'Ă©quilibre entre omĂ©ga-6 et omĂ©ga-3[9] - [10] - [11] - [12]. Une Ă©tude indique Ă ce titre que ce taux de conversion est trĂšs variable, allant de 0,2 Ă 21 % pour l'EPA et de 0 Ă 9 % pour le DHA, notamment en fonction de l'apport d'acide linolĂ©ique (LA, omĂ©ga-6, qui est en concurrence avec l'ALA pour la mĂȘme dĂ©saturase) et de l'apport exogĂšne d'EPA et DHA[13].
Comme les vĂ©gĂ©tariens et les vĂ©gĂ©taliens absorbent moins ou pas d'EPA et de DHA Ă travers leur alimentation, les taux d'EPA et de DHA peuvent ĂȘtre significativement plus faibles chez ces personnes que dans le reste de la population selon l'AcadĂ©mie de nutrition et de diĂ©tĂ©tique, plus grande organisation amĂ©ricaine de nutritionnistes[14]. Cette association note toutefois que la conversion de l'ALA en EPA et DHA Ă©tait suffisante pour maintenir des taux stables pendant de nombreuses annĂ©es chez les personnes saines. L'importance clinique de ces taux plus faibles est actuellement inconnue, mais les vĂ©gĂ©taliens et vĂ©gĂ©tariens ne semblent pas souffrir de pathologies habituellement liĂ©es Ă des taux insuffisants de ces acides gras, notamment au niveau de la croissance cĂ©rĂ©brale, des yeux ou du systĂšme cardiovasculaire[14] - [15]. D'autres Ă©tudes aboutissent Ă des conclusions similaires, montrant qu'une consommation suffisante d'ALA peut permettre de rĂ©pondre aux besoins en DHA[16].
Effets physiologiques
Les oméga-3 diminuent le taux de triglycérides sanguins[17].
Plusieurs Ă©tudes montrent qu'ils ont un effet anti-inflammatoire[18] - [19]. D'autres Ă©tudes ne retrouvent pas cet effet[20].
Apport recommandé
Les apports nécessaires recommandés en oméga-3 sont de 2 grammes par jour alors que la consommation moyenne est comprise entre 0,10 et 0,20 g voire 0,60 g selon d'autres études[21].
Sources alimentaires d'oméga-3
Les omĂ©ga-3 Ă chaine courte, l'acide alpha-linolĂ©nique ou ALA, existent en grande quantitĂ© spĂ©cialement dans les plantes, comme les graines de lin, de chia, de chanvre et leur Ă©quivalent en huile ainsi que dans l'huile de colza, les noix, les algues et en quantitĂ© plus modĂ©rĂ©e dans certains lĂ©gumes verts. Les omĂ©ga-3 Ă chaine longue, l'acide eicosapentaĂ©noĂŻque ou EPA et l'acide docosahexaĂ©noĂŻque ou DHA, se trouvent uniquement dans les algues ainsi que dans les animaux marins qui sont capables dâaccumuler des EPA et DHA.
Poissons gras
Les poissons gras vivant en eaux froides sont riches en EPA et DHA. Ce sont principalement le saumon, le maquereau, le flétan, le hareng, les anchois et les sardines. Ces poissons contiennent environ sept fois plus d'oméga-3 que d'oméga-6. D'autres poissons gras comme le thon et tous les carnivores sont assez riches en oméga-3 mais sont susceptibles de contenir de fortes quantités de métaux lourds et de polluants. Les fabricants de compléments en oméga-3 éliminent ces polluants par divers procédés.
Les poissons ne synthĂ©tisent pas eux-mĂȘmes les acides gras, ils ingĂšrent des microalgues et bactĂ©ries qui en contiennent et les assimilent[22] - [23], ce qui explique pourquoi les poissons d'Ă©levage â nourris en partie avec des vĂ©gĂ©taux d'origine terrestre â contiennent moins d'omĂ©ga-3 que les poissons sauvages. De plus, de nombreux animaux invertĂ©brĂ©s (coraux, mollusques, crustacĂ©sâŠ) synthĂ©tisent des omĂ©ga-3 et pourraient ĂȘtre une source importante dans l'Ă©cosystĂšme marin[24].
NĂ©anmoins en cas de consommation de poisson surgelĂ©, au bout de 6 mois de congĂ©lation, le poisson ne contient plus d'omĂ©ga-3[25]. Il est donc important de vĂ©rifier la date de pĂȘche. Au bout de 90 jours de congĂ©lation, la truite arc-en-ciel perd 32,55 % de ses omĂ©ga-3[26].
Chanvre
Les graines de chanvre alimentaire (Cannabis sativa, aussi appelé chÚnevis) sont également une source d'oméga-3.
Avec 17 % à 19 % d'oméga-3, l'huile de chanvre est riche en oméga-3. L'huile de chanvre contient non seulement de l'ALA, comme la plupart des autres huiles végétales, mais aussi de maniÚre unique de l'acide stéaridonique (ou SDA), un autre oméga-3 de chaßne moyenne qui est assimilé plus facilement par le corps humain.
Enfin, le rapport oméga-6/oméga-3 de l'huile de chanvre est de 3/1 qui est considéré comme le rapport « idéal » (normalement entre 1 et 5).
Chia
Les graines de chia (Salvia hispanica) appartiennent Ă la famille de la menthe et de la sauge et Ă©taient consommĂ©es par les AztĂšques et les Mayas au mĂȘme titre que les fĂšves et le maĂŻs. Les graines de chia sont une bonne source d'omĂ©ga-3 vĂ©gĂ©tal. L'huile de chia contient 65 % d'omĂ©ga-3 et 20 % d'omĂ©ga-6. Les graines de chia sont elles aussi trĂšs riches en omĂ©ga-3 : 20 g de graines fournissent 4,5 g d'omĂ©ga-3.
Les graines peuvent ĂȘtre mangĂ©es entiĂšres ou moulues, selon les prĂ©fĂ©rences.
Riches en antioxydants, les graines et l'huile de chia se conservent trĂšs longtemps : 5 ans pour les graines et 1 an pour l'huile.
Lin
Le lin est une importante source vĂ©gĂ©tale d'omĂ©ga-3 et d'omĂ©ga-6. L'huile de lin est composĂ©e Ă 58 % d'ALA. Les graines de lin qui contiennent 41 % d'huile sont donc Ă©galement riches en ALA (23,5 %), 20 grammes de graines apportent 4,67 grammes d'ALA. Les graines doivent ĂȘtre moulues ou trempĂ©es afin que l'organisme puisse les assimiler.
Les graines de lin sont souvent employĂ©es dans les pains aux graines (qui sont dĂ©conseillĂ©s puisque chauffĂ©es Ă haute tempĂ©rature dans un four, l'huile se transforme alors en acide gras trans ; un conseil Ă relativiser puisque les graines de lin non moulues, mĂȘme grillĂ©es, ne sont pas digĂ©rĂ©es). Elles sont souvent employĂ©es aussi dans l'alimentation animale, enrichissant ainsi un peu le lait, la viande ou les Ćufs en omĂ©ga-3[Note 1].
Auparavant, cette huile ne se consommait sans crainte qu'en émulsion battue dans du fromage blanc, sinon elle était considérée comme hépatotoxique (pour cette raison, d'ailleurs, elle était interdite de vente en France, bien que consommée dans tous les pays alentour).
En 2009, l'Agence française de sĂ©curitĂ© sanitaire des aliments (AFSSA) a donnĂ© un avis positif Ă l'utilisation de l'huile de lin[27] en cuisine. Lâhuile de lin prĂ©sente un intĂ©rĂȘt nutritionnel en termes dâapport en acide alphalinolĂ©nique (omĂ©ga-3). Dâautre part, câest un produit commercialisĂ© depuis longtemps dans de nombreux pays (Allemagne, Canada, ChineâŠ) sans que des effets nĂ©fastes nâaient Ă©tĂ© mis en Ă©vidence. Il convient cependant que des mesures de conditionnement, de conservation et dâutilisation soient plus restrictives que les mesures existant pour les huiles vĂ©gĂ©tales plus classiques afin de limiter lâoxydation du produit, Ă savoir :
- une traçabilitĂ© des lots, de la pression des graines jusquâau conditionnement, pour optimiser le contrĂŽle de la durĂ©e de vie (ne pas dĂ©passer un an, consommation comprise) ;
- un volume de conditionnement maximal de 250 mL ;
- un inertage Ă lâazote avant dâobturer la bouteille ;
- un conditionnement en matériau opaque ;
- une durĂ©e limite dâutilisation optimale infĂ©rieure Ă 9 mois.
LâAFSSA recommande enfin des mentions dâĂ©tiquetage de l'huile de lin pour une information adĂ©quate du consommateur :
- rĂ©server Ă lâassaisonnement ;
- ne pas chauffer l'huile de lin ;
- conserver Ă lâabri de la chaleur avant ouverture ;
- conserver au réfrigérateur aprÚs ouverture ;
- ne pas conserver plus de 3 mois aprĂšs ouverture ;
- ne convient pas aux enfants de moins de 3 ans.
L'huile de lin est une huile fragile (oxydation Ă l'air et Ă la lumiĂšre), car elle ne contient pas d'antioxydants qui protĂšgent du rancissement.
Colza (canola)
Dans les années 1960, l'huile de colza a fait l'objet d'étude de nutrition sur des rats qui faisaient apparaßtre des lésions cardiaques, apparemment liées à la consommation d'huile érucique[28]. Des associations de consommateurs se sont alertées et ont demandé son interdiction, l'huile de colza a été retirée, dans la pratique, de l'alimentation humaine, ce qui a permis à l'huile de tournesol de remplacer l'huile de colza sur le marché. Depuis, l'étude sur les rats a été relativisée[Note 2] et parallÚlement, le colza a été sélectionné pour en Îter l'acide érucique. Malheureusement le nom de l'huile de colza a été associé pendant longtemps à une image de danger alimentaire, qui n'a été finalement corrigée que dans les années 2000. Le Canada décidait dans les années 1970 de dénommer canola les variétés sans acide érucique.
Il semblerait cependant que l'acide Ă©rucique, dont l'excĂšs est certes estimĂ© iatrogĂšne, participe Ă l'activation des dĂ©saturases. On sait combien ces enzymes sont importantes pour la transformation et l'intĂ©gration des chaĂźnes d'acides gras polyinsaturĂ©es et pourtant, si souvent inactivĂ©es par nombre de facteurs pouvant diminuer le bĂ©nĂ©fice d'une alimentation raisonnĂ©e. Alors, avec Ă©rucique ou sans, colza ou canola, ce peut ĂȘtre une question. Surtout depuis les annĂ©es 2000, plusieurs arguments sont avancĂ©s pour mettre en valeur l'huile de colza :
- sa faible teneur en acides gras saturés (7 %) ;
- sa teneur relativement Ă©levĂ©e en omĂ©ga-3 (9 % d'ALA), catĂ©gorie d'acides gras dont l'intĂ©rĂȘt nutritionnel a Ă©tĂ© mis en avant dans plusieurs Ă©tudes scientifiques[21], ainsi que dans des livres grand public ;
- son rapport omĂ©ga-6/omĂ©ga-3 de 1,9 (faible) permettant de se rapprocher de la valeur moyenne apportĂ©e par l'alimentation conseillĂ©e par l'AFSSA (rapport 5), les autres apports alimentaires â la graisse de bĆuf ou de canard par exemple â prĂ©sentant un rapport beaucoup plus Ă©levĂ©. L'huile de colza se classe mieux que l'huile de noix (4,2), l'huile de soja (6,9), et l'huile de germe de blĂ© (7,1). Cependant elle contribue Ă augmenter encore et de façon considĂ©rable, l'excĂšs d'omĂ©ga 6 et avec 30 % d'acides gras essentiels , elle reste sensible au chauffage.
Aux Ătats-Unis, une allĂ©gation liant la consommation d'huile de colza (canola) et la rĂ©duction des maladies cardiovasculaires a Ă©tĂ© approuvĂ©e par la FDA en 2006[29]. Une demande d'allĂ©gation similaire a cependant Ă©tĂ© rejetĂ©e par l'EFSA[30], mais l'EFSA a reconnu certaines allĂ©gations pour les omĂ©ga-3 (voir ci-dessous).
Noix
Les noix, et donc l'huile de noix, renferment également beaucoup d'oméga-3 (10,3 % dans l'huile). Mais, à la différence de l'huile de colza dont ~ 70 % sont des oméga-9, ici, dans l'huile de noix, ces 70 % sont des oméga-6 dont il convient de limiter les apports : schématiquement, huile de noix : oméga-3 10 %, oméga-6 70 %, divers 20 %⊠(huile de colza : oméga-3 10 %, oméga-9 70 %, divers 20 %). Cette nuance est importante dans la construction de la ration.
Autres huiles alimentaires
D'autres huiles sont riches en oméga-3 mais moins courantes : huile de germe de blé, huile de soja, huile de cameline, huile de phoque, huile de perilla (autorisée en France depuis 2008), ainsi que l'huile de sauge sclarée.
LĂ©gumes verts
Les lĂ©gumes verts Ă feuilles (mĂąche, chou, laitueâŠ) contiennent de 200 Ă 375 mg d'ALA pour 100 g.
Microalgues
Seules les microalgues sont capables de synthétiser l'EPA et le DHA parmi les végétaux[31]. Elles sont à la base de toute la chaßne alimentaire des océans.
Parmi les microalgues non océaniques, la spiruline (une cyanobactérie classée dans les algues bleues) Arthrospira est une source parfois intéressante d'oméga-3 (elle n'est pas présente dans tous les échantillons analysés)[32]. Parmi les microalgues océaniques, Aurantiochytrium détient le record de DHA oméga-3 (39 % d'oméga-3 DHA dans l'huile extraite de cette microalgue), tandis qu'en moyenne 13 % (de 0 à 50) des lipides totaux des microalgues rouges sont constitués d'oméga-3 EPA ou DHA[33] - [34]
Depuis le 31 mars 2015, la Commission européenne autorise la mise sur le marché d'huile à teneur élevée en DHA extraite de la microalgue Schizochytrium sp[35].
Les huiles de microalgues sont utilisĂ©es depuis quelques annĂ©es comme bases d'additifs pour formules de laits pour bĂ©bĂ©s enrichis en DHA qui permettent de les rapprocher du lait maternel oĂč cet d'omĂ©ga-3 est prĂ©sent naturellement car transmis par la mĂšre qui le prĂ©lĂšve dans son organisme.
Plantes génétiquement modifiées
Des travaux sont en cours au Royaume-Uni pour essayer de produire du DHA et de l'EPA à partir de plantes génétiquement modifiées.
Produits de l'industrie agroalimentaire et de l'Ă©levage intensif
Selon Jean-Luc Porquet, journaliste au Canard enchaĂźnĂ©, les aliments issus de l'industrie agroalimentaire ont massivement recours Ă des huiles vĂ©gĂ©tales bon marchĂ© trĂšs riches en omĂ©ga-6 (huile de tournesol, huile de palme...). De mĂȘme, le bĂ©tail industriel est nourri, Ă la place de l'herbe riche en omĂ©ga-3, par des granules de maĂŻs et de soja riches en omĂ©ga-6, de sorte que le rapport omĂ©ga3/omĂ©ga6 de la viande et du lait industriels est de plus en plus dĂ©sĂ©quilibrĂ©[36].
Effets bénéfiques supposés sur la santé
Les Ă©tudes scientifiques rĂ©centes essaient de dĂ©terminer si les effets sur la santĂ© peuvent ĂȘtre reliĂ©s Ă un apport insuffisant d'omĂ©ga-3 ou Ă un dĂ©sĂ©quilibre du rapport omĂ©ga-6/omĂ©ga-3. Le rĂŽle bĂ©nĂ©fique a Ă©tĂ© suspectĂ© dans les annĂ©es 1970 en constatant la faible prĂ©valence des maladies cardiovasculaires chez les inuits, gros consommateurs d'acides gras polyinsaturĂ©s[37].
Effet de l'apport en oméga-3
La plupart des Ă©tudes testent l'intĂ©rĂȘt global des omĂ©ga-3 sans diffĂ©rencier ses principaux composants (ALA, EPA, DHA). Certaines testent l'huile de poisson sans qu'il soit exclu qu'un autre composĂ© de cette derniĂšre puisse ĂȘtre responsable de l'effet dĂ©crit.
Mortalité générale
Une méta-analyse utilisant les données au niveau individuel de 17 cohortes a examiné les associations entre les niveaux circulants des acides gras polyinsaturés oméga-3 et la mortalité[38]. AprÚs avoir pris en compte d'autres facteurs de risque importants, il a été constaté que les oméga 3 à longue chaßne (mais pas l'ALA) étaient associés à un risque de mortalité générale d'environ 15 à 18 % plus faible en comparant les quintiles supérieur et inférieur[38].
CĆur
Au niveau cellulaire, les oméga-3 interviendraient sur différents canaux ioniques, modifiant les propriétés électrophysiologiques des cellules cardiaques et diminuant, par ce biais, le risque de mort subite[39].
Dans les annĂ©es 1990, une Ă©tude[40] a rĂ©vĂ©lĂ© les bienfaits des acides gras du groupe omĂ©ga-3 dans le cadre de rĂ©gimes dĂ©ficients ou carencĂ©s ; la dose quotidienne d'un rĂ©gime europĂ©en Ă©tait entre 1 et 2 grammes/jour, alors que les omĂ©ga-3, acides gras essentiels, sont nĂ©cessaires Ă la construction de la membrane cellulaire et des tissus du cerveau chez l'enfant. Les omĂ©ga-3 Ă©taient censĂ©s limiter les accidents vasculaires et sont donc proposĂ©s en complĂ©ment pour la prĂ©vention des infarctus du myocarde ; l'Ă©tude GISSI IV[41], publiĂ©e en 1999, montre qu'une supplĂ©mentation artificielle en omĂ©ga-3 (sous forme de gĂ©lules) chez des patients ayant fait rĂ©cemment un infarctus du myocarde diminue sensiblement leur mortalitĂ©. Cela n'a cependant pas Ă©tĂ© confirmĂ© par une Ă©tude plus rĂ©cente[42], peut-ĂȘtre en partie par une meilleure prise en charge des patients[43]. De mĂȘme, l'utilisation d'une margarine enrichie en omĂ©ga-3 ne semble pas influencer le pronostic des patients nĂ©erlandais ayant fait un infarctus[44]. Mais cette Ă©tude (Alpha Omega Trial), de par sa conception, pourrait minimiser les bienfaits des omĂ©ga-3[45]. Chez d'autres patients ayant un antĂ©cĂ©dent de maladie cardiovasculaire (en dehors de la phase aigĂŒe), l'ajout d'omĂ©ga-3 dans l'alimentation n'a pas apportĂ© de bĂ©nĂ©fice pour les accidents cardiaques[46] - [47]. Chez le patient tout-venant (sans antĂ©cĂ©dent cardiaque), l'intĂ©rĂȘt de la supplĂ©mentation n'est Ă©galement pas dĂ©montrĂ©, du moins en ce qui concerne le risque cardiovasculaire[48].
D'autres études tendent à souligner que si un effet sur la pression artérielle, les taux de triglycérides et de cholestérol est démontré[49] - [50], l'effet sur la mortalité par maladies cardiovasculaires semble lui faible[51]. Cependant, une méta-analyse publié en 2022 recommande l'incorporation d'une supplémentation en acide eicosapentaénoïque (EPA) dans les recommandations officiels au sujet de la prévention secondaire des événements cardiovasculaires majeurs[52]. Une autre méta-analyse a en effet montré que la mortalité baisse de 18 % avec l'EPA seul contre seulement 6 % avec une supplémentation combinée d'EPA et de DHA[53].
Une action bénéfique sur la fibrillation atriale n'a pas été confirmée[54]. Une supplémentation modérée est recommandée dans l'insuffisance cardiaque[55].
Santé générale
Les Ă©tudes concluant au bĂ©nĂ©fice d'une supplĂ©mentation en omĂ©ga-3 sont de plus en plus nombreuses, mais la plupart Ă©tudient l'influence d'une alimentation riche en ces acides gras polyinsaturĂ©s essentiels, et d'autres facteurs peuvent influencer les rĂ©sultats (richesse en fibres, en vitaminesâŠ). Une Ă©tude montrait pourtant que, aprĂšs Ă©tude des donnĂ©es relatives Ă 48 essais alĂ©atoires et contrĂŽlĂ©s et Ă 41 Ă©tudes de cohortes, « les omĂ©ga-3 ne montrent qu'un lĂ©ger bĂ©nĂ©fice sur la mortalitĂ© totale, les Ă©vĂ©nements cardiovasculaire ou le cancer[56]. »
Depuis, de nombreuses Ă©tudes[57] - [58] - [59] (plus de 142) ont dĂ©montrĂ© les effets positifs d'une alimentation riche en omĂ©ga-3 dans l'amĂ©lioration de la santĂ© gĂ©nĂ©rale (prĂ©vention de la DMLA, baisse de l'hypertension, amĂ©lioration cognitive[60]âŠ) et dans la santĂ© cardiovasculaire en particulier[61] - [62].
Les effets d'une carence en omĂ©ga-3 sont documentĂ©s, en particulier sur la vision[63], et sur les comportements dĂ©pressifs[64]. Les symptĂŽmes d'une carence en omĂ©ga-3 sont la fatigue, une mauvaise mĂ©moire, une peau sĂšche, des problĂšmes cardiaques, des sautes d'humeur ou une dĂ©pression, et une mauvaise circulation[65]. Les effets d'une supplĂ©mentation en omĂ©ga-3 pourraient n'ĂȘtre liĂ©s qu'Ă la correction des carences dans les populations-cibles[66] - [67]. Il semble exister une corrĂ©lation entre longueur des tĂ©lomĂšres (longueur mesurĂ©e dans les tĂ©lomĂšres de leucocytes, et qui a moins diminuĂ© sur 5 ans, chez les patients de l'Ă©tude) et le taux sanguin en omĂ©ga-3 d'origine marine, sans pouvoir prouver de lien de cause Ă effet (un effet antioxydant pourrait peut-ĂȘtre ĂȘtre en cause)[68].
DiabĂšte
Selon une étude de cohorte publiée en 2022, la mortalité des personnes diabétiques qui consomment le plus de DHA et d'EPA est 25 % plus faible que celle des personnes diabétiques qui en consomment le moins[69].
Santé mentale
La supplémentation en omégas 3 a prouvé son efficacité dans la dépression dans de nombreuses méta-analyses[70], en particulier à des doses supérieures à 1 gramme d'EPA par jour[71]. Toutefois, la supplémentation en oméga-3 chez un sujet sain ne semble pas avoir de vertu préventive sur la dépression[72].
Il y a des indications qui montrent que la consommation accrue de poisson peut ĂȘtre associĂ©e Ă une rĂ©duction du risque de la maladie d'Alzheimer[70].
Grossesse, allaitement et petite enfance
Des recherches ont suggéré que la supplémentation en oméga-3 pendant la grossesse peut avoir des effets bénéfiques contre la pré-éclampsie, un faible poids à la naissance, l'accouchement prématuré et la dépression post-partum, et peut améliorer les mesures anthropométriques, le systÚme immunitaire et l'activité visuelle chez les nourrissons et les facteurs de risque cardiométabolique chez les femmes enceintes[73].
Allégations de santé reconnues au niveau européen
Dans le cadre de la révision des allégations de santé prévue par le RÚglement 1924/2006, l'EFSA a examiné les propositions d'allégations de santé, a rejeté les effets sur la tension artérielle et l'humeur[74], sur le développement du cerveau chez l'enfant[75] mais a reconnu un effet sur la réduction du cholestérol[76], des bénéfices au remplacement d'acides gras saturés par des insaturés sur la teneur en cholestérol[77] et ultérieurement des effets sur le développement du cerveau[78].
Ratio oméga-6 / oméga-3
L'AFFSA (devenu ANSES) a effectuĂ© un examen assez exhaustif des Ă©tudes scientifiques portant sur le rapport omĂ©ga-6/omĂ©ga-3, en supposant que ce rapport est dĂ©sĂ©quilibrĂ© dans l'alimentation moderne. L'Ă©tude AFFSA recommande un rapport de 5[21]. Cependant ce rapport de 5 n'est pas basĂ© sur une Ă©tude scientifique mais doit plutĂŽt ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un objectif (de diminution du rapport actuel). D'autres Ă©tudes mentionnent un rapport idĂ©al de 1 approximativement, en se basant sur la diĂšte du palĂ©olithique[79] - [80]. Selon l'AFSSA, l'alimentation moderne apporte un ratio de 10 environ.
Un modÚle animal montre un effet néfaste (obésité) d'une alimentation basée sur un mauvais ratio oméga-6 / oméga-3[81], qui semble se transmettre de génération en génération[82].
Chez l'ĂȘtre humain, une plus grande consommation d'omĂ©ga-3 et un meilleur rapport omĂ©ga-6/omĂ©ga-3 pendant la grossesse induit une moindre frĂ©quence de l'obĂ©sitĂ© chez les enfants[83].
Risques connus ou suspectés des oméga-3 en cas d'excÚs
Bien que l'apport en oméga-3 soit nettement insuffisant dans les sociétés industrialisées, un excÚs d'oméga-3 peut avoir des effets néfastes :
- des taux plus élevés de cholestérol LDL, parfois grossiÚrement appelé « mauvais cholestérol » ;
- une baisse de la glycémie, surtout chez les diabétiques ;
- une baisse des réponses immunitaires et inflammatoires (car ils sont anti-inflammatoires).
Pour ces raisons, la FDA (Food and Drug Administration) des Ătats-Unis d'AmĂ©rique recommande une consommation maximum d'omĂ©ga-3 EPA et DHA de 3 g par jour, dont un maximum de 2 g par jour provenant de supplĂ©ments alimentaires[84]. Cette recommandation est aussi Ă©tablie dans l'Union europĂ©enne par lâEFSA[85], et en France par lâAFSSA[86], mais non pas en tant que complĂ©ment alimentaire mais comme substitut dans le cadre dâune alimentation normale Ă©quilibrĂ©e.
La consommation actuelle dans les pays dĂ©veloppĂ©s est loin en dessous du minimum. Lâagence française recommande un rapport omĂ©ga-6/omĂ©ga-3 proche de 5 (aujourd'hui en France, les apports alimentaires en omĂ©ga-3 sont trĂšs insuffisants, avec un rapport moyen souvent au-delĂ de 10-12, et parfois 80 dans les rĂ©gimes alimentaires trĂšs dĂ©sĂ©quilibrĂ©s en AmĂ©rique du Nord, au Royaume-Uni ou au Danemark) ; cependant, elle recommande de ne pas en faire une publicitĂ© permettant de faire croire qu'une complĂ©mentation de l'alimentation aurait un bĂ©nĂ©fice pour la santĂ©, car cela conduirait Ă augmenter la consommation totale d'acides gras (qui est dĂ©jĂ trop Ă©levĂ©e).
De plus, les taux Ă recommander sont Ă rapprocher de la composition des rĂ©gimes alimentaires, des modes de prĂ©paration, et de nombreuses inconnues subsistent encore sur la persistance des propriĂ©tĂ©s bĂ©nĂ©fiques des omĂ©ga-3 dans les huiles alimentaires, et sur leur dĂ©gradation possible en composĂ©s volatils toxiques avec des mĂ©thodes de fabrication ou de prĂ©paration inadaptĂ©es, qui peuvent en plus empĂȘcher leur assimilation.
Les huiles riches en omĂ©ga-3 ne sont donc pas destinĂ©es Ă la friture, mais plutĂŽt Ă l'assaisonnement ou Ă une cuisson lĂ©gĂšre[87]. L'amĂ©lioration du rapport omĂ©ga-6/omĂ©ga-3 ne doit pas se faire en rĂ©duisant lâapport en omĂ©ga-6 pour les remplacer par des acides gras saturĂ©s ou acides gras insaturĂ©s trans, comme ont tentĂ© de le faire certains industriels. Des normes sont en cours dâĂ©laboration par les autoritĂ©s sanitaires françaises et europĂ©ennes qui ont Ă©tĂ© saisies par les organisations de consommateurs pour statuer sur leur Ă©ventuel niveau de toxicitĂ© ou leur rĂ©elles vertus, pour tenter de dĂ©finir des seuils raisonnables de consommation journaliĂšre et mettre en place une information vĂ©rifiable Ă destination des consommateurs, et enfin pour certifier les mĂ©thodes de mesure de taux qui sont encore beaucoup trop variables dâun laboratoire Ă un autre (ce qui peut ĂȘtre utilisĂ© abusivement par certains industriels de lâagroalimentaire).
Les margarines riches en oméga-3 ne sont pas destinées à la cuisson, surtout si elles sont allégées et contiennent donc de l'eau.
Cuisson des huiles polyinsaturées
Les huiles polyinsaturĂ©es (riches en omĂ©ga-3 ou en omĂ©ga-6) comme l'huile de colza et l'huile de tournesol peuvent ĂȘtre utilisĂ©es pour la cuisson sous les conditions suivantes :
- elles ne doivent pas atteindre leur point de fumée, au-delà duquel l'huile se dégrade en glycérol et en acide gras, avec production d'acroléine et de benzopyrÚne toxiques. à cet effet, on utilisera de préférence une huile raffinée dont le point de fumée est plus élevé que les huiles vierges de premiÚre pression ;
- elles ne doivent pas ĂȘtre utilisĂ©es pour la friture rĂ©pĂ©tĂ©e, les polyinsaturĂ©s se dĂ©gradant aux hautes tempĂ©ratures par oxydation, et aussi au contact des aliments contenus dans le bain de friture.
Les huiles de noix, de noisette, de lin ne doivent pas ĂȘtre chauffĂ©es.
Notes et références
Notes
- DĂ©marche connue sous la marque « Bleu Blanc CĆur ».
- La proportion d'acide Ă©rucique dans la diĂšte des rats reprĂ©sentait plus de 20 %, ce qui reprĂ©sente le chiffre des apports lipidiques moyens en nutrition humaine. L'acide Ă©rucique reprĂ©sentait alors 30 Ă 60 % des acides gras du colza, qui n'Ă©tait pas la principale source de lipide Ă l'Ă©poque. Aucun effet n'a jamais Ă©tĂ© prouvĂ© sur l'ĂȘtre humain.
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Annexes
Articles connexes
Liens externes
- Ressources relatives à la santé :
- (en) Medical Subject Headings
- (en) PatientLikeMe
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :