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Huile de palme

L’huile de palme est une huile vĂ©gĂ©tale extraite de la pulpe des fruits du palmier Ă  huile (Elaies guineensis), un arbre originaire d'Afrique tropicale dont est aussi tirĂ©e l’huile de palmiste, extraite du noyau de ses fruits.

Huile de palme
Image illustrative de l’article Huile de palme
Huile de palme au Ghana.
Identification
No CAS 8002-75-3
No ECHA 100.029.376
No CE 232-316-1
Propriétés chimiques
Indice d’iode 44 – 58[1]
Indice d’acide 10[2]
Indice de saponification 195 – 205[1]
MatiĂšres non saponifiables 0,5 %[1]
Acides gras libres 3 % Ă  5 %[1]
Propriétés physiques
T° fusion 36 à 40 °C[1]

j

Propriétés optiques
Indice de rĂ©fraction 1,453 – 1,456[1]

Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.

L'IndonĂ©sie et la Malaisie sont aujourd'hui les principaux pays producteurs mondiaux de ce fruit, et concentrent Ă  eux deux plus de 85 % de la production. Avec plus de 50 millions de tonnes produites chaque annĂ©e, c'est l'huile vĂ©gĂ©tale la plus consommĂ©e au monde (35 % de la consommation mondiale en 2017). IngrĂ©dient traditionnel des cuisines d'Afrique, d'AmĂ©rique du Sud et d'Asie, elle est actuellement massivement utilisĂ©e dans les pays non producteurs pour la fabrication d'aliments transformĂ©s, en remplacement des graisses animales (saindoux, beurre
) et des huiles vĂ©gĂ©tales hydrogĂ©nĂ©es (dites trans). À ce titre, elle est aussi devenue Ă  la fin du XXe siĂšcle et au dĂ©but du XXIe siĂšcle l'un des symboles des problĂšmes ou limites rencontrĂ©s par l'agroindustrie monoculturale et le « capitalisme agraire ».

Il existe des controverses au sujet de son effet sur la santé, ainsi que sur les conséquences de sa production sur l'environnement et des conditions de travail liées à la culture des palmiers à huile. Certains critiquent sa haute teneur en acides gras saturés. De fait, une méta-analyse reprenant toutes les études scientifiques publiées sur le sujet conclut en 2015 que l'huile de palme a un impact négatif sur le taux de cholestérol semblable à celui des graisses animales, pas beaucoup plus faible que celui des graisses hydrogénées, et bien plus fort que celui des huiles végétales riches en acides gras insaturés (olive, arachide, etc.).

Les ONG dĂ©noncent, quant Ă  elles, le dĂ©veloppement des plantations de palmiers Ă  huile, car il entraĂźne une importante dĂ©forestation en Malaisie, IndonĂ©sie et Papouasie-Nouvelle-GuinĂ©e, et constitue une grave menace pour diverses espĂšces animales vivant dans ces forĂȘts et dĂ©jĂ  en danger d'extinction (orangs-outans, gibbons, tigres
). Cependant, le palmier Ă  huile produit beaucoup plus par hectare que les huiles concurrentes (colza, tournesol, soja), donc le remplacer par celles-ci engendrerait encore plus de dĂ©forestation.

Plus récemment, Amnesty International a publié un rapport dénonçant le travail des enfants et le travail forcé dans les plantations d'Indonésie.

Histoire

Palmier Ă  huile (Elaeis guineensis).
Un homme cueillant un régime de graine de palme en CÎte d'Ivoire.

L'usage alimentaire et mĂ©dicinal d'huile de palme remonte au moins Ă  5 000 ans, comme l'attestent des fouilles archĂ©ologiques en Égypte[3]. Les palmiers Ă  huile sont probablement originaires des forĂȘts tropicales humides de l'Afrique de l'Ouest, oĂč ils sont exploitĂ©s localement avant d'ĂȘtre introduits en Égypte par des commerçants arabes[4] et au BrĂ©sil par les colons portugais au XVe siĂšcle[5].

Les noix de palme (en) servaient Ă  nourrir les esclaves objets du commerce triangulaire[6].

Les marchands europĂ©ens commercent avec l'Afrique mais l'huile de palme n'est qu'occasionnellement importĂ©e en Europe, oĂč elle sert d'huile de cuisson ou bien est utilisĂ©e pour la fabrication du savon et des chandelles[7]. Son commerce s'y dĂ©veloppe surtout Ă  la fin du XVIIIe siĂšcle, la rĂ©volution industrielle en faisant usage comme lubrifiant mĂ©canique, notamment dans les chemins de fer. Son usage en Europe augmente encore lorsque les rĂ©sidus de noix de palme sont donnĂ©s comme nourriture au bĂ©tail et que l'huile de palme entre dans la fabrication de produits pharmaceutiques[8]. L'arachide du Sahel, arrivant Ă  Marseille, va alors rivaliser avec les palmistes du Golfe de GuinĂ©e arrivant Ă  Liverpool.

En 1851, le roi Sodji de Porto-Novo signe un traité de commerce et d'amitié avec la France pour l'huile de palme[9]. Il fait planter de nouvelles palmeraies au nord de Porto-Novo, sur les conseils des négociants afro-brésiliens qui tirent bénéfice des Traites négriÚres, réprimée par le British African Squadron[10]. Il fait planter de nouvelles palmeraies au nord de Porto-Novo, dont les savonneries marseillaises seront le débouché.

La fin en 1864 du protectorat français créé par roi Sodji de Porto-Novo est une étape importante dans l'Histoire de la culture de l'arachide car les palmeraies ainsi mises en orbite dans le commerce colonial français en sortent peu aprÚs, obligeant à trouver de nouvelles matiÚres premiÚres pour les savonneries marseillaises qui en avaient profité.

Vers 1870, l'huile de palme constitue la principale exportation de certains pays d'Afrique de l'Ouest, comme le Ghana et le Nigeria[8]. En 1885, William Lever fabrique à Liverpool à échelle industrielle du savon à base d'huile de palme qu'il importe d'Afrique de l'Ouest[11]. Sa fabrique de savon Lever Brothers est devenue par la suite la multinationale Unilever. Jusqu'au XIXe siÚcle, l'éclairage est assuré par des bougies en suif dangereuses et à la combustion ùcre. Les travaux scientifiques de Michel-EugÚne Chevreul conduisent au remplacement de ces chandelles par des bougies stéariques, notamment à base d'huile de palme comme en fabrique depuis cette époque l'entreprise londonienne Price's Candles (en)[12].

En 1854, Price's Candles brevette un procédé de distillation de l'huile de palme qui permet de produire la glycérine utilisée dans de nombreuses compositions pharmaceutiques et cosmétiques et dans les pellicules de photos : la nitroglycérine. Néanmoins l'huile de palme est progressivement supplantée par les huiles minérales et les dérivés du pétrole.

Elle refait une percĂ©e au dĂ©but du XXe siĂšcle dans le domaine de l'industrie alimentaire, qui est aujourd'hui son principal dĂ©bouchĂ© en raison de son faible coĂ»t de production et de ses propriĂ©tĂ©s physiques et chimiques (bonne conservation, stable Ă  haute tempĂ©rature, richesse en ÎČ-carotĂšne)[13].

En 1981, les insectes Elaeidobius kamerunicus qui sont les seuls à polliniser les palmiers sont introduits en Malaisie et Indonésie permettant la culture à grande échelle de celui-ci[14].

Composition

L'huile vierge de palme est de couleur rouge Ă  orange, en raison de sa trĂšs forte concentration en carotĂ©noĂŻdes[15]. À tempĂ©rature ambiante, elle est gĂ©nĂ©ralement semi-solide du fait de la forte proportion d'acides gras saturĂ©s[15]. Lorsqu'elle est raffinĂ©e pour des usages en agroalimentaire ou en cosmĂ©tique, l'huile de palme est de couleur dorĂ©e, voire ivoire ou blanche[16].

L'huile de palme brute, de couleur rouge (non raffinĂ©e, ni traitĂ©e) est considĂ©rĂ©e comme l'aliment naturel le plus riche en Alpha et ÎČ-carotĂšne : (500 Ă  700 mg/kg), elle en contient environ 15 fois plus que la carotte. Cette particularitĂ© a Ă©tĂ© utilisĂ©e au Burkina Faso pour lutter contre les carences en vitamine des populations (le ÎČ-carotĂšne pouvant se transformer dans le corps en vitamine A)[17]. C'est Ă©galement la deuxiĂšme huile la plus riche en vitamine E (tocophĂ©rols et tocotriĂ©nols[18]), aprĂšs l'huile de germe de blĂ©. Cette richesse en ÎČ-carotĂšne et en vitamine E de l'huile de palme vierge, disparaĂźt aprĂšs raffinage, chauffage et cuisson. Ces nutriments n'existent plus ou sont trĂšs fortement diminuĂ©s dans l'huile de palme classique.

Principaux acides gras (proportions moyennes)[19] :

ComposĂ©Famille d'acide grasTeneur pour 100 g
Acide laurique (saturĂ©) 0,1 g
Acide myristique (saturé) g
Acide palmitique (saturĂ©) 43,5 g
Acide stĂ©arique (saturĂ©) 4,3 g
Acide Ă©rucastique (mono-insaturĂ©) ω-9 0,1 g
Acide olĂ©ique (mono-insaturĂ©) ω-9 36,6 g
Acide palmitolĂ©ique (mono-insaturĂ©) ω-7 0,3 g
Acide linolĂ©ique (poly-insaturĂ©) ω-6 9,3 g
Acide alpha-linolĂ©nique (poly-insaturĂ©) ω-3 0,2 g
Acides gras trans -
Total acides gras saturĂ©s 49,3 g
Total acides gras mono-insaturĂ©s 37 g
Total acides gras poly-insaturĂ©s 9,3 g
Vitamine E 15,94 mg
Vitamine K 8 ”g

Sa richesse en acides gras saturĂ©s la rend solide et mallĂ©able Ă  tempĂ©rature ambiante, son point de fusion se situe entre 35 °C et 42 °C. De ce fait, c’est une graisse vĂ©gĂ©tale (comme le beurre de cacao) et non une huile[20].

Usages

Extraction de l'huile de palme au Cameroun.

À l'Ă©chelle mondiale, l’huile de palme est principalement utilisĂ©e dans l’industrie alimentaire (prĂšs de 70 %), dans l’olĂ©ochimie (savon, cosmĂ©tiques
) et en tant qu’agrocarburant (plus de 20 %). En Europe, la moitiĂ© des importations d'huile de palme servent Ă  fabriquer les biocarburants ; en France, cette part est mĂȘme de 60 %[21]. Avec plus de 50 millions de tonnes produites chaque annĂ©e, c'est l'huile vĂ©gĂ©tale la plus consommĂ©e au monde (35 % de la consommation mondiale en 2017)[22].

Usage alimentaire

70 % de l'huile de palme consommée dans le monde en 2018 l'est pour un usage alimentaire, mais en Europe cette part est inférieure à 50 %[21].

IngrĂ©dient traditionnel des cuisines d'Afrique, d'AmĂ©rique du Sud et d'Asie, elle est actuellement massivement utilisĂ©e dans les pays non producteurs pour la fabrication d'aliments transformĂ©s, en remplacement des graisses animales (saindoux, beurre
) et des huiles vĂ©gĂ©tales hydrogĂ©nĂ©es (dites trans) dĂ©jĂ  interdites pour l'alimentation aux États-Unis[23] et trĂšs limitĂ©es depuis 2021 en Europe[24] . À ce titre, elle est aussi devenue Ă  la fin du XXe siĂšcle et au dĂ©but du XXIe siĂšcle l'un des symboles des problĂšmes ou limites rencontrĂ©s par l'agroindustrie monoculturale et le « capitalisme agraire »[25] - [26].

Usages traditionnels

Les traces les plus anciennes d'huile de palme remontent Ă  cinq mille ans. Elles ont Ă©tĂ© retrouvĂ©es sur une jarre en terre dans une tombe d'Abydos, en Égypte.

L’huile de palme rouge (ou orangĂ©e) est utilisĂ©e traditionnellement dans les pays producteurs d’Asie, d’Afrique et du BrĂ©sil[27].

Elle entre notamment dans la composition de plusieurs plats traditionnels : le moqueca de peixe (Brésil), l'aloco, attiéké rouge (CÎte d'Ivoire), la sauce graine, (CÎte d'Ivoire) et l'eru, le taro sauce jaune, le ekwan, l'okok, le koki (Cameroun)

Usages industriels

Afin de remplacer les graisses animales plus chĂšres et difficiles Ă  travailler (comme le beurre), l'agro-industrie a utilisĂ© les huiles vĂ©gĂ©tales hydrogĂ©nĂ©es (comme celles prĂ©sentes dans certaines margarines). Or, le processus d'hydrogĂ©nation induit la formation d'acides gras trans, reconnus comme contribuant aux maladies cardiovasculaires[28] - [29]. Les industriels se sont alors tournĂ©s vers l’huile de palme, qui possĂšde, une fois raffinĂ©e, des qualitĂ©s physiques et organoleptiques satisfaisantes pour la fabrication de nombreux aliments :

  • avec sa forte concentration d'acides gras saturĂ©s (50 %), l'huile de palme reste solide Ă  tempĂ©rature ambiante ce qui permet de limiter l'emploi de graisses hydrogĂ©nĂ©es ;
  • elle est gĂ©nĂ©ralement plus stable Ă  la cuisson que d'autres huiles ;
  • elle n'a pas de goĂ»t ni d'odeur une fois dĂ©sodorisĂ©e[30] ;
  • elle permet une bonne conservation du produit fini.

Ces diffĂ©rentes qualitĂ©s font que l’huile de palme est trĂšs apprĂ©ciĂ©e par les industriels, qui la jugent difficilement substituable d'un point de vue technique, pour certaines de leurs productions.

Bien que cela ne soit pas mis en avant dans l'information au consommateur, on trouve de l'huile de palme dans un grand nombre de produits élaborés par l'industrie agro-alimentaire, en général uniquement désignée comme « huile végétale » dans la liste des ingrédients : chips, croûtons, soupes lyophilisées, pùtes à tartiner, biscuits, lait pour bébé, sardines en boßte, bouillon de poulet instantané, mayonnaise, sauce tomate, céréales, chocolat, glaces, fromage rùpé, fromages analogues, sauces, crÚmes fraiches, pùtes à tartes, plats préparés, sauces pré-faites, biscottes, brioches, biscuits salés et sucrés, etc.[31].

Oléo chimie

Fabrication du kabakrou, savon artisanal de CĂŽte d'Ivoire.

L'huile de palme est Ă©galement utilisĂ©e dans la synthĂšse de nombreux produits cosmĂ©tiques. C'est le cas par exemple de certains savons, oĂč elle est utilisĂ©e pour la saponification. Le composĂ© est alors appelĂ© sodium palmate (et sodium palm kerenelate dans le cas de l'huile de palmiste). Elle est Ă©galement utilisĂ©e pour la parfumerie sous la forme de civettone[32], et comme agent hydratant dans les crĂšmes.

Elle est par ailleurs utilisée dans d'autres industries comme lubrifiant.

Agro-carburants

Par rapport aux autres huiles, le rendement de l'huile de palme en fait un choix privilégié pour la production d'agrocarburant. Mais sa composition en fait un carburant que l'on ne peut insérer qu'en quantité limitée car elle fige dans les réservoirs[33].

L'huile de palme peut Ă©galement ĂȘtre hydrogĂ©nĂ©e afin de produire un agrocarburant composĂ© d'alcanes qui ne prĂ©sente pas les inconvĂ©nients de l'huile brute ou de trans-estĂ©rification de triglycĂ©rides d'acides gras : encrassement du moteur, point de figeage Ă©levĂ©. Ce procĂ©dĂ© est mis en Ɠuvre Ă  partir de 2010 dans une usine Ă  Singapour, qui transforme de l'huile de palme provenant de Malaisie[34].

La part de l'huile de palme importée dans l'Union européenne et transformée en agrocarburant « biodiesel » a connu une trÚs forte augmentation de 2008 à 2018. Selon la Fédération européenne pour le transport et l'environnement[35], environ deux tiers de celle-ci étaient raffinés en biodiesel en 2018.

Économie

En plein essor

RĂ©servoirs d'huile de palme en Malaisie.

En douze ans (2006-2018), la production d'huile de palme a presque doublĂ©, de 36,03 Mt Ă  69,6 Mt, dont 87 % en IndonĂ©sie et en Malaisie, le reste en ThaĂŻlande, Nigeria, Colombie et plus rĂ©cemment au Gabon. Les principaux importateurs sont l'Inde (9,5 Mt), l'Union europĂ©enne (6,5 Mt), la Chine (5,1 Mt), le Pakistan (3,1 Mt) et les États-Unis (1,6 Mt). L'huile de palme est un marchĂ© ultra-rentable Ă  l'hectare : une plantation de palmier Ă  huile produit huit fois plus d'huile qu'un champ de soja et six fois plus qu'un champ de colza, selon l'Alliance française pour l'huile de palme durable[36].

La demande en huile de palme a augmentĂ© de 8,7 % par an entre 1995 et 2004[37]. On observe une forte croissance de la consommation mondiale qui pourrait atteindre 40 millions de tonnes en 2020, contre 22,5 millions de tonnes en 2010[38]. Ainsi, l'huile de palme est depuis 2010, la plus consommĂ©e dans le monde (25 % de la consommation mondiale en 2010), dĂ©passant de peu l'huile de soja (24 %) et de loin celles de colza (12 %) et de tournesol (7 %)[38].

Cette performance s'explique par son faible coût de production. Le rendement à l'hectare du palmier à huile est en effet dix fois plus élevé que celui du soja[38]. Ainsi, 100 kg de fruits donnent environ 22 kg d'huile[39].

Chargement d'un camion-citerne en Allemagne.

Outre cet avantage, la transformation des fruits en huile nĂ©cessite une huilerie avoisinante aux plantations, ce qui concentre les opĂ©rations de valorisations dans les pays producteurs, comme c'est dĂ©jĂ  le cas pour d'autres olĂ©agineux. MalgrĂ© cela, une Ă©tude comparative menĂ©e Ă  Sambas (IndonĂ©sie) entre les cultures traditionnelles et une culture de palmier Ă  huile, a montrĂ© qu'Ă  surface Ă©gale, la mĂȘme annĂ©e, les cultures traditionnelles fournissent plus de travail. En effet la culture de palmier Ă  huile demande trĂšs peu de main d'Ɠuvre[40]. CĂŽtĂ© revenus 66 % des travailleurs touchent moins que les salaires minimums en IndonĂ©sie quand ils sont employĂ©s dans des plantations de type industriel[41].

Dans les pays comme l'IndonĂ©sie et la Malaisie, le dĂ©veloppement des plantations de palmiers ont Ă©tĂ© la consĂ©quence d'une politique gouvernementale, ainsi les grandes plantations sont subdivisĂ©es en parcelles pour les petits planteurs (small holder). Ces derniers sont des transmigrants ou sont issus de populations locales. Ils doivent alors acheter les terres Ă  crĂ©dit auprĂšs de la compagnie mĂšre (nucĂ©lus). Avec les petits exploitants qui convertissent leurs riziĂšres en palmeraies, on compte 3 millions de ces exploitations, reprĂ©sentant la moitiĂ© des cultures[42]. La comparaison de revenu du travail est de 36 â‚Ź/pers. pour l'huile de palme contre 17 â‚Ź/pers. pour l'hĂ©vĂ©a et 1,7 â‚Ź/pers. pour le riz Ă  Bongo (Malaisie) et ces valeurs varient suivant le prix d’achat des matiĂšres premiĂšres[43].

Techniques de culture

AprĂšs avoir Ă©tĂ© placĂ©es en fermentation pendant un an dans des conteneurs, les graines sont semĂ©es en pĂ©piniĂšre oĂč elles sont arrosĂ©es au goutte Ă  goutte. AprĂšs 2 ans, on peut les planter pour rĂ©colter la noix de palme.

Un palmier donne des fruits deux fois par mois, durant toute l'annĂ©e, et produit pendant 25 Ă  35 ans. Cependant, vers 20 Ă  25 ans, les palmiers deviennent trop hauts et il devient difficile de cueillir les noix de palme ; ils sont alors coupĂ©s, et leur stipe est exploitĂ© notamment dans la construction d'habitations et la fabrication de planchers exotiques. Dans d'autres cas, les plantations sont brĂ»lĂ©es pour pouvoir ĂȘtre replantĂ©es.

Par rapport Ă  d’autres cultures, il n’y a pas besoin de retourner la terre chaque annĂ©e, de sorte que l’érosion et le tassement du sol sont moindres[44].

Production

Carte de la production mondiale d'huile de palme en 2013.

Évolution de la production mondiale d'huile de palme de 1961 à 2017[45] - [46].

Originaire d'Afrique de l'Ouest, le palmier Ă  huile est maintenant cultivĂ© dans toutes les rĂ©gions tropicales. Alors que l'IndonĂ©sie et la Malaisie ne produisaient ensemble que 5 millions de tonnes en 1976[47], ces pays reprĂ©sentent aujourd'hui plus de 85 % de la production mondiale[48]. Ces deux pays continuent d'accroĂźtre leur production dans un marchĂ© en expansion.

Voici les principaux pays producteurs mondiaux en 2013[49] :

PaysProduction

(millions de tonnes)

% mondial
1 Indonésie 26,895 49,5 %
2 Malaisie 19,217 35,3 %
3 ThaĂŻlande 1,970 3,6 %
4 Nigeria 0,960 1,8 %
5 Colombie 0,945 1,7 %
6 Papouasie-Nouvelle-Guinée 0,500 0,9 %
7 Honduras 0,425 0,8 %
8 CĂŽte d'Ivoire 0,415 0,8 %
9 Guatemala 0,402 0,7 %
10 Brésil 0,340 0,6 %
11 Équateur 0,325 0,6 %
12 Costa Rica 0,300 0,5 %
13 RDC 0,296 0,5 %
14 Chine 0,230 0,4 %
15 Cameroun 0,225 0,4 %
Total monde 54,385 100 %

Consommation

Proportion des différentes utilisations de l'huile de palme dans le monde (2010)[50] :

  • Aliments (71 %)
  • Produits de consommation (24 %)
  • Énergie (5 %)

Plus de la moitié de la consommation de l'huile de palme s'effectue dans les pays asiatiques.

PaysConsommation

millions tonnes en 2012[51]

%
1 Inde 8,425 16,1
2 Indonésie 7,565 14,4
3 Chine 6,300 12,0
4 UE 28 5,475 10,4
5 Malaisie 3,323 6,3
6 Autres 21,327 40,7
Total monde 52,415 100,0

Cours

L'huile de palme est cotée à la bourse de Kuala Lumpur.

Part de marché

Évolution de la part relative des diffĂ©rentes huiles vĂ©gĂ©tales entre 1980 (en haut) et 2009 (en bas). L'huile de palme est en bleu clair.
Class.Type de huileProduction (tonnes) en 2012[52]
1 Huile de palme 54 320 000
2 Huile de soja 43 090 000
3 Huile de colza 23 910 000
4 Huile de tournesol 13 840 000
5 Huile de palmiste 6 250 000
6 Huile de noix 5 320 000
7 Huile de coton 5 260 000
7 Huile de coco 3 590 000
8 Huile d’olive 2 870 000
T TOTAL 158 430 000

Controverses

Conséquences environnementales

Une image satellite montrant la déforestation en Malaisie pour permettre la plantation de palmier à huile.
La déforestation dans la province de Riau, à Sumatra, pour faire place à une plantation de palmiers à huile (2007).

DĂ©jĂ  au cours des XIXe et XXe siĂšcles, les superficies de forĂȘts et tourbiĂšres naturelles des principales rĂ©gions productrices (Malaisie et IndonĂ©sie) ont Ă©tĂ© considĂ©rablement rĂ©duites. Les responsables sont l’urbanisation[53], les cultures pour la production de bois exotique et de papier[54] (prĂ©alable frĂ©quent aux palmeraies[55]), la riziculture[53] (Projet MĂ©gaRice) et plus rĂ©cemment les palmeraies. Selon un rapport de la FAO, 17 Ă  27 % des milieux naturels seraient dĂ©forestĂ©s en IndonĂ©sie et 80 % en Malaisie[56]. De plus, il est estimĂ© que des 15,5 millions d’hectares des tourbiĂšres de l’Asie du Sud-Est, seulement 32 % existent encore, la plupart Ă©tant dĂ©gradĂ©es[57].

Cette destruction de forĂȘts tropicales et de tourbiĂšres (ces derniĂšres Ă©tant des puits de carbone)[58] aurait ainsi pour consĂ©quence une augmentation des Ă©missions de gaz Ă  effet de serre et serait mĂȘme responsable de 70 % de gaz Ă  effet de serre produits par l'IndonĂ©sie, troisiĂšme Ă©metteur de CO2 au monde, selon l'ONU[54].

La conversion des tourbiĂšres tropicales en culture pour l'huile de palme requiert la mise en place d'un systĂšme de canaux de drainage, assĂ©chant les tourbiĂšres et les rendant plus sujettes aux incendies. En , les aĂ©roports de Singapour et Kuala Lumpur ont Ă©tĂ© fermĂ©s pendant plusieurs jours Ă  cause des feux dans les tourbiĂšres drainĂ©es de l’IndonĂ©sie. Les Ă©missions de CO2 de ces feux correspondent Ă  13-40 % des Ă©missions annuelles de la combustion des Ă©nergies fossiles[59]. Les pertes Ă©conomiques liĂ©es Ă  ces feux se chiffrent Ă  environ 3 milliards de dollars amĂ©ricains[60]. En plus des pertes de carbone liĂ©s aux feux, la dĂ©gradation des sols organiques et la perte de fonction de sĂ©questration du carbone des tourbiĂšres tropicales mĂšnent Ă  50 % des Ă©missions de CO2 par annĂ©e (Gt de CO2)[61]. En fait, la production de biocarburants par la conversion des tourbiĂšres tropicales en culture produit 10 fois plus d’émissions de CO2 que par la combustion des combustibles fossiles[62].

Le corollaire de la dĂ©forestation est l'affectation de la biodiversitĂ©, par la rĂ©duction d'habitat de nombreuses espĂšces endĂ©miques Ă©ventuellement protĂ©gĂ©es comme les orangs-outans et les gibbons. Chaque annĂ©e, environ 5 000 de ces grands singes seraient victimes de l'exploitation des palmeraies[63]. En 2007 on estimait que 98 % des forĂȘts humides indonĂ©siennes, habitat naturel des orangs-outans, auraient disparu en 2022[64].

Cependant, remplacer l'huile de palme par une autre huile comme l'huile de soja engendrerai une déforestation plus importante vu que c'est la plante qui produit le plus d'huile par hectare[14].

Conditions de travail

En , Amnesty International publie un rapport dénonçant le travail des enfants et le travail forcé dans les plantations indonésiennes de palmiers à huile fournissant des entreprises comme Nestlé, Unilever, Kellogg's, Colgate-Palmolive, Elevance Renewable Sciences, Agrupación de Fabricantes de Aceites Marinos, S.A. (AFAMSA), Archer Daniels Midland, Procter & Gamble et Reckitt Benckiser[65] - [66].

L'ONG constate de nombreux abus dans les plantations dans lesquelles elle s'est rendu et qui sont la propriĂ©tĂ© du grand groupe singapourien des matiĂšres premiĂšres agricoles Wilmar. Femmes et enfants y travaillent dans des conditions trĂšs difficiles, sans Ă©quipements de protection alors que des pesticides toxiques sont utilisĂ©s. Bien qu'elles travaillent pendant de longues heures, les femmes sont payĂ©es en dessous du salaire minimum et sont menacĂ©es de rĂ©ductions de salaire. Certaines ne gagnent que 2,50 dollars par jour (environ 2,30 euros). Quant aux enfants, ĂągĂ©s entre 8 et 14 ans, qui abandonnent parfois l'Ă©cole pour venir aider leurs parents dans les plantations, ils rĂ©alisent des tĂąches pĂ©nibles comme le transport de sacs pesant jusqu'Ă  25 kg[67] - [68].

DĂ©bat sur le boycott de l’huile de palme

Autocollant des jeunes Vert-e-s en Suisse, 2021.

Face aux problĂšmes liĂ©s Ă  l'huile de palme, certaines marques ont engagĂ© des recherches pour changer les formulations de leurs produits. Dans certains cas, des opĂ©rations de communication ont Ă©tĂ© mises en place pour annoncer l’arrĂȘt de l’usage de l’huile de palme ou encore ajouter des Ă©tiquettes « Sans huile de palme ».

En 2010, la marque Casino annonce qu'elle cesse d'inclure cette huile dans ses produits alimentaires, en raison de ses risques pour la santé et de son impact sur l'environnement[69].

Ces pratiques ont Ă©tĂ© dĂ©noncĂ©es par les pays producteurs, notamment la Malaisie qui souligne qu’elle « s’est engagĂ©e Ă  conserver une couverture forestiĂšre sur 50 % de son territoire, en consacrant 24 % Ă  l’agriculture. Par contraste, la forĂȘt ne couvre que 24 % du territoire en France mais les terres agricoles en occupent plus de 50 % »[70]. Cet argument est Ă  mettre en perspective, la Malaisie et l'IndonĂ©sie font face Ă  une dĂ©forestation rapide et rĂ©cente de forĂȘts Ă  haute biodiversitĂ©, comparativement Ă  la France qui voit les surfaces de ses forĂȘts augmenter.

EngagĂ© sur cette mĂȘme voie, SystĂšme U a Ă©tĂ© condamnĂ© en par le tribunal de commerce de Paris Ă  retirer une publicitĂ© contre l'huile de palme au motif qu'elle constituait « un dĂ©nigrement caractĂ©risĂ© au prĂ©judice » du produit[71]. À l'origine de la plainte, l'Association interprofessionnelle de la filiĂšre palmier Ă  huile de CĂŽte d'Ivoire (AIPH) estimait que la campagne avait Ă©tĂ© lancĂ©e « sans conviction Ă©cologique aucune, ni analyse scientifique sĂ©rieuse[72] ».

Le boycott simple de l'huile de palme n’est pas encouragĂ© par Greenpeace, qui indique « nous n'avons jamais demandĂ© que l'on boycotte l'huile de palme en gĂ©nĂ©ral, mais seulement celle produite en ayant recours Ă  la dĂ©forestation » et ajoute « l'angle nutritionnel n'a Ă©mergĂ© vraiment qu'Ă  partir de 2009, et seulement en France, quand certaines entreprises, notamment des distributeurs, ont compris qu'il y avait un intĂ©rĂȘt commercial et en termes d'image Ă  ne plus utiliser d'huile de palme dans leurs produits[73] ». À ce titre, l'ONG a mis en avant des exploitations durables, mais il reste compliquĂ© pour le consommateur de pouvoir choisir des produits avec de l'huile de palme durable.

Au-delà du boycott, de nombreuses ONG, dont l'ASBL belge Justice et Paix, souhaitent privilégier la responsabilisation couplée des entreprises et des citoyens[74].

Huile de palme dite « durable »

Certification CSPO de la table ronde sur l’huile de palme durable (RSPO)

Projet initiĂ© par le WWF en 2001 et soutenu par des professionnels du secteur, la premiĂšre table ronde sur l'huile de palme durable (Roundtable on Sustainable Palm Oil ou RSPO) est organisĂ©e en 2003 Ă  Kuala Lumpur (Malaisie) et regroupe 200 participants de 16 pays. L’annĂ©e suivante RSPO devient une organisation internationale sans but lucratif basĂ©e Ă  Zurich (Suisse)[75]. Parmi les membres fondateurs on trouve ainsi des grandes entreprises productrices, des multinationales, comme Unilever, qui utilisent l'huile de palme pour revendre des produits transformĂ©s, des banques (comme la banque nĂ©erlandaise Rabobank) et le WWF[76].

Depuis 2011, un logo CSPO peut ĂȘtre apposĂ© sur les produits contenant de l’huile certifiĂ©e.

En 2012, RSPO rĂ©unit plus de 1 000 acteurs volontaires issus de 50 pays diffĂ©rents. On compte des revendeurs, des industriels, des transformateurs, des ONG, des investisseurs[77]


La certification CSPO (Certified Sustainable Palm Oil) est complexe :

  • il existe quatre niveaux de certification de l’huile ;
  • la certification s’effectue au niveau de l’huilerie de la palmeraie et non au niveau de l’entreprise. Un producteur participant Ă  RSPO ne produit donc pas forcĂ©ment d’huile CSPO.

Controverses

Cette certification est controversĂ©e sur divers aspects. La premiĂšre critique qui lui a Ă©tĂ© faite est de ne pas ĂȘtre dĂ©livrĂ©e par un organisme indĂ©pendant des industriels, les grandes entreprises productrices sont en effet Ă  la fois Ă  l'origine des certifications grĂące Ă  leur prĂ©sence au sein de la RSPO et rĂ©cipiendaires de ces certifications[78]. Ce conflit d'intĂ©rĂȘts a soulevĂ© des critiques d'ONG qui y voient une preuve d'une tentative de greenwashing.

La seconde critique porte sur les rĂšgles Ă©dictĂ©es par cette table ronde, qui n'imposent que la protection des forĂȘts primaires et des tourbiĂšres, mais pas celle des forĂȘts secondaires[78].

La troisiĂšme critique porte sur les violations manifestes des rĂšgles de la certification[79] - [80] - [81] avec notamment des dĂ©forestations illĂ©gales dans des zones dites protĂ©gĂ©es (forĂȘts primaires)[78] - [76].

Les ONG écologistes dénoncent aussi l'utilisation autorisée d'un pesticide neurotoxique dans les cultures RSPO : le paraquat[82], interdit en Europe.

En , PanEco, une des 33 ONG membres de cette table ronde, investie dans le Programme de conservation des orangs-outans, quitte l'organisation, dénonçant son inaction et son manque d'intégrité[83].

En , des scientifiques confirment, via une analyse dĂ©taillĂ©e d'images satellite, ce qu'indiquaient plusieurs Ă©tudes empiriques et enquĂȘtes : la production d'huile de palme certifiĂ©e « durable » a donnĂ© lieu Ă  la dĂ©forestation des forĂȘts tropicales de Sumatra et de BornĂ©o et Ă  la dĂ©gradation de l'habitat des mammifĂšres en danger au cours des 30 derniĂšres annĂ©es[84] - [85].

Certification agriculture biologique

Motte d'huile de palme biologique.

L’huile de palme durable peut aussi ĂȘtre issue de l'agriculture biologique (sans utilisation de pesticides de synthĂšse notamment), elle est alors certifiĂ©e par un organisme indĂ©pendant, comme l'exige la rĂ©glementation. Venant principalement de Colombie, elle est censĂ©e contribuer moins Ă  la dĂ©forestation[86].

Toutefois, comme le fait remarquer l'ONG Les Amis de la Terre, cette culture pose des problÚmes sociaux, car elle implique notamment l'accaparement des terres par les entreprises du secteur et l'expropriation de petits producteurs[86]. La principale société du secteur, le groupe Daabon, est accusée d'avoir fait expulser des paysans de leurs terres, avec l'aide des paramilitaires[87] - [88]. Elle serait aussi impliquée dans une usine de production de biocarburants[86].

Certification ISPO

En 2014, l’État IndonĂ©sien devrait lancer sa propre certification : ISPO (Indonesian Substainable Palm Oil). Elle a l’avantage d’ĂȘtre obligatoire (contrairement Ă  RSPO) et d’ĂȘtre plus accessible pour les petits producteurs que RSPO[89].

Autres initiatives

Engagement de marques occidentales

Depuis plusieurs années, les ONG comme Greenpeace (en particulier avec Nestlé[90]) ou WWF (avec un classement des « bons élÚves » RSPO[91]) attaquent directement les marques occidentales sur la question de la déforestation.

DÚs lors, plusieurs industriels ou distributeurs, comme Carrefour, Nestlé ou encore Unilever se sont engagés à utiliser exclusivement de l'huile de palme certifiée durable d'ici 2012 à 2015, pour fabriquer leurs produits[92] - [93].

Le syndicat professionnel, la Collective des Biscuits et GĂąteaux, s’est engagĂ© quant Ă  lui Ă  diminuer d'ici fin 2013 la quantitĂ© d'huile de palme non durable utilisĂ©e, d'au moins 50 % par rapport Ă  2008 via deux solutions[94] :

  • la substitution d'une autre matiĂšre grasse ;
  • l'utilisation d'une huile de palme dite durable (type RSPO).

Par ailleurs, certains acheteurs vont rechercher des critĂšres qui ont une « bonne Ă©thique », de ce fait nous pouvons citer l’entreprise NestlĂ©, qui achĂšte 400 000 tonnes d’huile de palme par an, et qui a dĂ©cidĂ© de tracer ses fournisseurs pour garder ceux qui produisent une huile sans avoir effectuĂ© de la dĂ©forestation au prĂ©alable, ainsi produire une huile zĂ©ro dĂ©forestation est leur objectif d’ici 2020[95].

Taxe Nutella

Entre 2013 et 2016 trois versions d'une proposition de loi pour taxer l'importation de l'huile de palme en France sont prĂ©sentĂ©es dans le cadre de la Loi pour la reconquĂȘte de la biodiversitĂ©, de la nature et des paysages. En 2017, le montant de la taxe s’élevait Ă  300 euros la tonne par le SĂ©nat. Il Ă©tait prĂ©vu qu’elle augmente de 200 euros chaque annĂ©e dans le but d’atteindre le montant d’imposition de 900 euros en 2020[96]. Par la suite, les dĂ©putĂ©s avaient limitĂ© cette taxation Ă  90 euros en 2016. La disposition sera finalement abandonnĂ©e[97]. En effet, en , l’AssemblĂ©e renonce pour la troisiĂšme fois Ă  la taxe Nutella, visant Ă  aligner la taxation de l’huile de palme, trĂšs peu taxĂ©e, sur celle de l’huile d’olive. Les protestations des principaux producteurs mondiaux d'huile de palme comme l’IndonĂ©sie ou la Malaisie qui dĂ©tiennent 98% de la production mondiale[96] sont en partie responsables de ce changement de position. La difficultĂ© de crĂ©er une taxe visant une seule huile est Ă©galement Ă©voquĂ©e. Les dĂ©putĂ©s ont finalement votĂ© un amendement du gouvernement dont l’objectif est de revoir dans les six prochains mois « le dispositif actuel de taxation des huiles alimentaires, afin notamment de le simplifier et de favoriser les productions dont la durabilitĂ© fait l’objet de critĂšres objectifs »[98].

Retrait de la liste des biocarburants en France

L'Assemblée nationale française a voté le , contre l'avis du gouvernement, un sous-amendement au projet de la loi de finances 2019 disposant que les produits à base d'huile de palme ne sont pas considérés comme des biocarburants. De ce fait, l'huile de palme perd, à partir de 2020, l'avantage fiscal lié à l'incorporation de substances végétales dans un carburant fossile ; elle ne pourra plus échapper à la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) majorée qui s'applique en dessous d'un certain taux de mélange (7 % en moyenne pour l'ensemble des carburants)[99].

Cette mesure a Ă©tĂ© critiquĂ©e par la Malaisie[100] (deuxiĂšme producteur mondial d'huile de palme) puisqu'elle compromet l'import d'huile de palme par Total pour sa bioraffinerie dĂ©criĂ©e de La MĂšde[101] (importation que Total s'est engagĂ© Ă  limiter Ă  300 000 tonnes/an)[102].

DĂ©fendu par sept dĂ©putĂ©s de la droite et du centre (MoDem, LREM et LR), un amendement, Ă©galement soutenu par le gouvernement, prĂ©voyant le report Ă  2026 de la suppression de l’huile de palme de la liste des agrocarburants est adoptĂ© le [103]. Cette dĂ©cision se traduira par un avantage fiscal Ă  Total Ă©valuĂ© entre 70 et 80 millions d’euros. Le dĂ©putĂ© LREM Mohamed Laqhila estime qu’il s’agit d’ĂȘtre « responsable » et d’accompagner l’industriel Total et ses investissements[103]. DĂšs le lendemain, la commission des Finances a approuvĂ© Ă  l’unanimitĂ© la tenue d’une nouvelle dĂ©libĂ©ration par rapport Ă  cet amendement ; le premier ministre Edouard Philippe demande lui aussi que l’AssemblĂ©e puisse revoter le texte. L’amendement, prĂ©sentĂ© par des Ă©lus MoDem, LREM et LR des Bouches-du-RhĂŽne, avait reçu un avis dĂ©favorable du rapporteur gĂ©nĂ©ral JoĂ«l Giraud (LREM), n’avait pas Ă©tĂ© dĂ©fendu au micro en sĂ©ance et n’avait pas fait l’objet du moindre dĂ©bat[104]. Finalement, le , l'amendement est rejetĂ© Ă  la quasi-unanimitĂ© de l'AssemblĂ©e nationale[105]. Mais une note de la Direction gĂ©nĂ©rale des Douanes et Droits indirects datĂ©e du maintient toutefois l'exonĂ©ration pour un sous-produit de l'huile de palme, les distillats d'acides gras de palme (en anglais Palm Fatty Acid Distillate - PFAD) qui bĂ©nĂ©ficie ainsi de la niche fiscale de la « taxe incitative relative Ă  l’incorporation de bio-carburants » (TIRIB). Les associations CanopĂ©e et Les Amis de la Terre dĂ©posent un recours en rĂ©fĂ©rĂ© devant le Conseil d’Etat pour excĂšs de pouvoir et faire annuler cette note des douanes qui permet Ă  Total de bĂ©nĂ©ficier en outre d'un avantage fiscal. Le juge des rĂ©fĂ©rĂ©s rejette le le recours en rĂ©fĂ©rĂ© [106] pour dĂ©faut du caractĂšre d'urgence[107]. Cependant, le Conseil d'État, saisit par un nouveau recours des deux associations auxquelles se joint Greenpeace, doit trancher cette question sur le fond avant l'Ă©tĂ© 2020[108] - [109] - [110]. Fin 2020, le statut des PFAD ne fait toujours pas l'objet de clarification[111].

Finalement, le Conseil d'État confirme, le , que tous les produits à base d’huile de palme sont exclus des biocarburants[112].

En , Total Énergies annonce qu'elle utilisera moins de 100 000 tonnes d'huile de palme en 2021 pour ses agrocarburants et plus du tout Ă  compter de 2023, au profit de la filiĂšre de rĂ©cupĂ©ration d'huile de friture et de graisse animale, ce qui restera rentable pour sa raffinerie de La MĂšde (Bouches-du-RhĂŽne)[113], dĂ©criĂ©e dĂšs son projet, dont en raison de l'insuffisance de son Ă©tude d'impact sur effets directs et indirects sur le climat[114].

Santé

Acides gras saturés

Historiquement, la production d'huile de palme s'est développée afin de remplacer l'utilisation des huiles végétales hydrogénées dans l'industrie alimentaire, car celles-ci contribuent aux maladies cardio-vasculaires en augmentant le taux de mauvais cholestérol (LDL-cholestérol) tout en diminuant le taux de bon cholestérol (HDL-cholestérol)[29].

Cependant, les acides gras saturés, qui composent l'huile de palme pour moitié, augmentent aussi le taux de mauvais cholestérol dans le sang et peuvent donc aussi entraßner des risques cardio-vasculaires. Mais, contrairement aux acides gras trans, les acides gras saturés augmentent également le bon cholestérol (HDL-cholestérol)[29].

Les dangers des acides gras saturĂ©s pour la santĂ© sont de plus en plus Ă©voquĂ©s[28]. Un lien statistique existe entre le taux d’acides gras saturĂ©s dans l’alimentation, l’hypercholestĂ©rolĂ©mie et la surmortalitĂ© des Occidentaux par maladie cardio-vasculaire si les proportions idĂ©ales entre les diffĂ©rents types d’acides gras ne sont pas respectĂ©es dans l’alimentation[28] - [29]. Ce danger est d'autant plus insidieux que d’une part, les instances de santĂ© ont surtout mis en garde la population contre les acides gras d’origine animale dans la prĂ©vention cardiovasculaire, et que d'autre part, il n’y a pas Ă  ce stade d’obligation d’affichage (l’huile de palme figurant le plus souvent dans les compositions des aliments sous la mention d’« huile vĂ©gĂ©tale »)[115] - [116] - [28].

La prĂ©sence d’huile de palme dans le lait artificiel en poudre pour bĂ©bĂ© inquiĂšte certains parents. Toutefois, les nourrissons ont un besoin particulier d’acides gras saturĂ©s. La composition de l’huile de palme avec 50 % d’acides gras saturĂ©s est proche de celle du lait maternel[117]. MalgrĂ© cette composition, l’absorption des acides gras n'est pas identique entre l'huile de palme et le lait[118] et l'huile de palme rĂ©duit l’absorption de calcium[119].

Une méta-analyse, reprenant toutes les études publiées sur le sujet, publiée en , donne pour conclusion que l'huile de palme a un impact négatif sur le taux de cholestérol semblable à celui des graisses animales, pas beaucoup plus faible que celui des graisses hydrogénées, et bien plus fort que celui des huiles végétales riches en acides gras insaturés[120]. Les auteurs soulignent que les études montrant un impact moins négatif de cette huile sont généralement de mauvaise qualité scientifique[120].

Contaminants

Les esters glycidyliques d’acides gras (GE), le 3-monochloro-propanol-1,2-diol (3-MCPD) et le 2-monochloro-propanol-1,2-diol (2-MCPD) sont retrouvĂ©s particuliĂšrement dans les huiles et graisses de palme, en raison de leur raffinage Ă  des tempĂ©ratures Ă©levĂ©es (Ă  200°C environ)[121]. Comme le glycidol, composĂ© parent des GE, est considĂ©rĂ© gĂ©notoxique et cancĂ©rigĂšne, l'EFSA n'a pas fixĂ© de seuil de sĂ©curitĂ© pour les GE. Selon la prĂ©sidente du CONTAM (groupe d’experts de l’EFSA sur les contaminants de la chaĂźne alimentaire), « L’exposition des bĂ©bĂ©s consommant uniquement des prĂ©parations pour nourrissons constitue une inquiĂ©tude particuliĂšre car elle atteint jusqu’à dix fois le niveau considĂ©rĂ© comme peu prĂ©occupant pour la santĂ© publique »[121]. La dose journaliĂšre tolĂ©rable (DJT) fixĂ©e par l'EFSA pour le 3-MCPD et ses esters d’acides gras Ă©tait de 0,8 microgrammes par kilogramme de poids corporel (”g/kg de poids corporel/jour) en 2016, augmentĂ©e Ă  2 ”g/kg de poids corporel/jour en 2017, d'aprĂšs les Ă©lĂ©ments de preuve reliant cette substance Ă  des lĂ©sions affectant les organes observĂ©es dans les essais sur des animaux et les effets nĂ©fastes possibles sur les reins et sur la fertilitĂ© masculine[121] - [122]. D'aprĂšs l'EFSA, il n'y a pas suffisamment de donnĂ©es pour fixer un seuil de sĂ©curitĂ© pour le 2-MCPD[121].

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Annexes

Bibliographie

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Films

  • Émilie Lancon, Palme, une huile qui fait tache, Magneto Presse, 2013
  • Patrick Rouxel, Green, 2009

Articles connexes

Liens externes

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