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Palmier Ă  huile

Elaeis guineensis, Palmiste

Le palmier à huile ou éléis de Guinée (Elaeis guineensis Jacq.) est une espèce de plante monocotylédone de la famille des Arecaceae, largement cultivée pour ses fruits et ses graines riches en huile à usage alimentaire et industriel. L'huile de palme, extraite de la pulpe du fruit, est devenue depuis quelques années la « première source de corps gras végétal sur le marché mondial »[1]. L'huile de palmiste, extraite des graines, est autorisée dans l'Union européenne comme substitut du beurre de cacao.

Le premier occidental à le décrire et à en ramener des graines fut le naturaliste aixois Michel Adanson[2].

Description

Le palmier Ă  huile mesure 20 Ă  25 m de haut, mais dans les palmeraies de culture les elaeis ne dĂ©passent pas 15 mètres. Son « faux-tronc Â» est le stipe caractĂ©ristique des palmiers, cylindrique, vertical, non ramifiĂ© et de diamètre constant.

Les feuilles, pennĂ©es, mesurent de 5 Ă  7 m de long[3], Ă  pĂ©tiole très robuste et Ă©pineux. Elles forment une couronne symĂ©trique en haut du stipe, entourant et protĂ©geant le bourgeon vĂ©gĂ©tatif.

Les inflorescences sont des spadices, implantés à l'aisselle de chaque feuille. La plante est monoïque et présente des spadices mâles et femelles séparés. Les fleurs, petites et de couleur blanc sale, sont très serrées.

Inflorescences de palmier Ă  huile.
Drupes de palmier Ă  huile.

Le fruit est une drupe charnue, de forme ovoĂŻde, sessile, d'environ 3 cm de long[3]. La pulpe ou mĂ©socarpe, de couleur jaune-orangĂ©, renferme près de 50 % de lipides qui constituent l'huile de palme. Les noix de palme sont groupĂ©es en rĂ©gimes. Un rĂ©gime pèse entre 5 et 50 kg et contient 500 Ă  4 000 drupes, selon l’âge du palmier, son origine, son environnement, etc.[4].

On distingue trois types variétaux selon la morphologie du fruit : le dura, dont le fruit contient une coque épaisse autour de l'amande ; le pisifera dépourvu de coque (et généralement femelle stérile) ; et le tenera, avec une coque mince. Le dura est le type le plus répandu dans la nature. Le tenera est le type cultivé, car il combine fruits riches en pulpe et fertilité femelle. Chez les dura et tenera, la coque du noyau, très dure, est constituée par l'endocarpe. Le type de fruit est contrôlé par le gène SHELL, qui possède deux allèles codominants (le tenera étant hétérozygote)[5]. Ce gène code un facteur de transcription de la famille des MADS-box, et l'allèle à l'origine du type pisifera est dû à des mutations faux sens[6] - [7].

L'amande, appelée palmiste, est également riche en lipides et fournit l'huile de palmiste. L’amande comprend un tégument mince et adhérent, un albumen cartilagineux qui contient environ 50 % d’huile et un embryon.

Distribution

Cette espèce est originaire de l'Afrique tropicale. Son aire naturelle s’étend sur plus de 6 000 km le long de la cĂ´te Atlantique d’Afrique, depuis le SĂ©nĂ©gal jusqu’à l’Angola. Elle s’enfonce sur 50 Ă  200 km Ă  l’intĂ©rieur des terres et sur 2 000 km au niveau de l’équateur, dans la cuvette congolaise[8]. Son foyer d'origine semble se situer le long du golfe de GuinĂ©e, oĂą subsistent des palmeraies naturelles. Grâce Ă  un pollen très caractĂ©ristique, qui diffère significativement de celui des autres palmiers africains, en particulier du Ronier (Borassus aethiopum), la palynologie a permis de mieux cerner ses origines et ses dĂ©placements, depuis 3000 ans environ[9] ; alors que les palmiers Ă©taient en Afrique, comme en AmĂ©rique du sud très frĂ©quents, ils ont rĂ©gressĂ© dans les forĂŞts d'Afrique durant le CĂ©nozoĂŻque, probablement Ă  cause de changements climatiques[10]. Le palmier Ă  huile est l'un des rares Ă  avoir rĂ©sistĂ© Ă  ce recul en Afrique.

Culture

Le palmier à huile est largement cultivé dans toutes les zones tropicales du globe, notamment en Asie, sous forme de plusieurs cultivars à la productivité fortement améliorée par sélection variétale[11].

Sa productivité a connu une croissance proche de celle du blé, maïs, tournesol, etc. durant la première révolution verte dans les régions tempérées. La sélection du type variétal tenera a fait croître sa productivité de 30 %[11]. Dans les années 1960, une augmentation supplémentaire de 10 % a été obtenue par l'hétérosis résultant du croisement entre populations complémentaires. Depuis, un progrès génétique annuel de 1 % a été obtenu par sélection variétale récurrente réciproque, pour arriver au début des années 1990 à une production de 6,7 tonnes d’huile par hectare et par an dans les meilleures conditions, passée à environ 7,2 t/ha/an vers l'an 2000[12] - [11]. En parallèle, des cultivars résistant mieux à la fusariose et à la pourriture du cœur, deux maladies fréquentes respectivement en Afrique et en Amérique du Sud, ont été développés.

La dormance de la graine reste difficile à lever. Ce sont donc souvent des graines germées qui sont vendues aux planteurs. Après avoir été surtout cultivé en Asie où il a fait reculer les forêts tropicales, il tend maintenant à être cultivé industriellement en Afrique, dans le Bassin du Congo notamment (projets de millions d'hectares de plantation)[13].

En culture industrielle, les objectifs de production sont de 20 Ă  30 t/ha de fruits avec un taux d'extraction en huile de 23-25 %[14].

Fruits du palmier à huile (Sénégal).
Palmiers Ă  huile, serres tropicales du Grand Blottereau (Nantes).
Récolte de régimes de palmiers à huile en Côte d'Ivoire.
Récolte de régimes de palmiers à huile au Bénin.

Les principaux producteurs sont le Nigeria, la CĂ´te d'Ivoire, le Cameroun et la RĂ©publique dĂ©mocratique du Congo pour l'Afrique, la Malaisie et l'IndonĂ©sie (les deux premiers producteurs mondiaux en 2008) pour l'Asie, la Colombie et l'Équateur pour l'AmĂ©rique du Sud. En IndonĂ©sie, les surfaces nouvellement consacrĂ©es au palmier Ă  huile sont passĂ©es de 14 000 ha par an dans les annĂ©es 1970 Ă  340 000 entre 2000 et 2009, selon l'USDA. Entre 1990 et 2005, les nouvelles plantations de palmiers Ă  huile ont occupĂ© 1,8 million d'hectares en Malaisie.

La rentabilité importante de cette culture est un facteur majeur de la déforestation dans certains pays comme la Malaisie et l'Indonésie. Ainsi, en 2009, l'archipel indonésien perdait chaque année 2 à 3 millions d'hectares boisés pour y planter à la place des palmiers à huile et répondre à une très forte demande du marché mondial : 10 % des produits alimentaires et 10 % des produits cosmétiques que nous consommons contiennent de l'huile de palme[15], sans oublier les besoins du secteur pétrolier, qui évincent petit à petit les autres secteurs.

Des violations des droits de l'homme sont associées à cette monoculture[16].

Un palmier Ă  huile donne des fruits douze mois sur douze, deux fois par mois, et peut produire jusqu'Ă  25 Ă  35 ans. Cependant vers 20 Ă  25 ans, les palmiers deviennent trop hauts et il devient difficile de cueillir les noix de palme ; ils sont alors coupĂ©s et leur « bois Â» est rĂ©cupĂ©rĂ© (en rĂ©alitĂ© ce n'est pas du bois car les plantes monocotylĂ©dones ne possèdent pas de cambium).

Utilisation

On tire du palmier deux huiles et une boisson alcoolisée :

Huile de palme

L'huile de palme est extraite de la pulpe des fruits, de couleur rouge soit par pression à chaud ou de manière artisanale avec des pressoirs manuels ou des petits extracteurs mécaniques à moteur.

  • Elle est très utilisĂ©e pour l'alimentation (friture, fabrication de margarines, matières grasses…). C'est, en 2010, l’huile vĂ©gĂ©tale la plus consommĂ©e au monde (25 %)[17].
  • Elle est aussi très utilisĂ©e pour la fabrication de savon, et en cosmĂ©tologie. Les savons saponifiĂ©s Ă  froid en contiennent souvent pour ses propriĂ©tĂ©s lavantes et moussantes.
  • En 2006, 1 % des biodiesels Ă©tait produit Ă  partir d'huile de palme[18].

Huile de palmiste

L'huile de palmiste est de couleur blanche. Extraite des graines décortiquées, à haute teneur en acidité, elle est utilisée également en alimentation et dans l'industrie (savons, lubrifiants…).

L'huile de palme et l'huile de palmiste sont riches en acides gras saturés et sont partiellement à l'état solide aux températures tempérées.

Vin de palme

La sève du palmier est récupérée durant 45-60 jours après l'abattage, à raison d'environ 5 L par jour. Très sucrée et avec une odeur caractéristique de levures, elle se consomme fraîche sous diverses nominations locales (Bandji en Côte d'Ivoire). Cependant, le principal débouché est l'alcool fort obtenu après fermentation puis distillation. Cet alcool a également divers noms (koutoukou en Côte d'Ivoire, akpeteshie au Ghana, etc.).

Ces deux boissons sont très prisées et consommées en Afrique de l'ouest et en Afrique centrale[19]. Chez les Diolas de Basse-Casamance, au Sénégal, la sève non fermentée était utilisée pour allaiter les nourrissons ayant perdu leur maman. Cette sève est pleine de vitamines. Les techniques d'exploitation du vin sont des pratiques durables qui se font depuis des générations et qui contribuent à assainir les populations de palmiers à huile, en asséchant les stipes des palmiers, ce qui limite la prolifération des insectes ravageurs.

Règlement européen visant à bannir les produits issus de la déforestation

Le règlement européen visant à bannir les produits issus de la déforestation a été adopté par le Parlement européen le . Pour les palmiers à huile, cela concerne[20] :

  • l'huile de palme et ses fractions ;
  • les huiles de palmiste et de babassu brutes et leurs fractions, mĂŞme raffinĂ©es, mais non chimiquement modifiĂ©es ;
  • les tourteaux et autres rĂ©sidus solides de noix ou d'amandes de palmiste ;
  • le glycĂ©rol, d'une puretĂ© de 95 % ou plus,
  • l'acide palmitique.

Notes et références

  1. Jean-Charles Jacquemard (préf. Philippe Lhoste), Le palmier à huile, Versailles, éditions Quæ, coll. « Agricultures tropicales en poche », , 240 p. (ISBN 978-2-7592-1678-9, lire en ligne), p. 5.
  2. Jean-Marie Pelt, « Michel Adanson, le baobab et les coquillages », dans La Cannelle et le panda : les grands naturalistes explorateurs autour du Monde, Fayard, 1999 (ISBN 978-2213-60466-4).
  3. J.G.Rohwer, Guide des plantes tropicales : à l'état sauvage ou acclimatées, Paris, Delachaux et Niestlé, , 286 p. (ISBN 978-2-603-01932-0), p. 34
  4. David Cros, Étude des facteurs contrôlant l’efficacité de la sélection génomique chez le palmier à huile (Elaeis guineensis Jacq.) (thèse de doctorat), Montpellier, Montpellier SupAgro, , 204 p. (présentation en ligne, lire en ligne), p. 29.
  5. Beirnaert A.D.F., et Vanderweyen R., « Contribution à l’étude génétique et biométrique des variétés d’Elaeis guineensis Jacquin », Ser. Sci. East African Standard, Congo Belge,‎ , p. 1-100
  6. Rajinder Singh, Eng-Ti Leslie Low, Leslie Cheng-Li Ooi et Meilina Ong-Abdullah, « The oil palm SHELL gene controls oil yield and encodes a homologue of SEEDSTICK », Nature, vol. 500, no 7462,‎ , p. 340–344 (ISSN 0028-0836 et 1476-4687, DOI 10.1038/nature12356, lire en ligne, consulté le )
  7. Leslie C.-L. Ooi, Eng-Ti L. Low, Meilina O. Abdullah et Rajanaidu Nookiah, « Non-tenera Contamination and the Economic Impact of SHELL Genetic Testing in the Malaysian Independent Oil Palm Industry », Frontiers in Plant Science, vol. 7,‎ (ISSN 1664-462X, PMID 27446094, PMCID PMC4914825, DOI 10.3389/fpls.2016.00771, lire en ligne, consulté le )
  8. J.C. Jacquemard, Le palmier Ă  huile, Maisonneuve et Larose, , 207 p.
  9. J Maley, S. Bahuchet & al, (1999), L'expansion du palmier à huile (Elaeis guineensis) en Afrique centrale au cours des trois derniers millénaires : nouvelles données et interprétations- ecologie-humaine.eu ; PDF, 20pp
  10. MALEY J. (1996), The African rain forest : main characteristics of changes in vegetation and climate from the upper Cretaceous to the Quaternary. Proceed. R. Soc. Edinburg, Biol. Sc., 104B, 31-73.
  11. T Durand-Gasselin & al. (2000) Diffusion variétale du palmier à huile (Elaeis guineensis Jacq.) - Revue Oléagineux, Corps Gras, Lipides, Volume 7, Numéro 2, Mars ; Avril 2000 ; jle (résumé)
  12. T Durand-Gasselin & al. (2010) SĂ©lection du palmier Ă  huile pour une huile de palme durable et responsabilitĂ© sociale - Revue OlĂ©agineux, Corps gras, Lipides, Volume 17, NumĂ©ro=6, doi=10.1051/ocl.2010.0343
  13. Valéry Laramée de Tannenberg (2013), Le palmier à huile menace désormais le bassin du Congo, brève datée 2013-02-22, consultée 2013-02-23
  14. (en) Claire Carter, Willa Finley, James Fry et David Jackson, « Palm oil markets and future supply », European Journal of Lipid Science and Technology, vol. 109, no 4,‎ , p. 307–314 (ISSN 1438-7697 et 1438-9312, DOI 10.1002/ejlt.200600256, lire en ligne, consulté le )
  15. Eric Baccega, SOS espèces menacées, Milan Jeunesse, , 94 p. (ISBN 978-2-7459-3481-9), La déforestation : la plus grande catastrophe écologique page38
  16. Amisdelaterre.org
  17. Mattea Battaglia, « Noyé dans l’huile de palme. L’explosion de la demande mondiale », Le Monde Magazine, no 39, supplément au Monde no 20336, 12 juin 2010, p. 14.
  18. FAO
  19. Ulysse, avril 2007.
  20. Les produits vendus dans l’Union européenne ne pourront plus provenir de la déforestation, consulté le 27 mai 2023]

Annexes

Bibliographie

  • (en) ISTA Mielke 2010, in MVO (2010). Fact sheet Palm Oil, Productschap Margarine, Vetten en OliĂ«n, November 2011
  • (en) Hoyle, D and Levang, P (2012), Oil Palm Development in Cameroon, WWF, IRD, CIFOR, April 2012, . And company websites and annual reports.
  • (en) Zeven A.C. (1964), On the origin of the oil palm (Elaeis guineensis Jacq.). Grana Palynologica, 5,121-123.
  • Paul Hubert, Le palmier Ă  huile, Paris, H. Dunod et E. Pinat, coll. « Bibliothèque pratique du colon : agriculture, industrie, commerce », , 1 vol. (315 p.) : fig. ; in-8 (BNF 30622898)

Articles connexes

Liens externes

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