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Module lunaire Apollo

Le module lunaire ou LEM (pour Lunar Excursion Module) ou LM (pour Lunar Module)[N 1] est le véhicule spatial utilisé dans le cadre du programme spatial américain Apollo (1961-1972) pour débarquer des hommes sur la Lune. Son rôle est de faire atterrir sur le satellite naturel deux des trois membres d'équipage du vaisseau Apollo avec des équipements scientifiques et de leur permettre d'y séjourner de deux à quatre jours avant de décoller pour rejoindre le module de commande et de service (CSM), resté en orbite lunaire et chargé de ramener l'équipage sur Terre.

Module lunaire du programme Apollo
Description de cette image, également commentée ci-après
Le module lunaire d'Apollo 16 sur la Lune.
Fiche d'identité
Constructeur Drapeau des États-Unis Grumman
Lanceur Saturn IB / Saturn V
Premier vol
Nombre de vols 10
Statut Retiré du service
Caractéristiques
Hauteur m
Diamètre 4,27 m
Masse Ă  sec 2 033 kg / 2 792 kg[1]
Masse totale 15 094 kg / 16 437 kg[1]
Ergols Peroxyde d'azote/AĂ©rozine 50
7 899 kg / 8 355 kg[1]
Source Ă©nergie Batteries
Performances
Destination Surface lunaire
Équipage 2
Espace habitable 6,65 m3
Delta-V • Descente : 2 470 m/s
• MontĂ©e : 2 220 m/s
Autonomie 35 h / 67 h[1]
Puissance Ă©lectrique 2 280 A-h / 2 667 A-h (592 A-h dans l'Ă©tage de remontĂ©e)[1]
Type d'écoutille Système drogue-and-probe
Rendez-vous Orbite lunaire
John Houbolt expliquant le scénario du LOR qu'il réussit à promouvoir non sans difficulté

Lorsqu'en 1961, le président des États-Unis, John Fitzgerald Kennedy fixe comme objectif à l'agence spatiale américaine d'envoyer des hommes sur la Lune avant la fin de la décennie, le programme spatial américain est encore balbutiant. Après avoir étudié plusieurs configurations pour le vaisseau spatial, la NASA choisit en 1962 d'avoir recours au LEM, module destiné au débarquement sur la Lune, malgré les interrogations que suscitent à cette époque le recours au rendez-vous orbital lunaire (LOR) que sous-tendait ce choix. Seule cette solution permettait en effet de tenir l'échéance fixée, en réduisant la masse à satelliser et en limitant les coûts et les risques techniques.

Le LEM comporte deux Ă©tages : un Ă©tage de descente, dont le rĂ´le principal est de faire atterrir verticalement le module lunaire grâce Ă  un moteur Ă  poussĂ©e variable, et un Ă©tage de remontĂ©e, dotĂ© de son propre moteur et dans lequel se situe la cabine pressurisĂ©e oĂą sĂ©journent les astronautes. MalgrĂ© la complexitĂ© de sa mission et une contrainte de masse très sĂ©vère (15 tonnes maximum), le LEM rĂ©ussit Ă  six reprises Ă  amener sans dĂ©faillance grave et Ă  faire sĂ©journer deux hommes dans un environnement lunaire particulièrement hostile et Ă  l'Ă©poque mal connu.

La conception et la construction du module lunaire sont réalisées sous la maîtrise d'œuvre de la société aérospatiale Grumman entre 1962 et 1969. Quinze modules lunaires sont construits, dont dix volent et six atterrissent sur le sol lunaire au cours de la période 1969-1972. Le module lunaire de la mission Apollo 13 permet de sauver l'équipage en se substituant au Module de commande et de service défaillant. Le programme Constellation, qui devait permettre de débarquer des hommes sur la Lune à l'horizon 2020, a d'ailleurs repris une grande partie des solutions développées pour le LEM.

Contexte : le choix du rendez-vous orbital lunaire (1961-1962)

Scénario du vol direct : maquette du vaisseau spatial qui devait se poser sur la lune (NASA en 1962). Les modules de commande et de service perchés en haut donnent l'échelle.

En 1959, l'agence spatiale américaine lance des études dans une perspective à long terme pour déterminer les techniques permettant d'envoyer des hommes sur la Lune. Trois scénarios principaux se dégagent[2] :

  • l'envoi direct d'un vaisseau sur la Lune (Direct Ascent) ; une fusĂ©e de forte puissance, de type Nova, propulse le vaisseau complet (vĂ©hicule lunaire et vaisseau utilisĂ© pour le retour sur Terre) vers la Lune ; l'ensemble atterrit sur la Lune puis en redĂ©colle avant de retourner sur la Terre ;
  • le rendez-vous orbital autour de la Terre (EOR, Earth-Orbit Rendez-vous) : pour limiter les risques et le coĂ»t de dĂ©veloppement de la fusĂ©e gĂ©ante que nĂ©cessite le premier scĂ©nario, les composants du vaisseau sont envoyĂ©s en orbite terrestre par deux fusĂ©es (ou plus) moins puissantes. Ces diffĂ©rents Ă©lĂ©ments sont assemblĂ©s en orbite par des astronautes, qui utilisent Ă©ventuellement une station spatiale comme base logistique. Le dĂ©roulement du vol du vaisseau, par la suite, est similaire Ă  celui du premier scĂ©nario ;
  • le rendez-vous en orbite lunaire (LOR, pour Lunar Orbital Rendez-vous) : une seule fusĂ©e est nĂ©cessaire, mais le vaisseau envoyĂ© vers la Lune comporte deux sous-ensembles qui se sĂ©parent une fois l'orbite lunaire atteinte : le module, dit « lunaire », atterrit avec une partie de l'Ă©quipage sur la Lune et en redĂ©colle pour ramener les astronautes jusqu'au module dit « de commande », restĂ© en orbite autour de la lune, qui prend en charge le retour des astronautes Ă  Terre. Cette solution permet d'Ă©conomiser du poids par rapport aux deux autres scĂ©narios (beaucoup moins de combustible est nĂ©cessaire pour l'atterrissage et le dĂ©collage) et permet de concevoir un vaisseau optimisĂ© pour l'atterrissage et le sĂ©jour sur la Lune. La fusĂ©e Ă  dĂ©velopper est moins puissante que celle requise par le premier scĂ©nario.

Lorsque le président américain John Kennedy donne à la NASA le l'objectif de faire atterrir des hommes sur la Lune avant la fin de la décennie, l'évaluation de ces trois méthodes est encore peu avancée. La NASA n'a pas encore réalisé un seul véritable vol spatial habité (le premier vol orbital de la capsule Mercury n'a lieu qu'en avec le vol de John Glenn)[N 2]. L'agence spatiale a du mal à évaluer l'ampleur des difficultés soulevées par les rendez-vous entre engins spatiaux et elle ne maîtrise pas l'aptitude des astronautes à supporter de longs séjours dans l'espace et à y travailler ; ses lanceurs ont essuyé une série d'échecs, ce qui l'incite à la prudence dans ses choix techniques. La NASA est consciente que le choix de la méthode conditionne les caractéristiques des véhicules spatiaux et des lanceurs à développer, et que tout retard pris dans cette décision pèse sur une échéance très proche, compte tenu des défis techniques à relever. Mais les responsables de la NASA vont mettre plus d'une année, passée en études et en débats, avant de sélectionner un des trois scénarios.

Comparaison des tailles de véhicules lunaires selon la méthode retenue (la taille dans le mode LOR est sous-estimée).

Le LOR est initialement la solution qui a le moins de partisans, malgrĂ© les arguments dĂ©taillĂ©s avancĂ©s par son plus ardent dĂ©fenseur John C. Houbolt, du Centre de recherche de Langley. Aux yeux de beaucoup de spĂ©cialistes et responsables de la NASA, le rendez-vous autour de la Lune entre module lunaire et module de commande paraĂ®t instinctivement trop risquĂ© : si le rendez-vous Ă©choue, les astronautes occupant le module lunaire n'ont pas le recours de freiner leur engin pour se laisser redescendre sur la Terre : ils sont condamnĂ©s Ă  tourner indĂ©finiment autour de la Lune. Les avantages de ce scĂ©nario, en particulier le gain sur la masse Ă  satelliser (45 tonnes avec le LOR contre 70 tonnes en vol direct), sont rejetĂ©s sans Ă©tude sĂ©rieuse. Houbolt, dĂ©sespĂ©rĂ©, envoie Ă  deux reprises un courrier Ă  Robert Seaman, le numĂ©ro deux de la NASA, en lui demandant d'intervenir pour que la mĂ©thode qu'il prĂ©conise soit Ă©tudiĂ©e sur le fond et non pas rejetĂ©e sur la base d'idĂ©es prĂ©conçues. En procĂ©dant ainsi, il court-circuitait plusieurs niveaux hiĂ©rarchiques et mettait en grand danger son avenir Ă  la NASA[3] - [N 3]. Toutefois, au fur et Ă  mesure que les autres scĂ©narios sont approfondis, le LOR gagne en crĂ©dibilitĂ© : les partisans du vol direct — Maxime Faget et ses hommes du Centre des Vols HabitĂ©s — se rendent compte de la difficultĂ© de faire atterrir un vaisseau lourd sur le sol irrĂ©gulier et aux caractĂ©ristiques incertaines de la Lune[4]. Wernher von Braun et l'Ă©quipe qu'il dirige au Centre de vol spatial Marshall, partisan d'un rendez-vous orbital terrestre, finit lui-mĂŞme par ĂŞtre convaincu que le choix du LOR est le seul qui permettra de tenir l'Ă©chĂ©ance fixĂ©e par le prĂ©sident Kennedy[4]

Au dĂ©but de l'Ă©tĂ© 1962, alors que les principaux responsables de la NASA se sont tous convertis au scĂ©nario du rendez-vous orbital lunaire, leur choix se heurte au veto de Jerome B. Wiesner, conseiller scientifique du prĂ©sident Kennedy. Finalement, la solution du LOR est, malgrĂ© tout, entĂ©rinĂ©e le [5]. Dès le , onze sociĂ©tĂ©s aĂ©rospatiales amĂ©ricaines sont sollicitĂ©es pour la construction du module lunaire, sur la base d'un cahier des charges Ă©tabli par la NASA. Celui-ci Ă©nonce dans ses grandes lignes les caractĂ©ristiques du module lunaire Ă  fabriquer — type de propergol, durĂ©e de la mission (2 jours), taille de l'Ă©quipage (2 personnes), nombre d'Ă©coutilles, prĂ©sence d'un système de navigation et de pilotage — ainsi que le dĂ©roulement d'une mission type. Une partie des fournitures est supervisĂ©e directement par la NASA (l'ordinateur de navigation, les scaphandres, les expĂ©riences scientifiques). La sĂ©curitĂ© de l'Ă©quipage doit ĂŞtre assurĂ©e avec un taux de 99,9 %, tandis que le taux de fiabilitĂ© du LEM est fixĂ© Ă  99,5 %[6].

Une phase de conception laborieuse (1963-1964)

Version initiale du module lunaire : la taille des hublots va être réduite, le dispositif d'amarrage situé à l'avant disparaitre et le train d'atterrissage être refondu.
Structure du module lunaire sans son revĂŞtement et sans le train d'atterrissage.

Le , la société Grumman[N 4] remporte l'appel d'offres. Ce constructeur américain du célèbre chasseur embarqué (Hellcat et, par la suite, du F-14) avait, jusque-là, soumissionné sans succès à plusieurs appels d'offres de la NASA. Grumman tient à pénétrer le marché de l'aérospatiale et avait mobilisé une importante équipe d'ingénieurs pour travailler à la conception du futur module lunaire, avant même le lancement de l'appel d'offres.

L'interlocuteur de Grumman au sein de la NASA sera le Centre des Vols HabitĂ©s de la NASA (Manned Spacecraft Center, ou MSC) qui vient d'emmĂ©nager au Centre Spatial de Houston (aujourd'hui Centre Spatial Lyndon B. Johnson ou JSC). Ce dernier doit assister Grumman dans la phase de spĂ©cifications et est chargĂ© de la qualification du module lunaire. Après un round de nĂ©gociations, destinĂ© Ă  figer la distribution des tâches et des procĂ©dures, la rĂ©munĂ©ration de Grumman est fixĂ©e Ă  385 millions $ incluant un bĂ©nĂ©fice de 25 millions pour Grumann, bien que les contractants n'aient, Ă  l'Ă©poque, qu'une idĂ©e peu prĂ©cise de l'engin Ă  construire[5].

Le projet part avec un handicap d'un an par rapport aux autres composants du programme Apollo, notamment le CSM. DĂ©but 1963, les ingĂ©nieurs de Grumman, basĂ©s Ă  Bethpage, Long Island (État de New York), commencent Ă  travailler sur l'architecture gĂ©nĂ©rale du module lunaire. Au cours des premiers Ă©changes avec la NASA, on Ă©voque un vaisseau spatial de 3 mètres de diamètre et de 4,5 mètres de haut pesant environ 11 tonnes, comportant une partie habitable de la taille et de la forme d'une cabine d'hĂ©licoptère[7].

Un étage de remontée profondément remanié

Au fur et à mesure de l'avancement des études, beaucoup de ces caractéristiques vont être remises en question.

Les hublots qui reprenaient, dans la proposition de départ, la disposition bombée d'une cabine d'hélicoptère pour procurer la vision la plus complète au pilote — ce qui était jugé essentiel pour les manœuvres délicates d'atterrissage et de rendez-vous —, voient leur taille se réduire, pour des raisons de rigidité structurelle et de contrôle thermique, à deux petits triangles de verre inclinés vers le bas, ne représentant plus que 10 % de la surface initiale.

Deux possibilités d'amarrage au module de commande et de service Apollo étaient prévues : une écoutille placée au sommet de l'étage de remontée devait être utilisée avant le débarquement sur la Lune, tandis que l'écoutille située sur la face avant était utilisée au retour lors du rendez-vous orbital lunaire pour permettre au pilote de contrôler visuellement son approche à travers les hublots : finalement, pour gagner en poids (s'il y a amarrage, il faut un tunnel et des renforts structurels), un petit hublot est ajouté dans la partie supérieure de l'étage de remontée, permettant d'utiliser également l'écoutille supérieure au retour[8].

Le Centre spatial Marshall de la NASA, à Houston, assiste Grumman dans la phase de conception et réalise les tests de réception.

Les ergols utilisés par les moteurs de remontée ont une masse différente. Chaque type d'ergol est réparti dans deux réservoirs, pour permettre une répartition symétrique de la masse. Ce schéma retenu pour l'étage de descente est abandonné dans l'étage de remontée : chaque type d'ergol sera stocké dans un seul réservoir. La distance entre chaque réservoir et l'axe de poussée sera différente, pour ne pas déséquilibrer le vaisseau. Cette disposition donne une apparence nettement dissymétrique à la silhouette de l'étage de remontée[9].

Pour économiser le poids et le volume de la cabine, les sièges des astronautes sont remplacés par de simples harnais qui maintiennent les astronautes dans les phases d'impesanteur ou de forte accélération : cette solution, viable dans le contexte de gravité généralement nulle ou faible de la mission, est acceptée par les astronautes ; elle permet au pilote, plus proche du hublot (« dans une position de conducteur de tramway », dit l'astronaute Conrad), d'avoir une meilleure visibilité sur l'extérieur[8].

Des essais dans un environnement simulant la gravité lunaire remettent en cause le dessin de l'écoutille avant ainsi que la méthode proposée pour la descente sur le sol lunaire (une corde). On donne alors une forme carrée à l'écoutille (elle était ronde à l'origine) et on l'agrandit fortement pour que les astronautes puissent passer sans encombre ; une plate-forme est ajoutée devant l'écoutille, ainsi qu'une échelle à son aplomb portée par une des jambes du train d'atterrissage[10].

Deux solutions sont étudiées pour le positionnement des équipements : à l'intérieur de la cabine pressurisée, à portée de main des astronautes, ou à l'extérieur. La solution retenue est un compromis : une partie des équipements est logée à l'extérieur de la cabine pressurisée (essentiellement sur la face arrière). Le vaisseau ne doit voler que dans le vide spatial : les ingénieurs en tirent les conséquences et éliminent dans la forme extérieure tout ce qui relève d'une recherche d'aérodynamisme et accroît le volume pressurisé. La forme résultante, peu esthétique, vaut au module lunaire les surnoms de « punaise » (bug) et « araignée » (spider).

Ces modifications, ainsi que d'autres non citées, donnent à la cabine des formes si torturées que, dans certains cas, les ingénieurs de Grumman choisissent d'assembler les éléments de la structure du LEM par rivetage (au lieu de la soudure), au grand mécontentement des représentants de la NASA, qui émettront longtemps des doutes sur l'étanchéité de la cabine pressurisée[9].

DĂ©but , plusieurs caractĂ©ristiques importantes ne sont toujours pas dĂ©finies et la masse du module lunaire continue de croĂ®tre. Toutefois, l'Ă©volution prĂ©visible de la puissance de la fusĂ©e Saturn V donne de la marge, puisque celle-ci peut dĂ©sormais emporter un module lunaire de 13 tonnes contre les 9 tonnes prĂ©vues au lancement de l'appel d'offres.

Le sol lunaire, cet inconnu

La configuration du train d'atterrissage est l'objet de nombreux dĂ©bats, car les ingĂ©nieurs ne disposent jusqu'en 1966 d'aucune donnĂ©e prĂ©cise sur la consistance du sol lunaire[N 5]. Dans le doute, la NASA modifie ses spĂ©cifications initiales en demandant Ă  Grumman de faire passer la taille des semelles situĂ©es Ă  l'extrĂ©mitĂ© des jambes du train d'atterrissage de 22 Ă  91 cm de diamètre. Mais dans cette nouvelle configuration, le LEM ne tient plus dans le carĂ©nage qui doit l'accueillir au sommet de la fusĂ©e Saturn V : il faut donc prĂ©voir un train d'atterrissage articulĂ©, qui ne sera dĂ©pliĂ© qu'une fois le module lunaire extrait de son carĂ©nage. Pour des raisons d'encombrement Ă©galement, le nombre de jambes passe de cinq Ă  quatre, après avoir envisagĂ© de le rĂ©duire Ă  trois. Cette dernière solution est Ă©cartĂ©e, car elle aurait condamnĂ© Ă  mort les astronautes en cas de rupture d'une jambe Ă  l'atterrissage[8].

Des moteurs complètement nouveaux

Moteur de l'étage de remontée.

Le module lunaire doit disposer de deux moteurs-fusées de conception nouvelle (un par étage) et de seize petits moteurs de contrôle d'attitude, regroupés par grappes de quatre et situés sur l'étage de remontée.

Le moteur de l'Ă©tage de descente a des caractĂ©ristiques qui en font sans doute la plus grande innovation technique de tout le projet Apollo dans le domaine des moteurs : pour pouvoir poser le LEM sur la Lune, la poussĂ©e du moteur doit ĂŞtre Ă  la fois orientable (de 6° maximum[11] par rapport Ă  l'axe vertical), et surtout modulable entre 4,7 et 43,9 kN[N 6] - [11]. Pour limiter le risque, Grumman demande Ă  deux industriels de construire un prototype en se proposant de sĂ©lectionner Ă  l'Ă©chĂ©ance le projet le plus abouti : la sociĂ©tĂ© Rocketdyne propose de moduler la poussĂ©e grâce Ă  l'injection d'un flux d'hĂ©lium, tandis que Space Technology Laboratories (STL) choisit de faire varier le dĂ©bit de carburant grâce Ă  des vannes et un injecteur Ă  superficie variable. DĂ©but 1965, les deux fabricants ont obtenu des rĂ©sultats sensiblement identiques : Grumman sĂ©lectionne Rocketdyne, mais la NASA intervient et impose le choix de STL, pour que Rocketdyne puisse se concentrer sur les dĂ©veloppements que cet industriel mène dans le cadre du programme Gemini[12].

Une Ă©lectronique complexe

Lorsque le projet Apollo est lancĂ©, la NASA estime nĂ©cessaire que l'Ă©quipage puisse calculer les paramètres complexes du vol sans dĂ©pendre des moyens de calcul situĂ©s sur Terre : en orbite autour de la Lune, il faut en effet composer avec le temps de latence entre deux Ă©changes Terre-Lune (3 secondes pour l'aller-retour), la nĂ©cessitĂ© de rĂ©agir rapidement dans la phase de descente vers le sol lunaire, les problèmes de communication qui peuvent survenir, etc[13].

Pour répondre à ce besoin, il est prévu que le module lunaire dispose d'un système de navigation et de pilotage complexe (le Primary Guidance, Navigation and Control System, ou PGNCS) construit autour d'une centrale à inertie et d'un ordinateur (le LGC, LEM Guidance Computer). Ce dernier prend en charge, grâce à des programmes de navigation élaborés, à la fois la détermination de la position du LEM dans l'espace, le calcul de la trajectoire à suivre et le pilotage automatique (force et direction de la poussée des moteurs).

L'ordinateur LGC0.

La NASA, qui suit directement cette fourniture, exige que le système fourni par le Massachusetts Institute of Technology (MIT) et installé dans le Module de Commande, soit repris dans le LEM malgré une évaluation négative de Grumman. Le MIT avait l'expérience d'ordinateurs embarqués à bord de sondes spatiales et plus récemment du missile Polaris[13]. La première version du LGC, fabriquée en 1963, est d'ailleurs une extrapolation de celui utilisé dans les missiles Polaris. Pour diminuer le poids et accélérer le temps de traitement, le MIT choisit de remplacer les transistors par des circuits intégrés. La fabrication des circuits intégrés à l'époque vient tout juste d'être lancée (1961) et leur fiabilité n'a pas encore pu être prouvée[N 7]. Le MIT achète à cette époque 60 % de la production mondiale pour les besoins des ordinateurs des vaisseaux Apollo[14]. La mise au point du système de Navigation et de Pilotage, fortement interfacé avec d'autres sous-systèmes du LEM, est longue et difficile : il faudra que la NASA s'implique fortement dans les relations entre le fabricant du LEM et son sous-traitant MIT pour que les principaux problèmes soient aplanis dans les délais impartis[15].

L'autonomie théorique procurée par le système de navigation et de pilotage sera fortement réduite lorsque les missions Apollo seront élaborées : c'est le contrôle au sol à Houston qui fournira en réalité les principaux paramètres, tels que la position du LEM ainsi que le vecteur de la poussée avant chaque allumage des moteurs. Houston dispose au moment des premiers vols vers la Lune de moyens de calcul plus puissants et, grâce à la télémétrie, connaît parfaitement la position des vaisseaux et leur trajectoire. Une fois une phase de vol engagée, c'est toutefois à l'ordinateur de bord d'appliquer les corrections nécessaires, en se basant sur ses capteurs et ses capacités de calcul. Par ailleurs, l'ordinateur joue un rôle essentiel pour le contrôle des moteurs (fonction autopilote) et gère de nombreux sous-systèmes, ce qui lui vaut le surnom de quatrième homme de l'équipage[13]. Sans l'ordinateur, les astronautes n'auraient pu poser le LEM sur la Lune, car lui seul pouvait optimiser suffisamment la consommation de carburant pour se contenter des faibles marges disponibles[16].

Il est prévu que le LEM dispose de deux radars : l'un utilisé pour l'atterrissage, l'autre pour le rendez-vous avec le CSM. La NASA va longtemps hésiter pour des raisons de poids et de performance, entre l'installation d'un radar de rendez-vous et un système purement optique[17].

Fiabilité

Manuel de familiarisation distribué par le maître d'œuvre Grumman à ses employés (1964).

La NASA est, dès le lancement du programme Apollo, très sensible aux problèmes de fiabilité. L'envoi d'astronautes sur la Lune est une entreprise beaucoup plus risquée que les vols spatiaux autour de la Terre. Pour les missions en orbite terrestre, en cas d'incident grave, le retour est assuré relativement facilement par une brève poussée des rétrofusées. Une fois en orbite lunaire ou, cas encore plus délicat, sur le sol lunaire, le retour des astronautes sur Terre nécessite que les principaux sous-systèmes du module lunaire ne connaissent aucune défaillance. Ces objectifs font du module lunaire un système complexe donc susceptible d'avoir un taux de panne élevé.

Comme sur le module de service, les ergols liquides retenus pour les moteurs sont hypergoliques, c'est-à-dire qu'ils s'enflamment spontanément quand ils sont mis en contact et ne sont pas à la merci d'un système d'allumage défaillant. Leur mise sous pression est effectuée classiquement grâce à de l'hélium, supprimant le recours à une fragile turbopompe. Il n'est à l'époque pas du tout envisagé de recourir aux carburants cryogéniques (Oxygène/Hydrogène), plus performants mais dont le stockage et la mise en œuvre auraient été beaucoup plus délicats.

Pour parvenir au taux de fiabilité visé, la NASA envisage d'abord de donner aux astronautes la possibilité de réparer les composants défaillants. Mais ce choix suppose de les former à des systèmes nombreux et complexes, d'emporter des outils et des pièces de rechange et de rendre accessibles les composants à réparer, ce qui les rend vulnérables à l'humidité et à la contamination. La NASA renonce à cette solution en 1964[17] et décide d'intégrer dans la conception du vaisseau des solutions de contournement fournissant une alternative pour chaque anomalie susceptible de se produire. En cas de panne de sous-systèmes complets jugés vitaux, des systèmes de secours doivent pouvoir prendre le relais dans un mode plus ou moins dégradé. Ainsi le système de navigation (ordinateur + système inertiel) dispose d'un système de secours développé par un autre constructeur, pour éviter qu'une même faille logicielle mette en panne les deux systèmes. Les quatre groupes de moteurs de contrôle d'attitude sont regroupés par paires indépendantes, chacune d'entre elles pouvant couvrir le besoin en mode dégradé. Le système de régulation thermique est doublé. Les circuits d'alimentation électrique sont également doublés. L'antenne de télécommunications en bande S peut être remplacée par deux antennes plus petites en cas de défaillance. Il n'y a néanmoins pas de parade à une panne de moteur : seuls des tests poussés avec un maximum de réalisme peuvent permettre d'atteindre le taux de fiabilité attendu. Des solutions techniques conservatrices mais éprouvées sont dans certains cas retenues : c'est le cas de l'énergie électrique (choix des batteries), des systèmes pyrotechniques (choix de systèmes existants standardisés et éprouvés), ainsi que l'électronique de bord (les circuits intégrés, bien qu'acceptés dans les ordinateurs, ne sont pas retenus pour le reste de l'électronique).

Selon Neil Armstrong, les responsables du projet avaient calculĂ© qu'il y aurait environ 1 000 anomalies Ă  chaque mission Apollo (fusĂ©e, CSM et LEM), chiffre extrapolĂ© du nombre de composants et du taux de fiabilitĂ© exigĂ© des constructeurs. Il y en aura en fait en moyenne 150[N 8] ce qu'Armstrong attribue Ă  l'implication exceptionnellement forte des personnes ayant travaillĂ© sur le projet[18]. Aucune des pannes du LEM n'empĂŞcha les Ă©quipages Apollo de remplir leurs principaux objectifs.

La validation de la conception

Pas moins de cinq maquettes plus ou moins complètes sont réalisées par Grumman entre 1963 et 1964 (la dernière M5 en ), pour mettre au point et faire valider par la NASA les spécifications du Module Lunaire[19].

Fabrication et tests (1965-1967)

La fabrication des modules lunaires démarre en 1965. Elle porte à la fois sur des modules opérationnels et des versions utilisées pour des tests au sol et en vol. La construction du module lunaire rencontre de graves problèmes de délai, de surpoids et de qualité, qui menacent le programme Apollo tout entier. Certain tests en vol devront être repoussés, mais l'incendie de la capsule du Module de Commande d'Apollo 1, en repoussant l'échéance, permettra au LEM d'être prêt à temps.

Modules lunaires fabriqués

Quinze modules lunaires seront construits. Sur ce nombre, deux d'entre eux ne voleront pas (les LM-2 et LM-9), les trois derniers resteront inachevés, à la suite de l'interruption du programme Apollo (les LM-13, LM-14 et LM-15), trois seront utilisés pour les tests en vol (les LM-1, LM-3 et LM-4), enfin, le LM-7 ne s'est jamais posé sur la lune, à la suite de l'interruption de la mission Apollo 13. Par ailleurs, six LEM seront construits pour les tests au sol (LTA : Lunar Module Article) : le LTA-2 pour les tests de vibration, le LTA-10 utilisé pour les tests de compatibilité avec la fusée Saturn, le LTA-1 à usage interne, le LTA-8 pour les tests thermiques et d'exposition au vide et enfin les LTA-3 et LTA-5, sur lesquels sont effectués les tests structuraux combinés de vibrations, accélérations et essais moteurs[20]. Deux simulateurs statiques sont également fabriqués par Grumman[7].

Modules lunaires utilisés par les missions habitées
Code Nom Mission Apollo Date lancement Localisation actuelle
LM-1 Apollo 5 S'est désintégré lors de sa rentrée dans l'atmosphère terrestre.
LM-2 Devait être utilisé pour un vol, se trouve au National Air and Space Museum, Washington.
LM-3 Spider Apollo 9 S'est désintégré lors de sa rentrée dans l'atmosphère terrestre.
LM-4 Snoopy Apollo 10 L'étage de descente s'est écrasé sur la Lune ; l'étage de remontée est en orbite autour du Soleil.
LM-5 Eagle Apollo 11 L'étage de descente est posé sur la Lune ; l'étage de remontée, laissé en orbite autour de la Lune, s'est finalement écrasé sur celle-ci.
LM-6 Intrepid Apollo 12 L'étage de descente est posé sur la Lune ; l'étage de remontée s'est écrasé volontairement sur la Lune.
LM-7 Aquarius Apollo 13 S'est désintégré lors de sa rentrée dans l'atmosphère terrestre.
LM-8 Antares Apollo 14 L'étage de descente est posé sur la Lune ; l'étage de remontée s'est écrasé volontairement sur la Lune.
LM-9 Devait voler avec Apollo 15, la mission fut modifiée, en exposition au Centre spatial Kennedy.
LM-10 Falcon Apollo 15 L'étage de descente est posé sur la Lune ; l'étage de remontée s'est écrasé volontairement sur la Lune.
LM-11 Orion Apollo 16 L'étage de descente est posé sur la Lune ; l'étage de remontée, laissé en orbite autour de la Lune, s'est finalement écrasé sur celle-ci.
LM-12 Challenger Apollo 17 L'étage de descente est posé sur la Lune ; l'étage de remontée s'est écrasé volontairement sur la Lune.

Dépassements budgétaires

Maquette du module lunaire LTA-2R en cours d'installation sur Apollo 6 pour tester en vol le comportement dynamique de sa structure.
Le LEM d'Apollo 15 sur la Lune avec le rover lunaire.

Début 1965[N 9], les principales interrogations concernant la conception sont levées. La fabrication de sous-ensembles du LEM et les tests sont lancés. Mais le projet se heurte à des problèmes de dépassement budgétaire, de management et de méthodologie de test.

Cette année-là, le programme Apollo dans son ensemble doit faire face à une décrue budgétaire programmée. Or, les coûts des différents modules sont en train d'exploser. La NASA renégocie avec Grumman un contrat comportant des clauses incitant le fabricant à rester dans l'enveloppe budgétaire attribuée au module lunaire qui est désormais, tous intervenants confondus, fixée à 1,42 milliard de dollars[20].

Un problème de surpoids

En 1965, les concepteurs du module lunaire n'ont encore qu'une idĂ©e imprĂ©cise du poids final de l'engin, mais la limite des 13,3 tonnes imposĂ©e par les capacitĂ©s de la fusĂ©e Saturn V est rapidement dĂ©passĂ©e. Des mesures ponctuelles, comme l'abandon du radar de rendez-vous au profit d'un système optique (mais un veto des astronautes imposera in fine l'installation du radar), n'Ă©taient pas suffisantes. Le module lunaire, malgrĂ© un relèvement de la masse autorisĂ©e Ă  14,85 tonnes dĂ©but 1965, est de nouveau en surpoids. Thomas J. Kelly, chef du projet chez Grumman, conscient que le LEM dans sa version finale, risque de ne pas rĂ©pondre aux contraintes de masse, lance au cours de l'Ă©tĂ© 1965 un programme spĂ©cifique pour la chasse aux excĂ©dents de poids. L'allègement des structures ne va permettre d'Ă©conomiser que 50 kg ; une masse de 1 100 kg est gagnĂ©e, en grande partie en remplaçant les boucliers thermiques rigides situĂ©s près des moteurs par un millefeuille constituĂ© de couches alternĂ©es d'aluminium et de mylar. Mais ces allègements, en fragilisant la structure, rendront la construction et la manipulation du LEM très dĂ©licate[21].

Un planning tendu

Grumman rencontre de nombreux problèmes de fabrication qui affectent le planning de livraison : le suivi des nombreux sous-traitants n'est pas assez serré et les tests réalisés se révèlent insuffisants compte tenu de la complexité du véhicule. La mise au point du moteur de descente rencontre des problèmes graves (érosion du divergent), que le constructeur n'arrive pas à corriger. Fin 1966 les LM-1 et 2 sont en cours de tests chez le constructeur, tandis que les LM-3 à LM-7 en sont à différents stades de fabrication[22].

En 1967 et jusqu'à , le moteur de l'étage de remontée, conçu par Bell, a des problèmes de stabilité qui incitent la NASA à faire développer un nouvel injecteur par la société Rocketdyne[23].

Des problèmes de qualité

L'incendie de la capsule Apollo 1 (), provoqué par un court-circuit en atmosphère d'oxygène pur, n'entraîne pas de révision de la conception du module lunaire. En revanche, les exigences de qualité sont revues à la hausse par la NASA, ce qui nécessite la modification de certains composants. Le calendrier du projet Apollo est repoussé de 19 mois, ce qui permet au LEM de combler une partie de son retard[24].

Début 1968, des traces de corrosion sous contrainte sont découvertes dans la structure en alliage d'aluminium des LEM : des renforcements ponctuels et un changement d'alliage pour les LEM restant à construire sont décidés[23]. Toujours en 1968, le câblage électrique s'avère trop fragile et sujet à des ruptures[23].

La préparation au vol lunaire : les programmes Ranger, Pegasus, Lunar Orbiter, Gemini et Surveyor

Parallèlement au programme Apollo, la NASA lance plusieurs programmes qui doivent valider les choix effectués et permettre de préparer les futures missions lunaires. En 1965, trois satellites Pegasus sont placés en orbite par une fusée Saturn I pour évaluer le danger représenté par les micrométéorites ; les résultats seront utilisés pour dimensionner la protection des vaisseaux Apollo[25]. Les sondes Ranger (1961-1965), après une longue série d'échecs, ramènent à compter de fin 1964 une série de photos de bonne qualité, qui permettent de définir les zones d'atterrissage.

Le programme Lunar Orbiter, composĂ© de cinq sondes qui sont placĂ©es en orbite autour de la Lune en 1966 et 1967, complète ce travail : une couverture photographique de 99 % du sol lunaire est rĂ©alisĂ©e, la frĂ©quence des micromĂ©tĂ©orites dans la banlieue lunaire est dĂ©terminĂ©e, ainsi que l'intensitĂ© du rayonnement cosmique. Le programme permet Ă©galement de valider le fonctionnement du rĂ©seau de tĂ©lĂ©mesure : les mesures effectuĂ©es permettent de dĂ©terminer que le champ de gravitation lunaire n'est pas homogène, contrairement Ă  celui de la Terre, rendant dangereuses les orbites avec des pĂ©rigĂ©es Ă  basse altitude. Le phĂ©nomène, sous-estimĂ©, abaissera Ă  10 km le pĂ©rigĂ©e du LEM d'Apollo 15, dont l'Ă©quipage Ă©tait endormi, alors que la limite de sĂ©curitĂ© avait Ă©tĂ© fixĂ©e Ă  15 km[26].

La technique du rendez-vous spatial, à la base de la création du module lunaire, est testée en vol avec succès avec un étage Agena par l'équipage de Gemini 8 le . Le de la même année, la sonde Surveyor 1 effectue le premier atterrissage en douceur sur la Lune, fournissant des informations précieuses et rassurantes sur la consistance du sol lunaire (le sol est relativement ferme).

L'entrainement des pilotes du LEM : les simulateurs de vol

Le LLRV est un simulateur volant qui reproduit le comportement du LEM en gravité lunaire.

La phase finale de l'atterrissage sur la Lune est un exercice difficile : pour des raisons de poids, la marge de carburant disponible est très faible (sur l'ensemble des missions Apollo, il restera entre 3 et 6 % de carburant dans les rĂ©servoirs du LEM Ă  l'atterrissage, soit 2 minutes de vol au maximum[27]) et il faut trouver sur un sol lunaire constellĂ© de cratères et de blocs de pierre, un terrain suffisamment plat pour que le LEM ne bascule pas au moment de l'atterrissage et qu'il puisse par la suite redĂ©coller (ce qui nĂ©cessite moins de 20 % de pente). Les vitesses verticale et horizontale Ă  l'atterrissage doivent ĂŞtre limitĂ©es, pour Ă©viter que le train d'atterrissage ne se brise ou que le LEM bascule, ce qui aurait condamnĂ© les pilotes. On demande Ă©galement au pilote d'effectuer un atterrissage prĂ©cis : chaque mission a pour objectif de poser le LEM dans une zone sĂ©lectionnĂ©e Ă  l'avance pour son intĂ©rĂŞt gĂ©ologique. Certaines des missions seront confrontĂ©es Ă  deux autres problèmes : une luminositĂ© gĂŞnant la reconnaissance des reliefs et, en phase finale (Ă  compter de 30 mètres d'altitude pour Apollo 15), la poussière soulevĂ©e par le jet du moteur-fusĂ©e, qui empĂŞche de distinguer les reliefs et de connaĂ®tre la vitesse horizontale rĂ©siduelle Ă  ce moment critique. Poser un tel engin du premier coup, sans faire d'erreurs et en ne l'ayant jamais rĂ©ellement pilotĂ©, nĂ©cessitait un entraĂ®nement intensif sur Terre.

Aussi, trois types de simulateurs de vol sont mis à la disposition des astronautes, pour qu'ils puissent s'entraîner à manœuvrer le module lunaire dans des conditions s'approchant au maximum de celles rencontrées sur la Lune[28] :

  • un simulateur fixe, qui permet aux astronautes de maĂ®triser les procĂ©dures normales et d'urgence, ainsi que de s'entraĂ®ner Ă  repĂ©rer et atterrir sur le site choisi pour la mission : Ă  cet effet, le pilote dispose d'une vue filmĂ©e par une camĂ©ra qui survole une maquette en trois dimensions de la rĂ©gion du site ;
  • une maquette de module lunaire, suspendue Ă  un portique au-dessus d'un terrain configurĂ© comme la surface de la Lune
  • un engin volant complètement libre, le LLRV, dont le comportement reproduit celui du module lunaire, grâce Ă  la poussĂ©e d'un turborĂ©acteur montĂ© sur cardan et pilotĂ© par un ordinateur Ă  l'aide de commandes de vol Ă©lectriques, qui annule en permanence cinq sixièmes de la gravitĂ© terrestre. Trois des cinq exemplaires du LLRV (surnommĂ© « sommier volant ») seront dĂ©truits en vol au cours des vols de formation et de test, sans faire de victimes (Neil Armstrong Ă©chappera Ă  la mort Ă  une seconde près, lors d'un vol d'entrainement au cours duquel il dut s'Ă©jecter, peu de temps avant son envol historique vers la lune).

Les caractéristiques du module lunaire

Schéma du LEM.
Schéma du LEM.

Le module lunaire comporte deux étages. Un étage de descente permet d'atterrir sur la Lune. Cet étage sert de plate-forme de lancement à l'étage de remontée, qui ramène les astronautes au vaisseau Apollo en orbite à la fin de leur séjour sur la Lune.

La structure

La structure du module lunaire est, pour l'essentiel, rĂ©alisĂ©e avec un alliage d'aluminium choisi pour sa lĂ©gèretĂ©. Les pièces sont gĂ©nĂ©ralement soudĂ©es entre elles mais parfois Ă©galement rivetĂ©es. La paroi extĂ©rieure de l'Ă©tage de remontĂ©e est constituĂ©e par une structure d'aluminium en nid d'abeille prise en sandwich entre deux feuilles d'aluminium de 0,305 mm, une Ă©paisseur suffisante pour supporter l'atmosphère pressurisĂ©e de la cabine. L'isolation thermique est assurĂ©e par une feuille d'aluminium liĂ©e Ă  des panneaux d'acier Ă  structure en nid d'abeille remplie d'un matĂ©riau isolant en verre phĂ©nolique.

L'Ă©tage de descente

Le corps de l'Ă©tage de descente, qui pèse plus de 10 tonnes, a la forme d'une boĂ®te octogonale d'un diamètre de 4,12 mètres et d'une hauteur de 1,65 mètre. Sa structure, constituĂ©e de deux paires de panneaux parallèles assemblĂ©s en croix, dĂ©limite cinq compartiments carrĂ©s (dont un central) et quatre compartiments triangulaires. Le corps de l'Ă©tage est enveloppĂ© dans plusieurs pellicules de matĂ©riaux servant d'isolant thermique. Cette protection est renforcĂ©e près de la tuyère du moteur de descente.

La fonction principale de l'Ă©tage de descente est d'amener le LEM sur la Lune. Ă€ cet effet, l'Ă©tage dispose d'un moteur fusĂ©e Ă  la fois orientable et Ă  poussĂ©e variable. La modulation de la poussĂ©e permet d'optimiser la trajectoire de descente, mais surtout de poser en douceur le LEM, qui s'est fortement allĂ©gĂ© en consommant ses ergols. Le comburant — du peroxyde d'azote (5 tonnes) — et le carburant — de l'aĂ©rozine 50 (3 tonnes) — sont stockĂ©s dans quatre rĂ©servoirs placĂ©s dans les compartiments carrĂ©s situĂ©s aux quatre coins de la structure. Le moteur se trouve dans le compartiment carrĂ© central.

Le deuxième rôle de l'étage de descente est de transporter tous les équipements et consommables qui peuvent être abandonnés sur la Lune à la fin du séjour, ce qui permet de limiter le poids de l'étage de remontée. Les quatre compartiments triangulaires délimités par la structure octogonale reçoivent :

Le train d'atterrissage

Pour se poser sur un sol lunaire, dont la consistance est mal connue au moment de la conception du LEM, l'Ă©tage de descente dispose d'un train d'atterrissage[N 10] comportant quatre jambes largement Ă©cartĂ©es pour procurer la meilleure stabilitĂ© Ă  l'atterrissage. Chaque jambe se termine par une semelle d'un diamètre de 94 cm, qui doit limiter l'enfoncement du LEM mĂŞme dans un sol très meuble. Des structures en nid d'abeille, situĂ©es au niveau des jambes et des semelles, s'Ă©crasent au moment de la prise de contact avec le sol et jouent ainsi le rĂ´le d'amortisseur : le train d'atterrissage est conçu pour supporter une vitesse horizontale de 1,22 m/s et une vitesse verticale de 2,43 m/s (3 m/s si la vitesse horizontale est nulle). La semelle de chaque pied est prolongĂ©e vers le bas par une tige longue de 1,50 mètre qui, au moment du contact avec le sol, allume un voyant sur le tableau de bord ce qui doit donner le temps au pilote d'Ă©teindre le moteur avant le contact avec le sol. Le train d'atterrissage, stockĂ© en position repliĂ©e au dĂ©part, est dĂ©ployĂ© lorsque le LEM est mis en orbite autour de la Lune[29].

L'étage de remontée

L'étage de remontée du LEM d'Apollo 17, Challenger, peu avant l'accostage avec le module de commande America, après un séjour de trois jours sur la Lune.

L'Ă©tage de remontĂ©e pèse environ 4,5 tonnes. Sa forme complexe, qui rĂ©sulte d'une optimisation de l'espace occupĂ©, lui donne l'allure d'une tĂŞte d'insecte. Il est essentiellement composĂ© de la cabine pressurisĂ©e, qui hĂ©berge deux astronautes dans un volume de 4,5 m3, et du moteur de remontĂ©e avec ses rĂ©servoirs d'ergols.

Les moteurs

La trajectoire de retour vers le module de commande Ă©tant beaucoup plus simple, la poussĂ©e du moteur est constante. Les ergols — 910 kg de peroxyde d'azote et 1,4 tonne d'aĂ©rozine 50 — sont stockĂ©s chacun dans un unique rĂ©servoir mis sous pression par de l'hĂ©lium. L'architecture gĂ©nĂ©rale de l'Ă©tage est conçue de manière que le centre de masse et le centre de poussĂ©e du moteur soient très proches (moins d'un mètre) : le moteur est placĂ© très haut (le sommet dĂ©passe dans la cabine) et les rĂ©servoirs sont placĂ©s de part et d'autre de la cabine. Cette disposition limite le couple Ă  exercer pour maintenir l'Ă©tage dans la direction voulue durant la phase propulsĂ©e. Le moteur n'est pas orientable, et les corrections sont rĂ©alisĂ©es par des moteurs de contrĂ´le d'attitude (RCS, Reaction Control System) de 45 kg de poussĂ©e, regroupĂ©s en quatre grappes de quatre moteurs, situĂ©es Ă  chaque angle de l'Ă©tage, et dont les actions combinĂ©es permettent d'agir selon les trois axes de lacet, de tangage et de roulis. Pour maximiser leur efficacitĂ©, ils sont Ă©cartĂ©s au maximum de l'axe de la poussĂ©e du moteur principal[30].

La cabine pressurisée

Cabine pressurisée : les astronautes en position de vol et au repos.

La partie avant de la cabine pressurisĂ©e occupe la plus grande partie d'un cylindre de 2,34 mètres de diamètre et de 1,07 mètre de profondeur. C'est lĂ  que se tient l'Ă©quipage lorsqu'il n'est pas en excursion sur la Lune. Le pilote (Ă  gauche face Ă  l'avant) et le commandant de bord sont debout, tenus par des harnais qui les maintiennent en place en impesanteur et durant les phases d'accĂ©lĂ©ration. Sur la cloison avant, chaque astronaute a devant lui un petit hublot triangulaire de 0,18 m2[N 11] inclinĂ© vers le bas, qui lui permet d'observer le sol lunaire avec un bon angle de vision, ainsi que les principales commandes de vol et cadrans de contrĂ´le, regroupĂ©s par panneaux gĂ©nĂ©ralement affectĂ©s Ă  un sous-système. Les commandes et contrĂ´les communs sont placĂ©s entre les deux astronautes (par exemple la console d'accès Ă  l'ordinateur de navigation), certaines commandes sont doublĂ©es (commandes pilotant l'orientation et la poussĂ©e des moteurs), les autres commandes sont rĂ©parties en fonction des tâches assignĂ©es Ă  chaque astronaute. Les panneaux de commandes et coupe-circuit se prolongent sur les parois latĂ©rales situĂ©es de part et d'autre des astronautes. Le pilote a au-dessus de sa tĂŞte un petit hublot de 0,07 m2, qui lui permet de contrĂ´ler la manĹ“uvre de rendez-vous avec le module de commande. En haut du panneau central situĂ© face aux astronautes se trouve le tĂ©lescope utilisĂ© pour faire le point avec les astres, et au ras du plancher, l'Ă©coutille de forme carrĂ©e (96 Ă— 96 cm) qui est utilisĂ©e pour descendre sur le sol lunaire[31].

L'arrière de la cabine pressurisĂ©e est beaucoup plus exigu (1,37 Ă— 1,42 m pour 1,52 m de haut) : son plancher est plus haut de 48 cm et, de plus, encombrĂ© par un capot recouvrant le sommet du moteur de remontĂ©e. Les parois latĂ©rales sont occupĂ©es par les rangements et, Ă  gauche, par une partie du système de contrĂ´le environnemental. Dans cette niche, les astronautes rangent le deuxième système de survie portable (le premier se trouve couchĂ© sur le plancher de la cabine avant entre les deux astronautes), la nourriture, les scaphandres de sortie avec les bottes et les casques, les sacs de dĂ©chets corporels… Derrière la cloison arrière se situe un compartiment non pressurisĂ©, dans lequel est logĂ©e une grande partie des composants Ă©lectriques et Ă©lectroniques. Au plafond, se trouve l'Ă©coutille utilisĂ©e pour passer dans le module de commande : derrière cette porte, on trouve un tunnel court (80 cm de diamètre pour 46 cm de long) comportant un système de verrouillage utilisĂ© pour solidariser les deux vaisseaux. Les forces en jeu au moment de l'accostage, qui pourraient dĂ©former le tunnel, sont amorties par des poutres qui les rĂ©percutent sur toute la structure[31].

Les panneaux de commande comportent environ 170 interrupteurs, en majoritĂ© Ă  deux ou trois positions, rĂ©partis entre plusieurs panneaux de contrĂ´le et plus de 80 afficheurs, dont plus de vingt fournissant des informations quantifiĂ©es (quatre afficheurs numĂ©riques, dix-huit indicateurs Ă  aiguille…)[32]. L'Ă©lectroluminescence, une technologie alors balbutiante[N 12], est utilisĂ©e pour Ă©clairer les tableaux de commande et de contrĂ´le : les voyants sont plus lisibles et la consommation Ă©lectrique est diminuĂ©e[10].

Le LEM ne dispose pas de sas, qui aurait ajouté trop de poids. Pour descendre sur le sol lunaire, les astronautes font le vide dans la cabine et, à leur retour, ils pressurisent la cabine avec les réserves d'oxygène. Pour descendre, ils se glissent dans l'écoutille : celle-ci donne sur une petite plate-forme horizontale qui débouche sur l'échelle, dont les barreaux sont situés de part et d'autre d'une des jambes de l'étage de descente.

Le système de navigation et de pilotage principal

Schéma de la partie avant de la cabine.
Schéma de la console de l'ordinateur principal de navigation (LGC).
Cabine : vue vers l'avant.
Sur ce LEM (Apollo 11), on distingue bien l'électronique installée dans le compartiment arrière.

Le Module Lunaire embarque deux systèmes, qui réalisent la navigation (le calcul de la position et la définition de la trajectoire) et le pilotage (la gestion des commandes de vol conformément à la trajectoire retenue) du module lunaire. Chacun de ces systèmes repose sur un ordinateur : ce sont le LEM Guidance Computer (LGC) et l'Abort Guidance System (AGS). Ce dernier est mis en œuvre en cas de défaillance du LGC.

Le LGC, en français l'ordinateur de guidage du LEM, est un ordinateur effectuant des traitements en temps rĂ©el. Il est multitâche (jusqu'Ă  huit tâches exĂ©cutĂ©es en parallèle). La mĂ©moire utilise des mots de seize bits : elle est composĂ©e de 64 ko (32 000 mots) de mĂ©moire morte, contenant l'ensemble des programmes, et de ko (2 000 mots) de mĂ©moire vive (effaçable) utilisĂ©e par les traitements. Les deux types de mĂ©moire sont constituĂ©s de tores magnĂ©tiques : les programmes sont implantĂ©s dans l'ordinateur Ă  la fabrication. Le processeur est constituĂ© d'environ 5 000 portes NOR, rĂ©alisĂ©es Ă  l'aide de circuits intĂ©grĂ©s. Il pèse environ 35 kg[33].

Le LGC reçoit ses principales informations du système inertiel (IMU) ainsi que des deux radars, lorsque ceux-ci sont activés. Utilisant des programmes de navigation pour chaque phase de la mission, il est capable de piloter en direction et en poussée les deux moteurs principaux ainsi que les seize moteurs d'orientation, pour que LEM suive la trajectoire qui a été calculée. Les astronautes utilisent une console (DSKY) pour entrer des instructions : lancement de programme de navigation, demande d'information, réinitialisation de la position, saisie des paramètres de vol à exécuter, etc.

Les aides Ă  la navigation

Le système inertiel doit être régulièrement recalé en effectuant un relevé de la position du LEM dans l'espace. À cet effet, les astronautes disposent du télescope optique d'alignement (AOT, Alignment Optical Telescope). Cet instrument permet de relever la position des étoiles et est interfacé avec l'ordinateur embarqué. Deux méthodes peuvent être utilisées. Lorsque le LEM navigue seul, l'astronaute entre une référence d'étoile dans l'ordinateur : celui-ci fait alors pivoter avec ses moteurs d'orientation le vaisseau de manière que l'étoile passe devant l'optique du télescope[N 13]). L'étoile va successivement couper l'abscisse et l'ordonnée d'un réticule qui s'affiche dans l'optique. L'astronaute signale à l'ordinateur au moyen de deux boutons situés sur la monture du télescope le moment où les deux lignes sont successivement coupées. En relevant la position de deux étoiles, l'ordinateur peut recalculer la position du LEM, et si besoin recaler la centrale inertielle. Lorsque le LEM ne peut pas pivoter librement — lorsqu'il est posé sur la Lune ou lorsqu'il est accouplé au module de commande —, l'astronaute fait pivoter le réticule de manière à recouper les deux lignes d'un réticule dédié. Il relève à chaque fois l'angle que fait le réticule, puis saisit les informations dans l'ordinateur[34] - [35].

Le module lunaire dispose par ailleurs de deux radars :

  • Le radar de rendez-vous (Rendezvous Radar) est utilisĂ© pour la manĹ“uvre de rendez-vous avec le Module de Commande, après sa remontĂ©e depuis la Lune et sa mise en orbite basse. Un transpondeur radar embarquĂ© Ă  bord du module de commande envoie un signal en rĂ©ponse Ă  l'Ă©mission du radar, qui est analysĂ© et fournit la distance, la vitesse et l'angle que forme le vaisseau cible avec l'axe du LEM. Le radar a une portĂ©e nominale de 75 km. L'antenne du radar peut ĂŞtre pointĂ©e manuellement vers la cible par un astronaute. Elle peut ĂŞtre Ă©galement maintenue pointĂ©e vers la cible par un système automatique autonome (qui comprend un gyroscope) ou par l'intermĂ©diaire de l'ordinateur de bord. Ă€ partir du moment oĂą le radar a accrochĂ© le transpondeur, la distance, la vitesse relative et le gisement (angle en abscisse et ordonnĂ©e) du module de commande sont affichĂ©s sur le tableau de bord[36].
  • Le radar d'atterrissage (Lunar Radar) dĂ©termine l'altitude au-dessus du sol lunaire et la vitesse de dĂ©filement du LEM par rapport au sol. Il est installĂ© sur l'Ă©tage de descente. Le radar est activĂ© lorsque le vaisseau est descendu Ă  moins de 15 km d'altitude, mais ses donnĂ©es ne sont utilisĂ©es par l'ordinateur de navigation qu'Ă  partir de l'altitude de 12 km. L'antenne du radar a deux positions, pour pouvoir fonctionner lorsque le LEM est en phase de freinage (l'axe vertical du LEM est alors parallèle au sol lunaire) et en phase d'approche finale (axe vertical du LEM plus ou moins perpendiculaire au sol lunaire). Ă€ l'atterrissage, lorsque le sol est Ă  moins de 15 mètres, en l'absence de vitesse horizontale, il ne peut plus fournir d'information valable : l'ordinateur utilise alors les donnĂ©es fournies par le gyroscope. Les donnĂ©es du radar sont affichĂ©es sur le tableau de bord[37].

Au cours des deux manœuvres de rendez-vous, au moment de l'approche finale, le pilote doit aligner exactement le module lunaire selon les trois axes avec le module de Commande. À cet effet, il dispose d'un système de visée optique, le COAS (Crewman Optical Alignment Sight). Cet instrument est monté sur le hublot supérieur destiné à la manœuvre. Il projette un réticule que le pilote doit superposer avec la cible située sur le Module de Commande[38].

Pour se signaler durant les manĹ“uvres de rendez-vous avec le module de Commande, le LEM a des feux de position visibles Ă  plus de 300 mètres : les conventions terrestres sont reprises : un feu rouge signale le cĂ´tĂ© bâbord, un vert le tribord et un feu blanc l'arrière ; par ailleurs deux feux, l'un blanc l'autre jaune, matĂ©rialisent sur la face avant l'axe horizontal[39]. Pour faciliter le repĂ©rage Ă  grande distance par le module de commande, un feu scintillant (50 Ă©clats par seconde) Ă©met une lumière visible Ă  près de 700 km (400 nautiques)[40].

L'AGS : le système de navigation de secours

L'AGS (Abort Guidance System, système de guidage d'abandon) est un système de navigation et de pilotage destiné à remplacer le système principal (LGC), en cas de défaillance de celui-ci durant les phases de descente sur la Lune ou de remontée. L'activation de l'AGS entraîne l'interruption de la mission et le largage de l'étage de descente si le LEM est en cours d'atterrissage. L'AGS est conçu par une société différente TRW[N 14]. Il est composé de :

  • Un ordinateur AEA (pour Abort Electronics Assembly), dotĂ© d'une mĂ©moire vive de ko et d'une mĂ©moire morte de ko dĂ©diĂ©e aux programmes (mot de 18 bits). La mĂ©moire utilise la mĂŞme technologie que l'AGS.
  • Un système inertiel ASA (pour Abort Sensor Assembly), très compact (kg), composĂ© de trois accĂ©lĂ©romètres.
  • D'une console d'affichage et de saisie DSE (pour Data Sensor Assembly) : plus rudimentaire que celle du LGC, elle permet d'afficher et de saisir des donnĂ©es dans l'AGS.

L'ensemble pèse 28 kg et consomme une centaine de watts quand il est utilisĂ©. Pour son fonctionnement, l'AGS exploite les donnĂ©es des radars et de son système inertiel. Plus simple que le système principal, il dispose des fonctions suivantes : ramener le vaisseau en orbite basse, effectuer les manĹ“uvres pour placer le LEM en orbite de transfert, corriger l'orbite, effectuer la manĹ“uvre de rendez-vous avec le module de Commande. Les programmes sont diffĂ©rents de ceux du LGC, pour Ă©viter qu'une mĂŞme faille de programmation se retrouve dans les deux systèmes.

Au démarrage, l'initialisation des caractéristiques de la position et de la trajectoire est réalisée soit par transfert depuis l'ordinateur de navigation principal, soit par saisie à l'aide de la console dédiée. Il agit sur la poussée du moteur principal et les moteurs d'attitude, conformément au programme sélectionné, et restitue au pilote certaines informations (altitude, vitesse) sur le tableau de bord. L'AGS est également utilisé pour vérifier les calculs de l'ordinateur de navigation principal, lorsque celui-ci fonctionne. Il fournit des informations télémétriques périodiques au Contrôle au sol[41].

Le système de contrôle environnemental

Une partie du système de contrôle environnemental est dans la cabine, comme ici le très célèbre filtre à CO2 « bricolé », qui permit aux astronautes de la mission Apollo 13 de ne pas mourir asphyxiés par le dioxyde de carbone.
Vue arrière du LEM d'Apollo 11 : Buzz Aldrin est en train de sortir un sismomètre de l'une des baies de l'étage de descente.

Le système de contrôle environnemental est chargé de fournir des conditions vivables pour les deux astronautes (oxygène, température), de maintenir l'électronique dans une fourchette de températures acceptable, de dépressuriser et pressuriser la cabine, de fournir l'eau pour l'alimentation (hydratation des aliments solides et boisson), l'extinction d'un éventuel incendie, le système de contrôle thermique et enfin d'alimenter en eau et oxygène le Système de Survie Portable (PLSS), utilisé par les astronautes durant les sorties extravéhiculaires (EVA)[42].

Les rĂ©serves d'eau et d'oxygène sont, pour l'essentiel, situĂ©es dans l'Ă©tage de descente pour ne pas alourdir l'Ă©tage de remontĂ©e. (186 litres d'eau sur 225). Le module lunaire dispose d'un système d'alimentation en oxygène en circuit fermĂ©, comportant des filtres pour absorber le dioxyde de carbone.

Le contrĂ´le thermique est Ă  la fois passif et actif :

  • Pour assurer un contrĂ´le thermique passif, l'ensemble de l'Ă©tage est recouvert de plusieurs pellicules de matĂ©riau rĂ©verbĂ©rant la chaleur, qui fait Ă©galement office de bouclier contre les micromĂ©tĂ©orites. La protection principale est constituĂ©e de 25 couches de mylar sur un support d'aluminium, qui est maintenue Ă©cartĂ© de cm de la structure par des petits plots en nylon[N 15]. Dans les endroits exposĂ©s aux flammes des moteurs, un « film-H », matĂ©riau offrant plus de rĂ©sistance Ă  la chaleur, est appliquĂ©.
  • Le contrĂ´le thermique actif repose sur un circuit de refroidissement, dans lequel circule un mĂ©lange eau-glycol qui traverse les Ă©quipements gĂ©nĂ©rateurs de chaleur situĂ©s Ă  l'intĂ©rieur et Ă  l'extĂ©rieur de la cabine pressurisĂ©e, pour maintenir la tempĂ©rature dans une fourchette permettant leur fonctionnement. La chaleur est dispersĂ©e en premier lieu grâce Ă  des radiateurs ; la chaleur qui subsiste est Ă©vacuĂ©e par sublimation d'eau en gaz. Un circuit de refroidissement de secours permet de pallier une panne du circuit principal[43].

L'Ă©nergie Ă©lectrique Ă  bord

Grumman, après avoir dans un premier temps étudié l'utilisation de piles à combustible pour fournir l'électricité, opte pour des batteries classiques, plus simples à mettre en œuvre, afin de tenir l'échéance[44].

L'Ă©nergie Ă©lectrique est fournie par quatre batteries (cinq Ă  partir d'Apollo 15) situĂ©es dans l'Ă©tage de descente et deux batteries situĂ©es dans l'Ă©tage de remontĂ©e. Ces batteries, non rechargeables, fournissent en tout 2 280 Ah (2 667 Ah Ă  partir d'Apollo 15) sous une tension de 28 volts, par le biais de deux circuits indĂ©pendants redondants. Les anodes, en zinc et argent, sont plongĂ©es dans un Ă©lectrolyte d'hydroxyde de potassium. Le poids total des batteries est de 358 kg (420 kg Ă  partir d'Apollo 15). Le courant est transformĂ© en 110 V 400 Hz pour alimenter les diffĂ©rents sous-systèmes. Des batteries indĂ©pendantes dĂ©clenchent les systèmes pyrotechniques (sĂ©paration d'Ă©tage, dĂ©ploiement du train d'atterrissage, percussion des rĂ©servoirs…) et sont prĂ©sentes dans les systèmes de survie portables (PLSS)[45].

Télécommunications

Le LEM dispose de deux systèmes de télécommunications :

  • Un Ă©metteur-rĂ©cepteur qui fonctionne en bande S sur la frĂ©quence de 2,2 GHz, pour les communications longue distance avec la Terre (cette bande est utilisĂ©e parce qu'elle n'est que faiblement affectĂ©e par l'atmosphère terrestre). La NASA a dĂ©veloppĂ© des appareils (Unified S-band System, USB) qui permettent de transmettre Ă  l'aide d'une mĂŞme antenne des paquets de donnĂ©es, Ă©missions tĂ©lĂ©visuelles ou vocales ainsi que de localiser l'Ă©metteur. Le dĂ©bit dĂ©pend de la nature des donnĂ©es transmises ;
  • Un Ă©metteur-rĂ©cepteur VHF avec deux canaux, utilisĂ© pour les communications locales entre les deux vaisseaux et entre les astronautes durant les sorties extra-vĂ©hiculaires. Le système VHF a une portĂ©e de 1 400 km.

Ces systèmes de communication permettent également au Centre de Contrôle sur Terre de récupérer des données télémétriques, qui permettent de connaître la position et la trajectoire du LEM par trigonométrie, en utilisant plusieurs stations de réception sur Terre. Des télémesures de l'état des différents sous-systèmes du vaisseau et les données biométriques des astronautes sont également récupérées en permanence par le Centre de Contrôle ; ces liaisons permettent aussi de télécharger des données dans l'ordinateur de navigation du LEM et de contrôler les données qui y sont stockées. L'équipage du LEM utilise ces canaux pour transmettre des images vidéo (télévision).

Le LEM dispose de plusieurs antennes :

  • Une antenne parabolique orientable de 66 cm de diamètre en bande S. Le maintien de l'orientation de l'antenne parabolique est rĂ©alisĂ© automatiquement dès que l'Ă©metteur terrestre a Ă©tĂ© accrochĂ©. Deux petites antennes coniques fixes omnidirectionnelles couvrant chacune 180° en bande S servent de système de secours ;
  • Deux antennes VHF, couvrant chacune 180° utilisĂ©es en vol ;
  • Une antenne omnidirectionnelle VHF, utilisĂ©e sur le sol lunaire pour les sorties extravĂ©hiculaires ;
  • Une deuxième antenne parabolique de 61 cm de diamètre en bande S est dĂ©ployĂ©e sur le sol lunaire (elle est montĂ©e sur le rover lunaire Ă  partir de la mission Apollo 15) ;

Pour recevoir et émettre, les astronautes disposent d'un casque audio qu'ils peuvent porter sous leur tenue de sortie extravéhiculaire[46].

La version améliorée du LEM des missions J

Le LEM des missions J permit d'embarquer le rover lunaire (Apollo 15).

Début 1969, la NASA lance des études pour s'assurer que la fusée Saturn V peut placer en orbite une charge plus lourde, et que le module lunaire peut effectuer des missions plus longues sur la Lune (missions dites « missions J »). Les conclusions positives (Saturn V, après évolution, peut satelliser deux tonnes supplémentaires) donnent le coup d'envoi au développement d'une version un peu plus lourde de l'étage de remontée du LEM[47].

UtilisĂ©e Ă  compter de la mission Apollo 15 (première mission dite « J »), cette version du LEM est Ă©quipĂ©e de manière Ă  pouvoir sĂ©journer 67 heures sur la Lune (au lieu des 35 heures initiales) et transporter plus d'Ă©quipements scientifiques, ainsi que le rover lunaire. Les principales modifications sont :

  • Une cinquième batterie dans l'Ă©tage de descente et un accroissement de la capacitĂ© par batterie de 400 Ă  425Ah ;
  • 500 kg de propergols supplĂ©mentaires dans l'Ă©tage de descente, pour prendre en compte l'alourdissement du LEM et donner plus de marge au pilote pour se poser. Les rĂ©servoirs sont allongĂ©s vers le bas de 10 cm ;
  • Les rĂ©serves d'oxygène et d'eau sont accrues, pour faire face Ă  la consommation supplĂ©mentaire des astronautes ;
  • La protection thermique est amĂ©liorĂ©e, pour prendre en compte une durĂ©e d'exposition plus longue ;
  • Le poids du matĂ©riel scientifique et d'exploration qui peut ĂŞtre logĂ© dans les baies de l'Ă©tage de descente augmente de 180 kg, ce qui permet d'emporter le rover lunaire ;
  • La tuyère du moteur de l'Ă©tage de descente est allongĂ©e de 25 cm, pour fournir une poussĂ©e plus importante ;
  • Le revĂŞtement de la chambre de combustion du moteur de descente est modifiĂ© pour rĂ©duire le phĂ©nomène d'ablation[48].

Le rĂ´le du module lunaire

Trajectoire de la mission Apollo 15.

Les missions Apollo sont programmĂ©es pour que le module lunaire atterrisse au tout dĂ©but du jour lunaire : les astronautes bĂ©nĂ©ficient ainsi d'une lumière rasante pour le repĂ©rage du terrain (entre 10 et 15° d'Ă©lĂ©vation au-dessus de l'horizon selon les missions) et de tempĂ©ratures relativement modĂ©rĂ©es[N 16] durant le sĂ©jour sur la Lune (rappel : le jour lunaire dure environ 28 jours terrestres). En consĂ©quence, pour chaque lieu d'atterrissage choisi, la fenĂŞtre de tir de la fusĂ©e Saturn est rĂ©duite Ă  trois jours par mois. Le site retenu est toujours situĂ© sur la face visible de la Terre, pour que les communications entre le vaisseau et la Terre ne soient pas interrompues ; il n'est pas trop Ă©loignĂ© de la bande Ă©quatoriale de la Lune, pour limiter la consommation de carburant.

Le déroulement d'une mission comporte les phases suivantes :

  • La mise en orbite basse terrestre ;
  • L'injection en orbite de transfert vers la Lune ;
  • La mise en orbite autour de la Lune ;
  • La descente du module lunaire sur la Lune ;
  • Le sĂ©jour sur la Lune ;
  • La remontĂ©e du module lunaire ;
  • L'accostage du LEM et du CSM ;
  • La sĂ©paration du LEM et du CSM (oĂą le LEM est abandonnĂ©) ;
  • L'injection en orbite de transfert vers la terre ;
  • La rentrĂ©e dans l'atmosphère terrestre.

De l’orbite terrestre à l’orbite lunaire

Le LEM dans son carénage : il en sera totalement extrait une fois effectuée la manœuvre d'accouplement avec le Module de Commande.
Les différentes configurations du module lunaire durant une mission Apollo.

Une fois placĂ©s en orbite basse, les vaisseaux Apollo (LEM et modules de Commande et de Service) ainsi que le troisième Ă©tage de la fusĂ©e effectuent une orbite et demie autour de la Terre, puis le moteur du troisième Ă©tage est rallumĂ© pour insĂ©rer l'ensemble sur une orbite de transfert vers la Lune (c'est la manĹ“uvre de TransLunar Injection, ou TLI). L'insertion se traduit par une augmentation de la vitesse de 3 040 m/s (10 000 km/h).

Le module lunaire est, depuis l’envol de la fusée Saturn V, stocké en position repliée dans un carénage — le SLA (Spacecraft Lunar Module Adapter) — situé entre le troisième étage de la fusée Saturn et les modules de Commande et de Service ceci afin d’alléger la puissance nécessaire à la tour de sauvetage : celle-ci ne peut arracher de la fusée que le vaisseau Apollo (CSM). Emporter le LEM et le CSM nécessiterait une taille trop importante de la tour de sauvetage[49].

Peu après la fin de la poussée, le Module de Commande et de Service (CSM) se détache du reste du train spatial puis pivote de 180° pour venir repêcher le LEM dans son carénage. Après avoir vérifié l'amarrage des deux vaisseaux et pressurisé le LEM, les astronautes déclenchent par pyrotechnie la détente de ressorts situés dans le carénage du LEM : ceux-ci écartent le LEM et le CSM du troisième étage de la fusée Saturn V à une vitesse d'environ 30 cm/s. Le troisième étage va alors entamer une trajectoire divergente[N 17] qui, selon les missions, le place en orbite autour du Soleil (orbite héliocentrique) ou l'envoie s'écraser sur la Lune.

Durant le trajet de 70 heures vers la Lune, des corrections peuvent ĂŞtre apportĂ©es Ă  la trajectoire du CSM et du LEM pour optimiser la consommation finale de propergols. Initialement, le dĂ©roulement d’une mission Apollo prĂ©voyait une quantitĂ© relativement importante de carburant pour ces manĹ“uvres[N 18]. Ă€ l'usage, Ă  peine 5 % de cette quantitĂ© sera consommĂ©e, grâce Ă  la prĂ©cision de la navigation. Le train spatial est mis en rotation lente, pour limiter l'Ă©chauffement des vaisseaux en rĂ©duisant la durĂ©e de l'exposition continue au Soleil. Cette manĹ“uvre est appelĂ©e « refroidissement passif ».

Une fois arrivĂ© Ă  proximitĂ© de la Lune, le moteur du module de commande est allumĂ© pour placer les vaisseaux en orbite en les freinant[N 19]. Si ce freinage n'est pas rĂ©alisĂ©, la trajectoire permet aux vaisseaux de revenir se placer en orbite terrestre après avoir fait le tour de la Lune sans utiliser leurs moteurs (Cette disposition sauvera la mission Apollo 13). Un peu plus tard, le moteur du CSM est utilisĂ© une deuxième fois pour placer les deux vaisseaux sur une orbite circulaire Ă  110 km d'altitude[50].

Descente et atterrissage sur la Lune

Pour économiser les propergols de l’étage de descente du LEM, la trajectoire de la descente est découpée en plusieurs phases : la première phase est l'abaissement de l'orbite, qui est suivi de la descente propulsée (Powered Descent), qui elle-même se décompose en une phase de freinage, une phase de repérage et une phase d’atterrissage.

Le rôle du système de navigation et de pilotage embarqué

La descente sur la Lune repose en grande partie sur le système de guidage, navigation et contrôle (PGNCS, Primary Guidance, and Control System), piloté par l'ordinateur embarqué (LGC). Celui-ci, d’une part va déterminer périodiquement la position et la trajectoire réelle du vaisseau, en utilisant d'abord la centrale inertielle puis le radar d'atterrissage (fonction de navigation), d’autre part, il va calculer la trajectoire à suivre en utilisant ses programmes, et piloter en fonction de tous ces éléments la poussée et l’orientation des moteurs (fonction de guidage). Le pilote du LEM peut certes corriger l’altitude en cours à tout moment et dans la dernière phase reprendre complètement la main sur les commandes des moteurs. Mais seul le système de navigation et de pilotage permet, en optimisant la trajectoire et la consommation des ressources, de poser le LEM avant d'avoir épuisé tout le carburant[51].

Le centre de contrôle au sol, situé à Houston, prend en charge l’initialisation du système de navigation : grâce aux données télémétriques fournies par ses échanges avec le vaisseau en bande S et ses programmes de simulation s’appuyant sur une modélisation détaillée de la surface et de la gravité lunaire, il peut calculer avec plus de précision que l’ordinateur du LEM les paramètres initiaux : la position et le vecteur vitesse du vaisseau spatial à l’allumage des moteurs, ainsi que le vecteur de la poussée à appliquer pour la première phase de la descente.

Les données calculées par le centre de contrôle sont introduites par les astronautes dans l’ordinateur de bord. Celui-ci va, au cours de la descente, exécuter successivement plusieurs programmes de guidage (un pour chaque segment de la trajectoire : abaissement d’orbite, freinage etc.) qui vont moduler la poussée et la direction du moteur de descente ainsi que les moteurs d’attitude[N 20]. L’ordinateur de bord actualise toutes les deux secondes sa position grâce aux mesures d’accélération de sa centrale inertielle (gyroscope) et aux mesures de vitesse de défilement du sol et d’altitude fournies par le radar dans les phases finales, lorsque le LEM est suffisamment proche du sol. À la demande des astronautes, l’ordinateur peut restituer les informations de navigation[52].

L'abaissement de l'orbite

DĂ©roulement de l'atterrissage sur la Lune.

L'objectif de cette phase est d'abaisser l'altitude du LEM de 110 km Ă  15 km au-dessus du sol lunaire. Ă€ cet effet, son orbite circulaire est transformĂ©e en une orbite elliptique de 15 km sur 110 km. Cette phase permet de rĂ©duire la distance Ă  parcourir jusqu’au sol lunaire Ă  un faible coĂ»t en propergols (elle ne nĂ©cessite qu'une brève impulsion du moteur). La limite des 15 km a Ă©tĂ© retenue pour Ă©viter que la trajectoire finale ne s'approche trop du relief.

Deux des trois astronautes de l'équipage prennent place dans le Module Lunaire pour descendre sur la Lune. Ils initialisent le système de navigation avant d’entamer la descente. Le LEM et le CSM se séparent avant que le moteur ne soit mis en marche (jusqu’à Apollo 12).

Le changement d’orbite est initiĂ© lorsque le vaisseau spatial se situe aux antipodes (Ă  une demi-orbite) du point oĂą dĂ©marrera la phase suivante. Une fois que la distance entre le LEM et le module de commande est suffisante (une centaine de mètres), une petite accĂ©lĂ©ration est d’abord imprimĂ©e par les moteurs contrĂ´lant l'attitude pour plaquer le carburant du moteur de descente contre les vannes de distribution, puis le moteur de descente est allumĂ© brièvement pour freiner le LEM d'environ 25 mètres par seconde (90 km/h)[53].

À partir d'Apollo 14, pour économiser les propergols de l’étage de descente, c’est le moteur du Module de Commande et de Service qui est sollicité pour abaisser l’orbite. Le CSM accompagne donc le LEM dans son orbite elliptique et s’en sépare avant que la descente propulsée ne démarre.

La descente propulsée

Cette phase est caractérisée par une action continue du moteur de descente. Elle démarre lorsque le LEM a atteint le point le plus bas de son orbite elliptique. Elle se décompose elle-même en trois phases : la phase de freinage, la phase d'approche et la phase d'atterrissage.

La phase de freinage

La phase de freinage vise Ă  rĂ©duire la vitesse du vaisseau de la manière la plus efficace possible : celle-ci va passer de 1 695 m/s (6 000 km/h) Ă  150 m/s (550 km/h). Le moteur est allumĂ© Ă  10 % de sa puissance durant 26 secondes, le temps que le moteur s'aligne grâce Ă  son cardan sur le centre de gravitĂ© du vaisseau, puis il est poussĂ© au maximum de sa puissance. Le module lunaire, qui au dĂ©but de la trajectoire est pratiquement parallèle au sol, va progressivement s’incliner, tandis que sa vitesse de descente, nulle au dĂ©part, augmente jusqu’à 45 m/s en fin de phase[54]. Lorsque le LEM se trouve Ă  une altitude infĂ©rieure Ă  12 ou 13 km, le radar d'atterrissage accroche le sol et se met Ă  fournir des informations (altitude, vitesse de dĂ©placement) qui vont permettre de vĂ©rifier que la trajectoire est correcte : jusqu'alors celle-ci Ă©tait extrapolĂ©e uniquement Ă  partir de l'accĂ©lĂ©ration mesurĂ©e par la centrale Ă  inertie. Une diffĂ©rence trop importante entre les donnĂ©es fournies par le radar et la trajectoire visĂ©e ou le non fonctionnement du radar sont des motifs d'interruption de la mission[55].

La phase d'approche

La phase d'approche dĂ©marre Ă  km du site visĂ©, alors que LEM est Ă  une altitude de 700 mètres. Elle doit permettre au pilote de repĂ©rer la zone d'atterrissage et de choisir le lieu prĂ©cis (dĂ©gagĂ©) oĂą il souhaite atterrir. Son point de dĂ©part est dĂ©signĂ© sous le terme de « porte haute » (high gate), expression empruntĂ©e Ă  l'aĂ©ronautique.

Le module lunaire est progressivement redressé en position verticale, fournissant au pilote une meilleure vision du terrain. Celui-ci peut ainsi localiser le point d'atterrissage auquel conduit la trajectoire grâce à une échelle gravée sur son hublot graduée en degrés (Landing Point Designator, ou LPD)[N 21] : l'ordinateur fournit à la demande l'angle sous lequel l'astronaute peut voir le lieu d'atterrissage sur cette échelle. Si celui-ci juge que le terrain n'est pas propice à un atterrissage ou qu’il ne correspond pas au lieu prévu, il peut alors corriger l'angle d'approche en agissant sur les commandes de vol par incrément de 0.5° dans le sens vertical ou 2° en latéral[56].

La phase d'atterrissage

Lorsque le module lunaire est descendu Ă  une altitude de 150 mètres, ce qui le place thĂ©oriquement Ă  une distance de 700 mètres du lieu visĂ© (point dĂ©signĂ© sous le terme de low gate), dĂ©marre la phase d'atterrissage. Si la trajectoire a Ă©tĂ© convenablement suivie, les vitesses horizontale et verticale sont respectivement alors de 66 km/h et 18 km/h. La procĂ©dure prĂ©voit que le pilote prenne la main pour amener le module lunaire au sol mais il peut, s'il le souhaite, laisser faire l'ordinateur de bord, qui dispose d'un programme de pilotage pour cette dernière partie du vol[N 22]. En prenant en compte les diffĂ©rents alĂ©as (phase de repĂ©rage allongĂ©e de deux minutes, modification de la cible de dernière minute de 500 mètres pour Ă©viter un relief, mauvaise combustion finale, jauge de propergol pessimiste), le pilote dispose d'une marge de trente-deux secondes pour poser le LEM avant l'Ă©puisement des ergols. La dernière partie de la phase est un vol planĂ© Ă  la manière d’un hĂ©licoptère, qui permet Ă  la fois d’annuler toutes les composantes de vitesse mais Ă©galement de mieux repĂ©rer les lieux. Des sondes situĂ©es sous les semelles du train d’atterrissage prennent contact avec le sol lunaire lorsque l'altitude est infĂ©rieure Ă  1,3 mètre et transmettent l’information au pilote. Celui-ci doit alors couper le moteur de descente pour Ă©viter que le LEM ne rebondisse ou ne se renverse[57].

Le séjour sur la Lune

Le séjour sur la Lune est rythmé par les sorties extra-véhiculaires (une sortie pour Apollo 11, mais jusqu’à trois sorties pour les dernières missions). Avant chaque sortie, les astronautes doivent faire le plein en eau et oxygène de leur système de survie portable, puis enfiler leur tenue. Ils font ensuite le vide, avant d’ouvrir l’écoutille qui donne accès à l’échelle.

Les outils et les instruments scientifiques sont sortis des baies de stockage de l’étage de descente, puis sont déployés non loin du LEM ou à plus grande distance. À partir d'Apollo 14, les astronautes disposent d’une brouette puis, dans le cadre des vols suivants, du rover lunaire, qui leur permet de s’éloigner d’une dizaine de kilomètres du LEM en transportant de lourdes charges. Le Rover occupe une baie entière du module lunaire : il est stocké en position repliée sur une palette, que les astronautes abaissent pour libérer le véhicule. Le rover est déployé par un système de ressorts et de cordes, agissant via des poulies et actionnés par les astronautes.

Avant de quitter la Lune, les échantillons géologiques placés dans des conteneurs sont hissés jusqu’à l’étage de remontée grâce à un palan. Le matériel qui n’est plus nécessaire (survie portable, appareils photos…) est abandonné pour alléger au maximum l’étage de remontée[N 23].

Schéma de la manœuvre de rendez-vous après le séjour sur la Lune.

La remontée et le rendez-vous avec le module de commande

Répétition de la manœuvre de rendez-vous au-dessus de la Lune : le LEM « Snoopy » photographié par le pilote du CM (Apollo 10).

La phase de remontée doit permettre au LEM de rejoindre le module de commande, resté en orbite. Cet objectif est atteint en deux temps : l’étage du LEM décolle du sol lunaire pour se mettre en orbite basse puis, à l'aide de poussées ponctuelles du moteur-fusée, il rejoint le module de commande.

Avant le décollage, la position précise du LEM au sol est entrée dans l'ordinateur, afin de déterminer la meilleure trajectoire. L'instant du départ est calculé de manière à optimiser la trajectoire de rendez-vous avec le module de Commande. L'étage de descente reste au sol et sert de plate-forme de lancement. La séparation des deux étages est déclenchée avant le décollage par de petites charges pyrotechniques, qui sectionnent les quatre points solidarisant les deux étages ainsi que les câbles et tuyauteries.

Le Module Lunaire suit d'abord une trajectoire verticale jusqu'Ă  une altitude d'environ 75 mètres, pour se dĂ©gager du relief lunaire, puis s'incline progressivement pour rejoindre finalement Ă  l'horizontale le pĂ©rilune (point bas) d'une orbite elliptique de 15 Ă— 67 km.

Un rendez-vous est alors effectué entre le CSM (piloté par le troisième membre d'équipage, le seul de la mission à ne pas aller sur la Lune) et le LEM en orbite lunaire. Une fois les pierres lunaires transférées, le LEM est libéré et lancé sur une trajectoire qui l’amènera à s’écraser sur la Lune. Le module de commande et le module de service peuvent entamer leur retour vers la Terre.

La qualification en vol du module lunaire (1968-1969)

Le LEM-1 est installé dans l'adaptateur pour la mission Apollo 5.

Pour tester le fonctionnement en vol du module lunaire, la NASA prévoyait initialement cinq vols utilisant la fusée Saturn IB consacrés à la mise au point des moteurs de descente et de remontée (missions de « type B ») puis, en fonction des résultats, un nombre variable de vols pour tester successivement le fonctionnement conjoint du CSM et du LEM en orbite basse (missions de « type D »), en orbite haute (missions de « type E ») et autour de la Lune (missions de « type F »). Les bons résultats obtenus dès le premier test permirent de réduire le nombre de vols à une mission de chaque type[58].

Apollo 5

Le , avec neuf mois de retard sur le planning prévu, le LEM est testé pour la première fois en vol, au cours de la mission Apollo 5. Pour réduire les coûts, le module lunaire (LEM-1) est dépourvu de train d'atterrissage (il n'est pas prévu de le tester). Les hublots sont obturés par des panneaux en aluminium, car au cours de tests de pression réalisés un mois auparavant un hublot s'était brisé. Une fois le LEM placé en orbite, le moteur de descente est allumé à plusieurs reprises. Puis le moteur de remontée est mis à feu pour simuler une procédure d'urgence. Tous les tests se déroulent de manière satisfaisante[59].

Apollo 9

L'Ă©quipage d'Apollo 9 teste le fonctionnement du LEM en orbite au-dessus de la terre.

Le la mission Apollo 9 décolle pour un test complet du module lunaire avec son équipage. Après avoir été mis en orbite terrestre, les astronautes vont répéter toutes les manœuvres qui devront être réalisées durant la mission lunaire. L'accostage du LEM par le module de commande puis l'extraction de son carénage sont exécutés pour la première fois. Deux des astronautes se glissent alors dans le tunnel reliant le module de commande au LEM et mettent en marche les sous-systèmes du LEM, avant d'allumer le moteur de descente sans toutefois se détacher du Module de Commande.

Le lendemain, l'Ă©quipage du LEM se sĂ©pare du CSM, dĂ©ploie le train d'atterrissage et met Ă  feu le moteur de descente en testant plusieurs niveaux de poussĂ©e. Puis après avoir larguĂ© l'Ă©tage de descente, il simule la remontĂ©e depuis le sol lunaire et la manĹ“uvre de rendez-vous : il entame la poursuite du vaisseau Apollo, dont il s'Ă©tait Ă©cartĂ© de près de 200 km, en utilisant le moteur de remontĂ©e. Le test, qui comportait un certain risque si les moteurs du module lunaire s'Ă©taient avĂ©rĂ©s dĂ©faillants (le LEM n'aurait pas rĂ©sistĂ© Ă  une rentrĂ©e dans l'atmosphère terrestre), est un succès complet[60].

À partir de ce vol, les modules lunaires recevront un nom de baptême — pour Apollo 9, ce sera « Spider » — qui permettra de distinguer, au cours des échanges radio avec le support au sol, l'équipage du LEM de celui du Module de Commande et de Service.

Apollo 10

La mission Apollo 10 s'envole le . Ce vol aurait pu ĂŞtre l'occasion du premier atterrissage sur la Lune, mais les responsables de la NASA prĂ©fèrent effectuer un dernier test pour vĂ©rifier le fonctionnement du système de navigation et du radar d'altitude autour de la Lune. Le dĂ©roulement de la mission va ĂŞtre une rĂ©pĂ©tition presque complète d'un vol lunaire. La descente vers la Lune n'est interrompue qu'Ă  14,4 km du sol. Après un bref emballement du moteur de descente, dĂ» Ă  une erreur de manipulation, « Snoopy » (le LEM) effectue une manĹ“uvre de rendez-vous parfaite avec « Charlie Brown » (le module de commande)[61].

Les missions lunaires : Apollo 11 Ă  17 (1969-1972)

Six exemplaires de LEM vont se poser sur la Lune entre 1969 et 1973, permettant ainsi à douze hommes de fouler le sol lunaire. Apollo 13 est le seul échec, mais les astronautes peuvent revenir sains et saufs sur Terre grâce au LEM. Seuls des incidents mineurs émaillent les six missions, qui parviennent quand-même à se poser sur la Lune.

Apollo 11 : l'Ă©preuve du feu

Buzz Aldrin descend l'échelle du module lunaire (Apollo 11), après avoir refermé en partie l'écoutille.

Le module lunaire de la mission Apollo 11 est le premier Ă  se poser sur la Lune. Le , Edwin Aldrin (pilote) et Neil Armstrong (commandant) entament la descente vers le sol lunaire. Durant la phase d'approche finale, la sĂ©rĂ©nitĂ© de l'Ă©quipage est Ă©branlĂ©e par des alarmes rĂ©pĂ©tĂ©es de l'ordinateur qui, saturĂ©, ne peut plus exĂ©cuter toutes les tâches qui lui ont Ă©tĂ© assignĂ©es. Or, ce système joue un rĂ´le essentiel pour dĂ©terminer la trajectoire qui permet de se poser avec les faibles marges de carburant disponibles. AccaparĂ© par ces alarmes, qui pourraient signifier la fin prĂ©maturĂ©e de la mission, le pilote effectue un repĂ©rage visuel du terrain trop tardif. Lorsqu'il s'aperçoit que la trajectoire mène le LEM droit sur une zone encombrĂ©e de rochers, il est dĂ©jĂ  trop bas pour la corriger. Il reprend manuellement les commandes (le LEM Ă©tait jusqu'alors en pilote automatique) et survole Ă  la manière d'un hĂ©licoptère la zone dangereuse en entamant dangereusement les dernières rĂ©serves de carburant, alors que le volume de carburant restant passe Ă  60 secondes, puis 30 secondes. Finalement, lorsqu'il pose le module lunaire, il ne reste plus que 20 secondes de carburant dans les rĂ©servoirs alimentant le moteur de l'Ă©tage de descente[62].

L'enquête révélera que la surcharge de l'ordinateur était due à l'envoi de demandes de traitement par le radar de rendez-vous à fréquence très rapprochée. Il y avait en fait deux erreurs : d'une part la procédure indiquait à tort de laisser le radar de rendez-vous allumé et, d'autre part, il y avait un défaut de conception dans l'interface entre l'ordinateur et le radar de rendez-vous. Les simulations réalisées n'avaient pas permis de détecter l'anomalie, car l'ordinateur de rendez-vous n'était pas branché pour les atterrissages. Le problème sera corrigé pour les missions suivantes. Par ailleurs, des mesures seront prises (modification des programmes de calcul de trajectoire et accroissement des corrections de trajectoire intermédiaires) pour que les pilotes disposent de plus de marge en carburant[63]. Le reste de la mission se déroulera sans incident majeur.

Apollo 13 : le LEM radeau de sauvetage

La facture humoristique envoyée au constructeur du module de service défaillant
Quantité Description Montant
400 001 MillesRemorquage : $ le premier mille, $ par mille ensuite.
Tarif Appel d'urgence, Service express
400 004 $
1Recharge de batterie avec les câbles du client + 0,05 $ pour recharge in situ4,05 $
25Oxygène Ă  20 $/kg500 $
Couchage pour deux, sans télévision, avec air climatisé et vue (contrat NAS-9-1100)[N 24]Prépayé
4Couchage supplĂ©mentaire Ă  $ la nuit, chambre Ă  libĂ©rer avant le vendredi 17/4/1970, service non garanti au-delĂ  de cette date32 $

Alors que le LEM et le CSM de la mission Apollo 13 sont en route pour la Lune, le réservoir d'oxygène no 2 du CSM explose, à la suite d'un court-circuit, et ravage le module de service : les réserves en oxygène du CSM tombent à zéro et les deux tiers de ses ressources électriques disparaissent. La mission doit être interrompue, mais le moteur de propulsion principal du CSM n'est plus jugé assez sûr, du fait de sa proximité avec le foyer de l'explosion, pour permettre son utilisation et réaliser un demi-tour. Le LEM va alors jouer un rôle crucial dans le sauvetage de l'équipage de la mission Apollo 13, en servant de canot de sauvetage, exercice auquel les équipages étaient entraînés. L'équipage se réfugie dans le module lunaire, qui est alors activé. Le contrôle au sol décide de laisser le vaisseau faire le tour de la Lune et revenir vers la Terre. Les consommables (en particulier l'eau et électricité) stockés dans les deux vaisseaux ne sont toutefois pas suffisants pour faire face aux besoins des trois astronautes jusqu'à leur arrivée. Le moteur de descente du LEM est utilisé à plusieurs reprises pour optimiser la trajectoire. Plusieurs bricolages sont improvisés pour disposer de suffisamment d'électricité et éliminer le CO2, permettant à l'équipage de revenir sain et sauf sur Terre[64].

Un employé de Grumman enverra, pour ce remorquage non prévu, une facture humoristique à la société North American, constructeur du Module de commande et de service sinistré.

Apollo 14 : un abandon non désiré

Peu avant que le LEM aborde sa descente vers le sol lunaire, le contrôle à Houston se rend compte, en examinant les données périodiquement transmises par télémesure, que l'interrupteur qui permet de déclencher l'abandon de l'atterrissage en cas de problème grave est positionné sur « ON ». Dès que la descente aura été amorcée, l'ordinateur de bord interprétera l'information comme une demande d'abandon et larguera l'étage de descente, interrompant la mission. Le problème vient d'un faux contact, mais le circuit concerné ne peut pas être réparé. Il ne reste que deux heures pour trouver une solution : les développeurs sur Terre finissent par trouver une méthode pour tromper l'ordinateur et font rentrer une longue liste de commandes par les astronautes. La manipulation a une contrepartie : si la mission doit être effectivement interrompue, les automatismes ne pourront plus jouer et les astronautes devront détailler chaque étape en saisissant les instructions. Heureusement, après une ultime frayeur (refus temporaire du radar d'atterrissage de fonctionner) l'atterrissage se déroule parfaitement[65].

Buzz Aldrin (Apollo 11) tournant le dos au pupitre du pilote

Apollo 15 : la version lourde des missions J

Ă€ compter d'Apollo 15, les modules lunaires sĂ©journent plus longtemps sur la Lune et sont donc plus lourds. La tuyère du moteur de descente est rallongĂ©e d'une trentaine de centimètres et est du coup susceptible de toucher le sol lunaire : pour Ă©viter qu'une surpression se forme Ă  l'atterrissage dans la cloche de la tuyère et ne renverse le module lunaire, la consigne avait Ă©tĂ© donnĂ©e d'arrĂŞter le moteur-fusĂ©e dès le premier contact des sondes prolongeant vers le bas le train d'atterrissage, soit Ă  environ 1,3 mètre du sol[N 25]. Cette consigne existait dĂ©jĂ , mais David Scott, qui le pilote, l'applique pour la première fois avec la plus grande rigueur. Il fait l'atterrissage le plus dur de tous les modules lunaires. Le LEM qui avait, au moment de l'arrĂŞt du moteur, une vitesse verticale rĂ©siduelle de 0,5 km/h, arrive sur le sol lunaire Ă  près de 7 km/h (les autres LEM s'Ă©taient posĂ©s avec une vitesse verticale de 2 Ă  3 km/h). Par manque de chance, le module lunaire atterrit Ă  cheval sur le relief d'un petit cratère que le pilote n'avait pas pu apercevoir, Ă  cause du nuage de poussière soulevĂ© par le moteur, et les jambes du train d'atterrissage ne se posent pas en mĂŞme temps, accroissant le choc (le LEM accusera une inclinaison de 11° une fois posĂ©)[66].

Conclusion (après 1973)

Le coût du LEM en valeur courante et actualisée
(test, système de guidage/navigation non compris)
Année Montant % coût du programme Apollo
millions $ courant millions $ 2023
1963 123 1 027,2 20 %
1964 135 1 112,9 6 %
1965 242 1 963,3 9 %
1966 311 2 450,7 10 %
1967 473 3 626,8 16 %
1968 400 2 940,9 16 %
1969 326 2 272,8 16 %
1970 241 1 586,6 16 %
Total 2 251 14 819,6 13 %

En , le programme Apollo subit des coupes budgétaires drastiques, traduisant les nouvelles priorités du gouvernement Nixon : Apollo 11 a réussi à capter le prestige dont bénéficiait jusqu'à présent le programme spatial soviétique et la guerre du Viêt Nam draine désormais les ressources budgétaires des États-Unis. La NASA est obligée d'annuler les deux dernières missions Apollo planifiées. Le dernier module lunaire atterrit le sur la Lune, dans le cadre de la mission Apollo 17, qui comprenait pour la première fois un scientifique : le géologue Harrison Schmitt[67]. Les trois LEM en cours de construction dans les locaux de la société Grumman restèrent inachevés.

Le coĂ»t final du module lunaire Apollo dĂ©passera toutes les prĂ©visions et se monte, fin 1970, lorsque le projet est achevĂ©, Ă  2,2 milliards de dollars de l'Ă©poque (14,3 milliards de dollars 2008) soit 13 % du coĂ»t total du projet Apollo[68]. Ă€ titre de comparaison, cette somme est Ă  peu près l'Ă©quivalent de trois annĂ©es du budget de l'Agence spatiale europĂ©enne 2006. Ce chiffre ne comprend pas le dĂ©veloppement du système de guidage et de navigation partagĂ© avec le module de commande (3,8 milliards de dollars 2008), les coĂ»ts d'intĂ©gration et de test qui reprĂ©sentent sans doute le mĂŞme montant, etc.

Les développements abandonnés

Plusieurs variantes du LEM prévues pour une phase ultérieure de l'exploration lunaire ne verront pas le jour :

  • le LEM « cargo » est un module lunaire non habitĂ© utilisĂ© pour transporter environ 5 tonnes de matĂ©riel sur la Lune. Le fret remplace l'Ă©tage de remontĂ©e, tandis que l'Ă©tage de descente est Ă©quipĂ© de moteurs de contrĂ´le d'attitude ainsi que d'un ordinateur de navigation et de guidage[69] ;
  • le LEM « taxi » est un LEM disposant d’un Ă©tage de remontĂ©e. Il peut ĂŞtre envoyĂ© sur la Lune peu après qu'un LEM « abri » y a Ă©tĂ© lancĂ©[70] ;
  • le LEM « abri », utilisĂ© de manière combinĂ©e avec le LEM « taxi », a son Ă©tage de remontĂ©e remplacĂ© par des consommables et du matĂ©riel scientifique. Les consommables dont il dispose permettant des sĂ©jours de 14 jours sur la Lune pour un Ă©quipage de trois astronautes. Il atterrit sur la Lune en pilotage automatique[71] ;
  • le LEM « Lab » voit son Ă©tage de remontĂ©e, son moteur et ses rĂ©servoirs remplacĂ©s par environ 10 tonnes de matĂ©riel scientifiques pour des observations et des expĂ©riences en orbite terrestre[72]. Le LEM « Lab » devint progressivement l'Apollo Telescope Mount (ATM), une structure non pressurisĂ©e porteuse d'un tĂ©lescope pour l'observation du soleil. PrĂ©vu initialement pour ĂŞtre mis en orbite seul, il est finalement dĂ©veloppĂ© comme un module annexe de la station Skylab[73].

La descendance du LEM : le vaisseau Altair

Vue d'artiste d'un des concepts du module lunaire Altair.

En , le président des États-Unis, George W. Bush, lance le programme Constellation, dont l'objectif est de ramener des hommes sur la Lune vers 2020. Le projet prévoit la construction d'un module lunaire baptisé Altair, lointain descendant du LEM. Altair reprend de nombreuses caractéristiques de son prédécesseur : c'est un vaisseau conçu uniquement pour descendre sur la Lune, y séjourner et remonter en orbite. L'équipage revient ensuite à Terre à bord d'un vaisseau resté en orbite lunaire : l'Orion. Il est composé d'un étage de descente (qui reste sur le sol lunaire) et d'un étage de remontée, qui se pose verticalement sur un train d'atterrissage analogue à celui du LEM. Il comporte deux ouvertures, dont une utilisée pour accéder au sol lunaire. Mais certains aspects du programme Constellation sont très différents du programme Apollo : Altair est envoyé dans l'espace par une fusée dédiée et est assemblé avec Orion en orbite terrestre. Trois fois plus lourd que le LEM, il est propulsé par des moteurs cryogéniques (descendants de ceux utilisés par la fusée Saturn). Il doit embarquer l'ensemble de l'équipage de la mission (quatre astronautes). La cabine pressurisée comprend un sas et un coin toilette.

Finalement, ce projet est abandonné en 2010, pour des raisons économiques. D'autres projets spatiaux sont mis en avant à la place de cette mission.

Les modules lunaires dans les musées

Aujourd'hui, plusieurs exemplaires du module lunaire sont conservés dans différents musées : ce sont des exemplaires n'ayant jamais volé, des modèles utilisés pour les tests de résistance ou des modèles utilisés pour les entraînements.

Vidéos

Atterrissage du LEM d'Apollo 15 : le copilote annonce la hauteur en pieds et de temps en temps le pourcentage de carburant restant. La poussière soulevĂ©e Ă  compter de 20 mètres ne permet pas au pilote de voir qu'il se pose sur le bord d'un petit cratère ; il en rĂ©sultera une gite de près de 10°.
Le décollage depuis la Lune de l'étage de remontée du LEM d'Apollo 17 filmé par la caméra du rover lunaire : la trajectoire est verticale sur une centaine de mètres, pour se dégager du relief, puis prend sa trajectoire définitive beaucoup plus inclinée.

Notes et références

Notes

  1. L'acronyme LM a remplacé en 1968 LEM parce que les dirigeants de la NASA considéraient que le terme « Excursion » traduisait mal la portée du projet lunaire.
  2. Les vols précédents étaient des vols balistiques, c'est-à-dire que la capsule Mercury ne se mettait pas en orbite.
  3. Un cas d'école de dysfonctionnement de l'organisation d'une entreprise. Son courrier commençait ainsi « Somewhat as a voice in the wilderness, I would like to pass on a few thoughts that have been of deep concern to me over recent months… Do we want to go to the moon or not?, and, if so, why do we have to restrict our thinking to a certain narrow channel?…»
  4. . Cette société fait partie depuis 1994 du groupe Northrop Grumman.
  5. La première sonde Surveyor se pose en douceur sur le sol lunaire le : les capteurs dont elle dispose indiquent que le sol lunaire est plutôt plus ferme que ce qui était prévu.
  6. Une plage de poussée comprise entre 65 et 92,5 % est exclue, car elle provoque une ablation trop rapide du revêtement de la tuyère.
  7. Le responsable du projet chez Grumman reprochera à la NASA d'avoir refusé par ailleurs l'emploi des circuits intégrés dans le reste de l'électronique du LEM.
  8. les plus importantes sont détaillées dans les rapports rédigés après les missions disponibles ici ).
  9. Le choix de batteries à la place de piles à combustible est une des dernières options structurantes à être figée (). Les solutions concurrentes du radar de rendez-vous et du guidage optique seront développées en parallèle jusqu'à la sélection du radar au printemps 1966.
  10. La fabrication du train d'atterrissage est réalisée par Héroux-Devtek Inc. dans son usine de Longueuil au Québec.
  11. Chaque hublot est constitué de deux lames de verre séparées par une lame d'air qui ont subi des traitements pour filtrer les rayonnements ultraviolets et infrarouges, empêcher l'éblouissement et résister aux micrométéorites.
  12. C'est le constructeur automobile Chrysler qui la met en œuvre pour la première fois de manière industrielle dans les tableaux de bord de certains de ses modèles automobiles en 1960.
  13. Six positions sont possibles, permettant de couvrir tout l'hémisphère céleste, en prenant comme plan de référence le plancher de la cabine.
  14. La société TRW a été démembrée à la suite de son rachat par Northrop Grumman. La branche aéronautique de TRW fait maintenant partie de Goodrich Corporation.
  15. En l'absence d'atmosphère, la chaleur ne se diffuse que par conductivité. En écartant la couverture thermique de la coque du LEM, on empêche toute transmission de chaleur.
  16. La tempĂ©rature au sol passe progressivement de 0 Ă  130 °C entre le lever du Soleil et le moment oĂą le Soleil culmine (au bout de 177 heures terrestres).
  17. L'étage de la fusée reçoit une poussée supplémentaire grâce à l'éjection des propergols non brûlés.
  18. . Le carburant prévu permettait une variation de vitesse de 152 m/s.
  19. La dĂ©cĂ©lĂ©ration est de 891 m/s, soit 3 200 km/h.
  20. Les corrections de l'orientation sont réalisées par les moteurs d'attitude. Le moteur de descente peut être également utilisé grâce au montage sur cardan (jusqu'à 6° d'inclinaison par rapport à la verticale) à condition que les corrections ne nécessitent pas une trop grande rapidité d'exécution.
  21. L'échelle est gravée à la fois sur les hublots intérieur et extérieur et l'astronaute doit aligner les deux échelles.
  22. Il s'agit du programme P65, qui ne sera jamais utilisé au cours des missions Apollo.
  23. Une dizaine d’appareils photos Hasselblad en bon état (à l’époque) jonchent le sol lunaire.
  24. Cette référence correspond au contrat NASA/Grumman pour la fabrication du LEM.
  25. Lorsque les tigelles longues de 1,3 mètre qui prolongent vers le bas les semelles du train d'atterrissage touchent le sol lunaire.

Références

Toutes les références correspondent à des textes en anglais sauf mention contraire.

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  4. Chariots for Apollo Analysis of LOR.
  5. Chariots for Apollo NASA-Grumman Negotiations.
  6. The Apollo Spacecraft A Chronology Part 3D : 25 July 1962.
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  8. Chariots for Apollo Hatches and Landing Gear.
  9. Chariots for Apollo External Design.
  10. Chariots for Apollo Tailoring the Cockpit.
  11. Manuel Sous-systèmes du Module Lunaire - Grumman parag. 2.3.2
  12. Chariots for Apollo Engines, Large and Small.
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  14. Phil Parker Apollo and the integrated circuit.
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  21. Chariots for Apollo Lunar Module Refinement.
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  69. Apollo LM Truck, Astronautix.
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Sources

Principales sources utilisées pour la rédaction de l'article :

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  • (en) William David Compton, Where No Man Has Gone Before : A History of Apollo Lunar Exploration Missions, , 432 p. (ISBN 978-0-486-47888-3, lire en ligne)
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    Histoire de la conception des systèmes informatiques embarqués du programme Apollo

Sources utilisées ponctuellement :

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  • (en) NASA, Apollo 11 mission report, (lire en ligne)
    Rapport de mission Apollo 11 ;ref NASA : MSC-000171 [PDF]
  • (en) NASA, Apollo15 mission report, (lire en ligne)
    Rapport de mission Apollo 15 ;ref NASA : MSC-005161
  • (en) NASA, Apollo9 mission report, (lire en ligne)
    Rapport de mission Apollo 9 ;ref NASA : MSC-PA-R-69-2 [PDF]
  • (en) NASA, Apollo10 mission report, (lire en ligne)
    Rapport de mission Apollo 10 ;ref NASA : MSC-00126 [PDF]
  • (en) NASA, Guidance, Navigation and Control subsystem Study guide for training, (lire en ligne)
    Panneaux de contrôle du LEM (manuel d'entraînement) [PDF]
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    Specifications des programmes gérant l'atterrissage (P63, P64, P66) MIT R 695 [PDF]
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  • (en) Richard W Orloff, Apollo by the Numbers : A Statistical Reference, (lire en ligne)
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  • (en) NASA, Apollo 11 flight journal : The First Lunar Landing, (lire en ligne)
    Journal de vol d'Apollo 11 annoté : l'atterrissage
  • (en) Patrick Rozas et Allen R. Cunningham, Lunar Module Landing Radar and Rendezvous Radar, (lire en ligne)
    Fonctionnement des radars de rendez-vous et d'atterrissage (ref NASA TND-6849) [PDF]
  • (en) NASA, Lunar Module/Abort Guidance System /LM/AGS/ design survey, (lire en ligne [PDF])
    et historique de la réalisation de l'AGS système de navigation de secours (ref NASA CR-86189) [PDF]

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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