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Claude LĂ©vi-Strauss

Claude LĂ©vi-Strauss [klod levi stʁos][1], nĂ© le Ă  Bruxelles et mort le Ă  Paris 16e[2], est un anthropologue et ethnologue français qui a exercĂ© une influence majeure Ă  l'Ă©chelle internationale sur les sciences humaines et sociales dans la seconde moitiĂ© du XXe siĂšcle. Il est devenu notamment l'une des figures fondatrices du structuralisme Ă  partir des annĂ©es 1950 en dĂ©veloppant une mĂ©thodologie propre, l'anthropologie structurale, par laquelle il a renouvelĂ© en profondeur l'ethnologie et l'anthropologie en leur appliquant les principes holistes issus de la linguistique, de la phonologie, des mathĂ©matiques et des sciences naturelles.

Claude LĂ©vi-Strauss
Claude LĂ©vi-Strauss en 2005
Naissance
DĂ©cĂšs
SĂ©pulture
Nationalité
Formation
École/tradition
Principaux intĂ©rĂȘts
Idées remarquables
ƒuvres principales
Les Structures élémentaires de la parenté (1949), Race et Histoire (1952), Tristes Tropiques (1955), Anthropologie structurale (1958), Le Totémisme aujourd'hui (1962), La Pensée sauvage (1962), Les Mythologiques (tétralogie ; 1964-1971)
Influencé par
A influencé
PĂšre
Raymond Levi-strauss (d)
Conjoints
Dina Dreyfus (de Ă  )
Rose Marie Ullmo (d) (de Ă  )
Monique Roman (Ă  partir de )
Distinctions
MĂ©daille d'or du CNRS ()
signature de Claude LĂ©vi-Strauss
Signature

Professeur agrĂ©gĂ© de philosophie et enseignant au dĂ©but des annĂ©es 1930, il se tourne Ă  partir de 1935 vers l'ethnologie, dont il va faire son mĂ©tier. AprĂšs ses premiers travaux de terrain sur les peuples indigĂšnes du BrĂ©sil entre 1935 et 1939, il est contraint de s'exiler en 1941 Ă  New York ; oĂč il rencontre de grandes figures des sciences humaines et sociales, dont le phonologue russe Roman Jakobson, auprĂšs de qui il s'initie aux principes de l'analyse structurale et de la linguistique moderne. À partir de cette dĂ©couverte dĂ©cisive qu'il choisit d'appliquer Ă  la parentĂ©, il Ă©labore les principes de l'anthropologie structurale, en rupture radicale avec les courants alors dominants en ethno-anthropologie (Ă©volutionnisme, diffusionnisme, culturalisme, fonctionnalisme) : il cherche Ă  expliquer la sociĂ©tĂ© et ses manifestations comme un tout dotĂ© d'une cohĂ©rence interne autorĂ©gulĂ©e, Ă©chappant Ă  la conscience des individus. À son retour en France, il soutient et publie en 1949 sa thĂšse sur Les Structures Ă©lĂ©mentaires de la parentĂ©, premiĂšre application de sa mĂ©thode novatrice, qui lui apporte une notoriĂ©tĂ© prĂ©coce parmi les anthropologues de nombreux pays.

Durant les annĂ©es 1950, il enseigne en France, oĂč il est directeur d'Ă©tudes Ă  l'Ecole pratique des hautes Ă©tudes (future École des hautes Ă©tudes en sciences sociales) et aux États-Unis et consolide les principes de sa mĂ©thode structurale, qu'il prĂ©sente en 1958 au public sous la forme d'un recueil d'articles, Anthropologie structurale, premier d'une sĂ©rie d'ouvrages mĂ©thodologiques. Ses travaux apportent un Ă©clairage neuf sur un grand nombre de problĂ©matiques anthropologiques classiques jusqu'alors mal connues ou inexpliquĂ©es. Ils acquiĂšrent rapidement un rayonnement international et inspirent d'autres disciplines, participant dans une large mesure Ă  la naissance du mouvement structuraliste français. Élu en 1959 Ă  la chaire d'anthropologie sociale du CollĂšge de France, LĂ©vi-Strauss quitte le champ de la parentĂ© et continue avec Le TotĂ©misme aujourd'hui et La PensĂ©e sauvage (1962) Ă  revisiter les grandes thĂ©matiques anthropologiques, bouleversant le regard occidental sur les sociĂ©tĂ©s sans Ă©criture. Puis, durant prĂšs d'une dĂ©cennie, il se consacre Ă  une approche structurale des mythes, publiant entre 1964 et 1971 les quatre volumes des Mythologiques, son Ɠuvre majeure. Dans les annĂ©es 1970 puis aprĂšs sa retraite en 1982, il adapte sa mĂ©thode scientifique Ă  l'Ă©volution gĂ©nĂ©rale du paradigme structuraliste vers la dimension temporelle (diachronie, structuralisme gĂ©nĂ©tique), travaillant notamment avec les historiens des Annales Ă  la naissance de l'anthropologie historique sur des thĂšmes comme la famille, la parentĂ© cognatique, le systĂšme Ă  maison. ParallĂšlement, tout au long de sa carriĂšre, il participe Ă  la rĂ©flexion sur les sciences sociales et leur organisation institutionnelle, et rĂ©examine de façon critique de vastes thĂ©matiques des sciences humaines comme l'art, le progrĂšs, la race, les rapports entre nature et culture, le dĂ©veloppement et la condition humaine.

Auteur, à cÎté de ses nombreux ouvrages de caractÚre universitaire, d'un livre plus littéraire et autobiographique, Tristes Tropiques, qui connut dÚs sa parution en 1955 un large succÚs public en France comme à l'étranger[3], Lévi-Strauss a été élu en 1973 à l'Académie française. Ayant acquis à partir des années 1980 une trÚs grande stature intellectuelle, consacrée en 2008 par l'entrée de son vivant dans la prestigieuse collection de la Pléiade, il reste présent dans les médias et les débats de société jusqu'à un ùge avancé. Sa pensée, qui avait perdu aprÚs les années 1970 une grande partie de son influence dans les sciences sociales avec le reflux du paradigme structuraliste et holiste, connaßt une nouvelle vitalité à partir des années 2000 en philosophie des sciences et des mathématiques, autour de la notion-clé de transformation.

Biographie

Enfance et formation

Claude LĂ©vi-Strauss naĂźt Gustave Claude LĂ©vi[4] - [5] le Ă  Bruxelles, oĂč rĂ©sidaient briĂšvement ses parents : Raymond LĂ©vi, artiste peintre portraitiste (petit-fils d'Isaac Strauss, chef d'orchestre Ă  la cour de Louis-Philippe puis de NapolĂ©on III), qui utilise « LĂ©vi-Strauss » comme nom d'usage, et Emma LĂ©vy[4] - [6], eux-mĂȘmes cousins issus de germains, de familles juives alsaciennes[7] - [8] (c'est en 1961 seulement que Claude LĂ©vi-Strauss obtiendra du Conseil d'État l'officialisation de son nom d'usage hĂ©ritĂ© de son pĂšre[9]). La famille se rĂ©installe Ă  Paris peu aprĂšs la naissance de l'enfant, et connaĂźt d'importantes difficultĂ©s financiĂšres avec le dĂ©clin du portrait peint sous l'influence nouvelle de la photographie. InfluencĂ© par les impressionnistes, Raymond LĂ©vi donne Ă  son fils unique des estampes japonaises en rĂ©compense de ses succĂšs scolaires[10]. L'un de ses oncles est le portraitiste Henry Caro-Delvaille. Durant la PremiĂšre Guerre mondiale, Emma LĂ©vy se rĂ©fugie avec le jeune Claude chez son propre pĂšre, rabbin de la synagogue de Versailles.

AprĂšs le retour de la famille Ă  Paris aprĂšs la guerre, dans le 16e arrondissement, LĂ©vi-Strauss suit ses Ă©tudes Ă  Janson-de-Sailly puis Ă  Condorcet (en khĂągne)[11]. Il a aussi Ă©tudiĂ© au lycĂ©e Hoche[12]. À la fin de ses Ă©tudes secondaires, il rencontre un jeune socialiste d'un parti belge et s'engage alors Ă  gauche. Il dĂ©couvre rapidement les rĂ©fĂ©rences philosophiques de ce parti qui lui Ă©taient jusqu'alors inconnues, incluant Marx et K. Kautsky. Il commence Ă  militer au sein de la SFIO, oĂč il anime le Groupe d’Études Socialistes, puis devient secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de la FĂ©dĂ©ration des Étudiants Socialistes, ancĂȘtre du MJS[13]. En 1928, il devient secrĂ©taire parlementaire du dĂ©putĂ© socialiste Georges Monnet[14]. Il obtient une licence Ă  la FacultĂ© de droit de Paris, avant d'ĂȘtre admis Ă  la Sorbonne et d'ĂȘtre reçu troisiĂšme Ă  l'agrĂ©gation de philosophie en 1931[15]. Il se marie en 1932 Ă  Dina Dreyfus, une ethnologue française qui l'initie et le convertit Ă  cette discipline. Il est alors proche de faire une carriĂšre politique, Ă  l'instar des nombreuses personnes qu'il frĂ©quente dans ces annĂ©es[16]. Une cinquantaine d'annĂ©es plus tard, il se dĂ©crira lui-mĂȘme comme un « anarchiste de droite », nĂ©anmoins « fidĂšle Ă  Marx », quoique « pas [...] sur le plan des idĂ©es politiques »[17].

Missions ethnographiques et premiÚres fonctions académiques

Indiens Caduveo, du Mato Grosso brésilien.

AprĂšs deux ans d'enseignement de la philosophie au lycĂ©e Victor-Duruy de Mont-de-Marsan et au lycĂ©e de Laon, LĂ©vi-Strauss accepte la proposition du directeur de l'École normale supĂ©rieure, CĂ©lestin BouglĂ© de participer Ă  la mission universitaire au BrĂ©sil. Il quitte alors l'enseignement de la philosophie et la vie politique et part en 1935 avec son Ă©pouse en tant que professeur de sociologie Ă  l'universitĂ© de SĂŁo Paulo. De lĂ , ils organisent et dirigent plusieurs missions ethnographiques dans le Mato Grosso et en Amazonie : « L'ethnologie jette un pont entre psychanalyse et marxisme d'un cĂŽtĂ©, gĂ©ologie de l'autre. LĂ©vi-Strauss a trouvĂ© la science dans laquelle se marient toutes ses passions antĂ©rieures »[18].

Une premiĂšre mission a lieu en 1935-1936, auprĂšs des indiens Caduveo et Bororo. Une deuxiĂšme expĂ©dition est lancĂ©e en 1938, dans des conditions matĂ©rielles Ă©galement difficiles ; les ethnologues rencontrent les Nambikwara dont ils rapportent une documentation fournie et 200 photos. En raison d'une infection des yeux, plusieurs membres de l'Ă©quipe, parmi lesquels Dina LĂ©vi-Strauss, doivent abandonner la mission. Claude LĂ©vi-Strauss poursuit l'expĂ©dition avec quelques compagnons ; ils visitent les peuples autochtones MundĂ© (en) et Tupi Kawahib dans l'État du RondĂŽnia.

De retour en France Ă  la veille de la Seconde Guerre mondiale, LĂ©vi-Strauss est mobilisĂ© en 1939-1940 sur la ligne Maginot comme agent de liaison, puis, aprĂšs la dĂ©bĂącle, enseigne au lycĂ©e de Montpellier, avant d’ĂȘtre rĂ©voquĂ© en octobre 1940 en raison des lois raciales de Vichy. Il se sĂ©pare de son Ă©pouse Dina et quitte la France en 1941[19] pour se rĂ©fugier Ă  New York, alors haut lieu de bouillonnement culturel, accueillant de nombreux intellectuels français en exil[20] - [21]. À la rentrĂ©e 1941, il est chargĂ© d'enseigner la sociologie contemporaine de l'AmĂ©rique du Sud Ă  la New School for Social Research[22]. En 1942, il rallie la France libre, l'organisation de rĂ©sistance extĂ©rieure fondĂ©e par le gĂ©nĂ©ral de Gaulle et travaille comme speaker Ă  l’Office of War Information. La rencontre avec Roman Jakobson (qui lui est prĂ©sentĂ© par Alexandre KoyrĂ©), dont il suit les cours et devient un proche[23], est dĂ©cisive sur le plan intellectuel : la linguistique structurale lui apporte les Ă©lĂ©ments thĂ©oriques qui lui faisaient dĂ©faut pour mener Ă  bien son travail d'ethnologue sur les systĂšmes de parentĂ©. Il s'attelle alors Ă  la mise en forme rĂ©dactionnelle des matĂ©riaux ethnographiques rapportĂ©s du BrĂ©sil. ParallĂšlement, il s'engage auprĂšs des Forces françaises libres, et est affectĂ© Ă  la mission scientifique française aux États-Unis. Il fonde avec Henri Focillon, Jacques Maritain, Jean Perrin et d'autres l'École libre des hautes Ă©tudes de New York en [24].

Claude Lévi-Strauss à Rio de Janeiro (fin des années 1930).

Apogée scientifique

RappelĂ© en France en 1944 par le ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres, il retourne aux États-Unis en 1945 pour y occuper les fonctions de conseiller culturel auprĂšs de l'ambassade de France, et poursuivre grĂące Ă  la richesse des bibliothĂšques amĂ©ricaines l'Ă©criture de son premier grand ouvrage ethnologique sur la parentĂ©, avec le projet d'en faire une thĂšse universitaire[25]. DivorcĂ© de sa premiĂšre femme Dina, il Ă©pouse en 1946 Rose-Marie Ullmo (1913-1985), avec qui il a un fils, Laurent, l'annĂ©e suivante. La rĂ©daction de sa thĂšse Les Structures Ă©lĂ©mentaires de la parentĂ© achevĂ©e, il rentre en France avec sa famille au tout dĂ©but de 1948. En 1949, il soutient et publie sa thĂšse, devient sous-directeur du musĂ©e de l'Homme, puis, sollicitĂ© par Lucien Febvre, obtient une chaire de directeur d'Ă©tudes Ă  l'École pratique des hautes Ă©tudes. (oĂč il enseigne Ă  la fois Ă  la Ve section et Ă  la VIe section, future EHESS). En 1954, il Ă©pouse en troisiĂšmes noces Monique Roman[26], avec qui il aura un second fils, Matthieu. Il publie en 1955 dans la collection Terre Humaine (crĂ©Ă©e par Jean Malaurie chez Plon) Tristes Tropiques, livre Ă  mi-chemin de l'autobiographie, de la mĂ©ditation philosophique et du tĂ©moignage ethnographique, qui connaĂźt un Ă©norme succĂšs public et critique : de Raymond Aron Ă  Maurice Blanchot, de Georges Bataille Ă  Michel Leiris, de nombreux intellectuels applaudissent Ă  la publication de cet ouvrage qui sort des sentiers battus de l'ethnologie[27]. Avec la publication de son recueil d’Anthropologie structurale en 1958, il jette les bases de son travail thĂ©orique en matiĂšre d'Ă©tude des peuples premiers et de leurs mythes.

En 1959, aprĂšs deux Ă©checs, il est Ă©lu professeur au CollĂšge de France, Ă  la chaire d'anthropologie sociale[28]. À l'Ă©tĂ© 1960 est mise en place la structure d'un laboratoire d'anthropologie sociale, qui relĂšve Ă  la fois du CollĂšge de France et de l'École pratique des hautes Ă©tudes[29]. Il propose Ă  l'anthropologue Isac Chiva de codiriger ce laboratoire d'anthropologie sociale. Il obtient de Fernand Braudel que le seul exemplaire europĂ©en des Human Relations Area Files (en) produit par l'UniversitĂ© Yale soit confiĂ© au nouveau laboratoire, ce qui fait de cette nouvelle structure « avant mĂȘme d'avoir lancĂ© recherches et missions [
] un centre de rĂ©fĂ©rence en matiĂšre ethnographique »[30].

Il fonde en 1961 avec Émile Benveniste et Pierre Gourou la revue L'Homme, qui s'ouvre aux multiples courants de l'ethnologie et de l'anthropologie, et cherche Ă  favoriser l'approche interdisciplinaire. Du dĂ©but des annĂ©es 1960 au dĂ©but des annĂ©es 1970, il se consacre Ă  l'Ă©tude des mythes, en particulier la mythologie amĂ©rindienne. Ces Ă©tudes – les Mythologiques – donnent lieu Ă  la publication de plusieurs volumes, dont le premier, Le Cru et le Cuit, paraĂźt en 1964. Il donne de nombreux entretiens Ă  la presse et peut ainsi prĂ©senter « sous une forme vulgarisĂ©e les idĂ©es qui lui tiennent Ă  cƓur » et Ă  ce titre, « dans les annĂ©es 1960, avant que l'Ă©cologie ne devienne une idĂ©ologie et un parti [
] LĂ©vi-Strauss, par ses vues distantes et sĂ©vĂšres, lui a sans doute donnĂ©, hors de tout effet de pathos, sa formulation la plus radicale »[31]. LĂ©vi-Strauss fut un prĂ©curseur dans le domaine de l'Ă©cologie, il a notamment ƓuvrĂ© Ă  la rĂ©habilitation de la pensĂ©e primitive[32]. Il fut Ă©galement membre du conseil d'administration du Centre Royaumont pour une Science de l’Homme[33].

Il est Ă©lu en Ă  l'AcadĂ©mie française. Comme le veut la tradition, il fait l'Ă©loge de son prĂ©dĂ©cesseur, Henry de Montherlant, et Roger Caillois, prononçant – Ă  la demande de LĂ©vi-Strauss – le discours de « rĂ©ponse », en profite pour lancer « une sĂ©rie de flĂšches empoisonnĂ©es » sur sa mĂ©thode et ses prĂ©supposĂ©s scientifiques[34]. Son entrĂ©e Ă  l'AcadĂ©mie française suscite autant d'interrogations au sein de la Coupole que parmi ses amis et collaborateurs[34]. LĂ©vi-Strauss poursuit ses recherches sur la mythologie : Myth and Meaning (1978), La PotiĂšre jalouse (1985), et enfin Histoire de Lynx (1991), qui clĂŽt un travail entamĂ© quarante ans plus tĂŽt. En 1982, il prend sa retraite et quitte son poste au CollĂšge de France. Il pĂšse de toute son influence pour que Françoise HĂ©ritier, sa collaboratrice de longue date, lui succĂšde[35]. Il continue cependant Ă  venir au moins une fois par semaine au laboratoire pour y recevoir de jeunes chercheurs, « toujours prĂȘt Ă  Ă©changer », comme le souligne Françoise HĂ©ritier[36].

DerniÚres années

À partir de 1994, Claude LĂ©vi-Strauss publie moins[37]. Il continue toutefois Ă  donner rĂ©guliĂšrement des comptes rendus de lecture pour la revue L'Homme. En 1998, Ă  l'occasion de son quatre-vingt-dixiĂšme anniversaire, la revue Critique lui dĂ©die un numĂ©ro spĂ©cial dirigĂ© par Marc AugĂ©, et une rĂ©ception a lieu au CollĂšge de France. LĂ©vi-Strauss Ă©voque sans dĂ©tour la vieillesse et dĂ©clare notamment : « [il y a] aujourd'hui pour moi un moi rĂ©el, qui n'est plus que le quart ou la moitiĂ© d'un homme, et un moi virtuel qui conserve encore une vive idĂ©e du tout. Le moi virtuel dresse un projet de livre, commence Ă  en organiser les chapitres, et dit au moi rĂ©el : « C'est Ă  toi de continuer ». Et le moi rĂ©el, qui ne peut plus, dit au moi virtuel : « C'est ton affaire. C'est toi seul qui vois la totalitĂ© ». Ma vie se dĂ©roule Ă  prĂ©sent dans ce dialogue trĂšs Ă©trange »[38].

Il donne pour un numĂ©ro de L'Homme d'avril-septembre 2002 consacrĂ© Ă  « La question de parentĂ© » une postface dans laquelle il se fĂ©licite de constater que les lois et rĂšgles de fonctionnement qu'il a mises au jour « restent au cƓur des travaux contemporains »[39]. Au dĂ©but de l'annĂ©e 2005, lors d'une de ses derniĂšres apparitions Ă  la tĂ©lĂ©vision française, il dĂ©clare, reprenant en des termes trĂšs proches une opinion qu'il avait dĂ©jĂ  exprimĂ©e en 1972 (dans un entretien avec Jean JosĂ© Marchand) puis en 1984 (dans un entretien avec Bernard Pivot) : « Ce que je constate : ce sont les ravages actuels ; c'est la disparition effrayante des espĂšces vivantes, qu'elles soient vĂ©gĂ©tales ou animales ; et le fait que du fait mĂȘme de sa densitĂ© actuelle, l'espĂšce humaine vit sous une sorte de rĂ©gime d'empoisonnement interne – si je puis dire – et je pense au prĂ©sent et au monde dans lequel je suis en train de finir mon existence. Ce n'est pas un monde que j'aime »[40].

En mai 2008, une partie de son Ɠuvre, sĂ©lectionnĂ©e par LĂ©vi-Strauss lui-mĂȘme, est publiĂ©e dans un volume de la BibliothĂšque de la PlĂ©iade sous le titre d’ƒuvres[41]. Le choix de la collection prestigieuse de la maison Gallimard apparaĂźt Ă  Emmanuel DĂ©sveaux comme un « embaumement de l’Ɠuvre lĂ©vi-straussienne » et l'ensemble du projet Ă©ditorial ne permet pas Ă  ses yeux de faire efficacement place Ă  la rĂ©flexion anthropologique « extrĂȘmement puissante » de l'auteur[42]. C'est Ă©galement le sentiment de Maurice Bloch qui remarque, de concert avec l'introduction « impertinente » rĂ©digĂ©e par Vincent Debaene pour ce volume, que la « France prĂ©fĂšre de loin se reprĂ©senter ses grands scientifiques et penseurs en grandes figures littĂ©raires plutĂŽt que les cĂ©lĂ©brer pour ce qu'ils ont dit ou dĂ©couvert »[43].

Le , Ă  l'occasion de son centenaire, de nombreuses manifestations sont organisĂ©es. Le musĂ©e du Quai Branly lui dĂ©die une journĂ©e au cours de laquelle, devant un public trĂšs nombreux, des Ă©crivains, des hommes de science et des artistes lisent un choix de ses textes. L'AcadĂ©mie française l'honore Ă©galement, le 27 novembre, en fĂȘtant le premier centenaire de son histoire[44] - [45]. La BibliothĂšque nationale de France organise une journĂ©e au cours de laquelle les visiteurs dĂ©couvrent les manuscrits, les carnets de voyages, les croquis, les notes et mĂȘme la machine Ă  Ă©crire de l'anthropologue. Le prĂ©sident de la RĂ©publique, Nicolas Sarkozy, se rend au domicile parisien de LĂ©vi-Strauss en compagnie d'HĂ©lĂšne CarrĂšre d'Encausse pour s'entretenir avec lui de « l'avenir de nos sociĂ©tĂ©s »[46]. La ministre de l’Enseignement SupĂ©rieur et de la Recherche, ValĂ©rie PĂ©cresse, annonce pour son centenaire la crĂ©ation d’un Prix Claude LĂ©vi-Strauss, d’un montant de 100 000 euros qui doit rĂ©compenser chaque annĂ©e le « meilleur chercheur » dans les disciplines telles que l’histoire, l’anthropologie, les sciences sociales ou l'archĂ©ologie[47]. Son premier laurĂ©at est, en , l'anthropologue Dan Sperber[48].

Lignerolles (CĂŽte-d'Or), oĂč Claude LĂ©vi-Strauss est inhumĂ©.

Claude LĂ©vi-Strauss meurt le vendredi d'une crise cardiaque[49] - [50] Ă  son domicile du 2, rue des Marronniers dans le 16e arrondissement de Paris[5] - [49] - [50]. Il est inhumĂ© dans l'intimitĂ© Ă  Lignerolles (CĂŽte-d'Or) trois jours plus tard[51] - . À l'annonce de son dĂ©cĂšs le , Roger-Pol Droit dresse pour Le Monde le portrait d'un homme qui « ne dissociait pas la dĂ©fense de la diversitĂ© culturelle et celle de la diversitĂ© naturelle »[52]. Robert Maggiori, pour LibĂ©ration, estime que l'hĂ©ritage le plus « sacrĂ© » de LĂ©vi-Strauss « est l’idĂ©e que les cultures ont la mĂȘme force et la mĂȘme dignitĂ©, parce qu’on trouve en chacune, aussi Ă©loignĂ©e soit-elle des autres, des Ă©lĂ©ments poĂ©tiques, musicaux, mythiques qui sont communs »[53]. Dans The Guardian, Maurice Bloch souligne que, malgrĂ© l'Ă©tiquette structuraliste utilisĂ©e par de nombreux auteurs, LĂ©vi-Strauss n'a pas fait rĂ©ellement Ă©cole, et demeure une « figure solitaire, mais imposante, de l'histoire de la pensĂ©e », en raison notamment de son positionnement philosophique naturaliste[43].

Depuis, son Ɠuvre reste saluĂ©e dans le monde entier pour son importance dĂ©cisive dans l'histoire de l'anthropologie et de l'ethnologie[54]. Françoise HĂ©ritier, qui lui a succĂ©dĂ© au CollĂšge de France, rĂ©sume ainsi son hĂ©ritage : « Nous avons dĂ©couvert avec stupĂ©faction qu'il y avait des mondes qui n'agissaient pas comme nous. Mais aussi que derriĂšre cette diffĂ©rence apparente, derriĂšre cette rupture radicale avec notre propre rĂ©alitĂ©, on pouvait mettre en Ă©vidence des appareils cognitifs communs. Ainsi, nous prenions Ă  la fois conscience de la diffĂ©rence et de l'universalitĂ©. Tel est son principal legs, encore aujourd'hui : nous sommes tous trĂšs diffĂ©rents, oui, mais nous pouvons nous entendre, car nos structures mentales fonctionnent de la mĂȘme maniĂšre »[36]. Elle confie encore : « Bien sĂ»r, dans les rapports individuels, il fut un ĂȘtre d'amitiĂ©, de confiance, qui a toujours protĂ©gĂ© celles et ceux qui ont travaillĂ© avec lui. Mais il n'a jamais acceptĂ© la moindre familiaritĂ©. Il avait un regard d'Ă©lĂ©phant, avec ce petit Ɠil perçant qui vous mettait Ă  nu. Quand on Ă©tait en face de lui, on se dĂ©sagrĂ©geait, il fallait beaucoup de courage pour se reconstituer. Du reste, en dehors de sa famille ou de ses camarades d'Ă©cole, y a-t-il eu des personnes qui ont tutoyĂ© LĂ©vi-Strauss ? J'en doute »[36].

Filiations et sources initiales

PassionnĂ© dĂšs son enfance de lectures et de « curiositĂ©s exotiques »[55], philosophe devenu ethnologue, plongĂ© prĂ©cocement par les bouleversements de son Ă©poque, entre 1941 et 1944 Ă  New York, dans l'atmosphĂšre de bouillonnement intellectuel international et pluridisciplinaire de l’École Libre des Hautes Études, LĂ©vi-Strauss construit son projet intellectuel, l'anthropologie structurale, sur des sources aussi nombreuses que variĂ©es et sur le mode de la rupture mĂ©thodologique, sans se rattacher formellement Ă  une Ă©cole ethno-anthropologie en particulier, constituant « un cas assez rare d'autodidactisme rĂ©ussi[56] ». Ses filiations intellectuelles sont ainsi rĂ©putĂ©es difficiles Ă  tracer, d'autant plus que l’Ɠuvre, trĂšs abondante, s'Ă©tale sur plus d'un demi-siĂšcle et que LĂ©vi-Strauss lui-mĂȘme ne s'est qu'assez tardivement exprimĂ© sur son parcours intellectuel initial. C'est en 1988, dans le livre d'entretien avec Didier Eribon De PrĂšs et de loin[57], qu'il fournit le plus d'indices Ă  ce sujet.

Outre les fameuses « trois maĂźtresses » de sa jeunesse (marxisme, freudisme et gĂ©ologie) dont il tire trĂšs tĂŽt un attrait pour les dimensions cachĂ©es, organisĂ©es et synchroniques du rĂ©el[58] - [59], LĂ©vi-Strauss cite parmi ses inspirateurs prĂ©coces le sinologue Marcel Granet (1884-1940) dont il revisite les travaux dans les Structures Ă©lĂ©mentaires de la parentĂ© en 1949 ; son aĂźnĂ© et ami Georges DumĂ©zil (1898-1986) en qui il voit « l’initiateur de la mĂ©thode structurale »[60] ; l'ethnologue Marcel Mauss (1872-1950), dont il cĂ©lĂšbre dĂšs 1950 dans Introduction Ă  l’Ɠuvre de Marcel Mauss[61] les intuitions holistes en matiĂšre de faits de sociĂ©tĂ©; et Jean-Jacques Rousseau en qui il voit un des « fondateurs des sciences de l’homme »[62].

Le rejet précoce de la philosophie post-moderne

C'est dans Tristes Tropiques (1955) que LĂ©vi-Strauss livre la premiĂšre description dĂ©taillĂ©e du basculement intellectuel Ă  l'origine de sa carriĂšre d'ethnologue. Jeune enseignant en philosophie, reçu Ă  l'agrĂ©gation en 1931, il ressent trĂšs tĂŽt une rĂ©ticence vis-Ă -vis de l'institution et de la discipline au sein desquelles il se sent avoir Ă©tĂ© amenĂ© par dĂ©faut plus que par vocation. La philosophie française des annĂ©es 1930 est trĂšs marquĂ©e par l'influence phĂ©nomĂ©nologique allemande (Husserl, Heidegger), prĂŽnant l'apprĂ©hension de la rĂ©alitĂ© exclusivement Ă  travers le vĂ©cu subjectif, la perception individuelle[63] ; LĂ©vi-Strauss s'ennuie Ă  pratiquer et Ă  enseigner ce qui se rĂ©sume pour lui Ă  des « exercices verbaux », des « coups de thĂ©Ăątre spĂ©culatifs Ă  l'ingĂ©niositĂ© desquels se reconnaissent les bons travaux philosophiques », et s'inquiĂšte dĂšs ses premiers postes de devoir rĂ©pĂ©ter Ă  l'infini cet enseignement philosophique qui « exerçait l'intelligence en mĂȘme temps qu'il dessĂ©chait l'esprit, [
] une sorte de contemplation esthĂ©tique de la conscience par elle-mĂȘme »[64], et qui selon lui reprend Ă  l'infini les mĂȘmes schĂ©mas historiques dĂ©connectĂ©s de la science et des phĂ©nomĂšnes concrets.

CuriositĂ© intellectuelle, refus de la monotonie et attirance ancienne vers les sciences naturelles vont se cristalliser en 1934 sous la forme de la vocation d'ethnologue : « La rĂ©vĂ©lation m'est seulement venue vers 1933 ou 1934, Ă  la lecture d'un livre rencontrĂ© par hasard et dĂ©jĂ  ancien : Primitive Society, de Robert H. Lowie »[65]. En 1934, lassĂ© de plusieurs annĂ©es d'engagement politique autant que de la philosophie institutionnelle, LĂ©vi-Strauss abandonne son activitĂ© militante et recherche activement un poste d'ethnologue, qu'il obtient au BrĂ©sil au dĂ©but de 1935. Il conservera toute sa vie de ce basculement de carriĂšre une double aversion, pour la politique autant que pour la philosophie. Ce « compte Ă  rĂ©gler » avec les philosophes[66] reviendra en force dans le « Finale » de l’Homme Nu (tome IV des Mythologiques) oĂč LĂ©vi-Strauss affirmera ne pas avoir « de philosophie qui mĂ©rite qu'on s'y arrĂȘte [
]. Contraire Ă  toute exploitation philosophique qu'on voudrait faire de mes travaux, je me borne Ă  signifier que, Ă  mon goĂ»t, ils ne pourraient, dans la meilleure des hypothĂšses, contribuer qu'Ă  une abjuration de ce qu'on entend aujourd'hui par philosophie »[67].

La révélation linguistique et phonologique

Le linguiste et phonologue russe Roman Jakobson.

RĂ©fugiĂ© aux États-Unis entre 1941 et 1944, c’est auprĂšs des anthropologues hĂ©ritiers de l’école historique allemande et autrichienne (Robert Lowie, Alfred Kroeber, Franz Boas) que LĂ©vi-Strauss puise l’idĂ©e d’une structure inconsciente des phĂ©nomĂšnes collectifs tels que la parentĂ©. Cette dimension inconsciente s'ancrait dĂ©jĂ  dans le domaine du langage chez Boas, Ă©galement grand linguiste, en qui LĂ©vi-Strauss voit « l'un des premiers [
] Ă  insister sur ce fait essentiel pour les sciences de l'homme : les lois du langage fonctionnent au niveau inconscient »[68]. Cette conviction mĂ©thodologique va s'Ă©panouir particuliĂšrement Ă  partir de 1942 grĂące Ă  la collaboration du jeune ethnologue Ă  New York dans le cadre de l’École libre des hautes Ă©tudes avec le linguiste et phonologue d’origine russe Roman Jakobson (1896-1982). La dĂ©couverte de ces travaux structuraux de la phonologie, dans lesquels Jakobson et TroubetskoĂŻ dĂ©veloppent et systĂ©matisent les acquis de Saussure en linguistique et de Boas en anthropologie, sont pour LĂ©vi-Strauss un « Ă©blouissement » intellectuel[69], la rĂ©vĂ©lation soudaine des instruments qui manquaient Ă  ses prĂ©occupations et intuitions de toujours.

L’originalitĂ© de la dĂ©marche structurale de LĂ©vi-Strauss va donc ĂȘtre de fusionner deux filiations intellectuelles sans lien entre elles jusqu'alors, et faisant un usage trĂšs diffĂ©rent du terme de structure: il va introduire la mĂ©thode de raisonnement de la phonologie dans l'anthropologie descriptive et fonctionnaliste des anglo-saxons[70]. Dans la premiĂšre partie (« Langage et parentĂ© ») de son premier grand ouvrage mĂ©thodologique Anthropologie Structurale (1958), oĂč il reprend entre autres trois articles publiĂ©s entre 1945 et 1953, LĂ©vi-Strauss dĂ©veloppe longuement la rĂ©volution mĂ©thodologique apportĂ©e par les disciplines du langage (linguistique et phonologie en particulier) dans les sciences sociales depuis le dĂ©but du XXe siĂšcle : « la phonologie ne peut manquer de jouer, vis-Ă -vis des sciences sociales, le mĂȘme rĂŽle rĂ©novateur que la physique nuclĂ©aire, par exemple, a jouĂ© pour l’ensemble des sciences exactes »[71]. Il reconnaĂźt sa dette intellectuelle vis-Ă -vis de ces disciplines, Ă©voquant notamment[72] un article de 1933 de TroubetskoĂŻ[73] qu’il qualifie « d’article programme » dĂ©finissant les quatre dĂ©marches fondamentales de la phonologie, qui seront au fondement de l'anthropologie structurale: Ă©tude de l'infrastructure inconsciente des phĂ©nomĂšnes perceptibles, traitement privilĂ©giĂ© des relations entre les termes plutĂŽt que des termes eux-mĂȘmes, mise en Ă©vidence de systĂšmes, et dĂ©couverte de lois gĂ©nĂ©rales par induction et par dĂ©duction.

Sciences naturelles et mathématiques

Moins connues chez LĂ©vi-Strauss que la filiation linguistique, les sciences naturelles (zoologie, botanique, gĂ©ologie notamment) sont pour l'ethnologue une prĂ©occupation de toujours[74] - [75]. À New York au dĂ©but des annĂ©es 1940, LĂ©vi-Strauss dĂ©couvre l'ouvrage On Growth and Forms (1917) de D'Arcy Wentworth Thompson, qui va constituer Ă  cĂŽtĂ© des travaux de Jakobson l'autre apport majeur de cette pĂ©riode oĂč prend naissance sa mĂ©thodologie structurale. Le naturaliste Ă©cossais y interprĂšte « comme des transformations les diffĂ©rences visibles entre les espĂšces ou organes animaux ou vĂ©gĂ©taux au sein d'un mĂȘme genre »[76]. Cette inspiration naturaliste et esthĂ©tique, que LĂ©vi-Strauss fait Ă©galement remonter Ă  Goethe, Albrecht DĂŒrer et Ă  Georges Cuvier, reviendra rĂ©guliĂšrement dans son Ɠuvre[77], et va ĂȘtre Ă  l'origine du concept de transformation, fondamental dans l'anthropologie structurale lĂ©vi-straussienne.

C'est dans cette scientificitĂ© prĂ©cocement revendiquĂ©e, opposant la construction minutieuse de modĂšles Ă  l'empirisme anglo-saxon, que s’inscrit l'intĂ©rĂȘt de LĂ©vi-Strauss pour les mathĂ©matiques : dĂšs les annĂ©es 1940, il sollicite dans le cadre de sa thĂšse AndrĂ© Weil, mathĂ©maticien lui aussi Ă©migrĂ© Ă  New York et membre fondateur du groupe Bourbaki, pour rĂ©soudre avec la thĂ©orie des groupes (et le groupe de Klein) une Ă©nigme sur les rĂšgles de mariage[78]. Dans l’introduction d’un article intitulĂ© Les MathĂ©matiques de l’Homme (1955), il fait remonter jusqu’à l’antiquitĂ© grecque les problĂ©matiques qu’il aborde avec l’anthropologie structurale, et qu’il a d’emblĂ©e cherchĂ© Ă  intĂ©grer dans un cadre scientifique de portĂ©e gĂ©nĂ©rale[79]. Bien que poursuivant sa propre filiation intellectuelle, LĂ©vi-Strauss continuera de faire rĂ©guliĂšrement rĂ©fĂ©rence dans son Ɠuvre aux mathĂ©matiques et Ă  leurs applications Ă©mergentes dans les annĂ©es 1950 aux États-Unis (cybernĂ©tique, thĂ©orie de l’information puis la systĂ©mique[80]) - [81] - [82].

MĂ©thode structurale

Contexte

Important en France le terme Ă  l'Ă©poque anglo-saxon d'anthropologie sociale (comme science gĂ©nĂ©rale de la sociĂ©tĂ©), LĂ©vi-Strauss cherche dĂšs les annĂ©es 1940 Ă  appliquer Ă  l'ethnologie le concept Ă  l'Ă©poque naissant de structuralisme, c'est-Ă -dire Ă  expliquer la diversitĂ© des faits de sociĂ©tĂ© par la combinatoire d'un nombre limitĂ© de possibilitĂ©s logiques liĂ©es Ă  l'architecture du cerveau humain, en rupture avec les courants dominants de cette Ă©poque en ethno-anthropologie : Ă©volutionnisme, diffusionnisme, culturalisme, fonctionnalisme. La mĂ©thode qu'il commence Ă  construire, qu'il appelle dĂšs lors l’anthropologie structurale, associe donc les principes gĂ©nĂ©raux des sciences naturelles et ceux de la formalisation logico-mathĂ©matique et linguistique, pour apprĂ©hender une sociĂ©tĂ© en tant que systĂšme complexe douĂ© de propriĂ©tĂ©s autonomes invariables (« structurales ») dĂ©coulant des relations entre les Ă©lĂ©ments (les individus) qui le composent, non dĂ©ductibles de l’étude de ces seuls individus et non perceptibles consciemment a priori par eux.

Les termes d’analyse (ou mĂ©thode) structurale en anthropologie ont souvent Ă©tĂ© employĂ©s indiffĂ©remment comme synonymes d’anthropologie structurale par LĂ©vi-Strauss lui-mĂȘme, qui les a fixĂ©s comme titres de plusieurs de ses articles et ouvrages. Ainsi tout au long de sa carriĂšre, Ă  cĂŽtĂ© des grands thĂšmes anthropologiques oĂč il applique sa mĂ©thode (parentĂ©, symbolisme, totĂ©misme, mythes, puis systĂšme Ă  maison), il continue de publier des Ă©crits mĂ©thodologiques, dans lesquels il affine les aspects fondamentaux de son grand projet scientifique. Il rassemblera au fur et Ă  mesure ces diffĂ©rents articles dans trois livres constituant une suite cohĂ©rente : Anthropologie Structurale (1958), Anthropologie Structurale deux (1973), et enfin Le regard Ă©loignĂ© (1983) qui d'aprĂšs l'auteur dans la prĂ©face[83], aurait pu s'appeler Anthropologie structurale trois.

DĂ©finitions

C'est assez prĂ©cocement dans sa carriĂšre, Ă  partir de la deuxiĂšme moitiĂ© des annĂ©es 1940 et Ă  cĂŽtĂ© de ses travaux sur la parentĂ© (il soutient en 1949 sa thĂšse de philosophie sur Les Structures Ă©lĂ©mentaires de la parentĂ©), que LĂ©vi-Strauss a commencĂ© Ă  dĂ©tailler les fondements de la mĂ©thode structurale qu’il entend dĂ©velopper en anthropologie. Plusieurs ouvrages et articles de cette Ă©poque font ainsi figures de « manifestes structuraux »[84] - [85] : L’analyse structurale en linguistique et en anthropologie (article, 1945), Introduction Ă  l’Ɠuvre de Marcel Mauss (1950), La notion de structure en ethnologie (article, 1952). LĂ©vi-Strauss y reprend les principes fondamentaux de la linguistique et de la phonologie structurales, consistant Ă  Ă©tudier des faits[86] :

  • Ă  leur niveau non conscient, objectif, sans se limiter au vĂ©cu subjectif et Ă  la perception consciente des individus (indigĂšnes ou informateurs) ;
  • en privilĂ©giant les relations entre les termes (ou Ă©lĂ©ments), et non plus seulement ces termes eux-mĂȘmes :
  • sous l’angle de leur systĂšme d’appartenance, ensemble dynamique oĂč Ă©voluent ces termes et leurs relations rĂ©ciproques :
  • par l’intermĂ©diaire de lois gĂ©nĂ©rales, universelles, qu’il s’agit de formuler Ă  la fois par une dĂ©marche inductive et dĂ©ductive.

Une définition plus tardive de la méthode structurale par Lévi-Strauss, restée célÚbre et illustrant ses liens étroits avec la démarche intellectuelle générale des sciences fondamentales[87], est celle figurant dans Tristes Tropiques (1955), son livre le plus diffusé :

« L’ensemble des organisations sociales d’un peuple est toujours marquĂ© par un style, elles forment des systĂšmes. Je suis persuadĂ© que ces systĂšmes n’existent pas en nombre illimitĂ©, et que les sociĂ©tĂ©s humaines comme les individus [
] ne crĂ©ent jamais de façon absolue, mais se bornent Ă  choisir certaines combinaisons dans un rĂ©pertoire idĂ©al qu’il serait possible de reconstituer. En faisant l’inventaire de toutes les organisations sociales observĂ©es, de toutes celles imaginĂ©es [
] on parviendrait Ă  dresser une sorte de tableau pĂ©riodique comme celui des Ă©lĂ©ments chimiques, oĂč toutes les organisations rĂ©elles ou simplement possibles apparaĂźtraient groupĂ©es en familles, et oĂč nous n’aurions plus quÂŽĂ  reconnaĂźtre celles que les sociĂ©tĂ©s ont effectivement adoptĂ©es[88]. »

Principes généraux

ModÚle graphique en analyse structurale: exemple d'un village Bororo (C. Lévi-Strauss, « Contribution à l'étude de l'organisation sociale des Indiens Bororo », Journal de la Société des Américanistes, 28-2, 269-304, 1936).

Le concept de modĂšle est central dans l'anthropologie structurale[89], LĂ©vi-Strauss lui donnant la mĂȘme dĂ©finition que celle utilisĂ©e par les sciences naturelles : un outil intellectuel permettant de se reprĂ©senter et donc d’apprĂ©hender, sous-jacente Ă  la rĂ©alitĂ© Ă©tudiĂ©e, une structure elle-mĂȘme abstraite mais dont les manifestations sont trĂšs rĂ©elles. Le modĂšle est un instrument d’approche, Ă  caractĂšre provisoire, qui s’il apparaĂźt validement expliquer la rĂ©alitĂ© Ă©tudiĂ©e, est retenu alors plus dĂ©finitivement sous le terme de structure[90] - [91].

La notion de modĂšle explique notamment l'importance de la dimension spatiale (souvent dite synchronique) chez LĂ©vi-Strauss, comparativement aux paradigmes antĂ©rieurs dans sa discipline. La dimension temporelle, trĂšs largement dominante dans l'anthropologie Ă©volutionniste et fonctionnaliste, est loin d'ĂȘtre exclue de l'anthropologie structurale mais n'y est plus qu'une dimension de l'environnement dans lequel ont lieu les transformations (ou mutations, ou variations) de la structure sociale. En effet la reprĂ©sentation Ă  l’aide du modĂšle n’est pas seulement intellectuelle, mais (comme en science fondamentale) volontiers visuelle, graphique : dessin, schĂ©ma ou carte, outils dont LĂ©vi-Strauss se sert largement Ă  l'appui de ses dĂ©monstrations, par exemple avec des plans de villages indigĂšnes : « Personne n'a sĂ©rieusement cherchĂ© quelles corrĂ©lations peuvent exister entre la configuration spatiale des groupes, et les propriĂ©tĂ©s formelles qui relĂšvent des autres aspects de leur vie sociale. Pourtant de nombreux documents attestent la rĂ©alitĂ© et l'importance de telles corrĂ©lations, principalement en ce qui concerne, d'une part la structure sociale, et de l'autre, la configuration spatiale des Ă©tablissements humains : villages ou campements »[92]. Cette question des plans de villages est traitĂ©e de façon trĂšs caractĂ©ristique dans l'article Les organisations dualistes existent-elles ? (1956)[93].

Par ailleurs, chez LĂ©vi-Strauss, la notion de systĂšme est bien diffĂ©renciĂ©e de celle de structure, et Ă©troitement liĂ©e Ă  celle de transformation. Le systĂšme social dĂ©signe le groupe humain compris comme un ensemble composĂ© d’élĂ©ments entretenant entre eux des relations. La structure en revanche, dĂ©couverte au terme du raisonnement structural (au moyen des modĂšles), est une configuration de ces relations inter-individuelles internes au systĂšme, qui peut varier selon un nombre limitĂ© de possibilitĂ©s logiques. Enfin la transformation (comprise au sens mathĂ©matique et naturaliste) dĂ©signe chacune de ces variations de la structure logique sous l'effet de l'environnement, par permutation dans le temps ou dans l'espace de termes et/ou de relations, crĂ©ant une variante (une nouvelle configuration) du systĂšme. Les configurations proches dans le temps et/ou dans l'espace sont appelĂ©es groupe de systĂšmes, et les transformations qui les induisent, groupe de transformations (selon le principe mathĂ©matique) ; et c'est parce que le nombre de configurations stables logiquement possibles de la structure sociale est limitĂ©, que des structures identiques de phĂ©nomĂšnes sociaux (parentĂ©, mythes, formes artistiques, etc.) peuvent ĂȘtre identifiĂ©es en des temps ou des lieux trĂšs Ă©loignĂ©s rendant le contact entre les sociĂ©tĂ©s considĂ©rĂ©es trĂšs improbable :

« Le terme « groupe » ne dĂ©signe pas le groupe social, mais plus gĂ©nĂ©ralement la maniĂšre dont les phĂ©nomĂšnes sont groupĂ©s entre eux. [
] Il est impossible de concevoir les relations sociales en dehors d'un milieu commun qui leur serve de systĂšme de rĂ©fĂ©rence. L'espace et le temps sont les deux systĂšmes de rĂ©fĂ©rence qui permettent de penser les relations sociales, ensemble ou isolĂ©ment[94]. »

ThĂšmes d'application

Ayant élaboré sa méthode structurale dans les années 1940 à New York afin d'organiser et de mettre en forme les données ethnographiques qu'il avait collectées au Brésil entre 1935 et 1938, Lévi-Strauss applique d'abord cette méthode sur les relations de parenté, l'un des thÚmes majeurs de l'anthropologie de l'époque. Reprenant et élargissant la tension entre nature et culture abordée dans sa thÚse, il va ensuite se tourner vers d'autres thématiques : le symbolisme et la pensée sauvage dans les années 1950, la mythologie dans les années 1960, la parenté cognatique dans les années 1970 et 1980 ; et tout au long de sa carriÚre, mais plus particuliÚrement aprÚs sa retraite en 1982, vers l'art d'une part, vers l'histoire et le temps des sociétés d'autre part.

Les structures élémentaires de la parenté

Avec la mĂ©thode structurale, LĂ©vi-Strauss donne un nouveau souffle aux Ă©tudes de parentĂ©. L'anthropologie prenait traditionnellement comme objet fondamental de son Ă©tude la famille, Ă©tudiĂ©e comme groupe de filiation dans une dimension diachronique (temporelle), et considĂ©rĂ©e comme une unitĂ© autonome composĂ©e d'un mari, d'une femme et de leurs enfants, en tenant pour secondaires les neveux, cousins, oncles, tantes et grands-parents. À partir de sa thĂšse sur les structures Ă©lĂ©mentaires de la parentĂ©, LĂ©vi-Strauss rĂ©volutionne ces Ă©tudes et jette une lumiĂšre nouvelle sur des faits de sociĂ©tĂ© jusque-lĂ  peu Ă©tudiĂ©s et considĂ©rĂ©s comme obscurs : rĂ©ciprocitĂ© entre groupes de parentĂ©, exogamie, interdits de mariage. Il est le premier Ă  insister sur l'importance de l'alliance au sein des structures de parentĂ©, dĂ©veloppant une vaste « thĂ©orie de l'alliance » qui met en rapport d'une part la nĂ©cessitĂ© de l'Ă©change et de la rĂ©ciprocitĂ©, d'autre part le principe de prohibition de l'inceste.

Pour cela il change radicalement d'approche. Reprenant le modĂšle linguistique et phonologique de la « valeur » en tant que position dans un systĂšme, et s’appuyant sur l’analyse des niveaux dits d’appellations et d’attitude dĂ©jĂ  dĂ©crits dans les systĂšmes de parentĂ© par ses prĂ©dĂ©cesseurs, LĂ©vi-Strauss Ă©claire la comprĂ©hension comparative de diverses ethnographies classiques (Trobriand, Siuai, Tcherkesses, Tonga, Lac Kutubu) en renversant le point de vue traditionnel de l'anthropologie pour mettre en avant les membres secondaires de la famille et en centrant son analyse sur les relations entre les unitĂ©s plutĂŽt que sur les unitĂ©s elles-mĂȘmes: les membres d'une parentĂ© n'acquiĂšrent des identitĂ©s dĂ©terminĂ©es que par les relations qu'ils entretiennent les uns avec les autres. LĂ©vi-Strauss introduit dans le groupe familial type le terme d’oncle maternel et la relation d’avunculat, pour construire son premier grand modĂšle structural. En analysant comment se forment les identitĂ©s au cours des mariages intertribaux, il remarque en effet que la relation entre un oncle et son neveu (A) est Ă  la relation entre un frĂšre et sa sƓur (B) ce que la relation entre un pĂšre et son fils (C) est Ă  celle qui relie un mari Ă  sa femme (D) : A est Ă  B ce que C est Ă  D. De la sorte, en connaissant A, B et C, on peut prĂ©dire D. L'anthropologie structurale permet donc d'extraire depuis de larges masses de donnĂ©es empiriques des relations gĂ©nĂ©rales entre des unitĂ©s, et d'isoler des lois Ă  valeur prĂ©dictive :

« Cette structure repose elle-mĂȘme sur quatre termes (frĂšre, sƓur, pĂšre, fils), unis entre eux par deux couples d’opposition corrĂ©latives, et tels que, dans chacune des deux gĂ©nĂ©rations en cause, il existe toujours une relation positive et une relation nĂ©gative. [
] Cette structure est la structure de parentĂ© la plus simple qu’on puisse concevoir et qui puisse exister. C’est Ă  proprement parler l’élĂ©ment de parentĂ©[95]. »

Loi gĂ©nĂ©rale applicable Ă  de nombreux exemples, relations privilĂ©giĂ©es par rapport aux termes, systĂšmes dĂ©passant la conscience des individus, les grands principes de l’anthropologie structurale sont alors dĂ©jĂ  rĂ©unis en une « logique : un systĂšme de diffĂ©rences et une dynamique des rĂ©gularitĂ©s dans les relations de parentĂ©. Leur analyse peut sous ce rapport prĂ©tendre au mĂȘme degrĂ© de scientificitĂ© que celle revendiquĂ©e par la linguistique »[96].

Dans la prĂ©face Ă  la premiĂšre Ă©dition (de 1949) des Structures Ă©lĂ©mentaires de la parentĂ© (terme dĂ©signant des systĂšmes oĂč il existe une rĂšgle prĂ©cise dĂ©signant le type de conjoint Ă  Ă©pouser : telle relation dans la parentĂ©, par exemple un(e) cousin(e) matri- ou patrilinĂ©aire, ou tel clan), LĂ©vi-Strauss prĂ©cisait qu'aprĂšs cette Ă©tude, « la place reste ouverte Ă  une autre, rĂ©servĂ©e aux structures complexes ; peut-ĂȘtre mĂȘme Ă  une troisiĂšme, [
] le systĂšme des appellations »[97]. Les structures complexes dĂ©signaient, dans cette optique, les systĂšmes non prescriptifs. LĂ©vi-Strauss finira par abandonner le projet d'Ă©crire le ou les ouvrages projetĂ©s sur les autres types de structure de parentĂ©.

Nature et culture : le symbolisme et la pensée sauvage

Nature et culture : dualisme ou monisme ?

Les Structures Ă©lĂ©mentaires de la parentĂ© s'ouvraient en 1949 par leur premier chapitre sur les rapports entre nature et culture, une ancienne et dĂ©licate problĂ©matique, centrale en ethnologie et anthropologie, rejoignant d'autres dĂ©bats classiques dans l'histoire de la philosophie (innĂ© et acquis, donnĂ© et construit, esprit et matiĂšre[98]). La position de LĂ©vi-Strauss vis-Ă -vis de cette question a souvent Ă©tĂ© interprĂ©tĂ©e, notamment par ses collĂšgues anglophones (Ă  tort, pour l'anthropologue Philippe Descola[99]) comme celle d'un vieux dualisme issu de Descartes et d'une coupure radicale marquĂ©e par l'apparition du langage, mĂȘme s'il prĂ©cisait en fin d'ouvrage que « les lois de la pensĂ©e – primitive ou civilisĂ©e – sont les mĂȘmes que celles qui s'expriment dans la rĂ©alitĂ© physique et dans la rĂ©alitĂ© sociale, qui n'en est elle-mĂȘme qu'un des aspects »[100]. LĂ©vi-Strauss est donc revenu sur ce dĂ©bat dans la prĂ©face Ă  la seconde Ă©dition des Structures Ă©lĂ©mentaires, en 1967, reconnaissant les ambiguĂŻtĂ©s de sa formulation initiale, les progrĂšs accomplis depuis en gĂ©nĂ©tique et en Ă©thologie (sur la communication inter-individuelle chez les grands singes), et suggĂ©rant qu'il ne faut voir dans l'opposition nature/culture qu'une « crĂ©ation artificielle de la culture, un ouvrage dĂ©fensif que celle-ci aurait creusĂ© sur son pourtour parce qu'elle ne se sentait capable d'affirmer son existence et son originalitĂ© qu'en coupant tous les passages propres Ă  attester sa connivence originelle avec les autres manifestations de la vie »[101].

AprĂšs la parution de sa thĂšse en 1949, LĂ©vi-Strauss quitte au moins temporairement le champ de la parentĂ© pour se consacrer Ă  l'Ă©tablissement institutionnel de sa discipline, fragilisĂ©e et marginalisĂ©e sur le plan acadĂ©mique dans la France de l'aprĂšs-guerre. Il s'agit alors pour lui de dĂ©fendre la place de l'ethnologie, et d'Ă©tablir celle de l'anthropologie qu'il souhaite refonder en France en tant que vaste science de l'esprit humain en sociĂ©tĂ©. Soucieux Ă  ce titre d'Ă©largir ses vues aux conditions « inconscientes » de la vie sociale[102], et amenĂ© Ă  rĂ©orienter son enseignement Ă  la suite de sa nomination par le jeu des postes acadĂ©miques Ă  la chaire dites des « religions comparĂ©es des peuples non civilisĂ©s » de la Ve section de l'École pratique des hautes Ă©tudes[103] - [104], il reprend le dĂ©bat sur l'opposition nature/culture en s'inspirant des travaux de Mauss et de ses prĂ©dĂ©cesseurs sur le symbolisme en sciences sociales.

Le Symbolisme : Introduction à l'Ɠuvre de Marcel Mauss

Dans la tradition des sciences sociales, Ă  cĂŽtĂ© de l'usage qui en Ă©tait fait dans les arts (voir : Symbolisme dans l'art), en psychanalyse freudienne et en psychologie analytique chez Jung[105], le terme de symbolisme (ou fait symbolique) Ă©tait en effet utilisĂ© essentiellement dans les Ă©tudes sur la religion, avant d'ĂȘtre repris en sociologie par l'Ă©cole durkheimienne, surtout chez Émile Durkheim (1858-1917) puis au sein de l'ethnologie naissante par Marcel Mauss (1872-1950)[106]. S'il existe encore Ă  cette Ă©poque un certain Ă©volutionnisme, notamment chez Lucien LĂ©vy-Bruhl (1857-1939) et sa conception prĂ©logique de la mentalitĂ© primitive opposĂ©e Ă  la pensĂ©e occidentale « civilisĂ©e », Durkheim et Mauss introduisent une approche globale (holiste) de phĂ©nomĂšnes de sociĂ©tĂ© comme le don et la rĂ©ciprocitĂ©, pris comme « fait social total » (fait symbolique) : « [Mauss] rĂ©fĂšre Ă  Durkheim, qui en eut bien l'intuition, le fait que la symbolisation est Ă  la fois un fait naturel et un fait culturel. [
] Les symbolismes sont tout simplement une condition nĂ©cessaire de tout groupe. [
] Si les symboles et les signes forment un ordre propre, c'est parce qu'ils renvoient les uns aux autres et pas seulement aux choses, aux rĂ©fĂ©rents qu'ils dĂ©signent [
]. Les symboles n'existent qu'en rĂ©seaux (ce qu'on pourrait appeler les symbolismes, ceux d'un rite, d'une religion, d'une culture) dont l'ensemble, au niveau anthropologique, peut ĂȘtre appelĂ© le symbolique »[107].

L'approche maussienne va jouer une influence importante sur LĂ©vi-Strauss Ă  l'Ă©poque oĂč celui-ci Ă©labore les principes de son anthropologie structurale[108]. C'est ce legs dont LĂ©vi-Strauss rend compte en 1950 dans la prĂ©face que le sociologue Georges Gurvitch lui demande de rĂ©diger Ă  Sociologie et anthropologie, recueil de textes en l'honneur de Mauss tout juste dĂ©cĂ©dĂ©. Dans cette prĂ©face, qui deviendra l'un des textes fondateurs de l'anthropologie structurale sous le titre d’Introduction Ă  l’Ɠuvre de Marcel Mauss, s'il estime que Mauss n'est pas allĂ© assez loin dans ses intuitions, LĂ©vi-Strauss salue la grande modernitĂ© et l'intense potentiel explicatif des perspectives soulevĂ©es : importance des phĂ©nomĂšnes non conscients dans les productions collectives, privilĂšge accordĂ© Ă  la fonction organisatrice (cohĂ©sion sociale) du symbolisme plus qu'Ă  sa valeur de signification (notion d'ordre symbolique) : « C'est cette subordination du psychologique au sociologique que Mauss met utilement en lumiĂšre. [
] Il est de la nature de la sociĂ©tĂ© qu'elle s'exprime symboliquement dans ses coutumes et dans ses institutions ; au contraire, les conduites individuelles normales ne sont jamais symboliques par elles-mĂȘmes : elles sont les Ă©lĂ©ments Ă  partir desquels un systĂšme symbolique, qui ne peut ĂȘtre que collectif, se construit »[109].

Plus encore que chez Mauss, le symbolisme pour LĂ©vi-Strauss (au sens de tout phĂ©nomĂšne collectif, quel qu'il soit : langage, rĂšgle de parentĂ©, mariage, religion, rite, rĂ©cit mythique, art
) est fondamentalement un mĂ©canisme rĂ©gulateur de la sociĂ©tĂ©, une condition indispensable de son Ă©quilibre. Le social et le symbolique sont donc par essence indissociables, et la question de l'antĂ©rioritĂ© de l'un sur l'autre ne se pose pas[110]. Par son caractĂšre global, un systĂšme symbolique a beaucoup plus que la fonction de reprĂ©sentation (de signification) qui lui a historiquement donnĂ© son nom[111] : par le jeu de combinaison de relations (homologies, oppositions, inversions), il produit de l'ordre Ă  partir de l'immense quantitĂ© de donnĂ©es hĂ©tĂ©rogĂšnes et confuses que les individus reçoivent en permanence de leur environnement et qui dĂ©bordent les explications Ă©tablies (scientifiques) dont ils disposent[112].

Évolution du modĂšle: TotĂ©misme et pensĂ©e sauvage

LĂ©vi-Strauss avait dĂ©jĂ , en 1949, dĂ©taillĂ© cette fonction d'organisation et de mise en cohĂ©rence de processus inconscients par le symbolisme dans deux articles (Le Sorcier et sa magie, et L'efficacitĂ© symbolique[113]) Ă  propos des fonctions de magicien et de chaman dans certaines sociĂ©tĂ©s sans Ă©criture. Tout au long des annĂ©es 1950, il continue de travailler sur ces questions, et affine ce concept de pensĂ©e symbolique qu'il va finalement appeler « pensĂ©e sauvage », et livrer au public en 1962 dans l'ouvrage du mĂȘme nom qui connaĂźtra un succĂšs considĂ©rable.

La pensĂ©e sauvage (que LĂ©vi-Strauss appelle aussi « bricolage intellectuel »[114]) est une opĂ©ration symbolique de l'esprit humain en sociĂ©tĂ© organisant le concret (la perception sensible immĂ©diate) de façon globale sans Ă©tape de dĂ©coupage ni d'analyse; elle se dĂ©finit par complĂ©mentaritĂ© (plus que par opposition) avec la pensĂ©e dite domestiquĂ©e (ou scientifique, « pensĂ©e de l'ingĂ©nieur ») qui procĂšde quant Ă  elle lentement, par Ă©tapes intellectuelles d'induction et de dĂ©duction, pour aboutir Ă  des rĂ©sultats toujours partiels mais reproductibles. Point fondamental par lequel LĂ©vi-Strauss renverse l'Ă©volutionnisme anthropologique historique, la pensĂ©e sauvage n'est en rien une quelconque « pensĂ©e des sauvages » considĂ©rĂ©e pĂ©jorativement (car « chaque civilisation a tendance Ă  surestimer l'orientation objective de sa pensĂ©e »[115]) mais constitue Ă  l'inverse un mode de pensĂ©e universel et intemporel Ă  cĂŽtĂ© de la pensĂ©e scientifique, en alternance et en « compĂ©tition » avec elle : « Au lieu, donc, d'opposer magie et science, il vaudrait mieux les mettre en parallĂšle, comme deux modes de connaissance, inĂ©gaux quant aux rĂ©sultats thĂ©oriques et pratiques [
], mais non par le genre d'opĂ©rations mentales qu'elles supposent toutes deux, et qui diffĂšrent moins en nature qu'en fonction des types de phĂ©nomĂšnes auxquels elles s'appliquent »[116]. La pensĂ©e sauvage continue donc de s'exprimer Ă  tout moment et dans toute sociĂ©tĂ©, y compris l'occident contemporain, dans des domaines de la production humaine oĂč elle « se trouve relativement protĂ©gĂ©e: c'est le cas de l'art, auquel notre civilisation accorde le statut de parc national [
] ; et c'est surtout le cas de tant de secteurs de la vie sociale non encore dĂ©frichĂ©s »[117].

Cette oscillation constitutive de l'esprit humain, de tout temps et de tout lieu, est alors Ă  mĂȘme de rendre compte du « paradoxe nĂ©olithique », c'est-Ă -dire de cette pĂ©riode d'effervescence technique considĂ©rable oĂč en des endroits diffĂ©rents du globe l'homme dĂ©couvre l'agriculture et la maĂźtrise d'outils nouveaux, suivie de siĂšcles de stagnation[118]. La pensĂ©e scientifique (abstraite) est en effet Ă©nergĂ©tiquement coĂ»teuse, et peut dĂ©stabiliser l'ordre social en cas d'Ă©volution technique trop rapide (perte de repĂšres explicatifs): la pensĂ©e sauvage (concrĂšte) intervient alors comme mode spontanĂ© et complĂ©mentaire d'organisation et de rĂ©Ă©quilibrage collectif, de garantie pour l’homĂ©ostasie du systĂšme social[119].

La pensĂ©e sauvage, mĂȘme si elle procĂšde sans logique scientifique, est pourtant comme n'importe quel processus cĂ©rĂ©bral une pensĂ©e classificatoire, terme-clĂ© dans la thĂ©orie lĂ©vi-straussienne. Elle se saisit des formes du rĂ©el dans leur globalitĂ© pour catĂ©goriser et nommer les phĂ©nomĂšnes culturels par analogie avec la nature: c'est par ce raisonnement que LĂ©vi-Strauss dans La PensĂ©e Sauvage reprend et rĂ©interprĂšte entiĂšrement le problĂšme, classique en anthropologie, du totĂ©misme, qu'il avait dĂ©jĂ  abordĂ© dans un livre plus bref publiĂ© quelques mois auparavant, dĂ©but 1962, Le TotĂ©misme aujourd'hui. Dans son optique, le totĂ©misme (façon dont les clans ou groupes vĂ©nĂšrent des animaux ou plantes d'aprĂšs lesquels ils se nomment eux-mĂȘmes, dans certaines sociĂ©tĂ©s) est en rĂ©alitĂ© une illusion ethnographique par erreur d'Ă©chelle : lĂ  oĂč on a cru le voir, il ne fallait pas en fait considĂ©rer de façon isolĂ©e chaque ressemblance groupe-totem, mais des « diffĂ©rences qui se ressemblent », c'est-Ă -dire un diffĂ©rentiel entre le plan de la nature (les totems) et celui de la culture (les groupes) en se plaçant Ă  l'Ă©chelle globale de l'ethnie considĂ©rĂ©e voire de plusieurs ethnies voisines[120] :

1. société « à totem » :

     NATURE     espùce 1 ≠ espùce 2 ≠ espùce 3 ≠ espùce 4
                         |          |          |
     CULTURE    groupe 1 ≠ groupe 2 ≠ groupe 3 ≠ groupe 4

2. société « à castes »

     NATURE     espùce 1 ≠ espùce 2 ≠ espùce 3 ≠ espùce 4
                   |          |          |          |
     CULTURE    groupe 1 ≠ groupe 2 ≠ groupe 3 ≠ groupe 4

Dans les sociĂ©tĂ©s exogames, dites classiquement « Ă  totem » (schĂ©ma no 1), les groupes diffĂšrent entre eux de la mĂȘme façon que les espĂšces naturelles diffĂšrent entre elles (homologie entre les relations) : ils ne sont pas identifiĂ©s Ă  l'espĂšce correspondante et se conçoivent comme parties solidaires d'un mĂȘme tout ; ils peuvent donc partager des conjoints entre eux (exogamie). En revanche ce que des ethnographes avaient cru identifier comme des homologies entre groupes et espĂšces existe bien, mais dans des sociĂ©tĂ©s dites « Ă  castes », comme en Inde (schĂ©ma no 2), endogames parce que s'identifiant en tout point Ă  des espĂšces qui ne peuvent biologiquement se mĂ©langer. Revenant Ă  la fin du livre Ă  une ancienne problĂ©matique Ă©clairĂ©e d'un jour nouveau par la thĂ©orie de la pensĂ©e sauvage, LĂ©vi-Strauss prĂ©cise finalement que « l'opposition entre nature et culture, sur laquelle nous avons jadis insistĂ©, nous semble aujourd'hui offrir une valeur surtout mĂ©thodologique »[121].

Études sur l'art

FormĂ© dans une famille comptant de nombreux artistes, dont son pĂšre, LĂ©vi-Strauss dĂ©veloppe trĂšs tĂŽt un intĂ©rĂȘt pour la matiĂšre esthĂ©tique. Il dĂ©couvre lors de sa premiĂšre mission ethnographique au BrĂ©sil en 1935-36 les productions artistiques indiennes, dont les peintures faciales des femmes Caduveo qui le fascinent ; au retour de ce voyage, il organise Ă  Paris une exposition de cĂ©ramiques, de peaux peintes et de parures[122]. Durant ses annĂ©es d'exil Ă  New York, il frĂ©quente antiquaires et musĂ©es avec les surrĂ©alistes (Max Ernst, AndrĂ© Breton, Yves Tanguy), s'imprĂšgne de leur regard artistique, participe Ă  leurs expositions et publications. Il se passionne alors pour l'art indien de Colombie Britannique, en particulier les masques[123].

« Masque de transformation » Kwakiutl (Peabody Museum, université Harvard).

C'est trĂšs tĂŽt en ethnologue qu'il aborde ces productions: dĂšs 1944 il publie un de ses articles les plus connus, le dĂ©doublement de la reprĂ©sentation dans les arts de l'Asie et de l'AmĂ©rique[124], oĂč il analyse la troublante similitude structurale (dĂ©doublement du corps ou du visage selon un axe symĂ©trique) entre diffĂ©rentes formes d'art trĂšs Ă©loignĂ©s dans le temps ou dans l'espace, comme les masques de Colombie Britannique, les peintures faciales Caduveo ou les sculptures Maori. Face Ă  ce que les thĂ©ories diffusionnistes ne pouvaient expliquer, il formule l'hypothĂšse d'un modĂšle logique universel, visant Ă  la rĂ©solution de contradictions sociales internes par le dĂ©doublement gĂ©omĂ©trique ou morphologique des objets d'art crĂ©Ă©s[125] - [126]. Cet article, qui sera le plus ancien de ceux repris en 1958 dans Anthropologie structurale, est important dans l’Ɠuvre de LĂ©vi-Strauss dans la mesure oĂč il ouvre trĂšs tĂŽt et largement le champ des matĂ©riaux ethnographiques candidats Ă  l'analyse structurale. Au-delĂ  du langage et de la parentĂ©, qui serviront de modĂšle initial, toute reprĂ©sentation ou production collective, qu'elle soit matĂ©rielle (art, musique, rite) ou immatĂ©rielle (conte, mythe) peut servir Ă  explorer le fonctionnement universel des « enceintes mentales » en sociĂ©tĂ©, au-delĂ  des explications fonctionnalistes, Ă©volutionnistes ou diffusionnistes : « L'analyse structurale, lorsqu'elle s'applique Ă  l'art, touche donc au privilĂšge de l'individualitĂ© crĂ©atrice en la replaçant dans un contexte social qu'elle exprime en dĂ©veloppant toutes ses contradictions »[127].

LĂ©vi-Strauss poursuit cette analyse en 1947 avec l'article Le serpent au corps rempli de poissons[128], puis en 1955 dans le chapitre de Tristes Tropiques consacrĂ©s aux peintures faciales Caduveo. En 1975 il consacrera un livre, La voie des masques, aux transformations logiques identifiables dans l'esthĂ©tique des masques de Colombie Britannique : « Pas plus que les mythes, les masques ne peuvent s'interprĂ©ter en eux-mĂȘmes et par eux-mĂȘmes, comme des objets sĂ©parĂ©s. EnvisagĂ© du point de vue sĂ©mantique, un mythe n'acquiert un sens qu'une fois replacĂ© dans le groupe de ses transformations »[129].

AprĂšs cette premiĂšre pĂ©riode marquĂ©e dans les annĂ©es 1940 par l'Ă©tude des masques et peintures faciales, l'approche de l'art par LĂ©vi-Strauss va Ă©voluer, oscillant entre plusieurs positions mĂ©thodologiques et diffĂ©rents objets d'Ă©tude, mais sans se transformer fondamentalement. Il va s'intĂ©resser Ă  d'autres formes d'art: la peinture de la Renaissance (Ă  laquelle il accorde un statut spĂ©cifique de « connaissance », comme modĂšle rĂ©duit du rĂ©el) dans Tristes Tropiques, puis surtout, dans les annĂ©es 1960, au modĂšle musical qui va s'avĂ©rer le plus apte Ă  l'analyse des mythes: comme le rĂ©cit collectif, l’Ɠuvre musicale mobilise les rythmes physiologiques, organise les donnĂ©es sensibles de façon globale sans ĂȘtre traduisible autrement que dans une autre Ɠuvre de la mĂȘme catĂ©gorie[130] ; elle est donc un mĂ©talangage plus qu'un langage[131] - [132]. Dans Mythe et musique[133], LĂ©vi-Strauss suggĂšre d'ailleurs que la musique en occident s'est dĂ©veloppĂ©e sur l'espace laissĂ© vacant par le retrait progressif des grands rĂ©cits mythiques.

LĂ©vi-Strauss continue ensuite, tout au long de sa carriĂšre, Ă  publier Ă©tudes et rĂ©flexions sur les manifestations artistiques : Entretiens (avec Georges Charbonnier ; 1961) ; chap. XVIII et XIX du Regard EloignĂ© (1983) ; chap. 18 et 19 de De prĂšs et de loin (avec Didier Eribon ; 1988) ; Des symboles et leurs doubles (1989), anthologie regroupant textes et articles antĂ©rieurement publiĂ©s sur l'art ; et enfin, en 1995, Regarder, Écouter, Lire, piĂšce majeure de la rĂ©flexion de l'anthropologue sur l’Ɠuvre d'art depuis La Voie des Masques, vingt ans auparavant.

Étude des mythes

Les travaux dĂ©butĂ©s par LĂ©vi-Strauss au dĂ©but des annĂ©es 1950 dans le cadre de son enseignement Ă  l'EPHE puis au CollĂšge de France sur les manifestations collectives symboliques, lui ont permis d'accumuler une quantitĂ© considĂ©rable de donnĂ©es sur les rites et les mythes, et une mĂ©thodologie d'Ă©tude de la pensĂ©e du concret et de la logique des qualitĂ©s sensibles. Il s'attelle Ă  partir de l'annĂ©e universitaire 1961-1962 Ă  la rĂ©daction d'une Ɠuvre hautement ambitieuse, revue d'ensemble de centaines de mythes amĂ©rindiens qui dĂ©bouchera sur la tĂ©tralogie monumentale des Mythologiques.

FascinĂ© par les ressemblances apparentes entre les mythes du monde entier, LĂ©vi-Strauss rejette d'emblĂ©e l'idĂ©e qu'ils puissent « se rĂ©duire tous Ă  un jeu gratuit, ou Ă  une forme grossiĂšre de spĂ©culation philosophique »[134]. Ce qui importe, c'est la substance du mythe, et celle-ci « ne se trouve ni dans le style, ni dans le mode de narration, ni dans la syntaxe, mais dans l'histoire qui y est racontĂ©e »[135]. Partant de l'idĂ©e qu'il n'y a pas une version unique « authentique » du mythe mais que toutes les versions sont des manifestations d'un mĂȘme langage situĂ©es entre elles dans des rapports de transformation, il dĂ©veloppe une mĂ©thode d'analyse calquĂ©e au dĂ©part sur la linguistique. Le mythe est d'autant plus justiciable, en thĂ©orie, d'une analyse de ce genre qu'il relĂšve lui-mĂȘme du discours : « (
) modes du langage, les mythes et les contes en font un usage hyper-structural : ils forment, pourrait-on dire, un mĂ©talangage oĂč la structure est opĂ©rante Ă  tous les niveaux »[136].

Dans le mythe, les unitĂ©s de base ne sont Ă©videmment pas les phonĂšmes, mais les mythĂšmes, lesquels se situent au niveau de la phrase la plus courte possible. Le personnage mythique, « loin de constituer une entitĂ©, est, Ă  la maniĂšre du phonĂšme tel que le conçoit Roman Jakobson, un faisceau d'Ă©lĂ©ments diffĂ©rentiels »[137]. Un mythe est donc rĂ©crit en une sĂ©rie de propositions, chacune consistant en la relation entre une fonction et un sujet. Les propositions pourvues de la mĂȘme fonction sont regroupĂ©es sous le mĂȘme numĂ©ro.

Examinant les relations entre les mythĂšmes, LĂ©vi-Strauss en arrive Ă  la conclusion qu'un mythe consiste uniquement en oppositions binaires. Le mythe d'ƒdipe, par exemple, est Ă  la fois l'exagĂ©ration et la sous-Ă©valuation des relations de sang, l'affirmation d'une origine autochtone de l'humanitĂ© et le dĂ©ni de cette origine. Sous l'influence de Hegel, LĂ©vi-Strauss pense que l'esprit humain organise fondamentalement sa pensĂ©e autour de telles oppositions binaires et de leur unification (thĂšse, antithĂšse, synthĂšse), ce mĂ©canisme permettant de rendre la signification possible. De plus, il considĂšre que le mythe est un stratagĂšme habile qui transforme une opposition binaire inconciliable en une opposition binaire conciliable, crĂ©ant ainsi l'illusion ou la croyance qu'elle a Ă©tĂ© rĂ©solue.

Dans cette méthode d'analyse, l'accent est mis non pas sur les enchaßnements syntaxiques entre les divers moments du récit, mais sur les oppositions paradigmatiques qui sous-tendent la dynamique profonde des événements et donnent au mythe sa signification : le cru et le cuit, le ciel et la terre, le soleil et la lune, etc. Ce choix s'appuie sur le fait que le mythe joue beaucoup plus nettement sur les oppositions que ne le fait le conte, dans lequel les contradictions sont affaiblies et se situent à un niveau social ou moral plutÎt que cosmologique ou métaphysique[138]. Cette importance des relations d'opposition entraßne l'analyste à délaisser la trame temporelle du récit pour se concentrer sur les articulations logiques qui forment sa structure matricielle. Par ailleurs, Lévi-Strauss justifie l'élimination du temps en montrant que, dans le mythe, le temps est fonciÚrement autre, en quelque sorte immobile : en plus de se rapporter toujours à des événements passés, le mythe attribue au dénouement du récit une valeur définitive et se présente comme « un schÚme doué d'une efficacité permanente »[139]. Ce désinvestissement de la trame temporelle amÚne l'anthropologue à chercher un mode de formalisation du récit bien différent du modÚle de Vladimir Propp, qui est récusé précisément en raison de sa dimension chronologique[140].

LĂ©vi-Strauss observe par ailleurs, dans ces mythes, la rĂ©currence des oppositions binaires entre le cru et le cuit d’une part et le cru et le pourri d’autre part, Ă  la base de son modĂšle du triangle culinaire[141]. Il considĂšre que l’acte de cuisson donne lieu Ă  une transformation culturelle et la putrĂ©faction Ă  une transformation naturelle[142]. La cuisine, entendue comme cuisson des aliments, est pour lui une forme de mĂ©diation entre nature et culture[143]. Il considĂšre par ailleurs que les mythes d’origine du feu partagent la mĂȘme structure de ceux de l’origine de la cuisine, diamĂ©tralement opposĂ©e Ă  celle des mythes de l’origine de l’eau qui sont pour leur part analogues Ă  celle des mythes de l’origine des plantes cultivĂ©es[144].

Enfin, l'Ă©limination du syntagmatique sera d'autant plus Ă©clatante que le rĂ©cit pourra ĂȘtre saisi au moyen d'une formule mathĂ©matique, emblĂšme du scientifique. Tout rĂ©cit mythique se ramĂšne ainsi Ă  une sĂ©rie de rapports binaires entre Ă©lĂ©ments positifs et nĂ©gatifs ou, mieux encore, Ă  une formule algĂ©brique dite formule canonique du mythe : Fx (a) : Fy (b) ≈ Fx (b) : Fa−1 (y), que LĂ©vi-Strauss introduit pour la premiĂšre fois en 1958 dans Anthropologie structurale (chap. XI, La Structure des mythes, reprenant un article 1955). Selon cette Ă©quation, le mythe est structurĂ© autour de deux termes (a et b) et de deux fonctions (x et y) pouvant subir diffĂ©rentes inversions et permutations rĂ©alisant autant de possibilitĂ©s de transformations du rĂ©cit: inversions des termes (a et b), inversion entre terme et fonction (y et b), inversion d'un terme sur lui-mĂȘme (a et non-a, ou a−1)[145]. Si Propp a Ă©tĂ© le premier Ă  ouvrir le rĂ©cit Ă  des manipulations symboliques, et Ă  reprĂ©senter celui-ci par une formule oĂč sont Ă©numĂ©rĂ©es les fonctions particuliĂšres qui le constituent, LĂ©vi-Strauss est allĂ© beaucoup plus loin. En enlevant au rĂ©cit sa composante temporelle, il a pu se concentrer sur les relations paradigmatiques et aboutir Ă  un modĂšle plus rĂ©duit et plus formalisĂ©, ce qui serait un gain manifeste par rapport au schĂ©ma de Propp[146].

Parenté cognatique et systÚme à maison

Une Big House kwakiutl Ă  Victoria, Colombie Britannique (Canada).

DĂ©couvert et formulĂ© par LĂ©vi-Strauss assez tardivement dans sa carriĂšre, au milieu des annĂ©es 1970, le concept de maison constitue pour l'ethnologue un retour aux Ă©tudes de parentĂ© par lesquelles il Ă©tait entrĂ© dans sa discipline dans les annĂ©es 1930. Ce nouveau concept va occuper une place importante dans sa dĂ©marche intellectuelle, en rupture avec les grandes thĂ©ories anthropologiques de la parentĂ© : celle de l’alliance qu’il avait dĂ©fendue pendant l’essentiel de sa carriĂšre, et celle de la filiation et de la descendance privilĂ©gies par ses homologues anglo-saxons. Il s’agissait pour lui de rĂ©pondre Ă  un problĂšme concernant les sociĂ©tĂ©s cognatiques (c'est-Ă -dire ni matrilinĂ©aires ni patrilinĂ©aires) qu’il avait jusque-lĂ  laissĂ©es de cĂŽtĂ©[147] - [148].

Levi-Strauss Ă©tait particuliĂšrement attachĂ© Ă  la cĂŽte de Colombie-Britannique et particuliĂšrement aux peuples de la rĂ©gion de Vancouver, dont il avait dĂ©couvert les masques durant ses annĂ©es d’enseignement Ă  New York autour de la Seconde Guerre mondiale, et dont il avait ensuite Ă©tudiĂ© les mythes dans le cadre de sa tĂ©tralogie des Mythologiques. Il avait Ă  cette occasion pris connaissance des difficultĂ©s rencontrĂ©es par l’anthropologue amĂ©ricain Franz Boas[149] pour interprĂ©ter la parentĂ© de certaines de ces tribus indiennes, notamment les Kwakiutl. Boas avait identifiĂ© chez eux des unitĂ©s sociales qu’ils appelaient numaym, dirigĂ©es par une aristocratie et qui transmettaient de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration des biens matĂ©riels et immatĂ©riels (titres, noms, fonctions religieuses) selon des modalitĂ©s Ă©chappant Ă  toutes les thĂ©ories anthropologiques classiques comme l’alliance, la filiation matrilinĂ©aire ou patrilinĂ©aire. En publiant en 1975 la premiĂšre version de la Voie des Masques consacrĂ© Ă  ces tribus, LĂ©vi-Strauss mentionne ses interrogations sur leur systĂšme de parentĂ©. Il va ensuite se pencher sur ses questions dans le cadre de ses cours au CollĂšge de France[150]. C’est dans le cadre de son sĂ©minaire de 1976 qu’il donne sa premiĂšre dĂ©finition de la maison[151], s’appuyant sur la description des Yurok de Californie et du numaym des Kwakiutl.

Cette dĂ©finition est reprise en 1979 dans la deuxiĂšme Ă©dition de la Voie des masques, son domaine d’application Ă©tant alors prĂ©cisĂ© : « personne morale dĂ©tentrice d’un domaine composĂ© Ă  la fois de biens matĂ©riels et immatĂ©riels, qui se perpĂ©tue par la transmission de son nom, de sa fortune et de ses titres en ligne rĂ©elle ou fictive, tenue pour lĂ©gitime Ă  la seule condition que cette continuitĂ© puisse s’exprimer dans le langage de la parentĂ© ou de l’alliance, et, le plus souvent, des deux ensemble »[152].

Lévi-Strauss ne modifiera plus cette définition par la suite[153]. Il consacre à la notion de maison plusieurs cours au CollÚge de France sur le sujet, entre 1976 et 1982 (résumés dans la cinquiÚme partie de Paroles Données), ainsi qu'un article intitulé « Histoire et Ethnologie »[154], présenté en juin 1983 la Sorbonne pour la 5e Conférence Marc Bloch. Il revient publiquement une derniÚre fois sur le concept de maison en 1987 dans un entretien[155] accordé à Pierre Lamaison, anthropologue spécialiste du monde rural européen.

C’est surtout Ă  partir de l’article « Histoire et Ethnologie » de 1983 que le concept de maison a Ă©tĂ© diffusĂ© dans la communautĂ© scientifique, et a commencĂ© Ă  intĂ©resser un public large d’historiens, d’ethnologues et mĂȘme d’archĂ©ologues[156]. Cependant la formulation de LĂ©vi-Strauss n’a pas toujours Ă©tĂ© bien reçue, parfois considĂ©rĂ©e comme incompatible avec la catĂ©gorie de maison au sein de certaines sociĂ©tĂ©s[157].

L’Ɠuvre dans son contexte : rĂ©ception, dĂ©bats, postĂ©ritĂ©

Une audace scientifique assumée

Auteur d'une Ɠuvre scientifique et littĂ©raire immense tant par la quantitĂ© d'articles et de livres que par la multiplicitĂ© des sujets abordĂ©s, et rĂ©solument novatrice dans ses hypothĂšses thĂ©oriques comme dans ses mĂ©thodes, LĂ©vi-Strauss n'a cessĂ© de susciter dĂ©bats et critiques dĂšs ses dĂ©buts Ă  la fin des annĂ©es 1940 puis tout au long de sa carriĂšre, en France et aux États-Unis surtout, mais Ă©galement dans de nombreux autres pays. Ses travaux ont fait et continuent de faire l'objet d'un nombre considĂ©rable de publications ; ils restent encore aujourd'hui trĂšs commentĂ©s. Plusieurs raisons peuvent ĂȘtre avancĂ©es Ă  cette intense rĂ©ception, conjonction d'enthousiasmes et de rejets[158] :

  • le contexte historique, et en particulier le paradigme structuraliste dans lequel LĂ©vi-Strauss s'est prĂ©cocement inscrit et qu'il a largement contribuĂ© Ă  dĂ©velopper, avant de s'en Ă©carter dans les annĂ©es 1960 Ă  mesure que ce mouvement prenait un virage formaliste littĂ©raire et une ampleur mĂ©diatique ;
  • le caractĂšre rĂ©volutionnaire au sein des sciences sociales de l'Ă©poque des intuitions holistes et des rĂ©fĂ©rences naturalistes de LĂ©vi-Strauss, son goĂ»t du risque mĂ©thodologique[159] et son projet d'appliquer rĂ©solument aux sciences de l'homme la rigueur des mĂ©thodes utilisĂ©es par les sciences dites « dures », en rupture assumĂ©e par rapport Ă  l'empirisme de l'anthropologie anglo-saxonne, Ă  l'historicisme Ă©volutionniste du XIXe siĂšcle et Ă  la mĂ©thode comprĂ©hensive que la sociologie de Durkheim et LĂ©vy-Bruhl continuait d'appliquer aux sociĂ©tĂ©s primitives[160] (mĂȘme si LĂ©vi-Strauss s'inspire du holisme durkheimien) ;
  • le « syndrome du fondateur »[161] - [162] : Ă©tudiant puis jeune enseignant formĂ© dans une philosophie qu'il rejettera constamment, puis ethnologue autodidacte tenu Ă  l'Ă©cart des grandes institutions jusqu'Ă  la fin des annĂ©es 1950 (et son Ă©lection au CollĂšge de France), LĂ©vi-Strauss aborde les sciences de l'homme avec un regard neuf, extĂ©rieur, et une mĂ©thode structurale issue d'une discipline (la linguistique) peu connue de ses condisciples, cherchant d'emblĂ©e Ă  bouleverser leurs codes et habitudes de travail ;
  • la variĂ©tĂ© thĂ©matique, gĂ©ographique et historique des sujets abordĂ©s par LĂ©vi-Strauss, de la parentĂ© des sociĂ©tĂ©s sans Ă©criture sur tous les continents aux systĂšmes Ă  maisons de l'Occident mĂ©diĂ©val, des Masques de Colombie Britannique aux rĂ©fĂ©rences musicales des Mythologiques, des rites amĂ©rindiens Ă  la famille europĂ©enne contemporaine ;
  • le dĂ©sir rĂ©guliĂšrement avouĂ© par LĂ©vi-Strauss d'une rĂ©ussite non seulement scientifique mais aussi littĂ©raire et artistique, qui le conduira Ă  la fois au CollĂšge de France et Ă  l'AcadĂ©mie Française, « mĂ©lange des genres » peu apprĂ©ciĂ© des milieux institutionnels oĂč il Ă©volue[163].

1935-1945 : débats sur les sources initiales

Voir aussi, plus loin dans cet article : LĂ©vi-Strauss et le structuralisme.

Les sciences du langage ont Ă©tĂ© largement reconnues, par LĂ©vi-Strauss lui-mĂȘme comme par ses commentateurs, comme une source d'inspiration prĂ©coce de l’Ɠuvre, mais la rĂ©ussite de leur transposition Ă  l'ethnologie ainsi que leur importance relative vis-Ă -vis des apports naturalistes et mathĂ©matiques constitue de longue date un dĂ©bat, qui se poursuit au XXIe siĂšcle. DĂšs 1945, LĂ©vi-Strauss soulignait qu'une « difficultĂ© prĂ©liminaire s'oppose Ă  la transposition de la mĂ©thode phonologique aux Ă©tudes de sociologie primitive. L'analogie superficielle entre les systĂšmes phonologiques et les systĂšmes de parentĂ© est si grande qu'elle engage immĂ©diatement sur une fausse piste »[164]. Il reprend cette interrogation en 1951 dans l'article Langage et SociĂ©tĂ©[165], puis lors d'une confĂ©rence de conclusion Ă  une rencontre internationale d'anthropologues et de linguistes aux États-Unis en 1952 oĂč il discute du « problĂšme des rapports entre langage et culture, un des plus compliquĂ©s qui soient »[166] : « tout effort pour formuler dans un langage commun les problĂšmes linguistiques et les problĂšmes culturels nous place d'emblĂ©e dans une situation extraordinairement complexe [
]. Mon hypothĂšse de travail se rĂ©clame donc d'une position moyenne : certaines corrĂ©lations sont probablement dĂ©celables, entre certains aspects et Ă  certains niveaux, et il s'agit pour nous de trouver quels sont ces aspects et oĂč sont ces niveaux. Anthropologues et linguistes peuvent collaborer Ă  cette tĂąche »[167].

Certains auteurs, comme le linguiste italien D. Silvestri, estiment malgrĂ© tout que « mĂȘme si cette Ɠuvre s’est dĂ©veloppĂ©e ensuite dans une direction prĂ©cise, qui aboutira en toute autonomie vers les rĂ©sultats extraordinaires que l’on connaĂźt, l’apport linguistique ne sera jamais reniĂ© »[168]. Le philosophe des sciences Bertrand Saint-Sernin estime lui aussi, Ă  propos de LĂ©vi-Strauss, que « le choix de la phonologie comme discipline de rĂ©fĂ©rence – comme paradigme – pour l'ethnologie, dĂ©cidĂ© au tout dĂ©but des annĂ©es 1940, restera une constante de l’Ɠuvre[169] ». Dans un panorama de la rĂ©fĂ©rence linguistique chez les structuralistes (Le Mirage linguistique, 1988), Thomas Pavel rattache Ă©galement LĂ©vi-Strauss au courant scientiste du structuralisme, courant le plus convaincu du rĂŽle pilote de la linguistique comme mĂ©thode scientifique dans les sciences humaines, mais suggĂšre nĂ©anmoins que « les recherches de LĂ©vi-Strauss couvrent un champ infiniment plus vaste que l'application momentanĂ©e du modĂšle linguistique[170] ».

D'autres auteurs, comme les biographes de LĂ©vi-Strauss Denis Bertholet (2009)[171] et Emmanuelle Loyer (2015)[172], ainsi que le philosophe Marcel HĂ©naff[173], estiment que l'ethnologue a dĂšs ses dĂ©buts Ă©tĂ© prudent dans la transposition des modĂšles du langage vers les faits de sociĂ©tĂ©, et qu'au-delĂ  de la « rĂ©vĂ©lation »[174] et des rĂ©fĂ©rences sincĂšrement admiratives Ă  Boas et Jakobson, il s'est servi de la phonologie et de la linguistique comme modĂšles parmi d'autres au sein de l'intense creuset intellectuel transdisciplinaire que fut l'exil new-yorkais des annĂ©es 1940. Est par exemple rappelĂ©e l'analyse a posteriori de cette Ă©poque par LĂ©vi-Strauss lui-mĂȘme en 1988 :

« On a mal compris la nature et l'importance de mes emprunts Ă  la linguistique. En dehors d'une inspiration gĂ©nĂ©rale - ce qui, j'en conviens, est Ă©norme - ils se rĂ©duisent au rĂŽle de l'activitĂ© inconsciente de l'esprit dans la production de structures logiques [
] ensuite Ă  ce principe fondamental que les Ă©lĂ©ments constitutifs n'ont pas de signification intrinsĂšque [
]. Je ne crois pas avoir demandĂ© plus Ă  la linguistique, et Jakobson, au cours de nos conversations, Ă©tait le premier Ă  reconnaĂźtre que, dans un autre domaine, je faisais un usage original de ces notions[175]. »

En outre, si la linguistique structurale se prĂȘtait bien Ă  l'Ă©tude de la parentĂ© dans les annĂ©es 1940[176], elle serait montrĂ©e ensuite moins adaptĂ©e au matĂ©riau mythique, incitant l'ethnologue Ă  faire Ă©voluer ses mĂ©thodes au profit du modĂšle musical[177], « moyen le plus appropriĂ© pour indiquer ce que sa conception linguistique et sĂ©miologique du mythe ne lui permettait pas de formuler explicitement »[178]. C'est Ă©galement avec l'Ă©tude des mythes que LĂ©vi-Strauss introduit la notion de transformation inspirĂ©e des modĂšles naturalistes de philosophie des formes. À partir des annĂ©es 1970 cette filiation naturaliste[179] s'accentue encore chez LĂ©vi-Strauss, sensible aux progrĂšs de la gĂ©nĂ©tique et des sciences cognitives[180].

Depuis les annĂ©es 1990, un certain nombre de recherches philosophiques, souvent issues des modĂšles mathĂ©matiques et Ă©pistĂ©mologiques sur la morphogenĂšse, s'intĂ©ressent Ă  cette filiation moins connue de l'Ɠuvre de LĂ©vi-Strauss, et redĂ©couvrent son importance. Ainsi la notion lĂ©vi-straussienne de transformation est Ă©tudiĂ©e Ă  la lumiĂšre de la philosophie des formes dynamiques (Jean Petitot[181], Lucien Scubla[182]) ; l'approche symboliste et holiste des mythes et de l'art dans l'anthropologie structurale est comparĂ©e Ă  celle, trĂšs proche par nombre d'aspects, de l'anthropologie philosophique des formes symboliques du philosophe allemand nĂ©okantien Ernst Cassirer, que LĂ©vi-Strauss a pu cĂŽtoyer au dĂ©but des annĂ©es 1940 au Cercle Linguistique de New York oĂč ils publiaient tous deux[183] - [184].

L'anthropologue Philippe Descola revient en 2008 sur le parcours intellectuel de LĂ©vi-Strauss, dont il occupe la chaire au CollĂšge de France (aprĂšs F. HĂ©ritier) : « LĂ©vi-Strauss n'a pas tant cherchĂ© dans la linguistique un modĂšle Ă  transposer tel quel qu'une source fĂ©conde d'analogies Ă  exploiter pour une science encore dans l'enfance [
]. Ce modĂšle de la variation des traits contrastifs Ă  l'intĂ©rieur d'une table de permutation n'est pas propre Ă  la linguistique, et LĂ©vi-Strauss aurait peut-ĂȘtre pu l'emprunter aussi bien Ă  la chimie (la table pĂ©riodique des Ă©lĂ©ments) ou mĂȘme Ă  la musique, dont on sait le rĂŽle qu'elle joue dans son Ɠuvre »[185].

1945-1965 : les conquĂȘtes intellectuelles

DĂšs sa parution en 1949, la thĂšse de LĂ©vi-Strauss sur les systĂšmes de parentĂ© Ă  travers le monde apparaĂźt comme un moment dĂ©cisif dans l’histoire de l’ethnologie, devenant rapidement un des classiques dans cette discipline, en France mais aussi dans les pays anglo-saxons grĂące notamment Ă  l’ethnologue hollandais J.P.B Josselin de Jong, enthousiasmĂ© par la mĂ©thode structurale lĂ©vi-straussienne qui prolonge ses propres intuitions[186]. La thĂšse de LĂ©vi-Strauss, malgrĂ© sa technicitĂ©, diffuse Ă©galement auprĂšs du public intellectuel parisien grĂące Ă  l’enthousiasme paradoxal de deux revues en vogue, pourtant trĂšs Ă©loignĂ©es des conceptions mĂ©thodologiques de l’ethnologue : Les Temps modernes avec Simone de Beauvoir, et Critique avec Georges Bataille. Conscient du malentendu philosophique, LĂ©vi-Strauss ne rejette pas nĂ©anmoins cette publicitĂ©[187], car la rĂ©ception de l’ouvrage est loin d’ĂȘtre unanime dans les sciences sociales ; l’audace mĂ©thodologique et l’ambition gĂ©ographique considĂ©rable de l’auteur suscitent rapidement mĂ©fiances et rĂ©ticences.

Dans les annĂ©es 1949-1959, libĂ©rĂ© de son travail de thĂšse et portĂ© par le succĂšs de l’ouvrage, LĂ©vi-Strauss travaille Ă  consolider une double assise, institutionnelle et mĂ©thodologique. Les deux dimensions sont intrinsĂšquement liĂ©es. Il s’agit pour l’ethnologue, dans le contexte de la construction acadĂ©mique des sciences sociales dans la France de l’aprĂšs-guerre, de faire reconnaĂźtre sa posture mĂ©thodologique holiste et son projet d’une vaste science naturaliste de l’homme en sociĂ©tĂ©, et de gagner en visibilitĂ© institutionnelle alors qu’il ne dispose d’aucun poste prestigieux aprĂšs un sĂ©jour de plus de dix ans loin de la France. Dans ce contexte de tension acadĂ©mique, LĂ©vi-Strauss essuie jusqu’à son entrĂ©e au CollĂšge de France en 1959 des critiques rĂ©currentes, principalement de la part des historiens et des sociologues[188] :

  • historiens : explorant des champs intellectuels relativement inĂ©dits ou peu en vogue Ă  l’époque dans les sciences sociales (l’invariant, les lois de structure, les phĂ©nomĂšnes non conscients), LĂ©vi-Strauss se trouve trĂšs tĂŽt amenĂ© Ă  relativiser la diachronie des historiens au bĂ©nĂ©fice de la synchronie des lois mathĂ©matiques. S’ouvre dĂšs la fin des annĂ©es 1950 entre LĂ©vi-Strauss et les historiens une tension mĂ©thodologique durable faite de concessions, de coopĂ©ration et de compĂ©tition, opposant des approches radicalement incompatibles des sciences sociales, autour d’enjeux institutionnels capitaux (les historiens de l’École des Annales occupent le devant de la scĂšne lors de la crĂ©ation de la VIe section de l’EPHE en 1947). Critique vis-Ă -vis des postures purement narratives, Ă©volutionnistes ou diffusionnistes de la discipline historique, LĂ©vi-Strauss se verra reprocher prĂ©cocement sa mise entre parenthĂšses de la dimension temporelle, de la variabilitĂ© et de la contingence[189].
  • sociologues : le mĂ©lange de guerres d’horizons mĂ©thodologiques et de positions acadĂ©miques est plus durable et radical encore entre LĂ©vi-Strauss et le sociologue Georges Gurvitch, anciens collĂšgues Ă©migrĂ©s Ă  l’École libre des hautes Ă©tudes de New York. RentrĂ© en 1945 et ayant crĂ©Ă© au CNRS le Centre de Recherche Sociologiques (dotĂ© d’une revue), Gurvitch devient ensuite professeur Ă  la VIe section de l’EPHE et bĂ©nĂ©ficie d’une position institutionnelle plus prĂ©coce, et plus solide que celle de LĂ©vi-Strauss durant toute la dĂ©cennie 1950. Les tensions entre les deux hommes ne vont cesser de croĂźtre, depuis l’Introduction Ă  l’Ɠuvre de Marcel Mauss[190] jusqu’à un Ă©change virulent par articles interposĂ©s en 1955 qui consomme la rupture dĂ©finitive de leurs relations[191]. Gurvitch reproche Ă  LĂ©vi-Strauss de vouloir enfermer le rĂ©el dans des lois universelles abstraites, et l’ethnologue en retour dĂ©nonce l’empirisme superficiel du sociologue[192]. Le mĂȘme reproche d’abstraction est Ă  l’origine d’échanges particuliĂšrement virulents entre LĂ©vi-Strauss et divers critiques durant cette pĂ©riode : le philosophe Jean-François Revel dans son livre pamphlĂ©taire Pourquoi des Philosophes? (1956)[193], le sociologue et critique littĂ©raire Roger Caillois et sa revue DiogĂšne[194].

Peu enclin aux interviews dans la presse grand public, LĂ©vi-Strauss profite nĂ©anmoins durant quelque temps du succĂšs populaire de Tristes Tropiques en 1955 pour faire connaĂźtre largement sa discipline et ses ambitions scientifiques, et rĂ©pondre indirectement aux nombreuses attaques acadĂ©miques qu’il subit Ă  cette Ă©poque[195]. AprĂšs son Ă©lection au CollĂšge de France en 1959 et la publication de plusieurs autres livres connaissant un grand succĂšs (Anthropologie Structurale en 1958, Entretiens avec LĂ©vi-Strauss de Georges Charbonnier en 1961, Le TotĂ©misme aujourd’hui et La PensĂ©e sauvage en 1962), l’aura intellectuelle de l’ethnologue s’installe solidement auprĂšs des milieux universitaires comme du grand public. La PensĂ©e Sauvage en particulier est trĂšs largement saluĂ©e, et son dernier chapitre Histoire et dialectique, oĂč LĂ©vi-Strauss s'attaque frontalement Ă  l'existentialisme sartrien, reçu comme un Ă©vĂ©nement mĂ©diatique[196]. Les distinctions honorifiques, dĂ©corations et nominations acadĂ©miques s’accumulent, en France et Ă  travers le monde. À cĂŽtĂ© des critiques polĂ©miques en apparaissent d'autres plus fouillĂ©es, s’intĂ©ressant Ă  la mĂ©thode structurale elle-mĂȘme et non plus Ă  ses seuls rĂ©sultats, et portĂ©es non plus par de seuls articles mais par des dossiers entiers et numĂ©ros spĂ©ciaux de revues. La revue Esprit publie en 1963 un dĂ©bat philosophique entre Paul RicƓur et LĂ©vi-Strauss, oĂč s’opposent deux conceptions diamĂ©tralement opposĂ©e du sens de la vie humaine[197]. C’est en ce dĂ©but des annĂ©es 1960 que l’ethnologue commence Ă  se consacrer Ă  temps plein, pour une dizaine d’annĂ©es, Ă  la rĂ©daction des Mythologiques, s’imposant un rythme de travail « monacal » qui le rend moins prĂ©sent sur la scĂšne mĂ©diatique[198]. Le structuralisme lĂ©vi-straussien continue pourtant de s'installer dans un rapport particulier de sĂ©duction avec le public et avec l'Ă©poque, qu'il « fascine et irrite, voire inquiĂšte »[199].

1965-1970 : les ambiguïtés du structuralisme

Voir aussi, précédemment dans cet article : Filiations et influences précoces.

Le positionnement de LĂ©vi-Strauss par rapport au structuralisme tel qu'il se gĂ©nĂ©ralise et se mĂ©diatise dans les annĂ©es 1960 en France est une problĂ©matique complexe et encore dĂ©battue au XXIe siĂšcle dans l'histoire des idĂ©es contemporaines et en Ă©pistĂ©mologie. Elle est intimement liĂ©e Ă  la rĂ©flexion sur les origines du structuralisme lui-mĂȘme, notamment sur la longue durĂ©e historique, et aux dĂ©bats sur l'influence du formalisme et des sciences du langage dans l’Ɠuvre de LĂ©vi-Strauss par rapport Ă  d'autres filiations.

LĂ©vi-Strauss est entrĂ© en contact avec le concept logico-analytique et linguistique de structure lors de son exil amĂ©ricain au dĂ©but des annĂ©es 1950, notamment par l'intermĂ©diaire de Roman Jakobson qui fut un des principaux reprĂ©sentants du Cercle linguistique de Prague, mais il Ă©labore une mĂ©thodologie structurale demeurant au contact permanent de l'enquĂȘte empirique (les donnĂ©es ethnographiques) et n'utilisant des outils mathĂ©matiques que de façon sporadique et limitĂ©e. Cette mĂ©fiance vis-Ă -vis de l'abstraction de la tradition formaliste, dĂ©jĂ  sensible dans l'article Structure et dialectique de 1956[200], apparaĂźt trĂšs nettement dans un article de 1960, La structure et la forme (repris en 1973 dans Anthropologie structurale deux), Ă  propos d'un article de 1928 du formaliste Russe Vladimir Propp (Ă©ditĂ© en français en 1960 sous le titre Morphologie du conte)[201]. Pour autant, LĂ©vi-Strauss va trĂšs largement participer dans les sciences de l'Homme Ă  populariser et Ă  donner une assise institutionnelle au paradigme structural entendu au sens large (logique holiste de relations internes), au point d'en devenir la figure tutĂ©laire dans les annĂ©es 1960, grĂące Ă  l'Ă©tendue de son rĂ©seau acadĂ©mique en France comme aux États-Unis, Ă  son Ă©lection au CollĂšge de France, Ă  ses interventions rĂ©guliĂšres Ă  l'UNESCO, puis grĂące Ă  sa notoriĂ©tĂ© scientifique internationale.

ParallÚlement dans les années 1950 s'est développée en France une autre tendance structuraliste qui se réfÚre de façon encore plus marquée au langage et au Cours de linguistique générale de Saussure : Roland Barthes en analyse littéraire (Le Degré Zéro de l'écriture, 1953), Martial Guéroult en histoire de la philosophie (il entre au CollÚge de France en 1951), et surtout le sémioticien Algirdas Julien Greimas, admirateur et héritier d'une part de Saussure dont il diffuse largement les idées[202], d'autre part des écoles mathématico-linguistiques les plus formalistes (mathématiques de Bourbaki, glossématique du danois Hjelmslev)[203]. Cette tendance prÎnant l'abstraction logico-mathématique (au sens positif que lui donne la philosophie analytique du langage)[204], l'exclusivité de la synchronie et du spatial au détriment du temporel, et la coupure vis-à-vis de la réalité objective et/ou de son image mentale (le référent linguistique), connaßt un ùge d'or dans la premiÚre moitié des années 1960 autour de Barthes et Greimas, auxquels s'est joint Lacan pour qui « l'inconscient est structuré comme un langage »[205].

Ces deux tendances du structuralisme (que Dosse et Pavel qualifient de scientiste[206] - [207]) sont relativement proches jusqu'au milieu des années 1960 ; Lévi-Strauss et Lacan se fréquentent réguliÚrement et échangent sur la formalisation mathématique dans leurs disciplines[208] ; Greimas et son collectif de la revue Communication (Barthes, U.Eco, Todorov, Genette) sont hébergés à partir de 1966 dans les locaux du laboratoire d'anthropologie sociale fondé par Lévi-Strauss.

À partir du milieu des annĂ©es 1960 la scĂšne mĂ©diatique française s'empare du structuralisme, amalgame ses diffĂ©rentes tendances et le rĂ©duit Ă  son aspect le plus formaliste et logico-mathĂ©matique. C'est en 1966-1967 que le structuralisme au sens large connaĂźt son apogĂ©e Ă©ditoriale avec entre autres SĂ©mantique structurale de Greimas, ThĂ©orie de la littĂ©rature de Todorov, Écrits de Lacan. LĂ©vi-Strauss n'apprĂ©cie guĂšre et critique vivement dans plusieurs entretiens et articles ce qu'il considĂšre chez ces auteurs comme un formalisme abstrait de plus en plus marquĂ©[209] - [210] - [211] - [212], « un jeu de miroirs, oĂč il devient impossible de distinguer l’objet de son retentissement symbolique dans la conscience du sujet. [
] Comme manifestation particuliĂšre de la mythologie de notre temps, elle se prĂȘte fort bien Ă  l’analyse, mais au mĂȘme titre et de la mĂȘme façon qu’on pourrait, par exemple, interprĂ©ter de façon structurale la lecture des tarots, du marc de cafĂ© ou des lignes de la main : pour autant qu’il s’agit lĂ  de dĂ©lires cohĂ©rents »[213]. LĂ©vi-Strauss dĂ©fend son territoire intellectuel et s'Ă©loigne de Lacan[214], puis en 1970 de Barthes dont le S/Z lui dĂ©plaĂźt vivement (et qu'il pastiche), et de Greimas qui quitte le laboratoire d'anthropologie sociale[215] :

« LĂ©vi-Strauss, considĂ©rĂ© malgrĂ© lui comme le « pape » du structuralisme, a Ă©tĂ© sommĂ© de s’expliquer sur des domaines de savoir qui ne lui Ă©taient pas familiers, sur des mĂ©thodes oĂč il ne pouvait plus reconnaĂźtre les siennes, sur des prises de position qui n’avaient rien Ă  voir avec le caractĂšre technique de ses recherches et finalement sur des modes intellectuelles dont il a trĂšs vite compris Ă  quel point elles pouvaient, dans l’esprit du public comme auprĂšs de la communautĂ© savante, ĂȘtre nuisible Ă  la rigueur et Ă  l’évaluation sereine de son travail[216]. »

« Du cĂŽtĂ© de LĂ©vi-Strauss, le refus stratĂ©gique de lĂ©gitimer et d'intĂ©grer le « structuralisme littĂ©raire » est fondĂ© sur le risque de formalisme qu'il fait peser sur le « vrai » structuralisme oĂč le contenu ethnographique, historique, linguistique n'est jamais sĂ©parĂ© de la forme[217]. »

Déjà sensible aprÚs les bouleversements de mai 1968, le déclin médiatique du structuralisme s'accentue nettement à partir de 1970.

AprÚs 1970 : le reflux général du structuralisme

Claude LĂ©vi-Strauss (1973).

AprĂšs l'accueil plutĂŽt Ă©logieux du dernier volet des Mythologiques, l’Homme nu, paru en octobre 1971, Anthropologie structurale deux en 1973 est reçue de façon plus mitigĂ©e par la critique[218], en pleine pĂ©riode de reflux du paradigme structuraliste. DĂ©jĂ  en 1968, la sĂ©rie d'essais coordonnĂ©e par François Wahl Qu'est-ce que le structuralisme brossait dans les diffĂ©rentes disciplines abordĂ©es le portrait des Ă©volutions en cours, sous des accents critiques[219] - [220]. Le post-structuralisme (Derrida, Deleuze, Lyotard) opĂšre parallĂšlement une remise en question philosophique des principes structuralistes. Au dĂ©but des annĂ©es 1970, les publications Ă  charge et les postures critiques contre LĂ©vi-Strauss se succĂšdent de la part d'ethnologues et anthropologues plus jeunes (nĂ©s entre 1920 et 1940), souvent Ă©lĂšves ou proches de LĂ©vi-Strauss mais sensibilisĂ©s Ă  l'anti-colonialisme et au marxisme dont certains sont des militants actifs, et revendiquant une pratique plus empathique, subjective, Ă©loignĂ©e des modĂšles et des gĂ©nĂ©ralisations thĂ©oriques, tournĂ©e vers l'Ă©volution historique et l'action politique : Bernard Delfendahl[221] - [222], Robert Jaulin[223], Pierre Clastres[224], Jacques Lizot, Georges Balandier, Maurice Godelier, Emmanuel Terray. Les attaques viennent aussi de l'anthropologie anglophone (Raoul et Laura Makarius[225]).

La sociologie de Pierre Bourdieu témoigne elle aussi du déclin de l'anthropologie structurale lévi-straussienne dans le paysage intellectuel des années 1970. Fortement influencé par Lévi-Strauss à ses débuts, le sociologue infléchit alors nettement sa théorie en y réintégrant ce qu'il appelle les agents; avec Le Sens pratique en 1980, il attaque frontalement la méthode lévi-straussienne à laquelle il reproche de se focaliser sur les rÚgles collectives des sociétés humaines en oubliant les stratégies individuelles et le poids de l'aspect économique.

Utilisant durant les trente premiÚres années de sa carriÚre le terme de structure beaucoup plus que celui de structuralisme[226] - [227], Lévi-Strauss y fait de moins en moins référence à partir des années 1970, devant le reflux de la notion dans le paysage intellectuel. Ainsi, comme il s'en explique dans la préface du Regard éloigné en 1983[83], il renonce à intituler Anthropologie Structurale Trois cet ouvrage qui est pourtant la suite assumée des deux premiers publiés respectivement en 1958 et 1973. De fait, le livre est plébiscité par la critique, qui fait entrer l'anthropologue « dans le domaine réservé des valeurs sûres »[228]. Mais si les mots ont changé, Lévi-Strauss est resté fidÚle à ses méthodes : « On essaie simplement, et dans une trÚs faible mesure, d'appliquer à certains secteurs relevant de ce qu'on appelle improprement les sciences humaines une attitude ou une approche qui - sans avoir besoin de s'appeler structuralisme ou quoi que ce soit de ce genre - a toujours été celle de la recherche scientifique »[229].

Au fil des annĂ©es 1980 s'accentue le recul du paradigme structuraliste et du holisme en gĂ©nĂ©ral au sein des sciences humaines et sociales, oĂč reviennent en force les notions d'historicitĂ©, d'empirisme, de subjectivitĂ©, d'individualisme mĂ©thodologique[230]. Aux grandes synthĂšses thĂ©oriques lĂ©vi-straussiennes des annĂ©es 1960 sont prĂ©fĂ©rĂ©es les enquĂȘtes sur des terrains rĂ©duits, donnant la parole aux acteurs sociaux et s'attachant Ă  leur ressenti subjectif. En ethnologie et en anthropologie se multiplient les champs d'Ă©tude comme les mĂ©thodes de travail, faisant apparaĂźtre quantitĂ© de sous-disciplines spĂ©cialisĂ©es (anthropologie de l'enfance, de l'Ă©ducation, de la santĂ©, etc.)[231]. La place de LĂ©vi-Strauss dans les programmes d'enseignement en philosophie et en sciences sociales se rĂ©duit progressivement[232].

Les critiques féministes

DĂšs les Structures Ă©lĂ©mentaires de la parentĂ©, LĂ©vi-Strauss construit sa thĂ©orie de l'alliance autour de l'Ă©change des femmes comme Ă©pouses entre les groupes de parentĂ©. Cette prĂ©sentation lui vaudra tout au long de sa carriĂšre les reproches rĂ©currents de mouvements fĂ©ministes et des gender studies. LĂ©vi-Strauss analyse et rĂ©pond rĂ©guliĂšrement Ă  ces critiques jusque tardivement dans sa carriĂšre, maintenant le principe gĂ©nĂ©ral de sa thĂ©orie. Dans l'article « La sexualitĂ© fĂ©minine et l'origine de la sociĂ©tĂ© »[233] en 1995, il rĂ©fute la thĂ©orie fĂ©ministe de la perte de l'Ɠstrus comme vecteur du passage de la nature Ă  la culture, y voyant la rĂ©surgence de la vieille thĂšse Ă©volutionniste du matriarcat primitif. Enfin, en 2000, dans sa postface pour un numĂ©ro spĂ©cial de la revue L'Homme sur les questions de parentĂ©, il rĂ©insiste sur l'indiffĂ©rence au caractĂšre masculin ou fĂ©minin en tant que position dans son modĂšle thĂ©orique, fondĂ© sur les relations respectives et leurs rapports de transformation :

« Combien de fois me faudra-t-il aussi rĂ©pĂ©ter qu’il est indiffĂ©rent Ă  la thĂ©orie que les hommes Ă©changent les femmes ou bien l’inverse ? J’ai tentĂ© de rĂ©duire la confuse multiplicitĂ© des rĂšgles de parentĂ© et de mariage, dĂ©pourvue d’intelligibilitĂ©, Ă  un petit nombre de types simples, chacun dotĂ© d’une valeur explicative ; de montrer qu’à partir de ces types simples on pouvait dĂ©duire des types plus complexes ; et qu’entre tous ces types existaient des rapports de transformation. Que, dans cette construction, ce soient les hommes ou les femmes qui se dĂ©placent ne change rien Ă  son Ă©conomie. Il suffit d’inverser les signes et le systĂšme des rapports restera inchangĂ©. Et Ă  supposer que les deux sexes soient mis Ă  Ă©galitĂ©, on pourra dire, ce qui revient aussi au mĂȘme, que des groupes formĂ©s d’hommes et de femmes Ă©changent entre eux des relations de parentĂ©[234]. »

LĂ©vi-Strauss et les anthropologues

Claude LĂ©vi-Strauss en 1973.

LĂ©vi-Strauss a acquis prĂ©cocement dans sa discipline - l'ethnologie, puis en France l'anthropologie sociale qu'il a fondĂ©e – un immense prestige. TrĂšs introduit dans le milieu acadĂ©mique amĂ©ricain lors de son sĂ©jour prolongĂ© Ă  New York (1941-1948), reconnu lors du dĂ©cĂšs de Franz Boas en 1942 comme l'un des successeurs de cette figure phare de la discipline[162], il continue ensuite de construire son assise institutionnelle Ă  la fois en France et aux États-Unis oĂč il poursuit rĂ©guliĂšrement publications et confĂ©rences, puis progressivement Ă  travers le monde entier, recevant des titres honorifiques d'universitĂ©s de nombreux pays. À la fin de sa carriĂšre, les publications d'hommages Ă  son Ɠuvre, sous des formats divers, se multiplient. Son centiĂšme anniversaire en 2008 est l'occasion de recueils collectifs tĂ©moignant de son rayonnement dans la discipline[235].

Dans une dimension technique au sein de sa discipline, avec une moindre exposition mĂ©diatique, LĂ©vi-Strauss a dialoguĂ© durant toute sa carriĂšre avec un grand nombre d'anthropologues dont certains furent Ă  la fois ses ardents dĂ©fenseurs et ses plus constants contradicteurs : Marshall Sahlins, Rodney Needham[236], Edmund Leach[237] - [238], Dan Sperber, ainsi que certains de ses Ă©lĂšves formĂ©s dans l’anthropologie marxiste comme Françoise HĂ©ritier, Maurice Godelier. Dans les annĂ©es 1960 et 1970, ces dĂ©bats portent notamment sur les structures complexes et semi-complexes de la parentĂ©, sur lesquels LĂ©vi-Strauss avait ouvert la voie aprĂšs sa thĂšse sur les structures Ă©lĂ©mentaires, sans trouver cependant le temps de s’y plonger de façon prolongĂ©e; sur les systĂšmes dits « crow » et « omaha » (Françoise HĂ©ritier) ; sur l'historicitĂ©, le fait Ă©conomique et la pensĂ©e marxiste (Maurice Godelier, Marc AugĂ©)[239] ; sur le naturalisme, la notion d'Ă©mergence et les structures cognitives (Dan Sperber, Lucien Scubla)[240]. Le terrain ethnographique amĂ©ricain oĂč LĂ©vi-Strauss fit ses premiĂšres armes est revenu sur le devant de la scĂšne anthropologique dans les annĂ©es 1990, se prĂȘtant particuliĂšrement aux Ă©tudes structurales (Philippe Descola, Eduardo Viveiros de Castro)[241].

Dans l'ensemble, l'hĂ©ritage de LĂ©vi-Strauss dans sa propre discipline est souvent reconnu comme paradoxal, Ă  la fois trĂšs Ă©tendu mais souvent dĂ©formĂ© : « Nombre d’anthropologues qui ne se considĂšrent pas eux-mĂȘmes comme des structuralistes – y compris ceux qui condamnent et Ă©vitent tout isme – ont nĂ©anmoins Ă©tĂ© inspirĂ©s par l’une ou l’autre facette de l’Ɠuvre lĂ©vi-straussienne. Au risque de dĂ©former l’hĂ©ritage du maĂźtre, ils ont inflĂ©chi ses idĂ©es dans un sens que lui-mĂȘme n’aurait guĂšre souhaitĂ© »[242].

La filiation lévi-straussienne au XXIe siÚcle

Une représentation de Claude Lévi-Strauss (2009).

AmorcĂ© dans les deux derniĂšres dĂ©cennies du XXe siĂšcle, le reflux de la rĂ©fĂ©rence au terme de structure dans les sciences sociales se poursuit au XXIe siĂšcle et l'Ɠuvre de LĂ©vi-Strauss reste certes cĂ©lĂ©brĂ©e mais a perdu une grande partie de son influence des annĂ©es 1960 dans les sciences sociales, se retrouvant comme « embaumĂ©e » (selon l'expression de l'anthropologue G. Lenclud[243]). Cette perte d'influence est particuliĂšrement sensible aux États-Unis, aprĂšs plusieurs dĂ©cennies de post-modernisme et de French Theory[244]. L'anthropologue ocĂ©aniste Marshall Sahlins y est un des rares Ă  prolonger les thĂ©ories structurales de LĂ©vi-Strauss, qu'il connut lors d'un sĂ©jour prolongĂ© en France dans les annĂ©es 1960 ; reconnaissant en 2010 que « l’intĂ©rĂȘt que le monde acadĂ©mique porte Ă  LĂ©vi-Strauss aux États-Unis aujourd’hui est au plus bas », il explique cela par le peu d'intĂ©rĂȘt dans son pays pour les AmĂ©rindiens et pour les cultures indigĂšnes en gĂ©nĂ©ral, et plus largement par :

« le nĂ©o-libĂ©ralisme, avec son culte de l’individualisme et son hostilitĂ© sĂ©culaire envers tout ordre collectif en gĂ©nĂ©ral, gouvernemental en particulier ; le postmodernisme, avec ses antipathies pour les « rĂ©cits magistraux » et les « catĂ©gories essentialisĂ©es », ses penchants pour les « discours contestĂ©s », les « limites poreuses » et autres formes d’ambiguĂŻtĂ© ; et enfin les divers mouvements d’émancipation de groupes minoritaires pour lesquels les « structures » dominantes sont l’ennemi Ă  abattre. Nous vivons Ă  l’ñge anti-structurel[242]. »

L'anthropologie lévi-straussienne a eu en revanche d'importants continuateurs (et néanmoins critiques) chez les Britanniques (Rodney Needham et Edmund Leach en particulier[245]), ainsi qu'au Brésil en raison des liens particuliers de Lévi-Strauss avec ce pays depuis ses études de terrain dans les années 1930[246].

En anthropologie française, oĂč LĂ©vi-Strauss a formĂ© toute une gĂ©nĂ©ration de chercheurs Ă  travers le Laboratoire d'anthropologie sociale (LAS)[247] - qu'il avait fondĂ© en 1960, l'hĂ©ritage est « puissant mais conflictuel »[246], et relativement dispersĂ© dans une discipline particuliĂšrement segmentĂ©e en de trĂšs nombreux champs spĂ©cialisĂ©s. NĂ©anmoins le LAS prolonge les travaux de son fondateur sur les structures complexes de la parentĂ©, et son approche logico-mathĂ©matique des phĂ©nomĂšnes de parentĂ© par un vaste chantier de traitement informatique[248] - . Un certain nombre de travaux reprennent, discutent et actualisent la mĂ©thodologie structurale lĂ©vi-straussienne et son postulat de la combinatoire universelle d'un petit nombre de diffĂ©rences irrĂ©ductibles pour expliquer les faits de sociĂ©tĂ©: les quatre « sociĂšmes » fondamentaux (formes Ă©lĂ©mentaires universelles de lien social) chez Emmanuel DĂ©sveaux[249], le systĂšme des quatre ontologies chez Philippe Descola. En dehors de la rĂ©fĂ©rence explicite Ă  la structure, les historiens et ethnologues des sociĂ©tĂ©s rurales europĂ©ennes (ou extra-europĂ©ennes) continuent de faire fructifier la notion de maison (et le concept liĂ© de famille souche) introduite par LĂ©vi-Strauss dans les annĂ©es 1970[250].

En France, la rĂ©actualisation des mĂ©thodes lĂ©vi-straussiennes est surtout l’Ɠuvre, sous l'impulsion de Marcel HĂ©naff[251] et Claude Imbert depuis les annĂ©es 1990, de jeunes philosophes souvent d'orientation sociologique ou anthropologique (Jocelyn Benoist, Vincent Descombes, Patrice Maniglier, FrĂ©dĂ©ric Keck, Gildas Salmon[252]), privilĂ©giant un structuralisme dynamique portant davantage sur l'Ă©tude des mythes que sur le premier LĂ©vi-Strauss des Structures Ă©lĂ©mentaires de la parentĂ©[253]. La formalisation mathĂ©matique, aspect controversĂ© et relativement marginal de l'Ɠuvre de LĂ©vi-Strauss, connaĂźt Ă©galement une postĂ©ritĂ© notable avec l'intĂ©rĂȘt portĂ© par l'anthropologue Lucien Scubla[254] - [255] et par certains philosophes des mathĂ©matiques[256] - [257] Ă  la formule canonique du mythe[258].

Distinctions, décorations, récompenses

Le prince Bernhard de Lippe-Biesterfeld remet le prix Erasme Ă  Claude Levi Strauss (Amsterdam, 28 mai 1973).

Distinctions académiques

DĂ©corations

Prix et médailles

Docteur honoris causa

Promenade Claude LĂ©vi-Strauss au 13e arrondissement de Paris.

Lévi-Strauss a été fait docteur honoris causa des universités suivantes (par ordre alphabétique) : Bruxelles, Chicago, Columbia, Harvard, université Johns-Hopkins, Laval (Québec), université nationale autonome du Mexique, Montréal, Oxford, São Paulo (Brésil), Stirling, Uppsala, université Visva-Bharati (Inde), Yale, université nationale du Zaïre.

Hommage

ƒuvres (premiĂšres Ă©ditions)

Livres et principaux articles

Liste non exhaustive. La plupart des titres sont aujourd'hui disponibles en collection de poche.

  • Gracchus Babeuf et le Communisme, publiĂ© par la maison d'Ă©dition du Parti ouvrier belge L'Églantine, 1926
  • La Vie familiale et sociale des Indiens Nambikwara, Paris, SociĂ©tĂ© des amĂ©ricanistes, 1948
  • Les Structures Ă©lĂ©mentaires de la parentĂ©, Paris, La Haye, Mouton, (1re Ă©d. 1949 (Presses universitaires de France)) (ISBN 90-279-7293-1) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Introduction Ă  l’Ɠuvre de Marcel Mauss, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », (rĂ©impr. 2012), 56 p. (ISBN 978-2-13-060772-4) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Race et Histoire, Paris, UNESCO, 1952
  • Tristes Tropiques, Paris, Plon, coll. « Terre Humaine », (rĂ©impr. Pocket Paris 2005) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Anthropologie structurale, Paris, Plon, (rĂ©impr. 2012), 480 p. (ISBN 978-2-266-13931-1) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Le TotĂ©misme aujourd'hui, Paris, PUF, 1962
  • La PensĂ©e sauvage, Paris, Plon, (rĂ©impr. 2014), 347 p. Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Mythologiques, t. I : Le Cru et le Cuit, Paris, Plon, Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Mythologiques, t. II : Du miel aux cendres[262], Paris, Plon, 1967
  • Mythologiques, t. III : L'Origine des maniĂšres de table[263], Paris, Plon, 1968
  • Mythologiques, t. IV : L'Homme nu[264], Paris, Plon, 1971. Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Race et Culture (confĂ©rence Ă  l'UNESCO, 1971), Revue int. des sciences sociales (UNESCO), 1971
  • Unesco, et Claude LĂ©vi-Strauss. Le racisme devant la science. Unesco/Gallimard, 1973.
  • Anthropologie structurale deux, Paris, Plon, (rĂ©impr. 2009) (ISBN 978-2-266-14003-4) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • La Voie des masques, Pocket Agora no 25, (1re Ă©d. GenĂšve, Ă©d. Skira, 1975 ; nouv. Ă©d. augmentĂ©e et rallongĂ©e de Trois Excursions, Plon, 1979) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Myth and Meaning, Londres, Routledge & Kegan Paul, 1978
  • Le Regard EloignĂ©, Paris, Plon, , 398 p. (ISBN 2-259-01007-5) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Paroles donnĂ©es, Paris, Plon, Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • La PotiĂšre jalouse, Paris, Plon, 1985
  • Des symboles et leurs doubles Paris, Plon, 1989
  • Histoire de Lynx, Paris, Pocket, 1991 (ISBN 2-266-00694-0)
  • Regarder Ă©couter lire, Paris, Plon, 1993 (ISBN 2-259-02715-6)
  • (pt) Saudades do Brasil, Paris, Plon, 1994 (ISBN 2-259-18088-4)
  • Le PĂšre NoĂ«l suppliciĂ© (Les Temps modernes, mars 1952, p. 1572-90)), repris aux Ă©ditions des Sables, sur la route de l'Église Ă  Pin-Balma, 1996 (ISBN 2-907530-22-4)
  • ƒuvres, prĂ©face par Vincent Debaene, Ă©dition Ă©tablie par Vincent Debaene, FrĂ©dĂ©ric Keck, Marie MauzĂ©, et al., Paris, Gallimard, « BibliothĂšque de la PlĂ©iade », 2008 (ISBN 978-2-07-0118021) (ce volume rĂ©unit Tristes Tropiques, Le TotĂ©misme aujourd'hui, La PensĂ©e sauvage, La voie des masques, La PotiĂšre jalouse, Histoire de lynx, Regarder Ă©couter lire, avec une bibliographie des Ɠuvres de et sur Claude LĂ©vi-Strauss).
  • L'Anthropologie face aux problĂšmes du monde moderne, Paris, Le Seuil, 2011 (ISBN 978-2-02-103524-7)
  • L'autre face de la lune. Écrits sur le Japon, Paris, Le Seuil, 2011 (ISBN 978-2-02-103525-4)
  • Nous sommes tous des cannibales, Paris, Seuil, 2013

Entretiens

  • Entretiens avec Claude LĂ©vi-Strauss par Georges Charbonnier, Plon et Julliard, 1961
  • Claude LĂ©vi-Strauss et Didier Eribon, De prĂšs et de loin, Paris, Odile Jacob, , 254 p. (ISBN 978-2-7381-2140-0) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Loin du BrĂ©sil : entretien avec VĂ©ronique Mortaigne, Paris, Chandeigne, 2005 (ISBN 2-915540-19-5)
  • La Notion de maison, entretien avec Claude LĂ©vi-Strauss par Pierre Lamaison, Terrain, 1987(9), p. 34-39 (http://www.terrain.revues.org/3184) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • LĂ©vi-Strauss. L'homme derriĂšre l'Ɠuvre, Émilie Joulia, entretiens avec des proches de Claude LĂ©vi-Strauss et discours Ă  l'AcadĂ©mie française, Paris, Jean-Claude LattĂšs, 2008
  • Dentro il pensiero selvaggio. L’antropologo e i filosofi. Conversazione : Claude LĂ©vi-Strauss & Marcel HĂ©naff, Milano, Medusa, 2013 (en italien, 96 p.)

Préfaces

Notes et références

  1. Prononciation en français de France retranscrite selon la norme API.
  2. « DécÚs de M. Claude Lévi-Strauss », sur academie-francaise.fr, .
  3. « 1955 : Claude Levi-Strauss, "Tristes tropiques" », sur radiofrance.fr, .
  4. Acte de naissance no 2985 du 1er dĂ©cembre 1908, consultable sur le site des archives de l'État en Belgique.
  5. Insee, « Acte de décÚs de Gustave Claude Levi-Strauss », sur MatchID
  6. Emma Lévy : acte de naissance no 16 du de la ville de Verdun, consultable sur le site des archives départementales de la Meuse.
  7. Bertholet 2008.
  8. loyer 2015.
  9. loyer 2015, p. 27.
  10. Claude LĂ©vi-Strauss vouera une passion au Japon, qu'il dĂ©couvrira de 1977 jusqu’en 1988. Cf. Claude LĂ©vi-Strauss, L'Autre Face de la Lune. Écrits sur le Japon, Ă©d. Seuil, 2011.
  11. Pierre Albertini, « Les juifs du lycée Condorcet dans la tourmente », VingtiÚme SiÚcle : Revue d'histoire, n°92, 2006/4, p. 81-100.
  12. (fr) Un livre sur le lycée Hoche, , Le Parisien.
  13. Bertholet 2008, p. 26-41.
  14. Claude Lévi-Strauss, « Autoportrait, propos recueillis par Catherine Clément et Dominique A. Grisoni », Magazine littéraire, no 223, octobre 1985, note 8, p. 21.
  15. « Les agrégés de l'enseignement secondaire. Répertoire 1809-1960 | Ressources numériques en histoire de l'éducation », sur rhe.ish-lyon.cnrs.fr (consulté le ).
  16. Bertholet 2008, p. 62 « Sa vie militante a duré plus de huit ans. Il y a cru, il a pensé faire carriÚre ».
  17. « Claude LĂ©vi-Strauss, un anarchiste de droite », L'Express,‎ (lire en ligne, consultĂ© le ).
  18. Bertholet 2008, p. 69.
  19. « Catherine ClĂ©ment raconte le grand ethnologue qui fĂȘte ses 99 ans », interview, Le Journal du Dimanche, .
  20. Eugénie Bastié, « Breton / Saint-Exupéry, le manifeste et le sacrifice », Le Figaro Magazine, semaine du 21 juillet 2017, pages 22-25.
  21. Cf. Emmanuelle Loyer, Paris à New York. Intellectuels et artistes français en exil (1940-1947), Grasset, 2005.
  22. Bertholet 2008, p. 139 « DÚs le premier jour, l'administration lui a signifié qu'il ne s'appellerait désormais plus Claude Lévi-Strauss, mais Claude L. Strauss, parce que son nom complet paraßtrait bizarre aux étudiants. Lévi-Strauss, dans ce pays de cow-boys, est une marque de jeans ».
  23. GĂ©rard Lenclud, Claude LĂ©vi-Strauss aujourd'hui[PDF], p. 14, Études du CEFRES no 12, HAL, (10/11/2008).
  24. Bertholet 2008, p. 139-140.
  25. Bertholet 2008, p. 160-161.
  26. Fille d'un ingĂ©nieur belge, Jules Roman et d'une mĂšre, amĂ©ricaine, d’origine juive sĂ©farade, Ruth Emma Rie, qui vivent dans l'Allemagne nazie pendant la Seconde Guerre mondiale, Monique Roman s'installe en France Ă  la LibĂ©ration et rencontre Jacques Lacan. Ce dernier lui confie la traduction de ses travaux et la recommande Ă  Claude LĂ©vi-Strauss qui recherche une traductrice. Monique LĂ©vi-Strauss devient chercheur en histoire des textiles, publiant notamment Cachemire. L'art et l'histoire des chĂąles en France au XIXe siĂšcle et Cachemires. La crĂ©ation française. 1800-1880. Source : Monique LĂ©vi-Strauss, Une enfance dans la gueule du loup, Seuil, , 240 p. et cf. Ă©mission du 5/1/2015 Hors-Champs sur France Culture http://www.franceculture.fr/emission-hors-champs-monique-levi-strauss-2015-01-05.
  27. Vincent Debaene et Jean-Louis Jeannelle, « OĂč est la littĂ©rature ? », in Michel Murat (dir.), L'idĂ©e de littĂ©rature dans les annĂ©es 1950, colloque Fabula, Paris IV, 2004. L'historien GĂ©rard Noiriel Ă©crit que Tristes Tropiques « aura un Ă©norme impact sur le public cultivĂ© » dans Les Fils maudits de la RĂ©publique, Fayard, 2005, p. 228.
  28. Bertholet 2008, p. 242.
  29. Bertholet 2008, p. 255.
  30. Bertholet 2008, p. 256.
  31. Bertholet 2008, p. 299.
  32. VIDÉO. Google cĂ©lĂšbre Claude LĂ©vi-Strauss !, Le Point, le .
  33. royaumont-archives-et-bibliotheque[PDF].
  34. Bertholet 2008, p. 344-348.
  35. Bertholet 2008, p. 380.
  36. « Claude Lévi-Strauss était "un passeur exceptionnel" », LeMonde.Fr, .
  37. Bertholet 2008, p. 427.
  38. Cité par Bertholet 2008, p. 432.
  39. Bertholet 2008, p. 436.
  40. France 2, émission spéciale pour la centiÚme de Campus, jeudi , rédacteur en chef : Laurent Lemire (propos reproduits sur le site de Canal Académie).
  41. Entretien avec Vincent Debaene et Frédéric Keck sur Nonfiction, .
  42. Emmanuel DĂ©sveaux, « Claude LĂ©vi-Strauss, ƒuvres », L’Homme, 190 | 2009. [lire en ligne].
  43. (en) « Claude Lévi-Strauss obituary », The Guardian, .
  44. Daniel Garcia, « L'AcadĂ©mie française, une zone de non-droit en plein Paris », Revue du crieur, no 3,‎ , p. 83.
  45. Bernard Le Bouyer de Fontenelle a ratĂ© ce titre pour 33 jours, Louis Leprince-Ringuet de quatre mois.
  46. « Nicolas Sarkozy rend visite Ă  Claude LĂ©vi-Strauss pour son 100e anniversaire », sur Le Nouvel Observateur, (consultĂ© le ) : « Nicolas Sarkozy a rendu visite vendredi soir Ă  l'anthropologue Claude LĂ©vi-Strauss "pour lui rendre un hommage chaleureux et lui dire la reconnaissance de toute la Nation le jour de ses 100 ans", a annoncĂ© l'ÉlysĂ©e dans un communiquĂ©. ».
  47. VĂ©ronique Mortaigne, « Folle journĂ©e pour LĂ©vi-Strauss », sur Le Monde, (consultĂ© le ) : « La ministre annonce encore la crĂ©ation d'un prix Claude LĂ©vi-Strauss, dotĂ© de 100 000 euros, qui distinguera chaque annĂ©e un chercheur en sciences humaines et sociales travaillant en France ».
  48. Communiqué de presse du MinistÚre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, .
  49. (en) « Claude Lévi-Strauss Dies at 100 », The New York Times, .
  50. « Claude LÉVI-STRAUSS dans la biographie des immortels de l'AcadĂ©mie française ».
  51. Article du sur le site du magazine Le Point.
  52. Roger-Pol Droit, « L'ethnologue Claude Lévi-Strauss est mort », Le Monde, .
  53. Robert Maggiori, « L’empreinte LĂ©vi-Strauss », LibĂ©ration, .
  54. « Depuis les annĂ©es quarante, une Ɠuvre imposante n'a cessĂ© de dominer les sciences humaines, de leur fournir des modĂšles, d'en enrichir le foisonnement. Anthropologue et thĂ©oricien, Claude LĂ©vi-Strauss a repensĂ© les grandes questions de l'ethnologie la plus ambitieuse, celle de la tradition anglo-saxonne [
] Il est un auteur pour autrui, Ă  savoir un point de repĂšre qu'aucun chercheur ne peut s'abstenir de lire faute de manquer un terminus post quem de la rĂ©flexion anthropologique » Giulia Sissa, EncyclopĂŠdia Universalis, 1990, p. 542.
  55. LĂ©vi-Strauss, Eribon 1988, p. 27.
  56. HĂ©naff 1991, p. 37.
  57. LĂ©vi-Strauss, Eribon 1988.
  58. Bertholet 2008, p. 24.
  59. Keck 2005, La rivalitĂ© avec la psychanalyse freudienne, p. 49 Ă  61 : LĂ©vi-Strauss a relativisĂ© Ă  la fin de sa carriĂšre l'influence de la psychanalyse freudienne du marxisme dans son Ɠuvre.
  60. Dosse 1991, p. 50 Lévi-Strauss, « Dumézil et les sciences humaines », France Culture 2 oct.1978.
  61. LĂ©vi-Strauss 1950.
  62. LĂ©vi-Strauss 1973, p. 45.
  63. Lamy 2008, p. 13.
  64. LĂ©vi-Strauss 1955, p. 53.
  65. LĂ©vi-Strauss 1955, p. 62.
  66. HĂ©naff 1991, p. 11.
  67. L'Homme Nu, Plon, Paris, 1971, p. 570.
  68. LĂ©vi-Strauss, Eribon 1988, p. 59.
  69. Bertholet 2008, p. 152.
  70. HĂ©naff 1991, p. 25.
  71. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 45.
  72. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 46.
  73. NikolaĂŻ TroubetskoĂŻ, « La phonologie actuelle », Psychologie du langage, Paris,‎ .
  74. LĂ©vi-Strauss, Eribon 1988, p. 156.
  75. HĂ©naff 1991, p. 30 et 31.
  76. LĂ©vi-Strauss, Eribon 1988, p. 159-160.
  77. Petitot 1999, p. 2, §1 La référence naturaliste.
  78. Izard 2014, p. 63, article de LĂ©vi-Strauss Les MathĂ©matiques de l’Homme (1955).
  79. Izard 2014, p. 53.
  80. Durand 2013, p. 34.
  81. Izard 2014, p. 57.
  82. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 336 « Les recherches structurales sont apparues dans les sciences sociales comme une consĂ©quence indirecte de certains dĂ©veloppements des mathĂ©matiques modernes [
] dans divers domaines : logique mathĂ©matique, thĂ©orie des ensembles, thĂ©orie des groupes et topologie [
], Cybernetics de Norbert Wiener ».
  83. LĂ©vi-Strauss 1983, p. 11.
  84. Godelier 2013, p. 10.
  85. Chiss JL, Izard M, Puech C, « Structuralisme », EncyclopÊdia Universalis.
  86. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 46.
  87. HĂ©naff 1991, p. 19-35.
  88. LĂ©vi-Strauss 1955, p. 205.
  89. HĂ©naff 1991, p. 29.
  90. Lévi-Strauss 1958, p. 331 à 344, partie I Définition et problÚmes de méthode.
  91. LĂ©vi-Strauss 1973, p. 89:chap. VI, Sens et usage de la notion de modĂšle.
  92. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 347.
  93. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 154, chap. VIII reprenant l'article original de 1956.
  94. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 344, partie II Morphologie sociale ou structure de groupe.
  95. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 62.
  96. HĂ©naff 1991, p. 418.
  97. Lévi-Strauss 1949, p. X, préface à la premiÚre édition.
  98. Lamy 2008, p. 29.
  99. Izard 2014, p. 271 « Le contraste tranchĂ© entre la Nature et la Culture affirmĂ© au dĂ©but des Structures Ă©lementaires n'Ă©tait donc qu'une fiction philosophique, une maniĂšre d'expĂ©rience de pensĂ©e sans implication ontologique, mais qui fut prise au pied de la lettre par bien des critiques, mĂȘme parmi les plus perspicaces ».
  100. LĂ©vi-Strauss 1949, p. 520.
  101. LĂ©vi-Strauss 1949, p. XVII.
  102. Bertholet 2008, p. 185, 188 ; p. 189 « LĂ©vi-Strauss rĂ©pĂštera sans jamais se laisser, mais sans ĂȘtre toujours entendu, que son ambition premiĂšre est de comprendre l'esprit humain » ; p. 191 « Histoire, psychanalyse, psychologie, sociologie : en trois ans, LĂ©vi-Strauss a posĂ© les bornes qui dĂ©limitent le territoire de l'anthropologue ».
  103. chaire d'enseignement créée en 1888, occupée par Mauss entre 1901 et 1940, et dont Lévi-Strauss fera changer le nom en 1954 en « direction d'étude pour les religions comparées des peuples sans écriture ».
  104. LĂ©vi-Strauss, Eribon 1988, p. 104 « J'ai Ă©tĂ© Ă©lu Ă  la cinquiĂšme section de l’École des Hautes Études. Cette section se consacre aux sciences religieuses. Or, jusque-lĂ , je m'Ă©tais surtout occupĂ© de rĂšgles du mariage et de systĂšmes de parentĂ©. Du jour au lendemain, j'ai dĂ» changer d'objectif. [
] j'y entame une deuxiĂšme Ă©tape, de loin la plus longue, de ma carriĂšre, consacrĂ©e Ă  l'Ă©tude des reprĂ©sentations religieuses. Un prĂ©lude aux Mythologiques en quelque sorte ».
  105. Par exemple dans l'ouvrage de Jung Essais sur la symbolique de l'esprit, Paris, Albin Michel, 1991.
  106. Lionel Obadia, « La part anthropologique du symbolisme religieux », Archives de sciences sociales des religions no 148, octobre-décembre 2009, http://assr.revues.org/21473 (consulté le ).
  107. Camille Tarot, De Durkheim Ă  Mauss, l'invention du symbolique : sociologie et sciences des religions, Paris, La DĂ©couverte, mars 1999, p. 621.
  108. HĂ©naff 1991, p. 395 Parcours de l'Ɠuvre.
  109. LĂ©vi-Strauss 1950, p. 11.
  110. LĂ©vi-Strauss 1950, p. 19.
  111. Hénaff 1991, p. 222 et 223 La pensée symbolique.
  112. LĂ©vi-Strauss 1950, p. 48 « toujours et partout, ces types de notion interviennent, un peu comme des symboles algĂ©briques, pour reprĂ©senter une valeur indĂ©terminĂ©e de signification, en elle-mĂȘme vide de sens et donc susceptible de recevoir n'importe quel sens ».
  113. repris en 1958 dans Anthropologie structurale, aux chap. IX et X.
  114. LĂ©vi-Strauss 1962, p. 30.
  115. LĂ©vi-Strauss 1962, p. 13.
  116. LĂ©vi-Strauss 1962, p. 26.
  117. LĂ©vi-Strauss 1962, p. 262-263.
  118. LĂ©vi-Strauss 1962, p. 26 Ă  28.
  119. HĂ©naff 1991, p. 229.
  120. LĂ©vi-Strauss 1962, p. 141 Ă  143.
  121. LĂ©vi-Strauss 1962, p. 294.
  122. Bertholet 2008, p. 88 ; 95.
  123. Lévi-Strauss 1983, p. 345, chap. XX « New-York post- et préfiguratif ».
  124. repris dans Anthropologie structurale (1958) au chapitre XIII.
  125. Keck 2005, p. 179 « L'art est donc la solution d'une contradiction qui traverse la sociĂ©tĂ© entre ce qu'elle voudrait ĂȘtre et ce qu'elle est, qui divise Ă©galement l'individu entre son rĂŽle social et sa personnalitĂ©, et qui trouve sa forme d'expression la plus achevĂ©e, quoique toujours instable, dans le dĂ©doublement de la reprĂ©sentation ».
  126. HĂ©naff 1991, p. 443-447.
  127. Keck 2005, p. 183.
  128. repris dans Anthropologie structurale (1958) au chapitre XIV.
  129. LĂ©vi-Strauss 1975, p. 15.
  130. Keck 2005, p. 186.
  131. Le Cru et le Cuit, Plon, 1964, p. 40.
  132. La tétralogie des Mythologiques est structurée comme un opéra de Wagner, en quatre actes, avec une « ouverture » et, dans le QuatriÚme volume L'Homme nu, un « finale ».
  133. Le Magazine littéraire no 311, juin 1993, p. 41-45, reprenant le dernier chapitre de Myth and meaning publié en anglais en 1979.
  134. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 236.
  135. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 240.
  136. LĂ©vi-Strauss 1973, p. 169.
  137. LĂ©vi-Strauss 1973, p. 162.
  138. LĂ©vi-Strauss 1973, p. 154.
  139. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 239.
  140. LĂ©vi-Strauss 1973, p. 164.
  141. Silva, A. J. M, Un ingrĂ©dient du discours, Discours et pratiques alimentaires en MĂ©diterranĂ©e (vol. 1), Édilivre-Aparis, Saint Denis, 2013 (ISBN 978-2-332-55208-2), p. 157-178.
  142. LĂ©vi-Strauss 1964, p. 152.
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  144. LĂ©vi-Strauss 1964, p. 197.
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  168. Domenico Silvestri, « Linguistique implicite et linguistique explicite chez Claude LĂ©vi-Strauss », DiogĂšne, Presses Universitaires de France, vol. no 238, no 2,‎ , p. 68-77 (DOI 10.3917/dio.238.0068) Inscription nĂ©cessaire.
  169. B.Saint-Sernin, La raison au XXe siĂšcle, Ă©d. du Seuil, Paris, mars 1995, p. 162.
  170. T.Pavel, Le Mirage Linguistique, Éditions de Minuit, Paris, 1988, p. 12 et 13.
  171. Bertholet 2008, p. 152-153 « LĂ©vi-Strauss est ethnologue et ignore tout de la linguistique. Son coup de foudre ne le conduit pas Ă  imiter Jakobson, [
] pas non plus Ă  emprunter ses concepts et ses mĂ©thodes Ă  la linguistique, et Ă  la transposer tels quels en ethnologie. [
] La clĂ© structuraliste [
] reprĂ©sente pour LĂ©vi-Strauss non une fin, mais un commencement ».
  172. loyer 2015, p. 264 « Le structuralisme [
] est confrontĂ© Ă  l'expĂ©rience de l'exil dans toute sa pluralitĂ©. Il ne saurait ĂȘtre rĂ©duit Ă  l'explication habituelle : LĂ©vi-Strauss invente le structuralisme Ă  New-York parce qu'il y rencontre le linguiste Roman Jakobson » ; p. 292 « Prompt Ă  dĂ©contextualiser l'histoire du structuralisme et fidĂšle Ă  son coup de foudre personnel, Claude LĂ©vi-Strauss a toujours projetĂ© la lumiĂšre sur la magie de l'amitiĂ© avec Jakobson, au dĂ©triment de la singularitĂ© et des propriĂ©tĂ©s du lieu qui accueillit cette rencontre intellectuelle ».
  173. HĂ©naff 1991, p. 16 Ă  18 « Que le recours Ă  la linguistique ait rendu possible cette avancĂ©e, c'est tout ce qui importe. LĂ©vi-Strauss a bien senti lui-mĂȘme les limites de ce recours ».
  174. LĂ©vi-Strauss 1983, p. 191.
  175. LĂ©vi-Stauss, Eribon 1988, p. 158.
  176. keck 2005, p. 78.
  177. HĂ©naff 1991, p. 276 DeuxiĂšme Ă©poque : Le modĂšle musical.
  178. HĂ©naff 2008, p. 191.
  179. Dosse 1992, p. 306, 462, 463 Ă  471.
  180. LĂ©vi-Stauss, Eribon 1988, p. 149.
  181. Petitot 1999.
  182. Scubla 1998.
  183. Muriel Van Vliet, La forme selon Ernst Cassirer, de la morphologie au structuralisme, Presses Universitaires de Rennes, 2013, p. 290 « Tous deux partagent, malgrĂ© la diversitĂ© de leurs intentions respectives, un point de dĂ©part commun trĂšs fort : [
] la fonction symbolique constitue le noyau mouvant de leurs systĂšmes ouverts » ; p. 292 « Il est fort probable que la lecture de Goethe et de Humboldt par LĂ©vi-Strauss se soit faite par l'intermĂ©diaire de Cassirer qui en est le mĂ©diateur principal pour toute une gĂ©nĂ©ration ».
  184. E.Cassirer (posthume), « Structuralism in modern linguistics », Word, Journal of the Linguistic Circle of New-York, vol. 1, no 11, aoĂ»t 1946 ; LĂ©vi-Strauss avait publiĂ© un an auparavant dans la mĂȘme revue (vol. 1, no 2, aoĂ»t 1945) un article-programme qui sera repris dans Anthropologie Structurale au chap. II : « L'analyse structurale en linguistique et en anthropologie ».
  185. HĂ©naff 2008, p. 11 : Entretien avec Ph. Descola, Sur LĂ©vi-Strauss, le structuralisme et l'anthropologie de la nature.
  186. Bertholet 2008, p. 182.
  187. Bertholet 2008, p. 183-184.
  188. Bertholet 2008, p. 185-191 « Dans la jungle des sciences de l’homme », p. 224-230 « Des combats », p. 235-238 « Face Ă  l’histoire ».
  189. HĂ©naff 1991, p. 335, chap. IX Le temps des sociĂ©tĂ©s et la question de l’histoire.
  190. LĂ©vi-Stauss 1950.
  191. LĂ©vi-Stauss, Eribon 1988, p. 103.
  192. Lévi-Strauss 1958, p. 98 chap. V ; p. 379 au chap. XVI « M. Gurvitch, que j'avoue comprendre de moins en moins chaque fois qu'il m'arrive de le lire, s'en prend à mon analyse de la notion de structure sociale, mais ses arguments se réduisent le plus souvent à des points d'exclamation ajoutés à quelques paraphrases tendancieuses de mon texte ».
  193. Bertholet 2008, p. 228.
  194. Bertholet 2008, p. 205, 212, 218, 219, 224.
  195. Bertholet 2008, p. 228-230.
  196. loyer 2015, p. 466.
  197. Esprit, no 322, novembre 1963.
  198. Bertholet 2008, p. 277-283.
  199. loyer 2015, p. 467.
  200. LĂ©vi-Strauss 1958, p. 275 au chap. XII « on ne peut pas se contenter d'une analyse purement formelle [
]. La dialectique structurale ne contredit donc pas le dĂ©terminisme historique ».
  201. LĂ©vi-Strauss 1973, p. 157 Ă  159 : « Propp fait deux parts dans la littĂ©rature orale : une forme qui constitue l'aspect essentiel parce qu'elle se prĂȘte Ă  l'Ă©tude morphologique, et un contenu arbitraire auquel, pour cette raison, il n'accorde qu'une importance accessoire. [Cela] rĂ©sume toute la diffĂ©rence entre structuralisme et formalisme. [
] La position formaliste [
] est condamnĂ©e Ă  rester Ă  un tel niveau d'abstraction qu'elle ne signifie plus rien, et qu'elle n'a, pas davantage, de valeur heuristique. Le formalisme anĂ©antit son objet ».
  202. AJ.Greimas, « L'actualité du saussurisme », Le Français moderne, no 3, 1956.
  203. Dosse 1991, p. 62-64, 91-92, 95, 99, 107.
  204. Dosse 1991, p. 106 à 110 « Le tout-épistémologique ».
  205. Dosse 1991, p. 249 chap. 24 L'ùge d'or de la pensée formelle : le greimassisme, Barthes sémioticien, le tournant logicien de Lacan.
  206. Dosse 1991, p. 13.
  207. Pavel 1988, p. 12.
  208. Godelier 2013, p. 427.
  209. Dosse 1992, p. 225 Le Mirage de la formalisation.
  210. loyer 2015, p. 579 Ă  584 Les malentendus du succĂšs.
  211. Chiss, Izard et Puech 2015, p. chap. III, sous-chapitre Le temps des malentendus.
  212. Bertholet 2008, p. 315 Ă  325.
  213. Lévi-Strauss 1973, p. 324, chap. XV « structuralisme et critique littéraire ».
  214. Bertholet 2008, p. 316.
  215. loyer 2015, p. 582-583.
  216. HĂ©naff 1991, p. 10.
  217. loyer 2015, p. 583.
  218. Bertholet 2008, p. 333 et 343.
  219. loyer 2015, p. 617.
  220. Dosse 1992, p. 104 « l'ouvrage traduit bien la situation d'une sémiologie générale parvenue à un tournant, traversée par des tentatives diverses d'ouverture et de rupture ».
  221. Bernard Delfendahl, Le Clair et l'Obscur. Critique de l'anthropologie savante et défense de l'anthropologie amateur, Paris, Anthropos, 1973.
  222. Bernard Delfendahl, « Critique de l'anthropologie savante : Claude Lévi-Strauss, homéliste et scolastique », L'Homme et la société, année 1971, vol. 22, no 1, p. 211-235, http://www.persee.fr/doc/homso_0018-4306_1971_num_22_1_1466.
  223. Robert Jaulin, La Paix blanche, Introduction à l'ethnocide, Paris, Éditions du Seuil (Combats), 1970.
  224. Pierre Clastres, La SociĂ©tĂ© contre l'État. Recherches d’anthropologie politique, Minuit, 1974, rĂ©Ă©d. 2011.
  225. Raoul et Laura Makarius, Structuralisme ou Ethnologie. Pour une critique radicale de l'anthroÂŹpologie de LĂ©vi-Strauss. Paris, Éditions Anthropos, 1973, 360 p..
  226. HĂ©naff 2011, p. 14.
  227. Les articles Structuralisme et écologie, paru en anglais en 1972, et Structuralisme et critique littéraire (1965) sont parmi les rares titres de Lévi-Strauss comportant le mot structuralisme.
  228. Bertholet 2008, p. 383.
  229. « Pierre Billard fait le point avec Claude Lévi-Strauss », Le Point, no 582, . Cité par Bertholet 2008, p. 382.
  230. Auger,Colleyn 2012, p. 103.
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  233. Les Temps modernes, 1998, no 598, p. 78-84. Publié initialement dans La Reppublica, , sous le titre « Quell'intenson profumo di donna ».
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Bibliographie

Biographies

  • Denis Bertholet, Claude LĂ©vi-Strauss, Paris, Odile Jacob, coll. « poches », (1re Ă©d. Plon, 2003), 465 p. (ISBN 978-2-7381-2182-0) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Emmanuelle Loyer, LĂ©vi-Strauss, Paris, Flammarion, coll. « Grandes biographies », , 910 p. (ISBN 978-2-08-125752-8) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article

Hors-séries de revues

  • Critique, numĂ©ro spĂ©cial « Claude LĂ©vi-Strauss », no 620-621, 1999
  • Comprendre Claude LĂ©vi-Strauss, numĂ©ro spĂ©cial de la revue Sciences Humaines, novembre-dĂ©cembre 2008(PrĂ©sentation en ligne).
  • Marc Kirsch et Patricia Llegou(dir), « Claude LĂ©vi-Strauss. CentiĂšme anniversaire », La lettre du CollĂšge de France (hors sĂ©rie 2),‎ (lire en ligne) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Marcel HĂ©naff (dir), « Claude LĂ©vi-Strauss : langage, signes, symbolisme, nature », Philosophie, Éditions de Minuit, no 98,‎ Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • L'Homme, « Claude LĂ©vi-Strauss (1908-2009) », textes et photographies de Vincent Debaene, Françoise HĂ©ritier, Jean Jamin, Emmanuel Terray, no 193, 2010, p. 7-50

Ouvrages

Articles

  • Jean-Louis Chiss, Michel Izard et Christian Puech, « structuralisme », Encyclopaedia Universalis,‎ (lire en ligne, consultĂ© le ) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
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  • (en) Albert Doja, « Claude LĂ©vi-Strauss (1908-2009): The apotheosis of heroic anthropology », Anthropology Today, vol. 26 (5), p. 18-23, doi:10.1111/j.1467-8322.2010.00758.x (http://hal.ccsd.cnrs.fr/halshs-00523837)
  • (en) Jacques Grinevald, « Piaget on LĂ©vi-Strauss : an interview with Jean Piaget », New Ideas in Psychology, no 1, 1983, p. 73-79 et « LĂ©vi-Strauss’s reaction: on interview with LĂ©vi-Strauss », New Ideas in Psychology, no 1, 1983, p. 81-86
  • Jacques Grinevald, « Interviews avec Jean Piaget et Claude LĂ©vi-Strauss », Revue europĂ©enne des sciences sociales et Cahiers Vilfredo Pareto, t. XXII, no 67, GenĂšve, Droz, 1984, p. 165-178
  • Elie Haddad, « Qu'est-ce qu'une "maison" ? De LĂ©vi-Strauss aux recherches anthropologiques et historiques rĂ©centes », L'Homme, no 212,‎ , p. 109-138 Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • GĂ©rard Lenclud, « Claude LĂ©vi-Strauss aujourd’hui », Études du CEFRES, Centre Français de recherche en sciences sociales, vol. no 12,‎ (lire en ligne) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Anne MĂ©lice, « Un concept lĂ©vi-straussien dĂ©construit : le « bricolage » », Les Temps Modernes, no 656,‎ , p. 83-98 (lire en ligne, consultĂ© le )
  • Jean Petitot, « La gĂ©nĂ©alogie morphologique du structuralisme », Critique, Paris, vol. 55, nos 621-21,‎ , p. 97-122 (ISSN 0011-1600, lire en ligne) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Marshall Sahlins, « L’anthropologie de LĂ©vi-Strauss », ethnographiques.org, vol. no 20,‎ ((http://www.ethnographiques.org/2010/Sahlins) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article

Filmographie

  • Claude LĂ©vi-Strauss, entretien rĂ©alisĂ© dans la propriĂ©tĂ© bourguignonne de Claude LĂ©vi-Strauss par Jean JosĂ© Marchand et Pierre Beuchot, 1972 ; DVD produit par l'INA & Arte distribuĂ© par les Éditions Montparnasse
  • Entretien avec Claude LĂ©vi-Strauss, Michel Treguer, 32 min, CNRS Audiovisuel, 1976 — « Entretien avec Claude Levi-Strauss - TĂ«nk », sur www.tenk.fr (consultĂ© le ).
  • Claude LĂ©vi-Strauss, entretien avec Bernard Pivot, ; DVD Ă©ditĂ© par les Ă©ditions Gallimard et l'INA, 2004
  • À propos de « Tristes Tropiques », 52 min, film Super 16, 1991
  • Le siĂšcle de LĂ©vi-Strauss de Pierre Assouline, 52 min, INA, Arte, CinĂ©tĂ©vĂ©, 2016

Fonds d'Ă©tudes

Les archives de Claude LĂ©vi-Strauss ont Ă©tĂ© donnĂ©es au dĂ©partement des manuscrits de la BibliothĂšque nationale de France. La bibliothĂšque de travail a Ă©tĂ© rachetĂ©e par le Cercle Claude LĂ©vi-Strauss et lĂ©guĂ©e Ă  la MĂ©diathĂšque du musĂ©e du Quai Branly — Site amisquaibranly.fr, « BibliothĂšque Claude LĂ©vi-Strauss »[PDF].

Voir aussi

Articles connexes

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