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El cĂłndor pasa

El cĂłndor pasa est une Ɠuvre thĂ©Ăątrale musicale classĂ©e traditionnellement comme zarzuela, d'oĂč est extrait l'air de la cĂ©lĂšbre chanson du mĂȘme nom.

El cĂłndor pasa, zarzuela
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Le grand condor des Andes, animal-totem, symbole de libertĂ©, de transcendance et du retour de l'Inca suprĂȘme Ă  la jonction des Ăšres, dont la zarzuela tire son nom. La rĂ©surgence du thĂšme Ă©ponyme final de la zarzuela, dans les annĂ©es 1960 / 1970, marque l'avĂšnement d'un nouveau courant musical, la World Music, et reprĂ©sente un marqueur gĂ©nĂ©rationnel fort, ainsi que le symbole d'une identitĂ© andine et amĂ©rindienne renouvelĂ©e.
Nbre d'actes 1 acte en 2 tableaux
Musique Daniel AlomĂ­a Robles
Livret Julio Baudouin/de La Paz
Langue
originale
espagnol/quechua
Création
Teatro Mazzi
Lima Drapeau du PĂ©rou PĂ©rou

Personnages

  • Mr. King (Bariton), propriĂ©taire de la mine.
  • Mr. Cup, propriĂ©taire de la mine.
  • MarĂ­a (Soprano), Ă©pouse de Higinio.
  • Higinio, Ă©poux de MarĂ­a.
  • Frank (Tenor), fils de MarĂ­a.
  • Juanacha, fiancĂ©e de Ruperto.
  • Ruperto, fiancĂ© de Juanacha.
  • FĂ©lix, mineur.
  • Tiburcio, mineur.
  • Marraine.
  • Parrain.
  • Berger.

Airs

  • Final orchestral et choral El cĂłndor pasa et cri de joie des mineurs libĂ©rĂ©s : « nous sommes tous des condors ! »

La musique a Ă©tĂ© Ă©crite par le compositeur pĂ©ruvien Daniel AlomĂ­a Robles sur un livret original de Julio de La Paz (pseudonyme du dramaturge limĂ©nien[N 1] Julio Baudouin) en 1913. Cependant, la partition ne fut publiĂ©e comme composition originale et enregistrĂ©e par Robles qu'en 1933 aux États-Unis.

Le thĂšme Ă©ponyme El cĂłndor pasa, issu de la musique qui clĂŽt la zarzuela en 1913, a connu un rebond de renommĂ©e mondiale considĂ©rable Ă  partir de la fin des annĂ©es 1950 (groupe Achalay) / dĂ©but des annĂ©es 1960 (groupe Los Incas), mais sous une forme diffĂ©rente de l'original : non plus en version orchestrale classique, Ă©ventuellement avec chƓur, mais maintenant pour un ensemble rĂ©duit, en version toujours uniquement instrumentale mais avec des instruments autochtones des Andes (kenas, charango, harpe andine, tinya (es)). C'est sous cette forme nouvelle, avec l'adjonction de nouvelles parties chantĂ©es en 1970 (sur des paroles bien diffĂ©rentes de l'esprit et des thĂšmes de la version originale de la zarzuela), que cet air deviendra un standard de la musique folk dans le rĂ©pertoire du duo Simon and Garfunkel et fera le tour du monde, connaissant des versions et des adaptations quasiment innombrables.

Le succĂšs de cette mĂ©lodie a consacrĂ© le renouveau des musiques andines sur la scĂšne internationale, et ne sera pas pour rien dans l'essor d'un nouveau genre musical : la World music ou Musiques du monde, Ă  partir des annĂ©es 1970 et 1980. Ce nouveau genre est distinct de ce qu'on appelle la Musique folk, plus ancienne et plus centrĂ©e sur la recherche de racines culturelles plus localisĂ©es, quoique tout aussi susceptible qu'elles de pratiquer la fusion de genres musicaux. La world music devient, Ă  partir de ces dĂ©cennies (Ă  cĂŽtĂ© des principaux courants occidentaux contemporains que sont la musique classique, le jazz, la pop, le rock), un genre musical Ă  part entiĂšre, visitant le monde et revisitant les musiques traditionnelles, des Indes Ă  l'Afrique, des AmĂ©riques Ă  l’ ExtrĂȘme et au Moyen-Orient. Elle rĂ©sulte du mĂ©tissage culturel de patrimoines musicaux variĂ©s Ă©manant de cultures traditionnelles, et d'une insatiable curiositĂ© culturelle polycentrĂ©e qui se dĂ©veloppe dans l'ensemble du monde musical et du public Ă  partir de ces annĂ©es-lĂ . Non pas que l'intĂ©rĂȘt pour les musiques traditionnelles, l'ethnomusicologie, voire pour l'exotisme musical n'y prĂ©existe pas : le jazz, le flamenco ou le tango par exemple avaient dĂ©jĂ  connu dans la premiĂšre moitiĂ© du XXe siĂšcle une certaine extension internationale, tout en restant cantonnĂ©s dans leur propre ligne d'Ă©volution ; de mĂȘme l'histoire de la musique retient l'intĂ©rĂȘt attentif et assidu que les compositeurs classiques, comme Vivaldi ou BĂ©la BartĂłk entre de nombreux autres, avaient manifestĂ© pour les musiques traditionnelles. Mais cet intĂ©rĂȘt "centrifuge", couplĂ© avec une recherche de racines multiples et de sens, n'avait pas encore donnĂ© lieu Ă  un tel brassage, Ă  un mĂȘme courant musical fusionnel Ă  Ă©chelle mondiale, en lien avec le dĂ©veloppement des tĂ©lĂ©communications, comme celui qu'a inaugurĂ© El cĂłndor pasa pour la world music. Ainsi, — et ce thĂšme d'El cĂłndor pasa en tĂ©moigne Ă  l'Ă©vidence, ce qui caractĂ©rise son style — la world music, malgrĂ© son goĂ»t marquĂ© pour les instruments autochtones du monde (par exemple le ney et l'oud proche-orientaux, la kalimba et la kora ou le balafon africains, le sitar et le bansurĂź indiens, le shakuhachi et le koto extrĂȘme-orientaux, la kena, le siku et le charango andins, etc.), ne relĂšve pas du champ des musiques traditionnelles. Elle s'en inspire certes, mais pour crĂ©er une musique inĂ©dite qui s'apparente plutĂŽt Ă  la musique-fusion, mĂȘlant les apports des musiques traditionnelles Ă  ceux du jazz[N 2], de la musique classique, baroque et de la musique ancienne europĂ©ennes[N 3], du rock, de la pop-musique, du tango et du flamenco, etc.

El cĂłndor pasa, avec les instruments traditionnels andins (kena, charango) qui l'incarnent dĂ©sormais, deviendra mĂȘme le symbole d'un rĂ©veil de la conscience amĂ©rindienne des peuple andins, ou tout au moins d'un regain d'intĂ©rĂȘt pour leur passĂ© prĂ©colombien, ainsi que l’emblĂšme de la gĂ©nĂ©ration du Flower Power, du "retour Ă  la terre" ou d'un Ă©veil de la conscience Ă©cologique. Certes, cette quĂȘte d'exotisme ou cette volontĂ© de retour aux sources ne seraient pas exemptes d'ambiguĂŻtĂ©s pour certains historiens de l'art[1] - [2]. Toujours est-il que pour Kofi Annan, secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de l'ONU en visite dans les Andes et notamment Ă  La Paz en 2003, ce thĂšme est devenu un symbole de paix, de justice sociale et d'harmonie Ă©cologique, d'amitiĂ© entre les peuples[3]. On peut ajouter que de ce point de vue concernant les aspects de renouvellement, de consolidation et de diffusion des identitĂ©s autochtones, pour l'Occident comme pour la conscience autochtone, ce thĂšme d'El cĂłndor pasa a jouĂ© un peu le mĂȘme rĂŽle pour les peuples andins qu'un autre tube planĂ©taire de world music pour les Kabyles et l'ensemble des berbĂ©rophones d'Afrique du Nord : la chanson amazighe A Vava Inouva du chanteur kabyle Idir en 1976, soit au cours de la mĂȘme dĂ©cennie. Mais il est Ă  noter que celle-ci a connu beaucoup moins de reprises par le monde que notre thĂšme du condor.

Les raisons du succĂšs et de l’importance de ce thĂšme d'El cĂłndor pasa — comme initiation d’un courant musical et comme condensĂ© de rĂ©fĂ©rences culturelles et identitaires, lui confĂ©rant une vĂ©ritable dimension emblĂ©matique et patrimoniale[4] — sont probablement Ă  trouver du cĂŽtĂ© de sa mĂ©lodie qui puise certains de ses Ă©lĂ©ments dans les traditions musicales les plus anciennes, voire prĂ©colombiennes (voir ci-dessous « Une rencontre "coup de foudre" »), ainsi que dans la prĂ©gnance, toujours actuelle en partie, de la figure archĂ©typale du condor dans la cosmovision andine, elle aussi la plus ancestrale.

Symbolique et contexte

Un oiseau champion du monde et mythe vivant

Le grand Condor des Andes va « passer » au dessus de nous, nous permettant d'admirer son envergure de plus de 3 mĂštres (ici c'est un mĂąle adulte).

Le grand Condor des Andes, qui a inspirĂ© le titre, le final et l’air le plus cĂ©lĂšbre de la piĂšce originale est actuellement le plus grand oiseau terrestre volant du monde. Son envergure est de 3,20 m en moyenne, jusqu’à 3,50 m, n'Ă©tant dĂ©passĂ© que par les ailes de l'Albatros hurleur, grand oiseau marin avec une envergure pouvant aller jusqu'Ă  3,70 m ; mais celui-ci est un oiseau pĂ©lagique et non un oiseau terrestre comme le condor, qui d’ailleurs est lĂ©gĂšrement plus lourd que l’Albatros (jusqu’à 15 kg pour le condor, contre 12 kg maximum pour l’albatros) ; les oiseaux terrestres plus massifs que le condor comme ceux apparentĂ©s aux autruches ne sont Ă©videmment pas des oiseaux volants[5].

Statue située à Cotabambas (département d' Apurímac sud-Pérou) évoquant le combat rituel du condor contre le taureau, nommé Yawar Fiesta, qui avait lieu tous les ans, et qui se rejoue encore dans certains villages reculés.
Yawar fiesta, vue d'ensemble d'un retable Ă  Ayacucho (PĂ©rou).
Yawar fiesta, le mĂȘme retable Ă  Ayacucho (dĂ©tail).

Ce caractĂšre exceptionnel voire unique du condor, champion du monde des voiliers planeurs, explique la puissance et la majestĂ© de son vol, particuliĂšrement lorsqu’il croise en spirale ascendante Ă  la recherche de carcasses toujours plus loin. Ceci explique aussi qu’il a toujours Ă©tĂ© rĂ©vĂ©rĂ© par les peuples andins prĂ©colombiens ; notamment il Ă©tait le symbole de la puissance de l’Inca suprĂȘme et donc celui de son retour (voir ci-dessous). D’ailleurs, durant la pĂ©riode coloniale, et jusqu’à une Ă©poque rĂ©cente, le condor symbolise la revanche des Indiens sur le pouvoir espagnol : ainsi un rite explicite de ce point de vue, la YĂĄwar fiesta (es) (ou « fĂȘte du sang » dans la culture des Chancas), met en scĂšne le combat du condor, reprĂ©sentant des Indiens andins, contre un taureau qui symbolise quant Ă  lui l'espagnol et le conquistador[N 4]. Ce combat rituel est prĂ©sent surtout dans les rĂ©gions sud-pĂ©ruviennes d’ApurĂ­mac et d’ Ayacucho. (Voir la section Culture et croyance de l’article consacrĂ© au Condor des Andes). Sur ce sujet, JosĂ© MarĂ­a Arguedas a Ă©crit un saisissant roman Ă©ponyme : Yawar fiesta[6], qui raconte les prĂ©paratifs et suggĂšre le sens profond de cette fĂȘte populaire. La Yawar fiesta prend la forme cette fois d’une sorte de fĂȘte taurine « sauvage » (sans le condor, mĂȘme si la forme canonique avec le condor y est Ă©voquĂ©e) qui prĂ©sente de maniĂšre Ă©pique « l'affrontement symbolique entre les populations autochtones amĂ©rindiennes et le groupe des notables (colons et grands propriĂ©taires blancs, appelĂ©s les "mistis"), entre la sierra [=montagne] indienne et la cĂŽte crĂ©ole et "blanche", affrontement qui rejoue Ă  sa façon le grand traumatisme et le choc civilisationnel que fut la "conquista" [=conquĂȘte], par une poignĂ©e d'aventuriers espagnols, du grand Empire inca au XVIe siĂšcle »[6], sur le mode d’une revanche des Indiens mettant enfin Ă  bas la puissance du mythique taureau espagnol[7].

On trouve aussi le grand condor dessinĂ© dans le site des gĂ©oglyphes de Nazca, aux cĂŽtĂ©s du colibri qui est le plus petit oiseau du monde[N 5], l’un et l’autre symboles importants, aux deux bouts de la chaĂźne de la vie (pollinisation et recyclage), pour la civilisation des Nazcas, culture prĂ© incaĂŻque (entre -200 et 600 ap.J-C). Il est d’ailleurs aujourd’hui un symbole national pour la Bolivie, le PĂ©rou, l'Argentine, le Chili, la Colombie et l’Équateur (c’est-Ă -dire l’ensemble des pays de la CordillĂšre des Andes qui reprĂ©sente son aire de rĂ©partition), et joue un rĂŽle important dans le folklore et la mythologie des rĂ©gions andines.

  • Vues aĂ©riennes des gĂ©oglyphes de Nazca
  • Le colibri (50 m de long).
    Le colibri (50 m de long).
  • Le condor (134 m de long).
    Le condor (134 m de long).
  • colibri (autre point de vue).
    colibri (autre point de vue).

Enfin, la hauteur extraordinaire de son vol suivant les courants ascendants (5 000 m, et jusqu’à 6 000 m) confĂšre au grand condor la caractĂ©ristique de parfois disparaĂźtre Ă  l’Ɠil nu dans l’azur mĂȘme par temps parfaitement clair[5], ce qui faisait de lui pour les autochtones un intercesseur entre le ciel et la terre[8]. Pour complĂ©ter son rĂŽle de « messager de transcendance », selon les incas (hĂ©ritiers des autres civilisations andines prĂ© incaĂŻques), qui Ă©taient tout Ă  fait informĂ©s du rĂŽle crucial que le condor joue dans le recyclage de la matiĂšre vivante, il Ă©tait rĂ©putĂ© accompagner les Ăąmes des morts dans leur ultime voyage[9], ce qui explique qu’ils dĂ©posaient parfois les momies des dĂ©funts prestigieux dans les niches Ă  flanc de paroi servant d’aire de nidification au condor lorsque celles-ci Ă©taient abandonnĂ©es[10].

L’archĂ©type du condor dans la cosmogonie inca

Lama en "mosaïque" de pierres blanches insérées dans une paroi du site de Choquequirao.
Le "Temple du Condor" au Machu Picchu : les sculpteurs incas ont à peine retouché un rocher monolithique qui avait naturellement la forme d'un condor déployant ses ailes au moment de son envol. Celui-ci a un statut de huaca (objet ou élément naturel sacré).
Toujours le "Temple du Condor" au Machu Picchu (dĂ©tail). On voit la roche affleurante qui a Ă©tĂ© elle aussi sculptĂ©e (avec la tĂȘte et la collerette de l'animal Ă  l'avant-plan) pour amĂ©nager une sorte d'"autel du Condor".

Le condor Ă©tait donc un des animaux sacrĂ©s des Incas, et mĂȘme selon eux l’un des trois archĂ©types ou esprits-animaux totems avec le puma et le serpent[11]. Le lama aussi Ă©tait sacrĂ©, comme en tĂ©moignent les fresques en mosaĂŻques oĂč il apparaĂźt en grandeur nature dans les ruines de Choquequirao, la « citĂ©-sƓur du Machu Picchu »[12], mais pas avec le mĂȘme statut : sur le plan religieux le lama Ă©tait plutĂŽt utilisĂ© pour les sacrifices et la divination, notamment ses poumons[13], (en plus de son utilisation domestique comme animal de bĂąt, et pour sa laine).

En accord avec la cosmovision andine des civilisations prĂ© incaĂŻques[N 6], symbolisĂ©e par les trois « marches » de la croix carrĂ©e andine ou Chacana[14], la cosmogonie inca admettait trois niveaux de rĂ©alitĂ© ou pacha : en langue Quechua et aussi en Aymara, pacha signifie Ă  la fois temps et espace, et mĂȘme continuum spatio-temporel[15], soit la rĂ©alitĂ©-cadre de l’expĂ©rience du monde sensible, et dans son acception courante : le monde en gĂ©nĂ©ral, comme dans Pachamama (la Terre-MĂšre) ; ou, plutĂŽt qu'un monde unique, le Pacha, en tant que concept cosmologique, Ă©nonce la division mĂȘme du monde en trois niveaux qui s'interpĂ©nĂštrent relativement[16].

Chacun de ces trois mondes est symbolisé par un animal archétypal :

  • le monde d’en haut rĂ©parti entre Haqay Pacha[N 7] (l’Au-delĂ  ou monde de Viracocha, des dieux et des esprits) et Hanan Pacha (en Quechua) ou Alaxpacha (en Aymara[N 8]), le monde d’en haut visible : soit le ciel, siĂšge des astres et des constellations, demeure d’Inti le PĂšre-Soleil et de Mama Quilla, sa sƓur-Ă©pouse, dĂ©esse de la Lune. L’archĂ©type ou esprit-animal-totem sacrĂ© du monde d’en haut est justement le condor, qui faisait le lien entre le monde des vivants et le divin[8].
  • Le monde d’ici-bas, ou monde du milieu est le Kay (ou Kai) Pacha (en Quechua) ou Akapacha (en Aymara[N 8]), monde des vivants que se partagent Ă  Ă©galitĂ© les hommes, les animaux et les plantes, qui est souvent affectĂ© comme terrain de l’affrontement entre Hanan Pacha et Uku Pacha. L’archĂ©type ou esprit-animal-totem sacrĂ© du monde d’ici-bas est le puma, dont la forme stylisĂ©e donne d’ailleurs son plan Ă  l’antique capitale du Tawantinsuyu (l’Empire Inca des « quatre quartiers »), El Cuzco (voir la section : La fondation du Cuzco et l'origine des Incas de l'article l'Empire inca).
  • L’inframonde enfin est l’Uku Pacha, parfois Ă©crit : Uqhu Pacha, ou parfois nommĂ© autrement Urin Pacha, (les trois en Quechua), ou bien Manqhapacha ou Manqhipacha (en Aymara[N 8]). Celui-ci est associĂ© Ă  la mort, mais aussi Ă  la vie nouvelle Ă  naĂźtre[17] : en tant que royaume de la vie future, de ce qui n’est pas encore nĂ© et qui attend son heure dans le ventre de la terre, Uku Pacha est associĂ© Ă  la fructification, aux moissons, Ă  la Pachamama (la Terre-mĂšre Ă©quivalant Ă  une dĂ©esse de la fertilitĂ©)[18]. En tant que royaume des morts et monde souterrain, l’Uku Pacha est associĂ© aux esprits des morts, mais aussi Ă  Supay, le roi d’un groupe de dĂ©mons (nommĂ©s eux aussi les supay) qui peuvent tourmenter les vivants[18]. L’archĂ©type ou esprit-animal-totem sacrĂ© de l’inframonde est le serpent ailĂ© gĂ©ant nommĂ© Amaru, divinitĂ© aymara parfois aussi appelĂ©e Katari, totem chez les incas de la connaissance et de la sagesse. Celui-ci n'est Ă©videmment pas sans rappeler QuetzalcĂłatl, le "serpent Ă  plume" en nahuatl, qui est l'une des divinitĂ©s principales du panthĂ©on des civilisations prĂ©colombiennes de MĂ©soamĂ©rique.

Symbolique tirée de cette cosmovision andine

Cette division de l’univers entre trois niveaux de rĂ©alitĂ© rĂ©pondant chacun d’archĂ©types diffĂ©rents et complĂ©mentaires se rĂ©percute dans d’autres domaines que la cosmogonie et est susceptible d’interprĂ©tations qui lui confĂšrent une validitĂ© et un sens dans les champs psychologique, thĂ©rapeutique et social, dĂšs l’époque incaĂŻque et encore aujourd’hui dans la spiritualitĂ© New-Age, les techniques thĂ©rapeutiques paramĂ©dicales et le domaine du dĂ©veloppement personnel[14] - [8] - [11].

Cérémonie de bénédiction du Kallawaya (homme-médecine traditionnel) sur la Isla del Sol, autel de l'Úre Tiwanaku [complexe Inta Wata, Comunidad Yumani, Isla del Sol, Lac Titicaca, Province de Manco Kapac, Département de La Paz (Bolivie)], 19 août 2013.

On peut trouver un Ă©cho de cette cosmovision andine[N 9] dans l’exercice de la mĂ©decine ancestrale des Kallawaya, groupe ethnique Ă©tabli dans la rĂ©gion montagneuse de la Province de Bautista Saavedra au nord de La Paz (Bolivie) et spĂ©cialisĂ©s comme mĂ©decins traditionnels itinĂ©rants. À cette pratique « sont attachĂ©s divers rites et cĂ©rĂ©monies [chamaniques] constituant le fondement de l’économie locale. La cosmovision andine de la culture des Kallawaya recouvre un ensemble cohĂ©rent de mythes, de rituels, de valeurs et d’expressions artistiques (
) ainsi qu’une intelligence extraordinaire de la pharmacopĂ©e animale, minĂ©rale et botanique[19] ». Cette connaissance et les aspects culturels de cette cosmovision andine des Kallawaya ont d’ailleurs Ă©tĂ© inscrits en 2008 au patrimoine culturel immatĂ©riel de l’humanitĂ© de l'UNESCO[19]. Cette survivance encore assez dynamique de pratiques ancestrales aux racines Ă©minemment prĂ©colombiennes tĂ©moigne d’une vision du monde ayant su maintenir un contact Ă©troit, « intime », avec les forces de la nature.

Chacana ou croix carrĂ© andine, ici en provenance de la Province de Jujuy (extrĂȘme Noroeste [nord-ouest] des Andes argentines). Au centre on reconnaĂźtra une reprĂ©sentation d'Inti le dieu solaire, peut-ĂȘtre assimilĂ© Ă  Viracocha le dieu crĂ©ateur inca, ici avec une tĂȘte de puma ou de jaguar[20], entourĂ©e d'une couronne de rayons solaires. Celle-ci se rapproche aussi de la tĂȘte du personnage connu sous le nom de "señor de los bĂĄculos" [seigneur des bĂątons] qui est au centre du bas-relief supĂ©rieur de la Porte du Soleil de Tiwanaku[20]. Celui-ci a servi de modĂšle Ă  HergĂ© pour sa reprĂ©sentation du dieu Viracocha dans son album Le Temple du Soleil.

Mais ces diffĂ©rents niveaux de rĂ©alitĂ© n’étaient pas pour les andins seulement des « lieux » mythologiques (le Ciel, la Terre et Sous Terre), ils Ă©taient, ils sont aussi des « instances » Ă  la fois psychologiques, symboliques et mĂ©taphysiques. Ainsi, cette cosmovision andine a aussi reçu un accueil et des interprĂ©tations diverses en France et en Europe, autour des thĂ©matiques du dĂ©veloppement personnel et des nouvelles "pratiques thĂ©rapeutiques" inspirĂ©es des traditions revisitĂ©es, par exemple :

  • l’archĂ©type du Condor, sur la plus haute « marche » de la Chacana (croix andine), pour Nicolas Goronflot[14], du collectif « terra andina Ecuador », et pour Claire Jozan-Meisel[8] (« Luna Femina » et « NaĂźtre femme »), « reprĂ©sente notre capacitĂ© Ă  communiquer avec les cieux »[14] et avec la dimension spirituelle de l’univers : « situĂ© dans la tĂȘte, il symbolise le supra-conscient, (
), le pouvoir cosmique, l’univers astral, le pouvoir de l’esprit (
) de se retrouver seul face Ă  soi-mĂȘme pour trouver son "maĂźtre intĂ©rieur" »[8]. En lien avec la sagesse du grand Ăąge (d’ailleurs le condor a une longĂ©vitĂ© exceptionnelle dans le monde des oiseaux[N 10]), il est Yachay, l’esprit et la sagesse, « la comprĂ©hension au-delĂ  de l’intellect »[14].
  • L’archĂ©type du Puma, sur la deuxiĂšme « marche » de la Chacana, « reprĂ©sente notre capacitĂ© Ă  vaincre nos peurs »[14] : situĂ© dans le cƓur, en lien avec la Pachamama, il symbolise le monde du milieu, de l’incarnation, du conscient ; il est en nous le relai de la force de la nature : animal puissant, rapide et agile, il stimule notre force d’agir, de se prendre en charge, de faire face Ă  l’imprĂ©vu, notre force de persuasion ; « en rĂ©fĂ©rence Ă  l’ñge adulte, Ă  l’intelligence et Ă  l’agilitĂ© sur tous les plans »[8], il est Ă  la fois l’intellect et le courage. Il est aussi Munay, « Amour Inconditionnel »[14], force du dĂ©sir, Ă©lan vital.
  • L’archĂ©type du Serpent, sur la troisiĂšme « marche » de la Chacana, « reprĂ©sente notre capacitĂ© Ă  nous guĂ©rir »[14], soit notre capacitĂ© de rĂ©gĂ©nĂ©rescence. Ce raisonnement par analogie biomimĂ©tique, comme un anthropomorphisme "inversĂ©" ou une identification "rĂ©tro projective", est probablement construit en lien avec le phĂ©nomĂšne de la mue, et avec la transmutation possible de la puissance de son venin en vue d'une utilisation pharmaceutique (rappelons la prĂ©sence du serpent dans les symboles occidentaux issus de la mythologie grecque : le caducĂ©e, attribut d'HermĂšs, le bĂąton d'AsclĂ©pios et la coupe d'Hygie, emblĂšmes respectifs des mĂ©decins et des pharmaciens). SituĂ© Ă  la base de la colonne vertĂ©brale, le serpent archĂ©typal des Andes est la force lovĂ©e dans les soubassements qui remonte le long de la colonne « au fur et Ă  mesure de l’élĂ©vation spirituelle, activant les centres Ă©nergĂ©tiques du corps et de l’esprit, ouvrant de nouvelles dimensions et de nouveaux niveaux de conscience, de santĂ© et de crĂ©ativitĂ©. (
) ReliĂ© Ă  la forĂȘt amazonienne, il reprĂ©sente l’enfance, le dĂ©but de la vie car le serpent vient du monde souterrain oĂč commence la vie selon la tradition inca »[8]. Il symbolise « le premier niveau de conscience de l’ĂȘtre humain, le subconscient »[8], la force de l’inconscient dans la crĂ©ativitĂ© pour le renouveau. Il est Ă  la fois « intuition, sagesse Ă  l’écoute du monde intĂ©rieur »[8] et aussi Llankay « le travail pour la maĂźtrise du corps physique »[14].
La nature

Bien que ces trois diffĂ©rents mondes fussent distincts, voire sĂ©parĂ©s, il y avait un certain nombre de connexions, de possibilitĂ©s de passage ou de communication entre eux. Par exemple, pour les andins, les grottes, les gouffres et les sources peuvent crĂ©er un contact entre l’inframonde (Uqhu Pacha) et le monde du milieu (Kay pacha), notre monde des vivants[N 11]. Les arcs-en-ciel et les Ă©clairs servent de voie de communication entre le monde d’en haut (Hanan pacha) et Kay pacha[17] ; de mĂȘme bien sĂ»r que le condor, intercesseur comme on l’a dit entre le ciel et la terre pour les raisons Ă©voquĂ©es plus haut. De plus, l’esprit des morts peut habiter dans l’un des trois niveaux "au choix" : quelques-uns peuvent rester dans le Kay Pacha pour parachever leur Ɠuvre sur terre, tant qu’elle n’est pas terminĂ©e, quand d’autres peuvent circuler d’un niveau Ă  l’autre[21].

La musique
Joueur de harpe indienne ou arpa andina Ă  Ollantaytambo au PĂ©rou.

Enfin on peut remarquer que dans la cosmovision andine la musique peut aussi jouer un rĂŽle de reconnexion entre les mondes, de mise en cohĂ©rence vibratoire de l’univers Ă  tous ses niveaux, de communication avec le divin (Haqay et Hanan Pacha), avec la nature profonde (Kay Pacha) et avec l’esprit des morts (Urin Pacha) de par les dimensions mystique et cosmique (holistique), dans une perspective animiste[22], qui sont confĂ©rĂ©es aux instruments de musique, et notamment :

La harpe des Andes dans plusieurs passages du roman Diamants et silex[22] de José María Arguedas, mais bien sûr aussi la Kena, la flûte qui porte désormais le thÚme d'El cóndor pasa, instrument sacré pour les incas (voir ci-dessous).

Pour illustrer la dimension cosmique et mystique de la Kena dans la cosmovision andine, on pourra lire un extrait d’un autre roman d’Arguedas dĂ©jĂ  Ă©voquĂ© : Yawar fiesta, particuliĂšrement la fin du chapitre 2[23]. On pourra lire aussi le beau poĂšme en espagnol de Luz Ángeles, citĂ© par le kĂ©niste Edgar Espinoza sur son site, et intitulĂ© La mĂ­stica de la quena [La mystique de la kena][24]. De mĂȘme, la Kena est assimilĂ©e au souffle de vie primordial et au chant amoureux, vecteur de dĂ©sir et d’élan vital, comme le dit Nicole FourtanĂ© dans son article du numĂ©ro 19 de la revue AmĂ©rica (les Cahiers du CRICCAL), AnnĂ©e 1997, p. 206 :

« Soulignons au passage, [
] que la quena, toujours jouĂ©e [traditionnellement] par des hommes [ce n’est plus le cas aujourd’hui, voir l'article consacrĂ© Ă  la quena, NDLR], est perçue dans la culture andine comme un symbole de vie et qu’elle est le moyen privilĂ©giĂ© par lequel l’amoureux exprime son amour Ă  celle qu’il veut prendre pour femme[25]. »

Ainsi que le souligne Max Calloapaza Ortega[26], « dans l’univers quechua, la croyance en l’"Ăąme" ou l’"esprit" des instruments de musique est frĂ©quente » (et encore rĂ©pandue aujourd’hui). Et il cite en appui les conclusions d’Arturo JimĂ©nez Borja [traduit de l'espagnol]:

« Les instruments de musique dans le PĂ©rou antique, et avec eux toutes les choses qui entourent l’homme, Ă©taient ressentis comme quelque chose de vivant [et d’interactif, voire performatif, NdT]. Leur pouvoir [quasi magique, au sens anthropologique que lui donne LĂ©vi-Strauss, NdT] ne rĂ©sidait pas tant dans le genre de matĂ©riaux dont ils Ă©taient faits, ni dans leur forme ni leur couleur, mais bien plutĂŽt dans leur voix. L’instrument Ă©tait imprĂ©gnĂ© de quelque mystĂšre Ă  l’envoĂ»tement duquel ne rĂ©sistaient ni les hommes, ni les bĂȘtes[26]. »

Mais la Kena peut servir aussi de lien avec l’esprit des morts (dans le monde d’en bas Urin Pacha) comme le suggĂšre le mĂȘme kĂ©niste Edgar Espinoza : « Quena es la voz de espĂ­ritus ancestrales, que se mezcla al soplo de vida, pasiĂłn y ternura[24] » [La Kena est la voix d’esprits ancestraux, qui se mĂȘle au souffle de vie, passion et tendresse].

La légende du « Manchay Puitu »

Un autre tĂ©moignage du statut de vecteur de transcendance, quasi "spirite", confĂ©rĂ© Ă  la Kena est une lĂ©gende andine du XVIIIe siĂšcle, la lĂ©gende du Manchay Puitu (es) (en quechua « la Caverne tĂ©nĂ©breuse », « le Monde de l’obscur ») : un jeune indien de Chayanta (dĂ©partement de PotosĂ­, Bolivie), devenu prĂȘtre catholique, tombe amoureux fou dans l’exercice de son sacerdoce d’une jeune indienne, et il est aimĂ© d’elle. Mais ils sont sĂ©parĂ©s car il est envoyĂ© en mission Ă  Lima, et en son absence sa bien-aimĂ©e dĂ©sespĂ©rĂ©e est rejetĂ©e, harcelĂ©e et persĂ©cutĂ©e par les gens au point d’en mourir. À son retour tardif, fou de douleur et d’amour, le jeune prĂȘtre erre dans les rues, pleure infiniment sur sa tombe, puis creuse sa tombe pour la retrouver, pour s’allonger prĂšs d’elle et mourir, mais finalement il reprend la vieille tradition prĂ©colombienne qui consistait Ă  prĂ©lever sur le squelette le tibia (ou le fĂ©mur) d’un ancĂȘtre afin d’y tailler une Kena pour lui rendre hommage en lui donnant une deuxiĂšme vie musicale en quelque sorte[27]. Il cherche par ce biais Ă  communiquer avec elle par-delĂ  la mort, en chantant sa douleur et en lui faisant entendre la plainte de cette flĂ»te issue de son propre corps, jouĂ©e d’une maniĂšre originale Ă  l’intĂ©rieur d’une grande jarre contenant un peu d’eau, ce qui lui donne un son particuliĂšrement doux, dĂ©chirant et caverneux, rĂ©sonnant Ă©trangement, « avec des effets sonores trĂšs curieux, proches de ceux qui se produisent avec les tambours d’eau »[28], et rĂ©putĂ©e ainsi audible par les morts qu’on a aimĂ©s.

Tradiciones peruanas [traditions pĂ©ruviennes], Ă©dition de 1893, Ɠuvre de Ricardo Palma oĂč l'on trouve une version de la lĂ©gende du Manchay Puitu.

Ce jeu "aquatique" et funĂšbre de la Kena Ă  l’intĂ©rieur d’une jarre Ă©tait lĂ  encore une pratique traditionnelle d’origine prĂ©colombienne. Le jeune prĂȘtre finit par mourir de chagrin, et on brĂ»le tous ses effets personnels, objets de scandale. Mais certains de ses amis « avaient retenu par cƓur son poĂšme et sa musique qui par la suite se diffusĂšrent dans la Province de Charcas »[28], rĂ©gion potosina du sud de la Bolivie.

L’Église catholique a frappĂ© d’excommunication majeure[28] (on disait « fulminĂ© »), prononcĂ©e par l’ArchevĂȘque majeur de La Plata[N 12], cette tradition prĂ©colombienne comme pratique dĂ©moniaque, et elle a aujourd’hui officiellement disparu[29] ; quoique, selon Paco JimĂ©nez, ce « trĂ©sor de la culture » se soit maintenu jusqu’à nos jours de façon occulte[28]. Cette lĂ©gende a comme on l’a vu donnĂ© lieu Ă  un poĂšme en quechua reprenant la plainte et les angoisses du jeune homme, et Ă  plusieurs yaravĂ­es (chansons ou airs tristes, en quechua) jouĂ©s sur le manchay-puitu (car le mot sert aussi Ă  nommer l’instrument composĂ© de cette Kena en os et de cette jarre oĂč des trous ont Ă©tĂ© percĂ©s permettant d’y passer les mains pour jouer de la flĂ»te Ă  l’intĂ©rieur ; on appelle aussi manchay-puitu les morceaux Ă©lĂ©giaques qu’on y joue)[30].

Outre les rĂ©fĂ©rences dĂ©jĂ  citĂ©es, on trouvera une version de cette lĂ©gende rapportĂ©e par le grand Ă©crivain pĂ©ruvien Ricardo Palma, dans son Ɠuvre majeure : Tradiciones Peruanas [Traditions pĂ©ruviennes][31]. Dans l'article consacrĂ© Ă  cette Ɠuvre dans le WikipĂ©dia en espagnol : Tradiciones peruanas (es), on trouvera des liens permettant de lire en espagnol le texte intĂ©gral de cette version de la lĂ©gende[32]. Enfin, on lira avec profit l'article en français de Nicole FourtanĂ© sur « La lĂ©gende du "Manchay-Puito", creuset de traditions complexes », extrait du numĂ©ro 19 de la revue AmĂ©rica dĂ©jĂ  citĂ© : elle y propose une analyse historique et critique de l'influence de la lĂ©gende et de l'instrument du Manchay-Puito sur le jeu "endeuillĂ©" de la Kena, et de leurs rĂ©surgences dans la littĂ©rature et les contes populaires du XIXe siĂšcle et du XXe siĂšcle[25].

Le « Pachakuti »
PachacĂștec (Sapa Inca IX, Ă  droite) et TĂșpac Yupanqui (Sapa Inca X, Ă  gauche), celui de ses fils qui sera son successeur dĂ©signĂ© comme le plus capable de ceindre la Mascapaicha (es) rouge, ou couronne impĂ©riale du Tawantinsuyu (dessin de MartĂ­n de MurĂșa (es), XVIe siĂšcle, religieux mercenaire espagnol auteur d'une Histoire gĂ©nĂ©rale du PĂ©rou, chronique illustrĂ©e qui relate l'histoire des Incas puis de la conquĂȘte espagnole.

Mais les connexions les plus significatives entre les trois mondes se produisent lors d’un Pachakuti (ou « grand renversement » cataclysmique, voir ci-dessous). Ce sont les moments oĂč les diffĂ©rents niveaux de rĂ©alitĂ© entrent en collision l’un avec l’autre, entraĂźnant un bouleversement total de l’ordre de l’univers. Ceci se produit lors d’un tremblement de terre, ou de tout autre Ă©vĂ©nement cataclysmique[33].

Le Sapa Inca IX ou prince Cusi Yupanqui prit ce concept comme nouveau nom lors de son couronnement comme empereur, devenant Pachacuti Inca Yupanqui ou PachacĂștec (le « RĂ©formateur », ou mĂȘme « Celui qui bouleverse l'ordre du monde » selon l'ethno-historienne et archĂ©ologue MarĂ­a Rostworowski, spĂ©cialiste du PĂ©rou prĂ©colombien qui a Ă©crit un ouvrage de rĂ©fĂ©rence sur ce grand Inca[34]) : en effet, sa victoire inespĂ©rĂ©e sur les Chancas Ă  Yahuar Pampa ouvrait selon lui une nouvelle Ăšre historique ; son rĂšgne long, conquĂ©rant et prospĂšre l’a amplement prouvĂ© et a fait de cette victoire l’étincelle initiale et la concrĂ©tisation de la vocation impĂ©riale de l’état inca, qu’il a rĂ©organisĂ© administrativement et religieusement, et considĂ©rablement Ă©tendu avec les Incas suivants : son fils TĂșpac Yupanqui et son petit-fils Huayna CĂĄpac.

La mélodie principale simule le vol du condor

On le verra, certains rattachent ce thĂšme d'El cĂłndor pasa Ă  la tragĂ©die au XVIIIe siĂšcle de la grande rĂ©volte indienne de TĂșpak-Amaru II, alias JosĂ© Gabriel Condorcanqui : « nuestro querido Padre andino » (notre trĂšs cher PĂšre des Andes), dont le patronyme semble faire coĂŻncidence.

La phrase mĂ©lodique principale, majestueuse et nostalgique, qui se hisse par degrĂ©s jusqu’à la cime pour s’effondrer brutalement, visualise bien le vol puissant et lourd du grand CĂłndor qui surfe paisiblement sur les courants ascendants et s’élĂšve peu Ă  peu pour fondre en piquĂ© rapide sur sa proie (ou sur la dĂ©pouille qu’il a repĂ©rĂ©e). De mĂȘme, elle reprĂ©sente bien l’allĂ©gorie de la rĂ©volte indienne dont le feu couvait sous la cendre, puis qui vole de succĂšs en succĂšs, allant jusqu’à menacer de reprendre aux Espagnols le Cuzco (ou Qusqu : le "nombril", capitale historique du Tawantinsuyu, l’empire inca des « quatre quartiers »), avant d’ĂȘtre trahie et sauvagement rĂ©primĂ©e[35] - [36] - [37]


Mais, de mĂȘme que le grand CĂłndor passe et s’en va (sens littĂ©ral d'El cĂłndor pasa) pour toujours revenir sur son aire de naissance ―qui sera aussi la nichĂ©e pour son couple (permanent et fidĂšle jusqu’à la mort incluse, car les condors sont trĂšs fidĂšles et ne se "remarient" pas aprĂšs leur "veuvage") et pour son groupe (car le condor est sociable)[5]―, de mĂȘme l’Inca suprĂȘme, le Sapa Inca, est « passĂ© » mais il reviendra libĂ©rer son peuple (quechua) du joug de l’argent et de ses oppresseurs, et restaurer pour l’humanitĂ© entiĂšre une vision du monde plus Ă©quilibrĂ©e Ă©cologiquement et socialement[38].

InkarrĂ­ et les figures messianiques / sacrificielles

Ce mythe du retour de l’Inca[38] est encore prĂ©sent dans les Andes, et a nourri les rĂ©voltes des autochtones pendant les siĂšcles de domination coloniale, puis a servi les desseins des Libertadores (LibĂ©rateurs) pendant les guerres d’indĂ©pendance, comme aujourd’hui les revendications identitaires et communautaires amĂ©rindiennes. Comme le souligne Antoinette MoliniĂ©[39] :

« Les Indiens disent souvent qu’un jour InkarrĂ­[N 13], le roi Inca reviendra rĂ©tablir son royaume[N 14]. Il surgira probablement de l’obscuritĂ© mystĂ©rieuse de la forĂȘt tropicale dans laquelle plonge la cordillĂšre. Ce messianisme, qui prend certainement racine dans les prĂ©dications franciscaines de l’époque coloniale*, est toujours prĂ©sent dans la vie politique pĂ©ruvienne[39]. *[Mais aussi dans les mythes prĂ©colombiens des hĂ©ros civilisateurs, puis dans les rĂ©voltes indiennes du XVIIIe siĂšcle, celles entre autres de Juan Santos Atahualpa et de JosĂ© Gabriel Condorcanqui alias TĂșpac Amaru II. NDLR]. »

Portrait de TĂșpac Amaru II (vision d'artiste), « nuestro querido Padre andino » [notre trĂšs cher PĂšre des Andes], chef de la plus grande rĂ©volte amĂ©rindienne du XVIIIe siĂšcle.

En effet, on peut rappeler que les figures messianiques et sacrificielles, ayant prophĂ©tisĂ© leur retour, sont nombreuses dans la cosmologie, la mythologie et l’histoire andines[40] - [41]. Ce paradigme messianique a d'ailleurs prĂ©parĂ© l'avĂšnement de la figure christique dans les Andes[42], les conquistadores l'ayant principalement apportĂ©e avec eux dans leur bagage idĂ©ologique. Ces figures messianiques sont d'abord mythologiques : par exemple et par excellence Viracocha, modĂšle du dieu crĂ©ateur puis civilisateur, parti au loin vers l'ouest sur les flots aprĂšs avoir promis son retour ; retour dont les Indiens ont pour leur malheur crĂ©ditĂ© les premiers conquistadores Ă  partir d'une certaine ressemblance avec l'image mythique de Viracocha (voir Ă  ce sujet l'article consacrĂ© Ă  cette divinitĂ©). Ce modĂšle est rĂ©affirmĂ© dans la figure de Manco Capac (premier Inca mythique fondateur du Cuzco et des dynasties Incas), et repris par les Incas historiques au moment de leur exĂ©cution : d’abord Atahualpa, l’Inca XIII exĂ©cutĂ© ou plutĂŽt assassinĂ© par Francisco Pizzaro, dont la dĂ©pouille, « Ă  la fois momie et semence[43] - [44] », Ă©tait rĂ©putĂ©e se « rĂ©gĂ©nĂ©rer » spontanĂ©ment Ă  partir de sa tĂȘte, Ă  l'intĂ©rieur de la terre[45] - [46] comme une entitĂ© chtonienne dans sa tombe tenue secrĂšte, puis oubliĂ©e, jusqu'Ă  nos jours (2012) oĂč l'on fouille un nouveau site l'ayant peut-ĂȘtre abritĂ©e[47]. Cette foi dans la rĂ©gĂ©nĂ©rescence puis la rĂ©surrection d'Atahualpa donne corps si l'on peut dire au mythe composite d'InkarrĂ­ (ou Inkarrey) dĂ©jĂ  Ă©voquĂ© : ce nom est la contraction du mot quechua Inka (signifiant tout Ă  la fois : -principe gĂ©nĂ©rateur et vital[48], -hĂ©ros civilisateur, -nom de la classe dominante de l’empire et, sous le titre de Sapa Inca : -l’Inca SuprĂȘme ou souverain rĂ©gnant dans sa capitale) et du terme espagnol de Rey (roi).

Ce personnage recueille toutes les potentialités divines, héroïques, messianiques, et la souveraineté de droit divin qui sont au carrefour de son étymologie, et aussi de l'histoire, ainsi que l'exprime Nicole Fourtané :

« la figure d’InkarrĂ­ correspond Ă  cet archĂ©type forgĂ© par un peuple vaincu mais rĂ©sistant culturellement en rĂ©-Ă©laborant les formes d’expression empruntĂ©es aussi Ă  la culture dominante[42]. »

Cet archĂ©type ressortit donc aussi bien Ă  la cosmovision andine ancestrale du Pachakuti (le grand renversement, voir ci-dessous), qu'Ă  la vision du monde chrĂ©tienne avec ses notions de rĂ©surrection de la chair, de Corps Mystique du Christ dont celui-ci est la tĂȘte justement, et dont le retour au jugement dernier nourrit l’espĂ©rance eschatologique[42].

Enfin on peut remĂ©morer la prophĂ©tie de TĂșpac Amaru II, lequel se dĂ©signait lui-mĂȘme d'ailleurs « Inka Rey del PerĂș »[42], faisant ainsi explicitement rĂ©fĂ©rence au mythe d'InkarrĂ­ dans sa dimension messianique (voir Messianisme de TĂșpac Amaru II), et aurait proclamĂ© au moment de son exĂ©cution (Ă  moins que ce ne soit TĂșpac Katari): « Ils ne tueront que moi seul..., mais demain je reviendrai et je serai alors des millions »[49].

Le Pachakuti (encore) et l’espĂ©rance

De mĂȘme on peut donc Ă©voquer Ă  nouveau dans le mĂȘme ordre d’idĂ©e le mythe ancien, dans la cosmologie des Andes prĂ©colombiennes et prĂ©sent encore aujourd’hui, du Pachakuti (pacha kutiq) : ce mot d’origine aymara, qui existe aussi en quechua, formĂ© de pacha (terre, monde, espace-temps) et cuti (action de retourner, par exemple la terre avec la chakitaqlla, la bĂȘche andine)[50], dĂ©signe symboliquement le grand bouleversement ou retournement cyclique de la sociĂ©tĂ© et du monde, et plus prĂ©cisĂ©ment le moment cataclysmique et de chaos[51] qui, Ă  la jonction des Ăšres, sert de transition pour le passage d’un Ăąge Ă  l’autre, d’un ordre Ă  un nouvel ordre inversĂ©. Ce mythe du Pachakuti, qui a donnĂ© comme on l’a vu son surnom Ă  l’Inca IX Pachacutec (le « rĂ©formateur »), participe aujourd’hui d’une vision vigoureusement critique des dĂ©sĂ©quilibres tant Ă©conomiques qu’écologiques de notre monde actuel, comme de l’espĂ©rance d’un changement radical de l’ordre social[52], et d’un retour Ă  la prospĂ©ritĂ© des peuples autochtones des Andes, en "rĂ©paration" du grand traumatisme civilisationnel qu’a provoquĂ© la conquĂȘte espagnole[35].

C’est aussi de cette espĂ©rance que cet air d'El cĂłndor pasa est porteur ─ ce que montre bien l’allĂ©gresse de sa deuxiĂšme partie ─ et c’est ce qui en a fait un symbole ; de mĂȘme que la Kena et les autres instruments autochtones, culturellement Ă©mancipateurs et marqueurs d’identitĂ©, qui ont Ă©tĂ© brĂ»lĂ©s et interdits par les espagnols au nom de "l’extirpation des idolĂątries"[53] - [54] : « Les Constituciones sinodales[N 15] de l’archevĂȘchĂ© de Lima exigeaient la "suppression des danses, chants ou taquis[N 16] anciens, et que tous les instruments de musique fussent brĂ»lĂ©s"[55] », dĂšs le XVIe siĂšcle et jusqu’au XVIIIe siĂšcle. Puis les mĂȘmes instruments, les mĂȘmes musiques presque et les mĂȘmes pratiques ont Ă©tĂ© plus tard censurĂ©s pour les mĂȘmes raisons lors de la dictature du gĂ©nĂ©ral Pinochet[56].

Le parcours et les connaissances de Daniel AlomĂ­a Robles

Daniel Alomía Robles (1871-1942), compositeur et ethnomusicologue péruvien.

Daniel AlomĂ­a Robles, le compositeur de la musique originale de la zarzuela El cĂłndor pasa, n’était pas seulement compositeur, mĂ©decin (Ă©tudes inachevĂ©es), mais aussi connaisseur en zoologie et botanique. Et surtout il Ă©tait un ethnomusicologue Ă©rudit et aussi collecteur infatigable sur le terrain de thĂšmes ancestraux
 et de plantes ! Comme le grand Ă©crivain pĂ©ruvien nĂ©o-indigĂ©niste JosĂ© MarĂ­a Arguedas l’avait fait pour les contes, mythes et lĂ©gendes populaires[57] (et aussi les paroles de Huaynos –chansons andines), Robles, arpentant les pays andins de fond en comble, a recueilli et resituĂ© dans leur contexte (costumes, danses) plus de 650 mĂ©lodies dans les zones rurales les plus reculĂ©es du PĂ©rou, qu’il avait rĂ©parties entre 336 thĂšmes dits "purs" (ou intacts ou ancestraux) et 319 thĂšmes dits "mĂ©tis"[58].

Il fit connaĂźtre ses travaux en 1910, et fut prĂ©sentĂ© Ă  cette occasion par le pĂšre Alberto Villalba Muñoz Ă  l’UniversitĂ© de San Marcos comme « le dĂ©couvreur, Ă  l’égal de Castro y Alviña, de la gamme pentaphonique des Incas »[58]. C’est la mĂȘme annĂ©e que les Ă©poux Marguerite et Raoul d’Harcourt, ethnomusicologues français, le rencontrĂšrent[58] Ă  Lima ; c’est de leurs Ă©tudes communes et de leurs Ă©changes de collectes que naquit leur grand projet d’ouvrage monumental : « La musique des Incas et ses survivances », qui parut en deux volumes Ă  Paris en 1925, et fait aujourd’hui encore rĂ©fĂ©rence sur le sujet[59]. Puis Robles reprit ses voyages, alternant collectes de terrain et confĂ©rences, en Argentine, Bolivie et Équateur, soit l’ensemble des pays de l’aire andine concernĂ©s par le maintien de traditions musicales remontant pour partie d’entre elles Ă  l’époque de la colonisation, et mĂȘme aux temps prĂ©colombiens. Enfin il continua Ă  voyager comme confĂ©rencier au Panama, Ă  Cuba et aux États-Unis oĂč il vĂ©cut de 1919 Ă  1933 (annĂ©e oĂč il dĂ©posa la mĂ©lodie d'El cĂłndor pasa Ă  la BibliothĂšque du CongrĂšs), enseignant, composant et enregistrant, puis Ă  nouveau au PĂ©rou jusqu’à son dĂ©cĂšs en 1942.

C’est aussi pour cette raison qu’il reste probable, comme on le verra, que Robles se soit inspirĂ©, pour le thĂšme principal d'El cĂłndor pasa, d’airs traditionnels anciens car sa mĂ©lodie revĂȘt des caractĂ©ristiques typiques des airs de l’Altiplano andin qu’il connaissait bien et qui gardent trace de la survivance de la musique prĂ©colombienne, notamment de certains de ses traits tels que les musicologues ont pu les reconstituer par recoupements : ainsi, la montĂ©e progressive Ă  reprise chromatique, suivie d’une descente rapide pentatonique ou pour mieux dire pentaphonique[60], qui caractĂ©rise les phrases principales de la mĂ©lodie d'El cĂłndor pasa, serait typique, comme les sauts d’octaves frĂ©quents, de la structure des mĂ©lodies incaĂŻques et pastorales[61] ; par la suite sa mĂ©lodie fut arrangĂ©e pour des fanfares de village et fut trĂšs souvent jouĂ©e, du fait de son succĂšs premier, puis modifiĂ©e de proche en proche par transmission orale, retrouvant peu Ă  peu ses origines populaires[60]. Ce qui explique peut-ĂȘtre sa "redĂ©couverte" par les groupes de musique andine des annĂ©es 1950-1960 Ă  Paris[62].

Archéologie
Exemple de joueur d'Antara (flĂ»te de Pan pĂ©ruvienne, quechua) dans l'art pĂ©ruvien prĂ©colombien. Pot d’argile cuite, PĂ©rou, rĂ©gion cĂŽtiĂšre du nord, culture Moche, entre 100 avant J.-C. et 600 aprĂšs JC. [Schaffhouse, Museum zu Allerheiligen, collection Ebnöther (DĂ©partement «Musique et danse»)].
Dessin ethnographique d'une Kena en os de culture Yuracaré (population amérindienne d'origine précolombienne, de langue isolée, des basses-terres boliviennes).

On a dĂ©couvert de nombreux types de flĂ»tes dans les sĂ©pultures prĂ©colombiennes, parfois trĂšs anciennes : par exemple, des flĂ»tes traversiĂšres de la civilisation de Caral-Supe, remontant jusqu’à 5000 ans avant le prĂ©sent, taillĂ©es dans des os de pĂ©lican ou 
 de condor des Andes, justement ! Ou bien, un peu plus rĂ©centes, mais toujours antiques (au moins 3000 ans avant le prĂ©sent, dĂšs la Culture ChavĂ­n), on a retrouvĂ© des Kenas[N 17] en os d’animaux variĂ©s (condor, lama, voire en tibia humain pour honorer la mĂ©moire de l’ancĂȘtre Ă  qui appartenait cet os), en argile cuite ou en pierre volcanique trĂšs dure (onyx, jade, obsidienne)[63] : comment faisaient les prĂ©colombiens pour tailler des tubes et des trous aussi prĂ©cisĂ©ment dans des matĂ©riaux aussi durs et cassants, sans la connaissance des mĂ©taux les plus durs, et qui « rivalisent pourtant, mise Ă  part leur gamme franchement pentatonique, avec les meilleures Kenas d’aujourd’hui[63] » ? Enigme archĂ©ologique fascinante qui vaut bien celles de l’édification des pyramides ou des MoaĂŻ de l’Île de PĂąques et qui est aujourd'hui peut-ĂȘtre moins explorĂ©e, circonscrite et assurĂ©ment rĂ©solue que ces derniĂšres


La Kena, qui porte aujourd'hui le thĂšme principal d'El cĂłndor pasaa, Ă©tait probablement l’instrument favori de la civilisation Inca[64], chargĂ© entre autres des mĂ©lodies sacrĂ©es que jouait parfois l’Inca SuprĂȘme lui-mĂȘme, le Fils du Soleil (Intip ChurĂ­n), mais aussi le plus humble berger de la grande CordillĂšre[63]. On a retrouvĂ© aussi des antaras[N 18] anciennes[N 19], prĂ©sentant gĂ©nĂ©ralement de six Ă  dix tubes jumelĂ©s, en terre cuite[65]. Les flĂ»tes en roseau existaient aussi sĂ»rement, de mĂȘme que des instruments rythmiques, mais le roseau, le bois et la peau rĂ©sistent moins bien Ă  l’usure du temps que les matĂ©riaux citĂ©s ci-dessus. On a aussi retrouvĂ© de nombreuses statuettes prĂ©colombiennes reprĂ©sentant des joueurs de Siku (flĂ»tes de Pan Aymara), d'Antara[66] ou de Kena[67]. La plupart de ces flĂ»tes permettent les microtons (comme le violon par exemple, voir : mode, et notamment : Modes microtonaux).

Transmission orale

Toutes ces flĂ»tes se retrouvent aujourd’hui encore chez les peuplades de la Sierra, parfois identiques (en pentaphonique strict) ou parfois « crĂ©olisĂ©es » vers la gamme diatonique occidentale. Mais ces villageois « ont souvent mis un point d'honneur Ă  perpĂ©tuer la tradition musicale de leurs ancĂȘtres, chants et lignes mĂ©lodiques en gĂ©nĂ©ral sobres et mĂ©lancoliques, et dont l'esprit a su rĂ©sister aux influences espagnole et noire »[68], mĂȘme si les rencontres ont aussi parfois crĂ©Ă© des genres hybrides fusionnant des apports d’origines diverses (musiques afro-pĂ©ruvienne ou afro-bolivienne par exemple).

La musique des Incas, comme leurs chants, Ă©tait semble-t-il essentiellement monodique[68] - [69], sauf lors des grands rassemblements de joueurs du mĂȘme instrument mais de tailles diffĂ©rentes, ce qui crĂ©e des polyphonies riches et complexes, assez Ă©tranges ou insolites pour une oreille occidentale [sikuriadas : rassemblement de joueurs de Siku, ou tarkeadas : rassemblement de joueurs de Tarka (sorte de flĂ»te Ă  bec)]. Cette musique tournait autour de deux accords parfaits, majeur et mineur, situĂ©s Ă  une tierce l'un de l'autre et parfois reliĂ©s par une note de passage. « À l'intĂ©rieur du pentaphone ainsi rĂ©alisĂ©, les Incas employaient des intervalles trĂšs variĂ©s et souvent inattendus (septiĂšme mineure ou dixiĂšme en deux sauts inĂ©gaux) »[68].

Les chants de circonstance ou de participation Ă  un rituel, les chants d'amour tristes (harawi ou yarawek ou encore yaravĂ­), d'adieu (cacharpari), de joie (haylli) ou de mĂ©lancolie qui se sont transmis oralement de gĂ©nĂ©ration en gĂ©nĂ©ration, « ont conservĂ©, en dĂ©pit de modifications inĂ©vitables, l'essentiel de ce qu'ils Ă©taient au cƓur de la civilisation qui les vit naĂźtre »[68]. Comment cela est-il possible, et comment les ethnomusicologues peuvent-ils l’affirmer raisonnablement ?

La préservation impossible

D'un cĂŽtĂ©, comme le dit le fameux ethno-anthropologue et archĂ©ologue amĂ©ricaniste Alfred MĂ©traux[70] : « aucun fragment de piĂšce musicale d’origine incaĂŻque certaine n’a pu nous parvenir »[69]. Ceci est dĂ» Ă  au moins trois raisons : d’abord les Incas n’avaient pas de systĂšme de notation musicale, pas plus qu’ils n’avaient d’écriture proprement dite, tout au moins sous forme de glyphes comme les Mayas et la plupart des civilisations mĂ©soamĂ©ricaines prĂ©colombiennes ; pas d’écriture si ce n’est les interprĂ©tations narratives et qualitatives qu’autorisaient peut-ĂȘtre les quipus[71], ces Ă©cheveaux de cordelettes nouĂ©es qui servaient principalement Ă  la comptabilitĂ© de l’empire Inca ; mais leur sens narratif et langagier, dĂ©jĂ  Ă©voquĂ© avec force et solidement sourcĂ© dans les annĂ©es 1950 par l'ethno-anthropologue et archĂ©ologue finlandais RafaĂ«l Karsten (es)[72] (de l'UniversitĂ© d'Helsinki), rĂ©affirmĂ© rĂ©cemment par le grand spĂ©cialiste amĂ©ricain des quipus qu’est Gary Urton[73], ainsi que par l'ethnographe anglaise Sabine Hyland[74], est probablement Ă  jamais inaccessible.

Ensuite, la cĂ©lĂ©bration du culte de Viracocha ou d’Inti, le dieu-soleil, et l’ensemble des rituels traditionnels oĂč la musique et le chant Ă©taient Ă©minemment prĂ©sents, ont Ă©tĂ© immĂ©diatement frappĂ©s d’interdit par les autoritĂ©s coloniales espagnoles dĂšs le XVIe siĂšcle[75], mĂȘme si des tĂ©moignages d’époque attestent de la survivance temporaire ou clandestine de ces cultes en musique.

Enfin, la pĂ©nĂ©tration dĂšs le XVIe siĂšcle, encore, de la musique espagnole entraĂźne une transformation profonde de la musique autochtone[75]. « C’est donc sous une forme mĂ©tissĂ©e, oĂč se combinent les Ă©lĂ©ments locaux et Ă©trangers, que nous entendons le plus souvent la musique qualifiĂ©e d’"incaĂŻque" »[75].

Des traces substantielles de la "musique inca"
Photos d'indiens Chipayas vers 1901, prÚs du Lac Poopó dans l'Altiplano bolivien, collectées et proposées en 1946 par Alfred Métraux au Bulletin de la Smithsonian Institution. Bureau of American Ethnology. Traduction du texte d'accompagnement : "Planche 120 - Pays et Indiens Chipayas - En haut (à gauche), Chullpa, ancienne tour funéraire [précolombienne] - En haut (à droite), femme foulant aux pieds. En bas (à gauche), danseurs [et musicien chipaya jouant du pinkul'u, flûte à bec ancestrale]- En bas (à droite), Chipayas jouant à un jeu de société (Courtesy Alfred Metraux.)".

Cependant, d’un autre cĂŽtĂ©, toujours avec Alfred MĂ©traux, on sait que la musique inca n’a pas entiĂšrement disparu, et qu’il en a subsistĂ© des traces plutĂŽt substantielles[76] : « grĂące Ă  la tradition orale, elle a partiellement survĂ©cu[69] ». Mais comment sait-on que tel Ă©lĂ©ment est incaĂŻque (voire prĂ© incaĂŻque) au sein d’une mĂ©lodie d’aujourd’hui collectĂ©e dans une communautĂ© amĂ©rindienne autochtone, et que tel autre Ă©lĂ©ment est allogĂšne ? Parce que « l’originalitĂ© de sa structure nous permet de la distinguer encore [la musique inca] de celle influencĂ©e par l’Europe[69] », et de dĂ©terminer par une analyse comparative les fragments de mĂ©lodies d’origine prĂ©colombienne qui sont enchĂąssĂ©s dans les airs prĂ©sentĂ©s dĂ©jĂ  par les musiciens autochtones du XXe siĂšcle comme trĂšs anciens : comparaison d’abord entre morceaux andins pour isoler des sĂ©quences caractĂ©ristiques par recoupements statistiques, mais aussi en confrontant ces morceaux aux piĂšces de musique ancienne et baroque espagnole du XVIe siĂšcle au XVIIIe siĂšcle, dont nous avons les partitions, pour mettre en Ă©vidence des Ă©lĂ©ments trop inhabituels Ă  la tradition espagnole dans les airs mĂ©tis Ă©tudiĂ©s. « Corroborant les rĂ©sultats de l’analyse des chants modernes, les instruments Ă  vent d’époque [prĂ©colombienne, retrouvĂ©s par les archĂ©ologues dans les tombes, NDLR] portent tĂ©moignage des Ă©chelles [ainsi que des possibilitĂ©s mĂ©lodiques, NDLR] utilisĂ©es par les anciens PĂ©ruviens[69]. »

En revanche, « de la composition des grands ensembles vocaux[N 20], nous ne savons rien. Nous pouvons seulement supposer, Ă©tant donnĂ© son absence actuelle dans la musique andine, que les Incas ignoraient la polyphonie et qu’hommes et femmes chantaient Ă  l’unisson[69] » [quoiqu’en suraigu pour les femmes, comme c’est l’habitude encore aujourd’hui dans les Andes]. Par contre, on a conservĂ©, sinon les mĂ©lodies, tout au moins des paroles (en quechua) de ces hymnes, dont on trouvera des exemples dans les ouvrages de Gary Urton[77], Alfred MĂ©traux (op. citĂ©[78]), et du grand Ă©crivain pĂ©ruvien JosĂ© MarĂ­a Arguedas[N 21].

Caractéristiques

De tous ces apports, tĂ©moignages analysĂ©s et collectes dans les villages, et du recensement systĂ©matique qu’on en a fait, on a dĂ©duit que les Ă©chelles musicales employĂ©es par les anciens pĂ©ruviens « sont toujours pentatoniques[69] ».

« Les traits les plus caractĂ©ristiques du pentatonique pĂ©ruvien sont, [d’aprĂšs M. et Mme d’Harcourt] : 1- la courbe [ascendante puis] descendante [plus frĂ©quente] des mĂ©lodies; 2- la frĂ©quence de l'Ă©chelle: sol - mi - rĂ© - la - do, caractĂ©risĂ©e par l'intervalle de tierce mineure (la - do), qui termine les mĂ©lodies de ce mode; 3- les grands sauts d'intervalles au cours du dĂ©veloppement[60] - [69]. [Jean-Lambert Charlier, ou Alfred MĂ©traux op. citĂ©, mĂȘme texte] »

On remarquera déjà là des caractéristiques ressemblant à des éléments présents dans la mélodie d'El cóndor pasa


Les mĂ©lodies indiennes Ă©taient donc bĂąties sur une Ă©chelle dĂ©fective pentatonique, commune d'ailleurs Ă  beaucoup de peuples premiers. Dans un premier temps, pour s’en faire une idĂ©e approximative, nous pouvons partir de notre Ă©chelle diatonique occidentale moderne de sept sons dont nous retirerons les demi-tons (Fa et Si) : ce qui nous laisse cinq notes (Do, RĂ©, Mi, Sol, La) et cinq tons (du Do au Do supĂ©rieur). Et « la succession incomplĂšte des cinq sons ci-dessus est prĂ©cisĂ©ment l’échelle indienne. Or, de mĂȘme que chez les Grecs, et plus tard dans les modes ecclĂ©siastiques du moyen Ăąge, on considĂ©rait chaque note de l'Ă©chelle diatonique comme le point de dĂ©part d'un mode diffĂ©rent (mode d'ut, de rĂ©, de mi, etc.), de mĂȘme pouvons-nous concevoir idĂ©alement un mode sur chaque degrĂ© de l'Ă©chelle dĂ©fective pentatonique, ce qui donnerait cinq sĂ©ries[60], » ou cinq « modes »[79].

L’étude des monodies indiennes a amenĂ© les musicologues Ă  la conclusion de l’usage trĂšs frĂ©quent du mode B (mineur : Sol, Mi, RĂ©, Do, La, descendant) et frĂ©quent du mode A (majeur : La, Sol, Mi, RĂ©, Do, descendant), et l’usage rare ou inusitĂ© des 3 modes restants[60].

Gamme/échelle pentatonique ou « systÚme pentaphonique » ?

De tous ces Ă©lĂ©ments et de leurs frĂ©quences relatives et respectives observĂ©es, les Ă©poux d’Harcourt, dans leur livre-rĂ©fĂ©rence dĂ©jĂ  citĂ©, concluaient donc que la musique prĂ©colombienne Ă©tait bien bĂątie sur une « Ă©chelle dĂ©fective pentatonique ».

Toutefois, Constantin Brăiloiu, invoquĂ© tant par MĂ©traux que par Charlier, s’appuyant aussi sur les instruments antiques retrouvĂ©s, note que les gammes prĂ©colombiennes ne partageaient pas l'octave en six tons (dont on n’utiliserait que cinq) mais divisaient carrĂ©ment l'octave en cinq intervalles Ă©gaux (Ă  la façon des lithophones asiatiques anciens).

« Si bien que la gamme « pentatonique » des Incas n'Ă©tait pas superposable exactement Ă  une gamme qui emprunterait cinq sons dans notre Ă©chelle occidentale. Certaines notes s'en Ă©cartaient de prĂšs d'un quart de ton. Nous pouvons constater que la traduction exacte serait « pentaphonique » qui correspondrait Ă  une gamme de 5 sons et non pentatonique qui voudrait dire gamme de 5 tons... Les gammes pentaphoniques sont basĂ©es sur 5 sons en quinte, ramenĂ©s sur une seule octave : par exemple : do - sol - rĂ© - la - mi, donnant effectivement la gamme : do - rĂ© - mi - sol – la[60]. [Jean-Lambert Charlier]. »

Mais ces notes seraient lĂ©gĂšrement dĂ©calĂ©es pour diviser l’octave en cinq intervalles Ă©gaux, et non plus en tons, donc.

On comprend que, dĂšs lors, « pentatonique » ici dĂ©signe avant tout un systĂšme musical complet et non une simple Ă©chelle. Raison pour laquelle, entre autres, les musiques ethniques sonnent Ă©trangement Ă  notre oreille occidentale, formatĂ©e qu’elle est par des siĂšcles (mais non des millĂ©naires !) de musique Ă  Ă©chelle diatonique, complĂ©tĂ©e par l’échelle chromatique.

Les recherches ultĂ©rieures en ethnomusicologie semblent montrer que les principes dĂ©gagĂ©s par Brăiloiu s'appliquent dans plusieurs cultures diffĂ©rentes. On trouverait ce systĂšme notamment en Chine, en Afrique, en AmĂ©rique du Sud et en Europe de l'Est. Selon Jean-Lambert Charlier « il n'est cependant pas prouvĂ© que ces similitudes dans l'organisation et l'utilisation des hauteurs dĂ©coulent bien d'un mĂȘme "systĂšme" mental ou culturel. Autrement dit, si d'un point de vue descriptif, la thĂ©orie de Brăiloiu permet de rendre compte d'un grand nombre de musiques, il n'est pas pour autant certain que le systĂšme pentatonique ait un sens autre que thĂ©orique[60] », et particuliĂšrement qu’il renvoie Ă  un contenu historique vĂ©ritable induisant des filiations ancestrales entre des musiques d’univers culturels si Ă©loignĂ©s dans le temps et dans l’espace.

Jean-Lambert Charlier poursuit son raisonnement en prenant en exemple une mĂ©lodie « mĂ©tissĂ©e » (c’est-Ă -dire inspirĂ©e des mĂ©lodies traditionnelles pentaphoniques, mais jouĂ©es sur la gamme diatonique occidentale dĂ©fective, avec des instruments traditionnels adaptĂ©s Ă  elle). Il s’agit d’un chant YaravĂ­ (mĂ©lodie no 4) collectĂ© et transcrit par Marguerite d’Harcourt en 1920, et reproduit dans son livre dĂ©jĂ  citĂ©. Il commente ainsi cette mĂ©lodie :

« Construits sur les échelles métissées, certains de ces airs contiennent des "métissages de métissages" remarquables. Celui qu'on rencontre le plus souvent et qui a un rÎle éminemment expressif, consiste en une équivoque entre la tierce majeure et la tierce mineure du mode, entendues l'une aprÚs l'autre, à quelques notes de distance, l'intervalle majeur précédant le mineur en une sorte de chromatisme tout spécial, comme dans ce Chant Yaraví[60]. [Jean-Lambert Charlier]. »

Or il se trouve que les quatre premiĂšres mesures de cette mĂ©lodie sont exactement les mĂȘmes, Ă  la tonalitĂ© prĂšs mais celle-ci se transpose aisĂ©ment, que celles de la premiĂšre phrase entiĂšre d'El cĂłndor pasa (l’auteur y fait d’ailleurs allusion), et que donc le commentaire du Professeur Charlier s’y applique parfaitement
 Nul doute qu'on ne puisse voir lĂ  l'une des sources d'inspiration de Daniel AlomĂ­a Robles pour sa partition originale de la passacaille finale d'El cĂłndor pasa, ainsi que le suggĂšre le Professeur Charlier[N 22].

La découverte du Machu Picchu et les revendications identitaires, sociales et politiques dans la zarzuela d'El cóndor pasa

L'explorateur et archéologue Hiram Bingham prÚs des ruines d'Espíritu Pampa en 1911, avec son guide autochtone, peu avant la découverte de la cité inca perdue du Machu Picchu.

Rappelons qu'au moment de la premiĂšre de la zarzuela de Robles et Baudouin, le 19 dĂ©cembre 1913, la dĂ©couverte du Machu Picchu par Hiram Bingham, en 1911, Ă©tait encore toute neuve ! MĂȘme si le livre de Bingham : La citĂ© perdue des Incas, ne sera publiĂ© Ă  New York qu'en 1948, l'article qui en fit part au monde entier parut dans le magazine National Geographic d'avril 1913 (donc huit mois avant la premiĂšre de la zarzuela) ; les pĂ©ruviens intĂ©ressĂ©s par l'archĂ©ologie et l'histoire prĂ©colombienne comme Robles furent donc nĂ©cessairement informĂ©s de cette dĂ©couverte et impressionnĂ©s par elle. Le Machu Picchu fut Ă  l'origine d'un regain d'intĂ©rĂȘt pour le passĂ© inca du PĂ©rou, y compris sur le plan politique pour l'affirmation de l'identitĂ© nationale, malgrĂ© les risques de tension avec les populations amĂ©rindiennes.

Un oiseau prend son vol et s'Ă©lance depuis la « CitĂ© des nuages » (un des surnoms du Machu Picchu) en octobre 2007. À noter qu'il s'agit lĂ  d'un Caracara montagnard (Phalcoboenus megalopterus) et non d'un condor, mais il semble qu'en arriĂšre-plan, au-dessus de la cime de la montagne, ce soit bien un condor qui croise.

Nul doute que cette découverte du Machu Picchu n'ait influencé l'atmosphÚre de la piÚce de Daniel Alomía Robles et Julio de la Paz, d'autant que son argument repose sur un conflit, à l'aube du XXe siÚcle, entre les mineurs autochtones et maltraités d'une mine de la région du Yåpac (prÚs de la ville miniÚre de Cerro de Pasco dans les Andes centrales péruviennes) et les patrons coloniaux et nord-américains de la compagnie miniÚre étrangÚre.

Extraordinaire audace visionnaire, Ă  son Ă©poque, que de confronter sur la mĂȘme scĂšne exploitĂ©s et exploiteurs, indiens et colons, et de paraĂźtre dĂ©noncer, sous la romance tragique, les exactions nĂ©ocoloniales des grandes compagnies "yankees"[80], dĂšs 1913. Cette audace explique sans doute le succĂšs que la piĂšce a rencontrĂ© dĂšs sa crĂ©ation et l’impact fulgurant qu’elle a connu : Marcela Robles[81], petite fille de Daniel AlomĂ­a, poĂ©tesse et journaliste, a Ă©crit que la Zarzuela, composĂ©e de huit parties (huit scĂšnes et huit moments musicaux), a connu plus de 3 000 reprĂ©sentations, tenant l’affiche durant 5 ans[82]. Et pourtant, comme le rappelle Marcela Cornejo[83] : « la sociĂ©tĂ© limĂ©nienne[N 1] de l’époque Ă©tait encore rĂ©ticente Ă  accueillir des expressions artistiques liĂ©es Ă  l’indigĂ©nisme, [malgrĂ© cela] l’Ɠuvre rencontra un grand succĂšs et resta en scĂšne plus de deux ans [d'autres sources indiquent cinq ans, NdT]. Cependant, aprĂšs cela elle tomba dans l’oubli et ne fut jamais reprise [sauf la « passacaille » et la « cashua »] ». Notons que ceci a Ă©tĂ© Ă©crit en 2008, et que la piĂšce a Ă©tĂ© depuis restaurĂ©e et reprise en 2013 pour son centenaire (voir ci-dessous).

Et en effet, pour Enrique Pinilla, cet argument de la piĂšce apparaĂźt comme vraiment

« rĂ©volutionnaire par son caractĂšre politique contre l’impĂ©rialisme yankee [et pour les revendications des autochtones]. Le librettiste d'El cĂłndor pasa [Julio Baudouin] assurĂ©ment avait lu Manuel GonzĂĄlez Prada[84] (1844 - 1918), qui avait affirmĂ© : "Nous ne voyons donc pas, dans la question indigĂšne, une crise provinciale et passagĂšre, mais un problĂšme national et permanent. [
] La parole qui s’adresse aujourd’hui Ă  notre peuple doit rĂ©veiller la conscience de chacun, mettre tout le monde debout, alerter tout le monde comme une cloche de tocsin pour l’incendie dans les heures avancĂ©es de la nuit"[80] - [85]. »

Plus loin, Enrique Pinilla poursuit :

« Le propos dĂ©veloppĂ© dans la zarzuela Ă©tait d’une nouveautĂ© absolue au thĂ©Ăątre, mĂȘme s’il avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© traitĂ© [sur le plan romanesque] dans les romans et nouvelles romantiques de ArĂ©stegui (es), Mercedes Cabello de Carbonera, et Clorinda Matto de Turner; mais en 1913, au thĂ©Ăątre, et surtout sous la prĂ©sidence de Guillermo Billinghurst[N 23] il a connu un extraordinaire retentissement. En effet, on a donnĂ© trois mille reprĂ©sentations au Teatro Mazzi pendant cinq ans[80] - [86]. »

On pourra lire en ligne de larges extraits en espagnol du livre oĂč les dialogues de la piĂšce de thĂ©Ăątre, soit le livret de Julio Baudouin, ont Ă©tĂ© republiĂ©s rĂ©cemment Ă  Lima (PĂ©rou), Ă  l'occasion du centenaire de la piĂšce d'El cĂłndor pasa et de la musique qui l'accompagne[87].

Historique

La premiĂšre de la piĂšce (1913) et sa reconstitution pour son centenaire (2013)

La version originale d'El cĂłndor pasa est donc une piĂšce de thĂ©Ăątre musical de tradition hispanique, dont on garde l’intitulĂ© original de genre : zarzuela comme intraduisible, car les Ă©quivalents français, allemands ou italiens qui alternent eux aussi parties instrumentales, chantĂ©es, parlĂ©es et action thĂ©Ăątrale, comme l’opĂ©rette, l'opĂ©ra-comique, le Singspiel, ou l’Opera buffa, sont assez Ă©loignĂ©s dans l’esprit de la zarzuela qui se rapprocherait peut-ĂȘtre plutĂŽt du mĂ©lodrame (Ă©tymologiquement : drame avec musique).

Carte postale du Teatro Mazzi (1910-1911)

Cette zarzuela, donc, est Ă©crite en prose et se compose d’un acte en deux tableaux. La premiĂšre a eu lieu le au Teatro Mazzi, Plaza Italia Ă  Lima. Parmi ses sept parties musicales, elle inclut la fameuse mĂ©lodie Ă©ponyme fondĂ©e sur la musique traditionnelle andine du PĂ©rou. Celle-ci, empruntant deux passages musicaux de la zarzuela : la Cachua (es) rapide (jouĂ©e pendant le bal au dĂ©but du deuxiĂšme tableau) et la Pasacalle lente et majestueuse (jouĂ©e Ă  la fin de la premiĂšre scĂšne du deuxiĂšme tableau, et reprise pour le final en se poursuivant pendant la parade des comĂ©diens), est uniquement instrumentale, et ne comporte pas de paroles (il n’y a donc pas de « paroles originales » pour cette musique). Ces deux piĂšces ont Ă©tĂ© Ă©crites pour orchestre classique, et non pour les instruments traditionnels des Andes ; lors de la rĂ©surgence de ce thĂšme dans la deuxiĂšme moitiĂ© du XXe siĂšcle, celui-ci sera alors jouĂ© sur les instruments autochtones, et l’ordre des mouvements sera inversĂ© par rapport Ă  celui de la piĂšce originale : lent d’abord puis rapide, dĂ©sormais.

Les parties les plus connues de la zarzuela, comme le prĂ©lude, la cachua et le final ont Ă©tĂ© arrangĂ©s pour piano par Daniel AlomĂ­a Robles lui-mĂȘme, et dĂ©posĂ©s lĂ©galement Ă  la BibliothĂšque du CongrĂšs des États-Unis et enregistrĂ©s en son nom par la Edward B. Marks Music Corp. le sous le numĂ©ro 9643.

En juillet 2013, le Colectivo Cultural Centenario El CĂłndor Pasa (association culturelle pour le centenaire d'El cĂłndor pasa), a rĂ©Ă©ditĂ© le livret original de la piĂšce qui avait Ă©tĂ© longtemps tenu pour perdu, accompagnĂ© d’un CD oĂč sont gravĂ©s ses sept parties musicales[88] et ses dialogues. On peut lire en ligne le texte original de cette rĂ©Ă©dition du livret[87]. La musique a Ă©tĂ© reconstituĂ©e, Ă  partir de la partition originale qu’a manuscrite et composĂ©e D. A. Robles, par le musicologue Luis Salazar MejĂ­a, avec la collaboration des musiciens Daniel Dorival et Claude Ferrier. La nouvelle « premiĂšre » de la piĂšce a Ă©tĂ© donnĂ©e les 14, 15 et 16 novembre 2013, au thĂ©Ăątre UNI de Lima, pour cĂ©lĂ©brer son premier centenaire[89]. Tous ces travaux et Ă©vĂ©nements (y compris la rĂ©Ă©dition du livret, du CD, et la reprise de la piĂšce) ont Ă©tĂ© rendus possibles grĂące aux efforts conjuguĂ©s de Salazar MejĂ­a et du producteur Mario CerrĂłn Fetta (membres de l’association culturelle mentionnĂ©e plus haut), et menĂ©s Ă  bien sans subvention aucune, ni publique, ni privĂ©e.

Argument de la piĂšce originale

L'ensemble du résumé qui suit a été tiré de la réédition du livret original (ici traduit de l'espagnol) de la zarzuela en 2013[87].

L’action se passe au tout dĂ©but du XXe siĂšcle, sur le site minier du YĂĄpac, dans les Andes pĂ©ruviennes.

Premier tableau
  • La premiĂšre scĂšne dĂ©bute avec le PrĂ©lude. Le soleil n’est pas encore levĂ© et les mineurs regagnent leur lieu de travail. Un chƓur d’hommes interprĂšte une chanson plaintive, comme un lamento des mineurs : En la nieve de las cumbres... (« Sur la neige des cimes
 »). Le chant se termine et quelques mineurs restent en arriĂšre pour Ă©couter la kena du berger ; avec admiration, ils le voient se perdre dans les nuages qui panachent les cimes, et ils envient sa libertĂ©. Frank est un jeune mineur fils de MarĂ­a, qui est l’épouse du contremaĂźtre Higinio. Frank n’accepte pas les abus auxquels ses compagnons et lui sont soumis de la part des propriĂ©taires de la mine. « Quelque chose me dit que ce n’est pas une vie ça » (pense-t-il Ă  haute voix). Cependant les autres mineurs l’accusent d’ĂȘtre ingrat et traĂźtre envers les patrons.
  • Dans la deuxiĂšme scĂšne Ruperto et Juanacha (un berger et une bergĂšre) entrent sur le plateau en courant ; Ruperto joue Ă  poursuivre Juanacha, d’ailleurs, ils vont bientĂŽt se marier. À la fin de la scĂšne, tous s’en vont sauf Frank, qui interprĂšte un YaravĂ­ mĂ©lancolique rĂ©flĂ©chissant sur son identitĂ©, son apparence (il est roux), et ses sentiments : Pobre alma prisionera
 (« Pauvre Ăąme prisionniĂšre
 »).
  • TroisiĂšme scĂšne : Alors entrent Mr. King et Mr. Cup (les patrons propriĂ©taires de la mine), en pleine conversation. Ils aperçoivent Frank assis sur un rocher Ă  l’extĂ©rieur de la galerie. Mr. King interpelle Frank et le fait rentrer dans la mine aprĂšs une brĂšve altercation. King et Cup continuent leur dialogue.
  • QuatriĂšme scĂšne : Mr. King fait sortir de la galerie quatre mineurs au moyen de coups de feu. Il les questionne briĂšvement sur l’avancement des travaux et les congĂ©die. La tension croĂźt entre Frank et Mr. King. MarĂ­a entre alors en scĂšne, hors d’haleine d’avoir cheminĂ©, apportant de la liqueur pour Mr. King. Ils discutent Ă  propos de Frank, et MarĂ­a tente d’intercĂ©der pour son fils. On apprend que Mr. King est le pĂšre biologique de Frank. MarĂ­a et Mr. King chantent en duo : PerdĂłnalo, taita... (« Pardonne-lui, pĂšre
 ») ; et finalement Mr. King accepte de ne pas sanctionner le jeune homme, attendri par la passion qu’il ressent pour MarĂ­a. Ils s’en vont bras dessus – bras dessous. C’est alors qu’Higinio, le mari de MarĂ­a, sort de la galerie ; en rage, il avoue sa haine envers les patrons et ourdit sa vengeance.
Second tableau
  • Dans les alentours de la mine, on donne un bal en l’honneur du mariage de Ruperto et Juanacha qui doit avoir lieu au village, et l’on joue une Cachua (es) (musique et danse proche du huayno. Durant le bal, le ciel s’obscurcit ; bientĂŽt Ă©clate un orage, et les jeunes gens ne pourront plus gagner le village pour cĂ©lĂ©brer leur mariage. Tous prient alors la vierge en chantant : Dulce reina de las cumbres... (« Douce reine des cĂźmes
 »), et miraculeusement le soleil revient ; les fiancĂ©s et leurs amis se mettent en route pour le village en continuant Ă  danser en parade ; sauf les mineurs qui ne peuvent abandonner leur travail (alors rĂ©sonne pour la premiĂšre fois la Passacaille : El cĂłndor pasa).
  • Pendant la fĂȘte, Mr. King a trop bu et dans son ivresse il maltraite cruellement Higinio. Lorsque Mr. King se retire, le mari bafouĂ© suit le yankee, et quand celui-ci atteint un ravin, Higinio fait rouler une Ă©norme roche sur lui. Mr. King meurt Ă©crasĂ©.
  • Un berger a Ă©tĂ© tĂ©moin de l’horrible meurtre et le raconte aux autres mineurs. Higinio le reconnaĂźt intĂ©gralement, et MarĂ­a Ă©clate en sanglot, inconsolable de la mort de son amant. Les mineurs, effrayĂ©s par les reprĂ©sailles inĂ©vitables, craignent pour leur vie.
  • L’autre propriĂ©taire de la mine, Mr. Cup, surgit revolver en main cherchant l’assassin. Frank l’affronte pour dĂ©fendre Higinio et ses camarades, et dans la bagarre qui s’ensuit, lui donne la mort avec son propre revolver. Devant ces Ă©vĂ©nements, tous sont horrifiĂ©s. Mais l’apparition soudaine d’un condor dans leur ciel, le premier depuis de nombreuses annĂ©es, leur apparaĂźt alors comme le prĂ©sage d’une nouvelle vie de libertĂ© et leur redonne espoir. « Nous sommes tous des condors ! » crient les mineurs avec allĂ©gresse. Puis c’est la reprise du thĂšme de la passacaille El cĂłndor pasa qui rĂ©sonne alors que tombe le rideau, et qui continuera pendant la prĂ©sentation des acteurs et chanteurs (parade finale).

Les huit passages musicaux

Cette Ɠuvre comporte sept piĂšces musicales (plus une reprise), quatre d’entre elles sont chantĂ©es et trois sont instrumentales (la reprise concernant le passage instrumental le plus cĂ©lĂšbre). Les mĂ©lodies les plus connues correspondent aux deux passages instrumentaux du second tableau, les deux interprĂ©tĂ©s lors de sa premiĂšre scĂšne : la Cachua (es) (ou Huayno) du bal des noces, puis la passacaille (ou YaravĂ­) qui suit immĂ©diatement la priĂšre Ă  la Vierge et qui sera reprise au final. Il est Ă  noter que ce sont ces deux airs rĂ©unis, mais dans l’ordre inverse, qui formeront le titre d'El cĂłndor pasa pour sa rĂ©surgence dans la version d’Achalay et de Los Incas dans les annĂ©es 1950-1960.

  • Premier tableau
  1. Prélude
  2. ChƓur d’hommes : En la nieve de las cumbres... (« Sur la neige des cimes
 »)
  3. YaravĂ­ de Frank : Pobre alma prisionera
(« Pauvre Ăąme prisionniĂšre
 »)
  4. Duo de MarĂ­a y Mr. King : PerdĂłnalo taita... (Pardonne-lui, pĂšre)
  • Second tabeau
  1. Bal (cashua)
  2. PriĂšre Ă  la Vierge : Dulce reina de las cumbres... (« Douce reine des cĂźmes
 »)
  3. Passacaille : el CĂłndor pasa
  4. Reprise finale de la passacaille el CĂłndor pasa

RĂ©surgence dans la musique des Andes en France, Ă  partir de 1958

Kena (ou quena), XXe siÚcle, Musée de la musique de Barcelone.
Charangos anciens en carapace de tatou des Andes, Musée des instruments de musique de Rome.
Tinya précolombienne (petit tambour) de culture Chancay 1000 à 1450 ap. J-C.
Harpe andine ancienne (?) (Disneyland Paris).

La toute premiĂšre version d'El cĂłndor pasa, enregistrĂ©e en France date de 1958. Elle se limitait Ă  une reprise de l'air le plus connu (la passacaille finale nommĂ©e elle aussi El cĂłndor pasa comme la piĂšce dans son ensemble), suivi, et non prĂ©cĂ©dĂ© comme dans la piĂšce originale, de la danse villageoise rapide (ou Kashua). Cette version innovante est l'Ɠuvre de Ricardo Galeazzi, cofondateur en 1956 avec Carlos Benn-Pott, de l'ensemble Los Incas. Ricardo Galeazzi enregistre, avec son Ensemble Achalay, cette version d'El CĂłndor Pasa[90] interprĂ©tĂ©e pour la premiĂšre fois avec la kena (flĂ»te des Andes droite Ă  encoche), accompagnĂ©e de guitares, sur disque microsillon 33 tours 25 cm, pour la firme BAM, que dirige Albert LĂ©vy Alvarez Ă  Paris.

Ricardo Galeazzi tient cette version — en deux mouvements 1- andante : appelĂ© parfois YaravĂ­ ou Pasacalle ou Fox incaĂŻco puis 2- allegro : Kashua ou Wayno de fuga (danse rapide proche du Huayno, qu'on peut trouver orthographiĂ©e : Cachua (es) ou encore Qashwa)— d'un ensemble Ă©quatorien composĂ© de solistes de l'orchestre national de Quito, Los Incaicos, lesquels interprĂštent l'Ɠuvre essentiellement avec des instruments Ă  cordes pincĂ©es (bandolas et guitares) dans un disque microsillon 33 tours 25 cm Ă©ditĂ© Ă  New York au dĂ©but des annĂ©es 1950.

Elle était déjà la chanson péruvienne la plus célÚbre au monde lorsqu'elle fut présentée à Paris par Los Incas au début des années 1960, et publiée par eux en 1963 dans un nouvel arrangement de Jorge Milchberg, là encore uniquement instrumental, toujours en deux mouvements, et encore une fois avec des instruments autochtones des Andes[91] : duo de Kenas, Charangos, Guitare, Harpe andine, Tinya (es) (petit tambour andin précolombien) ; ce thÚme est alors le deuxiÚme titre de leur album (33 tours LP) : « Amérique du Sud (chants et danses par Los Incas) » dans la collection « Voyages autour du monde » chez Philips (no 844.879 BY), lequel sera réédité tel quel en CD en 2000 (Mercury France, Universal Music, Philips no 538 906 - 2 LC 00305)[92]. C'est sous cette forme, initiée par Achalay et Los Incas, que la renommée de ce thÚme du Condor va encore changer d'échelle grùce à des rencontres opportunes.

Une rencontre "coup de foudre"

Paul Simon en 1966, juste aprĂšs sa rencontre avec Los Incas et Jorge Milchberg

D'aprĂšs le journal pĂ©ruvien La RepĂșblica, le duo de folk song amĂ©ricain Simon and Garfunkel[93], et notamment Paul Simon, en avait entendu en 1965 une version interprĂ©tĂ©e Ă  Paris au ThĂ©Ăątre de l'Est parisien par le groupe Los Incas (en premiĂšre partie d'un de leurs concerts). CharmĂ©s par la beautĂ© des mĂ©lodies andines interprĂ©tĂ©es sur instruments traditionnels, Simon et Garfunkel en demandent l'origine au groupe et si l'on pouvait en acheter les droits, car Paul Simon dĂšs cet instant envisage une transposition en chanson de ce thĂšme ; Ă  l'Ă©poque Jorge Milchberg, charanguiste, arrangeur, directeur musical du groupe, et surnommĂ© El Inca sur les pochettes de disques, leur prĂ©sente, probablement de bonne foi, le chant comme une complainte populaire pĂ©ruvienne remontant au XVIIIe siĂšcle et Ă  la grande rĂ©volte indienne de TĂșpac Amaru II. En effet voici comment Ă©tait prĂ©sentĂ© (sans doute par Jorge Milchberg lui-mĂȘme) le thĂšme El CĂłndor pasa (yaravĂ­) sur la pochette du disque oĂč il apparaĂźt pour la premiĂšre fois [Disque dĂ©jĂ  citĂ© : « AmĂ©rique du Sud - Voyages Autour du Monde, Chants et Danses par Los Incas», 1963 (Philips - 844.879 BY). Voir la discographie de Los Incas] :

« YaravĂ­ est la dĂ©formation espagnole du mot quechua « harawi » qui signifie : chanson [d’amour] triste. On trouve le terme yaravĂ­ dans des Ă©crits remontant jusqu’à 1791. Ce thĂšme aurait pris sa forme actuelle au XVIIIe siĂšcle, Ă  peu prĂšs Ă  l’époque de la rĂ©volte de Tupac Amaru contre les espagnols. L’Inca prend la forme du condor. D’aprĂšs la tradition, cette chanson relaterait sous la forme d’un court drame, l’épopĂ©e de cette rĂ©volte. AprĂšs une introduction jouĂ©e par deux charangos, les kenas exposent [Ă  deux voix], avec leur sonoritĂ© particuliĂšre, cette mĂ©lodie populaire du PĂ©rou. La deuxiĂšme partie termine ce morceau par un rythme trĂšs entrainant de huayno. »

D'ailleurs, l'hypothĂšse avait quelques fondements, car le condor a toujours symbolisĂ© le retour de l'Inca suprĂȘme sur les terres andines pour le Pachakuti ou bouleversement au changement d'Ăšres dans la cosmo-vision andine (voir la note 1 de l'article consacrĂ© au neuviĂšme empereur Inca Pachacutec). De plus le compositeur Daniel AlomĂ­a Robles Ă©tait lui-mĂȘme, un ethnomusicologue savant qui avait recueilli infatigablement dans les villages les plus reculĂ©s des Andes pĂ©ruviennes, boliviennes et Ă©quatoriennes, un grand nombre de mĂ©lodies ancestrales hĂ©ritĂ©es des peuples prĂ©colombiens et de l'Ă©poque coloniale, qui ont Ă©tĂ© pour lui une source d'inspiration inĂ©puisable. Certaines autres sources[94] envisagent d'ailleurs cette mĂȘme hypothĂšse Ă  savoir que Robles se serait en partie inspirĂ© pour cette composition de mĂ©lodies ancestrales villageoises issues de ses collectes[N 24] - [95]. En partie seulement, si bien que sa rĂ©Ă©criture peut tout de mĂȘme ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme une crĂ©ation[N 25].

Une paternité controversée... aujourd'hui apaisée

Jorge Milchberg en concert avec son groupe Urubamba (/Los Incas) Ă  Buenos Aires, le 2 novembre 2014.

Toujours est-il que lors de la rencontre entre Los Incas et Paul Simon, le nom d'AlomĂ­a Robles ne fut apparemment pas prononcĂ©, et le thĂšme fut prĂ©sentĂ© comme traditionnel sous arrangement de Jorge Milchberg avec une lĂ©gĂšre modification de la mĂ©lodie et l'adjonction d'une introduction inĂ©dite. Simon and Garfunkel enregistrent alors une version en 1970 sous le titre El CĂłndor Pasa (If I Could), avec des paroles entiĂšrement diffĂ©rentes de l'esprit de la version originale de la piĂšce, mais sur la mĂȘme mĂ©lodie et sur l'harmonisation de Los Incas qui les accompagnent sur le disque. Ils deviennent amis et feront mĂȘme des tournĂ©es avec le duo et avec Paul Simon seul, dont tĂ©moigne son disque en public Paul Simon in Concert: Live Rhymin'. Paul Simon d'ailleurs, la mĂȘme annĂ©e 1974, produira lui-mĂȘme le disque Ă©ponyme Urubamba du groupe Los Incas rejoint par Uña Ramos et reformĂ© sous le nom d'Urubamba. Mais fin 1970, Armando Robles Godoy, le fils du compositeur, cite en justice Simon and Garfunkel pour faire reconnaĂźtre le droit d'auteur de son pĂšre, qui avait officiellement dĂ©posĂ© sa composition aux États-Unis en 1933. Simon et Garfunkel n'ayant aucun dĂ©sir de faire du tort Ă  l'auteur et manifestant un grand respect pour les musiques autochtones, l'affaire judiciaire

Armando Robles Godoy en 2006, cinéaste péruvien et fils du compositeur et ethnomusicologue Daniel Alomía Robles.

« s'est rĂ©solue sans problĂšmes majeurs », d'aprĂšs Armando Robles Godoy[96], et en conclusion la non-attribution a Ă©tĂ© considĂ©rĂ©e comme une erreur de bonne foi (honest mistake) et un malentendu (misunderstanding)[N 26], et les droits d'auteur de Daniel AlomĂ­a Robles reconnus. Il est d'ailleurs aujourd'hui crĂ©ditĂ© au gĂ©nĂ©rique des innombrables versions que ce standard mondial a connues. D'ailleurs, aujourd'hui l’Ɠuvre est dans le domaine public, puisque sa premiĂšre prĂ©sentation (1913) remonte Ă  plus de cent ans, et son enregistrement officiel (1933) Ă  plus de quatre-vingts ans[97]. Enfin, Armando Robles Godoy, fils du compositeur et cinĂ©aste pĂ©ruvien, a Ă©crit lui-mĂȘme de nouvelles paroles pour cette chanson, en prenant comme rĂ©fĂ©rence, justement, la version de Paul Simon[N 27].

La polĂ©mique sur la paternitĂ© de l’Ɠuvre appartient donc dĂ©sormais au passĂ©, les diffĂ©rents apports historiques Ă  ce thĂšme Ă  la fois datĂ© (1913, 1933, 1958, 1963, 1970) et immĂ©morial (ses sources autochtones anciennes) sont aujourd'hui assez clairement attribuĂ©s. Enfin, sa simplicitĂ© thĂ©matique limpide et sa richesse de connotations culturelles particuliĂšrement suggestives ont amenĂ© de trĂšs nombreux musiciens de par le monde Ă  revisiter ce thĂšme depuis plus d'un siĂšcle et surtout depuis cinquante ans.

Versions chantées

Auparavant, le thĂšme avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© repris et chantĂ© par Marie LaforĂȘt accompagnĂ©e par Los Incas, sous deux versions diffĂ©rentes en 1966 et 1968, le mouvement lent seul sans le Huayno ou Kashua final, avec des paroles en français et les titres : « Sur le chemin des Andes » (1966)[98], puis « La FlĂ»te magique » (1968)[99]. La version de Simon and Garfunkel, qui fera le tour du monde avec Los Incas, qui comprend des paroles originales de Paul Simon et un arrangement de Jorge Milchberg, date de 1970[93] - [100]. Elle paraĂźtra sur le dernier album studio du duo folk : Bridge Over Troubled Water.

PlĂĄcido Domingo, en concert Ă  Buenos Aires en 2011, oĂč il a chantĂ© El CĂłndor pasa.

D'autres interprĂ©tations reprennent le mĂȘme air, mais les textes sont souvent trĂšs variĂ©s (voir ci-dessous la section « Paroles Ă©crites sur l'air de ce thĂšme »). Par exemple le chanteur russe Valery Leontiev, ou la chanteuse Esther Ofarim[101] en 1972 (qui chante une version en espagnol, laquelle sera aussi celle choisie par le grand tĂ©nor espagnol PlĂĄcido Domingo), ou le groupe israĂ©lien Parvarim, ou encore la chanteuse italienne Gigliola Cinquetti[102], pour une version en italien qui en fait une chanson d'amour (voir la sous-section « Les paroles de l'adaptation en italien pour Gigliola Cinquetti »). Elle est parue en single en 1970 avec un autre titre en face B : Il Condor/Lady d'Arbanville (Compagnia Generale del Disco, CGD no 9811). Il existe Ă©galement une interprĂ©tation du mĂȘme air avec un texte diffĂ©rent de Dana Winner qui, en nĂ©erlandais chante Jij en ik (« toi et moi »). Il existe mĂȘme une version chantĂ©e en chinois par la populaire chanteuse taĂŻwanaise Teresa Teng, version qui a eu un grand succĂšs dans les pays sinophones, car la musique des Andes est trĂšs apprĂ©ciĂ©e en extrĂȘme-orient[103]. Mais il est difficile de trouver le texte de cette version et sa traduction.

Il existe aussi une version chantĂ©e mais sans paroles d'Yma SĂșmac[104] la soprano pĂ©ruvienne et belle actrice d'Hollywood, princesse Inca authentique (Ñusta (es) descendante en ligne directe du treiziĂšme empereur ou Sapa Inca Atahualpa), Ă  la tessiture exceptionnelle dont l'amplitude dĂ©passait les six octaves. Cette version est le dernier titre de son huitiĂšme et dernier album : Miracles, de style rock psychĂ©dĂ©lique inhabituel pour elle, enregistrĂ© en septembre 1971 et sorti en janvier 1972, sous le label LONDON Records pour Decca. Mais l'album est retirĂ© de la vente Ă  la suite d'un dĂ©saccord entre Bob Covais, son producteur, et Yma SĂșmac qui n'approuvait dĂ©cidĂ©ment pas certains de ses choix artistiques. Il sera rĂ©Ă©ditĂ© en CD en juillet 1998[N 28].

La "Maison bleue" de la chanson San Francisco de Maxime Le Forestier, restaurĂ©e dans sa couleur originale, au no 3841, 18e Rue Ă  San Francisco (Californie, États-Unis).

Par ailleurs, la Kena (la flĂ»te porteuse du thĂšme dans les versions de 1958 par Achalay et de 1963 par Los Incas) est prĂ©sente dans les paroles d'une chanson emblĂ©matique des annĂ©es d'Ă©mergence de la World Music, couplĂ©e avec l'efflorescence du mouvement Hippie, qui forment l'arriĂšre-plan culturel de l'Ă©poque qui a vu l'essor du thĂšme d'El CĂłndor pasa. Il s'agit du grand succĂšs autobiographique de Maxime Le Forestier Ă©voquant ces annĂ©es "Condor pasa" et "Maison bleue" dans la "Mecque" hippie qu'Ă©tait la ville de San Francisco, Ă  savoir sa chanson San Francisco (sortie en 1972) oĂč il est dit : « C'est une maison bleue[105] / AdossĂ©e Ă  la colline / On y vient Ă  pied, on ne frappe pas / Ceux qui vivent lĂ , ont jetĂ© la clĂ© [...] Nageant dans le brouillard / EnlacĂ©s, roulant dans l'herbe / On Ă©coutera Tom Ă  la guitare / Phil Ă  la kena, jusqu'Ă  la nuit noire... »[106].

Versions instrumentales
Un groupe péruvien joue la version folk d''El cóndor pasa en 2005, en pleine ville de Tokyo (Japon), illustrant la mondialisation de ce thÚme.

La version originale en 1913 du thĂšme d'El cĂłndor pasa (parties I et II) Ă©tait uniquement instrumentale, et arrangĂ©e pour orchestre classique[107]. Elle sera dĂ©posĂ©e par Daniel AlomĂ­a Robles, avec accompagnement de piano, en 1933 aux États-Unis. [Voir ici mĂȘme : « Version originale, la piĂšce de 1913 »].

La premiĂšre version « folklorisĂ©e » [jouĂ©e avec des instruments autochtones (Kena et Charango) accompagnĂ©s par la guitare] d'El cĂłndor pasa fut enregistrĂ©e en 1958 par l'Ensemble Achalay dirigĂ© par Ricardo Galeazzi, alors dissident du groupe Los Incas [voir plus haut : « RĂ©surgence dans la musique des Andes en France »[90]. La version la plus cĂ©lĂšbre, parce que c'est celle qui accompagnera le tube que Paul Simon Ă©crira sur ce thĂšme, dans ce mĂȘme style de musique andine nouvelle Ă  l'Ă©poque, est celle dĂ©jĂ  Ă©voquĂ©e de Los Incas en 1963[108]. Cette version manifeste beaucoup de prĂ©cision et une grande puretĂ© des sonoritĂ©s des kenas en duo, du charango et de la harpe andine, lesquelles ont bien rĂ©sistĂ© au passage des ans et peuvent en partie expliquer son succĂšs. Il faut noter que pour le vingtiĂšme anniversaire de cette version originale, Los Incas enregistrĂšrent en 1983 une version bien diffĂ©rente et renouvelĂ©e dans son esprit d'El cĂłndor pasa, Ă  la fois tendue et mĂ©ditative, ouvrant la voie Ă  l'improvisation et se rapprochant tant du jazz que de la musique de chambre en quatuor. Celle-ci parut dans leur album Un Pedazo de Infinito (« un morceau d'infini ») publiĂ© en France sous le titre Un Instant d'Ă©ternitĂ©, rĂ©Ă©ditĂ© en CD sous le mĂȘme titre en 1996 (chez Buda Records, distribution AdĂšs - 82412 2 AD 761) ; c'est probablement Jorge Cumbo qui y tient la Kena, avec Milchberg toujours au Charango[109].

L'ensemble Los Chacos fondĂ© en 1953 par Jean-Jacques Cayre et Jean Bessalel, premier groupe français interprĂ©tant la musique andine et circum andine, enregistre en fĂ©vrier 1968 El cĂłndor pasa sur microsillon 33 tours 30 cm[N 29], phonogramme dont ils sont alors les seuls producteurs. Ils reçoivent avec leur disque la rĂ©compense la plus enviĂ©e du monde discographique : le Grand Prix International du Disque de l'AcadĂ©mie Charles-Cros 1970[110].

Il existe une version orchestrale assez magistrale, façon "second hymne national du PĂ©rou", arrangĂ©e par Francisco Pulgar Vidal Ă  partir des partitions de D. A. Robles, et interprĂ©tĂ©e en 2007 (?) par l'Orchestre Symphonique National du PĂ©rou (Orquesta SinfĂłnica Nacional del PerĂș (es)) dirigĂ© par Mina Maggiolo DibĂłs[111].

Le guitariste John Williams en concert Ă  Cordoue (Espagne) en 1986.

Eduardo FalĂș, guitariste et compositeur argentin renommĂ©, a proposĂ© une adaptation de ce thĂšme pour guitare seule. D'autres versions remarquĂ©es sont celles des guitaristes pĂ©ruviens RaĂșl GarcĂ­a ZĂĄrate, Manuelcha Prado y Mario Orozco CĂĄceres. Le grand guitariste australien John Williams, de haute renommĂ©e internationale, a proposĂ© dans son disque Romance of the Guitar (chez Sony Classical n° SK 89141 publiĂ© en 2000, enregistrements de 1984 Ă  2000) une version inĂ©dite pour guitare seule, trĂšs virtuose, sur une partition arrangĂ©e par Jorge Morel[112]. On peut noter aussi la version instrumentale de Paul Mauriat[113], typique de la variĂ©tĂ© de l'Ă©poque. Au petit matin sur France Culture, du lundi au vendredi, l'Ă©mission de Tewfik Hakem : "Le RĂ©veil culturel" s'ouvre Ă  6h05 sur un gĂ©nĂ©rique qui propose une reprise inhabituelle du thĂšme d'El cĂłndor pasa en version jazz au saxophone soprano.

Il existe aussi une version instrumentale inhabituelle pour l'auditeur occidental, car elle est entiĂšrement jouĂ©e sur des instruments traditionnels chinois par le groupe fĂ©minin chinois 12 Girls Band : les deux kenas y sont remplacĂ©es par deux dizi (flĂ»te traversiĂšre traditionnelle chinoise), ou parfois par un xiao (flĂ»te droite Ă  encoche, ancĂȘtre du shakuhachi japonais et peut-ĂȘtre de la kena) ; les cordes andines (guitare, charango et harpe andine) sont remplacĂ©es par le pĂ­pa (sorte de luth chinois traditionnel), l’erhu (Ă  deux cordes frottĂ©es), le yangqin (sorte de dulcimer chinois traditionnel Ă  cordes frappĂ©es) et le guzheng (autre sorte de cithare traditionnelle chinoise, sur table et Ă  cordes pincĂ©es)[114].

On estime Ă  plus de 4 000 les interprĂ©tations Ă  travers le monde, et Ă  300 les textes diffĂ©rents.

Au Pérou, elle a été déclarée comme appartenant au patrimoine culturel de la nation en 2004[115]. Elle y est d'ailleurs souvent considérée comme un « second hymne national »[4].

Paroles Ă©crites sur l'air de ce thĂšme

Les paroles inspirées par la version originale

Un Quechua en costume traditionnel (PĂ­sac, PĂ©rou, 2007).

Il est Ă  noter que, selon plusieurs sources[N 30], la version originale du thĂšme final El cĂłndor pasa de la Zarzuela Ă©ponyme ne comportait en 1913 aucune parole : il Ă©tait prĂ©sentĂ© en version orchestrale uniquement (orchestre classique), accompagnant les cris des personnages « nous sommes tous des condors ! », Ă©merveillĂ©s de la visite dans leur ciel, la premiĂšre depuis longtemps, d'un grand condor. Ils y voient un heureux prĂ©sage de renaissance, d'une nouvelle vie de libertĂ©, et la vision de ce condor les emplit d'espĂ©rance. C'est la derniĂšre image de la piĂšce, juste avant le dĂ©filĂ© des comĂ©diens, et ce thĂšme instrumental du Condor sert d'accompagnement Ă  la parade finale. Toutes les paroles apposĂ©es sur ce thĂšme, y compris celles en langue quechua, devraient donc ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme apocryphes, ce qui d'ailleurs ne leur retire en rien leur lĂ©gitimitĂ©... Celles qui suivent semblent les plus proches de l'esprit de la piĂšce originale, notamment pour ce qui est de la nostalgie ou d'une certaine revendication de l'identitĂ© amĂ©rindienne (le texte original est en quechua), laquelle est couplĂ©e avec l'Ă©vocation de la dimension de pĂšlerinage vers des lieux sacralisĂ©s comme le Machu Picchu. NĂ©anmoins, les paroles qui suivent ne peuvent pas ĂȘtre considĂ©rĂ©es plus que les autres comme « les "vraies" paroles de la "version originale" » ainsi qu'on le voit souvent affirmĂ© sur les disques et vidĂ©os ou recueils de paroles prĂ©sentant cette version, puisque cet air, on l'a dit, Ă©tait uniquement instrumental dans la zarzuela originelle de Robles et Baudouin.

Texte en quechua[116]Version en espagnolVersion en anglaisSens des paroles en français

Yaw kuntur llaqtay urqupi tiyaq
Maymantam qawamuwachkanki,
kuntur, kuntur

Apallaway llaqtanchikman, wasinchikman
chay chiri urqupi, kutiytam munani,
kuntur, kuntur.

(Ichaqa:)
Qusqu llaqtapim plazachallanpim
suyaykamullaway,
Machu Piqchupi Wayna Piqchupi
purikunanchikpaq.

Oh majestuoso CĂłndor de los Andes,
llévame, a mi hogar, en los Andes,
Oh CĂłndor.

Quiero volver a mi tierra querida
y vivir con mis hermanos Incas,
que es lo que mås añoro
oh CĂłndor.

(Fuga:)
En el Cusco, en la plaza principal,
espérame
para que a Machu Picchu y Huayna Picchu
vayamos a pasear.

Oh mighty condor owner of the skies,
Take me home, up into the Andes
Oh mighty condor.

I want go back to my native place
to be with my Inca brothers,
that's what I miss the most, Oh mighty Condor.

(Fuga:)
Wait for me in Cusco, in the main plaza,
so we can take a walk in Machu-Picchu
and Huayna-Picchu.

Ô majestueux condor des Andes, [souverain des cieux]
RamĂšne-moi Ă  la maison, dans les Andes
Ô [puissant] condor.

Je veux revenir à ma terre [natale] chérie
et vivre avec mes frĂšres Incas,
oui, c'est ce qui me manque le plus,
Ô condor.

(Fuga:)
Au Cuzco, sur la Grand'Place,
Attends-moi,
Alors, nous pourrons randonner
au Machu Picchu et au Huyana Picchu.

Les paroles des adaptations en français pour Marie LaforĂȘt

Les paroles de ces deux versions en français rĂ©vĂšlent une certaine authenticitĂ© autochtone allusive par l'Ă©vocation d'une dimension magique du condor et de cette musique (« accrocher le ciel Ă  mes doigts », « flĂ»te magique », « clĂ© des secrets », chemins initiatiques), de la puissance symbolique et divinatoire du rĂȘve, qui ne sont pas sans rappeler les aspects chamaniques et totĂ©miques des religions traditionnelles des Andes. Si ce n'est que le condor des Andes y est ici transformĂ© pour les besoins de la cause en « aigle noir » (qui est comme le condor un grand oiseau planeur), car l'Ă©quivalent français du condor des Andes, qui serait peut-ĂȘtre le vautour fauve, produirait probablement des connotations et un effet mĂ©taphorique dissonants par rapport au propos. Il n'y a pas non plus de citation discrĂšte, car la fameuse chanson de Barbara, L’Aigle noir, datant de 1970, est postĂ©rieure.

Les paroles de l'adaptation en anglais par Paul Simon

En 1970, ces paroles de Paul Simon s'accordent Ă  la fois avec leur temps (flower power, Ă©veil de la conscience Ă©cologique), et avec les origines andines de cette mĂ©lodie : appartenance Ă  la terre, identitĂ© amĂ©rindienne (« A man gets tied up to the ground » - "Un homme appartient Ă  sa terre", « I'd rather feel the earth beneath my feet » - "Je prĂ©fĂ©rerais sentir la terre sous mes pieds"), mĂ©lancolie (« its saddest sound » - "son chant le plus triste"), conscience Ă©cologique (« rather be a forest than a street » - "prĂ©fĂ©rer ĂȘtre une forĂȘt plutĂŽt qu'une rue", « be a sparrow » - "ĂȘtre un colibri"), et le dĂ©senchantement ou le fatalisme d'une certaine impuissance (« Yes I would, if I only could » - "Oui je le ferais, si seulement je le pouvais", et le refuge dans une fuite magique : « sail away like a swan that's here and gone » - "voguer au loin tel un cygne qui est ici et disparaĂźt soudain")... Mais ici le condor est devenu un cygne.

Les paroles de l'adaptation en italien pour Gigliola Cinquetti

Gigliola Cinquetti en 1964 Ă  seize ans au Festival de musique de San Remo.

Le thĂšme sentimental de ces paroles-ci n'est plus tellement en rapport avec sa source, si ce n'est peut-ĂȘtre « la floraison de la lune dans le dĂ©sert », et surtout la hauteur du vol du condor qui provoque sa disparition...

Les paroles de l'adaptation en espagnol pour Esther Ofarim ou PlĂĄcido Domingo

Esther Ofarim en 1971, au moment de l'enregistrement d'El cĂłndor pasa.

Cette adaptation-ci est plus en rapport avec sa source, notamment par la tournure sacrificielle du passage du condor pour l'avĂšnement d'une aube heureuse, d'un nouveau printemps de l'humanitĂ©, et l'aspect quasi messianique qu'y revĂȘt son retour (symbolisant le retour de l'Inca), et son "rĂ©veil", l'espĂ©rance de libĂ©ration et de bonheur qu'on place en lui, son lien avec le soleil (divinitĂ© principale des incas, avec Viracocha, hĂ©ros civilisateur et "christique" avant l'heure qui lui aussi se sacrifie pour une rĂ©demption et doit revenir pour inaugurer un nouvel Ăąge...). Il faut noter que celles-ci sont aussi les paroles de la version que PlĂĄcido Domingo a enregistrĂ©e, avec orchestre classique et flĂ»te de Pan, mettant en valeur son timbre de tĂ©nor lyrique.

Musique de ce thĂšme


<<
  \new ChordNames \with {
    midiInstrument = "acoustic grand"
  } \chordmode {
    \key a \minor
    \partial 4
    s4
    a2:m g:7
    c2. g4:7
    c2. g4:7
    c2. e4:7
    a2*5:m g2:7
    c2. g4:7
    c2. g4:7
    c2. e4:7
    a1*2:m
    f
    c2. g4:7
    c1
    f1*2
    c2. g4:7
    c2. e4:7
    a1*2:m
  }
  \new Staff \with {
    midiInstrument = "flute"
  } \relative c' {
    \key a \minor
    \partial 4
    e4
    a8 gis a b c b c d
    e2. g8 g
    e2. a8 g
    e2 r8 e d c
    a2. c4 a2. e4 \break
    a8 gis a b c b c d
    e2. g8 g
    e2. a8 g
    e2 r8 e d c
    a2. c4
    a2. e'4 \break
    a4. gis8 a gis a gis
    a2. c8 a
    g2 r8 g a g
    e2. c4 \break
    a'4. gis8 a gis a gis
    a2. c8 a
    g2 r8 g a g
    e2 r8 e d c
    a2. c4
    a2. \bar "|."
  }
>>

Notes et références

Notes

  1. de limeño : liménien, et limeña : liménienne, habitant(e) de Lima, ou qui appartient à Lima, la capitale du Pérou
  2. par exemple certains disques du kéniste argentin Jorge Cumbo, ancien membre de Los Incas, ou du kéniste bolivien Marcelo Peña
  3. comme certains disques du groupe hispano-argentin Ensemble La Chimera, qui mĂȘlent thĂ©orbe et viole de gambe avec kena et autres flĂ»tes des Andes, ou chant baroque avec Misa Criolla, ou certains disques parmi les derniers de Los Incas, qui reprennent aux instruments des Andes une chanson de Juan del Encina (XVe siĂšcle) : "MĂĄs vale trocar", ou encore Jorge Milchberg qui joue au charango des piĂšces de Guiraut de Bornelh (XIIe siĂšcle) ou de John Dowland (XVIe siĂšcle)
  4. (les bovins n'ayant été importés dans les Andes qu'à partir de la colonisation, avec l'art contesté de la corrida, dont les andins ont élaboré une version tout-à-fait particuliÚre)
  5. (avec plusieurs autres géoglyphes zoomorphes, dont les plus célÚbres sont les suivants : singe, jaguar, araignée, orque, héron, pélican, chien ou coyote ; sans compter les géoglyphes géométriques et autres biomorphes)
  6. [qui est d’ailleurs assez largement partagĂ©e, avec des variantes locales, par l’ensemble des populations amĂ©rindiennes prĂ©colombiennes, notamment la tripartition du monde, laquelle n’est pas sans rappeler celle qui a(vait) cours dans le monde mĂ©diterranĂ©en antique et dans le christianisme : Ciel/Terre/Enfer(s), et explique en partie la relative facilitĂ© d’élaboration et d’avĂšnement, ─malgrĂ© les tortures et intimidations de l’« extirpation des idolĂątries »─, ou la cohĂ©rence en tout cas, du syncrĂ©tisme entre religions andines et catholicisme, par une certaine parentĂ© de leurs visions du monde respectives ; nĂ©anmoins, il est difficile aujourd'hui, selon certains auteurs, de tracer exactement la ligne de partage entre ce qui relĂšve de la subsistance —bien rĂ©elle— de la cosmovision andine prĂ©colombienne, et ce qui ressortit Ă  une reconstitution a posteriori mĂȘlant des Ă©lĂ©ments chrĂ©tiens et incaĂŻques...]
  7. (parfois Ă©crit Hakaq Pacha)
  8. Voir : TranscripciĂłn del Vocabulario de la Lengua Aymara, de Ludovico Bertonio, 1612, publiĂ© en 1993 par l’"Instituto RadiofĂłnico de PromociĂłn Aymara" (IRPA : Institut radiophonique de promotion Aymara), Radio San Gabriel. RĂ©Ă©ditĂ© en 2011 par l’Institut des Langues et LittĂ©ratures Andines-Amazoniques (Instituto de las Lenguas y Literaturas Andinas-AmazĂłnicas, ILLA-A), dictionnaire Espagnol/Aymara. RĂ©Ă©ditĂ© en 2018 par Forgotten Books : (es) Ludovico Bertonio, Vocabulario de la Lengua Aymara, Vol. 1 (Classic Reprint) [« Vocabulaire de la Langue Aymara, vol.1 (rĂ©impression classique en fac-simile) »], Forgotten Books, (ISBN 978-1-333-85218-4). On trouvera un rĂ©sumĂ© en anglais de ce livre ici : (en) Ludovico Bertonio, Vocabulario De La Lengua Aymara, Part 1, Ulan Press [« Vocabulaire de la Langue Aymara, Partie 1, chez Ulan Press »],
  9. (andine avant que d’ĂȘtre la cosmovision incaĂŻque (es), car les incas sont les hĂ©ritiers de toutes les civilisations qui les ont prĂ©cĂ©dĂ©s, surtout sur cette question, ainsi que l'affirment de nombreux archĂ©ologues et anthropologues dont RafaĂ«l Karsten, La civilisation de l'Empire inca, PAYOT, coll. « Le Regard de l'Histoire », 1952, rĂ©Ă©ditĂ© en 1972, 1979, 1983 (ISBN 978-2-228-27320-6), p. 18, 29, 254 et passim)
  10. jusqu’à plus de 70 ans en captivitĂ© ! Voir notamment : Mort du plus vieux condor du monde, journal El Watan, mercredi 28 juillet 2010
  11. voir la section : "Connections between pachas" (connexions entre pachas) de l’article du wikipĂ©dia en anglais consacrĂ© au concept de Pacha (mythologie inca) (en).
  12. (La Plata : attention, il s’agit lĂ  de l’ancien nom de la ville de Sucre, capitale constitutionnelle de la Bolivie, durant la pĂ©riode de la Vice-royautĂ© du PĂ©rou, entre 1538 et 1776, et non de la ville argentine plus rĂ©cente de La Plata)
  13. note de l’auteur : Pour le mythe d’InkarrĂ­, voir Ossio J., IdeologĂ­a mesiĂĄnica del Mundo Andino, Lima, Ignacio Prado Pastor, 1973. Pour la reproduction de ce mythe dans la conscience nationale pĂ©ruvienne, voir Flores Galindo A., Buscando un Inca. Identidad y utopĂ­a en los Andes: ensayo, La Havane, Casa de las AmĂ©ricas, 1986.
  14. note de l’auteur : voir, de Wachtel Nathan, La vision des vaincus. Les Indiens du PĂ©rou devant la ConquĂȘte espagnole, Paris, Gallimard, 1971, (ISBN 2070327027 et 978-2070327027), troisiĂšme partie : « RĂ©voltes »
  15. = constitutions synodales, rĂšgles Ă©dictĂ©es par les assemblĂ©es dĂ©libĂ©ratives des Ă©vĂȘques et ecclĂ©siastiques d’une province
  16. [taqui = chant, en quechua]
  17. (Kena : flĂ»te droite Ă  encoche –sans bec, donc- et Ă  trous de jeu pour faire varier la hauteur de la note ; c'est cette flĂ»te que l'on entend, avec son timbre si particulier et riche en harmoniques, en soliste ou en duo au premier plan dans les versions de musique des Andes des annĂ©es 1950-1960 prĂ©sentant le renouvellement de ce thĂšme d'El cĂłndor pasa)
  18. (Antara : syrinx ou flûte de Pan péruvienne des Andes, à une seule rangée de tubes, alors que le siku a deux rangées de tubes complémentaires)
  19. (par exemple de culture Nazca sur la cĂŽte sud du PĂ©rou, entre -200 et 600 ap.J-C)
  20. [notamment ceux qui Ă©taient chargĂ©s de porter les priĂšres ou les hymnes aux divinitĂ©s incaĂŻques : Viracocha ou Inti le soleil, ou les Ă©popĂ©es en hommage Ă  l’Inca suprĂȘme, NDLR]
  21. Voir notamment sa remarquable traduction et son prologue d’un livre ancien de Francisco de Ávila (1598 ?), rĂ©Ă©ditĂ©e en 1992 : (es) JosĂ© MarĂ­a Arguedas, Dioses y Hombres de HuarochirĂ­ [« Des Dieux et des Hommes de HuarochirĂ­, l'une des neuf provinces de la rĂ©gion de Lima »], MĂ©xico, SIGLO XXI EDITORES, S. A. DE C. V. (1975), coll. « Ă©dition bilingue quechua/castillan », 1975-1992, rĂ©Ă©ditĂ© en 2012 avec une Ă©tude bibliographique de Pierre Duviols : (es) JosĂ© MarĂ­a Arguedas, Dioses y Hombres de HuarochirĂ­, NarraciĂłn Quechua recogida por Francisco de Ávila [« Des Dieux et des Hommes de HuarochirĂ­, rĂ©cit Quechua recueilli par Francisco de Ávila »], Instituto de Estudios Peruanos, Lima, PerĂș, , 278 p. (ISBN 978-9972-51-331-2)
  22. notamment lorsqu'il dit en nota bene, aprĂšs avoir donnĂ© un extrait de la partition de ce chant YaravĂ­ no 4, Ă  la page 16 du texte de sa confĂ©rence sur la musique Inca : « N.B. le thĂšme des trois premiĂšres mesures ne vous rappellent-elles rien? ». De mĂȘme il indique page 22 du mĂȘme texte : « El cĂłndor pasa est d'abord une mĂ©lodie andine trĂšs ancienne, sans doute d’origine prĂ©hispanique (?). Elle est (re)connue dĂšs le XVIIIe siĂšcle. Autour de 1913, le compositeur pĂ©ruvien Daniel Alomia Robles (1871 -1942) a codĂ© cette mĂ©lodie traditionnelle populaire et l'a utilisĂ©e peu ou prou comme thĂšme [arrangĂ©] pour ensemble instrumental. On la retrouve dans des partitions originales de cette Ă©poque. » Lire en ligne cette confĂ©rence (dĂ©jĂ  citĂ©e) ici : « Un cas musical : la musique Inca (et ses survivances), de Jean-Lambert Charlier », sur Centre de Recherche en Musique et Musicologie (CERMUS) –UniversitĂ© catholique de Louvain (consultĂ© le )
  23. [PrĂ©sident dĂ©mocrate du PĂ©rou, de 1912 Ă  1914, promoteur d’une loi sociale moderne favorable aux classes populaires, et donc renversĂ© par le coup d’état militaire du colonel Oscar Benavides, NDLR]
  24. Notamment (ainsi que le soutient Enrique Pinilla op. citĂ© plus haut et ci-dessous) d'un chant d'amour de la province de Jauja, oĂč Robles a longtemps sĂ©journĂ© et y a rencontrĂ© sa premiĂšre femme, chant dont le titre en quechua est “Huk urpichatam uywakarkani”, citĂ© dans le cĂ©lĂšbre livre des Ă©poux d'Harcourt La Musique des Incas et ses survivances, exemple musical no 47, page 303, publiĂ© Ă  Paris en 1925 Ă  la Librairie orientaliste Paul Geuthner, soit douze ans aprĂšs la premiĂšre de la piĂšce de Robles et Baudouin Ă  Lima. Voir : « Catalogue GĂ©nĂ©ral de la BibliothĂšque nationale de France, Notice bibliographique numĂ©ro : FRBNF32222188 », sur catalogue.bnf.fr (consultĂ© le )
  25. Enrique Pinilla : « Los tres primeros compases de la canciĂłn jaujina son idĂ©nticos, pero luego la melodĂ­a cambia totalmente. Por ello, no se puede decir que no haya autĂ©ntica creaciĂłn, como variaciĂłn de un tema popular, por parte de AlomĂ­a Robles », (La MĂșsica en la RepĂșblica, Siglo XX, "La MĂșsica en el PerĂș". Patronato Popular y Porvenir Pro-MĂșsica ClĂĄsica, Lima 1985, pp.139-140). [Traduction] : « Les trois premiĂšres mesures de la chanson de Jauja sont identiques [Ă  celles du thĂšme d'El CĂłndor pasa], mais ensuite la mĂ©lodie change totalement. Pour cela, on ne peut pas dire qu'il n'y aurait pas crĂ©ation authentique, comme variation d'un thĂšme populaire, de la part d'AlomĂ­a Robles. » L'apport par Milchberg de quelques notes et d'une introduction nouvelle Ă  la mĂ©lodie de Robles, quoique plus modeste, ainsi que l'instrumentation autochtone de cet air par Galeazzi et Milchberg, peuvent alors aussi ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme une crĂ©ation, et reprĂ©sentent Ă  tout le moins une contribution non nĂ©gligeable Ă  la renommĂ©e de ce thĂšme.
  26. ...n'oublions pas qu'Ă  l'Ă©poque les capacitĂ©s d'investigation surmultipliĂ©es d'internet n'existaient pas encore. Par ailleurs, Jorge Milchberg avait lui aussi effectuĂ© des collectes dans les Andes, plus de 30 ans aprĂšs celles plus approfondies de Robles, et avait peut-ĂȘtre pu entendre le thĂšme du Condor jouĂ© par des fanfares de village. Ceci explique la prĂ©sentation qui en est faite par lui sur la pochette du disque de la version originale de Los Incas en 1963 : AmĂ©rique du Sud, chez Philips no 844.879 BY, reliant le thĂšme Ă  la rĂ©volte indienne de TĂșpac Amaru II contre les espagnols au XVIIIe siĂšcle.
  27. Voir à ce sujet la section de l'article "El cóndor pasa
" du Wikipédia en espagnol consacrée aux versions et adaptations.
  28. (sous le Label JOM (initiales de James O'Maoilearca) – rĂ©fĂ©rence n° JOM – 1027 – 2 ShamLys Production)
  29. sur le label des Disques Barclay, no 920.199 T, présenté par Paris Zurini citant Atahualpa Yupanqui
  30. C'est notamment le cas pour l'article du wiki en espagnol, qui réaffirme plusieurs fois que la version originale était uniquement instrumentale et ne comportait aucune parole (voir par exemple la fin de la premiÚre section sur l'histoire de ce thÚme) ; on peut aussi le voir sur les vidéos de la version originale reconstituée en 2013 à Lima, pour le centenaire de la piÚce, dont les liens sont disponibles ci-dessous dans la section "liens externes".

Références

  1. voir notamment sur ce sujet l'article de Gérard Borras, paru dans le numéro 58 de la revue Caravelle (Cahiers du monde hispanique et luso-brésilien) consacré à « L'image de l'Amérique latine en France depuis cinq cents ans », année 1992, pp. 141-150 : « La « musique des Andes » en France : "l'Indianité" ou comment la récupérer », sur Persée (consulté le )
  2. Voir aussi l’article de Xavier Bellenger, dans la mĂȘme revue Caravelle (Cahiers du monde hispanique et luso-brĂ©silien) annĂ©e 1985, no 44 consacrĂ© Ă  la Bolivie, pp. 27-31 « Musique andine, Ă  la recherche du sens perdu », sur PersĂ©e, (consultĂ© le )
  3. « LA GRAND CROIX DU CONDOR DES ANDES, SYMBOLE DE L’AMITIE ENTRE LA BOLIVIE ET L’ONU, DECERNEE AU SECRETAIRE GENERAL, et la fameuse chanson andine «El Condor Pasa», 13 novembre 2003 », sur Nations Unies, couverture des rĂ©unions & communiquĂ©s de presse (consultĂ© le )
  4. sur la dimension patrimoniale et emblĂ©matique d'El cĂłndor pasa, voir notamment la premiĂšre section de l'article du WikipĂ©dia en espagnol sur le mĂȘme thĂšme, ainsi que : (es) La RepĂșblica, « "El cĂłndor pasa" patrimonio cultural de la naciĂłn » [« "El cĂłndor pasa", patrimoine culturel de la nation »], (consultĂ© le )
  5. « Condor des Andes (Vultur gryphus) », sur Manimal World (consulté le )
  6. On trouvera un rĂ©sumĂ©, un compte-rendu critique et de nombreux extraits de ce roman, ainsi qu’une prĂ©sentation de ce rituel ici : « Yawar fiesta (La fĂȘte du sang) de JosĂ© MarĂ­a Arguedas », sur Babelio (consultĂ© le )
  7. JosĂ© MarĂ­a Arguedas, Yawar fiesta (la fĂȘte du sang), MĂ©tailiĂ©, coll. « BibliothĂšque hispano-amĂ©ricaine », , 201 p. (ISBN 978-2-86424-369-4)
  8. Claire Jozan-Meisel et MaĂŻtie TrĂ©laĂŒn, « SpiritualitĂ© Inca : 3 animaux pour 3 niveaux de conscience », sur NaĂźtre Femme (consultĂ© le )
  9. « "ConquĂȘte, conversion, et rites funĂ©raires dans les Andes pĂ©ruviennes aux 16e-17e siĂšcles", article d’Isabelle Poutrin, paru le 31 mars 2017 », sur ANR (agence nationale de la recherche, Fr.) (consultĂ© le )
  10. « Le condor des Andes », sur Passions et Partage (consulté le )
  11. « Religion et cosmogonie inca », sur PerĂș ExcepciĂłn (consultĂ© le )
  12. Guillaume Brodeur, « La citĂ© des lamas sacrĂ©s », sur L’actualitĂ©/monde (magazine), (consultĂ© le )
  13. Alfred Métraux, Les Incas, Paris, Seuil, coll. « Points Histoire », 1961 et 1983 (réédition augmentée), 190 p. (ISBN 978-2-02-006473-6 et 2-02-006473-1), p. 122
  14. Nicolas Goronflot, « Chacana, la croix des Andes », sur Terra andina Ecuador (consulté le )
  15. Dr_Atuq_Eusebio_Manga_Qespi1994">(es) Dr Atuq Eusebio Manga Qespi, « Pacha: un concepto andino de espacio y tiempo » [« Pacha, un concept andin d’espace-temps »], sur Revista española de AntropologĂ­a Americana, no 24, p. 155–189. Edit. Complutense, Madrid., (consultĂ© le )
  16. Dictionnaire Quechua - Espagnol - Quechua, Academía Mayor de la Lengua Quechua, Gouvernement régional de Cuzco, Cuzco 2005 (dictionnaire Espagnol-Quechua)
  17. (en) Mary Strong, Art, Nature, Religion in the Central Andes [« Art, Nature, Religion dans les Andes Centrales »], University of Texas Press (Austin, Texas), (ISBN 978-0-292-75425-6). On trouvera de larges extraits de ce livre ici : (en) Mary Strong, Art, Nature, Religion in the Central Andes
  18. (en) Paul Richard Steele, Handbook of Inca Mythology [« Manuel de Mythologie Inca »], ABC-CLIO, , 319 p. (ISBN 978-1-57607-354-4, lire en ligne). On trouvera de larges extraits de ce livre ici : (en) Paul Richard Steele, Handbook of Inca Mythology [« Manuel de Mythologie Inca »],
  19. « La cosmovision andine des Kallawaya », sur Unesco, (consulté le )
  20. Rafaël Karsten, La civilisation de l'Empire inca, PAYOT, coll. « Le Regard de l'Histoire », 1952, réédité en 1972, 1979, 1983 (ISBN 978-2-228-27320-6), p. 26
  21. Olga M. Gonzalez, Unveiling Secrets of War in the Peruvian Andes [« Pour dévoiler les secrets de la guerre dans les Andes péruviennes (sur la guérilla maoïste du groupe Sentier Lumineux, et ses racines autochtones éventuelles) »], University of Chicago Press, , 307 p. (ISBN 978-0-226-30271-3, lire en ligne). On pourra lire la quatriÚme de couverture de cet ouvrage ici : Olga M. Gonzalez, Unveiling Secrets of War in the Peruvian Andes, .
  22. Voir l’extrait de la prĂ©face de Mario Vargas Llosa Ă  Diamants et silex (roman de JosĂ© MarĂ­a Arguedas), qui aborde cette question de l’animisme latent dans les Andes, extrait qu’on pourra lire ici avec de larges extraits du roman lui-mĂȘme montrant que la musique exprime la communion avec la nature des populations autochtones (voir la 2e critique du 24 octobre 2014) : Mario Vargas Llosa sur JosĂ© MarĂ­a Arguedas, « Diamants et silex », sur Babelio, (consultĂ© le ).
  23. Lire ce passage du roman ici : JosĂ© MarĂ­a Arguedas, « Extrait de Yawar fiesta (La fĂȘte du sang, chapitre 2 : le dĂ©pouillement, 4/4) SUITE 3 et FIN », sur Babelio, (consultĂ© le ).
  24. (es) Luz Ángeles et Edgar Espinoza, « La mística de la quena » [« La mystique de la kena »], sur Edgar Espinoza E, (consulté le ).
  25. On pourra lire l’intĂ©gralitĂ© de l’article sur la lĂ©gende du Manchay-Puito, d’oĂč est extrait cette citation, ici : Nicole FourtanĂ©, « La lĂ©gende du « Manchay-Puito », creuset de traditions complexes [article] », sur persĂ©e, (consultĂ© le ).
  26. Notre traduction de : (es) Max Calloapaza Ortega citant Arturo Jiménez Borja, « La Quena », sur Andean journey (voyage dans les Andes), (consulté le )
  27. On trouvera sur le remarquable site de Paco JimĂ©nez une photo d'une sĂ©pulture prĂ©colombienne montrant le squelette d'une personne enterrĂ©e avec des flĂ»tes kenas confectionnĂ©es dans les os de ses ancĂȘtres, ici : (es) Paco JimĂ©nez, « OrganologĂ­a de los Instrumentos Andinos de Viento # Quenas » [« organologie des instruments Ă  vent des Andes # Quenas »], sur Pacoweb MĂșsica Andina (consultĂ© le ).
  28. (qu + es) Paco JimĂ©nez, « Leyenda del Manchay Puitu » [« La lĂ©gende du Manchay Puitu (caverne tĂ©nĂ©breuse) »], sur Pacoweb MĂșsica Andina, (consultĂ© le ).
  29. voir la section TradiciĂłn de l’article du WikipĂ©dia en espagnol consacrĂ© Ă  ce thĂšme du Manchay Puito (es). Voir aussi, sur le site d’une association localisĂ©e dans un autre des districts possibles d’origine de la lĂ©gende (Province de Condesuyos dans le sud du PĂ©rou), une version passablement diffĂ©rente et peut-ĂȘtre plus historique du Manchay Puitu : (es) « Origen Milenario de la creaciĂłn de los pueblos de Andaray, Yanaquihua, Salamanca y Chichas » [« Origine millĂ©naire de la crĂ©ation des villages d’Andaray, Yanaquihua, Salamanca et Chichas [et aussi Huamanmarca, village disparu] »], sur AsociaciĂłn residentes del distrito de Andaray en Lima [Association des habitants du district d’Andaray dans la rĂ©gion de Lima] (consultĂ© le ).
  30. On trouvera un rĂ©sumĂ© de la lĂ©gende du Manchay Puitu, le texte du poĂšme en quechua traduit en espagnol et des illustrations du jeu de la Kena dans une jarre sur le remarquable site de Paco JimĂ©nez dĂ©jĂ  citĂ©, ici : (qu + es) Paco JimĂ©nez, « Leyenda del Manchay Puitu » [« La lĂ©gende du Manchay Puitu (caverne tĂ©nĂ©breuse) »], sur Pacoweb MĂșsica Andina, (consultĂ© le ).
  31. dont la traduction en français est disponible ici : Ricardo Palma, « Traditions péruviennes », sur le comptoir des presses d'universités, (consulté le ) et les références de cette édition en français sont : Ricardo Palma, Traditions péruviennes (traduit, présenté et complété par Bernard Lavallé), Presses universitaires de Bordeaux, coll. « Numéro 84 », , 256 p. (ISBN 978-2-909596-26-6), p. 256 (nb de pages).
  32. Voir le texte intĂ©gral de cette lĂ©gende, en espagnol, avec d’autres contes populaires, ici : (es) Ricardo Palma, « Tradiciones peruanas. Cuarta serie. El Manchay-Puito. » [« Traditions pĂ©ruviennes, quatriĂšme sĂ©rie, Le Manchay-Puito »], sur Biblioteca virtual Miguel de Cervantes (consultĂ© le ). Ce texte a d’ailleurs Ă©tĂ© repris sur le projet Wikisource en espagnol, ici : (es) Ricardo Palma, « El Manchay-Puito » [« Le Manchay-Puito »], sur Wikisource, un projet Wikimedia, (consultĂ© le ).
  33. Magda von der Heydt-Coca, « When Worlds Collide: The Incorporation Of The Andean World Into The Emerging World-Economy In The Colonial Period » [« Quand les mondes entrent en collision : l’incorporation du monde andin dans l’économie-monde pendant la pĂ©riode coloniale »], Revue : Dialectical Anthropology, vol. 24-1,‎ , p. 1–43. On trouvera un rĂ©sumĂ© de cet article ici : (fr + en) Magda von der Heydt-Coca, « When Worlds Collide », sur ResearchGate, (consultĂ© le ). Et on trouvera l’introduction de cet article ici : (en) Magda von der Heydt-Coca, « When Worlds Collide », sur JSTOR, (consultĂ© le )
  34. MarĂ­a Rostworowski (trad. de l'espagnol), Le grand Inca : PachacĂștec Inca Yupanqui, Paris, Editions Tallandier, coll. « MODERNE », , 351 p. (ISBN 978-2-84734-462-2 et 2-84734-462-4). On pourra lire en ligne d'autres extraits du mĂȘme ouvrage ici : MarĂ­a Rostworowski, « Le grand Inca : PachacĂștec Inca Yupanqui », sur Google livres (consultĂ© le )
  35. Henri Favre, Les Incas, Paris, Presses Universitaires de France, coll. « Que sais-je ? no 1504 », 1972, 9e édition : 2011, 127 p. (ISBN 978-2-13-059075-0)
  36. Alfred Métraux, Les Incas, Seuil, coll. « Points Histoire », (ISBN 978-2-02-006473-6), pp. 154 à 163
  37. Voir aussi : Ethnosociologie du refus ; rĂ©sistances, rĂ©voltes et insurrections indiennes paysannes (numĂ©ro spĂ©cial des Cahiers des AmĂ©riques latines), Paris, Institut des hautes Ă©tudes de l’AmĂ©rique latine, 1981. Ouvrage collectif sous la direction d’Henri Favre.
  38. « Mythe, utopie et contre-utopie dans les Andes : La figure de l'Inca, article de Nicole Fourtané América. Cahiers du CRICCAL, année 2004, no 32 (Utopies en Amérique latine), pp. 53-68 », sur Persée (consulté le )
  39. « Le retour des vaincus : la ville impĂ©riale des nĂ©o-Incas d’Antoinette MoliniĂ©, in Au miroir de l’anthropologie historique, MĂ©langes offerts Ă  Nathan Wachtel ouvrage collectif », sur Presses universitaires de Rennes (consultĂ© le ).
  40. sur ce sujet du messianisme dans les Andes Ă  l’époque de la conquĂȘte espagnole, voir les rapports au roi et rĂ©cits sur le rituel et les rĂ©voltes indiennes du Taki Unquy, au XVIe siĂšcle, par CristĂłbal de Albornoz (es) « l’extirpateur des idolĂątries », rĂ©Ă©ditĂ© et prĂ©facĂ© par Ladislao Landa en 2018 : (es) CristĂłbal de Albornoz, Mesianismo y UtopĂ­a en AmĂ©rica : PerĂș, Siglo XVI, informaciones de CristĂłbal de Albornoz [« Messianisme et Utopie dans le PĂ©rou du XVIe siĂšcle, rapports de CristĂłbal de Albornoz »], CreateSpace Independent Publishing Platform, (ISBN 978-1-9835-4634-1), en extraits ici : (es) Mesianismo y UtopĂ­a en AmĂ©rica: PerĂș, Siglo XVI [« Messianisme et Utopie dans le PĂ©rou du XVIe siĂšcle »]
  41. et au sujet du messianisme dans les Andes tout au long de l’histoire jusqu’à nos jours, voir comme ouvrage de rĂ©fĂ©rence : (es) Juan Manuel Ossio, EL MESIANISMO ANDINO [« Le messianisme andin »], TROTTA, coll. « Enciclopedia IberoAmericana de las Religiones [EncyclopĂ©die IbĂ©ro-AmĂ©ricaine des Religions] », , ebook PDF – DRM, en rĂ©sumĂ© ici : (es) Juan Manuel Ossio, « El mesianismo andino » [« Le messianisme andin »], sur Casa del Libro, (consultĂ© le )
  42. (fr + es) « Mythe, utopie et contre-utopie dans les Andes, par Nicole FourtanĂ©, revue "AmĂ©rica, les Cahiers du CRICCAL", AnnĂ©e 2004 no 32 », sur PersĂ©e (consultĂ© le ), pp. 54, 63 et 64
  43. (fr + es) « Mythe, utopie et contre-utopie dans les Andes, par Nicole FourtanĂ©, revue "AmĂ©rica, les Cahiers du CRICCAL", AnnĂ©e 2004 no 32 », sur PersĂ©e (consultĂ© le ), p. 63
  44. (es) Luis Eduardo ValcĂĄrcel, Etnohistoria del PerĂș Antiguo, historia del PerĂș de los Incas (Lima, 1959) [« Ethnohistoire du PĂ©rou ancien (histoire du PĂ©rou des Incas) »], UNMSM et Fondo de Cultura EconĂłmica (2013), rĂ©Ă©d. 1963 et 1967, 227 p. (ISBN 978-9972-663-70-3), pp. 150, 152, 195
  45. (fr + es) « Mythe, utopie et contre-utopie dans les Andes, par Nicole FourtanĂ©, revue "AmĂ©rica, les Cahiers du CRICCAL", AnnĂ©e 2004 no 32 », sur PersĂ©e (consultĂ© le ), p. 62
  46. (es) JosĂ© MarĂ­a Arguedas, Tres versiones del mito de InkarrĂ­, in Juan Ossio Acuña : IdeologĂ­a mesiĂĄnica del mundo andino [« Trois versions du mythe d'InkarrĂ­ in Juan Ossio Acuña (anthropologue et ancien ministre de la culture du PĂ©rou) : IdĂ©ologie messianique du monde andin »], EdiciĂłn de Ignacio Prado Pastor, Lima, , pp. 221 – 223
  47. Judith Blanes, « En Équateur, des ruines pourraient abriter la momie du dernier Inca, pour Tamara Estupiñån Viteri », sur revue Sciences Humaines, (consultĂ© le )
  48. sur ce thĂšme, voir : « Rito y milenarismo en los Andes, del Taki Onqoy a InkarrĂ­ » [rite et millĂ©narisme dans les Andes, du Taki Unquy (maladie du chant : rĂ©bellion religieuse des Indiens au XVIe siĂšcle) jusqu’à InkarrĂ­], revue Allpanchis no 10, 1977, p. 84. Et aussi « Inka est le modĂšle originaire de tout ĂȘtre », comme l’affirmaient les Indiens de Canas Ă  JosĂ© MarĂ­a Arguedas, citĂ© par Nicole FourtanĂ©, op. cit. p. 53 : « Mythe, utopie et contre-utopie dans les Andes : La figure de l'Inca », sur PersĂ©e (consultĂ© le )
  49. Jean-Christophe Victor, Virginie Raisson et Frank TĂ©tart, Le Dessous des cartes : Atlas gĂ©opolitique, Éditions Tallandier / ARTE Éditions, 2005 (1re Ă©dition).
  50. « Pachacuti, par Pierre-Olivier Combelles », sur Le Rouge et le Blanc (consulté le )
  51. Rosaleen Howard-Malverde, La conceptualisation de la parole et du silence dans la construction de l'identité quechua, Journal de la société des américanistes, numéro 76, (lire en ligne), pp. 105-120
  52. « Le PACHAKUTI et la rĂ©volution en marche, article de Jean Ortiz dans la section « Chroniques Latines » », sur L’HumanitĂ©, (consultĂ© le )
  53. Sur ce sujet, voir en tant qu’ouvrage de rĂ©fĂ©rence : Pierre Duviols, La lutte contre les religions autochtones dans le PĂ©rou colonial : l'extirpation de l'idolĂątrie entre 1532 et 1660, Toulouse, Presses Univ. du Mirail, 2008, article 1572, premiĂšre Ă©dition : 1971, 414 p. (ISBN 978-2-85816-960-3, prĂ©sentation en ligne)
  54. Sur « l’extirpation des idolĂątries », voir aussi ce livre saluĂ© par Claude LĂ©vi-Strauss : Alfred MĂ©traux, Les Incas, Seuil, coll. « Points Histoire », (ISBN 978-2-02-006473-6), pp. 150 Ă  152, ainsi que le livre-phare de Nathan Wachtel : Nathan Wachtel, La Vision des vaincus (les Indiens du PĂ©rou devant la conquĂȘte espagnole), Gallimard, coll. « Folio Histoire », , 395 p. (ISBN 978-2-07-032702-7)
  55. Alfred Métraux, op. cité : Alfred Métraux, Les Incas, Seuil, coll. « Points Histoire », (ISBN 978-2-02-006473-6), p. 151
  56. Sur le mythe du retour de l’Inca et la rĂ©pression des instruments culturels de l’identitĂ© amĂ©rindienne, voir : Carmen Bernand, Les Incas, peuple du soleil, Gallimard, coll. « DĂ©couvertes », (ISBN 978-2-07-053060-1) et encore Alfred MĂ©traux, op. citĂ© : Alfred MĂ©traux, Les Incas, Seuil, coll. « Points Histoire », (ISBN 978-2-02-006473-6), pp. 154 Ă  184
  57. Voir ici la comparaison des dĂ©marches des deux auteurs : (es) La RepĂșblica, article de Pedro Escribano, « "El cĂłndor pasa" patrimonio cultural de la naciĂłn » [« El CĂłndor pasa patrimoine culturel de la nation »], (consultĂ© le ).
  58. Voir ici notamment les entrĂ©es consacrĂ©es Ă  D. A. Robles et aux Ă©poux d’Harcourt(es) Cantera de sonidos : « el sonido (y el silencio) es creaciĂłn » [le son/la musique (et le silence) est crĂ©ation], « Breves notas para una visiĂłn general de la mĂșsica indĂ­gena y mestiza, de Marcela Conejo » [« Courtes notes pour un panorama gĂ©nĂ©ral de la musique indigĂšne et mĂ©tisse, par Marcela Conejo »], (consultĂ© le )
  59. On trouvera un rĂ©sumĂ© rĂ©digĂ© par Marguerite BĂ©clard d’Harcourt elle-mĂȘme, hĂ©las en espagnol, de cet ouvrage difficile Ă  se procurer ou Ă  consulter, ici : (es) Marguerite BĂ©clard d’Harcourt publiĂ© Ă  Paris en 1929 dans la revue La Gaceta Musical, « Âż Existe una mĂșsica incaica ? » [« Existe-t-il une musique incaĂŻque ? »] [PDF], (consultĂ© le )
  60. Voir notamment les pages 15 et 16 de : « Un cas musical : la musique Inca (et ses survivances), de Jean-Lambert Charlier », sur Centre de Recherche en Musique et Musicologie (CERMUS) –UniversitĂ© catholique de Louvain (consultĂ© le )
  61. Voir aussi le livre de Xavier Bellenger, qui pose la mĂȘme question, Ă  savoir : « existe-t-il toujours dans les Andes des expressions musicales qui plongent leurs racines dans l’époque prĂ©colombienne et procĂšdent d’un art antique dont la signification s’est perdue ? », dont on lira de larges extraits ici : (es) IFEA : Institut français d’études andines, OpenEdition books, « El espacio musical andino, modo ritualizado de producciĂłn musical en la isla de Taquile y en la regiĂłn del lago Titicaca » [« l’espace musical andin, mode ritualisĂ© de production musicale dans l’üle de Taquile et la regiĂłn du Lac Titicaca »], (consultĂ© le ).
  62. dont on pourra lire "l’épopĂ©e" et les Ă©pisodes quasi lĂ©gendaires, illustrant l'effervescence musicale nouvelle, nĂ©e des musiques latino-amĂ©ricaines, qui s'Ă©panouissait autour du cabaret (ou peña) L’Escale au no 15 de la Rue Monsieur le Prince, au Quartier Latin (ou "Barrio Latino", le bien nommĂ© !) ici : « La quena Ă  Paris. MĂ©moire d'un passionnĂ© », sur Maison Orange, Salsa et danses du monde (consultĂ© le ). Voir notamment le § "Los Incas : Ă  l'origine de la musique andine Ă  Paris".
  63. Professeur Ramón Rupac Inclan, Méthode de Flûte des Andes Kena, PAUL BEUSCHER, coll. « ArpÚge », , pp. 2 et 3.
  64. Par exemple, Tino Brodard affirme : « La quena es el instrumento musical Inca por antonomasia » [trad. : La quena est l'instrument musical Inca par antonomase (ou par excellence)] Ă  consulter ici : (es) Tino Brodard, « MĂșsica andina - Instrumentos de viento - La Quena o Kena » [« Musique andine - Instruments Ă  vent - La Quena ou Kena »], sur Tino Brodard - MĂșsica Andina y Latinoamericana (consultĂ© le )
  65. On pourra voir notamment une antara de culture Nazca, Ă  10 tubes, en terre cuite, ici page 18 : (en) Dale A. Olsen, « Studying Latin American Music - Introduction to the Music Cultures of the Region » [« Étude de la Musique Latino-amĂ©ricaine - Introduction aux cultures musicales de la rĂ©gion »] (consultĂ© le ), p. 18
  66. Voir passim plusieurs photos d'instruments prĂ©colombiens, et notamment une figurine de joueur d'antara sur une bouteille sifflante en cĂ©ramique de culture Moche (-100 Ă  600 ap. J.-C.), ici page 25 : (en) Dale A. Olsen, « Studying Latin American Music - Introduction to the Music Cultures of the Region » [« Étude de la Musique Latino-amĂ©ricaine - Introduction aux cultures musicales de la rĂ©gion »] (consultĂ© le ), p. 25
  67. Voir ici une photographie de Kenas anciennes prise au Museo de Instrumentos Precolombinos de Aguas Calientes [MusĂ©e d'instruments prĂ©colombiens d'Aguas Calientes, village le plus proche du Machu Picchu ], Cuzco - PĂ©rou(es) Tino Brodard, « Acerca de mi - Instrumentos » [« À propos de moi - mes instruments »] (consultĂ© le )
  68. « musique des Incas, in Dictionnaire Larousse de la musique », sur Encyclopédie Larousse (consulté le )
  69. Alfred Métraux, Les Incas, Paris, Seuil, coll. « Points-Histoire H66 », 1961 et 1983 (réédition augmentée), 190 p. (ISBN 978-2-02-006473-6 et 2-02-006473-1), pp. 114-115
  70. Voir notamment Hommage à Alfred Métraux [note biographique] par Claude Lévi-Strauss, Claude Tardits, Georges-Henri RiviÚre, Michel Leiris et Roger Bastide ici : Claude Lévi-Strauss et alii, « Hommage à Alfred Métraux », sur Persée, (consulté le )
  71. (en) The New York Times, « Untangling an Accounting Tool and an Ancient Incan Mystery » [« dĂ©chiffrer/dĂ©sembrouiller/dĂ©mĂȘler/dĂ©nouer un outil comptable et un ancien mystĂšre inca »], (consultĂ© le ).
  72. Rafaël Karsten, La civilisation de l'Empire inca, PAYOT, coll. « Le Regard de l'Histoire », v.o. en 1948, en français : 1952, réédité en 1972, 1979, 1983 (ISBN 978-2-228-27320-6), pp. 128 à 137, Chapitre X : "Les Incas savaient-ils écrire?",
  73. Voir notamment ses ouvrages : -(en) Gary Urton (Les signes du Quipu Inca : un code binaire dans les archives mĂ©morielles des cordes nouĂ©es andines), Signs of the Inka Khipu : Binary Coding in the Andean Knotted-String Records, University of Texas Press (Austin), , 202 p. (ISBN 0-292-78540-2 et 978-0292785403, lire en ligne). Édition en espagnol : Signos del Quipu Inka, CĂłdigo Binario. Cuzco: Centro BartolomĂ© de las Casas ed. (2005). On en lira de larges extraits ici : Gary Urton, Signs of the Inka Khipu, . Ainsi que : -The Khipus of Laguna de los CĂłndores / Los Quipus de la Laguna de los CĂłndores [Les Quipus de la Lagune des Condors]. Forma e ImĂĄgen ed. (2008, Lima). Et enfin : (en) Gary Urton, Inka History in Knots : Reading Khipus as Primary Sources [« L'Histoire des Incas par les nƓuds : lire les quipus comme des sources primaires »], Austin, TX, University of Texas Press, , 319 p. (ISBN 978-1-4773-1199-8 et 1-4773-1199-8, lire en ligne), on en lira de larges extraits ici : Gary Urton, Inka History in Knots, . Voir aussi le site : (en + es) Gary Urton & Carrie Brezine, « The People behind the Project » [« Les gens qui sont derriĂšre le projet »], sur Khipu Database Project, (consultĂ© le )
  74. Voir : (en) site personnel officiel, « Sabine Hyland », (consultĂ© le ), ainsi que l'article : (en) Daniel Cossins, « We thought the Incas couldn’t write. These knots change everything » [« Nous pensions que les Incas ne pouvaient Ă©crire. Ces nƓuds changent tout »], New Scientist,‎ (lire en ligne, consultĂ© le ).
  75. Alfred MĂ©traux, Les Incas, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points-Histoire H66 », 1961 et 1983 (rĂ©Ă©dition augmentĂ©e), 190 p. (ISBN 978-2-02-006473-6 et 2-02-006473-1), p. 114, §2
  76. Voir notamment son Ă©tude en 1935 sur les Indiens Uro-Chipaya de la Province de Carangas dans le DĂ©partement d'Oruro, prĂšs du Lac Poopo en Bolivie, avec ses pages consacrĂ©es aux instruments de musique, que l'on peut consulter intĂ©gralement en deux parties, ici : Alfred MĂ©traux, « Les Indiens Uro-Čipaya de Carangas [article], Journal de la sociĂ©tĂ© des amĂ©ricanistes - AnnĂ©e 1935, Tome 27 no 1, pp. 111-128 », sur PersĂ©e, (consultĂ© le ) et ici : Alfred MĂ©traux, « Les Indiens Uro-Čipaya de Carangas [suite], Journal de la sociĂ©tĂ© des amĂ©ricanistes - AnnĂ©e 1936, Tome 28 no 1, pp. 155-208 », sur PersĂ©e, (consultĂ© le )
  77. Gary Urton, Mythes incas, Seuil, coll. « Points - Sagesse », (ISBN 978-2-02-057340-5)
  78. Alfred Métraux, Les Incas, Seuil, coll. « Points Histoire », 1961 et 1983 (réédition augmentée) (ISBN 978-2-02-006473-6), pp. 111 à 114
  79. On trouvera une description prĂ©cise des Ă©chelles et des modes pentatoniques andins, inspirĂ©e d'ailleurs de l'Ă©tude des Ă©poux d'Harcourt et de Robles, sur le site de Paco JimĂ©nez dĂ©jĂ  citĂ©, ici : (es) Paco JimĂ©nez, « PentatonĂ­a andina, Escalas PentatĂłnicas » [« Pentaphonie andine (Ă©chelles pentatoniques) »], sur Pacoweb MĂșsica andina (consultĂ© le ).
  80. Voir cette thÚse développée par Enrique Pinilla ici : (es) Criollos peruanos, « Daniel Alomía Robles », (consulté le )
  81. (es) El Comercio, « "Ella me lo cuenta todo", semblanza Daniel AlomĂ­a Robles, los 65 años de su muerte » [« "Elle m’a tout racontĂ©", biographie de D.A. Robles, 65e anniversaire de sa mort »], (consultĂ© le ).
  82. On trouvera cette belle aventure contĂ©e par Daniel AlomĂ­a Robles lui-mĂȘme sur ces deux liens diffĂ©rents : (es) Ernesto More, « Con Daniel AlomĂ­a Robles (charla retrospectiva) » [« Avec Daniel AlomĂ­a Robles (entretien rĂ©trospectif) »], sur cantera de sonidos, (consultĂ© le ) et (es) « Apuntes. Historia de HuĂĄnuco, Revista antolĂłgica no 4, pp. 15-23, "Daniel AlomĂ­a Robles en primera persona" » [« Notes. Histoire de HuĂĄnuco, Revue anthologique no 4, pp. 15-23, "Daniel AlomĂ­a Robles Ă  la premiĂšre personne" »], sur Cantera de canterurĂ­as, (consultĂ© le ).
  83. (es) Marcela Cornejo, « Daniel Alomía Robles en primera persona » [« Daniel Alomía Robles à la premiÚre personne, § 4 »], sur cantera de sonidos, (consulté le )
  84. philosophe et poÚte péruvien, auteur d'essais, théoricien radical puis idéologue anarchiste, NDLR
  85. Texte original de la citation : « Este argumento resultĂł ser revolucionario por su carĂĄcter polĂ­tico contra el imperialismo yanqui. El libretista de 'El cĂłndor pasa' [Julio Baudouin] seguramente habĂ­a leĂ­do a Gonzales Prada Manuel GonzĂĄlez Prada (1844 - 1918), que afirmĂł: 'No veamos, pues, en la cuestiĂłn indĂ­gena una crisis provincial y pasajera sino un problema nacional y permanente'...'La palabra que se dirija hoy a nuestro pueblo debe despertar a todos, poner en pie a todos, agitar a todos como una campana de incendio en avanzadas horas de la noche' » Fuente: PINILLA, Enrique. La MĂșsica en la RepĂșblica. Siglo XX. En "La MĂșsica en el PerĂș". Patronato Popular y Porvenir Pro-MĂșsica ClĂĄsica, Lima 1985. pp.139-140 "
  86. Texte original de la citation : : « Este planteamiento desarrollado en la zarzuela era de una novedad absoluta en el teatro, si bien había sido ya tratado en las novelas romånticas de Aréstegui, Mercedes Cabello de Carbonera y Clorinda Matto de Turner, pero en 1913 y bajo la presidencia de Guillermo Enrique Billinghurst fue de un impacto fulminante. En el teatro Mazzi se dio tres mil veces a lo largo de cinco años. »
  87. (es) Julio Baudouin, El cóndor pasa..cien años después..., Colectivo Cultural Centenario "El Cóndor Pasa", (ISBN 978-612-46472-0-8, lire en ligne).
  88. On pourra Ă©couter ces sept piĂšces musicales ici : (es) « El CĂłndor Pasa...Original ÂĄÂĄPrimicia Mundial!!. 7 Partes Musicales... » [« El CĂłndor Pasa, l’original en premiĂšre mondiale ! Les 7 parties musicales »], sur YouTube (consultĂ© le )
  89. On pourra voir la vidéo de cette commémoration ici : (es) « El Cóndor Pasa...Zarzuela Completa...Daniel Alomía Robles », sur YouTube (consulté le )
  90. On pourra entendre cette premiÚre version historique ici : (es) « El cóndor pasa... 1958. Primera versión folclorizada. Ensamble Achalay. », sur YouTube (consulté le )
  91. Cette version originale par Los Incas, la plus cĂ©lĂšbre de toutes, car elle a aussi accompagnĂ© la version chantĂ©e par Simon & Garfunkel, peut ĂȘtre Ă©coutĂ©e en ligne ici : « Los Incas - El condor pasa », sur Daily Motion (consultĂ© le )
  92. CD qu'on pourra écouter ici : Los Incas, « " AMERIQUE DU SUD " (Disco completo) », sur YouTube, (consulté le )
  93. On pourra entendre leur célÚbre version accompagnée par Los Incas ici : (en) « El condor pasa (if I could) », sur YouTube (consulté le )
  94. (es) Latinoamerica-online, citant Raimundo LĂłpez et Enrique Pinilla, « "El cĂłndor pasa" declarada Patrimonio Cultural de PerĂș » [« "El cĂłndor pasa" dĂ©clarĂ© Patrimoine Culturel du PĂ©rou »], 2004 et 2005 (consultĂ© le )
  95. De mĂȘme le musicologue Jean-Lambert Charlier, de l'UniversitĂ© Catholique de Louvain, indique (p. 22 du document en lien ci-aprĂšs) « El cĂłndor pasa est d'abord une mĂ©lodie andine trĂšs ancienne, sans doute d’origine prĂ©hispanique. Elle est (re)connue dĂšs le XVIIIe siĂšcle ». Dans le mĂȘme document, il cite aussi en partition (p. 16) le « Chant YaravĂ­ (mĂ©lodie no 4) », dĂ©jĂ  Ă©voquĂ©, transcrit par Marguerite d’Harcourt en 1920 et reproduit dans son livre (Paris 1925, op. citĂ© plus haut), et dont les quatre premiĂšres mesures sont exactement les mĂȘmes que celles de la premiĂšre phrase entiĂšre de El cĂłndor pasa, voir : « Un cas musical : la musique Inca (et ses survivances) », sur Centre de Recherche en Musique et Musicologie (CERMUS) – UniversitĂ© catholique de Louvain, annĂ©e acadĂ©mique 2011-2012. (consultĂ© le )
  96. (es) « El cine, los libros, la muerte » - Interview d'Armando Robles Godoy, Juan Carlos Bondy, La Primera, 6 juillet 2008 [PDF].
  97. (es) Mario Cerrón Fetta, « "El cóndor pasa...", Calvario de una Zarzuela. » [« "El cóndor pasa...", calvaire d'une Zarzuela »] [page Face Book], (consulté le )
  98. Cette version, avec les paroles en surimpression pour "karaokĂ©", est accessible ici: « Marie LaforĂȘt Tribute », sur YouTube (consultĂ© le ), ou encore ici, couplĂ©e avec la chanson "La Plage" en forme d'hommage nostalgique Ă  la beautĂ© et au talent de Marie LaforĂȘt : « Marie LaforĂȘt Tribute », sur YouTube (consultĂ© le )
  99. On pourra Ă©couter cette version ici : « Marie LaforĂȘt - La FlĂ»te Magique (p) 1969 », sur YouTube (consultĂ© le )
  100. La mĂȘme version chantĂ©e d’El Condor pasa de Paul Simon avec des images d'archives diverses de l'Ă©poque montrant Simon et Garfunkel, ainsi que Jorge Milchberg au charango, Carlos Benn Pott Ă  la kena et Carlos Guerra Ă  la guitare, est consultable ici : Simon & Garfunkel avec Los Incas, « El condor pasa », sur YouTube (consultĂ© le )
  101. dont on pourra écouter la version ici : (es) « El Condor pasa, Esther Ofarim », sur YouTube (consulté le )
  102. Voir la version de Gigliola Cinquetti en vidéo ici : (it) « El Condor Pasa/Il condor passa - Gigliola Cinquetti », sur YouTube (consulté le )
  103. Cette version chinoise d’El Condor pasa peut ĂȘtre Ă©coutĂ©e ici : Teresa Teng, « Teresa Teng-Condor pasa. De los andes a los himalayas. 鄧éș—搛 - èˆŠć€ąäœ•è™•ć°‹ », sur YouTube (consultĂ© le )
  104. On pourra écouter cette étonnante version ici : (es) « El Condor Pasa (Original) - YMA SUMAC (1971) », sur YouTube (consulté le )
  105. Annick Cojean, « Il était une fois une maison bleue : l'histoire de la maison chantée en 1971 par Maxime Le Forestier résume à elle seule quarante ans de San Francisco. », sur Le Monde Magazine, (consulté le )
  106. Phil, le kĂ©niste citĂ© dans la chanson de Maxime Le Forestier, existe rĂ©ellement : il s'agit de Phil Polizatto, qui a donnĂ© une interview Ă©voquant la "Maison bleue" et ses annĂ©es 1970 ici : (fr + en) HĂ©lĂšne Goupil et Anne SengĂšs, « Hunga Dunga: la maison des gens heureux », sur France-AmĂ©rique, the best of french culture, (consultĂ© le ). Le mĂȘme kĂ©niste Phil Polizatto a racontĂ© l'expĂ©rience de cette communautĂ© hippie de la "Maison bleue" dans un livre consultable ici : Phil Polizatto (trad. de l'anglais par François Vincent), C'est une maison bleue
 : Confessions d'un Ă©ternel hippie [« Hunga Dunga – Confessions of an Unapologetic Hippie »], Paris, Les ArĂšnes, , 237 p. (ISBN 978-2-35204-754-4, lire en ligne)
  107. La reconstitution de cette version originale peut ĂȘtre Ă©coutĂ©e en ligne ici (le PrĂ©lude est de 0 Ă  1’50’’, la partie I (7) lente ou Passacalle est de 14’44’’ Ă  15’57’’, et la partie II (5) rapide ou Baile-Kashua est de 11’32’’ Ă  12’37’’) : (es) Daniel AlomĂ­a Robles et Julio de La Paz, « El CĂłndor Pasa...Original ÂĄÂĄPrimicia Mundial!! 7 Partes Musicales... » [« El CĂłndor Pasa... version originale en premiĂšre mondiale ! Les 7 parties musicales »], sur YouTube, (consultĂ© le )
  108. Cette version originale de Los Incas en 1963, avec un passage en revue de quelques-unes des pochettes de ses nombreuses rĂ©Ă©ditions, peut ĂȘtre Ă©coutĂ©e en ligne ici : Los Incas, « El condor pasa 1963 VERSION ORIGINALE », sur YouTube, (consultĂ© le )
  109. Cette version de 1983 d'El cĂłndor pasa tirĂ©e de l'album Un Instant d'Ă©ternitĂ© par Los Incas peut ĂȘtre Ă©coutĂ©e en ligne ici : Los Incas, « El Condor Pasa », sur YouTube ℗ Musavida, (consultĂ© le ). Une capture en concert de cette version d'El cĂłndor pasa enchaĂźnĂ©e avec Sikuris dans la formation actuelle (annĂ©es 2010) de Los Incas (Jorge et Olivier Milchberg, MarĂ­a Elena Medina Riera, Fidel Guigui) en 2013 au Mexique peut ĂȘtre vue ici : Los Incas, « El Condor pasa - Sikuris », sur YouTube, (consultĂ© le ) et ici en 2014 (?) : Los Incas/Urubamba, « El cĂłndor pasa », sur YouTube, (consultĂ© le )
  110. Cette version peut ĂȘtre Ă©coutĂ©e ici (Ă  noter que l'oiseau sur la pochette est un aigle royal et non un condor des Andes, ce qui ne retire rien Ă  la musique) : « Los Chacos - El Condor Pasa », sur YouTube (consultĂ© le )
  111. Ă  voir et Ă©couter ici : (es) « El CĂłndor Pasa, Orquesta SinfĂłnica Nacional del PerĂș », sur YouTube (consultĂ© le )
  112. On pourra entendre cette version impressionnante et d'une maßtrise magnifique ici : « John Williams - El condor pasa », sur YouTube (consulté le )
  113. à écouter ici : « Paul Mauriat - El Condor Pasa », sur YouTube (consulté le )
  114. On pourra entendre cette étonnante version instrumentale chinoise ici en version studio avec clip : 12 Girls Band, « El cóndor pasa (Original Music Video) », sur YouTube (consulté le ) et ici en concert au Japon : 12 Girls Band, « El Condor Pasa concert in Japan in HD », sur YouTube (consulté le )
  115. (es) "El cĂłndor pasa" declarada Patrimonio Cultural de PerĂș - Latinoamerica-online, 13 avril 2004
  116. Voir ici cette version chantée en quechua par le groupe péruvien Wayna Picchu(qu) « CONDOR PASA, letras en quechua », sur YouTube (consulté le )

Voir aussi

Version originale

RĂ©surgence

Symbolique et contexte

Liens externes

Sur la Zarzuela originale de Daniel AlomĂ­a Robles et Julio Baudouin de La Paz


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