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Condor des Andes

Vultur gryphus

Le Condor des Andes (Vultur gryphus) est une espĂšce d'oiseaux de proie diurnes de l'ordre des Accipitriformes. Il est parfois appelĂ© Grand Condor des Andes, du fait de sa taille. Appartenant Ă  la famille des Cathartidae, ce rapace charognard est la seule espĂšce du genre Vultur. Il vit en AmĂ©rique du Sud, tout le long de la CordillĂšre des Andes et des cĂŽtes du Pacifique. Par son envergure de 3,00 m[1] Ă  3,20 mĂštres[2] en moyenne, parfois plus de 3,20 m[3], il est le plus grand rapace et le plus grand oiseau volant terrestre du monde, n'Ă©tant aujourd'hui dĂ©passĂ© que par l'Albatros hurleur (Diomedea exulans), qui est pour sa part un grand oiseau marin pĂ©lagique, avec une envergure moyenne de 3,10 mĂštres, soit gĂ©nĂ©ralement de 2,5 Ă  3,5 m[4].

C'est un grand vautour noir avec une collerette de plumes blanches autour de la base du cou et, en particulier chez le mĂąle, de grandes taches blanches sur les cĂŽtĂ©s. La tĂȘte et le cou sont presque dĂ©plumĂ©s et sont d'une couleur noire et rouge sombre. Ils peuvent recevoir brusquement un afflux de sang et donc changer de couleur en rĂ©ponse Ă  l'Ă©tat Ă©motionnel de l'oiseau. Chez le mĂąle, il y a une caroncule sous le cou et une grande crĂȘte sur le sommet de la tĂȘte. Contrairement Ă  la plupart des oiseaux de proie, le mĂąle est plus grand que la femelle.

Vivant Ă  des altitudes de 3 000 Ă  5 000 m, gĂ©nĂ©ralement sur des rochers inaccessibles, le condor est essentiellement charognard. Il prĂ©fĂšre les grandes carcasses, telles que celles de cerfs, de bovins ou de camĂ©lidĂ©s des Andes (le lama et ses cousins).

Le Condor des Andes est un symbole national pour le PĂ©rou, l'Argentine, la Bolivie, le Chili, la Colombie et l’Équateur et joue un rĂŽle important dans le folklore et la mythologie des rĂ©gions andines. Le condor est considĂ©rĂ© comme quasi menacĂ© par l'UICN. Il est menacĂ© par la perte d'habitat et par l'empoisonnement rĂ©sultant de la consommation de carcasses de bĂȘtes mortes elles-mĂȘmes empoisonnĂ©es. Des programmes de reproduction en captivitĂ© ont Ă©tĂ© mis en place dans plusieurs pays.

Description

Mensurations

Son envergure peut atteindre jusqu'Ă  3,50 mĂštres[5], mais elle est en moyenne de 3,00 mĂštres[1] Ă  3,20 mĂštres[3]. Sa taille moyenne est de 105 cm mais peut aller jusqu'Ă  130 cm avec un poids moyen observĂ© de kg Ă  12 kg[6]. Mais contrairement aux autres rapaces la femelle est plus petite que le mĂąle pour une raison inconnue. Adulte, le mĂąle pĂšse entre 11 et 15 kg et la femelle entre 6 et 14 kg[7].

Pour ĂȘtre prĂ©cis sur cet oiseau champion du monde, le Condor des Andes est l'oiseau terrestre volant dont le poids moyen est le plus lourd du monde : soit 11,3 kg, avec le poids moyen de 12,5 kg pour le mĂąle et 10,1 kg pour la femelle. Par exemple, le mĂąle de la Grande Outarde, autre gros oiseau volant terrestre de l'Ancien Monde, peut parfois aller jusqu'Ă  peser 20 kg (records avĂ©rĂ©s Ă  19 kg en Espagne et 21 kg en Mandchourie[8]), mais avec un poids moyen d'espĂšce autour de 10 kg, en raison d'un fort dimorphisme sexuel[N 1] (la femelle est beaucoup plus petite que le mĂąle, avec un poids moyen de 5,5 kg), et parce que les grands individus y sont plus rares que chez le condor. De mĂȘme, le poids du PĂ©lican frisĂ© peut lui aussi aller jusqu'Ă  15 kg, mais avec un poids moyen pour les mĂąles entre 10,4 kg et 11,5 kg, et 8,7 kg pour les femelles, donc un poids moyen d'espĂšce en dessous de 10 kg. Et de plus c'est un oiseau aquatique, comme le Cygne trompette que le condor devance lui de justesse[9] - [10].

De mĂȘme, pour ce qui est des ailes, le Condor des Andes est l'oiseau volant dont la surface alaire est la plus grande du monde[8]. Il est aussi l'oiseau terrestre volant qui a l'envergure la plus longue du monde (moyenne : 3,00 Ă  3,20 mĂštres, maximum : 3,50 mĂštres), n'Ă©tant dĂ©passĂ© que par l'Albatros hurleur (moyenne : 3,10 m, mais maximum : 3,70 m, pour un poids moyen d'espĂšce de kg[11]), le PĂ©lican frisĂ© (moyenne : 2,70 Ă  3,20 m, maximum : 3,50 m, lui aussi), mais ce sont lĂ  encore des oiseaux aquatiques ou pĂ©lagiques[8] - [12].

Portrait

Condor des Andes mĂąle, Zoo de Taronga, Australie

Le Condor des Andes est un oiseau facilement reconnaissable sauf peut-ĂȘtre quand il plane trĂšs haut dans le ciel oĂč on peut le confondre avec l'Urubu Ă  tĂȘte rouge (Carthates aura) ou bien l'Urubu noir (Coragyps atratus) qui sont tous deux charognards et prĂ©sents dans l'aire du condor, et tournent au-dessus des carcasses d'animaux. Mais il se distingue nettement par sa trĂšs grande taille et sa collerette blanche bien marquĂ©e.

Comme la plupart des oiseaux charognards, il ne porte pas de plumes sur la tĂȘte, Ă  l'exception d'un lĂ©ger duvet plus clairsemĂ© que celui de son lointain cousin eurasiatique le Vautour fauve par exemple. Ils se sont adaptĂ©s ainsi car leur mode d'alimentation fait que leur tĂȘte est trĂšs souvent recouverte de sang et que cet endroit leur est particuliĂšrement difficile Ă  nettoyer. Or la peau nue est plus facile Ă  nettoyer et Ă  tenir propre et sĂšche que les parties recouvertes de duvet Ă©pais et long ou de plumes[2].

Son bec, adaptĂ© Ă  son mode alimentaire, est puissant, en forme de crosse, large, crochu et tranchant ; il est gris foncĂ© Ă  la base et couleur ivoire au bout. Le mĂąle et la femelle adultes ont une collerette duveteuse et immaculĂ©e dĂ©jĂ  Ă©voquĂ©e Ă  la base du cou, protĂ©geant l'animal du froid en altitude[13]. Celle-ci est plus fine chez la femelle[14]. Le mĂąle et la femelle adultes ont le plumage noir dans l’ensemble, exceptĂ© sur les ailes oĂč les couvertures alaires supĂ©rieures et les rĂ©miges secondaires sont blanches[15].

La tĂȘte est noire ou brun-rougeĂątre foncĂ© dans l'ensemble chez le mĂąle, mais la peau nue de la tĂȘte et du cou peut changer de couleur en fonction de l'Ă©tat Ă©motionnel de l'oiseau, comme on l'a vu : du rose rougeĂątre au bas du cou, au rosĂątre tachetĂ© ou au jaune plus haut. Le rouge peut devenir plus vif, comme le jaune. Cette aptitude peut avoir une fonction de communication entre individus[2], par exemple pour les parades d'intimidation entre mĂąles, pour la nourriture, ou lors des parades amoureuses. Le mĂąle adulte prĂ©sente une crĂȘte importante sur la tĂȘte et dĂ©bordant sur le bec, ainsi que d'autres caroncules sur la face et sous le bec, ainsi que des lobes charnus sur le cou[3]. Les yeux du mĂąle sont bruns-dorĂ©s. Les paupiĂšres sont dĂ©pourvues de cils[16].

Pattes du condor des Andes (Zoo de Cincinnati). On voit bien l’élongation de l’orteil central, les serres Ă©moussĂ©es, le pied bien Ă  plat sur la roche. Sur la patte de derriĂšre, on aperçoit la naissance du « pouce » ou orteil postĂ©rieur, assez loin des orteils antĂ©rieurs.

Les doigts solides et les pattes puissantes sont grisĂątres Ă  gris foncĂ©, recouverts d'Ă©cailles rondes[2] et souvent blanchis par les dĂ©jections[15], comme leurs perchoirs habituels. En effet, le Condor des Andes, comme plusieurs vautours du Nouveau Monde, pratique l’urohydrose1 (uriner volontairement sur les Ă©cailles de ses pattes) pour refroidir par Ă©vaporation son corps en cas de grandes chaleurs[2], un peu comme le corps humain le fait en transpirant. L'orteil central est trĂšs allongĂ©, et l'orteil postĂ©rieur (ou le « pouce ») est en revanche peu dĂ©veloppĂ©, placĂ© haut et non opposable aux autres doigts. Les doigts sont comparativement droits, les pieds posĂ©s Ă  plat sur le sol, et les griffes des serres Ă©moussĂ©es par l'usure de la marche : de fait les pieds du condor sont plutĂŽt adaptĂ©s Ă  la marche sur les rochers. D'ailleurs ses territoires sont gĂ©nĂ©ralement non boisĂ©s et rocheux, en raison des altitudes qu'il affectionne, et parce que le climat peut y ĂȘtre semi-dĂ©sertique, et aussi parce que les Ă©tendues dĂ©gagĂ©es facilitent la recherche des carcasses[2]. À la diffĂ©rence de ceux des oiseaux de proie ou des vautours de l'Ancien Monde par exemple, ses pieds ne sont donc pas ou peu utilisables comme arme, ni comme organe de prĂ©hension (il ne peut emporter une proie par exemple, et pour le condor donc, « c'est Ă  consommer sur place !... »[2])[17] ; et ils rendent aussi un dĂ©placement arboricole plus difficile que la marche au sol. En revanche, le condor est donc meilleur marcheur que ses cousins.

La femelle adulte a un plumage semblable Ă  celui du mĂąle, mais elle n’a ni caroncule, ni crĂȘte, ni lobes au cou. Sa tĂȘte est nue et uniformĂ©ment noire en temps habituel. NĂ©anmoins, bien que dans des proportions moindres et moins souvent que le mĂąle, elle a elle aussi la facultĂ© de faire changer la couleur de la peau de sa face et de son cou nus, en fonction de son Ă©tat Ă©motionnel, notamment lors de la saison de l'accouplement, pour indiquer son Ă©tat de disponibilitĂ©. À la diffĂ©rence de son conjoint, ses yeux sont rouge sombre et elle est lĂ©gĂšrement plus petite et plus fine que le mĂąle[3]. Ainsi, comme le dit Travis Kidd sur le site Animal Diversity Web, base de donnĂ©es zoologiques de l'UniversitĂ© du Michigan, « les condors des Andes sont la seule espĂšce de cathartidĂ©s Ă  prĂ©senter un dimorphisme sexuel[N 1] [Ă  la fois] aussi manifeste[2] » [et comme inversĂ© pour ce qui est de la taille] : par exemple, chez son plus proche cousin, le Sarcoramphe roi, le mĂąle et la femelle ont des morphologies parfaitement identiques tant en taille qu’en apparence (mĂȘmes couleurs de plumes et de peau, et mĂȘmes caroncules), comme chez ses autres cousins moins grands et moins colorĂ©s que le Sarcoramphe, les Urubus. C'est seulement chez les Urubus Ă  tĂȘte rouge, que les deux sexes, tout en Ă©tant d'apparence identique, prĂ©sentent toutefois un lĂ©ger dimorphisme pour la taille, mais chez eux, comme chez la plupart des rapaces, c'est la femelle qui a tendance Ă  ĂȘtre plus grande et plus lourde que le mĂąle. Chez le Condor des Andes, la face, la couleur et la taille prĂ©sentent des diffĂ©rences trĂšs remarquables, et c'est la femelle qui est plus petite ; un mystĂšre de plus chez ce grand vautour.

Le plumage des immatures mĂąle et femelle est indiffĂ©remment de couleur beige Ă  brun sale, avec la peau nue brunĂątre, les yeux brun foncĂ© et le bec couleur corne[15]. La collerette blanche apparaĂźt seulement quand l'animal devient adulte, vers six Ă  huit ans[1], au mĂȘme moment que la mue du plumage de brunĂątre Ă  noir et blanc (les plumes blanches n'apparaissent qu'Ă  la fin de la mue).

  • Vedettes en gros-plan
  • Condor des Andes mĂąle, avec caroncules (crĂȘte haute, excroissances, et crĂȘte basse sous le bec ici peu dĂ©veloppĂ©e : c'est un jeune adulte) ; iris dorĂ© et collerette immaculĂ©e (Sanctuaire animal de Cochahuasi, PĂ­sac, DĂ©partement du Cuzco, PĂ©rou).
    Condor des Andes mĂąle, avec caroncules (crĂȘte haute, excroissances, et crĂȘte basse sous le bec ici peu dĂ©veloppĂ©e : c'est un jeune adulte) ; iris dorĂ© et collerette immaculĂ©e (Sanctuaire animal de Cochahuasi, PĂ­sac, DĂ©partement du Cuzco, PĂ©rou).
  • Condor des Andes mĂąle adulte au zoo d'AmnĂ©ville en 2014, aux  caroncules plus dĂ©veloppĂ©es.
    Condor des Andes mùle adulte au zoo d'Amnéville en 2014, aux caroncules plus développées.
  • MĂąle adulte aux caroncules bien visibles, au zoo de Philadelphie.
    MĂąle adulte aux caroncules bien visibles, au zoo de Philadelphie.
  • Jeune femelle condor des Andes adulte, sans crĂȘte ni caroncule Ă  la diffĂ©rence du mĂąle ; iris rouge sombre et toujours la belle collerette blanche (Franklin Park Zoo, Massachusetts, USA).
    Jeune femelle condor des Andes adulte, sans crĂȘte ni caroncule Ă  la diffĂ©rence du mĂąle ; iris rouge sombre et toujours la belle collerette blanche (Franklin Park Zoo, Massachusetts, USA).
  • Dame Condor, reine des Andes, sous son meilleur profil, avec sa collerette plus fine que celle du mĂąle, au zoo de Cincinnati (États-Unis).
    Dame Condor, reine des Andes, sous son meilleur profil, avec sa collerette plus fine que celle du mñle, au zoo de Cincinnati (États-Unis).
  • Femelle juvĂ©nile immature au Canyon de Colca, PĂ©rou, en juillet 1998. Le plumage brunĂątre et l'absence de collerette blanche distinguent les jeunes des adultes.
    Femelle juvénile immature au Canyon de Colca, Pérou, en juillet 1998. Le plumage brunùtre et l'absence de collerette blanche distinguent les jeunes des adultes.

Vol

En exploitant les courants ascendants, il atteint parfois les 6 000 mĂštres d'altitude[15] grĂące Ă  sa trĂšs grande surface alaire[18], ce qui a pour effet de le faire disparaĂźtre Ă  l’Ɠil nu dans l'azur[1], mĂȘme par temps clair. Cette caractĂ©ristique en a fait pour les peuples prĂ©colombiens un intercesseur entre la terre et le ciel[19], un messager de transcendance, et par exemple « les Incas dĂ©posaient des momies dans ses nombreuses niches [abandonnĂ©es] car ils croyaient que le condor transportait les Ăąmes vers l’au-delĂ [13] ».

À l’atterrissage, le Condor des Andes laisse pendre ses pattes pour se freiner. Pour reprendre son envol, il court sur quelques mĂštres en battant des ailes afin de prendre la vitesse nĂ©cessaire pour s’élever dans les airs[1]. Puis il passe la majeure partie de son temps Ă  planer dans les courants thermiques crĂ©Ă©s par les vallĂ©es et les montagnes. Les ailes larges, les grandes rĂ©miges indĂ©pendantes et agiles ayant quasiment un rĂŽle de gouvernes d'avion, ainsi que la peau ultrafine et rosĂ©e de son crĂąne qui peut ressentir les plus infimes variations de pression atmosphĂ©rique[5], sont bien adaptĂ©es Ă  ce type de vol. Une fois en vol, il se sert de ses grandes rĂ©miges primaires (longues plumes en bout d'aile) pour contrĂŽler sa progression en faisant varier la quantitĂ© d’air passant entre elles[1]. Il peut par exemple les Ă©carter, car elles prĂ©sentent une Ă©margination[N 2] importante comme celles des aigles, ou mĂȘme les orienter individuellement (verticalement/horizontalement/en biais) pour rĂ©duire (lors d'un battement vers le haut par exemple) ou augmenter au choix la rĂ©sistance de l'air, et gĂ©rer finement, de maniĂšre diffĂ©renciĂ©e et optimale, la portance. Leur pointe flexible rĂ©duit aussi les turbulences qui pourraient dĂ©stabiliser l'Ă©quilibre subtil du vol de ce grand voilier planeur[20]. Il utilise au maximum les courants ascendants et ne pratique que trĂšs rarement le vol battu, dans le but dĂ©jĂ  Ă©voquĂ© de prĂ©server son Ă©nergie[3], car aprĂšs une trentaine de battements d'ailes il est dĂ©jĂ  Ă©puisĂ©[15].

Malgré cela, grùce à sa science du vol plané, grùce aussi à sa morphologie bien adaptée, à son éducation longue assurant une bonne transmission inter-générationnelle permettant la constitution d'une véritable « culture du vol à voile » et une bonne connaissance de son environnement, le condor est expert pour se frayer un difficile chemin dans le labyrinthe des glaciers et des grands canyons andins, en rasant leurs parois vertigineuses, malgré la complexité des courants et des tourbillons engendrés par le relief. Et ceci fait de lui l'un des charognards les plus performants dans le recyclage de la matiÚre vivante.

Plume rectrice de condor comparĂ©e avec celle du paon bleu, qui est lui aussi un oiseau assez grand, mais n'a pas les mĂȘmes capacitĂ©s de vol Ă  voile que le condor.

Soin des plumes

Comme tous les grands vautours, les condors ont l’habitude de prendre des bains de soleil le matin, car la tempĂ©rature de leur corps chute pendant la nuit toujours afin de prĂ©server l’énergie. La chaleur du soleil leur permet de retrouver le niveau de tempĂ©rature corporelle nĂ©cessaire Ă  leurs activitĂ©s.

Mais les bains de soleil sont Ă©galement utiles Ă  l’entretien des plumes : durant le vol Ă  haute altitude, les vents violents peuvent dĂ©former les extrĂ©mitĂ©s des rĂ©miges. « Le Condor des Andes a donc besoin de la chaleur du soleil pour que ses plumes retrouvent leur forme habituelle. La maintenance du plumage est trĂšs importante chez ces si grands oiseaux[3] » qui passent de longs moments Ă  lisser, rĂ©curer et gratter leur plumage, seuls ou mutuellement au sein du couple. De plus, exposer largement ses ailes et ses plumes au soleil lui permet de limiter la prolifĂ©ration des parasites.

De mĂȘme, le cou et la tĂȘte sont mĂ©ticuleusement tenus propres par l'oiseau[21]. On l'a vu, sa quasi-calvitie est une adaptation pour l'hygiĂšne, permettant Ă  la peau d'ĂȘtre plus accessible au nettoyage par frottement, ainsi que d'ĂȘtre exposĂ©e aux effets stĂ©rilisants de la dessication et de la lumiĂšre ultraviolette aux hautes altitudes[22].

Squelette puissant de condor des Andes : solides vertÚbres du cou, ancrage musculaire développé autour du bec et des maxillaires, grande envergure. La taille, la rectitude relative et le diamÚtre du fémur et surtout du tibia (ou tibio-tarse) expliquent pourquoi les précolombiens taillaient des Kenas (fûtes) dans cet os. (Museum of Osteology, Oklahoma City, USA.)

Longévité

Le condor peut vivre jusqu'Ă  50 ans en libertĂ© et plus de 70 ans en captivitĂ© (certaines sources indiquent mĂȘme jusqu'Ă  90 ans[15] - [5]). Ainsi, Hector, le condor des Andes du Jardin d'essai Ă  Alger est mort en 2010[23]. Il avait au moins 70 ans, amenĂ© dĂ©jĂ  adulte des Andes par Joseph d'Ange, le crĂ©ateur du parc animalier. Il est attestĂ© au zoo dĂšs 1942.

Un autre condor des Andes mùle, surnommé « Thaao », est né en captivité au Zoo Beardsley dans le Connecticut en 1930, et mort le 26 janvier 2010, à presque 80 ans, donc[24]. C'est historiquement le plus grand ùge vérifié jamais enregistré pour un oiseau[8].

Comportement

Sociabilité et économie d'énergie

Les condors sont sociables, vivent et se nourrissent en groupe, sous la conduite d'un mùle dominant, l'apu (le « sage », le « pÚre », le « dieu de la montagne » en quechua) qui donne le signal de la curée[15]. Il serait le premier à goûter la proie, aprÚs avoir « évalué » si elle est « saine »[13].

Pour ces grands oiseaux, leur taille impressionnante elle-mĂȘme constitue en soi une importante dĂ©pense d'Ă©nergie, particuliĂšrement au moment de l'envol, ainsi que pour soutenir son activitĂ© mĂ©tabolique[25]. Beaucoup de traits de leur comportement instinctuel sont donc orientĂ©s vers l'Ă©conomie maximale d'Ă©nergie. Ainsi ils doivent la prĂ©server par exemple en Ă©vitant les combats autour des carcasses, non seulement entre eux, par leur structuration sociale rarement dĂ©stabilisĂ©e, mais aussi avec les autres charognards : « au cours de ces festins, quand ils se nourrissent avec d’autres espĂšces de vautours, il existe quelques parades rituelles permettant de reconnaĂźtre les oiseaux dominants et d’éviter les conflits ou de les rĂ©soudre rapidement. En gĂ©nĂ©ral, la plus grande espĂšce [donc le condor des Andes et ses grands mĂąles en premier] domine les autres[3] ». D'ailleurs, plus mĂȘme qu'une simple coexistence organisĂ©e, il s'agit lĂ  plutĂŽt d'un cas de symbiose coopĂ©rative comme on le verra dans la section consacrĂ©e Ă  l'alimentation du condor. De mĂȘme leur vol habituel, surfant sur les courants thermiques ascendants comme on l'a vu, est Ă©conome en Ă©nergie, de mĂȘme que la baisse de leur tempĂ©rature corporelle nocturne pendant leur sommeil, comme leur aptitude Ă  stocker les graisses quand les sources de nourriture sont abondantes, ce qui leur permet sans difficultĂ© de jeĂ»ner pendant plusieurs jours[3] en cas de pĂ©nurie de carcasses. « Dans le pire des cas, le condor est capable de survivre sans s'alimenter pendant une semaine ou deux[14] ».

Leurs perchoirs-dortoirs sont localisés dans des lieux inaccessibles aux prédateurs éventuels (comme les grands félins), et si possible protégés de la pluie.

Le soir, on peut observer des rassemblements d'une vingtaine d’individus encore immatures et d’adultes des deux sexes, en dehors de la pĂ©riode de reproduction, sur leurs perchoirs et sur les corniches rocheuses des profonds canyons des Andes, pour passer la nuit ensemble[1]. Durant le cycle de reproduction, ils vivent en couple et sont fidĂšles pour leur vie entiĂšre, d'un cycle Ă  l'autre.

Cri et chant

Le Condor des Andes, comme ses cousins les vautours de la Famille des CathartidĂ©s, est presque silencieux. En effet, ce groupe n’a pas de syrinx ni les muscles qui lui sont associĂ©s[3], et il ne peut pas crier puissamment comme l'aigle, par exemple[26].

Il peut nĂ©anmoins produire des bruits faibles mais Ă©tranges tels que des sifflements, des sons rĂ©sonnants et des sortes d’éternuements. « Ils sont plus bruyants pendant la saison de reproduction, et sont alors capables de lancer des sĂ©ries de sifflements et de ronflements, notamment lors de la dĂ©fense du site de nidification[3] », qui est Ă  mĂȘme le sol ou dans des niches Ă  flanc de paroi. « Lors de la parade nuptiale, la peau nue du cou devient jaune vif ; les partenaires vont et viennent les ailes Ă©tendues, tout en poussant [de lĂ©gers] cris mĂ©lodieux[1] [ainsi que des sifflements et claquements de langue[3]], puis se lissent mutuellement le plumage jusqu’à ce que l’un des deux oiseaux s’envole de la falaise. Ils peuvent alors se poursuivre en vol[1] », [puis s'accouplent].

Reproduction

ƒuf de condor des Andes, (Collection Museum Wiesbaden, All.)
Un condor survole en planant le mirador naturel de la Cruz del Cóndor (la Croix du Condor), région d'Arequipa, Pérou.
La croix qui donne son nom au lieu-dit La Cruz del Condor, haut-lieu touristique d'observation de la population protégée du condor des Andes (Pérou).

La saison de reproduction a lieu de février à juin au Pérou, et en septembre-octobre au Chili[3]. Les condors vivent et se reproduisent en altitude, entre 3000 et 5000 m[27].

Le nid, assez sommaire, consiste en quelques brindilles posĂ©es Ă  mĂȘme le sol tout autour de l’Ɠuf, dans un creux de rocher ou une niche inaccessibles Ă  flanc de paroi. La femelle dĂ©pose un seul Ɠuf (trĂšs rarement deux), de couleur blanc-bleuĂątre et pesant 280 g pour une longueur de 75 Ă  100 mm[28] - [2]. L’incubation est assurĂ©e par les deux adultes, mais principalement par la femelle[14] ; le mĂąle nĂ©anmoins s'implique fortement dans la reproduction : on a observĂ© des comportements par lesquels il force la femelle Ă  lui laisser la place pour prendre la relĂšve et couver Ă  son tour, la chassant mĂȘme parfois hors du nid avant comme aprĂšs l'Ă©closion ; il est frĂ©quent aussi que les mĂąles nourrissent le poussin plus souvent que la femelle (toujours par rĂ©gurgitation)[2].

L'incubation dure entre 55 et 58 jours[3]. D'autres sources indiquent un laps de temps de deux à trois mois entre la ponte et l'éclosion[2]. Dans ce cas il a été remarqué que le ou les deux premiers mois, un des deux parents est toujours présent au nid, puis pour le temps restant d'incubation, ils continuent à se relayer au nid mais passent graduellement plus de temps hors du nid, sans trop s'éloigner du site de nidification[2].

Si l’Ɠuf ou le poussin sont perdus, un autre Ɠuf vient le remplacer rapidement. Les Ă©leveurs et les chercheurs exploitent parfois ce comportement pour doubler le taux de reproduction et rĂ©habiliter autant que possible la dĂ©mographie de l'espĂšce, en capturant le premier Ɠuf pour le couver et l'Ă©lever artificiellement, laissant aux parents le soin d'Ă©lever le second Ɠuf[29].

Couple de condors planant de concert dans la Province de Salta en Argentine. La femelle est au premier plan.

Le Condor des Andes atteint sa maturitĂ© sexuelle entre six et sept ans, et la femelle ne pond qu'un Ɠuf tous les deux ans : ce faible taux de reproduction, liĂ© Ă  la longueur du cycle, se retrouve chez d'autres espĂšces Ă  longĂ©vitĂ© importante n’ayant que peu d’ennemis[1]. Mais celui-ci expose l'espĂšce Ă  une situation de relative fragilitĂ© reproductive, en partie compensĂ©e par sa longĂ©vitĂ© exceptionnelle et par les soins dont le couple entoure longtemps son poussin, dont la maturation est assez lente et l'Ă©ducation longue : son apprentissage consiste Ă  mĂ©moriser la configuration du terrain, les itinĂ©raires lointains, Ă  savoir dĂ©busquer la nourriture, Ă  Ă©viter les dangers[5]. Mais pour devenir indĂ©pendant, il doit avant tout perfectionner sa technique de vol par une longue pratique, incluant, par jeu, des « combats aĂ©riens » spectaculaires mais sans violence vĂ©ritable entre jeunes[5]. « Ce n’est pas avant six ans que le jeune condor perd ses plumes d'un marron sale pour se parer de l'Ă©tonnant plumage blanc et noir de l'adulte[5] ». Le jeune est nourri par les deux adultes pendant plus d’un an, bien qu’il soit capable de voler vers l’ñge de 6 mois[1]. GĂ©nĂ©ralement, il ne quitte pas vraiment ses parents avant la ponte de l’Ɠuf suivant Ă  la fin du cycle de deux ans. Donc, « la reproduction Ă©tant particuliĂšrement lente, si trop d’adultes sont tuĂ©s, la population dĂ©croĂźt trĂšs rapidement[1] ».

D'autant que le Condor des Andes est monogame : « comme l'albatros et le cygne, il est un amant fidĂšle. Une fois accouplĂ©, il restera avec sa compagne la vie entiĂšre, indiffĂ©rent aux tentations qui pourraient briser son couple » (Emmanuel Monnier, Science & Vie n° 1221[30]]. On a mĂȘme observĂ© qu'il est parfois fidĂšle par-delĂ  la mort : si l'un des deux partenaires meurt, l'autre maintient son « veuvage » et ne s'accouple plus. Mais le plus souvent, le survivant se met en quĂȘte d'un autre conjoint ; nĂ©anmoins, comme l'observe Michel Raymond dans le mĂȘme article, plus la monogamie qui rĂšgne dans une espĂšce est stricte (comme c'est le cas chez le condor), plus le mĂąle ou la femelle qui voudrait adopter une autre stratĂ©gie (ou bien se « remarier ») aura du mal, puisque tous les partenaires sont dĂ©jĂ  pris, et les cartes non rebattues Ă  chaque saison des amours[31].

On peut voir aujourd'hui assez facilement dans certains lieux préservés des Andes le couple de condors donner son splendide spectacle et planer majestueusement de concert en tournoyant et se croisant, parfaitement synchrones[5], et s'élevant par paliers en milieu de journée grùce aux courants d'air ascendants qui se forment du fait de la chaleur du soleil, par exemple au lieu-dit et mirador naturel de la Cruz del Cóndor dans le Cañon de Colca au Pérou, l'un des plus profonds au monde, aujourd'hui réserve naturelle pour le condor.

Alimentation

Le Condor des Andes est principalement un charognard qui se nourrit de cadavres d'espĂšces diverses, notamment ceux de la famille des camĂ©lidĂ©s tels la vigogne, l'alpaga, le lama ou bien le guanaco, mais aussi de cadavres de bĂ©tail comme les moutons ou les bƓufs. Il repĂšre les dĂ©pouilles lors de ses « tournĂ©es d'inspection » systĂ©matiques de son territoire, raison de ses longues sĂ©ances de vol planant couvrant de grandes Ă©tendues, et grĂące Ă  sa vue exceptionnellement perçante ; mais le condor des Andes possĂšde un odorat trĂšs mĂ©diocre par rapport Ă  celui d’autres oiseaux[1], par exemple si on le compare avec le Grand Urubu, son pourtant proche cousin de la famille des CathartidĂ©s. Ce fait est d'ailleurs Ă  l'origine de singuliers cas de coopĂ©ration, ou mutualisation symbiotique, entre charognards : en effet ses cousins plus petits, les Urubus, surtout les vautours du genre Cathartes (Urubu Ă  tĂȘte rouge, et Grand Urubu), avec qui il partage une bonne partie de son aire de rĂ©partition, sont experts pour repĂ©rer olfactivement les charognes, ce dont il n'est pas capable, car ils sont en mesure de capter l'odeur du mercaptan Ă©thylique, un gaz produit par la dĂ©composition des animaux morts grĂące Ă  leur zone olfactive cĂ©rĂ©brale particuliĂšrement dĂ©veloppĂ©e, raison pour laquelle ils volent souvent prĂšs du sol ou au ras de la canopĂ©e[32]. Le Condor des Andes, pour sa part, grĂące Ă  sa vue trĂšs perçante, a plutĂŽt intĂ©rĂȘt Ă  prospecter sa nourriture du plus haut possible pour Ă©largir son point de vue, se donner un panorama d'ensemble et ainsi repĂ©rer les mouvements et regroupements de ses cousins urubus plus faciles Ă  distinguer que les carcasses elles-mĂȘmes, pour dĂ©terminer Ă  quel moment ils ont trouvĂ© une charogne. Ils lui servent donc en quelque sorte de balise, ou de signaux Ă  distance. Les urubus en revanche, plus petits et moins forts que le condor, ont besoin de lui, de ses chiquenaudes et de son bec puissants, pour attaquer et dĂ©chirer le cuir rĂ©sistant d'une carcasse fraĂźche[2], ce qui leur permet d'ajouter Ă  leur menu des carcasses de grands animaux (bovins, camĂ©lidĂ©s), qu'ils ne pourraient pas ouvrir sans lui. En dehors du fait que la taille du condor lui permet de s'imposer en premier dans ce festin partagĂ©, c'est aussi pour cela que les urubus lui laissent volontiers la prioritĂ©, ce qui a aussi l'avantage d'Ă©viter des conflits qui seraient coĂ»teux en Ă©nergie comme on l'a vu. D'ailleurs, on a observĂ© que l'arrivĂ©e en dernier des condors sur la zone de la dĂ©pouille provoque une excitation visible parmi les espĂšces plus petites de vautours prĂ©sents. « L'activitĂ© des grands condors pour ouvrir la carcasse semble dĂ©clencher un vĂ©ritable « festin frĂ©nĂ©tique » chez les petits charognards, durant lequel toute hiĂ©rarchie et toutes relations habituelles de dominance sont temporairement suspendues[33] - [34] ».

Le territoire d'exploration du Condor des Andes pour la recherche de nourriture est d'autant plus vaste qu'il vole pas moins de 320 km par jour et Ă  trĂšs haute altitude[2]. Le condor se nourrit de chair fraĂźche mais il ne rechigne pas non plus Ă  se nourrir de chair en Ă©tat de dĂ©composition avancĂ©e[35].

Sur les cĂŽtes du Pacifique, notamment celles de Patagonie, son alimentation est complĂ©tĂ©e par des charognes de phoques et de poissons mais aussi d'Ɠufs d'oiseaux de mer, cĂ©tacĂ©s Ă©chouĂ©s, grands oiseaux de mer morts, etc. Le Condor des Andes est sĂ©dentaire et ne migre donc pas, mais il peut couvrir de grandes distances pour se nourrir et trouver des carcasses[3]. Par exemple, lors de la mise bas des Ă©lĂ©phants de mer du sud ou des lions de mer de Patagonie (Otaria flavescens) sur les plages de ces cĂŽtes, il fait parfois un long voyage de plusieurs centaines de kilomĂštres pour se repaĂźtre du placenta abandonnĂ© de ces mammifĂšres, sans que l'on sache encore exactement comment il en repĂšre le lieu exact et le moment opportun Ă  si grande distance, si ce n'est par une mĂ©moire exceptionnelle[15], qu’il transmettrait de plus Ă  sa descendance[5].

Il lui arrive —rarement et s’il y est contraint par le manque de carcasses—, de s'attaquer Ă  une proie vivante mais seulement si elle est jeune, malade et de taille moyenne[1] ou bien plutĂŽt de petite taille comme des souris, des marmottes, des petits oiseaux, des lapins, des insectes, des lĂ©zards[2]. Faute de nourriture, il peut jeĂ»ner au pire jusqu'Ă  deux semaines comme on l'a vu[14]. Comme on l'a vu, son orteil postĂ©rieur est situĂ© trop haut pour pouvoir se refermer, ses serres ne sont donc pas prĂ©hensiles et elles sont Ă©moussĂ©es, ce qui l'empĂȘche d'attaquer, d'emporter, de clouer au sol ou bien encore de dĂ©chiqueter une Ă©ventuelle proie par leur truchement[5]. Le condor a donc recours Ă  son puissant bec crochu pour dĂ©pecer ses proies[1], les maintenant seulement au sol sous son propre poids pour une courte durĂ©e. Dans ces cas rares il est Ă©ventuellement capable de commencer Ă  consommer sa proie encore vivante[2]. Mais il doit la consommer sur place, car il ne pourrait pas mĂȘme emporter un petit lapin. Et il est exclu qu'il puisse tuer des animaux de la taille d'un mouton, d'un lama ou d'une vache[36]. En moyenne, il se nourrit de 900 grammes de viande par jour[37]. Si cet oiseau mange trop, il sera incapable de s'envoler Ă  mĂȘme le sol ; il devra attendre le processus de digestion, et, en cas d’alerte ou de danger, dĂ©gurgiter son repas. S'il n’y parvient pas, le condor s’immobilise totalement en ouvrant complĂštement ses ailes. Cette difficultĂ© est Ă  l'origine des pratiques de chasse au piĂ©geage dont il Ă©tait victime, car il Ă©tait un trophĂ©e recherchĂ© par certaines populations autochtones.

Population

RĂ©partition et habitat

RĂ©partition du condor des Andes (en jaune sur ce graphique).

Le condor des Andes se trouve en AmĂ©rique du Sud dans la CordillĂšre des Andes, ainsi que sur les cĂŽtes du Pacifique Sud et quelques cĂŽtes de l'Atlantique. Au nord, il est prĂ©sent au Venezuela et en Colombie mais il y est extrĂȘmement rare ; il est surtout rĂ©parti au sud sur tout le long de la cordillĂšre des Andes en Équateur, au PĂ©rou, au Chili, en Bolivie et en Argentine jusqu'en Terre de Feu oĂč il n'est pas rare de le voir voler au-dessus des nombreux fjords des canaux chiliens[35]. Il a Ă©tĂ© observĂ© Ă  l'est de la pĂ©ninsule Mitre, sur l'Ăźle des États[38]. Son habitat est essentiellement composĂ© de prairies ouvertes et alpines non boisĂ©es. Sur ces zones andines il vit de 3 000 jusqu'Ă  plus de 5 500 m d'altitude[2]. Mais le long des cĂŽtes, il peut vivre en haut des falaises surplombant l'ocĂ©an[35].

Effectifs

EstimĂ©e par l'UICN en 2009 Ă  environ 10 000 individus sur une aire de rĂ©partition de 2 540 000 km2, la population du condor des Andes est en dĂ©croissance continuelle depuis son enregistrement en 1977 Ă  la liste des espĂšces menacĂ©es[39]. Elle ne serait plus en 2018 que de 6 700 individus en AmĂ©rique du Sud[40].

Il aurait quasiment disparu du Venezuela et de Colombie, et mĂȘme en Équateur on estime sa population Ă  une centaine d'individus en libertĂ© seulement[15]. Dans la partie Nord de son aire de rĂ©partition, oĂč la population est en fort dĂ©clin, il semble selon plusieurs Ă©tudes que la rarĂ©faction de sa nourriture en zone sauvage soit le problĂšme majeur[2]. Celle-ci inciterait le condor, malgrĂ© son caractĂšre farouche, Ă  se rapprocher des routes et Ă  chercher sa nourriture sur les cadavres des animaux victimes de la circulation automobile, ce qui accroĂźt le risque d'ĂȘtre lui-mĂȘme fauchĂ© par un vĂ©hicule[41].

Prédateurs

« Les Condors des Andes adultes en bonne santĂ© n'ont pas de prĂ©dateurs naturels connus[2] » (l'homme exceptĂ© donc). D'autant que, quoique gĂ©nĂ©ralement calme et paisible, le condor peut devenir vraiment agressif pour dĂ©fendre son aire de nidification sur un territoire d'un kilomĂštre Ă  la ronde autour du nid, contre des prĂ©dateurs potentiels, y compris ses congĂ©nĂšres ou les zoologues chargĂ©s de la protection de l'espĂšce[2] - [42] - [43] - [44]. « Les poussins jeunes peuvent ĂȘtre victimes des grands oiseaux de proie ou des renards, si le nid est accessible aux prĂ©dateurs non volants[2] », pendant les rares moments oĂč ils sont laissĂ©s sans surveillance par leurs deux parents Ă  la fois. « L’Ɠuf aussi peut ĂȘtre perdu par prĂ©dation[2] ». Mais ces phĂ©nomĂšnes sont rares.

En effet, comme on l'a dit, les Condors des Andes nichent gĂ©nĂ©ralement sur les hautes corniches inaccessibles et les creux de roche des parois andines ou des falaises ocĂ©aniques. Mais parfois leur nid se situe dans des aires plus accessibles par terre, oĂč ils le dĂ©fendent alors activement[2].

Systématique

Étymologie

Le terme vultur ou voltur est un mot latin qui signifie « vautour » ; quant Ă  gryphus, il vient du mot grec ancien ÎłÏÏ…Ï€ÏŒÏ‚ (grupĂłs) qui signifie « nez crochu » mais la comparaison Ă  un « bec en forme de crosse » lui correspond mieux. Le mot condor quant Ă  lui est un dĂ©rivĂ© hispanique du mot quechua kuntur que les populations autochtones utilisent afin de dĂ©signer ce grand oiseau[45]. Les Incas le nommaient Kutur-Kuntur reprĂ©sentant le Dieu de l’air[46].

Taxonomie

Cette espÚce est décrite par le naturaliste suédois Carl von Linné en 1758 dans la dixiÚme édition de Systema Naturae[47] sous son nom binominal actuel.

L'emplacement taxonomique exact du Condor des Andes et des six autres espĂšces de Vautours du Nouveau Monde reste flou[48]. Bien que les vautours du Nouveau Monde et de l'Ancien Monde aient la mĂȘme apparence et des rĂŽles Ă©cologiques identiques, ils ont Ă©voluĂ© Ă  partir d'ancĂȘtres diffĂ©rents dans des rĂ©gions du monde diffĂ©rentes et ne sont pas Ă©troitement apparentĂ©s. C'est seulement sur la façon dont les deux familles diffĂšrent que portent actuellement les discussions, certaines autoritĂ©s ayant suggĂ©rĂ© antĂ©rieurement que les vautours du Nouveau Monde Ă©taient plus Ă©troitement liĂ©s aux cigognes[49]. Plus rĂ©cemment, les autoritĂ©s les ont maintenu dans l'ordre des Falconiformes avec les vautours de l'Ancien Monde[50] ou les ont placĂ©s dans l'ordre des Accipitriformes.

Toujours est-il que le Condor des Andes est actuellement la seule espÚce vivante de son genre, Vultur[51]. C'est aussi une espÚce dite monotypique, ce qui veut dire que l'on ne lui connaßt aucune sous-espÚce aujourd'hui vivante. Avec lui, il n'y a qu'une seule autre espÚce de condor : le Condor de Californie (Gymnogyps californianus), mais il est classé lui dans le genre Gymnogyps[1]. Les autres vautours du Nouveau Monde, les Urubus et le Sarcoramphe roi, sont des cousins des condors appartenant à la famille des Cathartidés.

Contrairement au Condor de Californie dont on a retrouvĂ© de nombreux vestiges fossiles ainsi que de quelques autres de ses congĂ©nĂšres, les fossiles du Condor des Andes rĂ©cupĂ©rĂ©s Ă  ce jour sont rares. Les espĂšces de condors supposĂ©es exister au Plio-/PlĂ©istocĂšne en AmĂ©rique du Sud ont plus tard Ă©tĂ© reconnues ne pas ĂȘtre diffĂ©rentes de l'espĂšce prĂ©sente, bien que l'on sache, Ă  partir de quelques os plutĂŽt petits trouvĂ©s dans un dĂ©pĂŽt du PliocĂšne du dĂ©partement de Tarija, en Bolivie, qu'il existait peut-ĂȘtre une sous-espĂšce plus petite Vultur gryphus patruus[52].

Le condor des Andes et l'homme

Une relation ambivalente

La relation des hommes avec le Condor des Andes est un paradoxe dans la mesure oĂč il est Ă  la fois emblĂ©matique et symbolique voire totĂ©mique pour les peuples andins, mais aussi un oiseau de mauvaise rĂ©putation considĂ©rĂ© parfois Ă  tort comme nuisible du fait de son statut de charognard, rĂ©pugnant symbole de mort, ou encore dangereux prĂ©dateur de troupeau, accusĂ© aussi de rapt d'enfant. On l’accuse d’attaquer les jeunes alpagas ou de tuer des vaches, des moutons et des chĂšvres en les effrayant volontairement pour qu'ils se prĂ©cipitent d’eux-mĂȘmes dans le vide. Il n'est peut-ĂȘtre pas impossible que le condor sĂšme parfois la panique dans les troupeaux en les survolant Ă  trĂšs basse altitude, mais « il se peut aussi que son habiletĂ© [et sa rapiditĂ©] Ă  dĂ©couvrir une carcasse fraĂźche lui fasse endosser la mort de l'animal[5] ». Et il est vrai que depuis que le gibier sauvage : le daim, la vigogne et le guanaco (l'ancĂȘtre sauvage du lama), a quasiment Ă©tĂ© anĂ©anti par les chasseurs, le condor est obligĂ© de se rabattre pour se nourrir sur les dĂ©pouilles du bĂ©tail domestique[5].

Or de nos jours, on sait que le condor ne peut attaquer des proies vivantes que si elles sont petites (rongeurs, reptiles...), et ne peut rien emporter dans ses serres qui en sont physiologiquement incapables. Il a aussi Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© que les charognards ont un rĂŽle clĂ© dans l'Ă©cosystĂšme, nettoyant l'environnement des carcasses en dĂ©composition, assurant ainsi la non-contamination des sols et des sources d'eau, et permettant aussi de prĂ©venir la propagation des maladies parmi les grands mammifĂšres[5]. Or le Condor des Andes est un charognard remarquablement efficace grĂące Ă  ses techniques systĂ©matiques de repĂ©rage, Ă  son excellente mĂ©moire des itinĂ©raires et de la topographie de son vaste territoire, et grĂące Ă  ses moyens de dĂ©tection exceptionnels (la vue particuliĂšrement). « OĂč que la mort frappe, ce fossoyeur de la nature n'est jamais loin pour nettoyer au plus vite une carcasse[5] ».

C'est ainsi que s'est amorcĂ©e une grande rĂ©conciliation entre les populations autochtones et le condor, dont tĂ©moigne l'article Ă©cologiste d'Hubert Reeves au titre parlant : « Le Condor des Andes, ou comment les hommes changent[53] ». RĂ©conciliation confortĂ©e par les initiatives locales, nationales et internationales de protection de la nature, ainsi que par les revenus qu'engendre le tourisme de contemplation de ce superbe animal dans son milieu naturel[36]. Kofi Annan, SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de l'ONU, a mĂȘme fait du condor des Andes un symbole de l'amitiĂ© entre les peuples, Ă  travers le cĂ©lĂšbre thĂšme d'El cĂłndor pasa dĂ©couvert et aimĂ© dans sa jeunesse, dans son discours de rĂ©ception de la Grand-Croix du Condor des Andes en Bolivie en 2003[54].

Statut de conservation de l'espĂšce, menaces et protection

Nonobstant l'UICN a classé cette espÚce en catégorie NT (quasi menacée), principalement du fait de sa chasse par l'homme sur une population d'espÚce trÚs faible[55]. D'ailleurs la CITES a inscrit cette espÚce dans sa liste d'oiseaux dont la survie est gravement menacée[56].

Le Condor des Andes est en effet menacé par les empoisonnements indirects utilisés pour les prédateurs, et par le plomb contenu dans les carcasses. Le recul des grands prédateurs (puma, jaguar), qui lui fournissaient des carcasses dont il consommait les restes, a aussi raréfié ses sources de nourriture. Les dérangements par l'homme, la réduction et la désertification de son habitat, la raréfaction de ses proies sauvages remplacées par la consommation de carcasses d'animaux domestiques (ce qui peut le désigner à la vindicte des éleveurs), la chasse illégale et la persécution jouent un rÎle important dans le déclin de cette espÚce[3].

De plus, les empoisonnements de condors dus aux pesticides se multiplient ces derniĂšres annĂ©es en Argentine, notamment Ă  cause de l'utilisation du carbofuran, un insecticide interdit en France en 2008 Ă  cause de sa dangerositĂ©, ainsi qu'en tĂ©moigne un article de 2018 au titre Ă©loquent : « [Encore] 34 condors des Andes empoisonnĂ©s en Argentine par un pesticide[40] » (avec plusieurs moutons et chĂšvres, ainsi qu'un puma : c'Ă©tait probablement lui qui Ă©tait ciblĂ© par les Ă©leveurs, avec leur carcasse empoisonnĂ©e, pour protĂ©ger leurs troupeaux ; la mort des condors ne serait ainsi qu'un dĂ©gĂąt collatĂ©ral). Ces Ă©pisodes massifs de morts en groupe sont dus aux habitudes collectives d'alimentation des condors dĂ©jĂ  Ă©voquĂ©es. Et ils inquiĂštent les spĂ©cialistes Ă  cause du faible taux de natalitĂ© des condors des Andes[40] : on l'a vu, la lenteur et la raretĂ© de son cycle reproductif, ainsi que ses mƓurs reproductives (dont la fidĂ©litĂ© des couples), font que la croissance de l’espĂšce est trĂšs lente, et donc que la rĂ©silience de sa courbe dĂ©mographique est longue Ă  venir aprĂšs ces Ă©pisodes de morts collectives (qu'on voudrait croire vraiment accidentelles). Dans ce contexte, « la disparition de 34 spĂ©cimens, dont 30 adultes en Ăąge de se reproduire, est une perte inestimable[40] ». D'autant que si le couple de condors n'est pas touchĂ© en mĂȘme temps, le conjoint survivant, parfois fidĂšle par-delĂ  la mort comme on l'a vu, ne se reproduira peut-ĂȘtre plus lui non plus : avec un seul mort, ce serait ainsi deux adultes qui seraient stĂ©rilisĂ©s, ce qui multiplie l'effet dĂ©vastateur de ces empoisonnements. Alors, interrogĂ© par Birdlife, Sergio Lambertucci, directeur du Groupe de recherches en biologie de la conservation (Group of Researchers in Conservation Biology GRINBIC, from the Argentine Research Council, INIBIOMA-CONICET), dĂ©clare mĂȘme que « les Condors des Andes ne peuvent survivre Ă  ces taux de mortalitĂ© ; l'usage du poison doit absolument ĂȘtre arrĂȘtĂ©, si nous voulons continuer Ă  contempler les condors survolant les cimes andines[36] ».

C'est pourquoi l'association Aves Argentinas se bat depuis 2017 pour l’adoption d’une loi sur la traçabilitĂ© des pesticides. « Le principe : tenir un registre Ă  la fois des Ă©leveurs ou agriculteurs acheteurs, mais Ă©galement des produits toxiques vendus ; Ă©dicter une rĂ©glementation urgente (avec surveillance) sur l’utilisation, la fabrication, la formulation, le fractionnement, le stockage, le transport, le marketing, la publicitĂ© d’affichage, ainsi que l’utilisation et l’élimination sĂ©cures des dĂ©chets ou rĂ©sidus de ces produits toxiques[40] ». Au-delĂ , les associations luttent pour l’application de nouvelles technologies moins polluantes et moins dangereuses : « en effet, les pesticides sont non seulement coupables d’empoisonner la faune sauvage, mais ils pĂ©nĂštrent Ă©galement dans les sols, contaminant les nappes d’eau. [...] Le carbofuran pour sa part, est responsable de 66 des 90 derniers dĂ©cĂšs de condor recensĂ©s[40] ».

De mĂȘme, la fondation argentine Bioandina a lancĂ© en 2003 un programme international de rĂ©introduction de Condors des Andes dans certaines rĂ©gions de la cĂŽte Atlantique comme dans la petite localitĂ© argentine de Sierra de PailĂ©man, dans la province de Rio Negro en Patagonie. Cette action, nommĂ©e « Retour du condor Ă  la mer » a permis la rĂ©introduction de 24 condors entre 2003 et 2007[57].

Culture, croyance et symbolique

Pour les dimensions mythique, symbolique et culturelle de cet oiseau, notamment pour les populations précolombiennes, voir

oĂč d'autres aspects sont dĂ©veloppĂ©s.

Illustration de Gauchos chassant des condors au lasso en 1895

La chasse au condor est une tradition dans les cordillÚres des Andes. La technique de chasse est originale : on amÚne une vache, un ùne ou un cheval en altitude, et on l'abat dans un creux topographique assez profond et pentu. AprÚs plusieurs jours de guet, le condor est attiré par la carcasse, et approche. Il se pose au fond du creux pour son repas. Les chasseurs le laissent se gaver pour l'alourdir, puis sortent de leur position de guet en criant et courant vers lui. Quand les chasseurs sont assez proches, ils jettent un filet sur le condor et l'emportent comme trophée. Cette technique exploite le fait que le condor utilise un vol plané plutÎt qu'un vol battu. Lorsqu'il est au fond du creux, il doit faire des efforts énormes pour réussir à décoller et monter plus fort que la pente qui l'entoure. Il est obligé de se poser plusieurs fois, ce qui laisse aux chasseurs du temps pour approcher.

Selon la croyance populaire, ses ailes larges et ses serres fortes lui permettent de s'envoler avec une proie d'un poids significatif. On dit alors qu'il peut rĂ©ussir Ă  s'emparer de jeunes enfants, ou de petits animaux de ferme (comme moutons et chĂšvres). Ces manƓuvres sont cependant totalement impossibles pour cet animal incapable de transporter quoi que ce soit, Ă  cause de la morphologie de ses pattes, dont le « pouce » est trop haut comme on l'a vu[5].

Géoglyphe ancien du désert de Nazca vu d'avion représentant un grand condor des Andes (134m de long).
Temple du Condor inca au Machu-Picchu.

Le Condor des Andes Ă©tait un oiseau mythique et vĂ©nĂ©rĂ© pour les peuples Inca et prĂ©incaĂŻques. Il Ă©tait considĂ©rĂ© par eux comme un messager de transcendance, ainsi que nous l'avons vu, grĂące Ă  la hauteur exceptionnelle de son vol. Il Ă©tait l'animal-totem du monde d’en haut (Haqay Pacha en quechua) dans la cosmovision andine, et faisait le lien entre le monde des vivants et le divin[19]. Les Nazcas au PĂ©rou ont sculptĂ© Ă  la surface du dĂ©sert de Nazca un gĂ©oglyphe gĂ©ant reprĂ©sentant un condor entre 300 av. J.-C. et 800 de notre Ère. Dans les Andes centrales, le temple du Condor, situĂ© dans l'ancienne llaqta (citĂ©) inca du XVe siĂšcle Machu Picchu, est un lieu vouĂ© Ă  la symbolique du condor. En ce lieu, les Incas ont composĂ© par un mĂ©lange complexe de roches naturelles et de roches taillĂ©es, les ailes dĂ©ployĂ©es d'un condor prenant son envol. À l'Ă©tage du temple se trouve un rocher sculptĂ© en forme de tĂȘte de condor avec la collerette blanche des plumes de son cou. Les historiens pensent que la tĂȘte du condor a Ă©tĂ© utilisĂ©e comme un autel sacrificiel[58]. D'ailleurs le plan entier du Machu Picchu laisse penser Ă  la forme d'un condor. Les Incas, en effet, donnaient Ă  leurs citĂ©s la forme de leurs animaux sacrĂ©s[59].

Monument reprĂ©sentant un condor et un taureau en hommage Ă  la fĂȘte du Yawar.

Chaque annĂ©e en juillet au PĂ©rou, autour de la fĂȘte nationale[60], se dĂ©roule la fĂȘte du Yawar[61]. OrganisĂ©e dans la localitĂ© trĂšs reculĂ©e de Ccollurqui dans la rĂ©gion d'ApurĂ­mac (province de Cotabambas), un condor, symbole des Indiens andins et oiseau-roi de la cordillĂšre des Andes, livre un combat contre un taureau qui symbolise quant Ă  lui l'espagnol et le conquistador. Dans une arĂšne, un condor est attachĂ© au dos d'un taureau qui va ĂȘtre excitĂ© par les ponchos des espontaneados[62] comme lors d'une faena. Le grand oiseau tente de se libĂ©rer en assĂ©nant au taureau des violents coups de bec. La plupart du temps le taureau sera vaincu et la victoire du condor qu'on libĂšre, donnera l'occasion de poursuivre les festivitĂ©s. Ce combat qui se transforme en un vĂ©ritable rituel reprĂ©sente la revanche des Indiens sur les conquistadores. Or si le condor est gravement blessĂ© et meurt comme cela peut arriver, la croyance locale veut que le malheur va s'abattre sur le village[63].

Dans les constellations quechuas on retrouve l'astérisme du condor. En le comparant au zodiaque il se situerait dans la partie orientale de la constellation du Scorpion[64].

L'image du condor inspire de nombreuses organisations internationales diverses et variĂ©es par sa symbolique du grand oiseau noir qui plane au-dessus de la Terre comme l'OpĂ©ration Condor, l'Ă©quipe de hockey-sur-glace, les Condors de Bakersfield, le nom d'un modĂšle de manĂšge appelĂ© Condor, une revue ornithologique The Condor, une force aĂ©rienne de l'Allemagne nazie nommĂ©e la lĂ©gion Condor, une compagnie aĂ©rienne allemande Condor et pĂ©ruvienne Aero CĂłndor, le premier avion Ă  propulsion humaine le Gossamer Condor, le monde de la bande dessinĂ©e avec le personnage Condor crĂ©Ă© en 1976, le monde du dessin animĂ© avec L'ƒuf du condor gĂ©ant prĂ©sentĂ© en 1944.

En Terre de Feu, les amérindiens Onas le nommaient « chalna » et les Yamanas « gurgu », « huairao » ou « huairu ».

Dans l'imaginaire collectif, les habitants de la Patagonie du sud-ouest considĂšrent ce royal charognard avec le plus grand des respects. En effet, il incarne des valeurs de puretĂ© et de grande simplicitĂ©. Depuis des siĂšcles, il est vĂ©nĂ©rĂ© comme le dieu Ă  plumes courbes, aussi appelĂ© dans le langage primitif Lasus-tĂčtĂč.

Symbole national

L'iconographie du Condor des Andes apparaĂźt sur les timbres de nombreux pays de l'AmĂ©rique du Sud comme l'Équateur en 1958, l'Argentine en 1960, le PĂ©rou en 1973, la Bolivie en 1985, la Colombie en 1989, 1992, 1996, le Chili en 2001, le Venezuela en 2004.

Son effigie peut ĂȘtre admirĂ©e sur les figures de proue de certains grands voiliers nationaux comme celle de la goĂ©lette Esmeralda, voilier Ă©cole de la marine du Chili ou bien celle du Guayas, voiler Ă©cole de la marine de l'Équateur.

L'image du condor se retrouve sur les diffĂ©rentes armoiries des pays andins comme sur celles de la Bolivie oĂč le condor, oiseau national de la Bolivie et situĂ© au-dessus des armes, symbolise l'horizon sans limite du pays ; sur celles du Chili oĂč il reprĂ©sente la force ; sur celles de la Colombie oĂč il est Ă  la fois emblĂšme national et synonyme de libertĂ© ; sur celles de l'Équateur oĂč il reprĂ©sente le pouvoir, la grandeur et la valeur du peuple Ă©quatorien ; et enfin sur les anciennes armoiries du PĂ©rou (1821-1825) oĂč, associĂ© au lama, ils symbolisaient ensemble le rĂšgne animal.

Armoiries de différents pays sur lesquelles est représenté le condor :

Le condor et l'art

On retrouve des objets en céramique mochica ou bien en or façonné avec la représentation du condor qui ont été réalisés par des populations précolombiennes installées tout au long de la cÎte nord-péruvienne, dans les oasis cÎtiÚres et sur les contreforts de la chaßne andine, de -100 à 700.

On ne doit pas oublier le célÚbre thÚme d'El cóndor pasa, déjà évoqué, standard international parfois considéré comme « second hymne national » du Pérou.

Le sculpteur animalier français François Pompon (1855-1933) a réalisé différentes statuettes à l'effigie du condor[65]. Une statue d'un condor réalisée par l'artiste est installée sur sa sépulture au cimetiÚre de Saulieu en France[66].

  • ƒuvres prĂ©colombiennes inspirĂ©es par le thĂšme du condor
  • Une cĂ©ramique mochica (entre 100 et 700 de notre Ăšre) reprĂ©sentant un condor au musĂ©e Larco Ă  Lima.
    Une céramique mochica (entre 100 et 700 de notre Úre) représentant un condor au musée Larco à Lima.
  • Une coiffe en or mochica avec la reprĂ©sentation de deux condors.
    Une coiffe en or mochica avec la représentation de deux condors.
  • Tunique sans manche (ou poncho) de culture Chancay (entre 1200 et 1470 de notre Ăšre), avec des condors en vol.
    Tunique sans manche (ou poncho) de culture Chancay (entre 1200 et 1470 de notre Ăšre), avec des condors en vol.

Notes et références

Notes

  1. On parle de dimorphisme sexuel lorsque le mĂąle et la femelle d'une mĂȘme espĂšce prĂ©sentent une diffĂ©rence d'aspect et/ou de taille bien marquĂ©e. Lorsqu'ils se ressemblent au point d'ĂȘtre indiscernables les zoologues parlent de monomorphisme sexuel.
  2. Émargination (plume) : espace entre les extrĂ©mitĂ©s des rĂ©miges primaires.

Références

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  60. Dans la culture des Chancas, la fĂȘte du Yawar signifie la fĂȘte du sang.
  61. Cf. Glossaire de la tauromachie
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Annexes

Bibliographie

  • (es) Carlos Julio Kovacs, Ors Kovacs, Zsolt Kovacs, Carlos Mariano Kovacs, Manual ilustrado de las Aves de la Patagonia, Carlos Kovacs, 2005, 365 p. (ISBN 987-22484-0-0)

Articles connexes

Références taxinomiques

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