Traité de Lisbonne
Le traitĂ© de Lisbonne est un traitĂ© signĂ© le Ă Lisbonne entre les vingt-sept Ătats membres de l'Union europĂ©enne, qui transforme l'architecture institutionnelle de l'Union.
Type de traité | Amendements aux traités existants |
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Signature | |
Lieu de signature | Lisbonne (Portugal) |
Sceau | |
Entrée en vigueur | |
Signataires | 27 Ătats membres de l'Union europĂ©enne |
DĂ©positaire | Gouvernement italien |
Langues | Langues officielles de l'Union européenne |
de l'Union européenne
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Ce traité a été préparé, pendant le second semestre 2007, au sein d'une conférence intergouvernementale (CIG) constituée pour pallier la non-ratification du traité de Rome de 2004 établissant une constitution pour l'Europe[Note 1].
à la différence du traité constitutionnel de 2004, qui remplaçait les deux grands traités par un texte nouveau, le traité de Lisbonne, qui reprend la majorité du traité de 2004[1], conserve les traités existants tout en les modifiant en profondeur :
- le traité instituant la Communauté européenne (Rome, 1957), qui est rebaptisé « traité sur le fonctionnement de l'Union européenne » ;
- le traité sur l'Union européenne (Maastricht, 1992).
Le traitĂ© de Lisbonne est entrĂ© en vigueur le [2], soit le premier jour du mois qui suit l'achĂšvement du processus de ratification dans les vingt-sept Ătats signataires de l'Ă©poque, avec dĂ©pĂŽt des instruments de ratification Ă Rome.
Généralités
Le texte du traitĂ© a Ă©tĂ© approuvĂ© par le Conseil europĂ©en de Lisbonne le et signĂ© le de la mĂȘme annĂ©e[3] par les 27 chefs d'Ătat ou de gouvernement, Ă©galement Ă Lisbonne, pour ĂȘtre ensuite ratifiĂ© par chaque Ătat membre selon ses propres procĂ©dures de ratification.
Le mandat donné à la « CIG 2007 » résulte du « projet de mandat pour la CIG », un document de quinze pages[4], annexé aux conclusions du Conseil européen de Bruxelles du .
« Traité modificatif » plutÎt que « traité simplifié » ou « mini-traité »
Avant de devenir officiellement le traité de Lisbonne, le traité a fait l'objet d'une polémique à propos de son appellation : aprÚs négociations, il a pris le nom de « traité modificatif », nom proposé par le groupe Amato (initialement « nouveau traité ») et non celui de « traité simplifié » ou de « mini-traité », terminologie qu'avait avancée Nicolas Sarkozy.
En effet, l'appellation « mini-traité » ne convenait pas au fait que le traité proprement dit contient 145 pages[5], qu'il modifie plusieurs centaines de dispositions des traités CE et UE[Note 2], et qu'il est associé à trente-six protocoles, vingt-six déclarations et des annexes consacrées en particulier à une renumérotation de l'ensemble des articles des traités existants.
De plus, sa complexitĂ© rĂ©dactionnelle est trĂšs Ă©levĂ©e. En effet, la prĂ©sidence allemande et les gouvernements des sept Ătats membres qui auraient voulu conserver l'appellation « Constitution europĂ©enne » soutenaient une dĂ©nomination technique et non une dĂ©nomination « amoindrie ».
Il fallait aussi satisfaire les gouvernements des pays qui ne voulaient pas de référendum pour leurs citoyens, avec le risque d'un rejet du traité remplaçant la Constitution européenne. Le référendum était souhaité par 76 % des Allemands, 75 % des Britanniques, 72 % des Italiens, 65 % des Espagnols[6] et 71 % des Français[7].
D'autres appellations ont été données au texte par la presse : nouveau « traité institutionnel[8] » ou « traité de Lisbonne[9] », par anticipation de sa signature dans la capitale portugaise, à l'image des traités antérieurs (de Maastricht en 1992, d'Amsterdam en 1997, de Nice en 2001).
L'article 7 du traité, tel qu'il a été signé le , consacre la dénomination « traité de Lisbonne ».
La Documentation française a publié le 28 mai 2008 le premier commentaire juridique, article par article, du traité de Lisbonne[10].
Calendrier
- : cinquante ans de la signature du traité de Rome. Déclaration de Berlin appelant à un « renouveau des bases communes » politiques de l'Union.
- : le Conseil européen des 21 et 22 juin décide la convocation d'une conférence intergouvernementale (CIG) en vue de la révision des institutions de l'UE.
- : accord des Vingt-Sept à Lisbonne sur le texte d'un traité modificatif du TUE et du traité instituant la Communauté européenne.
- : signature du traité à Lisbonne au monastÚre des Hiéronymites.
- : date initialement prĂ©vue de l'entrĂ©e en vigueur du traitĂ©, prĂ©vue Ă son article 9, sous rĂ©serve que tous les Ătats membres aient procĂ©dĂ© Ă sa ratification Ă cette date, ce qui n'a pas Ă©tĂ© le cas. Cette date est donc reportĂ©e au premier jour du mois qui suit le dĂ©pĂŽt des instruments de ratification Ă Rome.
- : entrée en vigueur effective du traité. Toutefois, Herman Van Rompuy, désigné le comme président du Conseil européen, n'assume ses nouvelles fonctions qu'à partir du . Son rÎle aurait autrement fait doublon avec celui du Premier ministre suédois, Fredrik Reinfeldt, qui assurait la présidence tournante du Conseil européen pour le second semestre 2009.
- 2014 : entrée en vigueur prévue du nouveau systÚme de vote à double majorité avec une période transitoire jusqu'en 2017.
Aspects juridiques
Le traité de Lisbonne est un traité international, conclu pour une durée illimitée. Son contenu consiste essentiellement en une modification des traités européens existants :
- l'article 1 modifie le traité sur l'Union européenne (traité UE, à l'origine le traité de Maastricht) ;
- l'article 2 modifie le traité instituant la Communauté européenne (traité CE, à l'origine le traité de Rome de 1957).
Le traité UE conserve son nom actuel, tandis que le traité CE devient « un traité sur le fonctionnement de l'Union européenne », l'Union étant dotée d'une personnalité juridique unique. Les juristes devront prendre en compte une nouvelle renumérotation des articles de ces deux traités, aprÚs celle à laquelle avait déjà procédé le traité d'Amsterdam. Ainsi la procédure législative de codécision, autrefois définie à l'article 189B puis transférée à l'article 251 par le traité d'Amsterdam, sera désormais inscrite à l'article 294.
Le terme « Communauté » est remplacé par « Union » et il est indiqué que les deux traités constituent les traités sur lesquels sera fondée l'Union. Ce qui a des conséquences au plan extérieur comme de devoir renotifier tous les accords internationaux[11].
Le concept constitutionnel, qui consistait à abroger tous les traités actuels pour les remplacer par un texte unique intitulé « traité établissant une constitution pour l'Europe », est abandonné. Le traité modificatif introduira dans les traités actuels, qui resteront en vigueur, les innovations découlant des travaux de la CIG de 2004.
Le traité institue deux types d'actes d'instrument d'exécution du droit de l'Union :
- l'acte d'exécution (article 291 TFUE) ;
- l'acte délégué (article 290 TFUE), qui est « non législatif » et qui « permet au législateur de l'Union européenne de déléguer à la Commission européenne le pouvoir d'adopter des actes non législatifs de portée générale qui modifient ou complÚtent des éléments non essentiels de l'acte législatif »[12].
Principales dispositions
- Les modifications techniques du traité Euratom et des différents protocoles actuels, qui ont été convenus par la CIG de 2004, seront reprises par le biais de protocoles annexés à ce traité modificatif.
- Le prĂ©sident de la Commission europĂ©enne voit son indĂ©pendance Ă l'Ă©gard des Ătats renforcĂ©e. Le Conseil europĂ©en choisit un « candidat » Ă la majoritĂ© qualifiĂ©e (et non Ă l'unanimitĂ©, comme c'Ă©tait le cas avant le traitĂ© de Nice de 2001), lequel doit ensuite ĂȘtre Ă©lu par la majoritĂ© du Parlement europĂ©en. La Commission europĂ©enne, qui dispose du monopole de l'initiative lĂ©gislative (art. 9D2 TUE), est soumise Ă un vote d'approbation du Parlement europĂ©en (art. 9D7 TUE). Elle peut ĂȘtre soumise Ă une motion de censure du Parlement europĂ©en, laquelle requiert l'accord de la majoritĂ© des 2/3 des suffrages exprimĂ©s et la majoritĂ© des membres qui la composent (art. 234 TFUE). La Commission n'est ainsi plus responsable devant le Conseil europĂ©en, mais devant le Parlement (art. 9D8 TUE). Enfin, la composition numĂ©rique de la Commission est rĂ©duite, tandis que les commissaires doivent ĂȘtre choisis, entre autres, en raison de « leur engagement europĂ©en » (art. 9D3 TUE).
- Le titre de « ministre des Affaires Ă©trangĂšres de l'Union » a Ă©tĂ© supprimĂ©. La fonction sera appelĂ©e « Haut ReprĂ©sentant de l'Union pour les affaires Ă©trangĂšres et la politique de sĂ©curitĂ© ». ChargĂ© de la politique europĂ©enne de sĂ©curitĂ© et de dĂ©fense, celui-ci est Ă©lu Ă la majoritĂ© qualifiĂ©e par le Conseil de l'Union europĂ©enne et est Ă©galement vice-prĂ©sident de la Commission europĂ©enne et prĂ©sident du Conseil des affaires Ă©trangĂšres. Par ailleurs, l'ex-article 19 alinĂ©a 3 TUE (devenu l'article 34(2) paragraphe 2) dispose que les Ătats membres siĂ©geant au Conseil de sĂ©curitĂ© de l'ONU devront inviter le Haut ReprĂ©sentant « Ă prĂ©senter la position de l'Union » au Conseil de sĂ©curitĂ© lorsque les Ătats membres de l'Union auront « dĂ©fini une position » commune[13].
- Le Conseil europĂ©en (sommet des chefs d'Ătat et de gouvernement des Ătats membres) n'est dĂ©sormais plus qu'une institution parmi d'autres de l'UE. Son prĂ©sident â actuellement Charles Michel â n'est plus Ă©lu Ă l'unanimitĂ©, mais Ă la majoritĂ© qualifiĂ©e, et ne doit exercer aucun mandat national (art. 9B TUE). Il assure « la reprĂ©sentation extĂ©rieure de l'Union (âŠ) sans prĂ©judice des attributions du Haut ReprĂ©sentant de l'Union pour les affaires Ă©trangĂšres et la politique de sĂ©curitĂ© » (art. 9B TUE).
- Les termes « loi » et « loi-cadre » seront abandonnés au profit du maintien des termes actuels de « rÚglements », « directives » et « décisions ». Néanmoins, les termes de « procédure législative ordinaire », de « fonction législative » (art. 9A et 9C du TUE, art. 249A1-A3 TFUE, etc.), etc., sont abondamment utilisés dans le traité : le changement par rapport au TCE n'est donc qu'idéologique.
- Les traités ne contiendront aucun article mentionnant les symboles de l'Union (le drapeau européen, l'hymne européen et la devise européenne)[Note 3].
- En ce qui concerne la primauté du droit de l'Union, la CIG adoptera une déclaration rappelant la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE, auparavant nommée Cour de justice des Communautés européennes).
- L'article sur les droits fondamentaux contiendra une mention â par consĂ©quent, le texte de la Charte sur les droits fondamentaux ne figurera pas dans le corps des traitĂ©s â de la Charte des droits fondamentaux de l'Union europĂ©enne, comme convenu lors de la CIG de 2004, Ă laquelle il confĂ©rera une valeur juridiquement contraignante. Celle-ci est par ailleurs placĂ©e en annexe, les annexes et dĂ©clarations faisant partie intĂ©grante du traitĂ©, selon ce dernier. La Charte n'est pas juridiquement contraignante pour le Royaume-Uni, qui a fait annexer un protocole ad hoc, tandis que la Pologne dĂ©clarait unilatĂ©ralement que « la charte ne porte atteinte en aucune maniĂšre au droit des Ătats membres de lĂ©gifĂ©rer dans le domaine de la moralitĂ© publique, du droit de la famille ainsi que de la protection de la dignitĂ© humaine et du respect de l'intĂ©gritĂ© physique et morale »). NĂ©anmoins, le protocole no 7 prĂ©voit que la Charte ne permet ni Ă la Cour de justice europĂ©enne ni aux juridictions britanniques et polonaises d'Ă©carter l'application d'actes nationaux de ces deux pays jugĂ©s incompatibles avec ladite charte. Les deux articles du protocole no 30 ont une portĂ©e politique, les chefs d'Ătat et de gouvernement souhaitant se montrer en position de force, car l'article 2 dispose qu'« elle ne s'applique Ă la Pologne ou au Royaume-Uni que dans la mesure oĂč les droits et principes qu'elle contient sont reconnus dans la lĂ©gislation ou les pratiques de la Pologne ou du Royaume-Uni ». Or, l'ensemble des droits retenus dans la Charte sont reconnus par les Ătats membres qui l'ont Ă©laborĂ©.
- à l'article 49, premier alinéa (« CritÚres d'éligibilité et procédure d'adhésion à l'Union ») est ajoutée la phrase suivante : « Les critÚres d'éligibilité ayant fait l'objet d'un accord du Conseil européen sont pris en compte. » Cela signifie que les futurs candidats devront respecter les critÚres de Copenhague portant notamment sur le développement démocratique.
- L'article 49 A du traité de Lisbonne introduit l'article 50 du traité sur l'Union européenne[14].
Catégories et domaines de compétences de l'Union
CatĂ©gories de compĂ©tences principales[15]. Les compĂ©tences non explicitement mentionnĂ©es dans le traitĂ© sont des compĂ©tences exclusives des Ătats. Dans les domaines de la recherche, du dĂ©veloppement technologique et de l'espace, l'Union dispose d'une compĂ©tence pour mener des actions, notamment pour dĂ©finir et mettre en Ćuvre des programmes, sans que l'exercice de cette compĂ©tence ne puisse avoir pour effet d'empĂȘcher les Ătats membres d'exercer la leur. Dans les domaines de la coopĂ©ration au dĂ©veloppement et de l'aide humanitaire, l'Union dispose d'une compĂ©tence pour mener des actions et une politique commune, sans que l'exercice de cette compĂ©tence ne puisse avoir pour effet d'empĂȘcher les Ătats membres d'exercer la leur.
Seule l'Union peut lĂ©gifĂ©rer et adopter des actes juridiquement contraignants, les Ătats membres ne pouvant le faire par eux-mĂȘmes que s'ils sont habilitĂ©s par l'Union, ou pour mettre en Ćuvre les actes de l'Union.
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L'Union et les Ătats membres peuvent lĂ©gifĂ©rer et adopter des actes juridiquement contraignants dans ces domaines. Les Ătats membres exercent leur compĂ©tence dans la mesure oĂč l'Union n'a pas exercĂ© la sienne. Les Ătats membres exercent Ă nouveau leur compĂ©tence dans la mesure oĂč l'Union a dĂ©cidĂ© de cesser d'exercer la sienne.
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L'Union dispose d'une compĂ©tence pour mener des actions pour appuyer, coordonner ou complĂ©ter l'action des Ătats membres.
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Texte du traité
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Le , la présidence portugaise de l'Union a diffusé le texte[16] du traité modificatif (en anglais et en français), tel qu'il résulte du travail des membres de la 7e CIG, conformément au mandat qu'elle a reçu (l'accord avait été atteint le ).
La CIG a conclu ses travaux lors du Conseil européen des 18 et (au petit matin, dans la nuit du 18 au 19), aprÚs des discussions ultérieures sur deux points :
- la Pologne insistait pour mettre le compromis de Ioannina, un mĂ©canisme qui permet le renvoi des dĂ©cisions prises par le Conseil de l'Union Ă des pays en minoritĂ©, Ă l'intĂ©rieur mĂȘme du traitĂ©, plutĂŽt que dans une dĂ©claration sĂ©parĂ©e. Le compromis qui a Ă©tĂ© trouvĂ© est de l'inclure dans un protocole, qui a une force lĂ©gale supĂ©rieure Ă celle d'une dĂ©claration. Mais ce compromis pourra ĂȘtre abandonnĂ© par le Conseil Ă l'unanimitĂ©, alors que la Pologne rĂ©clamait une nouvelle confĂ©rence intergouvernementale ;
- l'Italie contestait la nouvelle rĂ©partition du nombre de parlementaires, proposĂ©e par le Parlement europĂ©en et qui voyait pour la premiĂšre fois un dĂ©crochage entre les trois Ătats membres les plus peuplĂ©s aprĂšs l'Allemagne : la France avec 74 dĂ©putĂ©s europĂ©ens, le Royaume-Uni avec 73 et l'Italie avec seulement 72 dĂ©putĂ©s. Cette rĂ©partition tenait compte de la population rĂ©sidente dans ces trois pays et non du nombre de citoyens de l'Union comme le prĂ©voyait le traitĂ©. Finalement, un dĂ©putĂ© supplĂ©mentaire a Ă©tĂ© accordĂ© Ă l'Italie, en enlevant du compte le prĂ©sident du Parlement europĂ©en (il y aura donc 751 dĂ©putĂ©s avec ce dernier qui traditionnellement ne vote pas). Une nouvelle redistribution des siĂšges se fera avant les Ă©lections europĂ©ennes de 2014.
Dispositions relatives aux institutions
Les changements institutionnels agréés lors de la CIG de 2004 seront intégrés en partie dans le traité UE et en partie dans le traité sur le fonctionnement de l'Union. Le nouveau titre III donnera une vue d'ensemble du systÚme des institutions, avec notamment :
- Parlement européen (nouvelle composition) ;
- Conseil europĂ©en, transformation en une nouvelle institution et crĂ©ation de la fonction de prĂ©sident du Conseil europĂ©en (et non « prĂ©sident de l'Union » ou « prĂ©sident de l'Europe », expressions frĂ©quemment employĂ©es â Ă tort â par les mĂ©dias) ;
- le Conseil de l'Union europĂ©enne : introduction du systĂšme de vote Ă la double majoritĂ©, prĂ©sidence semestrielle du Conseil ; 4 Ătats peuvent former le blocage ; La minoritĂ© de blocage, si elle n'est pas loin de l'atteindre, peut demander une prolongation des discussions au Conseil pendant un dĂ©lai raisonnable ;
- Commission europĂ©enne, nouvelle composition (passage Ă 18 commissaires[17] au lieu de 27 commissaires), renforcement du rĂŽle du prĂ©sident qui est Ă©lu par le Parlement europĂ©en. Toutefois la Commission devrait conserver un commissaire par pays, ce qui est aussi permis par le traitĂ© Ă la suite du processus de ratification en Irlande oĂč le Conseil europĂ©en est engagĂ© sur ce point[Note 1] ;
- Cour de justice de l'Union européenne (nouvelle dénomination de la Cour de justice des Communautés européennes) ;
- Haut Représentant de l'Union pour les affaires étrangÚres et la politique de sécurité.
Le systĂšme de vote Ă la double majoritĂ©, agrĂ©Ă© en 2004, prendra effet au et jusqu'alors l'actuel systĂšme de vote Ă majoritĂ© qualifiĂ©e (traitĂ© CE, ModĂšle:Nobr-) continuera de s'appliquer. Il y aura ensuite une pĂ©riode transitoire jusqu'au , oĂč le compromis de Ioannina pourra ĂȘtre invoquĂ©. Une minoritĂ© de blocage sera instituĂ©e.
La plupart des éléments du traité sont restés assez proches voire identiques à l'esprit de la défunte Constitution européenne, notamment :
- la présidence de l'Union est stabilisée, avec un président élu par ses pairs, pour deux ans et demi : la présidence n'entraßne que des responsabilités administratives ;
- la Commission ne comportera plus un commissaire par Ătat mais deux commissaires pour trois Ătats membres ;
- le rĂŽle des parlements nationaux est renforcĂ© (allongement de la durĂ©e d'examen des textes qui passe de 6 Ă 8 semaines) et l'obligation faite Ă la Commission de revoir ou mĂȘme de retirer un texte contestĂ© Ă la majoritĂ© des voix.
RĂ©partition des siĂšges du parlement par pays
Nota bene : Ce tableau ne prend pas en compte le rapport[18] d'Alain Lamassoure (PPE-DE, FR) et d'Adrian Severin (PSE, RO) sur la redistribution des siÚges, qui a été adopté à titre de proposition le jeudi par 378 voix pour, 154 contre et 109 abstentions.
Dispositions concernant la politique de défense et de sécurité
Le traité de Lisbonne renforce considérablement la forme et le contenu de la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD), à tel point que le juriste Armel Pécheul a pu parler d'un « retour de la Communauté européenne de défense »[19]. La PESD devient la PSDC : gagnant au passage l'adjectif de commune[20]. Le titre V du traité est ainsi remplacé par l'intitulé suivant : Dispositions générales relatives à l'action extérieure de l'Union et dispositions spécifiques concernant la politique étrangÚre et de sécurité commune. Il est créé une section 2 : Dispositions concernant la politique de sécurité et de défense commune.
Les Ătats signataires du traitĂ© s'engagent Ă amĂ©liorer progressivement leurs capacitĂ©s militaires. Le traitĂ© lĂ©gitime la crĂ©ation d'une Agence europĂ©enne de dĂ©fense « dans le domaine du dĂ©veloppement des capacitĂ©s de dĂ©fense, de la recherche, des acquisitions et de l'armement », crĂ©Ă©e en 2004 par une simple dĂ©cision du Conseil.
Les modalités de coopération sont améliorées :
- le poste de haut représentant pour les affaires étrangÚres et la politique de sécurité est renforcé. Il cumule désormais trois fonctions : Haut représentant ; commissaire pour les relations extérieures et président du Conseil des ministres des Affaires étrangÚres[21] ;
- ouverture du mécanisme des « coopérations renforcées » à tous les domaines de la défense européenne ;
- création d'une coopération structurée permanente.
Il y a des ajouts au contenu de la PESD. C'est un complément aux missions dites de Petersberg (missions humanitaires, maintien de la paix, gestion des crises) :
- actions conjointes en matiÚre de désarmement ;
- missions de conseil et d'assistance en matiĂšre militaire ;
- missions de prévention des conflits ;
- opérations de stabilisation à la fin des conflits ;
- lutte contre le terrorisme.
Les Ătats devront mettre Ă disposition de l'UE les capacitĂ©s civiles et militaires nĂ©cessaires Ă l'accomplissement des objectifs fixĂ©s par l'UE, qui pourra ainsi, par exemple, engager des forces armĂ©es dans un pays pour lutter contre une opposition armĂ©e qualifiĂ©e de « terroriste ».
Relation entre le traité sur l'Union européenne et le traité de l'Atlantique nord
Le traité comporte des dispositions relatives à la coopération avec l'OTAN (notamment celles de l'article 42 et du paragraphe 7 de l'article 28 A - titre V, section II)[22]), critiquées à la fois par certains de ceux qui soutiennent l'OTAN et par certains qui la contestent. Il établit un devoir d'aide et d'assistance par tous les moyens entre les nations membres de l'UE. Il précise que cette disposition n'est pas contradictoire avec les obligations qui découlent du traité OTAN pour les pays qui en sont signataires.
« Les engagements et la coopĂ©ration dans ce domaine demeurent conformes aux engagements souscrits au sein de l'Organisation du traitĂ© de l'Atlantique Nord, qui reste, pour les Ătats qui en sont membres, le fondement de leur dĂ©fense collective et l'instance de sa mise en Ćuvre. »
Ceux qui soutiennent l'OTAN critiquent une disposition qui fait selon eux double emploi avec l'article 5 du traitĂ© OTAN[23] sur la solidaritĂ© entre ses membres en cas d'agression. L'article 8 du mĂȘme traitĂ© indique que « chaque partie [âŠ] assume l'obligation de ne souscrire aucun engagement international en contradiction avec le TraitĂ© ».
Ceux qui ne soutiennent pas l'OTAN dĂ©noncent notamment le fait qu'il est anormal que des traitĂ©s internationaux â a fortiori un traitĂ© prĂ©tendant au titre de « Constitution europĂ©enne » d'une entitĂ© fĂ©dĂ©rale en gestation â mentionnent l'existence et la soumission de certains de ses membres Ă des alliances militaires avec des Ătats tiers non parties au traitĂ©.
Points de vue, débats
Légalité du texte
La lĂ©galitĂ© du texte, ou Ă tout le moins sa conformitĂ© par rapport aux Constitutions respectives des Ătats membres, a Ă©tĂ© Ă©valuĂ©e par la Cour constitutionnelle allemande en juin 2009[24]. Prenant acte du caractĂšre sui generis de l'Union (« une union conventionnelle d'Ătats souverains rĂ©gie par des traitĂ©s »), elle relĂšve que les droits fondamentaux des citoyens ne peuvent ĂȘtre garantis que par les parlements nationaux via la subsidiaritĂ©. Elle conclut donc que « les garanties de l'identitĂ© constitutionnelle dans l'espace juridique europĂ©en par la Constitution d'une part, et par le droit de l'Union d'autre part, se rejoignent ».
Points de vue particuliers
Certains observateurs le jugent « indigeste[25] ». Christian Lequesne, titulaire de la chaire Sciences Po-LSE Alliance Ă la London School of Economics and Political Science, le qualifie ainsi d'« embrouillĂ© » et mĂȘme d'« usine Ă gaz[26] » ; le juriste Armel PĂ©cheul Ă©voque une « totale obscuritĂ© rĂ©dactionnelle » qui remet en cause le principe de sĂ©curitĂ© juridique[27].
D'aprÚs Valéry Giscard d'Estaing, il ne s'agit que d'une « pùle copie » du traité établissant une Constitution pour l'Europe, dans laquelle seule la forme a été changée, mais pas le contenu :
« Les juristes n'ont pas proposé d'innovations. Ils sont partis du texte du traité constitutionnel, dont ils ont fait éclater les éléments, un par un, en les renvoyant, par voie d'amendements aux deux traités existants de Rome (1957) et de Maastricht (1992). Le traité de Lisbonne se présente ainsi comme un catalogue d'amendements aux traités antérieurs. Il est illisible pour les citoyens, qui doivent constamment se reporter aux textes des traités de Rome et de Maastricht, auxquels s'appliquent ces amendements. Voilà pour la forme.
Si l'on en vient maintenant au contenu, le rĂ©sultat est que les propositions institutionnelles du traitĂ© constitutionnel â les seules qui comptaient pour les conventionnels â se retrouvent intĂ©gralement dans le traitĂ© de Lisbonne, mais dans un ordre diffĂ©rent, et insĂ©rĂ©s dans les traitĂ©s antĂ©rieurs.
(âŠ) La conclusion vient d'elle-mĂȘme Ă l'esprit. Dans le traitĂ© de Lisbonne, rĂ©digĂ© exclusivement Ă partir du projet de traitĂ© constitutionnel, les outils sont exactement les mĂȘmes. Seul l'ordre a Ă©tĂ© changĂ© dans la boĂźte Ă outils. La boĂźte, elle-mĂȘme, a Ă©tĂ© redĂ©corĂ©e, en utilisant un modĂšle ancien, qui comporte trois casiers dans lesquels il faut fouiller pour trouver ce que l'on cherche[28]. »
Il affirme toutefois : « Au lieu d'ĂȘtre de tonalitĂ© constitutionnelle, il modifie les anciens traitĂ©s, ce qui constitue une diffĂ©rence fondamentale[29]. »
Selon Bertie Ahern, Premier ministre de la République d'Irlande[30], « 90 % [de la Constitution] est toujours là ⊠ces changements n'ont apporté aucune modification spectaculaire à l'accord de 2004 », signifiant que 90 % des décisions du traité de Rome seront toujours présentes, notamment le transfert de certains compétences à l'Union européenne (dont une partie de la politique étrangÚre).
L'extension de la rĂšgle de la majoritĂ© qualifiĂ©e puis de la double majoritĂ© (calculĂ©es selon le poids dĂ©mographique des Ătats) demandant un nombre important d'Ătats pour modifier un article ayant trait Ă l'Union europĂ©enne, n'empĂȘchera pas l'Union d'Ă©voluer, mais bloquera toute tentative de modification d'actes dĂ©jĂ adoptĂ©s (notamment de nombreux projets d'ordre Ă©conomiques, politiques ou sĂ©curitaires).
Selon le juriste Armel PĂ©cheul, souverainiste opposĂ© au TCE et qui a Ă©tĂ© candidat du Mouvement pour la France, et qui critique Ă la fois la forme et le fond fĂ©dĂ©ral du traitĂ©, ainsi que la confirmation des mĂ©thodes Ă©prouvĂ©es du spill over (engrenage) et les lacunes dĂ©mocratiques de l'UE, « si l'on regarde les domaines ministĂ©riels attribuĂ©s au gouvernement français, hormis le secrĂ©tariat d'Ătat aux anciens combattants, aucun portefeuille ministĂ©riel n'est vĂ©ritablement autonome par rapport aux compĂ©tences de l'Union. Les compĂ©tences rĂ©siduelles sont moins importantes que celles qui appartiennent aux Ătats fĂ©dĂ©rĂ©s amĂ©ricains ou aux LĂ€nder allemands[31] ».
En France et aux Pays-Bas, pays ayant rejetĂ© par rĂ©fĂ©rendum l'adhĂ©sion au TCE, le traitĂ© de Lisbonne a suscitĂ© de nombreuses protestations, notamment dans le camp des opposants au TCE, qui militĂšrent, sans succĂšs, pour une ratification soumise Ă un nouveau rĂ©fĂ©rendum[32]. Selon ces dĂ©tracteurs, le traitĂ© de Lisbonne reprend en effet la plupart des dispositions du TCE pourtant rejetĂ© par les peuples consultĂ©s. Par consĂ©quent, la ratification du traitĂ© de Lisbonne par voie parlementaire aurait violĂ© la lĂ©galitĂ© constitutionnelle en trahissant l'expression de la volontĂ© du « peuple souverain ». Certains auteurs ont ainsi pu parler de « forfaiture »[33] ou mĂȘme de « coup d'Ătat »[34].
Historique et chronologie
GenĂšse du texte
En raison du rejet par référendum, en 2005, du traité de Rome de 2004 par les électeurs français et néerlandais, une période dite de réflexion s'était ouverte. En , alors qu'elle prenait la présidence de l'Union européenne, l'Allemagne a déclaré cette période close.
En , lors des célébrations du 50e anniversaire des traités de Rome de 1957, une déclaration de Berlin a été signée afin de donner un nouvel élan à la construction européenne, avant les élections du Parlement européen, en [35].
Ă la suite du rejet rĂ©fĂ©rendaire, un groupe Amato (ComitĂ© d'action pour la dĂ©mocratie europĂ©enne, prĂ©sidĂ© par Giuliano Amato, officiellement en anglais Action Committee for European Democracy, ACED), composĂ© de « sages » et soutenu par la Commission Barroso, a travaillĂ© de façon non officielle, en rĂ©Ă©crivant le traitĂ©. Le , le groupe arrĂȘta un texte en français, constituĂ© aux trois quarts de l'ancien traitĂ© constitutionnel auquel quelques modifications ont Ă©tĂ© rajoutĂ©es. Il a Ă©tĂ© certes allĂ©gĂ© en Ă©paisseur, non en contenu.
Approbation et signature par le Conseil
Le , lors du Conseil européen de Bruxelles, les négociations débutÚrent sur un projet de 11 pages, d'un « traité modificatif » (en anglais, Reform Treaty) qui résultait de négociations bilatérales sous la présidence allemande. AprÚs un jour et demi de discussions, un compromis a été trouvé samedi [36].
La procédure adoptée correspond à peu prÚs aux recommandations du groupe Amato.
Approbation par le Parlement européen
Le Parlement européen a approuvé le le traité à une trÚs forte majorité :
- 525 votes favorables (82 %) ;
- 115 défavorables ;
- 29 abstentions[37].
Ratifications par les Ătats membres
- Ratifications successives
En vertu du droit international le traitĂ© devait, aprĂšs la rĂ©union du et la signature des chefs de gouvernement, ĂȘtre ratifiĂ© par la totalitĂ© des contractants pour pouvoir entrer en vigueur.
En vertu du droit constitutionnel respectif de chaque Ătat membre, le Parlement et, dans certains cas, le peuple ou une juridiction doivent (ou peuvent devoir) autoriser le chef de l'Ătat membre Ă opĂ©rer cette ratification.
Référendums en Irlande
Seul Ătat ayant consultĂ©, par voie rĂ©fĂ©rendaire, ses citoyens, l'Irlande a, le , rejetĂ© le traitĂ© et l'a approuvĂ© le , lors d'un second vote sur le mĂȘme texte, avec des garanties supplĂ©mentaires de l'Union europĂ©enne (qui ne font pas partie du traitĂ©).
Depuis le Conseil européen des 19 et , sept autres pays ont approuvé le texte. Seul un autre pays ne l'a pas approuvé.
Le Premier ministre irlandais a demandĂ© du temps pour que son pays propose une solution, en , lors d'un des deux Conseils europĂ©ens ultĂ©rieurs[38]. Date Ă laquelle la SuĂšde a ratifiĂ© le traitĂ©, et oĂč la situation est plus claire en RĂ©publique tchĂšque : le Conseil constitutionnel a donnĂ© sa rĂ©ponse favorable, et des Ă©lections ont eu lieu en octobre.
Au cours du Conseil des 11 et , le Premier ministre irlandais a effectivement annoncé sa solution, par son engagement d'organiser un deuxiÚme référendum sur le traité avant novembre 2009, c'est-à -dire avant la fin de mandat de l'actuelle Commission européenne.
L'Irlande a obtenu satisfaction sur plusieurs points qui motivaient jusqu'alors ses rĂ©ticences vis-Ă -vis du traitĂ© de Lisbonne : « avant tout, elle obtient le maintien d'un commissaire de sa nationalitĂ© au sein du CollĂšge mĂȘme aprĂšs 2009. »
Autre garantie demandée par l'Irlande : celle d'un statu quo concernant l'impact de certaines politiques de l'UE.
- Elle voit ainsi confirmé son statut de neutralité dans le cadre de la politique de sécurité et de défense de l'UE.
- Elle obtient également l'assurance que le traité de Lisbonne ne modifiera pas la politique fiscale de l'UE.
- Enfin, « les dispositions de la Constitution irlandaise concernant le droit à la vie, l'éducation et la famille ne sont pas du tout affectées par l'attribution par le traité de Lisbonne d'un statut juridique à la Charte des droits fondamentaux de l'UE. »[39]
L'Irlande a finalement acceptĂ© le texte aprĂšs un second rĂ©fĂ©rendum le 2 octobre 2009. Celui-ci doit actuellement suivre le processus de ratification et passer par le DĂĄil Ăireann.
RĂ©publique tchĂšque
Le gouvernement tchĂšque a dĂ©jĂ signĂ© le traitĂ© de Lisbonne et les deux chambres du Parlement l'ont ratifiĂ©[Note 4]. Mais cette ratification devait ĂȘtre promulguĂ©e par le prĂ©sident Vaclav Klaus, rĂ©putĂ© eurosceptique. Des recours contre le texte approuvĂ© par le Parlement Ă©taient possibles de la part de certains sĂ©nateurs ODS, sĂ©nateurs qui ont in fine attaquĂ© le texte devant la Cour constitutionnelle tchĂšque en septembre 2009. Le , Klaus demande Ă la prĂ©sidence suĂ©doise de tenir compte du fait que les dĂ©crets BeneĆĄ pourraient ĂȘtre remis en cause sur la base du traitĂ© de Lisbonne et notamment de la Charte des droits fondamentaux qu'il contient. Le 14 octobre 2009, M. Klaus dĂ©clare Ă Moscou qu'il n'est pas prĂȘt Ă revenir sur les objections qu'il a formulĂ©es Ă l'encontre du traitĂ© de Lisbonne : « J'ai expliquĂ© que je crains et que je ne suis pas seul Ă craindre un approfondissement de l'intĂ©gration de l'Union europĂ©enne. Pour moi c'est une chose d'importance vitale. Ă mon avis, les conditions que j'ai formulĂ©es pour signer l'accord sont sĂ©rieuses et l'idĂ©e que je peux oublier mes objections est mal fondĂ©e » tandis que JosĂ© Manuel DurĂŁo Barroso l'exhorte Ă ne pas prendre le reste de l'Europe en otage et Ă respecter les « valeurs et principes » de l'Union europĂ©enne. Le , il dĂ©clare toutefois lors d'un entretien au LidovĂ© noviny qu'il pourrait sans doute signer le traitĂ© dans le mois qui vient mĂȘme s'il demeure contraire Ă ce texte : « Au train oĂč vont les choses c'est-Ă -dire trĂšs vite, il n'est plus possible d'arrĂȘter le traitĂ© ni de faire marche arriĂšre, quand bien mĂȘme certains d'entre nous le voudrions » et « Je n'ai jamais dit qu'il Ă©tait nĂ©cessaire que ma note de bas de page soit ratifiĂ©e par l'ensemble des Ătats membres, ce qui impliquerait que l'on recommence tout le processus de ratification de Lisbonne ».
Lors du sommet européen de Bruxelles (), un accord est atteint entre les 27 : la présidence suédoise a proposé d'inclure dans le prochain traité d'adhésion (avec la Croatie ?), une clause de opt-out à la Charte européenne des droits fondamentaux au profit de la République tchÚque qui l'a demandée seulement le 9 octobre (dérogation identique à celle déjà obtenue par le Royaume-Uni et la Pologne)[40], sans faire toutefois référence aux décrets Beneƥ. Le , Jan Fischer, le Premier ministre, déclare : « Je voudrais vous assurer que si la Cour constitutionnelle décrÚte le 3 novembre que le traité de Lisbonne est en accord avec la Constitution tchÚque, plus rien ne fera obstacle à un achÚvement rapide de la ratification » et que « La République tchÚque ratifiera le traité de telle maniÚre qu'il puisse entrer en vigueur d'ici la fin de l'année ». Le 3 novembre, la Cour constitutionnelle tchÚque donne son feu vert pour poursuivre la derniÚre étape de ratification malgré une plainte d'un groupe de sénateurs, proches du président, qui entendaient faire vérifier qu'il était bien conforme à la loi fondamentale tchÚque. Quelques heures plus tard, Vaclav Klaus signe finalement le traité.
Pologne
De son cĂŽtĂ©, en Pologne l'exprĂ©sident Lech KaczyĆski, conservateur, avait dĂ©clarĂ© le que le rejet du texte par les Ă©lecteurs irlandais lors d'un rĂ©fĂ©rendum le rendait « inutile » sa ratification, pourtant acceptĂ©e Ă une large majoritĂ© (380+77 oui, 54+17 non) par le Parlement en avril. DĂ©claration Ă laquelle Angela Merkel avait rĂ©agi : « Le traitĂ© de Lisbonne rend l'UE plus dĂ©mocratique et renforce les opportunitĂ©s de tous les membres. Je vais donc tout faire, en coopĂ©ration avec la prĂ©sidence française (de l'Union europĂ©enne), pour faire avancer le processus de ratification »[41].
Dans sa dĂ©claration du , le chef de l'Ătat polonais s'Ă©tait nĂ©anmoins engagĂ© Ă ratifier le document si l'Irlande le ratifiait Ă©galement : « ce doit ĂȘtre une dĂ©cision souveraine et non pas une dĂ©cision prise sous la pression des autres membres de l'UE. »[42] Le prĂ©sident de la Commission europĂ©enne JosĂ© Manuel DurĂŁo Barroso avait cependant rappelĂ© Ă Bruxelles : « Nous avons dĂ©cidĂ© Ă l'unanimitĂ©, y compris la Pologne, que le processus de ratification devait ĂȘtre menĂ© Ă son terme, donc il est faux de dire que le traitĂ© de Lisbonne est mort. J'espĂšre que les autoritĂ©s polonaises seront cohĂ©rentes avec leur propre position. »[43]
Le prĂ©sident polonais Lech KaczyĆski a finalement signĂ© le traitĂ© le [44], comme il avait promis de le faire en cas de « oui » irlandais. Le traitĂ© de Lisbonne avait dĂ©jĂ Ă©tĂ© ratifiĂ© par le Sejm et le SĂ©nat polonais.
Slovaquie
La Slovaquie, comme la RĂ©publique tchĂšque, a Ă©tĂ© concernĂ©e par les dĂ©crets d'expulsion des Allemands des SudĂštes dĂ©cidĂ©s par Edvard BeneĆĄ Ă la fin de la Seconde Guerre mondiale. Ă la suite de la demande du prĂ©sident tchĂšque d'une exception pour Ă©viter de remettre en cause ces dĂ©crets, le Premier ministre slovaque Robert Fico avait Ă©tĂ© tentĂ© de faire de mĂȘme le , faisant craindre aux autres dirigeants europĂ©ens une escalade de revendications de la part d'autres pays ayant dĂ©jĂ signĂ©. Le Premier ministre slovaque renonce finalement Ă cette idĂ©e afin de ne pas « sacrifi[er] les droits sociaux des gens en Slovaquie »[45] avant de se joindre Ă la Hongrie pour prĂ©senter des doutes sur le bien-fondĂ© de la demande tchĂšque[46]. Ces doutes ont Ă©tĂ© calmĂ©s par les propositions de la prĂ©sidence suĂ©doise.
France et Pays-Bas
Les deux pays qui avaient rejeté le traité constitutionnel lors des référendums de 2005 (France et Pays-Bas) ont ratifié le traité de Lisbonne par voie parlementaire.
En France : aprĂšs le rejet par 55 % des Français lors du rĂ©fĂ©rendum de 2005 du projet de traitĂ© Ă©tablissant une constitution pour l'Europe, la France n'a pas proposĂ© de nouveau rĂ©fĂ©rendum Ă ses citoyens au motif que ce nouveau traitĂ© n'est pas une Constitution europĂ©enne[47]. Une rĂ©vision de la Constitution française, effectuĂ©e par la voie du CongrĂšs le [48], a permis la ratification du traitĂ© lui-mĂȘme par la voie parlementaire le 8 fĂ©vrier[49].
Le choix de Nicolas Sarkozy alors prĂ©sident de la RĂ©publique française de ratifier par la voie parlementaire ce traitĂ©, qui reprend l'essentiel d'un texte refusĂ© par rĂ©fĂ©rendum, a suscitĂ© de nombreuses protestations. Certains partis ou mouvements politiques (Ă droite et Ă l'extrĂȘme droite : FN, MPF, Debout la RĂ©publique ; Ă gauche et Ă l'extrĂȘme gauche : le MRC, les Verts, le PCF, LO, la LCR, pour les principaux), des associations et syndicats (ATTAC, ConfĂ©dĂ©ration paysanne, Union syndicale Solidaires), et Ă©galement des parlementaires socialistes et souverainistes avaient appelĂ© Ă la mise en place d'un rĂ©fĂ©rendum pour l'adoption du traitĂ© de Lisbonne[50].
D'autres partis politiques, associations et syndicats (Mouvement dĂ©mocrate, ConfĂ©dĂ©ration Ă©tudiante, Jeunes EuropĂ©ens, Union pour l'Europe fĂ©dĂ©rale) appelaient Ă la tenue d'un rĂ©fĂ©rendum paneuropĂ©en, pensant qu'un rĂ©fĂ©rendum sur un texte europĂ©en n'aurait de sens que s'il Ă©tait lui-mĂȘme europĂ©en.
« Perçu par beaucoup comme un contournement de la volonté populaire qui s'était exprimée en 2005 », le traité de Lisbonne est rejeté par une majorité de Français dans les années qui suivent[51].
Autres pays oĂč la ratification a Ă©tĂ© retardĂ©e par des recours juridiques
- Allemagne : décision 72/2009 du Tribunal constitutionnel fédéral, rendue le . Dans sa décision, le Tribunal fédéral indique que le traité est compatible avec la Loi fondamentale, mais que la loi d'application était inconstitutionnelle en ce qu'elle ne garantissait pas la participation des deux chambres législatives au processus décisionnel[52].
- Belgique : un recours en annulation de l'un des actes lĂ©gislatifs nĂ©cessaires Ă la ratification a Ă©tĂ© rejetĂ©, par la Cour constitutionnelle, le (arrĂȘt 58/2009). Un des moyens soulevĂ©s Ă©tait relatif Ă l'absence d'organisation prĂ©alable de la coopĂ©ration entre les Chambres lĂ©gislatives fĂ©dĂ©rales et les Parlements des CommunautĂ©s et des RĂ©gions, en rapport avec le protocole « sur l'application des principes de subsidiaritĂ© et de proportionnalitĂ© ». En vertu du FĂ©dĂ©ralisme belge, tous les Parlements concernĂ©s doivent donner assentiment au traitĂ© par une loi, un dĂ©cret ou une ordonnance, publiĂ©s respectivement au Moniteur belge (pour Ă©viter les quiproquos sur la scĂšne internationale, la publication de la loi est spĂ©cialement retardĂ©e tant que les dĂ©crets et les ordonnances communautaires et rĂ©gionaux n'ont pas tous Ă©tĂ© publiĂ©s). Chacun de ces actes lĂ©gislatifs peut ĂȘtre attaquĂ© par un recours en annulation devant la Cour constitutionnelle, introduit dans un dĂ©lai de 60 jours aprĂšs sa publication respective. La ratification (dĂ©pĂŽt d'un acte du chef de l'Ătat auprĂšs de l'Ătat dĂ©positaire du traitĂ©) n'a lieu qu'aprĂšs.
- Royaume-Uni : un recours judiciaire, demandant un référendum, a été rejeté, le , par la Haute Cour[53].
Ă
land et Gibraltar
Les prérogatives des assemblées d'à land (territoire autonome de la Finlande) et de Gibraltar (territoire d'outre-mer britannique), dans le cadre de la participation des Parlement nationaux relative au protocole « sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité » ont entraßné des questionnements juridiques.
Tableau détaillé
Révisions du traité de Lisbonne
Les 28 et , les chefs d'Ătat et de gouvernement des 27 pays membres de l'Union europĂ©enne ont ouvert la voie Ă une rĂ©vision du traitĂ© de Lisbonne visant Ă crĂ©er un dispositif de sĂ©curitĂ© permanent pour les pays de l'Union monĂ©taire qui seraient en grande difficultĂ© financiĂšre, comme le fut la GrĂšce au printemps 2010.
Cette rĂ©vision du traitĂ© de Lisbonne a Ă©tĂ© rendue nĂ©cessaire par une jurisprudence du Tribunal constitutionnel fĂ©dĂ©ral allemand de Karlsruhe qui a indiquĂ© que les dispositions du plan de sauvetage de la GrĂšce Ă©taient contraires au traitĂ©. En effet, les articles 126-128 prĂ©voient qu'une aide financiĂšre peut ĂȘtre apportĂ©e par les pays de la zone euro Ă un pays qui n'en fait pas partie, mais interdit par ailleurs d'aider un pays de la zone euro. Sans cette rĂ©vision, le gouvernement allemand serait dans l'incapacitĂ© de ratifier un nouveau plan d'aide aux pays en difficultĂ©.
L'article 48-6 du traité de Lisbonne prévoit une procédure accélérée de révision, permettant de contourner le Parlement européen et d'éviter ainsi un long processus. Ce recours à la procédure accélérée est rendu nécessaire car le fonds européen de stabilité financiÚre, installé en aprÚs la crise grecque, devra disparaßtre le 30 juin 2013. Or, une révision du traité prend au moins deux ans.
Le prĂ©sident du Conseil europĂ©en, Herman Van Rompuy, s'est vu confier par les 27 la mission de travailler sur la mĂ©thode de rĂ©forme du traitĂ© et la nature de ce mĂ©canisme d'ici au prochain sommet des chefs d'Ătat et de gouvernement, les 16 et . Une fois l'accord politique finalisĂ©, un mandat devrait ĂȘtre donnĂ© Ă la confĂ©rence intergouvernementale (CIG) pour adopter la dĂ©cision avec, en annexe, le protocole de rĂ©vision du traitĂ© de Lisbonne. Les nĂ©gociations sur cette dĂ©cision pourraient ainsi dĂ©marrer automatiquement aprĂšs le sommet de dĂ©cembre[68].
La crise de la dette souveraine (GrĂšce, Portugal, EspagneâŠ) a mis en lumiĂšre les limites de l'intĂ©gration europĂ©enne en matiĂšre monĂ©taire et suscitĂ© un renouveau du dĂ©bat Ă©conomique opposant partisans de la relance financĂ©e par la dette publique et adeptes de l'orthodoxie financiĂšre classique-partisans du dĂ©sendettement (deleveraging) des Ătats, des entreprises et des mĂ©nages[69].
Ă terme, selon les experts du World Pensions Council, le retour Ă l'orthodoxie financiĂšre prĂŽnĂ© par le gouvernement allemand et la BCE et la politique de rigueur gĂ©nĂ©ralisĂ©e qui en dĂ©coule nĂ©cessiteront une nouvelle rĂ©vision du traitĂ© de Lisbonne, car ils pourraient avoir pour consĂ©quence de rĂ©duire les prĂ©rogatives budgĂ©taires et fiscales des Ătats-membres au-delĂ des dispositions du traitĂ© dans sa forme actuelle[70].
Notes et références
Notes
- Ce traitĂ© constitutionnel avait Ă©tĂ© ratifiĂ© par dix-huit Ătats membres sur vingt-sept en , et plusieurs pays avaient annoncĂ© ne pas vouloir poursuivre le processus de ratification (notamment la Pologne et le Royaume-Uni).
- Ainsi, l'article 2 du traité contient 295 alinéas apportant chacune une ou plusieurs modifications au traité CE.
- Toutefois, dans l'acte final du traitĂ©, 16 des 27 Ătats membres (Belgique, Bulgarie, Allemagne, Autriche, GrĂšce, Espagne, Italie, Chypre, Lituanie, Luxembourg, Hongrie, Malte, Portugal, Roumanie, SlovĂ©nie et Slovaquie) dĂ©clarent leur attachement au drapeau Ă©toilĂ© sur fond bleu et Ă l'hymne europĂ©en tirĂ© de l'Ode Ă la joie de Ludwig van Beethoven, Ă l'euro et au 9 mai en tant que JournĂ©e de l'Europe. Ils indiquent que ces symboles « continueront d'ĂȘtre, pour eux, les symboles de l'appartenance commune des citoyens Ă l'Union europĂ©enne et de leur lien avec celle-ci ».
- L'autorisation de ratification par le Parlement est acquise : le vote du SĂ©nat date du seulement.
- Les ßles à land sont une province autonome de la Finlande, font partie de l'Union européenne, mais ils bénéficient de quelques exemptions, la ratification du Parlement des ßles à land n'est pas nécessaire pour l'entrée en vigueur du traité, mais il faut l'approbation de dispositions qui rendent compatible le traité avec la législation des ßles à land.
- Le Conseil constitutionnel a déclaré partiellement incompatibles avec la Constitution française quelques dispositions du traité (décision no 2007-560 DC du ) donc, avant de procéder à la ratification formelle du texte, il a fallu modifier la Constitution française. Le projet de réforme constitutionnelle a été approuvé par l'Assemblée nationale le , par le Sénat le et par le CongrÚs, formé de l'Assemblée nationale et du Sénat réunis en séance commune, le . La loi de révision constitutionnelle a été publiée au Journal officiel le , jour à partir duquel la France a pu procéder à la ratification.
- La Constitution polonaise dispose que les traités internationaux soient ratifiés par le Sejm avec le vote favorable d'au moins 307 membres (soit les deux tiers sur un total de 460) et par le Sénat avec le vote favorable d'au moins 67 membres (soit les deux tiers sur un total de 100) ou au moyen de référendums populaires.
- La Constitutionroumaine dispose que les traités internationaux qui amendent les traités constitutifs de l'Union européenne soient ratifiés par le Parlement en séance commune avec le vote favorable au moins 324 membres, soit les deux tiers sur un total de 486.
- Gibraltar est un territoire d'outre-mer britannique, fait partie de l'Union européenne, mais il bénéficie d'exemptions ; la ratification du parlement de Gibraltar n'est pas nécessaire pour l'entrée en vigueur du traité, mais il nécessite l'approbation de dispositions qui rendent compatible le traité avec la législation de Gibraltar.
- La Constitution slovÚne dispose que les traités internationaux soient ratifiés par l'Assemblée nationale avec le vote favorable d'au moins 60 membres, soit deux tiers sur un total de 90.
Références
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- (fr+en) Texte du projet de traité.
- Il y aura un nombre de commissaires Ă©gal aux deux tiers du nombre d'Ătats membres en 2014 au lieu d'un par Ătat avant l'application du traitĂ©. Voir l'article « Un nouveau traitĂ© pour l'Union europĂ©enne » sur le site de l'Union europĂ©enne].
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- Le Président polonais refuse, pour le moment, de ratifier le traité « La construction européenne paie le prix de décennies de démagogie. Et d'un déficit démocratique, en partie résolu par le traité de Lisbonne⊠»
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Voir aussi
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
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Liens externes
- Texte officiel du traité dans les 23 langues officielles de l'Union, sur EUR-Lex.
- Lisbonne : une montée en charge progressive, par le Pr Jean-Luc Sauron.
- Version consolidée du traité de Lisbonne avec les anciens traités, version consolidée du traité avec les derniÚre mises à jour de la CIG (3 décembre).
- Le traité de Lisbonne, présentation synthétique par un rapport d'information de la délégation pour l'Union européenne du Sénat français.
- (en) Eur-charts visualisation - The EU following the Lisbon Treaty (Reform Treaty) (en anglais).
- Du traité de Nice au traité de Lisbonne : ce qui change - Touteleurope.fr.
- Réforme du traité de Lisbonne de 2010 et gouvernance économique de l'UE - Les Dessous de Bruxelles.
- Votre guide du traité de Lisbonne.