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Louis Guilloux

Louis Guilloux, nĂ© le Ă  Saint-Brieuc et mort dans la mĂȘme ville, est un Ă©crivain français.

Auteur du Sang noir, il appartient Ă  cette « grande gĂ©nĂ©ration »[1] de romanciers, dĂ©terminĂ©e par l’expĂ©rience de la guerre de 1914. « Romancier de la douleur »[2], sensible au sort que la sociĂ©tĂ© rĂ©serve aux plus dĂ©munis, il se caractĂ©rise Ă©galement par son engagement antifasciste. Il se situe au cƓur des questionnements littĂ©raires, politiques et existentiels de son Ă©poque.

Il a vĂ©cu entre Paris et Saint-Brieuc que l’on reconnaĂźt dans la petite ville de province qui sert de cadre Ă  de nombreux romans. Mais en se refusant Ă  lui attribuer un nom, il lui confĂšre une trĂšs vaste portĂ©e. Il s’inscrit dans une veine rĂ©aliste, issue du naturalisme, qui justifie son rapprochement avec la littĂ©rature prolĂ©tarienne. NĂ©anmoins, son Ɠuvre se dĂ©veloppe en pleine pĂ©riode de « crise du roman »[3] et explore les multiples ressources du genre romanesque. Le rĂ©cit peut se concentrer sur une seule journĂ©e (Le Sang noir) ou couvrir un demi-siĂšcle (Le Jeu de patience), ĂȘtre proche du grand roman polyphonique ou de l’« essai de voix » (Coco Perdu). La diversitĂ© de cette Ɠuvre unifiĂ©e par son sens du tragique[4] montre que son auteur ne peut ĂȘtre rĂ©duit ni Ă  son engagement social, ni Ă  son appartenance bretonne.

Il est l’ami intime d'AndrĂ© Malraux et d'Albert Camus. Depuis 1983, un prix littĂ©raire porte son nom.

Biographie

Plaque apposée au no 42 de la rue du Dragon, dans le 6e arrondissement de Paris.

Origine, enfance et formation

Louis Guilloux naĂźt Ă  Saint-Brieuc en 1899. MalgrĂ© de nombreux sĂ©jours Ă  Paris et un bref passage Ă  Angers, il reste attachĂ© sa vie durant Ă  sa ville natale, dans laquelle il situe l'action de plusieurs de ses romans et oĂč il Ă©crit la majeure partie de son Ɠuvre[5].

Son pĂšre est cordonnier et sa mĂšre modiste. À la naissance de Louis, le couple a dĂ©jĂ  deux filles. Les difficultĂ©s matĂ©rielles conduisent la famille Ă  des dĂ©mĂ©nagements successifs au sein de la petite ville. L’expĂ©rience de la pauvretĂ©, qui est aussi expĂ©rience de l’exclusion, imprĂšgne Ă  tout jamais l’enfant. Son pĂšre est militant socialiste. SecrĂ©taire de section, il se prĂ©sente Ă  plusieurs reprises Ă  des Ă©lections locales[6]. L’Ɠuvre de Louis Guilloux, de La Maison du peuple au Jeu de patience garde le souvenir des rĂ©unions de section, des espoirs et des dĂ©sillusions politiques, de la frĂ©quentation des compagnons artisans (Compagnons)

Une forme de tuberculose osseuse lui laisse une main gauche lĂ©gĂšrement dĂ©formĂ©e, le rendant inapte aux mĂ©tiers manuels. C’est pourquoi il entre en sixiĂšme comme Ă©lĂšve-boursier au lycĂ©e de Saint-Brieuc, actuellement collĂšge Anatole Le Braz. L’apprentissage de l’anglais seul semble le passionner. L’étĂ© 1914, il est en Angleterre quand la guerre est dĂ©clarĂ©e. En 1916, il rĂ©silie sa bourse et demande un poste de surveillant d’internat. La complexitĂ© de sa situation est analysĂ©e par Sylvie Golvet[7]. Il aspire Ă  ĂȘtre Ă©crivain, Ă  suivre une voie intellectuelle mais il se sent en porte-Ă -faux avec son milieu d’origine : il ne veut pas ĂȘtre le « bourgeois de la famille »[8]. Il Ă©choue au baccalaurĂ©at. En 1921 dans une lettre Ă  Jean Grenier, il confie :

« Je regrette seulement d’ĂȘtre un Ă©ternel inclassĂ©, et d’avoir tant Ă  me reprocher pour n’avoir pas tentĂ© de me classer[9]. »

Sa formation intellectuelle n’est pas acadĂ©mique, et vient moins d’une institution scolaire dans laquelle il ne trouve pas sa place que de sa curiositĂ© de lecteur portĂ© vers Jules VallĂšs ou Gorki et de ses rencontres, entraĂźnant Ă  leur tour amitiĂ©s et lectures. La premiĂšre rencontre dĂ©cisive est celle du philosophe et professeur Georges Palante qui prĂȘte certains de ses traits au Cripure du Sang Noir. C’est d’abord la lecture de Jean-Christophe de Romain Rolland qui les rapproche. S’ensuit une longue et profonde amitiĂ©, essentielle dans la formation intellectuelle de l’écrivain : Pascal et Nietzsche font partie des auteurs lus Ă  cette Ă©poque. Pendant la guerre, encore, il fait la connaissance du poĂšte Lucien Jacques et du critique d’art Waldemar George qui deviendra le personnage de Kaminski dans Le Sang noir. C’est grĂące Ă  lui qu’il dĂ©couvre DostoĂŻevski. En 1917, Ă  la bibliothĂšque de Saint-Brieuc, Guilloux rencontre Jean Grenier, futur professeur de philosophie de Camus Ă  Alger.

Il a Ă©tĂ© tĂ©moin pendant la guerre de l’arrivĂ©e des longues files de soldats blessĂ©s au lycĂ©e transformĂ© par les circonstances en hĂŽpital tandis que le maire parcourt la ville pour annoncer aux familles la mort d’un fils, d’un frĂšre ou d’un Ă©poux, cela constitue une expĂ©rience qui fonde la singularitĂ© d’une Ɠuvre- tĂ©moignage de premier plan sur la vie d’une petite ville de province de l’ArriĂšre pendant la premiĂšre guerre mondiale. Le sentiment tragique qui habite les romans de Louis Guilloux s’enracine dans cette vision du mal[10].

Il part pour Paris en 1918 ; commence une pĂ©riode difficile oĂč il est amenĂ© Ă  vivre de petits mĂ©tiers. « Une recommandation de Georges Palante Ă  l’intention de Jean Finot, directeur de La revue Mondiale ne lui ouvre aucune possibilitĂ©. »[11]. Le soutien de la famille Robert lui est alors d’un grand secours[12].

Mais sa dĂ©cision est prise : « Je ne saurais dĂ©cidĂ©ment qu’écrire, plus rien ne m’en empĂȘchera. »[13]

Un Ă©crivain dans la presse

Au printemps 1921, Louis Guilloux s’installe pour de bon dans la capitale et, dĂšs l’étĂ©, il parvient Ă  placer ses premiers textes dans divers journaux parisiens[14]. Il publie principalement des nouvelles et des contes[15]dans des quotidiens d’obĂ©dience socialiste, comme Le Populaire, proche de la SFIO ou Le Peuple, qui est une publication de la C.G.T., voire dans des journaux rĂ©publicains, plutĂŽt conservateurs comme Bonsoir, Le Petit Journal ou Ă  tendance socialisante comme L’ƒuvre. Il rĂ©dige Ă©galement les Ă©chos pour Excelsior, « un quotidien de douze pages qui bĂ©nĂ©ficie alors d’une bonne rĂ©putation »[16]. D’octobre 1921 Ă  avril 1923, il collabore rĂ©guliĂšrement Ă  l’hebdomadaire FlorĂ©al, un pĂ©riodique culturel de qualitĂ© « destinĂ© Ă  apporter des informations choisies Ă  un lectorat populaire »[17]. Louis Guilloux s’y rĂ©vĂšle un chroniqueur soucieux du monde moderne, maniant l’ironie et propre Ă  des envolĂ©es poĂ©tiques, capable de traiter de sujets trĂšs variĂ©s, qu’il s’agisse du Tour de France cycliste, des thĂ©ories d’Einstein, du cinĂ©ma[18] des dĂ©buts de l’aviation ou de la traduction française d’Introduction Ă  la psychanalyse de Sigmund Freud[19].

Le , Guilloux parvient Ă  une certaine stabilitĂ© financiĂšre puisqu’il est engagĂ© Ă  L’Intransigeant, un grand quotidien du soir d’opinion de droite. Il entre au service Ă©tranger, chargĂ© de la traduction de la presse anglaise. Dans une lettre Ă  Alain LemiĂšre (datĂ©e du 25 octobre 1921), il fait Ă©tat de sa collaboration aux diffĂ©rents journaux dĂ©jĂ  mentionnĂ©s, « surtout Ă  L’Intransigeant. Je dis surtout parce que L’Intran est un grand journal qui paie bien », avant d’ajouter plus loin : « Et avec cela derriĂšre moi je m’en vais commencer une nouvelle sĂ©rie de luttes (parfaitement : de luttes) pour m’adjoindre d’autres ressources et d’autres moyens de me rĂ©pandre »[20]. Les premiers pas de Louis Guilloux dans la presse sont donc marquĂ©s par la volontĂ© de s’imposer et dĂ©notent d’emblĂ©e des ambitions littĂ©raires que le jeune homme revendique ouvertement auprĂšs de sa famille et de ses amis.

Réseaux de relations et premiÚres tentatives littéraires

Entre le et le 15 avril 1923, Guilloux entreprend la rĂ©daction de L’IndĂ©sirable, un roman qui a pour dĂ©cor une ville de l’arriĂšre pendant la guerre de 14-18. S’inspirant d’un scandale survenu Ă  Saint-Brieuc en 1917, Guilloux Ă©voque la mise au ban d’un respectable professeur d’allemand qu’une rumeur insidieuse et infondĂ©e dĂ©crit comme un traitre, Ă  la solde des « boches ».

Le roman, demeurĂ© inĂ©dit du vivant de l’auteur, a Ă©tĂ© finalement publiĂ© chez Gallimard en 2019[21]. Les thĂšmes de l’Ɠuvre Ă  venir apparaissent dĂ©jĂ  dans ce rĂ©cit Ă©crit Ă  l’ñge de 24 ans : la guerre observĂ©e depuis l’arriĂšre (qui correspond Ă  la situation vĂ©cue par l’écrivain), la notion d’un pouvoir qui instrumentalise et mutile les vivants et une vision de la violence historique qui dĂ©crit une humanitĂ© en Ă©tat de guerre perpĂ©tuelle. Les diffĂ©rentes rĂ©actions de ses proches Ă  la lecture du manuscrit et le refus des Éditions Rieder ont incitĂ© Guilloux Ă  ne pas publier l’ouvrage. Pendant prĂšs de dix ans, il envisage de retravailler le manuscrit, avant d’y renoncer d’autant qu’il « a utilisĂ© pour Le Sang noir une partie non nĂ©gligeable des personnages et des situations prĂ©sentĂ©s dans L’IndĂ©sirable » et qu’« il est ainsi possible d’observer l’évolution considĂ©rable de l’écrivain entre une Ɠuvre de jeunesse prometteuse mais inĂ©gale et un roman qui est l’une de ses rĂ©ussites majeures[22] ».

Parmi les premiers lecteurs de cette Ɠuvre de jeunesse, figure RenĂ©e Tricoire, une professeure de lettres, d’origine toulousaine, que Louis Guilloux a rencontrĂ©e chez Henri Petit. SĂ©duit par cette jeune femme brillante et cultivĂ©e, de quatre ans son aĂźnĂ©e, Guilloux, pourtant rĂ©tif Ă  l’idĂ©e de la vie conjugale, la demande en mariage[23]. La cĂ©rĂ©monie est cĂ©lĂ©brĂ©e le 12 aoĂ»t 1924. Par la suite, RenĂ©e Guilloux est devenue une enseignante trĂšs apprĂ©ciĂ©e de ses Ă©lĂšves[24]. Jusqu’aux annĂ©es trente, elle apporte Ă  Louis Guilloux « une collaboration littĂ©raire, sous forme d’avis, de suggestions et d’échanges d’idĂ©es »[25] , qu’il s’agisse de relecture (Le Sang noir lui est d’ailleurs dĂ©diĂ©) ou de travaux de traduction[26].

GrĂące Ă  son ami AndrĂ© Chamson, Guilloux fait la rencontre de Daniel HalĂ©vy. Cet historien, ami de Marcel Proust et de Charles PĂ©guy, dreyfusard de la premiĂšre heure, dirige la collection des Cahiers verts chez Grasset. À partir de l’hiver 1925, Guilloux frĂ©quente les rĂ©unions littĂ©raires que Daniel HalĂ©vy organise tous les samedis dans son appartement du Quai de l’Horloge. Il agrandit le cercle de ses relations et fait notamment la connaissance de Julien Benda et d’AndrĂ© Malraux. Une amitiĂ© profonde va le lier Ă  ce dernier : d’emblĂ©e, Guilloux est impressionnĂ© par les qualitĂ©s intellectuelles et les dons d’orateur de celui qui vient de publier La Tentation de l’Occident chez Grasset. Pendant l’étĂ© 1926, grĂące Ă  Jean Grenier, Guilloux fait Ă©galement la connaissance de Max Jacob Ă  Saint-Brieuc. Guilloux Ă©voque dans ses Carnets « l’étonnante soirĂ©e » passĂ©e en compagnie du poĂšte qui entreprend en vain de le convertir au catholicisme et qui veut l’emmener Ă  Nantes avec lui : « Tu m’apprendras Ă  faire un roman et je te montrerai comment on fait les poĂšmes en prose »[27]. Louis Guilloux a en effet dĂ©cidĂ© de se consacrer entiĂšrement Ă  l’écriture depuis sa dĂ©mission de L’Intransigeant, le 25 avril 1926, quittant Paris pour retourner vivre Ă  Saint-Brieuc.

Une « carte de visite » : La Maison du peuple

C’est en juillet 1927 que Louis Guilloux publie son premier roman, La Maison du peuple, qui va l’imposer sur la scĂšne littĂ©raire. Il lui a fallu quatorze Ă  quinze mois pour Ă©crire cette Ɠuvre autobiographique qui raconte la vie et les combats politiques d’un pĂšre cordonnier et militant socialiste. Guilloux a d’abord soumis son manuscrit Ă  Daniel HalĂ©vy qui l’adresse Ă  Jean GuĂ©henno, lequel lance Ă  ce moment une collection chez Grasset, « Les Écrits ». Il est bouleversĂ© par cette lecture qui le renvoie Ă  sa propre enfance de fils de cordonnier Ă  FougĂšres. Dans une lettre Ă  HalĂ©vy, GuĂ©henno explique combien il a Ă©tĂ© troublĂ© par l’évocation de ce destin similaire au sien : « Il m’est tout Ă  fait impossible de juger ce livre-lĂ  comme un autre livre. (
) Il me semble Ă©couter quelqu’un tĂ©moigner pour moi, et je ne pense qu’à remercier[28]. » Un contrat est signĂ© avec Grasset en avril 1927.

Un demi-siĂšcle aprĂšs sa parution, lors d’un entretien radiophonique, Louis Guilloux a indiquĂ© ce que cet ouvrage signifiait Ă  ses yeux :

« C’est une carte de visite aussi puisque, en somme, je me destinais Ă  faire ce mĂ©tier, eh bien
 j’ai voulu dire d’abord « voilĂ  qui je suis, voilĂ  d’oĂč je viens », n’est-ce pas
 et ça a Ă©tĂ© La Maison du peuple[29]. »

La figure du pĂšre s’impose dĂšs le dĂ©but du rĂ©cit. C’est celle d’un honnĂȘte travailleur, cordonnier depuis l’ñge de onze ans qui refuse de ployer sous le joug des patrons et des nantis. Guilloux dĂ©crit un pĂšre frondeur prĂŽnant la RĂ©volution et enjoignant aux camarades de se grouper pour lutter plus efficacement. Son mĂ©tier ne lui permet pas d’échapper Ă  une vie prĂ©caire. La grave maladie de son Ă©pouse puis la mort de la grand-mĂšre aprĂšs une vie de labeur confirment les dures conditions d’existence de la famille. DerriĂšre une apparente simplicitĂ© narrative, La Maison du peuple est un rĂ©cit qui parvient Ă  exprimer sans emphase les mĂ©canismes d’aliĂ©nation sociale. Guilloux dĂ©crit l’humiliation d’un homme qui ne parvient plus Ă  gagner sa vie, parce que ses opinions politiques indisposent les clients et qu’il frĂ©quente le docteur RĂ©bal qui est Ă  la tĂȘte de la section socialiste[30]. Il doit mĂȘme fermer boutique et se retrouve dans l’impossibilitĂ© de payer son loyer.

La trahison du docteur RĂ©bal qui, sitĂŽt Ă©lu, dĂ©nonce la coalition, entraine une grave dĂ©sillusion politique. Mais le pĂšre rĂ©organise le mouvement populaire en projetant de construire une Maison du Peuple. C’est une utopie concrĂšte et emblĂ©matique qui se rĂ©alise ainsi Ă  travers un Ă©difice construit par et pour le peuple. La dĂ©claration de guerre d’aoĂ»t 14 vient balayer tous ces espoirs et le rĂ©cit s’achĂšve sur le dĂ©part des hommes pour le front.

Le livre reçoit un accueil critique favorable. Des Ă©crivains renommĂ©s comme Romain Rolland et Georges Duhamel font part de leur admiration Ă  Guilloux. La presse socialiste ne manque pas de souligner la qualitĂ© de l’écriture et l’évocation prĂ©cise et pertinente de la classe ouvriĂšre, comme en tĂ©moignent les articles louangeurs d’Henri Barbusse et de Henry Poulaille[31]. La critique, dans son ensemble, insiste sur la sobriĂ©tĂ© du style et le refus de toute emphase[32]. Cette « carte de visite » permet donc Ă  Louis Guilloux d’ĂȘtre reconnu par le milieu littĂ©raire mais, dans les annĂ©es qui suivent, le jeune auteur tentera d’échapper Ă  l’image d’« Ă©crivain prolĂ©tarien » qu’il juge rĂ©ductrice.

Années 1928-1934 : Louis Guilloux, un auteur prolétarien?

Le bon accueil critique de La Maison du peuple conforte les ambitions de Louis Guilloux. AprĂšs avoir vĂ©cu deux ans Ă  Angers oĂč son Ă©pouse RenĂ©e avait Ă©tĂ© nommĂ©e professeur, Louis Guilloux revient Ă  Saint-Brieuc en 1930[33]. Le couple fait l'acquisition d'un terrain, rue Lavoisier, dans le quartier Saint-Michel et y fait construire leur maison oĂč naĂźt en 1932 Yvonne, leur fille unique[34]. Louis Guilloux poursuit dĂšs lors activement son Ɠuvre et publie son deuxiĂšme roman, Dossier confidentiel, en 1930. Par bien des aspects, ce roman, dont l’intrigue se dĂ©roule dans une ville de l’arriĂšre pendant la guerre de 1914, annonce Le Sang noir. Dans la premiĂšre partie de l’ouvrage, Guilloux Ă©voque les rĂ©actions de trois adolescents, Raymond, Laurent et Lucie face Ă  la guerre et dĂ©crit leur immense dĂ©sarroi. La seconde partie raconte le dĂ©part du narrateur accompagnĂ© de sa tante pour s’installer dans un hĂŽtel d’une ville de province anonyme. Le rĂ©cit s’oriente sur le versant balzacien plus traditionnel d’une Ă©tude de caractĂšres avant de se conclure sur un crime involontaire commis par Raymond et dont il finit par s’accuser. Cette fin est jugĂ©e confuse par la critique[35]. L’épilogue renvoie Ă  la dĂ©marche rĂ©demptrice de Raskolnikov Ă  la fin de Crime et ChĂątiment[36]. Raymond dĂ©couvre ainsi grĂące Ă  un certain M. Coudrier, qu’il est sans doute incapable d’aimer : « Coudrier rĂ©pĂšte que chacun sera son propre juge. Il ajoute : “Vous serez simplement mis en prĂ©sence de vous-mĂȘme. La lumiĂšre de Dieu suffira”[37]. » Ses amis, qui sont les premiers lecteurs du manuscrit, regrettent la rĂ©fĂ©rence dostoĂŻevskienne trop flagrante et tentent de prĂ©server le jeune auteur de toute approche Ă©difiante[38]. Guilloux a bien entendu pris en compte ces recommandations et privilĂ©gie dans le roman la description d’une ville de province gagnĂ©e par l’idĂ©ologie mortifĂšre et mensongĂšre du pouvoir.

Bien que de nombreux critiques, d’Albert Thibaudet Ă  FrĂ©dĂ©ric LefĂšvre, louent les qualitĂ©s du roman, certains s’accordent Ă  le trouver incomprĂ©hensible, « de manquer de clartĂ© et de cohĂ©rence » et de laisser « le lecteur perplexe »[39]. Ces reproches Ă©clairent sans doute les vĂ©ritables enjeux du livre qui seraient de traduire, pour reprendre une distinction proposĂ©e par Kamel Daoud Ă  propos d’Albert Camus, une expĂ©rience de l’inexplicable[40]. La tragĂ©die Ă  l’échelle collective rejoint la tragĂ©die Ă  l’échelle privĂ©e. Rien ne justifie le massacre de masse comme rien n’explique le meurtre commis par Raymond. C’est Laurent, son camarade Ă©pris d’absolu qui donne la clef avec cette remarque : « La guerre n’est pas un contraire, ni un moment, mais une suite, comprenez-vous ? L’homme est le mĂȘme, dans la guerre et dans la paix, et le monde est le mĂȘme, c’est-Ă -dire pourri[41]. » Ce profond pessimisme mĂ©taphysique conduit Guilloux Ă  une vision de l’Histoire placĂ©e sous le sceau de la dĂ©sillusion et de la mĂ©fiance, au point de privilĂ©gier une dĂ©marche pragmatique, comme il l’affirme dans ses Carnets :

« La question n’est pas de savoir quel est le sens de cette vie, mais qu’est-ce que nous pouvons en faire[42] ? »

En 1931, Guilloux publie un court rĂ©cit intitulĂ© Compagnons. Il y raconte comment Jean Kernevel, un artisan-plĂątrier, ĂągĂ© de cinquante ans, tombe gravement malade. Ce cĂ©libataire est relayĂ© par ses compagnons qui viennent Ă  son chevet pour l’assister dans ses derniers moments. D’Albert Camus Ă  Pierre Lemaitre[43], de nombreux Ă©crivains considĂšrent ce rĂ©cit comme une des rĂ©ussites majeures de Guilloux, en raison de l’émotion provoquĂ©e par une Ă©criture sobre et dĂ©pouillĂ©e de tout artifice. L’auteur y rappelle la nĂ©cessitĂ© de l’amour, qui serait la seule maniĂšre de rĂ©sister Ă  la misĂšre et Ă  l’injustice sociale.

L’humilitĂ© et la dignitĂ© de Kernevel, la solidaritĂ© naturelle et implicite de ses compagnons participent de ce « sublime populiste »[44] qui refuse les effets spectaculaires. Guilloux se mĂ©fie en effet d’une reprĂ©sentation bourgeoise qui n’apprĂ©hende le peuple qu’à travers le prisme mĂ©lodramatique ou folklorique, dans la continuitĂ© d’une certaine littĂ©rature du XIXe siĂšcle (Lamartine, Hugo, Sand). Il est indĂ©niable que La Maison du peuple, Compagnons et AngĂ©lina s’apparentent Ă  l’esthĂ©tique populiste et « s’intĂšgrent Ă  la ligne naturaliste (
) oĂč l’intĂ©rĂȘt se trouve concentrĂ© sur un thĂšme unique : la confrontation dans les premiĂšres annĂ©es de ce siĂšcle, d’une famille pauvre Ă  la structure sociale de son temps[45]. » Pour autant, Guilloux n’a eu de cesse de rĂ©cuser les Ă©tiquettes d’écrivain populiste ou prolĂ©tarien qu’il juge sclĂ©rosantes.

À la fin des annĂ©es vingt, LĂ©on Lemonnier et AndrĂ© ThĂ©rive tentent de promouvoir un mouvement littĂ©raire populiste. Lemonnier explique dans un manifeste publiĂ© en 1929, que « le peuple offre une matiĂšre trĂšs riche et Ă  peu prĂšs neuve »[46] et, bien qu’il cite La Maison du peuple parmi les exemples du roman populiste, « il n’envisage pas que l’écrivain populiste soit d’origine populaire. (
) Le peuple est donc [pour lui] une matiĂšre pittoresque pour des Ă©crivains bourgeois lus par des bourgeois
 »[47] Guilloux ne peut Ă©videmment souscrire Ă  un tel point de vue et refuse logiquement d’entrer dans ce mouvement[48]. Et c’est sans enthousiasme qu’il accepte le Prix populiste en 1942 pour Le Pain des rĂȘves.

Louis Guilloux n’adhĂšre pas non plus au mouvement des Ă©crivains prolĂ©tariens, qui rassemble des auteurs d’origine populaire autour d’Henry Poulaille. Dans une lettre Ă  Romain Rolland datĂ©e de septembre 1931, il affirme craindre l’image simplificatrice et figĂ©e de « romancier du prolĂ©tariat » :

« MalgrĂ© tout, je ne veux, je ne puis me dire d’un parti ou d’une Ă©cole. Et l’on voudrait que je me dise Ă©crivain prolĂ©tarien. Mais les hommes que j’ai voulu peindre ne sont pas d’abord des prolĂ©taires. Ils sont avant tout des hommes (
). Il n’y a qu’une expĂ©rience, la mĂȘme pour tous, et qui est l’expĂ©rience de l’amour[49]. »

Mais cette indĂ©pendance revendiquĂ©e a un prix : un relatif isolement qui coupe Guilloux des rĂ©seaux littĂ©raires qui auraient pu le soutenir. En n’hĂ©sitant pas Ă  critiquer des mouvements qui tentent de l’enrĂŽler et donc, selon lui, d’aliĂ©ner sa libertĂ© crĂ©atrice[50] , Guilloux connaĂźt une situation instable dans son propre camp, celui de la gauche intellectuelle. Il donne ainsi Ă  la revue Europe un compte-rendu trĂšs critique du livre d’Henry Poulaille, Nouvel Ăąge littĂ©raire. S’il ne doute pas de la probitĂ© et de la sincĂ©ritĂ© de Poulaille, Guilloux se mĂ©fie d’un discours militant qui asservit la littĂ©rature Ă  des dĂ©bats d’école, de clan, de catĂ©gorie et qui, en quelque sorte, assigne Ă  rĂ©sidence l’écrivain issu du peuple[51]. Il prĂ©conise au contraire une libertĂ© artistique qui puisse rĂ©sister Ă  tout embrigadement, qu’il soit idĂ©ologique ou esthĂ©tique :

« Le fond du livre de Poulaille est prĂ©cisĂ©ment une invitation Ă  nous enfermer dans nos classes. Et c’est cette invitation que nous devons dĂ©cliner si nous tenons Ă  ĂȘtre ce que nous sommes, Ă  faire ce que nous avons Ă  faire. Notre Ă©poque est empoisonnĂ©e de faux problĂšmes, ayons le courage de nous en dĂ©livrer. Souhaitons certes avec Poulaille la venue d’une littĂ©rature prolĂ©tarienne, c’est-Ă -dire d’une nouvelle expression de l’homme. Mais sachons rester libres[52]. »

Guilloux enfant du peuple doit-il nĂ©cessairement se conformer Ă  l’image de l’écrivain prolĂ©tarien ? Son rejet des propositions populiste et prolĂ©tarienne confirme cette volontĂ© d’échapper Ă  un tel tropisme social et idĂ©ologique. Il demeure ainsi tiraillĂ© entre la loyautĂ© envers sa classe d’origine et un profond dĂ©sir de libertĂ© inhĂ©rent Ă  sa condition d’artiste.

Avec la parution d’HymĂ©nĂ©e en 1932, Guilloux propose une observation prĂ©cise de la vie conjugale. DĂ©laissant l’évocation des milieux populaires et prenant pour cadre la petite bourgeoisie de province, Guilloux s’essaie au roman psychologique et offre une Ă©tude en profondeur du destin de deux individus ordinaires, Maurice et Berthe. À partir d’un simple mensonge (Berthe a une liaison avec Maurice et lui fait croire qu’elle est enceinte afin qu’il l’épouse), Guilloux dĂ©crit l’enlisement d’un couple dans l’incomprĂ©hension et le dĂ©samour. Par obĂ©issance aux convenances sociales, Maurice et Berthe subissent leur destin sans parvenir Ă  le changer. Roman de l’enfermement, HymĂ©nĂ©e est aussi un roman tragique, mais d’un tragique dĂ©nuĂ© de grandeur, sans lien avec le transcendant et qui prend sa source dans la quotidiennetĂ©.

Bien que Guilloux ait signĂ© en dĂ©cembre 1932 un contrat pour six romans chez Gallimard, il publie un dernier ouvrage intitulĂ© AngĂ©lina chez Grasset en 1934. Il poursuit la geste familiale entamĂ©e avec La Maison du peuple en s’inspirant des souvenirs d’enfance et de jeunesse rĂ©digĂ©s par sa mĂšre. Guilloux songe Ă  les publier tels quels mais dĂ©cide finalement d’utiliser cette matiĂšre autobiographique Ă  des fins fictionnelles. Il raconte la vie d’un artisan-lamier, Esprit Le Coq mariĂ© Ă  Anne-Marie et pĂšre de trois enfants, Henri, Charles et AngĂ©lina. Les difficultĂ©s de la vie quotidienne, le spectre du chĂŽmage, les combats politiques traversent ce « texte Ă  la frontiĂšre de l’autobiographie familiale, du document humain et du roman »[53]. AngĂ©lina marque la fin du cycle des Ɠuvres de jeunesse et lors de sa parution, Guilloux est plongĂ© depuis plusieurs mois dĂ©jĂ  dans la rĂ©daction du Sang noir, qui sera perçu comme l’un des romans majeurs de l’entre-deux-guerres.

Le succĂšs du Sang noir

À partir de 1929-1930, Louis Guilloux entreprend la rĂ©Ă©criture de l’IndĂ©sirable[54]. Cela deviendra Le Sang noir qui rencontre un vĂ©ritable succĂšs, dĂšs sa parution en octobre 1935. « Le dossier de presse montre que la sortie du Sang noir est un Ă©vĂ©nement littĂ©raire et politique[55] ». La rĂ©ception mĂ©diatique a Ă©tĂ© prĂ©parĂ©e par l’auteur et son Ă©diteur[56]. Le bandeau publicitaire « La vĂ©ritĂ© de ce monde, ce n’est pas qu’on meurt, c’est qu’on meurt volĂ© » fait du roman une rĂ©ponse Ă  CĂ©line et Ă  Voyage au bout de la nuit qui a remportĂ© lui-mĂȘme un grand succĂšs, malgrĂ© l’échec au Goncourt. La stratĂ©gie est claire : avoir le Goncourt serait faire mieux que CĂ©line, ne pas le recevoir serait une preuve supplĂ©mentaire du discrĂ©dit qui pĂšse sur le prix.

La force du roman vient autant de son sujet - la guerre vue d’une petite ville de l’ArriĂšre en 1917 au moment des mutineries de soldats – que de sa composition. Dans ce contexte historique, le roman met en scĂšne les derniĂšres vingt-quatre heures du professeur de philosophie, Merlin, qui n’enchante plus guĂšre et que ses Ă©lĂšves, par dĂ©rision, surnomment Cripure. La construction dramatique repose sur les unitĂ©s de temps et de lieu. Mais l’art de la narration utilisant « les monologues croisĂ©s et la circulation des Ă©nonciations croisĂ©es[57]» dote d’une profondeur temporelle personnages et Ă©vĂ©nements, faisant sentir qu’« une journĂ©e est toujours plus qu’elle-mĂȘme[58]». L’opacitĂ© des personnages, et notamment celle du personnage principal, loin d’ĂȘtre dissipĂ©e par ces modalitĂ©s narratives, s’en trouve renforcĂ©e. Que les protagonistes du rĂ©cit durant cette journĂ©e soient enfermĂ©s dans une ville-labyrinthe[59] qui dĂ©vore ses enfants en les envoyant Ă  la mort augmente indĂ©niablement la puissance du sentiment tragique qui saisit le lecteur de ce grand roman moderne.

Quand le verdict du jury Goncourt tombe, la riposte s’organise : le 12 dĂ©cembre 1935, la maison de la culture de la rue PoissonniĂšre accueille un meeting en soutien Ă  Louis Guilloux, « DĂ©fense du roman français ». Sous la prĂ©sidence de Roland DorgelĂšs, AndrĂ© Gide, AndrĂ© Malraux, Louis Aragon, EugĂšne Dabit sont Ă  la tribune, autour de l’auteur du Sang noir qui Ă  son tour lit un texte dĂ©veloppant ses idĂ©es sur la crĂ©ation romanesque[60]. Cette assemblĂ©e d’auteurs, et non des moindres, contribue Ă  transformer l’échec du Goncourt en succĂšs. La presse de gauche dĂ©jĂ  mobilisĂ©e en faveur du roman n’est pas Ă  convaincre et Gallimard fait paraitre des encarts publicitaires dans la presse de droite, laissant entendre qu’ĂȘtre refusĂ© au Goncourt constitue un gage de qualitĂ©[61].

Dabit salue dans le roman la contestation des historiens officiels qui venge ceux qui ont dĂ» faire la guerre[62]. Gide Ă©crit Ă  Guilloux en dĂ©cembre 1935 que Le Sang noir « offre de quoi perdre pied », reconnaissant par cette formule son pouvoir de subversion. Aragon est sensible Ă  la verve satirique qui parcourt le texte et Ă  la peinture d’une « mĂ©nagerie humaine[63]». Malraux Ă©voque la « danse de la mort[64]» auquel se livrent les personnages, ombres errantes dans la ville. La critique des pairs dans son ensemble souligne ce qui fait du roman un coup de maĂźtre: mise en lumiĂšre des oubliĂ©s de l’Histoire, satire virulente de l’univers Ă©troit de la petite ville de province et de ses notables, sens aigu du tragique, prĂ©sentation complexe des personnages - et notamment du personnage de Cripure - Ă  propos desquels il est difficile, sinon impossible d’arrĂȘter une vĂ©ritĂ©, rĂ©fĂ©rence explicite au roman russe, incertitude fantastique dans laquelle baignent certains Ă©pisodes. La diversitĂ© des propos montre la richesse d’un roman, dont Jorge Semprun dira plus tard l’importance de sa dĂ©couverte pour l’adolescent qu’il Ă©tait :

« Outre que c’est l’un des plus grands romans français de ce siĂšcle -Ă©trangement mĂ©connu, Ă  mon avis : il doit y avoir des raisons ; sans doute sont-elles inavouables, scandaleuses du moins -, j’y ai appris des choses essentielles : sur la densitĂ© de la vie, sur le Mal et le Bien, sur les misĂšres de l’amour, sur le courage et la lĂąchetĂ© des hommes, sur l’espoir et le dĂ©sespoir[65]. »

En 1967, est prĂ©sentĂ©e l’adaptation thĂ©Ăątrale du Sang noir Ă©crite par Louis Guilloux, Cripure, dans une mise en scĂšne de Marcel MarĂ©chal. Si certains critiques contestent les choix de Marcel MarĂ©chal, tout le monde s’accorde Ă  reconnaitre que Le Sang noir est un chef-d’Ɠuvre. En 1970, l’accueil est plus favorable encore et la reprĂ©sentation de 1990 est saluĂ©e par Jean Daniel dans Le Nouvel Observateur[66] Notons que la rĂ©ception extrĂȘmement positive de L’IndĂ©sirable, au moment de sa publication posthume par les soins d’Olivier Macaux au printemps 2019 montre que l’intĂ©rĂȘt des questions soulevĂ©es dans Le Sang noir ne se dĂ©ment pas.

CongrÚs des écrivains pour la défense de la culture

En parallĂšle Ă  son activitĂ© d’écrivain, Guilloux s’est engagĂ© depuis le dĂ©but des annĂ©es 1930 (1932-1933) dans les mouvements des intellectuels et des Ă©crivains qui dĂ©noncent le militarisme puis les dangers du fascisme et du nazisme.

Dans le sillage d’AndrĂ© Malraux, Guilloux adhĂšre en 1933 Ă  l’AEAR, l’Association des Ă©crivains et artistes rĂ©volutionnaires fondĂ©e par le parti communiste français[67]. AprĂšs les Ă©meutes parisiennes du 6 fĂ©vrier 1934, il signe l’appel du ComitĂ© de vigilance des intellectuels antifascistes avant de participer activement Ă  Paris, du 21 au 25 juin 1935, au premier CongrĂšs international des Ă©crivains pour la DĂ©fense de la Culture connu comme le CongrĂšs des Ă©crivains antifascistes.

C’est un Ă©vĂ©nement majeur dans le monde de la culture, puisqu’il permet le rassemblement de nombreux Ă©crivains et intellectuels dans la grande salle de la MutualitĂ© Ă  Paris, devant une assistance de 2500 Ă  3 000 personnes[68]. L’AEAR, et donc le parti communiste français, sont Ă  l’origine de ce congrĂšs et invitent des intellectuels et artistes communistes, des « compagnons de route », mais aussi des radicaux-socialistes, voire des libĂ©raux. Guilloux ne prend pas la parole pendant le congrĂšs mais il effectue les nombreuses tĂąches de secrĂ©tariat en remplacement de Louis Martin-Chauffier tombĂ© malade. Il s’agit bien d’un lourd travail d’organisation, concernant l’accueil et l’hĂ©bergement des congressistes, que Guilloux, trĂšs impliquĂ©, a dĂ» assumer[69].

On dĂ©nombre pas moins de 250 Ă©crivains et intellectuels de 38 pays : Gide, Malraux, Aragon, GuĂ©henno figurent parmi les auteurs français de renom. Les auteurs allemands sont reprĂ©sentĂ©s notamment par Bertolt Brecht, Thomas Mann, Robert Musil, Anna Seghers. Quant aux auteurs anglo-saxons, ils comptent dans leurs rangs des personnalitĂ©s aussi reconnues que George Bernard Shaw, Aldous Huxley, E.M. Forster, Sinclair Lewis ou Dos Passos[70]. Une importante dĂ©lĂ©gation soviĂ©tique menĂ©e par Ilya Ehrenbourg a fait le dĂ©placement mais sans Maxime Gorki. Gide et Malraux parviennent alors Ă  convaincre les autoritĂ©s soviĂ©tiques d’autoriser la venue d’Isaac Babel et de Boris Pasternak, dont le discours prononcĂ© Ă  la tribune le soir du 24 juin a profondĂ©ment marquĂ© Guilloux[71]. Des controverses surgissent notamment avec les surrĂ©alistes menĂ©s par AndrĂ© Breton et les trotskistes quand ils tentent d’évoquer l’affaire Victor Serge, emprisonnĂ© par Staline. « Les dĂ©bats sont parfois houleux, les affrontements verbaux violents. La question des libertĂ©s, non seulement dans les pays fascistes, mais aussi en URSS est abordĂ©e Ă  plusieurs reprises[72].»

Par la suite, Guilloux ne participe pas aux congrÚs qui se déroulent à Londres en juin 1936 et à Valence et Madrid en juillet 1937[73].

L’engagement social et politique de Guilloux n’a cessĂ© pourtant de s’élargir jusqu’à la guerre : contre les ventes-saisies de leur ferme dont les paysans sont victimes en Bretagne, dans le comitĂ© de chĂŽmeurs et au Secours Rouge Ă  Saint-Brieuc, et dans l’accueil des rĂ©fugiĂ©s espagnols dans les CĂŽtes-du-Nord en 1937 et 1939[74]. Ce faisant, Louis Guilloux a dĂ©veloppĂ© des relations dans les milieux militants communistes en premier lieu, mais aussi socialistes et chrĂ©tiens. Ces contacts nouĂ©s dans les luttes communes des annĂ©es 1930 seront dĂ©terminants sous l’Occupation.

Voyage en URSS avec Gide et retour

Avec la publication du Sang noir, Louis Guilloux s’est affirmĂ© comme Ă©crivain de premier plan. Gide admire et l’homme et l’écrivain. InvitĂ© par le gouvernement soviĂ©tique, il fait cette proposition, notĂ©e par Louis Guilloux dans ses Carnets : « 28 janvier 1936- PassĂ© la soirĂ©e chez Gide. Il m’invite Ă  l’accompagner en URSS. Le projet me tente Ă©normĂ©ment mais
 J’accepte cependant. »[75]. Outre Louis Guilloux, Gide s’entoure d’EugĂšne Dabit, Jef Last, Pierre Herbart et Jacques Schiffrin, tous Ă©crivains de gauche heureux de l’occasion d’un voyage si utile pour comprendre la rĂ©alitĂ© soviĂ©tique.

L’équipe doit se scinder car il est demandĂ© Ă  Gide, pour un accueil triomphal, de gagner Moscou en avion, ce qu’il fait, accompagnĂ© du seul Herbart[76]. Leur arrivĂ©e le 19 juin coĂŻncide avec la mort de Gorki. Lors des funĂ©railles, Gide est appelĂ© Ă  prononcer un discours sur la Place Rouge comportant un hommage appuyĂ© Ă  l’Union soviĂ©tique. Les autres membres de l’équipe partent de Londres sur un bateau soviĂ©tique, Ă  destination de LĂ©ningrad.

Sur l’ensemble du voyage, Louis Guilloux reste trĂšs discret[77]. On en sait davantage grĂące au Retour de l'U.R.S.S. de Gide et aux annotations de Dabit dans son Journal intime, Ă©mouvantes en raison de la mort de l’auteur Ă  SĂ©bastopol. Dabit souligne notamment l’ambiance trĂšs festive sur le bateau de Londres Ă  Leningrad oĂč les compagnons se livrent Ă  « la chasse aux femmes ». Du voyage lui-mĂȘme, il retient surtout les aspects touristiques[78] , et les soirĂ©es avec Guilloux, son compagnon de chambrĂ©e[79]. Du rĂ©cit de voyage de Pierre Herbart on retiendra surtout l’apprĂ©ciation sur le repas officiel offert au groupe Ă  l’hĂŽtel Astoria sur les bords de la Neva, Ă  LĂ©ningrad oĂč il se livre « menu en main, Ă  un petit calcul approximatif du prix de revient du repas : environ deux cents roubles par tĂȘte, le salaire moyen d’un ouvrier »[80]. Gide, quant Ă  lui, accepte le faste du protocole mais s’agace de la prĂ©sence du GuĂ©pĂ©ou tout en pensant qu’il est assez prudent pour Ă©chapper Ă  la filature bien qu’il s’interroge sur la disparition d’un jeune Ă©tudiant qu’il a connu Ă  Moscou et fait venir Ă  LĂ©ningrad : « je suis certain qu’on s’est vengĂ© de lui et je n’ai jamais pu savoir ce qu’il Ă©tait devenu
Oui, je suis convaincu que je l’ai tuĂ© »[81]. Il confirme Ă©galement la scission du groupe en deux Ă©quipes dans une lettre Ă  Roger Martin du Gard : « Le plus souvent la bande se divise : Dabit, Schiffrin et Guilloux filent de leur cĂŽtĂ©, ou, plus exactement, nous les laissons, Pierre Herbart, Jef et moi, pour courir[82] ». Le dernier mot est clair : Ă  chaque groupe, ses prioritĂ©s


Tous les tĂ©moignages concordent donc pour noter le caractĂšre somptueusement protocolaire, touristique, et sous surveillance du voyage. Raisons pour lesquelles on peut comprendre facilement que l’ennui et la dĂ©ception aient pu gagner Schiffrin et Guilloux et les dĂ©cider Ă  rentrer prĂ©maturĂ©ment en France depuis Tiflis tandis que Dabit est restĂ©, par reconnaissance envers Gide et par amour pour une jeune femme, Alisson, avec qui il file un parfait amour.

Lors du retour en France, au traumatisme gĂ©nĂ©ral causĂ© par la mort de Dabit le 21 aoĂ»t Ă  SĂ©bastopol des suites du typhus s’ajoute le conflit entre Gide et Aragon dans lequel Louis Guilloux est appelĂ© Ă  intervenir : Aragon est scandalisĂ© par la publication du livre de Gide, Retour de l’URSS[83], dĂ©nonçant le rĂ©gime stalinien[84]. En janvier 1937, Aragon, codirecteur avec Jean-Richard Bloch de Ce soir[85], quotidien communiste, confie Ă  Guilloux la responsabilitĂ© de la page littĂ©raire du journal. Quelques semaines plus tard, il tente de l’instrumentaliser en lui demandant d’« Ă©crire quelque chose en rĂ©ponse au livre de Gide[86] ». Guilloux s’y refuse, comprenant rapidement qu’il s’agit surtout de faire le rĂ©cit du comportement de Gide en URSS. ConsĂ©quence presque immĂ©diate de ce refus d’obtempĂ©rer : Louis Guilloux est licenciĂ©[87] pour n’avoir pas voulu, alors qu’il peinait Ă  vivre de sa plume, s’abaisser Ă  un Ă©crit mĂ©disant sur Gide.

C’est un tournant dans la vie de Guilloux qui dĂ©cide de quitter Paris et, rentrĂ© Ă  Saint-Brieuc, de se consacrer Ă  l’aide aux rĂ©fugiĂ©s espagnols. De mĂȘme qu’il n’a pas cĂ©dĂ© aux injonctions d’Aragon, il a tenu tĂȘte Ă  Gide[88] qu'il accuse d'hypocrisie[89]. Louis Guilloux refuse alors de livrer une apprĂ©ciation officielle du voyage en URSS et renvoie ainsi dos Ă  dos Aragon et Gide.

Sur le plan littĂ©raire, il tire les leçons de ce voyage : parti enthousiaste et dĂ©sireux d’imaginer une suite au Sang noir, montrant la naissance d’un homme nouveau construit par la RĂ©volution prolĂ©tarienne, Ă  son retour il tirera un trait sur cette suite qui aurait pu s’intituler Le BlĂ©, sorte de Germinal lumineux.

Sur le plan politique, on peut Ă©galement comprendre son silence : la guerre d’Espagne Ă©clate et, pour faire piĂšce Ă  Franco, l’intervention soviĂ©tique est dĂ©terminante. Pour cette raison, Guilloux de mĂȘme que d’autres intellectuels engagĂ©s, ne veut pas faire le jeu des rĂ©actionnaires en disqualifiant l’URSS bien que commencent le 5 septembre les procĂšs de Moscou, caractĂ©ristiques des mĂ©thodes de Staline.

Le silence de Louis Guilloux[90] se comprend largement par la souffrance personnelle, intellectuelle, politique et littĂ©raire ressentie. C’est un silence choisi, une façon de tourner le dos Ă  une façon rĂ©pandue de faire de la politique en perdant sa libertĂ©. Quant Ă  lui, il s’engage bien davantage dans l’action locale, Ă  Saint-Brieuc, auprĂšs des chĂŽmeurs, des rĂ©fugiĂ©s espagnols et autres exclus.

AuprĂšs des paysans

Au dĂ©but des annĂ©es trente, l’onde de choc de la « crise de 29 » nĂ©e aux États-Unis, frappe l’Europe. Louis Guilloux s’engage dans le soutien aux plus dĂ©munis et particuliĂšrement auprĂšs des petits paysans durement frappĂ©s par la pratique des « ventes-saisies ». C’est avec le ton de l’économiste qu’il en rend compte dans Les Carnets le 21 octobre 1933 :

« MisĂšre paysanne. Le nombre des saisies pratiquĂ©es sur les paysans des environs de LoudĂ©ac s’accroĂźt depuis quelques mois. La situation des paysans est devenue trĂšs misĂ©rable : les caisses du CrĂ©dit agricole ne peuvent presque plus avancer d’argent. Dans les cas de saisie, le mobilier et le cheptel ne suffisent pas Ă  payer les dettes. Cause gĂ©nĂ©rale : la crise, la mĂ©vente des produits agricoles. Deux causes plus spĂ©ciales Ă  notre rĂ©gion : pendant la pĂ©riode de relative prospĂ©ritĂ© on a vendu trĂšs cher de la mĂ©chante terre. Le paysan est aujourd’hui victime de cette spĂ©culation. Autre cause : la duretĂ© de certains baux[91]. »

AprĂšs une pĂ©riode haussiĂšre des prix du blĂ©, les cours se sont Ă©croulĂ©s et les paysans ne pouvant rembourser leurs emprunts sont les victimes de prĂ©dateurs qui acquiĂšrent Ă  vil prix fermes et matĂ©riel agricole. Louis Guilloux, auprĂšs des organisations syndicales et politiques les plus engagĂ©es, communistes et socialistes en particulier participe Ă  de nombreuses manifestations, notamment dans la rĂ©gion de LoudĂ©ac oĂč les manifestants essaient de dissuader tout acquĂ©reur.

Toute l’humanitĂ© de Louis Guilloux apparaĂźt dans ces pages des Carnets : recueil prĂ©cis d’informations dans les journaux et dans l’action, cri de rĂ©volte contre la façon dont le droit qui devrait secourir les humbles, spolie les plus pauvres. La dĂ©marche citoyenne est prolongĂ©e et amplifiĂ©e par l’acte d’écriture : bien des annĂ©es plus tard, en 1949, un roman s’en fera l’écho, Le Jeu de patience.

Mais le roman qui revient le plus sur les ventes-saisies, c’est, en 1960, Les Batailles perdues. Aux combats politiques menĂ©s prĂšs de trente ans auparavant succĂšde, avec Les Batailles perdues, un roman de la dĂ©sillusion. Le roman s’interroge sur cette perte des illusions Ă  l’Ɠuvre dĂšs le dĂ©but des annĂ©es 1930 mais sur un point au moins, celui de la mobilisation contre les ventes-saisies, le romancier prend plaisir Ă  dĂ©crire la mobilisation des paysans pour sauver l’un des leurs et dĂ©jouer les mises en vente faites par l’huissier :

« Les gens Ă©taient gais comme un jour de foire, sĂ»rs que l’huissier en serait pour ses frais et le grand Tudual expliquait une fois de plus que Mescam avait parfaitement le droit de choisir l’ordre de la vente et d’obliger l’huissier Ă  commencer par les bĂȘtes : on pouvait toujours espĂ©rer que les assistants rĂ©agiraient mieux devant la mise en vente d’une vache que devant celle d’une armoire.

Il faudrait agir vite si par malheur quelque traĂźtre ou idiot osait proposer une enchĂšre ! On n’aurait qu’à laisser faire aux femmes ! Mieux que les hommes, elles avaient Ă  l’occasion montrĂ© une ardeur farouche en pareil cas. [
] Combien de paysans dans la cour jusqu’à prĂ©sent ? deux cents ? trois cents ? Il en arrivait toujours. » La foule rĂ©ussit Ă  dissuader les Ă©ventuels acquĂ©reurs : c’était Abgrall, qui parlait aux gens en breton. Jusqu’à quand se laisseraient-ils traiter en esclaves ? Ils n’avaient rien Ă  voir avec les franquillons ! La Bretagne aux Bretons !

- A la porte, l’huissier ! L’huissier Ă©tait allĂ© se cacher entre deux tas de paille. Les femmes le cherchaient en promettant de lui enlever son pantalon[92]. »

Et la manifestation se termine par des Ă©clats de rire qui rĂ©pondent aux vaines mises en vente faites par l’huissier finalement contraint de dĂ©clarer « que la vente n’aurait pas lieu faute d’acquĂ©reurs. » Certes le romancier donne une version triomphante de la lutte alors que de nombreux paysans ont tout perdu, mĂȘme la vie lors de ces ventes. MĂȘme si l’on sait que gendarmes et huissier rĂ©ussiront plus tard la saisie, le rire rabelaisien de l’assistance qui ridiculise l’huissier fait du bien et utopise la revanche des petits sur l’argent.

AuprÚs des réfugiés espagnols : 1934-1939

MĂȘme si l’annĂ©e 1935 est celle d’un travail littĂ©raire considĂ©rable car Louis Guilloux est absorbĂ© par la rĂ©daction laborieuse de son Ɠuvre maĂźtresse, Le Sang noir, il reste engagĂ© dans l’action sociale et, dans ses Carnets, note au dĂ©but de l’annĂ©e : « Une dizaine de rĂ©fugiĂ©s espagnols, les uns venant des Asturies, les autres de Barcelone, sont arrivĂ©s en ville. Nous avons trouvĂ© trois d’entre eux Ă  la Maison du Peuple oĂč nous avions une rĂ©union de chĂŽmeurs »[93].

Bien avant la guerre civile espagnole (1936-1939) il s’intĂ©resse au sort des rĂ©fugiĂ©s qui ont commencĂ© d’affluer Ă  Saint-Brieuc Ă  la suite de l’insurrection des Asturies. Le gouvernement de centre-droit de la RĂ©publique espagnole a fait appel aux troupes d’Afrique du Nord commandĂ©es par Franco pour noyer dans le sang (4 000 morts et des milliers de malheureux sur les routes de l’exode) cette Commune espagnole. Avec la montĂ©e du fascisme et du nazisme, partout en Europe s’exacerbe la violence dont sont toujours victimes les plus dĂ©munis[94].

EngagĂ© dans une large action au Secours Rouge, Ă  Saint-Brieuc, Louis Guilloux est devenu un acteur important de l’action en faveur des chĂŽmeurs et des exilĂ©s, victimes des consĂ©quences de la crise Ă©conomique et de toutes les dictatures, et il sait se dĂ©fier de tout nationalisme. Il lutte sans esprit de chapelle aussi bien aux cĂŽtĂ©s de l’abbĂ© VallĂ©e et du pasteur Crespin que des communistes Pierre Petit et Yves Flouriot.

Cet engagement est exprimĂ© de façon solennelle dans les Carnets en 1937 : « Aujourd’hui 7 septembre, je me suis mis en quĂȘte de la situation des rĂ©fugiĂ©s espagnols et dĂ©cide de m’y intĂ©resser activement. ParallĂšlement aux notes que je consigne dans ces carnets, je ferai en sorte de tenir un journal de cette activitĂ©[95].»

Si l’homme a le devoir de s’engager, l’écrivain a celui de tĂ©moigner et les prochaines Ɠuvres de Louis Guilloux seront les porte-voix de ces combats.

C’est la raison pour laquelle autant de pages des Carnets (p. 165-209 sans interruption) sont consacrĂ©es Ă  la situation des rĂ©fugiĂ©s espagnols Ă  Saint-Brieuc, aux conditions indignes dans lesquelles ils sont hĂ©bergĂ©s, aux discussions de Guilloux avec le PrĂ©fet pour qu’on leur vienne en aide, Ă  la lutte (vaine) pour empĂȘcher qu’ils ne soient renvoyĂ©s en Espagne.

À cette date, Louis Guilloux travaille dĂ©jĂ  au grand roman que sera Le Jeu de patience, roman polyphonique dont la voix majeure sera celle du narrateur des MĂ©moires d’un Responsable. Le narrateur remonte le temps Ă  partir de la mort de Pablo, Ă©vĂ©nement dĂ©clencheur du roman : « hier, 9 janvier, on a enterrĂ© Pablo »[96], rĂ©fugiĂ© espagnol arrivĂ© Ă  Saint-Brieuc en 1934, mort le 7 janvier 1947 et ami emblĂ©matique du narrateur. Ainsi, toutes les notes des Carnets au jour le jour trouvent leur place dans le roman autour de l’histoire de Pablo. Ce personnage permet de rendre compte Ă  la fois de l’insurrection d’Oviedo, de la guerre d’Espagne, de l’engagement des Espagnols dans la Seconde Guerre mondiale auprĂšs des combattants français, sans oublier de magnifier leur hĂ©roĂŻsme.

Louis Guilloux et les dĂ©buts de l’Occupation

Lorsque la Seconde Guerre mondiale Ă©clate en Europe, Louis Guilloux est de longue date sensibilisĂ© aux risques de guerre et aux dangers de l’Allemagne nazie.

La signature du pacte de non-agression germano-soviĂ©tique le 23 aoĂ»t 1939, suivie une semaine plus tard de l’attaque de la Pologne, font basculer l’Europe et le monde dans une nouvelle guerre mondiale. Louis Guilloux qui a Ă©tĂ© un proche compagnon de route du Parti communiste français (PCF) est, sans doute comme la masse des Français et de nombreux militants communistes, frappĂ© de stupeur par la signature ce qui devient vite une entente entre Hitler et Staline. Or, Staline qui se voulait quelques mois plus tĂŽt le principal rempart contre le fascisme en Europe participe avec Hitler au dĂ©peçage de la Pologne. On ignore la rĂ©action prĂ©cise de Guilloux Ă  ce Pacte qui facilite l’écrasement en trois semaines de la Pologne. Dans ses Carnets, il signale l’évĂ©nement Ă  la date du 23 aoĂ»t sans le moindre commentaire[97] Mais il y fait allusion indirectement le 8 septembre en Ă©voquant l’enterrement d’Yves Flouriot, le secrĂ©taire politique du PCF des CĂŽtes-du-Nord (actuelles CĂŽtes-d’Armor) : « Qu’a-t-il pensĂ©, s’il pensait encore quelque chose dans les derniers temps, du revirement de Moscou ? Il avait tant cru Ă  Moscou, Ă  Staline, au communisme. [
] Je voudrais savoir qu’on ne lui a rien dit sur les Ă©vĂ©nements »[98]. Le 30 aoĂ»t, Louis Guilloux est rentrĂ© de Paris Ă  Saint-Brieuc et il a repris ses permanences au ComitĂ© d’accueil des Ă©vacuĂ©s et rĂ©fugiĂ©s[99]. Puis, il s’est Ă  nouveau mobilisĂ© lors du gigantesque exode de mai et juin 1940 qui amĂšne des centaines de milliers de rĂ©fugiĂ©s dans la rĂ©gion.

PrĂ©sent Ă  Saint-Brieuc lors de l’arrivĂ©e de la Wehrmacht triomphante dans l’aprĂšs-midi du 18 juin 1940, Louis Guilloux assiste impuissant Ă  l’installation de l’armĂ©e et de l’administration militaire allemandes vivant comme des millions de Français le grand trauma de la DĂ©faite et de l’effondrement de la TroisiĂšme RĂ©publique. Selon son tĂ©moignage recueilli par l’historien Jean-Pierre Rioux le 17 novembre 1978, dans les jours prĂ©cĂ©dents il aurait songĂ© Ă  s’embarquer au port du LĂ©guĂ© pour l’Angleterre mais ce dĂ©part n’a pas eu lieu. Les Carnets publiĂ©s s’arrĂȘtent Ă  la date du 13 juin 1940 pour ne reprendre que le 17 janvier 1941 ; les annĂ©es 1941 et 1942 ne comptent que sept et cinq pages, ce qui signifie que l’écrivain n’a pas souhaitĂ© s’appesantir sur cette pĂ©riode de sa vie. Tout au plus note-t-il en 1941 : « J’ai achevĂ© mon livre (8 mars). Le Pain des rĂȘves »[100] qui sera publiĂ© en 1942 et obtiendra le Prix populiste. DĂšs lors, l’écrivain et sa famille -- il Ă©voque dans ses Carnets les ennuis de santĂ© de ses parents -- sont condamnĂ©s Ă  subir l’Ordre nouveau nazi et les conditions d’une occupation militaire avec son lot de vexations et de pĂ©nuries croissantes dans une ville appartenant Ă  la zone cĂŽtiĂšre interdite, ce qui signifie que les contrĂŽles et la rĂ©pression de l’occupant ne cessent de se durcir jusqu’en 1944.

L’écrivain qui vit de sa plume continue de publier chez Gallimard, Ă  la NRF, et dans un journal breton soumis Ă  la censure vichyste et allemande. En 1941 (date non prĂ©cisĂ©e mais aprĂšs l’invasion de l’URSS par le TroisiĂšme Reich), Louis Guilloux a des Ă©changes Ă©pistolaires avec Jean Paulhan, ancien directeur de la NRF dĂ©sormais dirigĂ©e par Pierre Drieu La Rochelle, passĂ© du communisme au fascisme et fervent partisan de la collaboration avec l’occupant. La question de la responsabilitĂ© de l’écrivain est posĂ©e par Paulhan (p. 270-271) : faut-il Ă©crire et publier dans des revues collaborationnistes comme ComƓdia et donc faire le jeu de l’occupant ou faut-il se taire comme l’a fait Jean GuĂ©henno ?

Comme de nombreux Ă©crivains, Louis Guilloux fait le choix de publier Le Pain des rĂȘves dont il a donnĂ© deux extraits Ă  la NRF en fĂ©vrier et juillet 1942. Si ce rĂ©cit d’enfance reçoit un bon accueil critique[101], Guilloux n’est pas en mesure d’obtenir le Prix Goncourt, finalement dĂ©cernĂ© Ă  Marc Bernard, en raison de son profil politique, car, selon GisĂšle Sapiro, « un Louis Guilloux, une Elsa Triolet, plus marquĂ©s politiquement dans le sillage de la gauche antifasciste et surtout du communisme, avaient peu de chances d’ĂȘtre dĂ©signĂ©s dans la conjoncture politique. Marc Bernard, lui, a rompu avec ses engagements socialistes depuis 1940[102].» L’historien amĂ©ricain, Herbert R. Lottman cite l’écrivain briochin parmi ceux qui participĂšrent Ă  la NRF « juste une fois ou deux, mais suffisamment pour donner une apparence de lĂ©gitimitĂ© Ă  l’entreprise de Drieu » [103]. On peut opposer Ă  ce point de vue sĂ©vĂšre celui de Pascal Ory et Jean-François Sirinelli qui ont une tout autre approche des mĂȘmes faits : « Abetz parvient ainsi Ă  convaincre son ami Drieu la Rochelle de prendre la tĂȘte d’une Nouvelle Revue française rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e. (
) Le contenu des premiers sommaires fait s’éloigner ceux qui, tels Paul Éluard, AndrĂ© Gide ou Louis Guilloux, avaient d’abord acceptĂ© d’y figurer, et le public non collaborationniste boude[104].»

Les Contributions de Guilloux Ă  la presse collaborationniste se rĂ©sument Ă  deux revues parisiennes (deux extraits du Pain des rĂȘves Ă  la NRF et deux textes littĂ©raires Ă  Comoedia[105]) et Ă  un quotidien breton La Bretagne, qui a publiĂ© cinq extraits du Pain des rĂȘves et un article sur la lecture entre mai et juin 1941. Ce journal est pris en charge par Yann FouĂ©rĂ© qui se prĂ©tend rĂ©gionaliste mais qui est liĂ©, en rĂ©alitĂ©, aux nationalistes bretons du Parti national breton (PNB) et de l’Emsav, le mouvement politique qui collabore ouvertement avec l’occupant. S’intĂ©ressant depuis quelques annĂ©es Ă  « la question bretonne », surtout Ă  sa dimension culturelle, notamment en raison de ses relations amicales avec François EliĂšs, professeur au lycĂ©e de Saint-Brieuc, et avec Florian Le Roy qui s’investissent dans la mise en place d’institutions bretonnes, en rĂ©alitĂ© contrĂŽlĂ©es par l’occupant (Radio-Rennes), Louis Guilloux paraĂźt un temps suivre d’un bon Ɠil les initiatives de celtisants et Ă©crivains bretons fort engagĂ©s dans l’Emsav. Écrivain reconnu, Louis Guilloux est sollicitĂ© par eux au dĂ©but de l’annĂ©e 1941 pour la mise en place de l’Institut celtique de Bretagne (ICB). Il participe aux manifestations culturelles organisĂ©es Ă  Rennes du 20 au 25 octobre 1941[106]. Louis Guilloux est le rapporteur de la commission « Arts, presse, sociĂ©tĂ©s culturelles » qui concerne « les lettres » lors de ces travaux prĂ©paratoires Ă  l’ICB mais on ignore s’il a participĂ© Ă  d’autres activitĂ©s les mois suivants. Ce qui est certain c’est qu’il n’est pas prĂ©sent lorsque l’ICB est officiellement lancĂ© Ă  Nantes en mai 1942 (vote des statuts).

En contact avec des pionniers de la résistance

Baignant dans les ambivalences du dĂ©but des AnnĂ©es noires, Louis Guilloux est dans le mĂȘme temps en contact avec d’autres hommes avec lesquels il a militĂ© dans les annĂ©es 1930 et qui entrent rapidement en rĂ©sistance Ă  Saint-Brieuc. Sans y participer, on peut raisonnablement penser qu’il est au courant de leurs intentions antiallemandes, voire de leurs activitĂ©s, car il les reçoit chez lui ou les croise en ville. Tout d’abord, il connait fort bien le Briochin Pierre Petit, responsable de la CGT et militant communiste. Or, dĂšs l’automne 1940, Pierre Petit rĂ©organise avec Pierre Le Queinec, le PCF clandestin Ă  Saint-Brieuc et dans les CĂŽtes-du-Nord. Pierre Le Queinec est le futur adjoint de Charles Tillon, le chef des FTP la branche armĂ©e du Front national pour la libĂ©ration et l’indĂ©pendance de la France, ce mouvement de rĂ©sistance crĂ©Ă© par le PCF en mai 1941. L’HumanitĂ© clandestine est signalĂ©e Ă  plusieurs reprises Ă  Saint-Brieuc Ă  la fin 1940 et au dĂ©but de 1941. En outre, le couple Guilloux hĂ©berge Ă  partir de 1940 une jeune fille, HĂ©lĂšne Le Chevalier, et l’aide Ă  prĂ©parer son baccalaurĂ©at (en français et en anglais)[107]. La jeune fille de Kergrist-MoĂ«lou (centre-Bretagne) va rapidement animer des comitĂ©s fĂ©minins crĂ©Ă©s par le PCF qui distribuent des tracts. En 1941 et 1942, elle participe Ă  des comitĂ©s du Secours populaire qui aident les familles de dĂ©tenus communistes emprisonnĂ©s Ă  Guingamp et Ă  Saint-Brieuc Ă  la suite de rafles au printemps 1941, en 1942 et surtout en 1943. Elle-mĂȘme est arrĂȘtĂ©e par la police de Vichy le 19 mars 1943 au moment oĂč Saint-Brieuc est secouĂ© par plusieurs attentats des Francs-tireurs et partisans. Louis Guilloux est inquiĂ©tĂ© car il s’est portĂ© garant de la jeune fille, ce qui lui vaut de voir sa maison perquisitionnĂ©e et d’ĂȘtre interrogĂ© par la police française[108]. EmprisonnĂ©e plusieurs mois, HĂ©lĂšne Le Chevalier n’est libĂ©rĂ©e qu’à NoĂ«l 1943 et l’une de ses premiĂšres visites est pour les Guilloux. Elle considĂšre que l’intervention de l’écrivain lui a Ă©vitĂ© la dĂ©portation. Elle apparaĂźt sous les traits de Monique dans Le Jeu de patience, livre dans lequel son arrestation est Ă©voquĂ©e[109].

Mais dans un autre registre, Louis Guilloux a rencontrĂ© dĂšs janvier 1941 l’abbĂ© VallĂ©e de passage Ă  Saint-Brieuc qui avait participĂ© activement Ă  l’accueil des rĂ©fugiĂ©s espagnols. Prisonnier de guerre, il vient juste d’ĂȘtre libĂ©rĂ©. En fĂ©vrier, l’abbĂ© VallĂ©e lance une feuille clandestine destinĂ©e au clergĂ©, Veritas, qui dĂ©nonce l’appui de la hiĂ©rarchie catholique au rĂ©gime de Vichy et Ă  la politique de collaboration d’État du marĂ©chal PĂ©tain. L’abbĂ© VallĂ©e Ă©voqua-t-il ses projets avec Guilloux ? Le 25 aoĂ»t 1941, Veritas est distribuĂ© Ă  Saint-Brieuc. Le numĂ©ro 2, conservĂ©, est une « RĂ©ponse au cardinal Baudrillart » qui a appelĂ© Ă  soutenir PĂ©tain et sa politique aprĂšs Montoire, texte signĂ© « Un catholique français ». Un 3e numĂ©ro paraĂźt le 18 octobre 1941. Mais l’abbĂ© VallĂ©e est arrĂȘtĂ© le 6 fĂ©vrier 1942, internĂ© Ă  Fresnes puis dĂ©portĂ© dans des prisons et des camps en Allemagne. CondamnĂ© Ă  cinq ans de travaux forcĂ©s en octobre 1943, il meurt d’épuisement Ă  Mauthausen le 30 mars 1945. Louis Guilloux connaĂźt bien l’abbĂ© ChĂ©ruel, professeur de philosophie Ă  Saint-Brieuc, ami de l’abbĂ© VallĂ©e, futur dirigeant du mouvement de rĂ©sistance DĂ©fense de la France (DF) et membre du CDL. Il a probablement Ă©tĂ© informĂ© de cette initiative de journal clandestin. C’est aussi le cas du pasteur Yves Crespin de Saint-Brieuc qui a eu des ennuis avec les Allemands dĂšs 1941, est arrĂȘtĂ© en 1943 et dĂ©portĂ© en 1944. Dans ses Carnets[110] et dans Le Jeu de patience, s’appuyant sur le rĂ©cit de l’épouse du pasteur Crespin, l’écrivain relate dans des pages Ă©mouvantes le dĂ©part de CompiĂšgne du pasteur et du Dr Hansen de Saint-Brieuc vers les camps de dĂ©portation.

Mais Louis Guilloux n’est pas seulement un spectateur et un chroniqueur de l’Occupation, il participe Ă  l’unification des mouvements de rĂ©sistance des CĂŽtes-du-Nord. Utilisant ses contacts dans ces milieux, Ă  PĂąques 1943 il contribue Ă  mettre en relation la rĂ©sistance communiste (Pierre Petit) et la rĂ©sistance catholique (l’abbĂ© ChĂ©ruel) en gestation Ă  DF, puis avec les socialistes de LibĂ©ration-Nord qui sont chargĂ©s dans la rĂ©gion de mettre sur pied l’ArmĂ©e secrĂšte (AS) Ă  partir de l’étĂ© 1943. Deux rĂ©unions des responsables briochins des mouvements se sont tenues chez lui[111]. Ce qui n’était pas sans risques quand on sait que plusieurs d’entre eux sont arrĂȘtĂ©s en 1944, des responsables de LibĂ©-Nord, le chef de l’AS Adolphe VallĂ©e et les chefs briochins de DF, l’abbĂ© Fleury et les MĂ©tairie pĂšre et fils, fusillĂ©s le 10 juillet prĂšs de Guingamp avec 14 autres patriotes. Guilloux est aussi en contact avec Christian le Guern, le responsable de la CGT, futur membre du CDL. Á la LibĂ©ration, Louis Guilloux appartient au FN dirigĂ© dans le dĂ©partement par l’instituteur socialiste Jean Devienne alors proche du PCF, membre actif du CDL. De mĂȘme, en 1944, quand un ComitĂ© dĂ©partemental de libĂ©ration (CDL) est constituĂ© sous la prĂ©sidence de l’ancien dĂ©putĂ© Henri Avril (radical-socialiste), Tonton, qui apparaĂźt dans Les Carnets comme dans Le Jeu de patience, il est probable que les Guilloux ont prĂȘtĂ© leur maison pour au moins une rĂ©union clandestine de cet organisme de direction de la RĂ©sistance. On sait que la premiĂšre rĂ©union s’est tenue dans la sacristie de l’église Saint-Michel, tout prĂšs de chez Louis Guilloux, et que l’abbĂ© ChĂ©ruel a Ă©tĂ© chargĂ© avec l’ancien dĂ©putĂ© socialiste finistĂ©rien Tanguy Prigent, responsable interrĂ©gional de LibĂ©-Nord, de la mise en place des CDL dans l’Ouest de la France. Deux versions littĂ©raires diffĂ©rentes, exhumĂ©es des archives Guilloux par MichĂšle Touret et Sylvie Golvet, qui racontent une rĂ©union de membres du CDL chez le narrateur rendent cette hypothĂšse plausible mais sans aucune certitude[112].

Louis Guilloux, interprÚte des Américains (août - octobre 1944)

Ses Carnets ainsi que O.K., Joe ! publiĂ© en 1976 montrent un Louis Guilloux trĂšs attentif aux derniers mois de l’Occupation Ă  Saint-Brieuc ainsi qu’aux journĂ©es de la libĂ©ration de la ville au dĂ©but aoĂ»t 1944. Pour les historiens, ces Ă©crits sont irremplaçables Ă  un moment oĂč le pouvoir d’État (prĂ©fet, sous-prĂ©fets) et le pouvoir municipal (maires) changent de mains. Dans ses Carnets, l’écrivain rend compte de la montĂ©e de la rĂ©pression policiĂšre et militaire allemande, de la peur, des pĂ©nuries alimentaires, des rĂ©quisitions de main-d’Ɠuvre pour tenter d’achever le Mur de l’Atlantique avant le dĂ©barquement. Lui-mĂȘme a Ă©tĂ© convoquĂ© sur les chantiers. Il note les nombreux attentats et sabotages de la rĂ©sistance dans la rĂ©gion briochine mais aussi les exĂ©cutions sommaires de collaborateurs prĂ©sumĂ©s : une quinzaine Ă  Saint-Brieuc avant la libĂ©ration effective de la ville du 4 au 6 aoĂ»t 1944, le nombre le plus Ă©levĂ© des villes de Bretagne sur un total de 243 dans les CĂŽtes-du-Nord entre 1943 et 1945. Louis Guilloux signale l’installation des nouveaux pouvoirs le 5 aoĂ»t, le prĂ©fet Gamblin et le nouveau maire de Saint-Brieuc l’industriel Charles Royer, membre du CDL, avant mĂȘme l’arrivĂ©e des troupes amĂ©ricaines le 6 aoĂ»t. Dans son interview Ă  l’historien Jean-Pierre Rioux, Louis Guilloux indiquait qu’on aurait pensĂ© Ă  lui pour ĂȘtre le maire de la LibĂ©ration mais il ne le dit pas dans ses Carnets et on n’en trouve pas trace. Il dĂ©crit les scĂšnes de l’épuration, l’arrestation des suspects et surtout les tontes de femmes qui le choquent avec son cĂ©lĂšbre portrait de la tondue. Ce type d’action est assumĂ© par les responsables de la rĂ©sistance, notamment du FN qui affiche des photos de femmes tondues Ă  sa permanence, et s’inscrit dans ce que l’on appelle alors « le chĂątiment des traĂźtres ». Les Ă©crits de Guilloux restituent bien le climat d’euphorie mais aussi de deuil, car on ouvre les fosses des torturĂ©s et fusillĂ©s, qui marquent ces journĂ©es de la LibĂ©ration.

Le 7 aoĂ»t, Louis Guilloux qui est allĂ© rĂ©cupĂ©rer son brassard du FN devient l’interprĂšte officiel de la mairie de Saint-Brieuc auprĂšs des troupes amĂ©ricaines. C’est cette fonction et cette expĂ©rience qui nous donnent une plongĂ©e inĂ©dite au sein de l’armĂ©e amĂ©ricaine libĂ©ratrice qui Ă©tale sa puissance matĂ©rielle mais aussi son racisme. L’écrivain briochin suit l’achĂšvement de la libĂ©ration de la Bretagne, sauf les deux poches de Lorient et de Saint-Nazaire, et notamment prĂšs de Brest, le port du Ponant qui subit un siĂšge de 43 jours en aoĂ»t-septembre 1944. Ces quelques semaines passĂ©es comme interprĂšte d’officiers amĂ©ricains sont restituĂ©es dans O.K., Joe ! Guilloux fait le rĂ©cit des enquĂȘtes menĂ©es auprĂšs de la population bretonne, des affaires mettant en cause des exactions, des viols ou des crimes commis par des soldats amĂ©ricains. Les prĂ©venus sont souvent des Noirs ; ils sont gĂ©nĂ©ralement lourdement condamnĂ©s, Ă  la peine de mort par pendaison pour le soldat James Hendrick dans le cas de l’affaire Bignon de Plumaudan (CĂŽtes-du-Nord). Pour son ouvrage L’InterprĂšte[113], l’universitaire amĂ©ricaine Alice Kaplan a identifiĂ© dans les archives amĂ©ricaines les deux officiers avec lesquels Louis Guilloux a menĂ© ces enquĂȘtes judiciaires, les lieutenants Joseph Greene et Ralph Fogarthy (Stone et Bradford dans le texte de Guilloux). Selon des travaux rĂ©cents, en France, 21 soldats dont 18 Noirs ont Ă©tĂ© condamnĂ©s Ă  mort pour violences sexuelles et viols par des Cours martiales amĂ©ricaines et pendus en public, dont deux en Bretagne. Pour comprendre ces chiffres, il faut savoir que les soldats Noirs Ă©taient relĂ©guĂ©s Ă  l'intendance, donc plus en contact avec les civils, tandis que les Blancs progressaient vers l'Est et avaient moins de chances d'ĂȘtre identifiĂ©s par des victimes en cas d'agression. A cela s'ajoute le biais du racisme qui imprĂ©gnait la sociĂ©tĂ© amĂ©ricaine de l'Ă©poque. AprĂšs le siĂšge de Brest, Louis Guilloux suit l’armĂ©e amĂ©ricaine quelques jours dans le Nord de la France mais il doit rentrer pour des raisons de santĂ©. Pour l’écrivain, une nouvelle vie commence Ă  Saint-Brieuc et Ă  Paris.

Le Jeu de patience : prix Renaudot 1949

Le Jeu de patience[114] est publié en 1949 et obtient le prix Renaudot en décembre 1949.

Cette vaste fresque embrassant prĂšs de 40 ans de la ville natale de l'auteur, jamais nommĂ©e, se dĂ©veloppe sur plus de 800 pages, rĂ©parties en 36 sĂ©quences et comprend environ 300 fragments de longueur extrĂȘmement variable. Avec Le Jeu de patience, l’Ɠuvre de Louis Guilloux subit une mutation importante. En effet, contrairement aux romans prĂ©cĂ©dents assez linĂ©aires, ce roman se dĂ©veloppe en une composition « kalĂ©idoscopique » sous le prĂ©texte du travail de crĂ©ation d’un Ă©crivain-narrateur. Cette fiction ouvertement discontinue synthĂ©tise des thĂšmes des romans prĂ©cĂ©dents et amorce une recherche de nouvelles pratiques d'Ă©criture que l'auteur explorera jusqu'Ă  son dernier roman.

Le Jeu de patience se prĂ©sente comme le journal d’une annĂ©e d’écriture (du 8 janvier 1947 au 9 janvier 1948) pendant laquelle le narrateur orchestre trois nappes historiques : la Chronique du Temps passĂ© (de 1912 Ă  1919), le journal d’un responsable (de 1932 Ă  1940) et la Chronique du Temps prĂ©sent (du 25 fĂ©vrier 1943 au 11 novembre 1943). Cette annĂ©e d’écriture permet donc une rĂ©appropriation du passĂ© de la ville et de son passĂ© de militant, ainsi que sa mise en perspective par rapport au temps de l’écriture. Car cette annĂ©e 1947 est une pĂ©riode de deuil : celle de la mort du personnage de Pablo, cet ancien milicien espagnol rĂ©fugiĂ© dans sa ville aprĂšs la dĂ©faite des rĂ©publicains espagnols. Pablo Ă©tait devenu un ami proche du narrateur.

Le narrateur, un homme d'une cinquantaine d'annĂ©es est caractĂ©risĂ© principalement par sa rĂ©flexion sur le sens de sa vie et de celle de ses personnages. Il plonge le lecteur au cƓur de sa crĂ©ation en une vaste mise en abyme, joue un rĂŽle de rĂ©gisseur du texte tout en livrant ses rĂ©flexions sur les limites d'une chronique face aux Ă©vĂ©nements tragiques de l'Histoire. Il se laisse porter par ses souvenirs et par tous les textes Ă©crits qu'il redĂ©couvre, qu'ils soient de lui ou de nombreux autres scripteurs. Les types de textes sont variĂ©s : nouvelles, lettres, articles de journaux, simples notes, extraits de romans, etc. Les ruptures dans la chronologie sont incessantes. Cependant, grĂące aux nombreuses analogies de situations et de circonstances, ainsi qu’à la reprise des nombreux rĂ©cits Ă©clatĂ©s en plusieurs fragments, grĂące aussi au retour des personnages, le narrateur parvient Ă  donner une forme d'unitĂ© Ă  ce roman extrĂȘmement fragmentĂ© qui rĂ©clame du lecteur une lecture patiente et exigeante.

Dans ce roman fleuve, l’univers thĂ©matique est particuliĂšrement riche : Ă©vocation de la vie traditionnelle d'autrefois et chronique sociale, action militante, conflits sociaux et Ă©vĂ©nements historiques (notamment l'accueil de rĂ©fugiĂ©s espagnols), histoires familiales ou de couples, lĂ©gendes et mythes, anecdotes locales, etc. La Seconde Guerre mondiale constitue un des thĂšmes majeurs et surtout un des plus structurants. Le roman offre une incroyable galerie de personnages extrĂȘmement nombreux (plus de 300). Ils apparaissent tantĂŽt comme de simples silhouettes tantĂŽt comme des personnages complexes, Ă©clairĂ©s le plus souvent sous l'angle de leurs contradictions. Le narrateur souligne sans cesse le tragique de leur destin aux prises avec l'Histoire. Ainsi ce roman foisonnant, prĂ©curseur de textes aux structures Ă©clatĂ©es, prĂ©sente une rĂ©alitĂ© trĂšs ancrĂ©e dans le quotidien d'une petite ville en la confrontant au tragique de l'Histoire. VĂ©ritable somme, ce roman entraĂźne le lecteur dans une vaste rĂ©flexion sur le temps qui semble relier par sa permanence toutes les strates du passĂ© au prĂ©sent du narrateur et aux affres de son Ă©criture du roman lui-mĂȘme.

1950-1980 : Ă©crire au temps du Nouveau Roman

Quand dans les annĂ©es 1950 aux Éditions de Minuit se rassemblent des auteurs aussi diffĂ©rents que Beckett, Nathalie Sarraute, Robbe-Grillet ou Claude Simon, que l’on range par commoditĂ© sous l’étiquette du « Nouveau Roman », Guilloux se tient, comme souvent, Ă  une distance lĂ©gĂšrement ironique de cette manifestation paroxystique d’une « crise du roman » qu’il a finalement toujours connue. Le romancier accorde depuis ses dĂ©buts un intĂ©rĂȘt profond aux questions d’écriture. Pour chaque Ɠuvre il s’est attachĂ© Ă  trouver la forme en fonction du sujet. Guilloux a mis au centre de ses prĂ©occupations la question du point de vue et celle de la structure narrative. Enfin, les jeux de mise en abyme qui apparaissent comme une des caractĂ©ristiques des Nouveaux Romanciers sont loin de lui ĂȘtre Ă©trangers. Lecteur assidu du Journal des Faux-Monnayeurs de Gide, il multiplie dans sa production romanesque, depuis au moins Le Jeu de patience, les reprĂ©sentations de l’écriture et de la lecture. Mais Guilloux se refuse Ă  tout discours thĂ©orique qui risquerait d’ĂȘtre doctrinaire. Il prĂ©fĂšre l’image de l’artisan Ă  celle du thĂ©oricien. Les questions de mĂ©tier importent et si le romancier se met en scĂšne en homo faber, en artisan, c’est moins par fidĂ©litĂ© (rĂ©elle) Ă  ses origines que pour montrer que chaque Ɠuvre rencontre des difficultĂ©s techniques qu’il va lui falloir rĂ©soudre avec des moyens qui lui sont propres. C’est ainsi qu’il continue d’explorer l’univers du roman, s’autorisant des clins d’Ɠil amusĂ©s Ă  ce nouveau groupe qui prophĂ©tise la fin du personnage, de l’intrigue et, en dĂ©finitive, d’un genre entrĂ© dĂšs le dĂ©but du siĂšcle dans « l’ùre du soupçon ».

Au dĂ©but des annĂ©es 1950, Guilloux passe davantage de temps Ă  Paris. Il vient de rencontrer par l’intermĂ©diaire de Camus, une romanciĂšre italienne, Liliana Magrini, liaison Ă  l’origine d’une correspondance nourrie conservĂ©e aux archives de Saint-Brieuc. Il se rend alors souvent Ă  Venise, ville qui sert de cadre Ă  un petit roman fantastique, Parpagnacco, paru en juin 1954 chez Gallimard, aprĂšs une parution en deux livraisons Ă  la NRF entre janvier et avril. Ce texte surprend tous les lecteurs de Guilloux, tant il semble en dĂ©calage avec la production antĂ©rieure de Guilloux.

« « Le narrateur, qui s’exprime en premiĂšre personne, est un marin danois, Erick Ericksen, provisoirement Ă  terre (“puisque le Motherland est momentanĂ©ment Ă  l’ancre”). D’Irlande, il se remĂ©more un Ă©pisode de sa vie : au cours d’une escale Ă  Venise, “il y a longtemps de cela” (p. 19), il a achetĂ© dans une boutique des marionnettes, et briĂšvement rencontrĂ© une jeune fille dont il a imaginĂ© qu’elle Ă©tait prisonniĂšre, sĂ©questrĂ©e. Il la recherche – Ă  vrai dire, sans mĂ©thode ni ardeur excessive – fait diverses rencontres qui sont autant de leurres, et se retrouve seul, son ami Patrick ayant Ă©tĂ© tuĂ©, responsable de son bateau et de son Ă©quipage, mais dĂ©sespĂ©rĂ©[115]. »

Conte fantastique avec rĂ©cit enchĂąssĂ©, roman de marins ou d’aventures, rĂ©cit initiatique, (voir l’analyse d’Anne Roche), ce court roman explore les diverses facettes d’un genre pluriel. La rĂ©ception mĂ©diatique dans son ensemble montre l’embarras devant ce texte dĂ©routant[116] qui semble Ă©loignĂ© de la sensibilitĂ© sociale de l’auteur.

Louis Guilloux n’achĂšve pas le roman auquel il travaille depuis 1951, La DĂ©livrance. Une seule partie, « L’évasion », est publiĂ©e sous le titre Labyrinthe d’octobre 1952 Ă  janvier 1953 dans la revue La Table Ronde. On y retrouve les thĂšmes chers Ă  l’auteur de l’éternel emprisonnement de l’homme, de la faute, de la culpabilitĂ©. Que les questions existentielles soient encore une fois traduites en termes d’espace, comme le titre finalement retenu l’indique, donne au roman une facture trĂšs contemporaine et renvoie Ă  l’univers de Kafka[117]. Enfin, on dĂ©couvre dans ce court texte un personnage haut en couleur, celui de GrĂ©goire Cantin, anarchiste, ancien Ă©goutier, boiteux atteint d’emphysĂšme qui offre fraternellement au narrateur venant de s’évader de prison la nuit de NoĂ«l une cachette inattendue sous la forme d’une espĂšce de terrier amĂ©nagĂ© dans la forĂȘt.

Au cours de l’étĂ© 1953, la rĂ©Ă©dition de La Maison du peuple et de Compagnons rĂ©unis en un seul volume avec une prĂ©face d’Albert Camus[118] est saluĂ©e par une presse unanime[119].

Dans Les Batailles perdues, roman entrepris depuis 1954 et paru en 1960, Guilloux participe Ă  sa façon au dĂ©bat instaurĂ© par ceux qui imaginent la mort dĂ©finitive du roman dit balzacien. Ce gros roman de 600 pages, qui se dĂ©roule entre Paris et la Bretagne, multiplie, comme le titre l’indique, les rĂ©fĂ©rences Ă  l’auteur de La ComĂ©die humaine[120]. La longue description de Pontivy dĂšs le dĂ©but du roman, le portrait de Nicolas Mesker constituent de rĂ©jouissants pastiches de Balzac. Enfin tous les personnages se croisent dans une pension de famille du quartier latin, tenue par l’avatar moderne (et plus humain) de maman Vauquer, maman Furet. Dans cette fresque romanesque aux personnages nombreux, journalistes ou Ă©crivains pour la plupart, le romancier renoue avec son intĂ©rĂȘt pour l’Histoire en rapportant les grands Ă©vĂ©nements du Front populaire. Le rĂ©cit se termine quand la guerre civile espagnole commence, trois des personnages principaux du roman se proposant de rejoindre les Brigades internationales. Les batailles sont perdues mais dit Guilloux dans un entretien au Petit bleu des CĂŽtes du Nord, « il faut livrer la bataille, toujours, mĂȘme si l’on croit qu’elle sera perdue »[121]. Il semblerait bien que ce soit aussi la bataille du roman que Guilloux livre lĂ . Alexandra Vasic, dans sa thĂšse L’Ɠuvre de Louis Guilloux, le romanesque en jeu [122], dĂ©crit ce roman comme un « feu de joie de la littĂ©rature populaire » envisagĂ©e sous tous ses aspects, la distance critique instaurĂ©e par les jeux de pastiche et de parodie de tous les codes du roman feuilleton opĂ©rant le double mouvement de « cĂ©lĂ©bration et de mise Ă  mort du romanesque »[123]. Guilloux s’inscrit avec ostentation dans la tradition d’un genre et rend hommage aux plaisirs de lecture qu’il offre. Mais il met en lumiĂšre sa complexitĂ© et sa modernitĂ© apparaĂźt dans les jeux spĂ©culaires et les rĂ©fĂ©rences intertextuelles qui font de ce texte-tĂ©moignage d’une Ă©poque (l’utilisation de la presse et des journaux a jouĂ© un rĂŽle important dans l’élaboration du roman[124] un concentrĂ© des questions que pose et se pose le romancier sur l’écriture du roman).

Quand La Confrontation paraĂźt en 1968, il n’échappe pas Ă  la critique que ce court texte, qui joue avec la structure de l’enquĂȘte et les codes du roman policier, rejoint les pratiques de certains auteurs du Nouveau Roman qui ont eux-mĂȘmes subverti ce modĂšle. Le personnage narrateur a Ă©tĂ© chargĂ© par un mystĂ©rieux commanditaire de retrouver un homme disparu afin de lui remettre un trĂ©sor. Dans un rĂ©cit-confession, il s’adresse Ă  celui qui lui a confiĂ© cette enquĂȘte qui a pris la tournure d’une quĂȘte existentielle. La parentĂ© avec le Nouveau Roman, signalĂ©e avec ironie par le personnage qui dit s’ĂȘtre « mĂȘme mis au Nouveau Roman pour ne pas se rouiller tout Ă  fait »[125], apparaĂźt aussi dans le « brouillage de l’instance Ă©nonciative, la remise en cause du personnage, et [
] la question de l’identitĂ© qui est au centre du propos »[126]. Mais si la presse de l’époque souligne les points de convergence avec cette mouvance, on veut aussi montrer Ă  quel point l’art de Guilloux s’en distingue : la lisibilitĂ© du rĂ©cit autant que son profond humanisme, la dimension sociale, le rapprochement avec La Chute de Camus sont les arguments pour replacer l’Ɠuvre « dans la continuitĂ© de la production romanesque antĂ©rieure de Guilloux[127]. »

En 1976, Guilloux fait paraitre deux rĂ©cits chez Gallimard : Salido et OK., Joe ! Pour les deux textes, il s’inspire de situations dont il a Ă©tĂ© tĂ©moin : l’histoire d’un rĂ©publicain espagnol qui souhaite rejoindre l’URSS[128] , et son expĂ©rience de traducteur auprĂšs de l’armĂ©e amĂ©ricaine Ă  la LibĂ©ration qui le conduit Ă  assister aux procĂšs des soldats amĂ©ricains accusĂ©s de viols et de constater la diffĂ©rence de traitement entre soldats blancs et soldats noirs. OK., Joe ! est Ă  l’origine du travail de l’historienne amĂ©ricaine Alice Kaplan, L’InterprĂšte (2010) qui a menĂ© l’enquĂȘte sur les traces de Louis Guilloux. Ce texte bĂ©nĂ©ficie Ă©galement d’une Ă©dition critique de Sylvie Golvet et MichĂšle Touret, OK., Joe !, le dossier d’une Ɠuvre, parue aux PUR en 2016, avec une prĂ©face de Christian Bougeard.

Une derniĂšre fiction compte dans l’Ɠuvre de Guilloux : il s’agit du mince Coco perdu, paru en 1978, qui se dĂ©finit lui-mĂȘme comme « Essai de voix ». Le texte est saluĂ© par une presse nombreuse dans une pĂ©riode oĂč l’on peut Ă  juste titre parler d’une « actualitĂ© Louis Guilloux »[129]. Cette expression est d’ailleurs le titre donnĂ© au numĂ©ro zĂ©ro d’Approches rĂ©pertoire qui paraĂźt la mĂȘme annĂ©e. L’adaptation par Guilloux des Thibault de Roger Martin du Gard en feuilleton pour la tĂ©lĂ©vision est dans les mĂ©moires[130], de mĂȘme que l’adaptation du Sang noir. La piĂšce Cripure, mise en scĂšne par Marcel MarĂ©chal pour la premiĂšre fois en 1966, est reprise Ă  l’espace Cardin oĂč Guilloux est ovationnĂ©. Enfin, le Grand aigle d’or de la ville de Nice qui rĂ©compense l’ensemble de l’Ɠuvre coĂŻncide avec la sortie de Coco perdu. Le texte est le long soliloque d’un petit retraitĂ©, qui a dĂ©posĂ© sa femme Ă  la gare et espĂšre recevoir d’elle une lettre qu’il lui a vu poster le matin de son dĂ©part. Au terme du rĂ©cit, il prend conscience qu’aucun courrier n’arrivera et que Fafa ne reviendra pas. Tout se passe dans le cadre unique d’une petite ville de province oĂč le personnage va et vient entre sa petite « villa », la gare, et les restaurants du centre-ville, se souvient, croise des connaissances ou des inconnus, dĂ©sormais rĂ©duit Ă  une solitude irrĂ©mĂ©diable. Le texte se caractĂ©rise par une attention prĂ©cise accordĂ©e Ă  la parole et Ă  la voix humaine: la voix de Coco, celles de tous ceux qu’il rencontre, transforme cet « essai » de voix d’une apparente simplicitĂ© en une savante polyphonie, chaque voix Ă©tant elle-mĂȘme liĂ©e Ă  des histoires « qui sont autant de potentialitĂ©s Ă  l’Ɠuvre »[131]. Sabrina Parent souligne que « par bien des aspects, le dernier texte publiĂ© par Guilloux rĂ©vĂšle la modernitĂ© de l’auteur et tĂ©moigne de sa capacitĂ©, tout au long de sa production, Ă  ĂȘtre de son temps. »[132].

En juin 1978, Bernard Pivot consacre un des grands entretiens d’Apostrophes Ă  Louis Guilloux, ce qui apparaĂźt Ă  juste titre comme une consĂ©cration de l’Ɠuvre.

Il meurt le Ă  Saint-Brieuc.

L’écriture autobiographique

Pendant toutes ces annĂ©es, Guilloux multiplie Ă©galement la publication d’écrits autobiographiques. Plusieurs parutions s’échelonnent de 1952 Ă  1984, permettant de dĂ©couvrir la personnalitĂ© de l’écrivain, ses amitiĂ©s, ses lectures, sa façon de travailler.

Absent de Paris paraĂźt en 1952. « DĂ©diĂ© Ă  Jean Grenier, alors professeur Ă  Lille, il se prĂ©sente sous la forme d’une sĂ©rie de lettres adressĂ©es Ă  son ami mais rassemblĂ©es de façon continue. » [133] « InterrogĂ© au mois d’aoĂ»t par Combat, il dĂ©finit ainsi son livre : « ce sera une succession de souvenirs, de rĂ©flexions, de vues sur les choses, les ĂȘtres et sur la vie profonde : un « fourre-tout en deux mots »[134]. « Dans Absent de Paris, Guilloux rapporte d’ailleurs nombre de souvenirs qu’il a en commun avec son ami : les voyages en Italie et en Autriche au dĂ©but des annĂ©es vingt, leurs conversations, les amis qu’ils ont connu Ă  Saint-Brieuc : Georges Palante, Edmond Lambert, Max Jacob. » [135]. Saint-Brieuc occupe une bonne place dans ce livre, mais de nombreux sujets sont abordĂ©s, notamment son travail d’écrivain, le foisonnement des anecdotes donnant, selon Yves Loisel, « au livre son cĂŽtĂ© extraordinairement humain »

Guilloux poursuit la veine autobiographique avec la rĂ©daction d’un livre de souvenirs au titre empruntĂ© Ă  une vieille lĂ©gende bretonne, L’Herbe d’oubli. CommencĂ© au dĂ©but des annĂ©es 1960, poursuivi de maniĂšre plus intense en 1969 [136] ce rĂ©cit paraĂźt seulement en 1984.

La publication du premier tome de son journal, Carnets 1921-44 en 1978 Ă©claire Ă©galement la personnalitĂ© de l’écrivain, sa pudeur, son sens du secret, son attention accordĂ©e aux autres autant que sa maniĂšre d’écrire, avec les nombreuses scĂšnes prises sur le vif, constituant un ensemble de choses vues et entendues souvent Ă  l’origine de l’écriture du romancier. Le travail effectuĂ© pour la publication des Carnets a reprĂ©sentĂ© pour Guilloux un considĂ©rable travail d’élagage de la matiĂšre d’origine, voire d’autocensure [137]. La consultation des archives Ă  Saint-Brieuc permet de prendre la mesure de la dĂ©marche du diariste et vient encore enrichir la connaissance de l’écrivain et de son travail. Le deuxiĂšme tome des Carnets, Carnets 1944-1978, est posthume (1982). Au cours des dix derniĂšres annĂ©es de sa vie, Guilloux reçoit l’aide de Françoise Lambert qu’il dĂ©signera comme son exĂ©cutrice testamentaire [138] et qui joue un rĂŽle dĂ©terminant pour les publications posthumes.

Louis Guilloux, le romancier et la Bretagne

La lecture des romans de Louis Guilloux impose l’évidence de leur localisation gĂ©ographique : Saint-Brieuc, ville natale de l’écrivain. Echappent Ă  ce principe Parpagnacco et Les Batailles perdues. Parpagnacco enclĂŽt Ă  Venise une fiction teintĂ©e de lĂ©gendaire celtique. Les Batailles perdues s’ancrent Ă  Pontivy, capitale du FĂ©dĂ©ralisme breton (janvier 1790). Si le rĂ©cit met en avant la pĂ©riode du Front populaire et les Ă©vĂ©nements parisiens qui s’y attachent, le fil conducteur de la trame romanesque reste bien la Bretagne : autonomistes, instituteurs attirĂ©s par l’URSS faisant songer aux idĂ©aux d’un Yann Sohier, surtout l’extraordinaire personnage, Alain de Kerauzern. PlutĂŽt autonomiste et farouche rĂ©publicain, recteur (nom donnĂ© en Bretagne au curĂ© d’une paroisse) de son Ă©tat, cet aristocrate de surcroĂźt ne dĂ©teste pas les Chouans[139]... De quoi donner un beau vertige idĂ©ologique ! Sauf que les choses sont plus simples : Alain de Kerauzern est un bon Breton, ce qui ne l’empĂȘche pas d’ĂȘtre un bon Français, de surcroĂźt anti-fasciste
. François QuĂ©rĂ©, le militant socialise de La Maison du peuple qui ne concevait pas de pouvoir vivre ailleurs qu’à Saint-Brieuc en sa Bretagne natale ; Cripure, alias Georges Palante qui fit de ces mĂȘmes lieux sa « patrie » d’adoption, libertaire rĂ©voltĂ© ; Alain de Kerauzern : Guilloux offre Ă  ses lecteurs une apparente curieuse trilogie.

Toutefois, Louis Guilloux ne laisse pas son lecteur dĂ©muni. En marge et quasi en fin de son parcours romanesque, il s’ouvre Ă  lui dans La Bretagne que j’aime[140]. « (
) Pour moi, Breton, la Bretagne est le plus beau pays du monde, la province de France qui me va le mieux. Je l’aime et il m’a toujours semblĂ© que mĂȘme si je n’y avais pas grandi, je l’aurais encore choisie. » Et de poursuivre : « Votre propre pays vous construit. On apprend Ă  le reconnaĂźtre dans un Ă©change de l’ñme et l’on dĂ©couvre qu’il vous va bien comme un autre manteau fait pour vous, vous pour lui ». Et de confier Ă  mi-voix qu’à Saint-Brieuc de Bretagne, il est devenu ce qu’il est devenu, comme il en fut Ă  Combourg pour Chateaubriand, Ă  TrĂ©guier pour Renan, Ă  Pouldreuzic pour Pierre-Jakez HĂ©lias
 Et Guilloux devint romancier, illustrant en ces termes les prĂ©misses de l’Ɠuvre de sa vie, dans ses mĂ©moires posthumes, L’Herbe d’oubli : « Un arbre. Toutes les histoires que je veux conter seraient les branches et les feuilles d’un arbre, un vieux chĂȘne breton, dont les racines plongeraient bien profondĂ©ment dans le noir humus d’oĂč les branches et les feuilles tireraient leur vigueur, leur Ă©clat, leur fraĂźcheur, leur profondeur dans (la) lumiĂšre ».

La Maison du peuple (1927) s’inscrit dans le projet de Guilloux. L’histoire racontĂ©e s’appuie sur les souvenirs de l’enfant qui relate le projet d’une construction d’une « Maison du Peuple » dont le pĂšre de l’écrivain fut un Ă©nergique artisan, projet auquel mit fin la dĂ©claration de guerre d’aoĂ»t 1914. L’histoire individuelle et familiale se fond dans une histoire collective et sociale qui ne peut que s’inscrire elle-mĂȘme dans l’histoire mondiale. La Maison du peuple appelait des dĂ©veloppements que Guilloux mĂšnera Ă  leur terme ultime. Ainsi l’écrivain appuie sa crĂ©ation romanesque sur des « choses vues », entendues, vĂ©cues par lui-mĂȘme auxquelles il donnera leur extension maximale dans Le Jeu de patience (1949). Dans ce roman, il reliera l’entreprise de construction de la Maison du Peuple Ă  l’arrivĂ©e du moine Brieuc (Ve s.) dans un mĂȘme idĂ©al de fraternitĂ© et de justice. Mais aussi dans ce roman qui embrasse, en mĂȘlant la chronologie des Ă©pisodes, l’histoire de Saint-Brieuc et du monde, des invasions romaines Ă  l’arrivĂ©e de l’ « Exodus » en Palestine, l’expĂ©rience du romancier-narrateur qui s’est dĂ©doublĂ© dans le personnage du chroniqueur Meunier, intĂšgre vie privĂ©e, pensĂ©es intimes, conscience sociale, rĂ©volte morale et fractures et fracas de l’Histoire : 1914-1918, chĂŽmage et misĂšre des annĂ©es 1930, rĂ©fugiĂ©s espagnols mais aussi autrichiens, italiens, occupation allemande, etc. Ainsi, Louis Guilloux entend-il lier le local Ă  l’universel, joindre conscience de soi, identitĂ© et universalisme.

L’histoire rĂ©elle de la Maison du peuple ouvre d’autres perspectives encore. Le projet briochin comportait la mise en place et l’accueil de cinq coopĂ©ratives de production et de construction, de deux coopĂ©ratives de consommation, d’une caisse ouvriĂšre de crĂ©dit
 A cela s’ajoutaient l’idĂ©al d’un socialisme municipal pour contrecarrer le centralisme Ă©tatique, et la crĂ©ation de groupements autogĂ©rĂ©s pour Ă©viter le pouvoir des chefs de partis et de syndicats. De Compagnon's (1931) aux Batailles perdues (1960), ce mĂȘme courant parcourt, plus ou moins explicite, l’Ɠuvre de Guilloux. Or tout cela – peu ou prou – figure dans l’opuscule de Georges Palante, Du nouveau en politique (1919), ce Palante dont Guilloux fit certes le Cripure du Sang noir (1935) mais dont il disait que celui-ci Ă©tait son maĂźtre, que tous deux s’apparentaient sur bien des points dont le mĂȘme amour qu’ils portaient Ă  la Bretagne[141]. Un tel programme trouve en outre des Ă©chos chez Lamennais ou chez Emile Masson.

« Comment peut-on ĂȘtre breton » ? À la suite de Chateaubriand, en accord avec ses contemporains Jean Grenier et Jean GuĂ©henno ou Armand Robin, Louis Guilloux voit dans le caractĂšre breton une propension Ă  la rĂ©volte, Ă  un esprit d’insoumission, d’indĂ©pendance (« Douze balles montĂ©es en breloque »), un anarchisme plus ou moins conscient, que Guilloux traduit pour lui-mĂȘme par les expressions : rester « Ă  son compte », demeurer « artisan », agir en « franc-tireur ». Ainsi entendait-il ĂȘtre breton, ĂȘtre Ă©crivain en dehors de tout engagement, voire de tout formalisme. C’est dans la prĂ©face Ă  Souvenirs de Bretagne (album de photographies de Charles Lhermitte 1911-1913) que Louis Guilloux se fait le plus explicite, citant Chateaubriand comme un argument littĂ©raire d’autoritĂ©, ou faisant des femmes bretonnes les fermes soutiens de « guerres de la Chouannerie », des actions paysannes « des annĂ©es 1933 et suivantes », et de « la lutte contre l’occupant nazi ». Et Guilloux de ponctuer son propos d’un pĂ©remptoire « le gĂ©nie du peuple breton n’est pas romain. CĂ©sar n’a pas encore achevĂ© sa conquĂȘte. Il ne l’achĂšvera jamais »[142].

La Bretagne que j’aime et la prĂ©face aux Souvenirs de Bretagne abordent deux autres points capitaux aux yeux de Guilloux : la langue et l’imaginaire. Louis Guilloux rappelle l’éloge que fit Michelet de la Bretagne et des Bretons, « de la langue et du gĂ©nie celtiques, de l’apport de ce gĂ©nie dans la culture française et gĂ©nĂ©rale » dans son Histoire de France. Puis il dĂ©nonce la proscription dont fut victime la langue bretonne qui ne risquait pourtant pas de ruiner « l’unitĂ© nationale », et conclut : « Il existe un « sacrĂ© » contre lequel aucun argument ne pourra jamais prĂ©valoir », le droit Ă  parler sa propre langue[143].Les droits culturels sont inhĂ©rents aux droits de l’homme.

Quant Ă  l’imaginaire, s’il appartient Ă  la propension au conte, Ă  la lĂ©gende, Ă  la poĂ©sie, au rĂȘve, qui est vif chez les Bretons, Guilloux le rattache Ă  l’esprit de rĂ©volte qui correspond Ă  une forme de dĂ©ni des rĂ©alitĂ©s de ce monde, tel que l’exprimĂšrent CorbiĂšre, Villiers de l’Isle-Adam ou Jules Lequier. Louis Guilloux rejoint sur ce point son ami Jean Grenier qui parle de « mal celtique », ennui de la finitude de toutes choses et appel Ă  tous les ailleurs[144]. Le marin Durtail du Pain des rĂȘves en serait un exemple modeste face Ă  Cripure et Ă  sa volontĂ© d’échec.

Des rĂ©alitĂ©s individuelles, sociales et politiques ancrĂ©es dans la terre bretonne, des idĂ©aux de justice, de libertĂ©, de bonheur dĂ©fendus en pays breton, un mal celtique liĂ© Ă  l’existence et Ă  l’ĂȘtre : la Bretagne est consubstantielle Ă  l’Ɠuvre de Louis Guilloux mais elle ne l’enferme pas, elle l’ouvre au monde et se propose comme un appel Ă  ce que le romancier considĂ©rait comme essentiel, « l’amour de la vie ».

Amitiés et correspondance

Louis Guilloux a été l'ami de nombreux écrivains, avec lesquels il entretenait une correspondance extensive. L'essentiel de cette correspondance a été édité dans les années 2005-2015 dans cinq livres, à savoir : Albert Camus[145], André Malraux[146], Jean Guéhenno[147], Jean Paulhan[148] et Georges, Emilienne et Lucie Robert[149].

Jean Grenier à 19 ans sera le premier à tisser des liens quasi fraternels avec le jeune Louis Guilloux. Le premier aussi qui lui fera rencontrer en 1925 des écrivains qui deviendront des amis : André Chamson, Max Jacob.

En 1927 Jean GuĂ©henno Ă©dite chez Grasset La Maison du peuple, le premier roman publiĂ©. Les deux fils de cordonniers partagent une mĂȘme enfance. Cette mĂȘme annĂ©e, AndrĂ© Malraux entre dans la vie de Louis Guilloux. À partir de 1932, Malraux accompagne la genĂšse du Sang Noir. Il sera avec Louis Aragon et AndrĂ© Gide l'un des fervents dĂ©fenseurs du roman paru en 1935. EugĂšne Dabit, l'auteur de L'HĂŽtel du Nord retrouve son ami Louis Guilloux pour accompagner AndrĂ© Gide en URSS Ă  l'Ă©tĂ© 1936.

AprĂšs la guerre, en 1945, la rencontre avec Albert Camus signe la naissance d'une amitiĂ© exceptionnelle qui portera Ă  jamais pour Guilloux l’empreinte tragique de la mort accidentelle de Camus en 1960. « Relation limpide des deux hommes...en totale confiance l'un par rapport Ă  l'autre » Ă©crit AgnĂšs Spiquel–Courdille dans l'avant-propos de la Correspondance Camus-Guilloux.

Moins connues du grand public, Liliana Magrini et Vivette Perret, publiées chez Gallimard, seront dans les années 1950-1960 des confidentes.

Autres amitiĂ©s littĂ©raires, Mohammed Dib, l’écrivain algĂ©rien et Ignazio Silone, l’auteur italien frĂ©quentĂ© lors des rencontres au titre de la SociĂ©tĂ© europĂ©enne de la culture dont Guilloux fut un membre actif.

D'autres textes traitent de l'amitié de Louis Guilloux avec Jean Grenier, avec lequel il est ami depuis 1917[150] - [151], avec Georges Palante son professeur de philosophie, sur lequel Guilloux a publié en 1931 Souvenirs sur Georges Palante[152] et avec André Chamson[153].

La SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux a consacrĂ© des Rencontres Louis Guilloux sur cette thĂ©matique de l'amitiĂ© Des amis, des compagnons au cƓur de la crĂ©ation littĂ©raire (20 et ) et a publiĂ© les actes de ces rencontres.

RĂ©ception de l’Ɠuvre

L’Ɠuvre de Louis Guilloux a fait l’objet d’une rĂ©ception abondante. L’étude de l’accueil fait Ă  ses livres[154] montre qu’ils ont intĂ©ressĂ© la critique, avec des pics de succĂšs : en 1927 La Maison du peuple suscite de nombreux articles. En 1935, Le Sang noir alimente abondamment les chroniques. Si le silence se fait presque totalement pendant les annĂ©es de guerre (rompu seulement pour Le Pain des rĂȘves), Le Jeu de patience, qui reçoit le Prix Renaudot en 1949, attire Ă  nouveau fortement l’attention. En 1967, l’attribution du Grand Prix National des Lettres pour l’ensemble de l’Ɠuvre dĂ©clenche beaucoup de commentaires, tout comme, en 1967 puis en 1977, la reprise du Sang noir dans la version thĂ©Ăątrale intitulĂ©e Cripure. Lors du dĂ©cĂšs de Louis Guilloux, en 1980, de trĂšs nombreuses chroniques nĂ©crologiques lui sont consacrĂ©es, du Figaro Ă  L’HumanitĂ©, de la presse rĂ©gionale Ă  la presse culturelle- sa mort est annoncĂ©e Ă  la Une du Monde[155]). Au cours des annĂ©es suivantes paraissent de plus en plus des numĂ©ros de revues, des actes de colloques, des essais, des Ă©tudes universitaires. Presque 40 ans plus tard, en 2019, la parution posthume de L’IndĂ©sirable constitue un succĂšs Ă©ditorial et relance la dĂ©marche critique.

Cette rĂ©ception assidue de l’Ɠuvre doit ses fluctuations au caractĂšre alĂ©atoire habituel des choix des lecteurs, Ă  la grande diversitĂ© des ouvrages — Louis Guilloux a Ă©tĂ© un explorateur en Ă©criture. Les intermittences de la critique s’expliquent aussi en particulier par les alternances de prĂ©sence et d’absence de l’auteur dans le monde littĂ©raire parisien. Mais il a Ă©tĂ© traitĂ© en pair, de façon constante, par les plus grands Ă©crivains du temps, comme l’attestent les correspondances (Gide, GuĂ©henno, Max Jacob, Malraux, Albert Camus, Paulhan, etc.). Il a Ă©tĂ© Ă©ditĂ© par les maisons les plus rĂ©putĂ©es, chez Grasset d’abord puis chez Gallimard Ă  partir du Sang noir. On a pu dire qu’il Ă©tait accompagnĂ© d’une grande escorte.

TrĂšs attachĂ© Ă  son mĂ©tier d’écrivain[156], il Ă©tait sensible Ă  la reconnaissance de son Ɠuvre. Dans une sĂ©rie d’études rĂ©unies sous le titre Louis Guilloux dans les mĂ©dias[157] , on voit notamment avec quel soin il collationnait les images de lui-mĂȘme, soigneusement Ă©tablies par les maisons d’édition — il en avait constituĂ© un thesaurus[158]. Il conservait les coupures de journaux, se prĂȘtait Ă  de multiples interviews, radiodiffusĂ©es puis tĂ©lĂ©visĂ©es ; il y entretenait une image de lui-mĂȘme Ă  laquelle il Ă©tait attachĂ© — il se livre et se dĂ©robe Ă  la fois de façon complexe[159].

Au total la rĂ©ception de l’Ɠuvre renvoie des images diverses. Les unes cautionnent un Louis Guilloux tĂ©moin de la pauvretĂ© dans la sociĂ©tĂ© du dĂ©but du XXe siĂšcle, un non alignĂ© plus ou moins anarchisant ; le personnage de Cripure est nodal dans la vision de l’Ɠuvre[160]. D’autres soulignent la dĂ©marche existentielle, un humanisme de la souffrance, une Ă©thique de la solidaritĂ© que manifestent les actions de militant[161] , et aussi, Ă  partir du Pain des rĂȘves, la fin d’une relation enchantĂ©e Ă  l’enfance, et de façon rĂ©currente un rapport complexe au communisme[162], Ă  la religion. Il faut noter que les articles qui traitent de Guilloux, comme le montrent leurs titres[163], dĂ©passent souvent le livre qui les a dĂ©clenchĂ©s, traitent de l’Ɠuvre dans son ensemble, de questions gĂ©nĂ©rales — philosophiques, politiques, littĂ©raires. On a analysĂ© l’intĂ©rĂȘt montrĂ© par de grands pĂ©riodiques, La Nouvelle Revue française, Esprit, Europe, Le Nouvel Observateur[164]. On insiste partout sur la maniĂšre dont l’auteur a donnĂ© la parole Ă  ceux qui habituellement ne l’ont pas, dont il a stigmatisĂ© un patriotisme fallacieux, dont il exprime la crainte de trahir ses origines[165] , dont il se dĂ©fend de toute infĂ©odation et se prĂ©sente en « franc-tireur ». Mais la rĂ©ception a rĂ©pondu aussi Ă  son souci de littĂ©raritĂ©, et si la presse de gauche le saluait en raison de son investissement dans la problĂ©matique sociale, les critiques qui sur ce plan le dĂ©savouaient prenaient en compte sa dĂ©marche de recherche littĂ©raire.

Il s’est avant tout voulu Ă©crivain, et les critiques l’ont jugĂ© Ă  cette aune. Dans Le Monde des livres, Ă  propos de Coco perdu il est rapprochĂ© de VallĂšs, du Nouveau Roman, de Beckett, de Cayrol[166]. Les Ă©chos des recherches du Nouveau Roman[167] expliquent sans doute en partie l’accueil assez froid qu’a rĂ©servĂ© la critique de gauche au Jeu de patience. On a montrĂ© le dĂ©veloppement de la recherche appliquĂ©e Ă  son Ɠuvre[168] : les premiers mĂ©moires et thĂšses sont produits aux États-Unis et en Grande Bretagne. En France les Ă©tudes Ă©manent d’abord de tĂ©moins, puis de spĂ©cialistes ; monographies, essais, mĂ©moires, thĂšses se succĂšdent Ă  partir des annĂ©es 1980. Des colloques ont lieu, la SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux produit une revue et organise des journĂ©es d’études, une Ă©quipe de l’universitĂ© Rennes 2 CELLAM se consacre Ă  l’écrivain, et gĂšre un site internet[169]. Un fonds d’archives, Ă  la BibliothĂšque de Saint-Brieuc, est Ă  la disposition des chercheurs[170]. La critique contemporaine, universitaire ou non, tient compte de plus en plus du travail narratologique de Louis Guilloux, des recherches de ton qui lui sont propres : les articles portant sur L’IndĂ©sirable sont rĂ©vĂ©lateurs de cet angle de vue ; les goĂ»ts Ă©voluent, l’esthĂ©tique du rĂ©cit a changĂ©, et le public contemporain a goĂ»tĂ© la briĂšvetĂ© du livre, la structure sans cesse rompue du rĂ©cit, l’aciditĂ© de la satire.

Au total, la critique a insistĂ© sur la force de cette pensĂ©e dialogique, sur les retours littĂ©raires du Sang noir, dans lesquelles s’inscrit L’IndĂ©sirable, sur le fait que la gauche a manquĂ© un grand Ă©crivain[171] — lui-mĂȘme rĂȘvait de voir Cripure[172] sur les barricades. Mais on donne aussi toute sa place Ă  une voix de conteur remarquable, de polĂ©miste, de satiriste, ainsi qu’aux arcanes d’une esthĂ©tique du rĂ©cit.

Distinctions

Fonds d’archives Louis Guilloux des bibliothùques municipales de Saint-Brieuc

DĂšs le mitan de sa carriĂšre littĂ©raire, au moins dĂšs les annĂ©es 1930, Louis Guilloux observe d’un Ɠil circonspect et souvent agacĂ© l'afflux de ses paperasses, semble-t-il aussi envahissantes que nĂ©cessaires, mais dont l’éventuelle postĂ©ritĂ© lui inspire des remarques fatalistes.

L’écrivain, en effet, dĂšs ses premiĂšres Ɠuvres, prenait soin de s’appuyer sur une indispensable et consĂ©quente matiĂšre documentaire de premiĂšre et seconde main, Ă©troitement tissĂ©e avec diffĂ©rents Ă©tats matĂ©riels de textes de diffĂ©rentes natures (chapitres de romans, nouvelles, journal personnel), eux-mĂȘmes susceptibles de se transformer pour glisser d’un projet Ă  l’autre, au grĂ© des impulsions crĂ©atrices et des potentialitĂ©s Ă©ditoriales. À cela s’ajoutait encore une correspondance personnelle volontiers intĂ©grĂ©e Ă  l’Ɠuvre ainsi que des articles de journaux et revues, de rĂ©ception de ses Ɠuvres ou sur des sujets politiques, sociaux, littĂ©raires et divers. Le tout cent fois transformĂ©, dĂ©coupĂ©, reclassĂ© puis retravaillĂ©, sur une multitude de supports.

À la fin de sa carriĂšre littĂ©raire, et comme cela le serait mesurĂ© ultĂ©rieurement, Louis Guilloux avait ainsi gĂ©nĂ©rĂ© plusieurs centaines de milliers de feuillets d’archives, essentiellement rĂ©partis entre les adresses familiales (dont la maison de Saint-Brieuc) et « professionnelles » (Gallimard).

Logiquement, compte tenu de l’importance d’une Ɠuvre unanimement saluĂ©e, la question de la prĂ©servation des archives de Louis Guilloux fit l’objet de questionnements, puis d’une attention particuliĂšre croissante Ă  laquelle prirent part de nombreux acteurs, en Ă©troite collaboration avec RenĂ©e Guilloux, puis avec sa fille Yvonne Guilloux[173]. Outre le travail de l’exĂ©cutrice littĂ©raire Françoise Lambert, le rĂŽle conjoint de la jeune SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux et de la municipalitĂ© de Saint-Brieuc fut essentiel dans l’acquisition par la Ville, en 1981, de la maison de la rue Lavoisier, puis de l’achat de l’essentiel des archives de l’écrivain, alors en possession de la famille (1993). Cette derniĂšre opĂ©ration, d’importance nationale, fut fortement soutenue par le ministĂšre de la Culture, la rĂ©gion Bretagne et le dĂ©partement des CĂŽtes-d’Armor, fut Ă©galement remarquable en ce qu’elle confirmait le maintien Ă  Saint-Brieuc d’un corpus archivistique initialement susceptible d’ĂȘtre intĂ©grĂ© aux collections de la BibliothĂšque nationale.

C’est Ă  la bibliothĂšque municipale de Saint-Brieuc que revint la mission de conservation et de valorisation de ce fonds initial, qui fit d’abord l’objet d’un plan de classement toujours actif, distinguant pour l’essentiel l’Ɠuvre littĂ©raire (publiĂ©e ou inĂ©dite), la correspondance, les papiers personnels, l’iconographie et la bibliothĂšque. Sauf exception, la consultation sur place est ouverte Ă  toute demande justifiĂ©e.

RĂ©guliĂšrement enrichi par des dons et acquisitions ciblĂ©es, le catalogue du fonds d’archives littĂ©raires Louis Guilloux des bibliothĂšques de Saint-Brieuc est accessible en ligne via le portail des mĂ©diathĂšques de la Baie.

Publications

ƒuvres

  • La Maison du peuple, roman, Grasset, coll. « Les Écrits » no 2, 1927
  • Dossier confidentiel, roman, Grasset, coll. « Les Cahiers verts » no 10, 1930
  • Compagnons, Grasset, 1931
  • Souvenirs sur Georges Palante, Saint-Brieuc, O.L. Aubert, 1931 ; rĂ©Ă©dition Calligrammes, 1980, et Éditions Diabase, 2014 (prĂ©face de Yannick Pelletier)
  • HymĂ©nĂ©e, roman, Grasset, 1932
  • Le Lecteur Ă©crit, compilation de courriers de lecteurs du journal L'Intransigeant, Gallimard, coll. « Les Documents bleus », no 50, 1933
  • AngĂ©lina, roman, Grasset, 1934
  • Le Sang noir, roman, Gallimard, 1935
  • Histoire de brigands, rĂ©cits, Éditions sociales internationales, 1936
  • Le Pain des rĂȘves, roman, Gallimard, 1942
  • Le Jeu de patience, roman, Gallimard, 1949
  • Absent de Paris, lettres de voyage, Gallimard, 1952
  • Parpagnacco ou la Conjuration, roman, Gallimard, 1954
  • Les Batailles perdues, roman, Gallimard, 1960
  • Cripure, piĂšce tirĂ©e du Sang noir, Gallimard, coll. « Le Manteau d'Arlequin », 1962
  • La Confrontation, roman, Gallimard, 1968
  • La Bretagne que j'aime, avec Pascal Hindus, photographies, et Charles Le Quintrec, lĂ©gendes, Éditions Sun, 1973
  • Salido, suivi de OK Joe !, 1976, Gallimard[174]
  • Coco perdu. Essai de voix, rĂ©cit, Gallimard, 1978
  • Carnets 1921-1944, Gallimard, 1978

ƒuvres posthumes

  • Grand BĂȘta, conte, Gallimard Jeunesse, coll. « Folio Benjamin », no 54, 1981
  • Carnets 1944-1974, Gallimard, 1982
  • L'Herbe d'oubli, mĂ©moires, texte Ă©tabli et annotĂ© par Françoise Lambert, Gallimard, 1984
  • Labyrinthe, roman, postface d'Yvonne Besson, Gallimard, coll. « L'Imaginaire », no 397, 1999
  • Vingt ans ma belle Ăąge, nouvelles, Gallimard, 1999
  • Chroniques de FlorĂ©al, 1922-1923, recueil d'articles, Ă©dition Ă©tablie par Éric Dussert, Éditions HĂ©ros-Limite, 2018
  • Douze balles montĂ©es en breloque, texte bilingue français-breton (traduction de Maguy Kerisit-LouĂ©doc), postface de Yannick Pelletier, Ă©ditions Goater, 2018
  • L'IndĂ©sirable, roman, avant-propos de Françoise Lambert, Ă©dition, notes et postface d'Olivier Macaux, Gallimard, 2019

Correspondance

Adaptations pour la télévision

  • Compagnons. RĂ©alisation par Jean-Paul Roux, adaptation par Louis Guilloux lui-mĂȘme et Jean-Paul Roux. Ce tĂ©lĂ©film d'une durĂ©e de 1 h 12 a Ă©tĂ© diffusĂ© Ă  la tĂ©lĂ©vision le 5 dĂ©cembre 1967.
  • Le Pain des rĂȘves. RĂ©alisation par Jean-Paul Roux, adaptation par Louis Guilloux lui-mĂȘme et Jean-Paul Roux. Ce tĂ©lĂ©film d'une durĂ©e de 1 h 31 a Ă©tĂ© diffusĂ© Ă  la tĂ©lĂ©vision le 23 janvier 1974.
  • Le Sang noir de Louis Guilloux a Ă©tĂ© adaptĂ© en 2007 pour la tĂ©lĂ©vision, mis en scĂšne par Peter Kassovitz et produit par BFC production (Françoise Castro). Le rĂŽle de Cripure est tenu par Rufus. Le film a Ă©tĂ© tournĂ© en mars et Ă  Lille et Ă  Cambrai par l'Ă©quipe de France 3 Production Lille.

Prix Louis-Guilloux

Le Conseil gĂ©nĂ©ral des CĂŽtes-d'Armor a crĂ©Ă© en 1983 le prix Louis-Guilloux « pour perpĂ©tuer les valeurs littĂ©raires et morales de l'Ă©crivain breton.»[175] Ce prix est dĂ©cernĂ© chaque annĂ©e Ă  une Ɠuvre de langue française ayant une « dimension humaine d'une pensĂ©e gĂ©nĂ©reuse, refusant tout manichĂ©isme, tout sacrifice de l'individu au profit d'abstractions idĂ©ologiques »[176].

Prix Louis Guilloux des Jeunes

Le Prix Louis Guilloux des Jeunes a Ă©tĂ© crĂ©Ă© en 1994 par la SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux. Ayant pour objectifs de faire vivre la mĂ©moire de cet Ă©crivain et d’amener les jeunes gĂ©nĂ©rations Ă  lire son Ɠuvre, ce prix s’adresse aux jeunes de moins de 25 ans. Il est diffusĂ©, en partenariat avec le Rectorat d’AcadĂ©mie et la Direction de l’enseignement catholique, dans tous les collĂšges et lycĂ©es publics et privĂ©s de l’AcadĂ©mie de Rennes. Il est Ă©galement accessible Ă  tous les jeunes qui en feront la demande en France ou Ă  l’étranger. Il est possible de concourir Ă  titre individuel ou dans le cadre d’un groupe, d’une classe


Chaque annĂ©e est choisi un extrait diffĂ©rent de l’Ɠuvre de Louis Guilloux dont les participants sont appelĂ©s Ă  s’inspirer trĂšs librement pour Ă©crire un texte de forme libre (rĂ©cit, lettre, correspondance, portrait, journal intime, carnet de bord
) ou, depuis 2016, rĂ©agir sur un mode personnel en combinant par exemple poĂšme, dessin, rĂ©Ă©criture. Le Prix est dotĂ© par la Ville de Saint-Brieuc, le dĂ©partement des CĂŽtes d’Armor, la rĂ©gion Bretagne et la SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux.

GrĂące au relais acadĂ©miques de diffusion, Ă©lĂšves et professeurs sont sensibilisĂ©s Ă  l’Ɠuvre de Louis Guilloux et Ă©ventuellement accompagnĂ©s dans leur travail par une visite de la maison et du bureau de Louis Guilloux.

Chaque annĂ©e, parmi plus de 200 concurrents, sont rĂ©compensĂ©s des laurĂ©ats de qualitĂ© reçus Ă  la Maison Louis Guilloux 13 rue Lavoisier Ă  Saint-Brieuc le premier ou second samedi de juin. Les nouvelles primĂ©es sont Ă©ditĂ©es. Certains laurĂ©ats, grĂące Ă  ce Prix, ont pris goĂ»t Ă  l’écriture et deviennent des passionnĂ©s de Louis Guilloux.

Ce Prix des Jeunes a pris place dans le paysage culturel de la RĂ©gion et est relayĂ© dans la Presse. Ne s’adressant pas Ă  des Ă©crivains, ce prix a le mĂ©rite d’encourager Ă  la fois Ă  la lecture et Ă  l’écriture littĂ©raire par l’entremise d’un grand Ă©crivain attachĂ© Ă  sa ville, sa rĂ©gion et reconnu bien au-delĂ  de son pays. Les meilleures nouvelles sont publiĂ©es depuis le dĂ©but du Prix et disponibles, Ă  la demande, Ă  la sociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux.

Lieux

Le nom de Louis Guilloux a notamment été donné à une place de la ville de Saint-Brieuc, à une rue de la ville de Rennes[177], de Nantes et d'Eysines prÚs de Bordeaux en Gironde.

Il a notamment Ă©tĂ© donnĂ© Ă  un lycĂ©e professionnel Ă  Rennes mais Ă©galement Ă  un collĂšge Ă  Montfort-sur-Meu ainsi qu'Ă  une association Ă  but non lucratif, le RĂ©seau Louis-Guilloux, qui promeut la SantĂ© comme dĂ©finie par l'Organisation mondiale de la SantĂ©, Ă  destination d’une population majoritairement prĂ©caire et de toutes origines.

Notes et références

  1. Henri Godard, Une grande génération : Céline, Malraux, Guilloux, Giono, Montherlant, Malaquais, Sartre, Queneau, Simon, Paris, Gallimard, coll. « BLANCHE », , 456 p. (ISBN 978-2-070-73315-6)
  2. Albert Camus, Préface à La Maison du peuple et Compagnons, Paris, Grasset, 1953.
  3. Michel Raimond, La crise du roman : des lendemains du naturalisme aux années vingt, Paris, José Corti, (1re éd. 1966), 539 p. (ISBN 978-2-714-30108-6)
  4. Henri Godard, Louis Guilloux : romancier de la condition humaine : essai, Paris, Gallimard, , 421 p. (ISBN 978-2-070-75647-6)
  5. SituĂ©e au 12 rue Lavoisier Ă  Saint-Brieuc, la Maison Louis Guilloux, propriĂ©tĂ© de la Ville, accueille depuis 1993 le public autour de diverses formes de rencontres avec la littĂ©rature contemporaine, les arts visuels et la visite du bureau de l’auteur au dernier Ă©tage. Le bureau de Louis Guilloux est demeurĂ© tel que l’auteur l’avait amĂ©nagĂ©.La Maison Louis Guilloux a par ailleurs reçu en 2011 le label « Maison des Illustres ». Ce label signale des lieux dont la vocation est de conserver et transmettre la mĂ©moire de femmes et d'hommes qui se sont illustrĂ©s dans l'histoire politique, sociale et culturelle de la France.Se reporter Ă  « La Maison Louis Guilloux », Site Officiel - Ville de Saint-Brieuc
  6. http://maitron.fr/spip.php?article138798, notice GUILLOUX Louis, Marie par Alain Prigent, François Prigent, version mise en ligne le 12 novembre 2011, derniÚre modification le 7 janvier 2018.
  7. Sylvie Golvet 2010, p. 43-45
  8. Louis Guilloux et Françoise Lambert, L'herbe d'oubli : récit, Paris, Gallimard, , 419 p. (ISBN 978-2-070-70124-7), p. 228
  9. Cité par Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, Collection Interférences, 2010, p. 45.
  10. Voir Valérie Poussard-Fournaison, La description selon Louis Guilloux : réalisme et tragédie, Paris, L'Harmattan, coll. « Espaces littéraires », , 255 p. (ISBN 978-2-343-14530-3)
  11. Sylvie Golvet, Louis Guilloux : devenir romancier, Rennes, France, Presses universitaires de Rennes, coll. « Interférences » (no 2), , 307 p. (ISBN 978-2-753-51105-7, lire en ligne)
  12. Confrontation no 19, “Correspondance Louis Guilloux-Georges, Emilienne et Lucie Robert -1920-1970 », Ă©dition Ă©tablie par Pierre- Yves Kerloc’h, Saint-Brieuc, SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux, septembre 2006.
  13. Lettre à Jean Grenier de janvier 1921, citée par Sylvie Golvet 2010, p. 45
  14. Voir Louis Guilloux, Un écrivain dans la presse, sous la direction de Jean-Baptiste LEGAVRE et MichÚle TOURET, Rennes, PUR, collection « Interférences », 2014.
  15. Une partie d’entre eux a Ă©tĂ© rĂ©unie dans le recueil posthume Vingt ans ma belle Ăąge (Gallimard, 1999).
  16. Yves Loisel, Louis Guilloux (1899-1980) : biographie, Spézet, Coop Breizh, , 286 p. (ISBN 978-2-843-46004-3), p. 61
  17. Louis Guilloux, Chroniques de FlorĂ©al, 1922-1923, Ă©dition Ă©tablie et prĂ©sentĂ©e par Éric Dussert, GenĂšve, HĂ©ros-Limite, 2018, p. 8.
  18. Valérie Poussard-Fournaison, « Louis Guilloux, critique de cinéma ? » dans Louis Guilloux, un écrivain dans la presse, p. 73-88.
  19. Sur les soixante-neuf textes publiĂ©s par Louis Guilloux dans cette revue, Éric Dussert a retenu quarante-neuf chroniques pour l’édition des Chroniques de FlorĂ©al qu’il a Ă©tablie et publiĂ©e aux Éditions HĂ©ros-Limite en 2018.
  20. Cité par Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, Collection Interférences, 2010, p. 49.
  21. L’IndĂ©sirable, avant-propos de Françoise Lambert, Ă©dition, notes et postface d'Olivier Macaux, Gallimard, 2019.
  22. L’IndĂ©sirable, avant-propos de Françoise Lambert, Ă©dition, notes et postface d'Olivier Macaux, Gallimard, 2019, p. 150.
  23. Yves Loisel, Louis Guilloux, Biographie, Spézet, Coop Breizh, 2000, p. 72.
  24. Comme en tĂ©moigne notamment l’hommage rendu par Mona Ozouf dans Composition française.
  25. Sylvie Golvet, op. cit., p. 105.
  26. RenĂ©e Guilloux est mentionnĂ©e aux cĂŽtĂ©s de son Ă©poux pour la traduction de L’Idiot de la famille de Margaret Kennedy (Plon, 1929), mais elle a signĂ© ou apportĂ© sa collaboration Ă  d’autres traductions (notamment La Vie de Robert Browning de G.K. Chesterton ou La Nymphe au cƓur fidĂšle de Margaret Kennedy) oĂč son nom n’apparaĂźt pas (cf. Sylvie Golvet, op. cit., p. 103-104).
  27. Louis Guilloux, Carnets, 1921-1944, Gallimard, 1978, p. 39.
  28. Yves Loisel, op. cit., p. 81.
  29. Entretien avec Patrice Galbeau, France Culture, La Vie entre les lignes, 1977, 1er entretien, cité par Sylvie Golvet, op.cit., p. 25.
  30. Le personnage du docteur RĂ©bal s’inspire du docteur Boyer qui avait menĂ© une coalition rĂ©unissant bourgeois progressistes et militants ouvriers (dont le pĂšre de Guilloux) lors des Ă©lections municipales de 1908 Ă  Saint-Brieuc.
  31. Sylvie Golvet, op. cit., p. 81-92.
  32. Louis Guilloux a reconnu d’ailleurs par la suite qu’il s’agissait, avec ce rĂ©cit d’enfance, d’« une Ă©criture trĂšs naĂŻve » (citĂ© par Sylvie Golvet, op. cit., n. 16, p. 31).
  33. Yves Loisel, Louis Guilloux, biographie, 1998, Éditions Coop Breizh, p. 88.
  34. Peu aprĂšs la mort de Louis Guilloux, la maison est acquise par la ville de Saint-Brieuc qui, en accord avec la famille, souhaite qu'elle reste dans le patrimoine briochin. Cette maison, devenue aujourd'hui « Maison Louis Guilloux », est animĂ©e par la SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux qui y organise des ateliers, des expositions et des confĂ©rences et qui, en liaison avec la bibliothĂšque municipale, y accueille en rĂ©sidence des auteurs et des chercheurs, tout en proposant Ă©galement des visites du bureau de l'Ă©crivain. En 2012, le ministre de la Culture FrĂ©dĂ©ric Mitterrand, dĂ©cide de dĂ©cerner Ă  cette maison le label « Maisons des Illustres ». Ce label signale des lieux dont la vocation est de conserver et transmettre la mĂ©moire de femmes et d'hommes qui se sont illustrĂ©s dans l'histoire politique, sociale et culturelle de la France. Il reprĂ©sente une reconnaissance officielle de l'intĂ©rĂȘt patrimonial de la Maison. (Source : ministĂšre de la Culture)
  35. Ibid., p. 90.
  36. Ce que confirme Mary Jane Matthews Green dans Louis Guilloux, an Artisan of Language, York, South Carolina : French Litterature Publications Company, 1980.
  37. Louis Guilloux, Dossier confidentiel, Grasset, coll. Les Cahiers Rouges, p. 242.
  38. Edmond Lambert demande clairement qu’il n’y ait « ni morale, ni dĂ©monstration » tandis que qu’Henri Petit le prie de « renoncer une bonne fois Ă  toute idĂ©ologie », in Sylvie Golvet, op. cit., p. 134-135.
  39. Sylvie Golvet, op. cit., p. 123.
  40. Kamel Daoud explique ainsi son point de vue : « (
) chez Camus, l’inexplicable est une sorte de vision du monde qui mĂšne Ă  l’éthique et pas au nihilisme commode. Je n’aime pas le mot « absurde » qu’on utilise souvent et qui sous-entend qu’il existe un au-delĂ  ou un au-deçà qui ne le sont pas. Je crois que le mot inexplicable convient mieux – il est la source de l’écrivain philosophe, du HĂ©ros moderne.» (Entretien avec Kamel Daoud, Le Figaro, 2 janvier 2020).
  41. Louis Guilloux, Dossier confidentiel, Grasset, coll. Les Cahiers Rouges, p. 44.
  42. Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, Gallimard, 1978, p. 101.
  43. Pierre Lemaitre exprime trĂšs clairement son admiration : « C’est bref, mais si puissant Ă©motionnellement que Camus mettait quiconque au dĂ©fi de terminer ce rĂ©cit sans avoir les larmes aux yeux. J’y retrouve Ă  chaque lecture l’économie de moyens, la sobre efficacitĂ©, l’imparable justesse de l’un des Ă©crivains les plus importants de son siĂšcle. » (« Conversation avec Pierre LemaĂźtre », Zadig, no 3, septembre 2019, p. 31)
  44. Ibid., p. 93.
  45. Jean-Louis Jacob, Louis Guilloux romancier du peuple, Éditions du Noroüt, 1983, p. 8.
  46. LĂ©on Lemonnier, Manifeste du roman populiste, Éditions J. Bernard, La Centaine, Paris, 1929, p. 73.
  47. Sylvie Golvet, Compagnons de Louis Guilloux en classe, CRDP de Bretagne, Rennes, 2007, p. 89.
  48. Dans un article de 1930, Louis Guilloux marque clairement son dĂ©saccord avec l’école populiste : « Le mouvement « populiste », selon le manifeste de ses inventeurs, s'annonçait surtout comme un mouvement de rĂ©action contre une littĂ©rature bourgeoise qui n'avait Ă  nous proposer que des « peintures d'oisifs ». (
) Mais le populisme n'Ă©tait qu'une affaire de boutique. On restait entre soi, gens de lettres. Il n'Ă©tait qu'une forme dĂ©guisĂ©e de cette littĂ©rature bourgeoise contre laquelle il prĂ©tendait rĂ©agir, et dans tous les cas, il ne pouvait donner naissance qu'Ă  une littĂ©rature d'intermĂ©diaires, nĂ©cessairement sans force. » (Louis Guilloux, « Compte-rendu de Nouvel Ăąge littĂ©raire d’Henry Poulaille », Europe, novembre 1930, p. 411-412)
  49. Cité par Yves Loisel, op.cit., p. 97.
  50. Sylvie Golvet, « L’art romanesque de Louis Guilloux et le tournant des annĂ©es 1930 » dans L’Atelier de Louis Guilloux, Presses Universitaires de Rennes, 2012, p. 108-109.
  51. Jean-Charles Ambroise explique que « (
) c’est d’ailleurs la logique mĂȘme du champ littĂ©raire qui impose progressivement Ă  Guilloux de rompre avec la revendication d'une appartenance de classe qui lui fait aussi courir le risque d'une fossilisation de son image : l'auteur briochin peut-il durablement rester cet Ă©crivain (
) vouĂ© Ă  l'Ă©vocation de ses propres racines provinciales et populaires ? » (« Une trajectoire politique », Louis Guilloux, Ă©crivain, sous la direction de Francine Dugast-Portes et Marc Gontard, Rennes, PUR, 2000, p. 56).
  52. Louis Guilloux, « Compte-rendu de Nouvel Ăąge littĂ©raire d’Henry Poulaille, Europe, novembre 1930, p. 413.»
  53. Sylvie Golvet, op. cit., p. 169.
  54. Louis Guilloux, L’IndĂ©sirable, publication posthume, Ă©dition, notes et postface d’Olivier Macaux, Gallimard, coll. Blanche, 2019.
  55. Sylvie Golvet, Louis Guilloux. Devenir romancier, 2010 PUR, p. 282.
  56. Sylvie Golvet, Louis Guilloux. Devenir romancier, op. cit. p. 282.
  57. Dominique Rabaté, « Construction narrative et dramatique dans Le Sang noir », in Francine Dugast-Portes et Marc Gontard, (dir), Louis Guilloux, écrivain, PUR, 2000, p. 197-210.
  58. Henri Godard, Louis Guilloux, romancier de la condition humaine, 1999, Gallimard, p. 50.
  59. Voir ValĂ©rie Poussard-Fournaison, La description selon Louis Guilloux. RĂ©alisme et tragĂ©die, L’Harmattan, 2018, p. 192-195.
  60. Louis Guilloux, « Notes sur le roman », publié en janvier 36 dans Europe, réédité dans Europe no 839, mars 1999
  61. Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, p. 283.
  62. Voir Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, p. 284, EugĂšne Dabit, « À Louis Guilloux », Commune, janvier 1936, p. 545-547 (texte lu le 12 dĂ©cembre 1935).
  63. Louis Aragon, « Le Sang noir par Louis Guilloux », Commune no 27, nov.1935, p. 352-356, « Défense du roman français », Commune no 29, janvier 1936, p. 562-568.
  64. André Malraux, « Le sens de la mort », publié dans Marianne, 20 novembre 1935, devient la préface du roman en 1955, repris dans le numéro 11-12 de la revue Plein Chant (dir. Yannick Pelletier), Bassac, 1982.
  65. Jorge Semprun, Adieu, vive clarté, Gallimard, 1998, coll. Folio 2000, p. 128.
  66. Jeanyves GuĂ©rin, « La double rĂ©ception de Cripure. ThĂ©Ăątre et politique dans les annĂ©es 1960-70 », Jean-Baptiste Legavre (dir.), Louis Guilloux dans les mĂ©dias. Les rĂ©ceptions de l’Ɠuvre, Rennes, PUR, 2019, p. 177-188.
  67. AndrĂ© Malraux a adhĂ©rĂ© Ă  l’AEAR en dĂ©cembre 1932 et Guilloux l’annĂ©e suivante (voir Jean-Charles Ambroise, « Louis Guilloux et les annĂ©es trente : un auteur dĂ©calĂ© ? », Louis Guilloux, homme de parole, Ville de Saint-Brieuc, 1999, p. 47).
  68. Christian Bougeard, « Louis Guilloux et le congrÚs des écrivains antifascistes de Paris (1935) », Louis Guilloux, Colloque de Cerisy, dir. Jean-Louis Jacob, Quimper, Calligrammes, 1986, p. 190.
  69. Dans une interview accordĂ©e Ă  l’historien Jean-Pierre Rioux en 1978, Guilloux est revenu sur les raisons de sa participation en tant que secrĂ©taire : « C’est Malraux qui m’avait demandĂ© de venir lĂ . C’était presque un devoir. C’était un devoir, quoi ! Au travail de secrĂ©tariat, il fallait quelqu’un, on m’avait demandĂ© (
) oui, [c’était] une grosse prĂ©sence, un gros travail de coordination des arrivĂ©es, des Ă©changes, je ne me souviens plus au juste, harassant quoi ? », CitĂ© par Christian Bougeard, ibid., p. 189.
  70. Ibid., p. 190-191.
  71. « Quand il [Boris Pasternak] est apparu, trÚs beau, l'ange est arrivé, oui ! La salle se lÚve, je n'ai jamais entendu une ovation aussi prolongée, aussi enthousiaste aussi spontanée. » (Cité par Christian Bougeard, Ibid., p. 189-190.
  72. Ibid.
  73. Le congrĂšs de Madrid est interrompu par la guerre civile et se termine quelques jours plus tard, les 16 et 17 juillet, Ă  Paris. Voir Christian Bougeard, « le parcours et les engagements de Louis Guilloux dans les enjeux de son temps (1930–1950) », Louis Guilloux, Ă©crivain, sous la direction de Francine Dugast-Portes et Marc Gontard, Rennes, PUR, 2000, p. 41.
  74. Christian Bougeard, « Louis Guilloux, un écrivain en son siÚcle », dix-neuf vingt, revue de littérature moderne, no 4/octobre 1997, p. 133-160.
  75. Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, Gallimard, 1978, p. 125. Participation confirmĂ©e comme l’atteste cette remarque : « Lettre de Gide Ă  Malraux, qui me la transmet : « Cher ami. Une excellente dĂ©pĂȘche de Guilloux me fait part de sa joie. Il accepte avec enthousiasme. » (Carnets 1921-1944, op. cit., p. 126)
  76. En tĂ©moigne cette lettre de Gide : « Mon cher Guilloux (
) l’on trouv(e) prĂ©fĂ©rable, Ă  Moscou, que nous n’arrivions pas tous ensemble. »
  77. Guilloux livre simplement ce rĂ©sumĂ© dans les Carnets : « juin-juillet. Voyage en URSS. Parti de Londres Ă  bord du Cooperatzia, bateau soviĂ©tique. Voyage de cinq jours jusqu’à Leningrad, oĂč nous retrouvons Gide. (
) AprĂšs Leningrad, Moscou oĂč Gide n’a pas Ă©tĂ© reçu par Staline. De Moscou Ă  Tiflis. TraversĂ©e du Caucase en voiture. À Tiflis, oĂč nous sommes restĂ©s une huitaine de jours, Schiffrin et moi avons quittĂ© nos compagnons et sommes rentrĂ©s Ă  Paris en chemin de fer, via Moscou, Berlin et la Belgique. Comme toujours en voyage, je n’ai pas Ă©crit une seule note, mais je me souviendrai. » (Carnets 1921-1944, op. cit., p. 131) Il supprimera mĂȘme des passages de l’édition des Carnets (T1) publiĂ©e en 1978. GrĂ©goire LemĂ©nager compare le texte tronquĂ© de l’entretien sur Gide avec Aragon paru dans Les Carnets avec le texte original conservĂ© dans le Fonds Louis Guilloux, « Guilloux, critique littĂ©raire ? » dans Louis Guilloux un Ă©crivain dans la presse, sous la direction de J.B. Legavre et M. Touret, Rennes, PUR, 2014, p. 167-180.
  78. « Les bords de la Neva, Ă  Leningrad, la visite au camp des pionniers ; dans les rues de la ville, prĂ©paration d’un dĂ©filĂ© ; cet aspect de « rĂ©volution permanente » de Moscou, « le dĂ©filĂ© sur la place Rouge, ces milliers d’hommes et de femmes (
) c’était grisant et terrible Ă  la fois (
) le mausolĂ©e. LĂ©nine, son visage, ses mains
 Heureux, je le suis nĂ©anmoins. Reconnaissant Ă  Gide. Car j’aurai enfin une image de l’URSS. » EugĂšne Dabit, Journal intime (1928-1936), Gallimard, 1939.
  79. « Nous avons dĂźnĂ© en compagnie de trois Ă©crivains gĂ©orgiens
 Nous sommes rentrĂ©s Ă  Tiflis un peu ivres. DĂ©sireux de voir et d’approcher des femmes. Mais rien. »
  80. Pierre Herbart, En URSS 1936, Gallimard, 1937.
  81. Cité par Bouadchidzé, Retour en URSS avec André Gide, Hermann 2005, p. 83.
  82. Cité par Bouadchidzé, op. cit., p. 139.
  83. AndrĂ© Gide, Le retour de l’Urss et Retouches, Cahiers AndrĂ© Gide, volume V, Gallimard 1974.
  84. Louis Aragon occupe une place centrale dans la gauche intellectuelle française de cette pĂ©riode : en tant que membre influent du PCF, il est agrĂ©Ă© auprĂšs de l’URSS, prĂ©sent dans la prĂ©paration du voyage, prĂ©sent Ă©galement Ă  Moscou aux obsĂšques de Maxime Gorki et chargĂ© au PĂšre Lachaise de prononcer un discours aux obsĂšques de Dabit.
  85. Marie-Noël Rio, « Inventer un journal de combat », sur Le Monde diplomatique,
  86. Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 140.
  87. « Ce que Bloch avait Ă  me dire, c’est qu’il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© que je ne ferai plus partie du journal. » (Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 153).
  88. « septembre 1936 - AprĂšs le dĂźner, chez Gide – qui nous lit son livre sur l’URSS. C’est un revirement total, brutal, inattendu. Un beau scandale en perspective ; il voudrait rendre tous ses compagnons de voyage solidaires de ses vues, il y a une phrase trĂšs nette dans ce sens que je lui demande de supprimer, ce Ă  quoi il consent. » (Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 133)
  89. « Gide. Un reproche qu’on pourrait lui faire, c’est de n’avoir pas quittĂ© l’URSS dĂšs qu’il s’est rendu compte qu’il n’était pas d’accord. Pourquoi n’avoir pas « rompu » aprĂšs sa visite manquĂ©e Ă  Staline ? Pourquoi a-t-il acceptĂ© les cadeaux jusqu’à la fin ? (
) Je commence Ă  croire qu’il n’est venu en URSS que pour y chercher l’autoritĂ© dont il avait besoin pour dire ce qu’il dit aujourd’hui. » (Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 149)
  90. C’est en privĂ© que Louis Guilloux en dira plus, et sur Gide et sur L’URSS : pour cela, il faut lire en particulier La Citoyenne, le livre autobiographique de FrĂ©dĂ©rique HĂ©brard, la fille d'AndrĂ© Chamson chez qui Louis Guilloux Ă©tait frĂ©quemment reçu, Ă  Versailles. L’ouvrage raconte comment Guilloux savait se moquer de Gide poursuivi par le GuĂ©pĂ©ou : « Comme l’autre jour quand Louis Guilloux a imitĂ© monsieur Gide : il l’imite trĂšs bien, il chuinte et il me semble, en l’entendant chuinter, voir monsieur Gide lui-mĂȘme avec sa cape Ă  carreaux. Alors il l’imitait et il disait : « Semons la guĂ© ! » J’ai ri avec tout le monde parce qu’il Ă©tait vraiment rigolo mais j’ai demandĂ©, parce que je ne veux pas mourir idiote : - Qu’est-ce que « la guĂ© » ? Ils riaient toujours, Henri Petit a eu pitiĂ© de moi et m’a dit que c’était la GuĂ©pĂ©ou et que monsieur Gide quand il Ă©tait en Russie, tous les matins, il disait Ă  Louis Guilloux : « « Semons la guĂ© ! » et que des fois ils y arrivaient. » (FrĂ©dĂ©rique HĂ©brard, La Citoyenne, J’ai Lu, 2003, p. 94)
  91. Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p 103.
  92. Louis Guilloux, Les Batailles perdues, Gallimard, 1960, p. 244.
  93. Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 116.
  94. De nombreuses pages des Carnets se font l’écho Ă  la fois de l’écoute de la situation en Espagne alors que la guerre est effective depuis le 17 juillet 1936 et de l’action Ă  Saint-Brieuc. Pour 1937 : les bombardements des avions nationalistes espagnols sur Barcelone (p. 207-8) et Ă  Saint-Brieuc les dĂ©marches Ă  la prĂ©fecture pour amĂ©liorer le sort des rĂ©fugiĂ©s, la Bataille de Teruel (p. 212) et, Ă  Saint-Brieuc la rencontre de l’abbĂ© VallĂ©e, pour 1939 la situation Ă  Madrid (p. 229) et l’évasion de Salido dans la nuit du 3 au 4 avril 1939 la veille du dĂ©part du contingent pour le Camp du Vernet (p. 233). À chaque fois le local et l’international et l’attention aux plus faibles : « A ma connaissance, cinq enfants en bas Ăąge sont morts dans le dĂ©partement depuis l’arrivĂ©e des rĂ©fugiĂ©s de catalogne. Tous sont morts de broncho-pneumonie, c’est-Ă -dire de froid. » (p. 234)
  95. Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit. , p. 156.
  96. Louis Guilloux, Le Jeu de patience, Gallimard, 1949, p. 24.
  97. Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, Gallimard, 1978, p. 247.
  98. Ibid., p. 248.
  99. Ibid., p. 247-249.
  100. Ibid., p. 268.
  101. Francine Dugast-Portes, « Louis Guilloux et la presse pendant La Seconde Guerre mondiale : réflexions sur sa position dans le champ littéraire », Louis Guilloux. Un écrivain dans la presse, s. d. de Jean-Baptiste Legavre et MichÚle Touret, Rennes, PUR, 2014, p. 125-147.
  102. GisĂšle Sapiro, La guerre des Ă©crivains, 1940–1953, Fayard, 1999, p. 366.
  103. Herbert R. Lottman, La Rive Gauche, Seuil, 1981, p. 199.
  104. Pascal Ory et Jean-François Sirinelli, Les intellectuels en France, de l’affaire Dreyfus à nos jours, Armand Colin, 2002, p. 136.
  105. Guilloux publie deux textes dans Coemedia : « ‘’Autour du feu’’ Pot-pourri » le 10 janvier 1942 et « Tante blanche » le 13 fĂ©vrier 1942.
  106. Arnaud Flici, Jean-Baptiste Legavre : « La tentation autonomiste dans l’Ɠuvre de Louis Guilloux », Louis Guilloux politique, s. d. de Jean-Baptiste Legavre, Rennes, PUR, 2016, p. 163-192.
  107. TĂ©moignage de HĂ©lĂšne Le Chevalier dans Confrontations, no 1, novembre 1994, p. 8-10.
  108. Louis Guilloux, Carnets 1921-1944,op. cit., p. 283-284.
  109. Louis Guilloux, Le jeu de patience, Gallimard, 1949, p. 405.
  110. Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 349-356.
  111. Jean Ancelin, Histoire de la RĂ©sistance dans les CĂŽtes-du-Nord, DES non publiĂ©, 1946. L’auteur a recueilli les tĂ©moignages de Louis Guilloux et de Pierre Petit.
  112. Louis Guilloux, O.K., Joe ! Le dossier d’une Ɠuvre, Édition prĂ©sentĂ©e par MichĂšle Touret et Sylvie Golvet, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2016, p. 142-145. Voir aussi la prĂ©face de Christian Bougeard et l’introduction de MichĂšle Touret.
  113. Alice Kaplan, L'InterprĂšte, Gallimard, 2007
  114. Gallimard a publié Le Jeu de patience en 1949. Cette premiÚre édition a fait l'objet d'une réédition en deux volumes en 1981. Aucune édition en livre de poche à ce jour.
  115. Anne Roche « Parpagnacco ou le sourire du chat » (Louis Guilloux, écrivain, dir. Francine Dugast, Marc Gontard, 1999, Presses universitaires de Rennes, p. 211-221).
  116. Yves Loisel, Louis Guilloux, biographie, 1998, Éditions Coop Breizh, p. 221.
  117. Sur le labyrinthe chez Guilloux, voir ValĂ©rie Poussard-Fournaison, La Description selon Louis Guilloux. RĂ©alisme et tragĂ©die, L’Harmattan 2018
  118. Editions Grasset & Fasquelle, 1953, 9782246129967
  119. Yves Loisel, Louis Guilloux. Biographie. Coop Breizh, 1998
  120. Voir Henri Godard, Louis Guilloux, romancier de la condition humaine, Gallimard, 1999)
  121. cité par Yves Loisel, louis Guilloux, biographie, Coop Breizh, 1998, p. 232
  122. ThÚse de doctorat en lettres, Université paris III Sorbonne nouvelle, 2015, p. 284-291
  123. Ibid.
  124. voir Alexandra Vasic : « Les usages de la presse dans Les Batailles perdues » in Louis Guilloux, un écrivain dans la presse / sous la direction de Jean-Baptiste Legavre, MichÚle Touret, Presses universitaires de Rennes
  125. La Confrontation, Paris, Gallimard, p. 58
  126. Alexandra Vasic, « Un auteur à contre-courant ? Louis Guilloux au temps du Nouveau Roman » in Louis Guilloux dans les médias, dir. Jean-Baptiste Legavre, Presses universitaires de Rennes, 2019, p. 201
  127. voir Alexandra Vasic « Un auteur à contre-courant ? Louis Guilloux au temps du Nouveau Roman » in Louis Guilloux dans les médias, dir. Jean-Baptiste Legavre, Presses universitaires de Rennes, 2019, p. 203.
  128. voir Alexandra Vasic « Salido, Louis Guilloux et le parti : rendre compte ou régler ses comptes ? Une condamnation en sourdine », Louis Guilloux politique, dir. Jean-Baptiste Legavre et MichÚle Touret, p. 143-161, op. cit.
  129. voir ValĂ©rie Fournaison-Poussard « ConsĂ©crations d’une voix singuliĂšre, Coco perdu dans la presse », in Louis Guilloux dans les mĂ©dias, op. cit. , PUR, 2019.
  130. En 1972, Louis Guilloux signe pour la tĂ©lĂ©vision l'adaptation des Thibault de Roger Martin du Gard, et en 1973 celle de trois rĂ©cits de Joseph Conrad, La Ligne d'ombre, La Folie Almayer et Freya des Sept-Îles (cf. Louis Guilloux sur IMDB).
  131. Sabrina Parent, « Épuisement et Ă©vĂ©nement dans Coco perdu, essai de voix », in L’Atelier de Louis Guilloux, dir. Madeleine FrĂ©dĂ©ric et MichĂšle Touret, Presses universitaires de Rennes, 2012, p. 181-195
  132. Ibid., p. 192
  133. Yves Loisel, Louis Guilloux, biographie, p. 216
  134. cité par Yves Loisel
  135. Yves Loisel p. 216-217
  136. voir Yves Loisel, p. 255
  137. pour une Ă©tude des Carnets, voir Pierre-Jean Dufief « Dit et non-dit dans les Carnets de Louis Guilloux », L’Atelier de Louis Guilloux, (dir. Madeleine FrĂ©dĂ©ric et MichĂšle Touret), PUR, 2012, p. 41-52
  138. Yves Loisel, p. 259
  139. Yannick Pelletier, « Louis Guilloux et les Bleus » ; Les Bleus de Bretagne (Colloque présidé par Michel Vovelle), ed. Fédération CÎtes-du-Nord, 1989, Saint-Brieuc 1991.
  140. Éd. Sun, 1973 ; rĂ©Ă©ditions sous le titre Ma Bretagne, ed. Folle Avoine, 1993 et 1998.
  141. Yannick Pelletier, « Un Palante peut en cacher un autre » ; Confrontations, (Bulletin de la Société des amis de Louis Guilloux), 2010.
  142. Éd. ChĂȘne, 1977 ; rĂ©Ă©dition 1984.
  143. Il existe par ailleurs des traductions de Louis Guilloux en breton : La Maison du peuple, Ti ar Bobl, ed. An Here, 1999 et Douze balles montĂ©es en breloque, Daouzed boled aet d’ober ur stribilhon, ed. Goater, 2018.
  144. Yannick Pelletier, « Louis Guilloux et le mal celtique » , Louis Guilloux écrivain (Colloque dirigé par Francine Dugast-Portes et Marc Gontard) ; Presses universitaires de Rennes, 2000.
  145. Albert Camus, Louis Guilloux, Correspondance (1945-1959), Édition d'Agnùs Spiquel-Courdille , Gallimard, 2013 (ISBN 9782070139262).
  146. André Malraux, Lettres Choisies 1920-1976 présentées par François de Saint-Cheron, coll. « Blanche », Gallimard, 2012 (ISBN 9782070135943).
  147. Jean GuĂ©henno et Louis Guilloux, Correspondance Guilloux-GuĂ©henno (1927-1967) - Les paradoxes d’une amitiĂ©, Ă©dition Ă©tablie par Pierre-Yves Kerloc'h, La Part commune, 2010 (ISBN 978-2-84418-154-1).
  148. Correspondance Jean Paulhan - Louis Guilloux (1929-1962), Ă©dition Ă©tablie par Pierre-Yves Kerloc'h, Éditions CNRS, 2010.
  149. Correspondance Louis Guilloux, Georges, Emilienne et Lucie Robert (1920-1970), édition établie par Pierre-Yves Kerloc'h, Spécial Confrontations (no 19), Société des Amis de Louis Guilloux, 2006.
  150. Toby Garfit, Jean Grenier, un Ă©crivain et un maĂźtre, La Part commune, 2010 (ISBN 2844181708 et 9782844181701).
  151. Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, Presses universitaires de Rennes.
  152. Pierre-Yves Kerloc’h et Yves PriĂ©, « Georges Palante - Louis Guilloux - L’amitiĂ© - la fĂȘlure (1917-1921) », Cahiers Louis Guilloux, vol. 2., Ă©ditions Folle Avoine, 2008.
  153. Frédérique Hébrard La Citoyenne, Flammarion, 1985 (ISBN 208064601X et 9782080646019).
    Frédéric Hébrard est la fille d'André Chamson.
  154. Voir Sylvie Golvet, mémoire de DEA, Louis Guilloux dans la vie littéraire de son siÚcle, 1. Recueil de textes et articles. 2. Présence dans les périodiques, sous la direction de MichÚle Touret, Université Rennes 2, année 2001-2002.
  155. Jean-Baptiste Legavre, « Mourir dans la presse. Les nĂ©crologies de Louis Guilloux », in Louis Guilloux dans les mĂ©dias. Les rĂ©ceptions de l’Ɠuvre, Jean-Baptiste Legavre dir., avec le concours de MichĂšle Touret, Rennes, PUR, 2019.
  156. Sylvie Golvet, Louis Guilloux : devenir romancier, Rennes, PUR, 2010.
  157. Op. cit.
  158. Arnaud Flici, « Louis Guilloux en portrait. Mise en scĂšne et re-mise en scĂšne iconographique dans la presse (1927-1980) » », in Louis Guilloux dans les mĂ©dias, les rĂ©ceptions de l’Ɠuvre, op. cit.
  159. RĂ©my Rieffel, « L’art du clair-obscur. Les entretiens de Louis Guilloux Ă  la radio et Ă  la tĂ©lĂ©vision », ibid.
  160. Voir Jeanyves GuĂ©rin, « La double rĂ©ception de Cripure, thĂ©Ăątre et politique dans les annĂ©es 1960-1970 », ibid. et Adeline Wrona, « Le dĂ©fi de l’actualisation. Du Sang noir Ă  Cripure, ibid.
  161. Voir les recherches d’Henri Godard, Yannick Pelletier.
  162. Voir Rachel Mazuy, « Une histoire à méandres. Louis Guilloux et la presse communiste », in Louis Guilloux dans les médias, op. cit.
  163. Voir les relevés effectués par Sylvie Golvet.
  164. Voir dans Louis Guilloux dans les médias les analyses de Grégoire Leménager pour Le Nouvel Observateur, AgnÚs Spiquel pour la Nouvelle Revue française, Bruno Curatolo pour Esprit et Europe.
  165. Jean-Charles Ambroise, « Un peuple de papiers. Le monde populaire de Louis Guilloux vu par la presse », ibid.
  166. Voir ValĂ©rie Poussard-Fournaison, « Coco perdu dans la presse, consĂ©crations d’une voix singuliĂšre », ibid. et de la mĂȘme La Description selon Louis Guilloux, rĂ©alisme et tragĂ©die, Paris, L’Harmattan, 2018.
  167. Alexandra Vasic, « Un auteur à contre-courant ? Louis Guilloux au temps du Nouveau Roman » in Louis Guilloux dans les médias, op. cit.
  168. MichÚle Touret, « Une réception au long cours. La réception universitaire de Louis Guilloux », ibid.
  169. « Carnets de recherches sur l'Ɠuvre de Louis Guilloux », sur HypothĂšses (consultĂ© le ).
  170. « Louis Guiloux », sur Les médiathÚques de la baie (consulté le )
  171. Jeanyves Guérin, ibid.
  172. héros de son roman Le Sang noir
  173. Voir Arnaud Flici, « Le fonds Louis Guilloux des bibliothÚques municipales de Saint-Brieuc » in : L'Atelier de Louis Guilloux [en ligne]. Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2012.
  174. Dans Carrefour, 29 juillet 1976, Pascal Pia écrit : « O.K. Joe ! raconte ce qu'a vu le narrateur lorsqu'en août 1944 il servait d'interprÚte auprÚs des officiers américains chargés d'instruire et de juger le procÚs des GI's, coupables d'avoir violé des paysannes dans une Bretagne qui n'était pas encore entiÚrement libérée, puisque des troupes allemandes tenaient toujours Lorient, Brest et Saint-Malo. Presque toujours ces forceurs de filles étaient des Noirs, que le tribunal condamnait à mort, et qui étaient bientÎt pendus. Une fois pourtant, un Blanc eut à répondre d'un meurtre commis aprÚs boire. Ses juges l'acquittÚrent, sans avoir estimé nécessaire de demander à l'interprÚte la traduction des témoignages », in D'une guerre à l'autre, p. 99.
  175. http://bca.cotesdarmor.fr/Default/prix-louis-guillloux-2019.aspx
  176. PrĂ©sentation du prix sur le site des BibliothĂšques des CĂŽtes d’Armor
  177. (CoordonnĂ©es :48° 06â€Č 36″ N, 1° 41â€Č 57″ O)

Voir aussi

Bibliographie

  • Élise Dirou, Le Saint Brieuc de Louis Guilloux, Ă©ditions de la Ville Close
  • Édouard Prigent, Louis Guilloux, P.U.B., 1971
  • Yannick Pelletier, ThĂšmes et symboles dans l'Ɠuvre romanesque de Louis Guilloux, Klincksieck-Presses Universitaires de Rennes 2, 1979
  • Yannick Pelletier (directeur), Louis Guilloux, Plein Chant, 1982
  • Jean-Louis Jacob, Louis Guilloux romancier du peuple, NoroĂźt, 1983
  • Jean-Louis Jacob (dir.), Louis Guilloux, colloque de Cerisy, Calligrammes, 1986
  • Yannick Pelletier, Louis Guilloux, de Bretagne et du monde, mĂ©moires d'un responsable, bibliothĂšque des CĂŽtes-d'Armor, 1994
  • Yannick Pelletier (directeur), Le Mal absolu (colloque Louis Guilloux et la guerre), Folle Avoine/ Ville de Saint-Brieuc, 1995
  • Yannick Pelletier, « Louis Guilloux, de Bretagne et du monde », Écrire la Bretagne : 1960-1995, Bernard Hue et Marc Gontard (dir.), Presses universitaires de Rennes, 1995, 237 p., p. 105-116
  • Jean-Claude BourlĂšs, Louis Guilloux, les maisons d'encre, Christian Pirot, 1997
  • Henri Godard (directeur), Louis Guilloux, Dix-neuf/Vingt, 1997
  • Yves Loisel, Louis Guilloux, biographie, Ă©ditions Coop Breizh, 1998
  • Walter Redfern, Louis Guilloux, Ear-witness, Rodopi, Amsterdam, 1998
  • Dossier Louis Guilloux, Europe, no 839, 1999
  • Yannick Pelletier, Louis Guilloux, ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres-ADPF, 1999
  • Yannick Pelletier, Des TĂ©nĂšbres Ă  l'Espoir, An Here, 1999
  • Henri Godard, Louis Guilloux, romancier de la condition humaine, Gallimard, 1999
  • Francine Dugast-Portes et Marc Gontard (dir.), Louis Guilloux, Ă©crivain, Presses universitaires de Rennes, 2000 (ISBN 2-86847-529-9)
  • Yannick Pelletier, Louis Guilloux et la Bretagne, Blanc Silex, 2004
  • SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux, Louis Guilloux et le Voyage (actes du colloque), 2005
  • Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, Presses universitaires de Rennes, 2010 (ISBN 978-2-7535-1105-7) ; livre en ligne sur le parcours littĂ©raire de Louis Guilloux
  • Madeleine FrĂ©dĂ©ric et MichĂšle Touret (dir.), L'Atelier de Louis Guilloux, colloque de Cerisy, Presses universitaires de Rennes, 2011 (ISBN 978-2-7535-1751-6)
  • SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux, Des amis, des compagnons au cƓur de la crĂ©ation littĂ©raire (actes des rencontres), 2012
  • Jean-Baptiste Legavre et MichĂšle Touret (dir.), Un Ă©crivain dans la presse, Presses universitaires de Rennes, 2012 (ISBN 978-2-7535-3278-6)
  • Louis Guilloux. MichĂšle Touret et Sylvie Golvet (Ă©d. prĂ©s. par), O.K., Joe ! Le dossier d’une Ɠuvre, Presses universitaires de Rennes, 2016 (ISBN 978-2-753-54772-8)
  • Jean-Baptiste Legavre (dir.), Louis Guilloux politique, Presses universitaires de Rennes, 2016 (ISBN 978-2-7535-4895-4)
  • ValĂ©rie Poussard-Fournaison, La Description selon Louis Guilloux - RĂ©alisme et tragĂ©die, L'Harmattan, 2018 (ISBN 978-2-343-14530-3)
  • Jean-Baptiste Legavre (dir.), Louis Guilloux dans les mĂ©dias. Les rĂ©ceptions de l'Ɠuvre, Presses universitaires de Rennes , 2019 (ISBN 978-2753578142)
  • Yannick Pelletier, Louis Guilloux, in LittĂ©rature bretonne de langue française, coll. dir. par P. Rannou, Fouesnant, Yoran Embanner, 2020, p. 225-232
  • Ali Chibani, « DĂ©valorisation du "rĂ©fugiĂ©". DĂ©sir de libertĂ© et Ă©thique romanesque dans Salido de Louis Guilloux », dans Vies et fictions d'exils, sous la direction de Hanen Allouch, Simon Harel, Louis-Thomas Leguerrier, Laurence Sylvain, Presses de l'universitĂ© de Laval, coll. « Intercultures », 2 fĂ©vrier 2021

Discographie

  • Louis Guilloux, Le Sang noir, textes choisis par Louis Guilloux et Yannick Pelletier, lus par Louis Guilloux, Ă©ditions Coop-Breizh, SpĂ©zet

Filmographie

  • Roland Savidan et Florence MahĂ©, Louis Guilloux l'insoumis, SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux et R.S. productions, 70 minutes, 2009 ; Ă©d. CinĂ©mathĂšque de Bretagne, 2010
  • Jean-Marie Drot, Voyage en Bretagne avec Louis Guilloux, droits : INA
  • Pierre-AndrĂ© Boutang, Libres propos d'un homme libre : Louis Guilloux, , Institut national de l'audiovisuel, voir en ligne
  • Entretien avec CĂ©cile Clairval, Ă©mission tĂ©lĂ©visĂ©e de la sĂ©rie Chant profond, INA, 1973
  • Entretien avec Bernard Pivot, Apostrophes, 1978, Ă©ditĂ© en DVD, Gallimard-NRF/INA, 2003

Théùtre

  • L'Herbe de mĂ©moire, voyage avec Louis Guilloux, texte et mise en scĂšne Anne Quesemand, 1998

Enregistrements radiophoniques

  • Entretien avec Roger Vrigny, France Culture, , ,
  • Entretien avec Anne Fabre-Luce, France Culture,
  • Entretien avec Roger Grenier, France Culture, Ă©mission La vie entre les lignes,
  • Entretien avec Jacques Chancel, France Inter, Ă©mission Radioscopie,
  • Entretien avec Patrice Galbeau, France Culture, Ă©mission MĂ©morables, 1977

Articles connexes

Liens externes

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