Louis Guilloux
Louis Guilloux, nĂ© le Ă Saint-Brieuc et mort dans la mĂȘme ville, est un Ă©crivain français.
Naissance |
Saint-Brieuc, CĂŽtes-du-Nord, France |
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DĂ©cĂšs |
Saint-Brieuc, CĂŽtes-d'Armor, France |
Activité principale | |
Distinctions |
Ćuvres principales
- La Maison du peuple (roman, 1927)
- Le Sang noir (roman, 1935)
- Le Pain des rĂȘves (roman, Prix populiste, 1942)
- Le Jeu de patience (roman, Prix Renaudot, 1949)
Auteur du Sang noir, il appartient Ă cette « grande gĂ©nĂ©ration »[1] de romanciers, dĂ©terminĂ©e par lâexpĂ©rience de la guerre de 1914. « Romancier de la douleur »[2], sensible au sort que la sociĂ©tĂ© rĂ©serve aux plus dĂ©munis, il se caractĂ©rise Ă©galement par son engagement antifasciste. Il se situe au cĆur des questionnements littĂ©raires, politiques et existentiels de son Ă©poque.
Il a vĂ©cu entre Paris et Saint-Brieuc que lâon reconnaĂźt dans la petite ville de province qui sert de cadre Ă de nombreux romans. Mais en se refusant Ă lui attribuer un nom, il lui confĂšre une trĂšs vaste portĂ©e. Il sâinscrit dans une veine rĂ©aliste, issue du naturalisme, qui justifie son rapprochement avec la littĂ©rature prolĂ©tarienne. NĂ©anmoins, son Ćuvre se dĂ©veloppe en pleine pĂ©riode de « crise du roman »[3] et explore les multiples ressources du genre romanesque. Le rĂ©cit peut se concentrer sur une seule journĂ©e (Le Sang noir) ou couvrir un demi-siĂšcle (Le Jeu de patience), ĂȘtre proche du grand roman polyphonique ou de lâ« essai de voix » (Coco Perdu). La diversitĂ© de cette Ćuvre unifiĂ©e par son sens du tragique[4] montre que son auteur ne peut ĂȘtre rĂ©duit ni Ă son engagement social, ni Ă son appartenance bretonne.
Il est lâami intime d'AndrĂ© Malraux et d'Albert Camus. Depuis 1983, un prix littĂ©raire porte son nom.
Biographie
Origine, enfance et formation
Louis Guilloux naĂźt Ă Saint-Brieuc en 1899. MalgrĂ© de nombreux sĂ©jours Ă Paris et un bref passage Ă Angers, il reste attachĂ© sa vie durant Ă sa ville natale, dans laquelle il situe l'action de plusieurs de ses romans et oĂč il Ă©crit la majeure partie de son Ćuvre[5].
Son pĂšre est cordonnier et sa mĂšre modiste. Ă la naissance de Louis, le couple a dĂ©jĂ deux filles. Les difficultĂ©s matĂ©rielles conduisent la famille Ă des dĂ©mĂ©nagements successifs au sein de la petite ville. LâexpĂ©rience de la pauvretĂ©, qui est aussi expĂ©rience de lâexclusion, imprĂšgne Ă tout jamais lâenfant. Son pĂšre est militant socialiste. SecrĂ©taire de section, il se prĂ©sente Ă plusieurs reprises Ă des Ă©lections locales[6]. LâĆuvre de Louis Guilloux, de La Maison du peuple au Jeu de patience garde le souvenir des rĂ©unions de section, des espoirs et des dĂ©sillusions politiques, de la frĂ©quentation des compagnons artisans (Compagnons)
Une forme de tuberculose osseuse lui laisse une main gauche lĂ©gĂšrement dĂ©formĂ©e, le rendant inapte aux mĂ©tiers manuels. Câest pourquoi il entre en sixiĂšme comme Ă©lĂšve-boursier au lycĂ©e de Saint-Brieuc, actuellement collĂšge Anatole Le Braz. Lâapprentissage de lâanglais seul semble le passionner. LâĂ©tĂ© 1914, il est en Angleterre quand la guerre est dĂ©clarĂ©e. En 1916, il rĂ©silie sa bourse et demande un poste de surveillant dâinternat. La complexitĂ© de sa situation est analysĂ©e par Sylvie Golvet[7]. Il aspire Ă ĂȘtre Ă©crivain, Ă suivre une voie intellectuelle mais il se sent en porte-Ă -faux avec son milieu dâorigine : il ne veut pas ĂȘtre le « bourgeois de la famille »[8]. Il Ă©choue au baccalaurĂ©at. En 1921 dans une lettre Ă Jean Grenier, il confie :
« Je regrette seulement dâĂȘtre un Ă©ternel inclassĂ©, et dâavoir tant Ă me reprocher pour nâavoir pas tentĂ© de me classer[9]. »
Sa formation intellectuelle nâest pas acadĂ©mique, et vient moins dâune institution scolaire dans laquelle il ne trouve pas sa place que de sa curiositĂ© de lecteur portĂ© vers Jules VallĂšs ou Gorki et de ses rencontres, entraĂźnant Ă leur tour amitiĂ©s et lectures. La premiĂšre rencontre dĂ©cisive est celle du philosophe et professeur Georges Palante qui prĂȘte certains de ses traits au Cripure du Sang Noir. Câest dâabord la lecture de Jean-Christophe de Romain Rolland qui les rapproche. Sâensuit une longue et profonde amitiĂ©, essentielle dans la formation intellectuelle de lâĂ©crivain : Pascal et Nietzsche font partie des auteurs lus Ă cette Ă©poque. Pendant la guerre, encore, il fait la connaissance du poĂšte Lucien Jacques et du critique dâart Waldemar George qui deviendra le personnage de Kaminski dans Le Sang noir. Câest grĂące Ă lui quâil dĂ©couvre DostoĂŻevski. En 1917, Ă la bibliothĂšque de Saint-Brieuc, Guilloux rencontre Jean Grenier, futur professeur de philosophie de Camus Ă Alger.
Il a Ă©tĂ© tĂ©moin pendant la guerre de lâarrivĂ©e des longues files de soldats blessĂ©s au lycĂ©e transformĂ© par les circonstances en hĂŽpital tandis que le maire parcourt la ville pour annoncer aux familles la mort dâun fils, dâun frĂšre ou dâun Ă©poux, cela constitue une expĂ©rience qui fonde la singularitĂ© dâune Ćuvre- tĂ©moignage de premier plan sur la vie dâune petite ville de province de lâArriĂšre pendant la premiĂšre guerre mondiale. Le sentiment tragique qui habite les romans de Louis Guilloux sâenracine dans cette vision du mal[10].
Il part pour Paris en 1918 ; commence une pĂ©riode difficile oĂč il est amenĂ© Ă vivre de petits mĂ©tiers. « Une recommandation de Georges Palante Ă lâintention de Jean Finot, directeur de La revue Mondiale ne lui ouvre aucune possibilitĂ©. »[11]. Le soutien de la famille Robert lui est alors dâun grand secours[12].
Mais sa dĂ©cision est prise : « Je ne saurais dĂ©cidĂ©ment quâĂ©crire, plus rien ne mâen empĂȘchera. »[13]
Un Ă©crivain dans la presse
Au printemps 1921, Louis Guilloux sâinstalle pour de bon dans la capitale et, dĂšs lâĂ©tĂ©, il parvient Ă placer ses premiers textes dans divers journaux parisiens[14]. Il publie principalement des nouvelles et des contes[15]dans des quotidiens dâobĂ©dience socialiste, comme Le Populaire, proche de la SFIO ou Le Peuple, qui est une publication de la C.G.T., voire dans des journaux rĂ©publicains, plutĂŽt conservateurs comme Bonsoir, Le Petit Journal ou Ă tendance socialisante comme LâĆuvre. Il rĂ©dige Ă©galement les Ă©chos pour Excelsior, « un quotidien de douze pages qui bĂ©nĂ©ficie alors dâune bonne rĂ©putation »[16]. Dâoctobre 1921 Ă avril 1923, il collabore rĂ©guliĂšrement Ă lâhebdomadaire FlorĂ©al, un pĂ©riodique culturel de qualitĂ© « destinĂ© Ă apporter des informations choisies Ă un lectorat populaire »[17]. Louis Guilloux sây rĂ©vĂšle un chroniqueur soucieux du monde moderne, maniant lâironie et propre Ă des envolĂ©es poĂ©tiques, capable de traiter de sujets trĂšs variĂ©s, quâil sâagisse du Tour de France cycliste, des thĂ©ories dâEinstein, du cinĂ©ma[18] des dĂ©buts de lâaviation ou de la traduction française dâIntroduction Ă la psychanalyse de Sigmund Freud[19].
Le , Guilloux parvient Ă une certaine stabilitĂ© financiĂšre puisquâil est engagĂ© Ă LâIntransigeant, un grand quotidien du soir dâopinion de droite. Il entre au service Ă©tranger, chargĂ© de la traduction de la presse anglaise. Dans une lettre Ă Alain LemiĂšre (datĂ©e du 25 octobre 1921), il fait Ă©tat de sa collaboration aux diffĂ©rents journaux dĂ©jĂ mentionnĂ©s, « surtout Ă LâIntransigeant. Je dis surtout parce que LâIntran est un grand journal qui paie bien », avant dâajouter plus loin : « Et avec cela derriĂšre moi je mâen vais commencer une nouvelle sĂ©rie de luttes (parfaitement : de luttes) pour mâadjoindre dâautres ressources et dâautres moyens de me rĂ©pandre »[20]. Les premiers pas de Louis Guilloux dans la presse sont donc marquĂ©s par la volontĂ© de sâimposer et dĂ©notent dâemblĂ©e des ambitions littĂ©raires que le jeune homme revendique ouvertement auprĂšs de sa famille et de ses amis.
Réseaux de relations et premiÚres tentatives littéraires
Entre le et le 15 avril 1923, Guilloux entreprend la rĂ©daction de LâIndĂ©sirable, un roman qui a pour dĂ©cor une ville de lâarriĂšre pendant la guerre de 14-18. Sâinspirant dâun scandale survenu Ă Saint-Brieuc en 1917, Guilloux Ă©voque la mise au ban dâun respectable professeur dâallemand quâune rumeur insidieuse et infondĂ©e dĂ©crit comme un traitre, Ă la solde des « boches ».
Le roman, demeurĂ© inĂ©dit du vivant de lâauteur, a Ă©tĂ© finalement publiĂ© chez Gallimard en 2019[21]. Les thĂšmes de lâĆuvre Ă venir apparaissent dĂ©jĂ dans ce rĂ©cit Ă©crit Ă lâĂąge de 24 ans : la guerre observĂ©e depuis lâarriĂšre (qui correspond Ă la situation vĂ©cue par lâĂ©crivain), la notion dâun pouvoir qui instrumentalise et mutile les vivants et une vision de la violence historique qui dĂ©crit une humanitĂ© en Ă©tat de guerre perpĂ©tuelle. Les diffĂ©rentes rĂ©actions de ses proches Ă la lecture du manuscrit et le refus des Ăditions Rieder ont incitĂ© Guilloux Ă ne pas publier lâouvrage. Pendant prĂšs de dix ans, il envisage de retravailler le manuscrit, avant dây renoncer dâautant quâil « a utilisĂ© pour Le Sang noir une partie non nĂ©gligeable des personnages et des situations prĂ©sentĂ©s dans LâIndĂ©sirable » et quâ« il est ainsi possible dâobserver lâĂ©volution considĂ©rable de lâĂ©crivain entre une Ćuvre de jeunesse prometteuse mais inĂ©gale et un roman qui est lâune de ses rĂ©ussites majeures[22] ».
Parmi les premiers lecteurs de cette Ćuvre de jeunesse, figure RenĂ©e Tricoire, une professeure de lettres, dâorigine toulousaine, que Louis Guilloux a rencontrĂ©e chez Henri Petit. SĂ©duit par cette jeune femme brillante et cultivĂ©e, de quatre ans son aĂźnĂ©e, Guilloux, pourtant rĂ©tif Ă lâidĂ©e de la vie conjugale, la demande en mariage[23]. La cĂ©rĂ©monie est cĂ©lĂ©brĂ©e le 12 aoĂ»t 1924. Par la suite, RenĂ©e Guilloux est devenue une enseignante trĂšs apprĂ©ciĂ©e de ses Ă©lĂšves[24]. Jusquâaux annĂ©es trente, elle apporte Ă Louis Guilloux « une collaboration littĂ©raire, sous forme dâavis, de suggestions et dâĂ©changes dâidĂ©es »[25] , quâil sâagisse de relecture (Le Sang noir lui est dâailleurs dĂ©diĂ©) ou de travaux de traduction[26].
GrĂące Ă son ami AndrĂ© Chamson, Guilloux fait la rencontre de Daniel HalĂ©vy. Cet historien, ami de Marcel Proust et de Charles PĂ©guy, dreyfusard de la premiĂšre heure, dirige la collection des Cahiers verts chez Grasset. Ă partir de lâhiver 1925, Guilloux frĂ©quente les rĂ©unions littĂ©raires que Daniel HalĂ©vy organise tous les samedis dans son appartement du Quai de lâHorloge. Il agrandit le cercle de ses relations et fait notamment la connaissance de Julien Benda et dâAndrĂ© Malraux. Une amitiĂ© profonde va le lier Ă ce dernier : dâemblĂ©e, Guilloux est impressionnĂ© par les qualitĂ©s intellectuelles et les dons dâorateur de celui qui vient de publier La Tentation de lâOccident chez Grasset. Pendant lâĂ©tĂ© 1926, grĂące Ă Jean Grenier, Guilloux fait Ă©galement la connaissance de Max Jacob Ă Saint-Brieuc. Guilloux Ă©voque dans ses Carnets « lâĂ©tonnante soirĂ©e » passĂ©e en compagnie du poĂšte qui entreprend en vain de le convertir au catholicisme et qui veut lâemmener Ă Nantes avec lui : « Tu mâapprendras Ă faire un roman et je te montrerai comment on fait les poĂšmes en prose »[27]. Louis Guilloux a en effet dĂ©cidĂ© de se consacrer entiĂšrement Ă lâĂ©criture depuis sa dĂ©mission de LâIntransigeant, le 25 avril 1926, quittant Paris pour retourner vivre Ă Saint-Brieuc.
Une « carte de visite » : La Maison du peuple
Câest en juillet 1927 que Louis Guilloux publie son premier roman, La Maison du peuple, qui va lâimposer sur la scĂšne littĂ©raire. Il lui a fallu quatorze Ă quinze mois pour Ă©crire cette Ćuvre autobiographique qui raconte la vie et les combats politiques dâun pĂšre cordonnier et militant socialiste. Guilloux a dâabord soumis son manuscrit Ă Daniel HalĂ©vy qui lâadresse Ă Jean GuĂ©henno, lequel lance Ă ce moment une collection chez Grasset, « Les Ăcrits ». Il est bouleversĂ© par cette lecture qui le renvoie Ă sa propre enfance de fils de cordonnier Ă FougĂšres. Dans une lettre Ă HalĂ©vy, GuĂ©henno explique combien il a Ă©tĂ© troublĂ© par lâĂ©vocation de ce destin similaire au sien : « Il mâest tout Ă fait impossible de juger ce livre-lĂ comme un autre livre. (âŠ) Il me semble Ă©couter quelquâun tĂ©moigner pour moi, et je ne pense quâĂ remercier[28]. » Un contrat est signĂ© avec Grasset en avril 1927.
Un demi-siĂšcle aprĂšs sa parution, lors dâun entretien radiophonique, Louis Guilloux a indiquĂ© ce que cet ouvrage signifiait Ă ses yeux :
« Câest une carte de visite aussi puisque, en somme, je me destinais Ă faire ce mĂ©tier, eh bien⊠jâai voulu dire dâabord « voilĂ qui je suis, voilĂ dâoĂč je viens », nâest-ce pas⊠et ça a Ă©tĂ© La Maison du peuple[29]. »
La figure du pĂšre sâimpose dĂšs le dĂ©but du rĂ©cit. Câest celle dâun honnĂȘte travailleur, cordonnier depuis lâĂąge de onze ans qui refuse de ployer sous le joug des patrons et des nantis. Guilloux dĂ©crit un pĂšre frondeur prĂŽnant la RĂ©volution et enjoignant aux camarades de se grouper pour lutter plus efficacement. Son mĂ©tier ne lui permet pas dâĂ©chapper Ă une vie prĂ©caire. La grave maladie de son Ă©pouse puis la mort de la grand-mĂšre aprĂšs une vie de labeur confirment les dures conditions dâexistence de la famille. DerriĂšre une apparente simplicitĂ© narrative, La Maison du peuple est un rĂ©cit qui parvient Ă exprimer sans emphase les mĂ©canismes dâaliĂ©nation sociale. Guilloux dĂ©crit lâhumiliation dâun homme qui ne parvient plus Ă gagner sa vie, parce que ses opinions politiques indisposent les clients et quâil frĂ©quente le docteur RĂ©bal qui est Ă la tĂȘte de la section socialiste[30]. Il doit mĂȘme fermer boutique et se retrouve dans lâimpossibilitĂ© de payer son loyer.
La trahison du docteur RĂ©bal qui, sitĂŽt Ă©lu, dĂ©nonce la coalition, entraine une grave dĂ©sillusion politique. Mais le pĂšre rĂ©organise le mouvement populaire en projetant de construire une Maison du Peuple. Câest une utopie concrĂšte et emblĂ©matique qui se rĂ©alise ainsi Ă travers un Ă©difice construit par et pour le peuple. La dĂ©claration de guerre dâaoĂ»t 14 vient balayer tous ces espoirs et le rĂ©cit sâachĂšve sur le dĂ©part des hommes pour le front.
Le livre reçoit un accueil critique favorable. Des Ă©crivains renommĂ©s comme Romain Rolland et Georges Duhamel font part de leur admiration Ă Guilloux. La presse socialiste ne manque pas de souligner la qualitĂ© de lâĂ©criture et lâĂ©vocation prĂ©cise et pertinente de la classe ouvriĂšre, comme en tĂ©moignent les articles louangeurs dâHenri Barbusse et de Henry Poulaille[31]. La critique, dans son ensemble, insiste sur la sobriĂ©tĂ© du style et le refus de toute emphase[32]. Cette « carte de visite » permet donc Ă Louis Guilloux dâĂȘtre reconnu par le milieu littĂ©raire mais, dans les annĂ©es qui suivent, le jeune auteur tentera dâĂ©chapper Ă lâimage dâ« Ă©crivain prolĂ©tarien » quâil juge rĂ©ductrice.
Années 1928-1934 : Louis Guilloux, un auteur prolétarien?
Le bon accueil critique de La Maison du peuple conforte les ambitions de Louis Guilloux. AprĂšs avoir vĂ©cu deux ans Ă Angers oĂč son Ă©pouse RenĂ©e avait Ă©tĂ© nommĂ©e professeur, Louis Guilloux revient Ă Saint-Brieuc en 1930[33]. Le couple fait l'acquisition d'un terrain, rue Lavoisier, dans le quartier Saint-Michel et y fait construire leur maison oĂč naĂźt en 1932 Yvonne, leur fille unique[34]. Louis Guilloux poursuit dĂšs lors activement son Ćuvre et publie son deuxiĂšme roman, Dossier confidentiel, en 1930. Par bien des aspects, ce roman, dont lâintrigue se dĂ©roule dans une ville de lâarriĂšre pendant la guerre de 1914, annonce Le Sang noir. Dans la premiĂšre partie de lâouvrage, Guilloux Ă©voque les rĂ©actions de trois adolescents, Raymond, Laurent et Lucie face Ă la guerre et dĂ©crit leur immense dĂ©sarroi. La seconde partie raconte le dĂ©part du narrateur accompagnĂ© de sa tante pour sâinstaller dans un hĂŽtel dâune ville de province anonyme. Le rĂ©cit sâoriente sur le versant balzacien plus traditionnel dâune Ă©tude de caractĂšres avant de se conclure sur un crime involontaire commis par Raymond et dont il finit par sâaccuser. Cette fin est jugĂ©e confuse par la critique[35]. LâĂ©pilogue renvoie Ă la dĂ©marche rĂ©demptrice de Raskolnikov Ă la fin de Crime et ChĂątiment[36]. Raymond dĂ©couvre ainsi grĂące Ă un certain M. Coudrier, quâil est sans doute incapable dâaimer : « Coudrier rĂ©pĂšte que chacun sera son propre juge. Il ajoute : âVous serez simplement mis en prĂ©sence de vous-mĂȘme. La lumiĂšre de Dieu suffiraâ[37]. » Ses amis, qui sont les premiers lecteurs du manuscrit, regrettent la rĂ©fĂ©rence dostoĂŻevskienne trop flagrante et tentent de prĂ©server le jeune auteur de toute approche Ă©difiante[38]. Guilloux a bien entendu pris en compte ces recommandations et privilĂ©gie dans le roman la description dâune ville de province gagnĂ©e par lâidĂ©ologie mortifĂšre et mensongĂšre du pouvoir.
Bien que de nombreux critiques, dâAlbert Thibaudet Ă FrĂ©dĂ©ric LefĂšvre, louent les qualitĂ©s du roman, certains sâaccordent Ă le trouver incomprĂ©hensible, « de manquer de clartĂ© et de cohĂ©rence » et de laisser « le lecteur perplexe »[39]. Ces reproches Ă©clairent sans doute les vĂ©ritables enjeux du livre qui seraient de traduire, pour reprendre une distinction proposĂ©e par Kamel Daoud Ă propos dâAlbert Camus, une expĂ©rience de lâinexplicable[40]. La tragĂ©die Ă lâĂ©chelle collective rejoint la tragĂ©die Ă lâĂ©chelle privĂ©e. Rien ne justifie le massacre de masse comme rien nâexplique le meurtre commis par Raymond. Câest Laurent, son camarade Ă©pris dâabsolu qui donne la clef avec cette remarque : « La guerre nâest pas un contraire, ni un moment, mais une suite, comprenez-vous ? Lâhomme est le mĂȘme, dans la guerre et dans la paix, et le monde est le mĂȘme, câest-Ă -dire pourri[41]. » Ce profond pessimisme mĂ©taphysique conduit Guilloux Ă une vision de lâHistoire placĂ©e sous le sceau de la dĂ©sillusion et de la mĂ©fiance, au point de privilĂ©gier une dĂ©marche pragmatique, comme il lâaffirme dans ses Carnets :
« La question nâest pas de savoir quel est le sens de cette vie, mais quâest-ce que nous pouvons en faire[42] ? »
En 1931, Guilloux publie un court rĂ©cit intitulĂ© Compagnons. Il y raconte comment Jean Kernevel, un artisan-plĂątrier, ĂągĂ© de cinquante ans, tombe gravement malade. Ce cĂ©libataire est relayĂ© par ses compagnons qui viennent Ă son chevet pour lâassister dans ses derniers moments. DâAlbert Camus Ă Pierre Lemaitre[43], de nombreux Ă©crivains considĂšrent ce rĂ©cit comme une des rĂ©ussites majeures de Guilloux, en raison de lâĂ©motion provoquĂ©e par une Ă©criture sobre et dĂ©pouillĂ©e de tout artifice. Lâauteur y rappelle la nĂ©cessitĂ© de lâamour, qui serait la seule maniĂšre de rĂ©sister Ă la misĂšre et Ă lâinjustice sociale.
LâhumilitĂ© et la dignitĂ© de Kernevel, la solidaritĂ© naturelle et implicite de ses compagnons participent de ce « sublime populiste »[44] qui refuse les effets spectaculaires. Guilloux se mĂ©fie en effet dâune reprĂ©sentation bourgeoise qui nâapprĂ©hende le peuple quâĂ travers le prisme mĂ©lodramatique ou folklorique, dans la continuitĂ© dâune certaine littĂ©rature du XIXe siĂšcle (Lamartine, Hugo, Sand). Il est indĂ©niable que La Maison du peuple, Compagnons et AngĂ©lina sâapparentent Ă lâesthĂ©tique populiste et « sâintĂšgrent Ă la ligne naturaliste (âŠ) oĂč lâintĂ©rĂȘt se trouve concentrĂ© sur un thĂšme unique : la confrontation dans les premiĂšres annĂ©es de ce siĂšcle, dâune famille pauvre Ă la structure sociale de son temps[45]. » Pour autant, Guilloux nâa eu de cesse de rĂ©cuser les Ă©tiquettes dâĂ©crivain populiste ou prolĂ©tarien quâil juge sclĂ©rosantes.
Ă la fin des annĂ©es vingt, LĂ©on Lemonnier et AndrĂ© ThĂ©rive tentent de promouvoir un mouvement littĂ©raire populiste. Lemonnier explique dans un manifeste publiĂ© en 1929, que « le peuple offre une matiĂšre trĂšs riche et Ă peu prĂšs neuve »[46] et, bien quâil cite La Maison du peuple parmi les exemples du roman populiste, « il nâenvisage pas que lâĂ©crivain populiste soit dâorigine populaire. (âŠ) Le peuple est donc [pour lui] une matiĂšre pittoresque pour des Ă©crivains bourgeois lus par des bourgeois⊠»[47] Guilloux ne peut Ă©videmment souscrire Ă un tel point de vue et refuse logiquement dâentrer dans ce mouvement[48]. Et câest sans enthousiasme quâil accepte le Prix populiste en 1942 pour Le Pain des rĂȘves.
Louis Guilloux nâadhĂšre pas non plus au mouvement des Ă©crivains prolĂ©tariens, qui rassemble des auteurs dâorigine populaire autour dâHenry Poulaille. Dans une lettre Ă Romain Rolland datĂ©e de septembre 1931, il affirme craindre lâimage simplificatrice et figĂ©e de « romancier du prolĂ©tariat » :
« MalgrĂ© tout, je ne veux, je ne puis me dire dâun parti ou dâune Ă©cole. Et lâon voudrait que je me dise Ă©crivain prolĂ©tarien. Mais les hommes que jâai voulu peindre ne sont pas dâabord des prolĂ©taires. Ils sont avant tout des hommes (âŠ). Il nây a quâune expĂ©rience, la mĂȘme pour tous, et qui est lâexpĂ©rience de lâamour[49]. »
Mais cette indĂ©pendance revendiquĂ©e a un prix : un relatif isolement qui coupe Guilloux des rĂ©seaux littĂ©raires qui auraient pu le soutenir. En nâhĂ©sitant pas Ă critiquer des mouvements qui tentent de lâenrĂŽler et donc, selon lui, dâaliĂ©ner sa libertĂ© crĂ©atrice[50] , Guilloux connaĂźt une situation instable dans son propre camp, celui de la gauche intellectuelle. Il donne ainsi Ă la revue Europe un compte-rendu trĂšs critique du livre dâHenry Poulaille, Nouvel Ăąge littĂ©raire. Sâil ne doute pas de la probitĂ© et de la sincĂ©ritĂ© de Poulaille, Guilloux se mĂ©fie dâun discours militant qui asservit la littĂ©rature Ă des dĂ©bats dâĂ©cole, de clan, de catĂ©gorie et qui, en quelque sorte, assigne Ă rĂ©sidence lâĂ©crivain issu du peuple[51]. Il prĂ©conise au contraire une libertĂ© artistique qui puisse rĂ©sister Ă tout embrigadement, quâil soit idĂ©ologique ou esthĂ©tique :
« Le fond du livre de Poulaille est prĂ©cisĂ©ment une invitation Ă nous enfermer dans nos classes. Et câest cette invitation que nous devons dĂ©cliner si nous tenons Ă ĂȘtre ce que nous sommes, Ă faire ce que nous avons Ă faire. Notre Ă©poque est empoisonnĂ©e de faux problĂšmes, ayons le courage de nous en dĂ©livrer. Souhaitons certes avec Poulaille la venue dâune littĂ©rature prolĂ©tarienne, câest-Ă -dire dâune nouvelle expression de lâhomme. Mais sachons rester libres[52]. »
Guilloux enfant du peuple doit-il nĂ©cessairement se conformer Ă lâimage de lâĂ©crivain prolĂ©tarien ? Son rejet des propositions populiste et prolĂ©tarienne confirme cette volontĂ© dâĂ©chapper Ă un tel tropisme social et idĂ©ologique. Il demeure ainsi tiraillĂ© entre la loyautĂ© envers sa classe dâorigine et un profond dĂ©sir de libertĂ© inhĂ©rent Ă sa condition dâartiste.
Avec la parution dâHymĂ©nĂ©e en 1932, Guilloux propose une observation prĂ©cise de la vie conjugale. DĂ©laissant lâĂ©vocation des milieux populaires et prenant pour cadre la petite bourgeoisie de province, Guilloux sâessaie au roman psychologique et offre une Ă©tude en profondeur du destin de deux individus ordinaires, Maurice et Berthe. Ă partir dâun simple mensonge (Berthe a une liaison avec Maurice et lui fait croire quâelle est enceinte afin quâil lâĂ©pouse), Guilloux dĂ©crit lâenlisement dâun couple dans lâincomprĂ©hension et le dĂ©samour. Par obĂ©issance aux convenances sociales, Maurice et Berthe subissent leur destin sans parvenir Ă le changer. Roman de lâenfermement, HymĂ©nĂ©e est aussi un roman tragique, mais dâun tragique dĂ©nuĂ© de grandeur, sans lien avec le transcendant et qui prend sa source dans la quotidiennetĂ©.
Bien que Guilloux ait signĂ© en dĂ©cembre 1932 un contrat pour six romans chez Gallimard, il publie un dernier ouvrage intitulĂ© AngĂ©lina chez Grasset en 1934. Il poursuit la geste familiale entamĂ©e avec La Maison du peuple en sâinspirant des souvenirs dâenfance et de jeunesse rĂ©digĂ©s par sa mĂšre. Guilloux songe Ă les publier tels quels mais dĂ©cide finalement dâutiliser cette matiĂšre autobiographique Ă des fins fictionnelles. Il raconte la vie dâun artisan-lamier, Esprit Le Coq mariĂ© Ă Anne-Marie et pĂšre de trois enfants, Henri, Charles et AngĂ©lina. Les difficultĂ©s de la vie quotidienne, le spectre du chĂŽmage, les combats politiques traversent ce « texte Ă la frontiĂšre de lâautobiographie familiale, du document humain et du roman »[53]. AngĂ©lina marque la fin du cycle des Ćuvres de jeunesse et lors de sa parution, Guilloux est plongĂ© depuis plusieurs mois dĂ©jĂ dans la rĂ©daction du Sang noir, qui sera perçu comme lâun des romans majeurs de lâentre-deux-guerres.
Le succĂšs du Sang noir
Ă partir de 1929-1930, Louis Guilloux entreprend la rĂ©Ă©criture de lâIndĂ©sirable[54]. Cela deviendra Le Sang noir qui rencontre un vĂ©ritable succĂšs, dĂšs sa parution en octobre 1935. « Le dossier de presse montre que la sortie du Sang noir est un Ă©vĂ©nement littĂ©raire et politique[55] ». La rĂ©ception mĂ©diatique a Ă©tĂ© prĂ©parĂ©e par lâauteur et son Ă©diteur[56]. Le bandeau publicitaire « La vĂ©ritĂ© de ce monde, ce nâest pas quâon meurt, câest quâon meurt volĂ© » fait du roman une rĂ©ponse Ă CĂ©line et Ă Voyage au bout de la nuit qui a remportĂ© lui-mĂȘme un grand succĂšs, malgrĂ© lâĂ©chec au Goncourt. La stratĂ©gie est claire : avoir le Goncourt serait faire mieux que CĂ©line, ne pas le recevoir serait une preuve supplĂ©mentaire du discrĂ©dit qui pĂšse sur le prix.
La force du roman vient autant de son sujet - la guerre vue dâune petite ville de lâArriĂšre en 1917 au moment des mutineries de soldats â que de sa composition. Dans ce contexte historique, le roman met en scĂšne les derniĂšres vingt-quatre heures du professeur de philosophie, Merlin, qui nâenchante plus guĂšre et que ses Ă©lĂšves, par dĂ©rision, surnomment Cripure. La construction dramatique repose sur les unitĂ©s de temps et de lieu. Mais lâart de la narration utilisant « les monologues croisĂ©s et la circulation des Ă©nonciations croisĂ©es[57]» dote dâune profondeur temporelle personnages et Ă©vĂ©nements, faisant sentir quâ« une journĂ©e est toujours plus quâelle-mĂȘme[58]». LâopacitĂ© des personnages, et notamment celle du personnage principal, loin dâĂȘtre dissipĂ©e par ces modalitĂ©s narratives, sâen trouve renforcĂ©e. Que les protagonistes du rĂ©cit durant cette journĂ©e soient enfermĂ©s dans une ville-labyrinthe[59] qui dĂ©vore ses enfants en les envoyant Ă la mort augmente indĂ©niablement la puissance du sentiment tragique qui saisit le lecteur de ce grand roman moderne.
Quand le verdict du jury Goncourt tombe, la riposte sâorganise : le 12 dĂ©cembre 1935, la maison de la culture de la rue PoissonniĂšre accueille un meeting en soutien Ă Louis Guilloux, « DĂ©fense du roman français ». Sous la prĂ©sidence de Roland DorgelĂšs, AndrĂ© Gide, AndrĂ© Malraux, Louis Aragon, EugĂšne Dabit sont Ă la tribune, autour de lâauteur du Sang noir qui Ă son tour lit un texte dĂ©veloppant ses idĂ©es sur la crĂ©ation romanesque[60]. Cette assemblĂ©e dâauteurs, et non des moindres, contribue Ă transformer lâĂ©chec du Goncourt en succĂšs. La presse de gauche dĂ©jĂ mobilisĂ©e en faveur du roman nâest pas Ă convaincre et Gallimard fait paraitre des encarts publicitaires dans la presse de droite, laissant entendre quâĂȘtre refusĂ© au Goncourt constitue un gage de qualitĂ©[61].
Dabit salue dans le roman la contestation des historiens officiels qui venge ceux qui ont dĂ» faire la guerre[62]. Gide Ă©crit Ă Guilloux en dĂ©cembre 1935 que Le Sang noir « offre de quoi perdre pied », reconnaissant par cette formule son pouvoir de subversion. Aragon est sensible Ă la verve satirique qui parcourt le texte et Ă la peinture dâune « mĂ©nagerie humaine[63]». Malraux Ă©voque la « danse de la mort[64]» auquel se livrent les personnages, ombres errantes dans la ville. La critique des pairs dans son ensemble souligne ce qui fait du roman un coup de maĂźtre: mise en lumiĂšre des oubliĂ©s de lâHistoire, satire virulente de lâunivers Ă©troit de la petite ville de province et de ses notables, sens aigu du tragique, prĂ©sentation complexe des personnages - et notamment du personnage de Cripure - Ă propos desquels il est difficile, sinon impossible dâarrĂȘter une vĂ©ritĂ©, rĂ©fĂ©rence explicite au roman russe, incertitude fantastique dans laquelle baignent certains Ă©pisodes. La diversitĂ© des propos montre la richesse dâun roman, dont Jorge Semprun dira plus tard lâimportance de sa dĂ©couverte pour lâadolescent quâil Ă©tait :
« Outre que câest lâun des plus grands romans français de ce siĂšcle -Ă©trangement mĂ©connu, Ă mon avis : il doit y avoir des raisons ; sans doute sont-elles inavouables, scandaleuses du moins -, jây ai appris des choses essentielles : sur la densitĂ© de la vie, sur le Mal et le Bien, sur les misĂšres de lâamour, sur le courage et la lĂąchetĂ© des hommes, sur lâespoir et le dĂ©sespoir[65]. »
En 1967, est prĂ©sentĂ©e lâadaptation thĂ©Ăątrale du Sang noir Ă©crite par Louis Guilloux, Cripure, dans une mise en scĂšne de Marcel MarĂ©chal. Si certains critiques contestent les choix de Marcel MarĂ©chal, tout le monde sâaccorde Ă reconnaitre que Le Sang noir est un chef-dâĆuvre. En 1970, lâaccueil est plus favorable encore et la reprĂ©sentation de 1990 est saluĂ©e par Jean Daniel dans Le Nouvel Observateur[66] Notons que la rĂ©ception extrĂȘmement positive de LâIndĂ©sirable, au moment de sa publication posthume par les soins dâOlivier Macaux au printemps 2019 montre que lâintĂ©rĂȘt des questions soulevĂ©es dans Le Sang noir ne se dĂ©ment pas.
CongrÚs des écrivains pour la défense de la culture
En parallĂšle Ă son activitĂ© dâĂ©crivain, Guilloux sâest engagĂ© depuis le dĂ©but des annĂ©es 1930 (1932-1933) dans les mouvements des intellectuels et des Ă©crivains qui dĂ©noncent le militarisme puis les dangers du fascisme et du nazisme.
Dans le sillage dâAndrĂ© Malraux, Guilloux adhĂšre en 1933 Ă lâAEAR, lâAssociation des Ă©crivains et artistes rĂ©volutionnaires fondĂ©e par le parti communiste français[67]. AprĂšs les Ă©meutes parisiennes du 6 fĂ©vrier 1934, il signe lâappel du ComitĂ© de vigilance des intellectuels antifascistes avant de participer activement Ă Paris, du 21 au 25 juin 1935, au premier CongrĂšs international des Ă©crivains pour la DĂ©fense de la Culture connu comme le CongrĂšs des Ă©crivains antifascistes.
Câest un Ă©vĂ©nement majeur dans le monde de la culture, puisquâil permet le rassemblement de nombreux Ă©crivains et intellectuels dans la grande salle de la MutualitĂ© Ă Paris, devant une assistance de 2500 Ă 3 000 personnes[68]. LâAEAR, et donc le parti communiste français, sont Ă lâorigine de ce congrĂšs et invitent des intellectuels et artistes communistes, des « compagnons de route », mais aussi des radicaux-socialistes, voire des libĂ©raux. Guilloux ne prend pas la parole pendant le congrĂšs mais il effectue les nombreuses tĂąches de secrĂ©tariat en remplacement de Louis Martin-Chauffier tombĂ© malade. Il sâagit bien dâun lourd travail dâorganisation, concernant lâaccueil et lâhĂ©bergement des congressistes, que Guilloux, trĂšs impliquĂ©, a dĂ» assumer[69].
On dĂ©nombre pas moins de 250 Ă©crivains et intellectuels de 38 pays : Gide, Malraux, Aragon, GuĂ©henno figurent parmi les auteurs français de renom. Les auteurs allemands sont reprĂ©sentĂ©s notamment par Bertolt Brecht, Thomas Mann, Robert Musil, Anna Seghers. Quant aux auteurs anglo-saxons, ils comptent dans leurs rangs des personnalitĂ©s aussi reconnues que George Bernard Shaw, Aldous Huxley, E.M. Forster, Sinclair Lewis ou Dos Passos[70]. Une importante dĂ©lĂ©gation soviĂ©tique menĂ©e par Ilya Ehrenbourg a fait le dĂ©placement mais sans Maxime Gorki. Gide et Malraux parviennent alors Ă convaincre les autoritĂ©s soviĂ©tiques dâautoriser la venue dâIsaac Babel et de Boris Pasternak, dont le discours prononcĂ© Ă la tribune le soir du 24 juin a profondĂ©ment marquĂ© Guilloux[71]. Des controverses surgissent notamment avec les surrĂ©alistes menĂ©s par AndrĂ© Breton et les trotskistes quand ils tentent dâĂ©voquer lâaffaire Victor Serge, emprisonnĂ© par Staline. « Les dĂ©bats sont parfois houleux, les affrontements verbaux violents. La question des libertĂ©s, non seulement dans les pays fascistes, mais aussi en URSS est abordĂ©e Ă plusieurs reprises[72].»
Par la suite, Guilloux ne participe pas aux congrÚs qui se déroulent à Londres en juin 1936 et à Valence et Madrid en juillet 1937[73].
Lâengagement social et politique de Guilloux nâa cessĂ© pourtant de sâĂ©largir jusquâĂ la guerre : contre les ventes-saisies de leur ferme dont les paysans sont victimes en Bretagne, dans le comitĂ© de chĂŽmeurs et au Secours Rouge Ă Saint-Brieuc, et dans lâaccueil des rĂ©fugiĂ©s espagnols dans les CĂŽtes-du-Nord en 1937 et 1939[74]. Ce faisant, Louis Guilloux a dĂ©veloppĂ© des relations dans les milieux militants communistes en premier lieu, mais aussi socialistes et chrĂ©tiens. Ces contacts nouĂ©s dans les luttes communes des annĂ©es 1930 seront dĂ©terminants sous lâOccupation.
Voyage en URSS avec Gide et retour
Avec la publication du Sang noir, Louis Guilloux sâest affirmĂ© comme Ă©crivain de premier plan. Gide admire et lâhomme et lâĂ©crivain. InvitĂ© par le gouvernement soviĂ©tique, il fait cette proposition, notĂ©e par Louis Guilloux dans ses Carnets : « 28 janvier 1936- PassĂ© la soirĂ©e chez Gide. Il mâinvite Ă lâaccompagner en URSS. Le projet me tente Ă©normĂ©ment mais⊠Jâaccepte cependant. »[75]. Outre Louis Guilloux, Gide sâentoure dâEugĂšne Dabit, Jef Last, Pierre Herbart et Jacques Schiffrin, tous Ă©crivains de gauche heureux de lâoccasion dâun voyage si utile pour comprendre la rĂ©alitĂ© soviĂ©tique.
LâĂ©quipe doit se scinder car il est demandĂ© Ă Gide, pour un accueil triomphal, de gagner Moscou en avion, ce quâil fait, accompagnĂ© du seul Herbart[76]. Leur arrivĂ©e le 19 juin coĂŻncide avec la mort de Gorki. Lors des funĂ©railles, Gide est appelĂ© Ă prononcer un discours sur la Place Rouge comportant un hommage appuyĂ© Ă lâUnion soviĂ©tique. Les autres membres de lâĂ©quipe partent de Londres sur un bateau soviĂ©tique, Ă destination de LĂ©ningrad.
Sur lâensemble du voyage, Louis Guilloux reste trĂšs discret[77]. On en sait davantage grĂące au Retour de l'U.R.S.S. de Gide et aux annotations de Dabit dans son Journal intime, Ă©mouvantes en raison de la mort de lâauteur Ă SĂ©bastopol. Dabit souligne notamment lâambiance trĂšs festive sur le bateau de Londres Ă Leningrad oĂč les compagnons se livrent à « la chasse aux femmes ». Du voyage lui-mĂȘme, il retient surtout les aspects touristiques[78] , et les soirĂ©es avec Guilloux, son compagnon de chambrĂ©e[79]. Du rĂ©cit de voyage de Pierre Herbart on retiendra surtout lâapprĂ©ciation sur le repas officiel offert au groupe Ă lâhĂŽtel Astoria sur les bords de la Neva, Ă LĂ©ningrad oĂč il se livre « menu en main, Ă un petit calcul approximatif du prix de revient du repas : environ deux cents roubles par tĂȘte, le salaire moyen dâun ouvrier »[80]. Gide, quant Ă lui, accepte le faste du protocole mais sâagace de la prĂ©sence du GuĂ©pĂ©ou tout en pensant quâil est assez prudent pour Ă©chapper Ă la filature bien quâil sâinterroge sur la disparition dâun jeune Ă©tudiant quâil a connu Ă Moscou et fait venir Ă LĂ©ningrad : « je suis certain quâon sâest vengĂ© de lui et je nâai jamais pu savoir ce quâil Ă©tait devenuâŠOui, je suis convaincu que je lâai tuĂ© »[81]. Il confirme Ă©galement la scission du groupe en deux Ă©quipes dans une lettre Ă Roger Martin du Gard : « Le plus souvent la bande se divise : Dabit, Schiffrin et Guilloux filent de leur cĂŽtĂ©, ou, plus exactement, nous les laissons, Pierre Herbart, Jef et moi, pour courir[82] ». Le dernier mot est clair : Ă chaque groupe, ses prioritĂ©sâŠ
Tous les tĂ©moignages concordent donc pour noter le caractĂšre somptueusement protocolaire, touristique, et sous surveillance du voyage. Raisons pour lesquelles on peut comprendre facilement que lâennui et la dĂ©ception aient pu gagner Schiffrin et Guilloux et les dĂ©cider Ă rentrer prĂ©maturĂ©ment en France depuis Tiflis tandis que Dabit est restĂ©, par reconnaissance envers Gide et par amour pour une jeune femme, Alisson, avec qui il file un parfait amour.
Lors du retour en France, au traumatisme gĂ©nĂ©ral causĂ© par la mort de Dabit le 21 aoĂ»t Ă SĂ©bastopol des suites du typhus sâajoute le conflit entre Gide et Aragon dans lequel Louis Guilloux est appelĂ© Ă intervenir : Aragon est scandalisĂ© par la publication du livre de Gide, Retour de lâURSS[83], dĂ©nonçant le rĂ©gime stalinien[84]. En janvier 1937, Aragon, codirecteur avec Jean-Richard Bloch de Ce soir[85], quotidien communiste, confie Ă Guilloux la responsabilitĂ© de la page littĂ©raire du journal. Quelques semaines plus tard, il tente de lâinstrumentaliser en lui demandant dâ« Ă©crire quelque chose en rĂ©ponse au livre de Gide[86] ». Guilloux sây refuse, comprenant rapidement quâil sâagit surtout de faire le rĂ©cit du comportement de Gide en URSS. ConsĂ©quence presque immĂ©diate de ce refus dâobtempĂ©rer : Louis Guilloux est licenciĂ©[87] pour nâavoir pas voulu, alors quâil peinait Ă vivre de sa plume, sâabaisser Ă un Ă©crit mĂ©disant sur Gide.
Câest un tournant dans la vie de Guilloux qui dĂ©cide de quitter Paris et, rentrĂ© Ă Saint-Brieuc, de se consacrer Ă lâaide aux rĂ©fugiĂ©s espagnols. De mĂȘme quâil nâa pas cĂ©dĂ© aux injonctions dâAragon, il a tenu tĂȘte Ă Gide[88] qu'il accuse d'hypocrisie[89]. Louis Guilloux refuse alors de livrer une apprĂ©ciation officielle du voyage en URSS et renvoie ainsi dos Ă dos Aragon et Gide.
Sur le plan littĂ©raire, il tire les leçons de ce voyage : parti enthousiaste et dĂ©sireux dâimaginer une suite au Sang noir, montrant la naissance dâun homme nouveau construit par la RĂ©volution prolĂ©tarienne, Ă son retour il tirera un trait sur cette suite qui aurait pu sâintituler Le BlĂ©, sorte de Germinal lumineux.
Sur le plan politique, on peut Ă©galement comprendre son silence : la guerre dâEspagne Ă©clate et, pour faire piĂšce Ă Franco, lâintervention soviĂ©tique est dĂ©terminante. Pour cette raison, Guilloux de mĂȘme que dâautres intellectuels engagĂ©s, ne veut pas faire le jeu des rĂ©actionnaires en disqualifiant lâURSS bien que commencent le 5 septembre les procĂšs de Moscou, caractĂ©ristiques des mĂ©thodes de Staline.
Le silence de Louis Guilloux[90] se comprend largement par la souffrance personnelle, intellectuelle, politique et littĂ©raire ressentie. Câest un silence choisi, une façon de tourner le dos Ă une façon rĂ©pandue de faire de la politique en perdant sa libertĂ©. Quant Ă lui, il sâengage bien davantage dans lâaction locale, Ă Saint-Brieuc, auprĂšs des chĂŽmeurs, des rĂ©fugiĂ©s espagnols et autres exclus.
AuprĂšs des paysans
Au dĂ©but des annĂ©es trente, lâonde de choc de la « crise de 29 » nĂ©e aux Ătats-Unis, frappe lâEurope. Louis Guilloux sâengage dans le soutien aux plus dĂ©munis et particuliĂšrement auprĂšs des petits paysans durement frappĂ©s par la pratique des « ventes-saisies ». Câest avec le ton de lâĂ©conomiste quâil en rend compte dans Les Carnets le 21 octobre 1933 :
« MisĂšre paysanne. Le nombre des saisies pratiquĂ©es sur les paysans des environs de LoudĂ©ac sâaccroĂźt depuis quelques mois. La situation des paysans est devenue trĂšs misĂ©rable : les caisses du CrĂ©dit agricole ne peuvent presque plus avancer dâargent. Dans les cas de saisie, le mobilier et le cheptel ne suffisent pas Ă payer les dettes. Cause gĂ©nĂ©rale : la crise, la mĂ©vente des produits agricoles. Deux causes plus spĂ©ciales Ă notre rĂ©gion : pendant la pĂ©riode de relative prospĂ©ritĂ© on a vendu trĂšs cher de la mĂ©chante terre. Le paysan est aujourdâhui victime de cette spĂ©culation. Autre cause : la duretĂ© de certains baux[91]. »
AprĂšs une pĂ©riode haussiĂšre des prix du blĂ©, les cours se sont Ă©croulĂ©s et les paysans ne pouvant rembourser leurs emprunts sont les victimes de prĂ©dateurs qui acquiĂšrent Ă vil prix fermes et matĂ©riel agricole. Louis Guilloux, auprĂšs des organisations syndicales et politiques les plus engagĂ©es, communistes et socialistes en particulier participe Ă de nombreuses manifestations, notamment dans la rĂ©gion de LoudĂ©ac oĂč les manifestants essaient de dissuader tout acquĂ©reur.
Toute lâhumanitĂ© de Louis Guilloux apparaĂźt dans ces pages des Carnets : recueil prĂ©cis dâinformations dans les journaux et dans lâaction, cri de rĂ©volte contre la façon dont le droit qui devrait secourir les humbles, spolie les plus pauvres. La dĂ©marche citoyenne est prolongĂ©e et amplifiĂ©e par lâacte dâĂ©criture : bien des annĂ©es plus tard, en 1949, un roman sâen fera lâĂ©cho, Le Jeu de patience.
Mais le roman qui revient le plus sur les ventes-saisies, câest, en 1960, Les Batailles perdues. Aux combats politiques menĂ©s prĂšs de trente ans auparavant succĂšde, avec Les Batailles perdues, un roman de la dĂ©sillusion. Le roman sâinterroge sur cette perte des illusions Ă lâĆuvre dĂšs le dĂ©but des annĂ©es 1930 mais sur un point au moins, celui de la mobilisation contre les ventes-saisies, le romancier prend plaisir Ă dĂ©crire la mobilisation des paysans pour sauver lâun des leurs et dĂ©jouer les mises en vente faites par lâhuissier :
« Les gens Ă©taient gais comme un jour de foire, sĂ»rs que lâhuissier en serait pour ses frais et le grand Tudual expliquait une fois de plus que Mescam avait parfaitement le droit de choisir lâordre de la vente et dâobliger lâhuissier Ă commencer par les bĂȘtes : on pouvait toujours espĂ©rer que les assistants rĂ©agiraient mieux devant la mise en vente dâune vache que devant celle dâune armoire.
Il faudrait agir vite si par malheur quelque traĂźtre ou idiot osait proposer une enchĂšre ! On nâaurait quâĂ laisser faire aux femmes ! Mieux que les hommes, elles avaient Ă lâoccasion montrĂ© une ardeur farouche en pareil cas. [âŠ] Combien de paysans dans la cour jusquâĂ prĂ©sent ? deux cents ? trois cents ? Il en arrivait toujours. » La foule rĂ©ussit Ă dissuader les Ă©ventuels acquĂ©reurs : câĂ©tait Abgrall, qui parlait aux gens en breton. JusquâĂ quand se laisseraient-ils traiter en esclaves ? Ils nâavaient rien Ă voir avec les franquillons ! La Bretagne aux Bretons !
- A la porte, lâhuissier ! Lâhuissier Ă©tait allĂ© se cacher entre deux tas de paille. Les femmes le cherchaient en promettant de lui enlever son pantalon[92]. »
Et la manifestation se termine par des Ă©clats de rire qui rĂ©pondent aux vaines mises en vente faites par lâhuissier finalement contraint de dĂ©clarer « que la vente nâaurait pas lieu faute dâacquĂ©reurs. » Certes le romancier donne une version triomphante de la lutte alors que de nombreux paysans ont tout perdu, mĂȘme la vie lors de ces ventes. MĂȘme si lâon sait que gendarmes et huissier rĂ©ussiront plus tard la saisie, le rire rabelaisien de lâassistance qui ridiculise lâhuissier fait du bien et utopise la revanche des petits sur lâargent.
AuprÚs des réfugiés espagnols : 1934-1939
MĂȘme si lâannĂ©e 1935 est celle dâun travail littĂ©raire considĂ©rable car Louis Guilloux est absorbĂ© par la rĂ©daction laborieuse de son Ćuvre maĂźtresse, Le Sang noir, il reste engagĂ© dans lâaction sociale et, dans ses Carnets, note au dĂ©but de lâannĂ©e : « Une dizaine de rĂ©fugiĂ©s espagnols, les uns venant des Asturies, les autres de Barcelone, sont arrivĂ©s en ville. Nous avons trouvĂ© trois dâentre eux Ă la Maison du Peuple oĂč nous avions une rĂ©union de chĂŽmeurs »[93].
Bien avant la guerre civile espagnole (1936-1939) il sâintĂ©resse au sort des rĂ©fugiĂ©s qui ont commencĂ© dâaffluer Ă Saint-Brieuc Ă la suite de lâinsurrection des Asturies. Le gouvernement de centre-droit de la RĂ©publique espagnole a fait appel aux troupes dâAfrique du Nord commandĂ©es par Franco pour noyer dans le sang (4 000 morts et des milliers de malheureux sur les routes de lâexode) cette Commune espagnole. Avec la montĂ©e du fascisme et du nazisme, partout en Europe sâexacerbe la violence dont sont toujours victimes les plus dĂ©munis[94].
EngagĂ© dans une large action au Secours Rouge, Ă Saint-Brieuc, Louis Guilloux est devenu un acteur important de lâaction en faveur des chĂŽmeurs et des exilĂ©s, victimes des consĂ©quences de la crise Ă©conomique et de toutes les dictatures, et il sait se dĂ©fier de tout nationalisme. Il lutte sans esprit de chapelle aussi bien aux cĂŽtĂ©s de lâabbĂ© VallĂ©e et du pasteur Crespin que des communistes Pierre Petit et Yves Flouriot.
Cet engagement est exprimĂ© de façon solennelle dans les Carnets en 1937 : « Aujourdâhui 7 septembre, je me suis mis en quĂȘte de la situation des rĂ©fugiĂ©s espagnols et dĂ©cide de mây intĂ©resser activement. ParallĂšlement aux notes que je consigne dans ces carnets, je ferai en sorte de tenir un journal de cette activitĂ©[95].»
Si lâhomme a le devoir de sâengager, lâĂ©crivain a celui de tĂ©moigner et les prochaines Ćuvres de Louis Guilloux seront les porte-voix de ces combats.
Câest la raison pour laquelle autant de pages des Carnets (p. 165-209 sans interruption) sont consacrĂ©es Ă la situation des rĂ©fugiĂ©s espagnols Ă Saint-Brieuc, aux conditions indignes dans lesquelles ils sont hĂ©bergĂ©s, aux discussions de Guilloux avec le PrĂ©fet pour quâon leur vienne en aide, Ă la lutte (vaine) pour empĂȘcher quâils ne soient renvoyĂ©s en Espagne.
Ă cette date, Louis Guilloux travaille dĂ©jĂ au grand roman que sera Le Jeu de patience, roman polyphonique dont la voix majeure sera celle du narrateur des MĂ©moires dâun Responsable. Le narrateur remonte le temps Ă partir de la mort de Pablo, Ă©vĂ©nement dĂ©clencheur du roman : « hier, 9 janvier, on a enterrĂ© Pablo »[96], rĂ©fugiĂ© espagnol arrivĂ© Ă Saint-Brieuc en 1934, mort le 7 janvier 1947 et ami emblĂ©matique du narrateur. Ainsi, toutes les notes des Carnets au jour le jour trouvent leur place dans le roman autour de lâhistoire de Pablo. Ce personnage permet de rendre compte Ă la fois de lâinsurrection dâOviedo, de la guerre dâEspagne, de lâengagement des Espagnols dans la Seconde Guerre mondiale auprĂšs des combattants français, sans oublier de magnifier leur hĂ©roĂŻsme.
Louis Guilloux et les dĂ©buts de lâOccupation
Lorsque la Seconde Guerre mondiale Ă©clate en Europe, Louis Guilloux est de longue date sensibilisĂ© aux risques de guerre et aux dangers de lâAllemagne nazie.
La signature du pacte de non-agression germano-soviĂ©tique le 23 aoĂ»t 1939, suivie une semaine plus tard de lâattaque de la Pologne, font basculer lâEurope et le monde dans une nouvelle guerre mondiale. Louis Guilloux qui a Ă©tĂ© un proche compagnon de route du Parti communiste français (PCF) est, sans doute comme la masse des Français et de nombreux militants communistes, frappĂ© de stupeur par la signature ce qui devient vite une entente entre Hitler et Staline. Or, Staline qui se voulait quelques mois plus tĂŽt le principal rempart contre le fascisme en Europe participe avec Hitler au dĂ©peçage de la Pologne. On ignore la rĂ©action prĂ©cise de Guilloux Ă ce Pacte qui facilite lâĂ©crasement en trois semaines de la Pologne. Dans ses Carnets, il signale lâĂ©vĂ©nement Ă la date du 23 aoĂ»t sans le moindre commentaire[97] Mais il y fait allusion indirectement le 8 septembre en Ă©voquant lâenterrement dâYves Flouriot, le secrĂ©taire politique du PCF des CĂŽtes-du-Nord (actuelles CĂŽtes-dâArmor) : « Quâa-t-il pensĂ©, sâil pensait encore quelque chose dans les derniers temps, du revirement de Moscou ? Il avait tant cru Ă Moscou, Ă Staline, au communisme. [âŠ] Je voudrais savoir quâon ne lui a rien dit sur les Ă©vĂ©nements »[98]. Le 30 aoĂ»t, Louis Guilloux est rentrĂ© de Paris Ă Saint-Brieuc et il a repris ses permanences au ComitĂ© dâaccueil des Ă©vacuĂ©s et rĂ©fugiĂ©s[99]. Puis, il sâest Ă nouveau mobilisĂ© lors du gigantesque exode de mai et juin 1940 qui amĂšne des centaines de milliers de rĂ©fugiĂ©s dans la rĂ©gion.
PrĂ©sent Ă Saint-Brieuc lors de lâarrivĂ©e de la Wehrmacht triomphante dans lâaprĂšs-midi du 18 juin 1940, Louis Guilloux assiste impuissant Ă lâinstallation de lâarmĂ©e et de lâadministration militaire allemandes vivant comme des millions de Français le grand trauma de la DĂ©faite et de lâeffondrement de la TroisiĂšme RĂ©publique. Selon son tĂ©moignage recueilli par lâhistorien Jean-Pierre Rioux le 17 novembre 1978, dans les jours prĂ©cĂ©dents il aurait songĂ© Ă sâembarquer au port du LĂ©guĂ© pour lâAngleterre mais ce dĂ©part nâa pas eu lieu. Les Carnets publiĂ©s sâarrĂȘtent Ă la date du 13 juin 1940 pour ne reprendre que le 17 janvier 1941 ; les annĂ©es 1941 et 1942 ne comptent que sept et cinq pages, ce qui signifie que lâĂ©crivain nâa pas souhaitĂ© sâappesantir sur cette pĂ©riode de sa vie. Tout au plus note-t-il en 1941 : « Jâai achevĂ© mon livre (8 mars). Le Pain des rĂȘves »[100] qui sera publiĂ© en 1942 et obtiendra le Prix populiste. DĂšs lors, lâĂ©crivain et sa famille -- il Ă©voque dans ses Carnets les ennuis de santĂ© de ses parents -- sont condamnĂ©s Ă subir lâOrdre nouveau nazi et les conditions dâune occupation militaire avec son lot de vexations et de pĂ©nuries croissantes dans une ville appartenant Ă la zone cĂŽtiĂšre interdite, ce qui signifie que les contrĂŽles et la rĂ©pression de lâoccupant ne cessent de se durcir jusquâen 1944.
LâĂ©crivain qui vit de sa plume continue de publier chez Gallimard, Ă la NRF, et dans un journal breton soumis Ă la censure vichyste et allemande. En 1941 (date non prĂ©cisĂ©e mais aprĂšs lâinvasion de lâURSS par le TroisiĂšme Reich), Louis Guilloux a des Ă©changes Ă©pistolaires avec Jean Paulhan, ancien directeur de la NRF dĂ©sormais dirigĂ©e par Pierre Drieu La Rochelle, passĂ© du communisme au fascisme et fervent partisan de la collaboration avec lâoccupant. La question de la responsabilitĂ© de lâĂ©crivain est posĂ©e par Paulhan (p. 270-271) : faut-il Ă©crire et publier dans des revues collaborationnistes comme ComĆdia et donc faire le jeu de lâoccupant ou faut-il se taire comme lâa fait Jean GuĂ©henno ?
Comme de nombreux Ă©crivains, Louis Guilloux fait le choix de publier Le Pain des rĂȘves dont il a donnĂ© deux extraits Ă la NRF en fĂ©vrier et juillet 1942. Si ce rĂ©cit dâenfance reçoit un bon accueil critique[101], Guilloux nâest pas en mesure dâobtenir le Prix Goncourt, finalement dĂ©cernĂ© Ă Marc Bernard, en raison de son profil politique, car, selon GisĂšle Sapiro, « un Louis Guilloux, une Elsa Triolet, plus marquĂ©s politiquement dans le sillage de la gauche antifasciste et surtout du communisme, avaient peu de chances dâĂȘtre dĂ©signĂ©s dans la conjoncture politique. Marc Bernard, lui, a rompu avec ses engagements socialistes depuis 1940[102].» Lâhistorien amĂ©ricain, Herbert R. Lottman cite lâĂ©crivain briochin parmi ceux qui participĂšrent Ă la NRF « juste une fois ou deux, mais suffisamment pour donner une apparence de lĂ©gitimitĂ© Ă lâentreprise de Drieu » [103]. On peut opposer Ă ce point de vue sĂ©vĂšre celui de Pascal Ory et Jean-François Sirinelli qui ont une tout autre approche des mĂȘmes faits : « Abetz parvient ainsi Ă convaincre son ami Drieu la Rochelle de prendre la tĂȘte dâune Nouvelle Revue française rĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e. (âŠ) Le contenu des premiers sommaires fait sâĂ©loigner ceux qui, tels Paul Ăluard, AndrĂ© Gide ou Louis Guilloux, avaient dâabord acceptĂ© dây figurer, et le public non collaborationniste boude[104].»
Les Contributions de Guilloux Ă la presse collaborationniste se rĂ©sument Ă deux revues parisiennes (deux extraits du Pain des rĂȘves Ă la NRF et deux textes littĂ©raires Ă Comoedia[105]) et Ă un quotidien breton La Bretagne, qui a publiĂ© cinq extraits du Pain des rĂȘves et un article sur la lecture entre mai et juin 1941. Ce journal est pris en charge par Yann FouĂ©rĂ© qui se prĂ©tend rĂ©gionaliste mais qui est liĂ©, en rĂ©alitĂ©, aux nationalistes bretons du Parti national breton (PNB) et de lâEmsav, le mouvement politique qui collabore ouvertement avec lâoccupant. SâintĂ©ressant depuis quelques annĂ©es à « la question bretonne », surtout Ă sa dimension culturelle, notamment en raison de ses relations amicales avec François EliĂšs, professeur au lycĂ©e de Saint-Brieuc, et avec Florian Le Roy qui sâinvestissent dans la mise en place dâinstitutions bretonnes, en rĂ©alitĂ© contrĂŽlĂ©es par lâoccupant (Radio-Rennes), Louis Guilloux paraĂźt un temps suivre dâun bon Ćil les initiatives de celtisants et Ă©crivains bretons fort engagĂ©s dans lâEmsav. Ăcrivain reconnu, Louis Guilloux est sollicitĂ© par eux au dĂ©but de lâannĂ©e 1941 pour la mise en place de lâInstitut celtique de Bretagne (ICB). Il participe aux manifestations culturelles organisĂ©es Ă Rennes du 20 au 25 octobre 1941[106]. Louis Guilloux est le rapporteur de la commission « Arts, presse, sociĂ©tĂ©s culturelles » qui concerne « les lettres » lors de ces travaux prĂ©paratoires Ă lâICB mais on ignore sâil a participĂ© Ă dâautres activitĂ©s les mois suivants. Ce qui est certain câest quâil nâest pas prĂ©sent lorsque lâICB est officiellement lancĂ© Ă Nantes en mai 1942 (vote des statuts).
En contact avec des pionniers de la résistance
Baignant dans les ambivalences du dĂ©but des AnnĂ©es noires, Louis Guilloux est dans le mĂȘme temps en contact avec dâautres hommes avec lesquels il a militĂ© dans les annĂ©es 1930 et qui entrent rapidement en rĂ©sistance Ă Saint-Brieuc. Sans y participer, on peut raisonnablement penser quâil est au courant de leurs intentions antiallemandes, voire de leurs activitĂ©s, car il les reçoit chez lui ou les croise en ville. Tout dâabord, il connait fort bien le Briochin Pierre Petit, responsable de la CGT et militant communiste. Or, dĂšs lâautomne 1940, Pierre Petit rĂ©organise avec Pierre Le Queinec, le PCF clandestin Ă Saint-Brieuc et dans les CĂŽtes-du-Nord. Pierre Le Queinec est le futur adjoint de Charles Tillon, le chef des FTP la branche armĂ©e du Front national pour la libĂ©ration et lâindĂ©pendance de la France, ce mouvement de rĂ©sistance crĂ©Ă© par le PCF en mai 1941. LâHumanitĂ© clandestine est signalĂ©e Ă plusieurs reprises Ă Saint-Brieuc Ă la fin 1940 et au dĂ©but de 1941. En outre, le couple Guilloux hĂ©berge Ă partir de 1940 une jeune fille, HĂ©lĂšne Le Chevalier, et lâaide Ă prĂ©parer son baccalaurĂ©at (en français et en anglais)[107]. La jeune fille de Kergrist-MoĂ«lou (centre-Bretagne) va rapidement animer des comitĂ©s fĂ©minins crĂ©Ă©s par le PCF qui distribuent des tracts. En 1941 et 1942, elle participe Ă des comitĂ©s du Secours populaire qui aident les familles de dĂ©tenus communistes emprisonnĂ©s Ă Guingamp et Ă Saint-Brieuc Ă la suite de rafles au printemps 1941, en 1942 et surtout en 1943. Elle-mĂȘme est arrĂȘtĂ©e par la police de Vichy le 19 mars 1943 au moment oĂč Saint-Brieuc est secouĂ© par plusieurs attentats des Francs-tireurs et partisans. Louis Guilloux est inquiĂ©tĂ© car il sâest portĂ© garant de la jeune fille, ce qui lui vaut de voir sa maison perquisitionnĂ©e et dâĂȘtre interrogĂ© par la police française[108]. EmprisonnĂ©e plusieurs mois, HĂ©lĂšne Le Chevalier nâest libĂ©rĂ©e quâĂ NoĂ«l 1943 et lâune de ses premiĂšres visites est pour les Guilloux. Elle considĂšre que lâintervention de lâĂ©crivain lui a Ă©vitĂ© la dĂ©portation. Elle apparaĂźt sous les traits de Monique dans Le Jeu de patience, livre dans lequel son arrestation est Ă©voquĂ©e[109].
Mais dans un autre registre, Louis Guilloux a rencontrĂ© dĂšs janvier 1941 lâabbĂ© VallĂ©e de passage Ă Saint-Brieuc qui avait participĂ© activement Ă lâaccueil des rĂ©fugiĂ©s espagnols. Prisonnier de guerre, il vient juste dâĂȘtre libĂ©rĂ©. En fĂ©vrier, lâabbĂ© VallĂ©e lance une feuille clandestine destinĂ©e au clergĂ©, Veritas, qui dĂ©nonce lâappui de la hiĂ©rarchie catholique au rĂ©gime de Vichy et Ă la politique de collaboration dâĂtat du marĂ©chal PĂ©tain. LâabbĂ© VallĂ©e Ă©voqua-t-il ses projets avec Guilloux ? Le 25 aoĂ»t 1941, Veritas est distribuĂ© Ă Saint-Brieuc. Le numĂ©ro 2, conservĂ©, est une « RĂ©ponse au cardinal Baudrillart » qui a appelĂ© Ă soutenir PĂ©tain et sa politique aprĂšs Montoire, texte signĂ© « Un catholique français ». Un 3e numĂ©ro paraĂźt le 18 octobre 1941. Mais lâabbĂ© VallĂ©e est arrĂȘtĂ© le 6 fĂ©vrier 1942, internĂ© Ă Fresnes puis dĂ©portĂ© dans des prisons et des camps en Allemagne. CondamnĂ© Ă cinq ans de travaux forcĂ©s en octobre 1943, il meurt dâĂ©puisement Ă Mauthausen le 30 mars 1945. Louis Guilloux connaĂźt bien lâabbĂ© ChĂ©ruel, professeur de philosophie Ă Saint-Brieuc, ami de lâabbĂ© VallĂ©e, futur dirigeant du mouvement de rĂ©sistance DĂ©fense de la France (DF) et membre du CDL. Il a probablement Ă©tĂ© informĂ© de cette initiative de journal clandestin. Câest aussi le cas du pasteur Yves Crespin de Saint-Brieuc qui a eu des ennuis avec les Allemands dĂšs 1941, est arrĂȘtĂ© en 1943 et dĂ©portĂ© en 1944. Dans ses Carnets[110] et dans Le Jeu de patience, sâappuyant sur le rĂ©cit de lâĂ©pouse du pasteur Crespin, lâĂ©crivain relate dans des pages Ă©mouvantes le dĂ©part de CompiĂšgne du pasteur et du Dr Hansen de Saint-Brieuc vers les camps de dĂ©portation.
Mais Louis Guilloux nâest pas seulement un spectateur et un chroniqueur de lâOccupation, il participe Ă lâunification des mouvements de rĂ©sistance des CĂŽtes-du-Nord. Utilisant ses contacts dans ces milieux, Ă PĂąques 1943 il contribue Ă mettre en relation la rĂ©sistance communiste (Pierre Petit) et la rĂ©sistance catholique (lâabbĂ© ChĂ©ruel) en gestation Ă DF, puis avec les socialistes de LibĂ©ration-Nord qui sont chargĂ©s dans la rĂ©gion de mettre sur pied lâArmĂ©e secrĂšte (AS) Ă partir de lâĂ©tĂ© 1943. Deux rĂ©unions des responsables briochins des mouvements se sont tenues chez lui[111]. Ce qui nâĂ©tait pas sans risques quand on sait que plusieurs dâentre eux sont arrĂȘtĂ©s en 1944, des responsables de LibĂ©-Nord, le chef de lâAS Adolphe VallĂ©e et les chefs briochins de DF, lâabbĂ© Fleury et les MĂ©tairie pĂšre et fils, fusillĂ©s le 10 juillet prĂšs de Guingamp avec 14 autres patriotes. Guilloux est aussi en contact avec Christian le Guern, le responsable de la CGT, futur membre du CDL. Ă la LibĂ©ration, Louis Guilloux appartient au FN dirigĂ© dans le dĂ©partement par lâinstituteur socialiste Jean Devienne alors proche du PCF, membre actif du CDL. De mĂȘme, en 1944, quand un ComitĂ© dĂ©partemental de libĂ©ration (CDL) est constituĂ© sous la prĂ©sidence de lâancien dĂ©putĂ© Henri Avril (radical-socialiste), Tonton, qui apparaĂźt dans Les Carnets comme dans Le Jeu de patience, il est probable que les Guilloux ont prĂȘtĂ© leur maison pour au moins une rĂ©union clandestine de cet organisme de direction de la RĂ©sistance. On sait que la premiĂšre rĂ©union sâest tenue dans la sacristie de lâĂ©glise Saint-Michel, tout prĂšs de chez Louis Guilloux, et que lâabbĂ© ChĂ©ruel a Ă©tĂ© chargĂ© avec lâancien dĂ©putĂ© socialiste finistĂ©rien Tanguy Prigent, responsable interrĂ©gional de LibĂ©-Nord, de la mise en place des CDL dans lâOuest de la France. Deux versions littĂ©raires diffĂ©rentes, exhumĂ©es des archives Guilloux par MichĂšle Touret et Sylvie Golvet, qui racontent une rĂ©union de membres du CDL chez le narrateur rendent cette hypothĂšse plausible mais sans aucune certitude[112].
Louis Guilloux, interprÚte des Américains (août - octobre 1944)
Ses Carnets ainsi que O.K., Joe ! publiĂ© en 1976 montrent un Louis Guilloux trĂšs attentif aux derniers mois de lâOccupation Ă Saint-Brieuc ainsi quâaux journĂ©es de la libĂ©ration de la ville au dĂ©but aoĂ»t 1944. Pour les historiens, ces Ă©crits sont irremplaçables Ă un moment oĂč le pouvoir dâĂtat (prĂ©fet, sous-prĂ©fets) et le pouvoir municipal (maires) changent de mains. Dans ses Carnets, lâĂ©crivain rend compte de la montĂ©e de la rĂ©pression policiĂšre et militaire allemande, de la peur, des pĂ©nuries alimentaires, des rĂ©quisitions de main-dâĆuvre pour tenter dâachever le Mur de lâAtlantique avant le dĂ©barquement. Lui-mĂȘme a Ă©tĂ© convoquĂ© sur les chantiers. Il note les nombreux attentats et sabotages de la rĂ©sistance dans la rĂ©gion briochine mais aussi les exĂ©cutions sommaires de collaborateurs prĂ©sumĂ©s : une quinzaine Ă Saint-Brieuc avant la libĂ©ration effective de la ville du 4 au 6 aoĂ»t 1944, le nombre le plus Ă©levĂ© des villes de Bretagne sur un total de 243 dans les CĂŽtes-du-Nord entre 1943 et 1945. Louis Guilloux signale lâinstallation des nouveaux pouvoirs le 5 aoĂ»t, le prĂ©fet Gamblin et le nouveau maire de Saint-Brieuc lâindustriel Charles Royer, membre du CDL, avant mĂȘme lâarrivĂ©e des troupes amĂ©ricaines le 6 aoĂ»t. Dans son interview Ă lâhistorien Jean-Pierre Rioux, Louis Guilloux indiquait quâon aurait pensĂ© Ă lui pour ĂȘtre le maire de la LibĂ©ration mais il ne le dit pas dans ses Carnets et on nâen trouve pas trace. Il dĂ©crit les scĂšnes de lâĂ©puration, lâarrestation des suspects et surtout les tontes de femmes qui le choquent avec son cĂ©lĂšbre portrait de la tondue. Ce type dâaction est assumĂ© par les responsables de la rĂ©sistance, notamment du FN qui affiche des photos de femmes tondues Ă sa permanence, et sâinscrit dans ce que lâon appelle alors « le chĂątiment des traĂźtres ». Les Ă©crits de Guilloux restituent bien le climat dâeuphorie mais aussi de deuil, car on ouvre les fosses des torturĂ©s et fusillĂ©s, qui marquent ces journĂ©es de la LibĂ©ration.
Le 7 aoĂ»t, Louis Guilloux qui est allĂ© rĂ©cupĂ©rer son brassard du FN devient lâinterprĂšte officiel de la mairie de Saint-Brieuc auprĂšs des troupes amĂ©ricaines. Câest cette fonction et cette expĂ©rience qui nous donnent une plongĂ©e inĂ©dite au sein de lâarmĂ©e amĂ©ricaine libĂ©ratrice qui Ă©tale sa puissance matĂ©rielle mais aussi son racisme. LâĂ©crivain briochin suit lâachĂšvement de la libĂ©ration de la Bretagne, sauf les deux poches de Lorient et de Saint-Nazaire, et notamment prĂšs de Brest, le port du Ponant qui subit un siĂšge de 43 jours en aoĂ»t-septembre 1944. Ces quelques semaines passĂ©es comme interprĂšte dâofficiers amĂ©ricains sont restituĂ©es dans O.K., Joe ! Guilloux fait le rĂ©cit des enquĂȘtes menĂ©es auprĂšs de la population bretonne, des affaires mettant en cause des exactions, des viols ou des crimes commis par des soldats amĂ©ricains. Les prĂ©venus sont souvent des Noirs ; ils sont gĂ©nĂ©ralement lourdement condamnĂ©s, Ă la peine de mort par pendaison pour le soldat James Hendrick dans le cas de lâaffaire Bignon de Plumaudan (CĂŽtes-du-Nord). Pour son ouvrage LâInterprĂšte[113], lâuniversitaire amĂ©ricaine Alice Kaplan a identifiĂ© dans les archives amĂ©ricaines les deux officiers avec lesquels Louis Guilloux a menĂ© ces enquĂȘtes judiciaires, les lieutenants Joseph Greene et Ralph Fogarthy (Stone et Bradford dans le texte de Guilloux). Selon des travaux rĂ©cents, en France, 21 soldats dont 18 Noirs ont Ă©tĂ© condamnĂ©s Ă mort pour violences sexuelles et viols par des Cours martiales amĂ©ricaines et pendus en public, dont deux en Bretagne. Pour comprendre ces chiffres, il faut savoir que les soldats Noirs Ă©taient relĂ©guĂ©s Ă l'intendance, donc plus en contact avec les civils, tandis que les Blancs progressaient vers l'Est et avaient moins de chances d'ĂȘtre identifiĂ©s par des victimes en cas d'agression. A cela s'ajoute le biais du racisme qui imprĂ©gnait la sociĂ©tĂ© amĂ©ricaine de l'Ă©poque. AprĂšs le siĂšge de Brest, Louis Guilloux suit lâarmĂ©e amĂ©ricaine quelques jours dans le Nord de la France mais il doit rentrer pour des raisons de santĂ©. Pour lâĂ©crivain, une nouvelle vie commence Ă Saint-Brieuc et Ă Paris.
Le Jeu de patience : prix Renaudot 1949
Le Jeu de patience[114] est publié en 1949 et obtient le prix Renaudot en décembre 1949.
Cette vaste fresque embrassant prĂšs de 40 ans de la ville natale de l'auteur, jamais nommĂ©e, se dĂ©veloppe sur plus de 800 pages, rĂ©parties en 36 sĂ©quences et comprend environ 300 fragments de longueur extrĂȘmement variable. Avec Le Jeu de patience, lâĆuvre de Louis Guilloux subit une mutation importante. En effet, contrairement aux romans prĂ©cĂ©dents assez linĂ©aires, ce roman se dĂ©veloppe en une composition « kalĂ©idoscopique » sous le prĂ©texte du travail de crĂ©ation dâun Ă©crivain-narrateur. Cette fiction ouvertement discontinue synthĂ©tise des thĂšmes des romans prĂ©cĂ©dents et amorce une recherche de nouvelles pratiques d'Ă©criture que l'auteur explorera jusqu'Ă son dernier roman.
Le Jeu de patience se prĂ©sente comme le journal dâune annĂ©e dâĂ©criture (du 8 janvier 1947 au 9 janvier 1948) pendant laquelle le narrateur orchestre trois nappes historiques : la Chronique du Temps passĂ© (de 1912 Ă 1919), le journal dâun responsable (de 1932 Ă 1940) et la Chronique du Temps prĂ©sent (du 25 fĂ©vrier 1943 au 11 novembre 1943). Cette annĂ©e dâĂ©criture permet donc une rĂ©appropriation du passĂ© de la ville et de son passĂ© de militant, ainsi que sa mise en perspective par rapport au temps de lâĂ©criture. Car cette annĂ©e 1947 est une pĂ©riode de deuil : celle de la mort du personnage de Pablo, cet ancien milicien espagnol rĂ©fugiĂ© dans sa ville aprĂšs la dĂ©faite des rĂ©publicains espagnols. Pablo Ă©tait devenu un ami proche du narrateur.
Le narrateur, un homme d'une cinquantaine d'annĂ©es est caractĂ©risĂ© principalement par sa rĂ©flexion sur le sens de sa vie et de celle de ses personnages. Il plonge le lecteur au cĆur de sa crĂ©ation en une vaste mise en abyme, joue un rĂŽle de rĂ©gisseur du texte tout en livrant ses rĂ©flexions sur les limites d'une chronique face aux Ă©vĂ©nements tragiques de l'Histoire. Il se laisse porter par ses souvenirs et par tous les textes Ă©crits qu'il redĂ©couvre, qu'ils soient de lui ou de nombreux autres scripteurs. Les types de textes sont variĂ©s : nouvelles, lettres, articles de journaux, simples notes, extraits de romans, etc. Les ruptures dans la chronologie sont incessantes. Cependant, grĂące aux nombreuses analogies de situations et de circonstances, ainsi quâĂ la reprise des nombreux rĂ©cits Ă©clatĂ©s en plusieurs fragments, grĂące aussi au retour des personnages, le narrateur parvient Ă donner une forme d'unitĂ© Ă ce roman extrĂȘmement fragmentĂ© qui rĂ©clame du lecteur une lecture patiente et exigeante.
Dans ce roman fleuve, lâunivers thĂ©matique est particuliĂšrement riche : Ă©vocation de la vie traditionnelle d'autrefois et chronique sociale, action militante, conflits sociaux et Ă©vĂ©nements historiques (notamment l'accueil de rĂ©fugiĂ©s espagnols), histoires familiales ou de couples, lĂ©gendes et mythes, anecdotes locales, etc. La Seconde Guerre mondiale constitue un des thĂšmes majeurs et surtout un des plus structurants. Le roman offre une incroyable galerie de personnages extrĂȘmement nombreux (plus de 300). Ils apparaissent tantĂŽt comme de simples silhouettes tantĂŽt comme des personnages complexes, Ă©clairĂ©s le plus souvent sous l'angle de leurs contradictions. Le narrateur souligne sans cesse le tragique de leur destin aux prises avec l'Histoire. Ainsi ce roman foisonnant, prĂ©curseur de textes aux structures Ă©clatĂ©es, prĂ©sente une rĂ©alitĂ© trĂšs ancrĂ©e dans le quotidien d'une petite ville en la confrontant au tragique de l'Histoire. VĂ©ritable somme, ce roman entraĂźne le lecteur dans une vaste rĂ©flexion sur le temps qui semble relier par sa permanence toutes les strates du passĂ© au prĂ©sent du narrateur et aux affres de son Ă©criture du roman lui-mĂȘme.
1950-1980 : Ă©crire au temps du Nouveau Roman
Quand dans les annĂ©es 1950 aux Ăditions de Minuit se rassemblent des auteurs aussi diffĂ©rents que Beckett, Nathalie Sarraute, Robbe-Grillet ou Claude Simon, que lâon range par commoditĂ© sous lâĂ©tiquette du « Nouveau Roman », Guilloux se tient, comme souvent, Ă une distance lĂ©gĂšrement ironique de cette manifestation paroxystique dâune « crise du roman » quâil a finalement toujours connue. Le romancier accorde depuis ses dĂ©buts un intĂ©rĂȘt profond aux questions dâĂ©criture. Pour chaque Ćuvre il sâest attachĂ© Ă trouver la forme en fonction du sujet. Guilloux a mis au centre de ses prĂ©occupations la question du point de vue et celle de la structure narrative. Enfin, les jeux de mise en abyme qui apparaissent comme une des caractĂ©ristiques des Nouveaux Romanciers sont loin de lui ĂȘtre Ă©trangers. Lecteur assidu du Journal des Faux-Monnayeurs de Gide, il multiplie dans sa production romanesque, depuis au moins Le Jeu de patience, les reprĂ©sentations de lâĂ©criture et de la lecture. Mais Guilloux se refuse Ă tout discours thĂ©orique qui risquerait dâĂȘtre doctrinaire. Il prĂ©fĂšre lâimage de lâartisan Ă celle du thĂ©oricien. Les questions de mĂ©tier importent et si le romancier se met en scĂšne en homo faber, en artisan, câest moins par fidĂ©litĂ© (rĂ©elle) Ă ses origines que pour montrer que chaque Ćuvre rencontre des difficultĂ©s techniques quâil va lui falloir rĂ©soudre avec des moyens qui lui sont propres. Câest ainsi quâil continue dâexplorer lâunivers du roman, sâautorisant des clins dâĆil amusĂ©s Ă ce nouveau groupe qui prophĂ©tise la fin du personnage, de lâintrigue et, en dĂ©finitive, dâun genre entrĂ© dĂšs le dĂ©but du siĂšcle dans « lâĂšre du soupçon ».
Au dĂ©but des annĂ©es 1950, Guilloux passe davantage de temps Ă Paris. Il vient de rencontrer par lâintermĂ©diaire de Camus, une romanciĂšre italienne, Liliana Magrini, liaison Ă lâorigine dâune correspondance nourrie conservĂ©e aux archives de Saint-Brieuc. Il se rend alors souvent Ă Venise, ville qui sert de cadre Ă un petit roman fantastique, Parpagnacco, paru en juin 1954 chez Gallimard, aprĂšs une parution en deux livraisons Ă la NRF entre janvier et avril. Ce texte surprend tous les lecteurs de Guilloux, tant il semble en dĂ©calage avec la production antĂ©rieure de Guilloux.
« « Le narrateur, qui sâexprime en premiĂšre personne, est un marin danois, Erick Ericksen, provisoirement Ă terre (âpuisque le Motherland est momentanĂ©ment Ă lâancreâ). DâIrlande, il se remĂ©more un Ă©pisode de sa vie : au cours dâune escale Ă Venise, âil y a longtemps de celaâ (p. 19), il a achetĂ© dans une boutique des marionnettes, et briĂšvement rencontrĂ© une jeune fille dont il a imaginĂ© quâelle Ă©tait prisonniĂšre, sĂ©questrĂ©e. Il la recherche â Ă vrai dire, sans mĂ©thode ni ardeur excessive â fait diverses rencontres qui sont autant de leurres, et se retrouve seul, son ami Patrick ayant Ă©tĂ© tuĂ©, responsable de son bateau et de son Ă©quipage, mais dĂ©sespĂ©rĂ©[115]. »
Conte fantastique avec rĂ©cit enchĂąssĂ©, roman de marins ou dâaventures, rĂ©cit initiatique, (voir lâanalyse dâAnne Roche), ce court roman explore les diverses facettes dâun genre pluriel. La rĂ©ception mĂ©diatique dans son ensemble montre lâembarras devant ce texte dĂ©routant[116] qui semble Ă©loignĂ© de la sensibilitĂ© sociale de lâauteur.
Louis Guilloux nâachĂšve pas le roman auquel il travaille depuis 1951, La DĂ©livrance. Une seule partie, « LâĂ©vasion », est publiĂ©e sous le titre Labyrinthe dâoctobre 1952 Ă janvier 1953 dans la revue La Table Ronde. On y retrouve les thĂšmes chers Ă lâauteur de lâĂ©ternel emprisonnement de lâhomme, de la faute, de la culpabilitĂ©. Que les questions existentielles soient encore une fois traduites en termes dâespace, comme le titre finalement retenu lâindique, donne au roman une facture trĂšs contemporaine et renvoie Ă lâunivers de Kafka[117]. Enfin, on dĂ©couvre dans ce court texte un personnage haut en couleur, celui de GrĂ©goire Cantin, anarchiste, ancien Ă©goutier, boiteux atteint dâemphysĂšme qui offre fraternellement au narrateur venant de sâĂ©vader de prison la nuit de NoĂ«l une cachette inattendue sous la forme dâune espĂšce de terrier amĂ©nagĂ© dans la forĂȘt.
Au cours de lâĂ©tĂ© 1953, la rĂ©Ă©dition de La Maison du peuple et de Compagnons rĂ©unis en un seul volume avec une prĂ©face dâAlbert Camus[118] est saluĂ©e par une presse unanime[119].
Dans Les Batailles perdues, roman entrepris depuis 1954 et paru en 1960, Guilloux participe Ă sa façon au dĂ©bat instaurĂ© par ceux qui imaginent la mort dĂ©finitive du roman dit balzacien. Ce gros roman de 600 pages, qui se dĂ©roule entre Paris et la Bretagne, multiplie, comme le titre lâindique, les rĂ©fĂ©rences Ă lâauteur de La ComĂ©die humaine[120]. La longue description de Pontivy dĂšs le dĂ©but du roman, le portrait de Nicolas Mesker constituent de rĂ©jouissants pastiches de Balzac. Enfin tous les personnages se croisent dans une pension de famille du quartier latin, tenue par lâavatar moderne (et plus humain) de maman Vauquer, maman Furet. Dans cette fresque romanesque aux personnages nombreux, journalistes ou Ă©crivains pour la plupart, le romancier renoue avec son intĂ©rĂȘt pour lâHistoire en rapportant les grands Ă©vĂ©nements du Front populaire. Le rĂ©cit se termine quand la guerre civile espagnole commence, trois des personnages principaux du roman se proposant de rejoindre les Brigades internationales. Les batailles sont perdues mais dit Guilloux dans un entretien au Petit bleu des CĂŽtes du Nord, « il faut livrer la bataille, toujours, mĂȘme si lâon croit quâelle sera perdue »[121]. Il semblerait bien que ce soit aussi la bataille du roman que Guilloux livre lĂ . Alexandra Vasic, dans sa thĂšse LâĆuvre de Louis Guilloux, le romanesque en jeu [122], dĂ©crit ce roman comme un « feu de joie de la littĂ©rature populaire » envisagĂ©e sous tous ses aspects, la distance critique instaurĂ©e par les jeux de pastiche et de parodie de tous les codes du roman feuilleton opĂ©rant le double mouvement de « cĂ©lĂ©bration et de mise Ă mort du romanesque »[123]. Guilloux sâinscrit avec ostentation dans la tradition dâun genre et rend hommage aux plaisirs de lecture quâil offre. Mais il met en lumiĂšre sa complexitĂ© et sa modernitĂ© apparaĂźt dans les jeux spĂ©culaires et les rĂ©fĂ©rences intertextuelles qui font de ce texte-tĂ©moignage dâune Ă©poque (lâutilisation de la presse et des journaux a jouĂ© un rĂŽle important dans lâĂ©laboration du roman[124] un concentrĂ© des questions que pose et se pose le romancier sur lâĂ©criture du roman).
Quand La Confrontation paraĂźt en 1968, il nâĂ©chappe pas Ă la critique que ce court texte, qui joue avec la structure de lâenquĂȘte et les codes du roman policier, rejoint les pratiques de certains auteurs du Nouveau Roman qui ont eux-mĂȘmes subverti ce modĂšle. Le personnage narrateur a Ă©tĂ© chargĂ© par un mystĂ©rieux commanditaire de retrouver un homme disparu afin de lui remettre un trĂ©sor. Dans un rĂ©cit-confession, il sâadresse Ă celui qui lui a confiĂ© cette enquĂȘte qui a pris la tournure dâune quĂȘte existentielle. La parentĂ© avec le Nouveau Roman, signalĂ©e avec ironie par le personnage qui dit sâĂȘtre « mĂȘme mis au Nouveau Roman pour ne pas se rouiller tout Ă fait »[125], apparaĂźt aussi dans le « brouillage de lâinstance Ă©nonciative, la remise en cause du personnage, et [âŠ] la question de lâidentitĂ© qui est au centre du propos »[126]. Mais si la presse de lâĂ©poque souligne les points de convergence avec cette mouvance, on veut aussi montrer Ă quel point lâart de Guilloux sâen distingue : la lisibilitĂ© du rĂ©cit autant que son profond humanisme, la dimension sociale, le rapprochement avec La Chute de Camus sont les arguments pour replacer lâĆuvre « dans la continuitĂ© de la production romanesque antĂ©rieure de Guilloux[127]. »
En 1976, Guilloux fait paraitre deux rĂ©cits chez Gallimard : Salido et OK., Joe ! Pour les deux textes, il sâinspire de situations dont il a Ă©tĂ© tĂ©moin : lâhistoire dâun rĂ©publicain espagnol qui souhaite rejoindre lâURSS[128] , et son expĂ©rience de traducteur auprĂšs de lâarmĂ©e amĂ©ricaine Ă la LibĂ©ration qui le conduit Ă assister aux procĂšs des soldats amĂ©ricains accusĂ©s de viols et de constater la diffĂ©rence de traitement entre soldats blancs et soldats noirs. OK., Joe ! est Ă lâorigine du travail de lâhistorienne amĂ©ricaine Alice Kaplan, LâInterprĂšte (2010) qui a menĂ© lâenquĂȘte sur les traces de Louis Guilloux. Ce texte bĂ©nĂ©ficie Ă©galement dâune Ă©dition critique de Sylvie Golvet et MichĂšle Touret, OK., Joe !, le dossier dâune Ćuvre, parue aux PUR en 2016, avec une prĂ©face de Christian Bougeard.
Une derniĂšre fiction compte dans lâĆuvre de Guilloux : il sâagit du mince Coco perdu, paru en 1978, qui se dĂ©finit lui-mĂȘme comme « Essai de voix ». Le texte est saluĂ© par une presse nombreuse dans une pĂ©riode oĂč lâon peut Ă juste titre parler dâune « actualitĂ© Louis Guilloux »[129]. Cette expression est dâailleurs le titre donnĂ© au numĂ©ro zĂ©ro dâApproches rĂ©pertoire qui paraĂźt la mĂȘme annĂ©e. Lâadaptation par Guilloux des Thibault de Roger Martin du Gard en feuilleton pour la tĂ©lĂ©vision est dans les mĂ©moires[130], de mĂȘme que lâadaptation du Sang noir. La piĂšce Cripure, mise en scĂšne par Marcel MarĂ©chal pour la premiĂšre fois en 1966, est reprise Ă lâespace Cardin oĂč Guilloux est ovationnĂ©. Enfin, le Grand aigle dâor de la ville de Nice qui rĂ©compense lâensemble de lâĆuvre coĂŻncide avec la sortie de Coco perdu. Le texte est le long soliloque dâun petit retraitĂ©, qui a dĂ©posĂ© sa femme Ă la gare et espĂšre recevoir dâelle une lettre quâil lui a vu poster le matin de son dĂ©part. Au terme du rĂ©cit, il prend conscience quâaucun courrier nâarrivera et que Fafa ne reviendra pas. Tout se passe dans le cadre unique dâune petite ville de province oĂč le personnage va et vient entre sa petite « villa », la gare, et les restaurants du centre-ville, se souvient, croise des connaissances ou des inconnus, dĂ©sormais rĂ©duit Ă une solitude irrĂ©mĂ©diable. Le texte se caractĂ©rise par une attention prĂ©cise accordĂ©e Ă la parole et Ă la voix humaine: la voix de Coco, celles de tous ceux quâil rencontre, transforme cet « essai » de voix dâune apparente simplicitĂ© en une savante polyphonie, chaque voix Ă©tant elle-mĂȘme liĂ©e Ă des histoires « qui sont autant de potentialitĂ©s Ă lâĆuvre »[131]. Sabrina Parent souligne que « par bien des aspects, le dernier texte publiĂ© par Guilloux rĂ©vĂšle la modernitĂ© de lâauteur et tĂ©moigne de sa capacitĂ©, tout au long de sa production, Ă ĂȘtre de son temps. »[132].
En juin 1978, Bernard Pivot consacre un des grands entretiens dâApostrophes Ă Louis Guilloux, ce qui apparaĂźt Ă juste titre comme une consĂ©cration de lâĆuvre.
Il meurt le Ă Saint-Brieuc.
LâĂ©criture autobiographique
Pendant toutes ces annĂ©es, Guilloux multiplie Ă©galement la publication dâĂ©crits autobiographiques. Plusieurs parutions sâĂ©chelonnent de 1952 Ă 1984, permettant de dĂ©couvrir la personnalitĂ© de lâĂ©crivain, ses amitiĂ©s, ses lectures, sa façon de travailler.
Absent de Paris paraĂźt en 1952. « DĂ©diĂ© Ă Jean Grenier, alors professeur Ă Lille, il se prĂ©sente sous la forme dâune sĂ©rie de lettres adressĂ©es Ă son ami mais rassemblĂ©es de façon continue. » [133] « InterrogĂ© au mois dâaoĂ»t par Combat, il dĂ©finit ainsi son livre : « ce sera une succession de souvenirs, de rĂ©flexions, de vues sur les choses, les ĂȘtres et sur la vie profonde : un « fourre-tout en deux mots »[134]. « Dans Absent de Paris, Guilloux rapporte dâailleurs nombre de souvenirs quâil a en commun avec son ami : les voyages en Italie et en Autriche au dĂ©but des annĂ©es vingt, leurs conversations, les amis quâils ont connu Ă Saint-Brieuc : Georges Palante, Edmond Lambert, Max Jacob. » [135]. Saint-Brieuc occupe une bonne place dans ce livre, mais de nombreux sujets sont abordĂ©s, notamment son travail dâĂ©crivain, le foisonnement des anecdotes donnant, selon Yves Loisel, « au livre son cĂŽtĂ© extraordinairement humain »
Guilloux poursuit la veine autobiographique avec la rĂ©daction dâun livre de souvenirs au titre empruntĂ© Ă une vieille lĂ©gende bretonne, LâHerbe dâoubli. CommencĂ© au dĂ©but des annĂ©es 1960, poursuivi de maniĂšre plus intense en 1969 [136] ce rĂ©cit paraĂźt seulement en 1984.
La publication du premier tome de son journal, Carnets 1921-44 en 1978 Ă©claire Ă©galement la personnalitĂ© de lâĂ©crivain, sa pudeur, son sens du secret, son attention accordĂ©e aux autres autant que sa maniĂšre dâĂ©crire, avec les nombreuses scĂšnes prises sur le vif, constituant un ensemble de choses vues et entendues souvent Ă lâorigine de lâĂ©criture du romancier. Le travail effectuĂ© pour la publication des Carnets a reprĂ©sentĂ© pour Guilloux un considĂ©rable travail dâĂ©lagage de la matiĂšre dâorigine, voire dâautocensure [137]. La consultation des archives Ă Saint-Brieuc permet de prendre la mesure de la dĂ©marche du diariste et vient encore enrichir la connaissance de lâĂ©crivain et de son travail. Le deuxiĂšme tome des Carnets, Carnets 1944-1978, est posthume (1982). Au cours des dix derniĂšres annĂ©es de sa vie, Guilloux reçoit lâaide de Françoise Lambert quâil dĂ©signera comme son exĂ©cutrice testamentaire [138] et qui joue un rĂŽle dĂ©terminant pour les publications posthumes.
Louis Guilloux, le romancier et la Bretagne
La lecture des romans de Louis Guilloux impose lâĂ©vidence de leur localisation gĂ©ographique : Saint-Brieuc, ville natale de lâĂ©crivain. Echappent Ă ce principe Parpagnacco et Les Batailles perdues. Parpagnacco enclĂŽt Ă Venise une fiction teintĂ©e de lĂ©gendaire celtique. Les Batailles perdues sâancrent Ă Pontivy, capitale du FĂ©dĂ©ralisme breton (janvier 1790). Si le rĂ©cit met en avant la pĂ©riode du Front populaire et les Ă©vĂ©nements parisiens qui sây attachent, le fil conducteur de la trame romanesque reste bien la Bretagne : autonomistes, instituteurs attirĂ©s par lâURSS faisant songer aux idĂ©aux dâun Yann Sohier, surtout lâextraordinaire personnage, Alain de Kerauzern. PlutĂŽt autonomiste et farouche rĂ©publicain, recteur (nom donnĂ© en Bretagne au curĂ© dâune paroisse) de son Ă©tat, cet aristocrate de surcroĂźt ne dĂ©teste pas les Chouans[139]... De quoi donner un beau vertige idĂ©ologique ! Sauf que les choses sont plus simples : Alain de Kerauzern est un bon Breton, ce qui ne lâempĂȘche pas dâĂȘtre un bon Français, de surcroĂźt anti-fascisteâŠ. François QuĂ©rĂ©, le militant socialise de La Maison du peuple qui ne concevait pas de pouvoir vivre ailleurs quâĂ Saint-Brieuc en sa Bretagne natale ; Cripure, alias Georges Palante qui fit de ces mĂȘmes lieux sa « patrie » dâadoption, libertaire rĂ©voltĂ© ; Alain de Kerauzern : Guilloux offre Ă ses lecteurs une apparente curieuse trilogie.
Toutefois, Louis Guilloux ne laisse pas son lecteur dĂ©muni. En marge et quasi en fin de son parcours romanesque, il sâouvre Ă lui dans La Bretagne que jâaime[140]. « (âŠ) Pour moi, Breton, la Bretagne est le plus beau pays du monde, la province de France qui me va le mieux. Je lâaime et il mâa toujours semblĂ© que mĂȘme si je nây avais pas grandi, je lâaurais encore choisie. » Et de poursuivre : « Votre propre pays vous construit. On apprend Ă le reconnaĂźtre dans un Ă©change de lâĂąme et lâon dĂ©couvre quâil vous va bien comme un autre manteau fait pour vous, vous pour lui ». Et de confier Ă mi-voix quâĂ Saint-Brieuc de Bretagne, il est devenu ce quâil est devenu, comme il en fut Ă Combourg pour Chateaubriand, Ă TrĂ©guier pour Renan, Ă Pouldreuzic pour Pierre-Jakez HĂ©lias⊠Et Guilloux devint romancier, illustrant en ces termes les prĂ©misses de lâĆuvre de sa vie, dans ses mĂ©moires posthumes, LâHerbe dâoubli : « Un arbre. Toutes les histoires que je veux conter seraient les branches et les feuilles dâun arbre, un vieux chĂȘne breton, dont les racines plongeraient bien profondĂ©ment dans le noir humus dâoĂč les branches et les feuilles tireraient leur vigueur, leur Ă©clat, leur fraĂźcheur, leur profondeur dans (la) lumiĂšre ».
La Maison du peuple (1927) sâinscrit dans le projet de Guilloux. Lâhistoire racontĂ©e sâappuie sur les souvenirs de lâenfant qui relate le projet dâune construction dâune « Maison du Peuple » dont le pĂšre de lâĂ©crivain fut un Ă©nergique artisan, projet auquel mit fin la dĂ©claration de guerre dâaoĂ»t 1914. Lâhistoire individuelle et familiale se fond dans une histoire collective et sociale qui ne peut que sâinscrire elle-mĂȘme dans lâhistoire mondiale. La Maison du peuple appelait des dĂ©veloppements que Guilloux mĂšnera Ă leur terme ultime. Ainsi lâĂ©crivain appuie sa crĂ©ation romanesque sur des « choses vues », entendues, vĂ©cues par lui-mĂȘme auxquelles il donnera leur extension maximale dans Le Jeu de patience (1949). Dans ce roman, il reliera lâentreprise de construction de la Maison du Peuple Ă lâarrivĂ©e du moine Brieuc (Ve s.) dans un mĂȘme idĂ©al de fraternitĂ© et de justice. Mais aussi dans ce roman qui embrasse, en mĂȘlant la chronologie des Ă©pisodes, lâhistoire de Saint-Brieuc et du monde, des invasions romaines Ă lâarrivĂ©e de lâ « Exodus » en Palestine, lâexpĂ©rience du romancier-narrateur qui sâest dĂ©doublĂ© dans le personnage du chroniqueur Meunier, intĂšgre vie privĂ©e, pensĂ©es intimes, conscience sociale, rĂ©volte morale et fractures et fracas de lâHistoire : 1914-1918, chĂŽmage et misĂšre des annĂ©es 1930, rĂ©fugiĂ©s espagnols mais aussi autrichiens, italiens, occupation allemande, etc. Ainsi, Louis Guilloux entend-il lier le local Ă lâuniversel, joindre conscience de soi, identitĂ© et universalisme.
Lâhistoire rĂ©elle de la Maison du peuple ouvre dâautres perspectives encore. Le projet briochin comportait la mise en place et lâaccueil de cinq coopĂ©ratives de production et de construction, de deux coopĂ©ratives de consommation, dâune caisse ouvriĂšre de crĂ©dit⊠A cela sâajoutaient lâidĂ©al dâun socialisme municipal pour contrecarrer le centralisme Ă©tatique, et la crĂ©ation de groupements autogĂ©rĂ©s pour Ă©viter le pouvoir des chefs de partis et de syndicats. De Compagnon's (1931) aux Batailles perdues (1960), ce mĂȘme courant parcourt, plus ou moins explicite, lâĆuvre de Guilloux. Or tout cela â peu ou prou â figure dans lâopuscule de Georges Palante, Du nouveau en politique (1919), ce Palante dont Guilloux fit certes le Cripure du Sang noir (1935) mais dont il disait que celui-ci Ă©tait son maĂźtre, que tous deux sâapparentaient sur bien des points dont le mĂȘme amour quâils portaient Ă la Bretagne[141]. Un tel programme trouve en outre des Ă©chos chez Lamennais ou chez Emile Masson.
« Comment peut-on ĂȘtre breton » ? Ă la suite de Chateaubriand, en accord avec ses contemporains Jean Grenier et Jean GuĂ©henno ou Armand Robin, Louis Guilloux voit dans le caractĂšre breton une propension Ă la rĂ©volte, Ă un esprit dâinsoumission, dâindĂ©pendance (« Douze balles montĂ©es en breloque »), un anarchisme plus ou moins conscient, que Guilloux traduit pour lui-mĂȘme par les expressions : rester « Ă son compte », demeurer « artisan », agir en « franc-tireur ». Ainsi entendait-il ĂȘtre breton, ĂȘtre Ă©crivain en dehors de tout engagement, voire de tout formalisme. Câest dans la prĂ©face Ă Souvenirs de Bretagne (album de photographies de Charles Lhermitte 1911-1913) que Louis Guilloux se fait le plus explicite, citant Chateaubriand comme un argument littĂ©raire dâautoritĂ©, ou faisant des femmes bretonnes les fermes soutiens de « guerres de la Chouannerie », des actions paysannes « des annĂ©es 1933 et suivantes », et de « la lutte contre lâoccupant nazi ». Et Guilloux de ponctuer son propos dâun pĂ©remptoire « le gĂ©nie du peuple breton nâest pas romain. CĂ©sar nâa pas encore achevĂ© sa conquĂȘte. Il ne lâachĂšvera jamais »[142].
La Bretagne que jâaime et la prĂ©face aux Souvenirs de Bretagne abordent deux autres points capitaux aux yeux de Guilloux : la langue et lâimaginaire. Louis Guilloux rappelle lâĂ©loge que fit Michelet de la Bretagne et des Bretons, « de la langue et du gĂ©nie celtiques, de lâapport de ce gĂ©nie dans la culture française et gĂ©nĂ©rale » dans son Histoire de France. Puis il dĂ©nonce la proscription dont fut victime la langue bretonne qui ne risquait pourtant pas de ruiner « lâunitĂ© nationale », et conclut : « Il existe un « sacrĂ© » contre lequel aucun argument ne pourra jamais prĂ©valoir », le droit Ă parler sa propre langue[143].Les droits culturels sont inhĂ©rents aux droits de lâhomme.
Quant Ă lâimaginaire, sâil appartient Ă la propension au conte, Ă la lĂ©gende, Ă la poĂ©sie, au rĂȘve, qui est vif chez les Bretons, Guilloux le rattache Ă lâesprit de rĂ©volte qui correspond Ă une forme de dĂ©ni des rĂ©alitĂ©s de ce monde, tel que lâexprimĂšrent CorbiĂšre, Villiers de lâIsle-Adam ou Jules Lequier. Louis Guilloux rejoint sur ce point son ami Jean Grenier qui parle de « mal celtique », ennui de la finitude de toutes choses et appel Ă tous les ailleurs[144]. Le marin Durtail du Pain des rĂȘves en serait un exemple modeste face Ă Cripure et Ă sa volontĂ© dâĂ©chec.
Des rĂ©alitĂ©s individuelles, sociales et politiques ancrĂ©es dans la terre bretonne, des idĂ©aux de justice, de libertĂ©, de bonheur dĂ©fendus en pays breton, un mal celtique liĂ© Ă lâexistence et Ă lâĂȘtre : la Bretagne est consubstantielle Ă lâĆuvre de Louis Guilloux mais elle ne lâenferme pas, elle lâouvre au monde et se propose comme un appel Ă ce que le romancier considĂ©rait comme essentiel, « lâamour de la vie ».
Amitiés et correspondance
Louis Guilloux a été l'ami de nombreux écrivains, avec lesquels il entretenait une correspondance extensive. L'essentiel de cette correspondance a été édité dans les années 2005-2015 dans cinq livres, à savoir : Albert Camus[145], André Malraux[146], Jean Guéhenno[147], Jean Paulhan[148] et Georges, Emilienne et Lucie Robert[149].
Jean Grenier à 19 ans sera le premier à tisser des liens quasi fraternels avec le jeune Louis Guilloux. Le premier aussi qui lui fera rencontrer en 1925 des écrivains qui deviendront des amis : André Chamson, Max Jacob.
En 1927 Jean GuĂ©henno Ă©dite chez Grasset La Maison du peuple, le premier roman publiĂ©. Les deux fils de cordonniers partagent une mĂȘme enfance. Cette mĂȘme annĂ©e, AndrĂ© Malraux entre dans la vie de Louis Guilloux. Ă partir de 1932, Malraux accompagne la genĂšse du Sang Noir. Il sera avec Louis Aragon et AndrĂ© Gide l'un des fervents dĂ©fenseurs du roman paru en 1935. EugĂšne Dabit, l'auteur de L'HĂŽtel du Nord retrouve son ami Louis Guilloux pour accompagner AndrĂ© Gide en URSS Ă l'Ă©tĂ© 1936.
AprĂšs la guerre, en 1945, la rencontre avec Albert Camus signe la naissance d'une amitiĂ© exceptionnelle qui portera Ă jamais pour Guilloux lâempreinte tragique de la mort accidentelle de Camus en 1960. « Relation limpide des deux hommes...en totale confiance l'un par rapport Ă l'autre » Ă©crit AgnĂšs SpiquelâCourdille dans l'avant-propos de la Correspondance Camus-Guilloux.
Moins connues du grand public, Liliana Magrini et Vivette Perret, publiées chez Gallimard, seront dans les années 1950-1960 des confidentes.
Autres amitiĂ©s littĂ©raires, Mohammed Dib, lâĂ©crivain algĂ©rien et Ignazio Silone, lâauteur italien frĂ©quentĂ© lors des rencontres au titre de la SociĂ©tĂ© europĂ©enne de la culture dont Guilloux fut un membre actif.
D'autres textes traitent de l'amitié de Louis Guilloux avec Jean Grenier, avec lequel il est ami depuis 1917[150] - [151], avec Georges Palante son professeur de philosophie, sur lequel Guilloux a publié en 1931 Souvenirs sur Georges Palante[152] et avec André Chamson[153].
La SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux a consacrĂ© des Rencontres Louis Guilloux sur cette thĂ©matique de l'amitiĂ© Des amis, des compagnons au cĆur de la crĂ©ation littĂ©raire (20 et ) et a publiĂ© les actes de ces rencontres.
RĂ©ception de lâĆuvre
LâĆuvre de Louis Guilloux a fait lâobjet dâune rĂ©ception abondante. LâĂ©tude de lâaccueil fait Ă ses livres[154] montre quâils ont intĂ©ressĂ© la critique, avec des pics de succĂšs : en 1927 La Maison du peuple suscite de nombreux articles. En 1935, Le Sang noir alimente abondamment les chroniques. Si le silence se fait presque totalement pendant les annĂ©es de guerre (rompu seulement pour Le Pain des rĂȘves), Le Jeu de patience, qui reçoit le Prix Renaudot en 1949, attire Ă nouveau fortement lâattention. En 1967, lâattribution du Grand Prix National des Lettres pour lâensemble de lâĆuvre dĂ©clenche beaucoup de commentaires, tout comme, en 1967 puis en 1977, la reprise du Sang noir dans la version thĂ©Ăątrale intitulĂ©e Cripure. Lors du dĂ©cĂšs de Louis Guilloux, en 1980, de trĂšs nombreuses chroniques nĂ©crologiques lui sont consacrĂ©es, du Figaro Ă LâHumanitĂ©, de la presse rĂ©gionale Ă la presse culturelle- sa mort est annoncĂ©e Ă la Une du Monde[155]). Au cours des annĂ©es suivantes paraissent de plus en plus des numĂ©ros de revues, des actes de colloques, des essais, des Ă©tudes universitaires. Presque 40 ans plus tard, en 2019, la parution posthume de LâIndĂ©sirable constitue un succĂšs Ă©ditorial et relance la dĂ©marche critique.
Cette rĂ©ception assidue de lâĆuvre doit ses fluctuations au caractĂšre alĂ©atoire habituel des choix des lecteurs, Ă la grande diversitĂ© des ouvrages â Louis Guilloux a Ă©tĂ© un explorateur en Ă©criture. Les intermittences de la critique sâexpliquent aussi en particulier par les alternances de prĂ©sence et dâabsence de lâauteur dans le monde littĂ©raire parisien. Mais il a Ă©tĂ© traitĂ© en pair, de façon constante, par les plus grands Ă©crivains du temps, comme lâattestent les correspondances (Gide, GuĂ©henno, Max Jacob, Malraux, Albert Camus, Paulhan, etc.). Il a Ă©tĂ© Ă©ditĂ© par les maisons les plus rĂ©putĂ©es, chez Grasset dâabord puis chez Gallimard Ă partir du Sang noir. On a pu dire quâil Ă©tait accompagnĂ© dâune grande escorte.
TrĂšs attachĂ© Ă son mĂ©tier dâĂ©crivain[156], il Ă©tait sensible Ă la reconnaissance de son Ćuvre. Dans une sĂ©rie dâĂ©tudes rĂ©unies sous le titre Louis Guilloux dans les mĂ©dias[157] , on voit notamment avec quel soin il collationnait les images de lui-mĂȘme, soigneusement Ă©tablies par les maisons dâĂ©dition â il en avait constituĂ© un thesaurus[158]. Il conservait les coupures de journaux, se prĂȘtait Ă de multiples interviews, radiodiffusĂ©es puis tĂ©lĂ©visĂ©es ; il y entretenait une image de lui-mĂȘme Ă laquelle il Ă©tait attachĂ© â il se livre et se dĂ©robe Ă la fois de façon complexe[159].
Au total la rĂ©ception de lâĆuvre renvoie des images diverses. Les unes cautionnent un Louis Guilloux tĂ©moin de la pauvretĂ© dans la sociĂ©tĂ© du dĂ©but du XXe siĂšcle, un non alignĂ© plus ou moins anarchisant ; le personnage de Cripure est nodal dans la vision de lâĆuvre[160]. Dâautres soulignent la dĂ©marche existentielle, un humanisme de la souffrance, une Ă©thique de la solidaritĂ© que manifestent les actions de militant[161] , et aussi, Ă partir du Pain des rĂȘves, la fin dâune relation enchantĂ©e Ă lâenfance, et de façon rĂ©currente un rapport complexe au communisme[162], Ă la religion. Il faut noter que les articles qui traitent de Guilloux, comme le montrent leurs titres[163], dĂ©passent souvent le livre qui les a dĂ©clenchĂ©s, traitent de lâĆuvre dans son ensemble, de questions gĂ©nĂ©rales â philosophiques, politiques, littĂ©raires. On a analysĂ© lâintĂ©rĂȘt montrĂ© par de grands pĂ©riodiques, La Nouvelle Revue française, Esprit, Europe, Le Nouvel Observateur[164]. On insiste partout sur la maniĂšre dont lâauteur a donnĂ© la parole Ă ceux qui habituellement ne lâont pas, dont il a stigmatisĂ© un patriotisme fallacieux, dont il exprime la crainte de trahir ses origines[165] , dont il se dĂ©fend de toute infĂ©odation et se prĂ©sente en « franc-tireur ». Mais la rĂ©ception a rĂ©pondu aussi Ă son souci de littĂ©raritĂ©, et si la presse de gauche le saluait en raison de son investissement dans la problĂ©matique sociale, les critiques qui sur ce plan le dĂ©savouaient prenaient en compte sa dĂ©marche de recherche littĂ©raire.
Il sâest avant tout voulu Ă©crivain, et les critiques lâont jugĂ© Ă cette aune. Dans Le Monde des livres, Ă propos de Coco perdu il est rapprochĂ© de VallĂšs, du Nouveau Roman, de Beckett, de Cayrol[166]. Les Ă©chos des recherches du Nouveau Roman[167] expliquent sans doute en partie lâaccueil assez froid quâa rĂ©servĂ© la critique de gauche au Jeu de patience. On a montrĂ© le dĂ©veloppement de la recherche appliquĂ©e Ă son Ćuvre[168] : les premiers mĂ©moires et thĂšses sont produits aux Ătats-Unis et en Grande Bretagne. En France les Ă©tudes Ă©manent dâabord de tĂ©moins, puis de spĂ©cialistes ; monographies, essais, mĂ©moires, thĂšses se succĂšdent Ă partir des annĂ©es 1980. Des colloques ont lieu, la SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux produit une revue et organise des journĂ©es dâĂ©tudes, une Ă©quipe de lâuniversitĂ© Rennes 2 CELLAM se consacre Ă lâĂ©crivain, et gĂšre un site internet[169]. Un fonds dâarchives, Ă la BibliothĂšque de Saint-Brieuc, est Ă la disposition des chercheurs[170]. La critique contemporaine, universitaire ou non, tient compte de plus en plus du travail narratologique de Louis Guilloux, des recherches de ton qui lui sont propres : les articles portant sur LâIndĂ©sirable sont rĂ©vĂ©lateurs de cet angle de vue ; les goĂ»ts Ă©voluent, lâesthĂ©tique du rĂ©cit a changĂ©, et le public contemporain a goĂ»tĂ© la briĂšvetĂ© du livre, la structure sans cesse rompue du rĂ©cit, lâaciditĂ© de la satire.
Au total, la critique a insistĂ© sur la force de cette pensĂ©e dialogique, sur les retours littĂ©raires du Sang noir, dans lesquelles sâinscrit LâIndĂ©sirable, sur le fait que la gauche a manquĂ© un grand Ă©crivain[171] â lui-mĂȘme rĂȘvait de voir Cripure[172] sur les barricades. Mais on donne aussi toute sa place Ă une voix de conteur remarquable, de polĂ©miste, de satiriste, ainsi quâaux arcanes dâune esthĂ©tique du rĂ©cit.
Distinctions
- Prix du roman populiste en 1942 pour Le Pain des rĂȘves.
- Prix Renaudot en 1949 pour Le Jeu de patience.
- Grand prix national des Lettres (1967) pour l'ensemble de son Ćuvre.
- Grand prix de littérature de l'Académie française (1973).
- Grand Aigle d'Or de la ville de Nice (1978).
- Prix Bretagne (1978) pour l'ensemble de son Ćuvre et Carnets 1944-1974.
Fonds dâarchives Louis Guilloux des bibliothĂšques municipales de Saint-Brieuc
DĂšs le mitan de sa carriĂšre littĂ©raire, au moins dĂšs les annĂ©es 1930, Louis Guilloux observe dâun Ćil circonspect et souvent agacĂ© l'afflux de ses paperasses, semble-t-il aussi envahissantes que nĂ©cessaires, mais dont lâĂ©ventuelle postĂ©ritĂ© lui inspire des remarques fatalistes.
LâĂ©crivain, en effet, dĂšs ses premiĂšres Ćuvres, prenait soin de sâappuyer sur une indispensable et consĂ©quente matiĂšre documentaire de premiĂšre et seconde main, Ă©troitement tissĂ©e avec diffĂ©rents Ă©tats matĂ©riels de textes de diffĂ©rentes natures (chapitres de romans, nouvelles, journal personnel), eux-mĂȘmes susceptibles de se transformer pour glisser dâun projet Ă lâautre, au grĂ© des impulsions crĂ©atrices et des potentialitĂ©s Ă©ditoriales. Ă cela sâajoutait encore une correspondance personnelle volontiers intĂ©grĂ©e Ă lâĆuvre ainsi que des articles de journaux et revues, de rĂ©ception de ses Ćuvres ou sur des sujets politiques, sociaux, littĂ©raires et divers. Le tout cent fois transformĂ©, dĂ©coupĂ©, reclassĂ© puis retravaillĂ©, sur une multitude de supports.
Ă la fin de sa carriĂšre littĂ©raire, et comme cela le serait mesurĂ© ultĂ©rieurement, Louis Guilloux avait ainsi gĂ©nĂ©rĂ© plusieurs centaines de milliers de feuillets dâarchives, essentiellement rĂ©partis entre les adresses familiales (dont la maison de Saint-Brieuc) et « professionnelles » (Gallimard).
Logiquement, compte tenu de lâimportance dâune Ćuvre unanimement saluĂ©e, la question de la prĂ©servation des archives de Louis Guilloux fit lâobjet de questionnements, puis dâune attention particuliĂšre croissante Ă laquelle prirent part de nombreux acteurs, en Ă©troite collaboration avec RenĂ©e Guilloux, puis avec sa fille Yvonne Guilloux[173]. Outre le travail de lâexĂ©cutrice littĂ©raire Françoise Lambert, le rĂŽle conjoint de la jeune SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux et de la municipalitĂ© de Saint-Brieuc fut essentiel dans lâacquisition par la Ville, en 1981, de la maison de la rue Lavoisier, puis de lâachat de lâessentiel des archives de lâĂ©crivain, alors en possession de la famille (1993). Cette derniĂšre opĂ©ration, dâimportance nationale, fut fortement soutenue par le ministĂšre de la Culture, la rĂ©gion Bretagne et le dĂ©partement des CĂŽtes-dâArmor, fut Ă©galement remarquable en ce quâelle confirmait le maintien Ă Saint-Brieuc dâun corpus archivistique initialement susceptible dâĂȘtre intĂ©grĂ© aux collections de la BibliothĂšque nationale.
Câest Ă la bibliothĂšque municipale de Saint-Brieuc que revint la mission de conservation et de valorisation de ce fonds initial, qui fit dâabord lâobjet dâun plan de classement toujours actif, distinguant pour lâessentiel lâĆuvre littĂ©raire (publiĂ©e ou inĂ©dite), la correspondance, les papiers personnels, lâiconographie et la bibliothĂšque. Sauf exception, la consultation sur place est ouverte Ă toute demande justifiĂ©e.
RĂ©guliĂšrement enrichi par des dons et acquisitions ciblĂ©es, le catalogue du fonds dâarchives littĂ©raires Louis Guilloux des bibliothĂšques de Saint-Brieuc est accessible en ligne via le portail des mĂ©diathĂšques de la Baie.
Publications
Ćuvres
- La Maison du peuple, roman, Grasset, coll. « Les Ăcrits » no 2, 1927
- Dossier confidentiel, roman, Grasset, coll. « Les Cahiers verts » no 10, 1930
- Compagnons, Grasset, 1931
- Souvenirs sur Georges Palante, Saint-Brieuc, O.L. Aubert, 1931 ; rĂ©Ă©dition Calligrammes, 1980, et Ăditions Diabase, 2014 (prĂ©face de Yannick Pelletier)
- Hyménée, roman, Grasset, 1932
- Le Lecteur écrit, compilation de courriers de lecteurs du journal L'Intransigeant, Gallimard, coll. « Les Documents bleus », no 50, 1933
- Angélina, roman, Grasset, 1934
- Le Sang noir, roman, Gallimard, 1935
- Histoire de brigands, rĂ©cits, Ăditions sociales internationales, 1936
- Le Pain des rĂȘves, roman, Gallimard, 1942
- Le Jeu de patience, roman, Gallimard, 1949
- Absent de Paris, lettres de voyage, Gallimard, 1952
- Parpagnacco ou la Conjuration, roman, Gallimard, 1954
- Les Batailles perdues, roman, Gallimard, 1960
- Cripure, piÚce tirée du Sang noir, Gallimard, coll. « Le Manteau d'Arlequin », 1962
- La Confrontation, roman, Gallimard, 1968
- La Bretagne que j'aime, avec Pascal Hindus, photographies, et Charles Le Quintrec, lĂ©gendes, Ăditions Sun, 1973
- Salido, suivi de OK Joe !, 1976, Gallimard[174]
- Coco perdu. Essai de voix, récit, Gallimard, 1978
- Carnets 1921-1944, Gallimard, 1978
Ćuvres posthumes
- Grand BĂȘta, conte, Gallimard Jeunesse, coll. « Folio Benjamin », no 54, 1981
- Carnets 1944-1974, Gallimard, 1982
- L'Herbe d'oubli, mémoires, texte établi et annoté par Françoise Lambert, Gallimard, 1984
- Labyrinthe, roman, postface d'Yvonne Besson, Gallimard, coll. « L'Imaginaire », no 397, 1999
- Vingt ans ma belle Ăąge, nouvelles, Gallimard, 1999
- Chroniques de FlorĂ©al, 1922-1923, recueil d'articles, Ă©dition Ă©tablie par Ăric Dussert, Ăditions HĂ©ros-Limite, 2018
- Douze balles montées en breloque, texte bilingue français-breton (traduction de Maguy Kerisit-Louédoc), postface de Yannick Pelletier, éditions Goater, 2018
- L'Indésirable, roman, avant-propos de Françoise Lambert, édition, notes et postface d'Olivier Macaux, Gallimard, 2019
Correspondance
- Louis Guilloux, Georges, Emilienne et Lucie Robert, Correspondance (1920-1970),« Confrontations » - Bulletin de la Société des Amis de Louis Guilloux, no 19, 2006
- Georges Palante et Louis Guilloux - L AmitiĂ© - La FĂȘlure, (1917-1921), Cahiers Louis Guilloux, no 2, Folle Avoine, 2009
- Jean GuĂ©henno, Louis Guilloux, Correspondance (1927-1967). Les paradoxes dâune amitiĂ©, La Part commune, 2010
- Jean Paulhan, Louis Guilloux, Correspondance (1929-1962), Ă©ditions du CNRS, 2010
- Albert Camus, Louis Guilloux, Correspondance (1945-1959), Gallimard, 2013
- Louis Guilloux et les Ăditions Rieder (1923-1937), Cahiers Louis Guilloux, no 3 (ISBN 978-2-86810-237-9), Folle Avoine, 2018
Adaptations pour la télévision
- Compagnons. RĂ©alisation par Jean-Paul Roux, adaptation par Louis Guilloux lui-mĂȘme et Jean-Paul Roux. Ce tĂ©lĂ©film d'une durĂ©e de 1 h 12 a Ă©tĂ© diffusĂ© Ă la tĂ©lĂ©vision le 5 dĂ©cembre 1967.
- Le Pain des rĂȘves. RĂ©alisation par Jean-Paul Roux, adaptation par Louis Guilloux lui-mĂȘme et Jean-Paul Roux. Ce tĂ©lĂ©film d'une durĂ©e de 1 h 31 a Ă©tĂ© diffusĂ© Ă la tĂ©lĂ©vision le 23 janvier 1974.
- Le Sang noir de Louis Guilloux a été adapté en 2007 pour la télévision, mis en scÚne par Peter Kassovitz et produit par BFC production (Françoise Castro). Le rÎle de Cripure est tenu par Rufus. Le film a été tourné en mars et à Lille et à Cambrai par l'équipe de France 3 Production Lille.
Prix Louis-Guilloux
Le Conseil gĂ©nĂ©ral des CĂŽtes-d'Armor a crĂ©Ă© en 1983 le prix Louis-Guilloux « pour perpĂ©tuer les valeurs littĂ©raires et morales de l'Ă©crivain breton.»[175] Ce prix est dĂ©cernĂ© chaque annĂ©e Ă une Ćuvre de langue française ayant une « dimension humaine d'une pensĂ©e gĂ©nĂ©reuse, refusant tout manichĂ©isme, tout sacrifice de l'individu au profit d'abstractions idĂ©ologiques »[176].
Prix Louis Guilloux des Jeunes
Le Prix Louis Guilloux des Jeunes a Ă©tĂ© crĂ©Ă© en 1994 par la SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux. Ayant pour objectifs de faire vivre la mĂ©moire de cet Ă©crivain et dâamener les jeunes gĂ©nĂ©rations Ă lire son Ćuvre, ce prix sâadresse aux jeunes de moins de 25 ans. Il est diffusĂ©, en partenariat avec le Rectorat dâAcadĂ©mie et la Direction de lâenseignement catholique, dans tous les collĂšges et lycĂ©es publics et privĂ©s de lâAcadĂ©mie de Rennes. Il est Ă©galement accessible Ă tous les jeunes qui en feront la demande en France ou Ă lâĂ©tranger. Il est possible de concourir Ă titre individuel ou dans le cadre dâun groupe, dâune classeâŠ
Chaque annĂ©e est choisi un extrait diffĂ©rent de lâĆuvre de Louis Guilloux dont les participants sont appelĂ©s Ă sâinspirer trĂšs librement pour Ă©crire un texte de forme libre (rĂ©cit, lettre, correspondance, portrait, journal intime, carnet de bordâŠ) ou, depuis 2016, rĂ©agir sur un mode personnel en combinant par exemple poĂšme, dessin, rĂ©Ă©criture. Le Prix est dotĂ© par la Ville de Saint-Brieuc, le dĂ©partement des CĂŽtes dâArmor, la rĂ©gion Bretagne et la SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux.
GrĂące au relais acadĂ©miques de diffusion, Ă©lĂšves et professeurs sont sensibilisĂ©s Ă lâĆuvre de Louis Guilloux et Ă©ventuellement accompagnĂ©s dans leur travail par une visite de la maison et du bureau de Louis Guilloux.
Chaque année, parmi plus de 200 concurrents, sont récompensés des lauréats de qualité reçus à la Maison Louis Guilloux 13 rue Lavoisier à Saint-Brieuc le premier ou second samedi de juin.
Les nouvelles primĂ©es sont Ă©ditĂ©es. Certains laurĂ©ats, grĂące Ă ce Prix, ont pris goĂ»t Ă lâĂ©criture et deviennent des passionnĂ©s de Louis Guilloux.
Ce Prix des Jeunes a pris place dans le paysage culturel de la Région et est relayé dans la Presse.
Ne sâadressant pas Ă des Ă©crivains, ce prix a le mĂ©rite dâencourager Ă la fois Ă la lecture et Ă lâĂ©criture littĂ©raire par lâentremise dâun grand Ă©crivain attachĂ© Ă sa ville, sa rĂ©gion et reconnu bien au-delĂ de son pays.
Les meilleures nouvelles sont publiées depuis le début du Prix et disponibles, à la demande, à la société des Amis de Louis Guilloux.
Lieux
Le nom de Louis Guilloux a notamment été donné à une place de la ville de Saint-Brieuc, à une rue de la ville de Rennes[177], de Nantes et d'Eysines prÚs de Bordeaux en Gironde.
Il a notamment Ă©tĂ© donnĂ© Ă un lycĂ©e professionnel Ă Rennes mais Ă©galement Ă un collĂšge Ă Montfort-sur-Meu ainsi qu'Ă une association Ă but non lucratif, le RĂ©seau Louis-Guilloux, qui promeut la SantĂ© comme dĂ©finie par l'Organisation mondiale de la SantĂ©, Ă destination dâune population majoritairement prĂ©caire et de toutes origines.
Notes et références
- Henri Godard, Une grande génération : Céline, Malraux, Guilloux, Giono, Montherlant, Malaquais, Sartre, Queneau, Simon, Paris, Gallimard, coll. « BLANCHE », , 456 p. (ISBN 978-2-070-73315-6)
- Albert Camus, Préface à La Maison du peuple et Compagnons, Paris, Grasset, 1953.
- Michel Raimond, La crise du roman : des lendemains du naturalisme aux années vingt, Paris, José Corti, (1re éd. 1966), 539 p. (ISBN 978-2-714-30108-6)
- Henri Godard, Louis Guilloux : romancier de la condition humaine : essai, Paris, Gallimard, , 421 p. (ISBN 978-2-070-75647-6)
- SituĂ©e au 12 rue Lavoisier Ă Saint-Brieuc, la Maison Louis Guilloux, propriĂ©tĂ© de la Ville, accueille depuis 1993 le public autour de diverses formes de rencontres avec la littĂ©rature contemporaine, les arts visuels et la visite du bureau de lâauteur au dernier Ă©tage. Le bureau de Louis Guilloux est demeurĂ© tel que lâauteur lâavait amĂ©nagĂ©.La Maison Louis Guilloux a par ailleurs reçu en 2011 le label « Maison des Illustres ». Ce label signale des lieux dont la vocation est de conserver et transmettre la mĂ©moire de femmes et d'hommes qui se sont illustrĂ©s dans l'histoire politique, sociale et culturelle de la France.Se reporter à « La Maison Louis Guilloux », Site Officiel - Ville de Saint-Brieuc
- http://maitron.fr/spip.php?article138798, notice GUILLOUX Louis, Marie par Alain Prigent, François Prigent, version mise en ligne le 12 novembre 2011, derniÚre modification le 7 janvier 2018.
- Sylvie Golvet 2010, p. 43-45
- Louis Guilloux et Françoise Lambert, L'herbe d'oubli : récit, Paris, Gallimard, , 419 p. (ISBN 978-2-070-70124-7), p. 228
- Cité par Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, Collection Interférences, 2010, p. 45.
- Voir Valérie Poussard-Fournaison, La description selon Louis Guilloux : réalisme et tragédie, Paris, L'Harmattan, coll. « Espaces littéraires », , 255 p. (ISBN 978-2-343-14530-3)
- Sylvie Golvet, Louis Guilloux : devenir romancier, Rennes, France, Presses universitaires de Rennes, coll. « Interférences » (no 2), , 307 p. (ISBN 978-2-753-51105-7, lire en ligne)
- Confrontation no 19, âCorrespondance Louis Guilloux-Georges, Emilienne et Lucie Robert -1920-1970 », Ă©dition Ă©tablie par Pierre- Yves Kerlocâh, Saint-Brieuc, SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux, septembre 2006.
- Lettre à Jean Grenier de janvier 1921, citée par Sylvie Golvet 2010, p. 45
- Voir Louis Guilloux, Un écrivain dans la presse, sous la direction de Jean-Baptiste LEGAVRE et MichÚle TOURET, Rennes, PUR, collection « Interférences », 2014.
- Une partie dâentre eux a Ă©tĂ© rĂ©unie dans le recueil posthume Vingt ans ma belle Ăąge (Gallimard, 1999).
- Yves Loisel, Louis Guilloux (1899-1980) : biographie, Spézet, Coop Breizh, , 286 p. (ISBN 978-2-843-46004-3), p. 61
- Louis Guilloux, Chroniques de FlorĂ©al, 1922-1923, Ă©dition Ă©tablie et prĂ©sentĂ©e par Ăric Dussert, GenĂšve, HĂ©ros-Limite, 2018, p. 8.
- Valérie Poussard-Fournaison, « Louis Guilloux, critique de cinéma ? » dans Louis Guilloux, un écrivain dans la presse, p. 73-88.
- Sur les soixante-neuf textes publiĂ©s par Louis Guilloux dans cette revue, Ăric Dussert a retenu quarante-neuf chroniques pour lâĂ©dition des Chroniques de FlorĂ©al quâil a Ă©tablie et publiĂ©e aux Ăditions HĂ©ros-Limite en 2018.
- Cité par Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, Collection Interférences, 2010, p. 49.
- LâIndĂ©sirable, avant-propos de Françoise Lambert, Ă©dition, notes et postface d'Olivier Macaux, Gallimard, 2019.
- LâIndĂ©sirable, avant-propos de Françoise Lambert, Ă©dition, notes et postface d'Olivier Macaux, Gallimard, 2019, p. 150.
- Yves Loisel, Louis Guilloux, Biographie, Spézet, Coop Breizh, 2000, p. 72.
- Comme en tĂ©moigne notamment lâhommage rendu par Mona Ozouf dans Composition française.
- Sylvie Golvet, op. cit., p. 105.
- RenĂ©e Guilloux est mentionnĂ©e aux cĂŽtĂ©s de son Ă©poux pour la traduction de LâIdiot de la famille de Margaret Kennedy (Plon, 1929), mais elle a signĂ© ou apportĂ© sa collaboration Ă dâautres traductions (notamment La Vie de Robert Browning de G.K. Chesterton ou La Nymphe au cĆur fidĂšle de Margaret Kennedy) oĂč son nom nâapparaĂźt pas (cf. Sylvie Golvet, op. cit., p. 103-104).
- Louis Guilloux, Carnets, 1921-1944, Gallimard, 1978, p. 39.
- Yves Loisel, op. cit., p. 81.
- Entretien avec Patrice Galbeau, France Culture, La Vie entre les lignes, 1977, 1er entretien, cité par Sylvie Golvet, op.cit., p. 25.
- Le personnage du docteur RĂ©bal sâinspire du docteur Boyer qui avait menĂ© une coalition rĂ©unissant bourgeois progressistes et militants ouvriers (dont le pĂšre de Guilloux) lors des Ă©lections municipales de 1908 Ă Saint-Brieuc.
- Sylvie Golvet, op. cit., p. 81-92.
- Louis Guilloux a reconnu dâailleurs par la suite quâil sâagissait, avec ce rĂ©cit dâenfance, dâ« une Ă©criture trĂšs naĂŻve » (citĂ© par Sylvie Golvet, op. cit., n. 16, p. 31).
- Yves Loisel, Louis Guilloux, biographie, 1998, Ăditions Coop Breizh, p. 88.
- Peu aprĂšs la mort de Louis Guilloux, la maison est acquise par la ville de Saint-Brieuc qui, en accord avec la famille, souhaite qu'elle reste dans le patrimoine briochin. Cette maison, devenue aujourd'hui « Maison Louis Guilloux », est animĂ©e par la SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux qui y organise des ateliers, des expositions et des confĂ©rences et qui, en liaison avec la bibliothĂšque municipale, y accueille en rĂ©sidence des auteurs et des chercheurs, tout en proposant Ă©galement des visites du bureau de l'Ă©crivain. En 2012, le ministre de la Culture FrĂ©dĂ©ric Mitterrand, dĂ©cide de dĂ©cerner Ă cette maison le label « Maisons des Illustres ». Ce label signale des lieux dont la vocation est de conserver et transmettre la mĂ©moire de femmes et d'hommes qui se sont illustrĂ©s dans l'histoire politique, sociale et culturelle de la France. Il reprĂ©sente une reconnaissance officielle de l'intĂ©rĂȘt patrimonial de la Maison. (Source : ministĂšre de la Culture)
- Ibid., p. 90.
- Ce que confirme Mary Jane Matthews Green dans Louis Guilloux, an Artisan of Language, York, South Carolina : French Litterature Publications Company, 1980.
- Louis Guilloux, Dossier confidentiel, Grasset, coll. Les Cahiers Rouges, p. 242.
- Edmond Lambert demande clairement quâil nây ait « ni morale, ni dĂ©monstration » tandis que quâHenri Petit le prie de « renoncer une bonne fois Ă toute idĂ©ologie », in Sylvie Golvet, op. cit., p. 134-135.
- Sylvie Golvet, op. cit., p. 123.
- Kamel Daoud explique ainsi son point de vue : « (âŠ) chez Camus, lâinexplicable est une sorte de vision du monde qui mĂšne Ă lâĂ©thique et pas au nihilisme commode. Je nâaime pas le mot « absurde » quâon utilise souvent et qui sous-entend quâil existe un au-delĂ ou un au-deçà qui ne le sont pas. Je crois que le mot inexplicable convient mieux â il est la source de lâĂ©crivain philosophe, du HĂ©ros moderne.» (Entretien avec Kamel Daoud, Le Figaro, 2 janvier 2020).
- Louis Guilloux, Dossier confidentiel, Grasset, coll. Les Cahiers Rouges, p. 44.
- Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, Gallimard, 1978, p. 101.
- Pierre Lemaitre exprime trĂšs clairement son admiration : « Câest bref, mais si puissant Ă©motionnellement que Camus mettait quiconque au dĂ©fi de terminer ce rĂ©cit sans avoir les larmes aux yeux. Jây retrouve Ă chaque lecture lâĂ©conomie de moyens, la sobre efficacitĂ©, lâimparable justesse de lâun des Ă©crivains les plus importants de son siĂšcle. » (« Conversation avec Pierre LemaĂźtre », Zadig, no 3, septembre 2019, p. 31)
- Ibid., p. 93.
- Jean-Louis Jacob, Louis Guilloux romancier du peuple, Ăditions du NoroĂźt, 1983, p. 8.
- LĂ©on Lemonnier, Manifeste du roman populiste, Ăditions J. Bernard, La Centaine, Paris, 1929, p. 73.
- Sylvie Golvet, Compagnons de Louis Guilloux en classe, CRDP de Bretagne, Rennes, 2007, p. 89.
- Dans un article de 1930, Louis Guilloux marque clairement son dĂ©saccord avec lâĂ©cole populiste : « Le mouvement « populiste », selon le manifeste de ses inventeurs, s'annonçait surtout comme un mouvement de rĂ©action contre une littĂ©rature bourgeoise qui n'avait Ă nous proposer que des « peintures d'oisifs ». (âŠ) Mais le populisme n'Ă©tait qu'une affaire de boutique. On restait entre soi, gens de lettres. Il n'Ă©tait qu'une forme dĂ©guisĂ©e de cette littĂ©rature bourgeoise contre laquelle il prĂ©tendait rĂ©agir, et dans tous les cas, il ne pouvait donner naissance qu'Ă une littĂ©rature d'intermĂ©diaires, nĂ©cessairement sans force. » (Louis Guilloux, « Compte-rendu de Nouvel Ăąge littĂ©raire dâHenry Poulaille », Europe, novembre 1930, p. 411-412)
- Cité par Yves Loisel, op.cit., p. 97.
- Sylvie Golvet, « Lâart romanesque de Louis Guilloux et le tournant des annĂ©es 1930 » dans LâAtelier de Louis Guilloux, Presses Universitaires de Rennes, 2012, p. 108-109.
- Jean-Charles Ambroise explique que « (âŠ) câest dâailleurs la logique mĂȘme du champ littĂ©raire qui impose progressivement Ă Guilloux de rompre avec la revendication d'une appartenance de classe qui lui fait aussi courir le risque d'une fossilisation de son image : l'auteur briochin peut-il durablement rester cet Ă©crivain (âŠ) vouĂ© Ă l'Ă©vocation de ses propres racines provinciales et populaires ? » (« Une trajectoire politique », Louis Guilloux, Ă©crivain, sous la direction de Francine Dugast-Portes et Marc Gontard, Rennes, PUR, 2000, p. 56).
- Louis Guilloux, « Compte-rendu de Nouvel Ăąge littĂ©raire dâHenry Poulaille, Europe, novembre 1930, p. 413.»
- Sylvie Golvet, op. cit., p. 169.
- Louis Guilloux, LâIndĂ©sirable, publication posthume, Ă©dition, notes et postface dâOlivier Macaux, Gallimard, coll. Blanche, 2019.
- Sylvie Golvet, Louis Guilloux. Devenir romancier, 2010 PUR, p. 282.
- Sylvie Golvet, Louis Guilloux. Devenir romancier, op. cit. p. 282.
- Dominique Rabaté, « Construction narrative et dramatique dans Le Sang noir », in Francine Dugast-Portes et Marc Gontard, (dir), Louis Guilloux, écrivain, PUR, 2000, p. 197-210.
- Henri Godard, Louis Guilloux, romancier de la condition humaine, 1999, Gallimard, p. 50.
- Voir ValĂ©rie Poussard-Fournaison, La description selon Louis Guilloux. RĂ©alisme et tragĂ©die, LâHarmattan, 2018, p. 192-195.
- Louis Guilloux, « Notes sur le roman », publié en janvier 36 dans Europe, réédité dans Europe no 839, mars 1999
- Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, p. 283.
- Voir Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, p. 284, EugÚne Dabit, « à Louis Guilloux », Commune, janvier 1936, p. 545-547 (texte lu le 12 décembre 1935).
- Louis Aragon, « Le Sang noir par Louis Guilloux », Commune no 27, nov.1935, p. 352-356, « Défense du roman français », Commune no 29, janvier 1936, p. 562-568.
- André Malraux, « Le sens de la mort », publié dans Marianne, 20 novembre 1935, devient la préface du roman en 1955, repris dans le numéro 11-12 de la revue Plein Chant (dir. Yannick Pelletier), Bassac, 1982.
- Jorge Semprun, Adieu, vive clarté, Gallimard, 1998, coll. Folio 2000, p. 128.
- Jeanyves GuĂ©rin, « La double rĂ©ception de Cripure. ThĂ©Ăątre et politique dans les annĂ©es 1960-70 », Jean-Baptiste Legavre (dir.), Louis Guilloux dans les mĂ©dias. Les rĂ©ceptions de lâĆuvre, Rennes, PUR, 2019, p. 177-188.
- AndrĂ© Malraux a adhĂ©rĂ© Ă lâAEAR en dĂ©cembre 1932 et Guilloux lâannĂ©e suivante (voir Jean-Charles Ambroise, « Louis Guilloux et les annĂ©es trente : un auteur dĂ©calĂ© ? », Louis Guilloux, homme de parole, Ville de Saint-Brieuc, 1999, p. 47).
- Christian Bougeard, « Louis Guilloux et le congrÚs des écrivains antifascistes de Paris (1935) », Louis Guilloux, Colloque de Cerisy, dir. Jean-Louis Jacob, Quimper, Calligrammes, 1986, p. 190.
- Dans une interview accordĂ©e Ă lâhistorien Jean-Pierre Rioux en 1978, Guilloux est revenu sur les raisons de sa participation en tant que secrĂ©taire : « Câest Malraux qui mâavait demandĂ© de venir lĂ . CâĂ©tait presque un devoir. CâĂ©tait un devoir, quoi ! Au travail de secrĂ©tariat, il fallait quelquâun, on mâavait demandĂ© (âŠ) oui, [câĂ©tait] une grosse prĂ©sence, un gros travail de coordination des arrivĂ©es, des Ă©changes, je ne me souviens plus au juste, harassant quoi ? », CitĂ© par Christian Bougeard, ibid., p. 189.
- Ibid., p. 190-191.
- « Quand il [Boris Pasternak] est apparu, trÚs beau, l'ange est arrivé, oui ! La salle se lÚve, je n'ai jamais entendu une ovation aussi prolongée, aussi enthousiaste aussi spontanée. » (Cité par Christian Bougeard, Ibid., p. 189-190.
- Ibid.
- Le congrĂšs de Madrid est interrompu par la guerre civile et se termine quelques jours plus tard, les 16 et 17 juillet, Ă Paris. Voir Christian Bougeard, « le parcours et les engagements de Louis Guilloux dans les enjeux de son temps (1930â1950) », Louis Guilloux, Ă©crivain, sous la direction de Francine Dugast-Portes et Marc Gontard, Rennes, PUR, 2000, p. 41.
- Christian Bougeard, « Louis Guilloux, un écrivain en son siÚcle », dix-neuf vingt, revue de littérature moderne, no 4/octobre 1997, p. 133-160.
- Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, Gallimard, 1978, p. 125. Participation confirmĂ©e comme lâatteste cette remarque : « Lettre de Gide Ă Malraux, qui me la transmet : « Cher ami. Une excellente dĂ©pĂȘche de Guilloux me fait part de sa joie. Il accepte avec enthousiasme. » (Carnets 1921-1944, op. cit., p. 126)
- En tĂ©moigne cette lettre de Gide : « Mon cher Guilloux (âŠ) lâon trouv(e) prĂ©fĂ©rable, Ă Moscou, que nous nâarrivions pas tous ensemble. »
- Guilloux livre simplement ce rĂ©sumĂ© dans les Carnets : « juin-juillet. Voyage en URSS. Parti de Londres Ă bord du Cooperatzia, bateau soviĂ©tique. Voyage de cinq jours jusquâĂ Leningrad, oĂč nous retrouvons Gide. (âŠ) AprĂšs Leningrad, Moscou oĂč Gide nâa pas Ă©tĂ© reçu par Staline. De Moscou Ă Tiflis. TraversĂ©e du Caucase en voiture. Ă Tiflis, oĂč nous sommes restĂ©s une huitaine de jours, Schiffrin et moi avons quittĂ© nos compagnons et sommes rentrĂ©s Ă Paris en chemin de fer, via Moscou, Berlin et la Belgique. Comme toujours en voyage, je nâai pas Ă©crit une seule note, mais je me souviendrai. » (Carnets 1921-1944, op. cit., p. 131) Il supprimera mĂȘme des passages de lâĂ©dition des Carnets (T1) publiĂ©e en 1978. GrĂ©goire LemĂ©nager compare le texte tronquĂ© de lâentretien sur Gide avec Aragon paru dans Les Carnets avec le texte original conservĂ© dans le Fonds Louis Guilloux, « Guilloux, critique littĂ©raire ? » dans Louis Guilloux un Ă©crivain dans la presse, sous la direction de J.B. Legavre et M. Touret, Rennes, PUR, 2014, p. 167-180.
- « Les bords de la Neva, Ă Leningrad, la visite au camp des pionniers ; dans les rues de la ville, prĂ©paration dâun dĂ©filĂ© ; cet aspect de « rĂ©volution permanente » de Moscou, « le dĂ©filĂ© sur la place Rouge, ces milliers dâhommes et de femmes (âŠ) câĂ©tait grisant et terrible Ă la fois (âŠ) le mausolĂ©e. LĂ©nine, son visage, ses mains⊠Heureux, je le suis nĂ©anmoins. Reconnaissant Ă Gide. Car jâaurai enfin une image de lâURSS. » EugĂšne Dabit, Journal intime (1928-1936), Gallimard, 1939.
- « Nous avons dĂźnĂ© en compagnie de trois Ă©crivains gĂ©orgiens⊠Nous sommes rentrĂ©s Ă Tiflis un peu ivres. DĂ©sireux de voir et dâapprocher des femmes. Mais rien. »
- Pierre Herbart, En URSS 1936, Gallimard, 1937.
- Cité par Bouadchidzé, Retour en URSS avec André Gide, Hermann 2005, p. 83.
- Cité par Bouadchidzé, op. cit., p. 139.
- AndrĂ© Gide, Le retour de lâUrss et Retouches, Cahiers AndrĂ© Gide, volume V, Gallimard 1974.
- Louis Aragon occupe une place centrale dans la gauche intellectuelle française de cette pĂ©riode : en tant que membre influent du PCF, il est agrĂ©Ă© auprĂšs de lâURSS, prĂ©sent dans la prĂ©paration du voyage, prĂ©sent Ă©galement Ă Moscou aux obsĂšques de Maxime Gorki et chargĂ© au PĂšre Lachaise de prononcer un discours aux obsĂšques de Dabit.
- Marie-Noël Rio, « Inventer un journal de combat », sur Le Monde diplomatique,
- Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 140.
- « Ce que Bloch avait Ă me dire, câest quâil a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© que je ne ferai plus partie du journal. » (Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 153).
- « septembre 1936 - AprĂšs le dĂźner, chez Gide â qui nous lit son livre sur lâURSS. Câest un revirement total, brutal, inattendu. Un beau scandale en perspective ; il voudrait rendre tous ses compagnons de voyage solidaires de ses vues, il y a une phrase trĂšs nette dans ce sens que je lui demande de supprimer, ce Ă quoi il consent. » (Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 133)
- « Gide. Un reproche quâon pourrait lui faire, câest de nâavoir pas quittĂ© lâURSS dĂšs quâil sâest rendu compte quâil nâĂ©tait pas dâaccord. Pourquoi nâavoir pas « rompu » aprĂšs sa visite manquĂ©e Ă Staline ? Pourquoi a-t-il acceptĂ© les cadeaux jusquâĂ la fin ? (âŠ) Je commence Ă croire quâil nâest venu en URSS que pour y chercher lâautoritĂ© dont il avait besoin pour dire ce quâil dit aujourdâhui. » (Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 149)
- Câest en privĂ© que Louis Guilloux en dira plus, et sur Gide et sur LâURSS : pour cela, il faut lire en particulier La Citoyenne, le livre autobiographique de FrĂ©dĂ©rique HĂ©brard, la fille d'AndrĂ© Chamson chez qui Louis Guilloux Ă©tait frĂ©quemment reçu, Ă Versailles. Lâouvrage raconte comment Guilloux savait se moquer de Gide poursuivi par le GuĂ©pĂ©ou : « Comme lâautre jour quand Louis Guilloux a imitĂ© monsieur Gide : il lâimite trĂšs bien, il chuinte et il me semble, en lâentendant chuinter, voir monsieur Gide lui-mĂȘme avec sa cape Ă carreaux. Alors il lâimitait et il disait : « Semons la guĂ© ! » Jâai ri avec tout le monde parce quâil Ă©tait vraiment rigolo mais jâai demandĂ©, parce que je ne veux pas mourir idiote : - Quâest-ce que « la guĂ© » ? Ils riaient toujours, Henri Petit a eu pitiĂ© de moi et mâa dit que câĂ©tait la GuĂ©pĂ©ou et que monsieur Gide quand il Ă©tait en Russie, tous les matins, il disait Ă Louis Guilloux : « « Semons la guĂ© ! » et que des fois ils y arrivaient. » (FrĂ©dĂ©rique HĂ©brard, La Citoyenne, Jâai Lu, 2003, p. 94)
- Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p 103.
- Louis Guilloux, Les Batailles perdues, Gallimard, 1960, p. 244.
- Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 116.
- De nombreuses pages des Carnets se font lâĂ©cho Ă la fois de lâĂ©coute de la situation en Espagne alors que la guerre est effective depuis le 17 juillet 1936 et de lâaction Ă Saint-Brieuc. Pour 1937 : les bombardements des avions nationalistes espagnols sur Barcelone (p. 207-8) et Ă Saint-Brieuc les dĂ©marches Ă la prĂ©fecture pour amĂ©liorer le sort des rĂ©fugiĂ©s, la Bataille de Teruel (p. 212) et, Ă Saint-Brieuc la rencontre de lâabbĂ© VallĂ©e, pour 1939 la situation Ă Madrid (p. 229) et lâĂ©vasion de Salido dans la nuit du 3 au 4 avril 1939 la veille du dĂ©part du contingent pour le Camp du Vernet (p. 233). Ă chaque fois le local et lâinternational et lâattention aux plus faibles : « A ma connaissance, cinq enfants en bas Ăąge sont morts dans le dĂ©partement depuis lâarrivĂ©e des rĂ©fugiĂ©s de catalogne. Tous sont morts de broncho-pneumonie, câest-Ă -dire de froid. » (p. 234)
- Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit. , p. 156.
- Louis Guilloux, Le Jeu de patience, Gallimard, 1949, p. 24.
- Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, Gallimard, 1978, p. 247.
- Ibid., p. 248.
- Ibid., p. 247-249.
- Ibid., p. 268.
- Francine Dugast-Portes, « Louis Guilloux et la presse pendant La Seconde Guerre mondiale : réflexions sur sa position dans le champ littéraire », Louis Guilloux. Un écrivain dans la presse, s. d. de Jean-Baptiste Legavre et MichÚle Touret, Rennes, PUR, 2014, p. 125-147.
- GisĂšle Sapiro, La guerre des Ă©crivains, 1940â1953, Fayard, 1999, p. 366.
- Herbert R. Lottman, La Rive Gauche, Seuil, 1981, p. 199.
- Pascal Ory et Jean-François Sirinelli, Les intellectuels en France, de lâaffaire Dreyfus Ă nos jours, Armand Colin, 2002, p. 136.
- Guilloux publie deux textes dans Coemedia : « ââAutour du feuââ Pot-pourri » le 10 janvier 1942 et « Tante blanche » le 13 fĂ©vrier 1942.
- Arnaud Flici, Jean-Baptiste Legavre : « La tentation autonomiste dans lâĆuvre de Louis Guilloux », Louis Guilloux politique, s. d. de Jean-Baptiste Legavre, Rennes, PUR, 2016, p. 163-192.
- TĂ©moignage de HĂ©lĂšne Le Chevalier dans Confrontations, no 1, novembre 1994, p. 8-10.
- Louis Guilloux, Carnets 1921-1944,op. cit., p. 283-284.
- Louis Guilloux, Le jeu de patience, Gallimard, 1949, p. 405.
- Louis Guilloux, Carnets 1921-1944, op. cit., p. 349-356.
- Jean Ancelin, Histoire de la RĂ©sistance dans les CĂŽtes-du-Nord, DES non publiĂ©, 1946. Lâauteur a recueilli les tĂ©moignages de Louis Guilloux et de Pierre Petit.
- Louis Guilloux, O.K., Joe ! Le dossier dâune Ćuvre, Ădition prĂ©sentĂ©e par MichĂšle Touret et Sylvie Golvet, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2016, p. 142-145. Voir aussi la prĂ©face de Christian Bougeard et lâintroduction de MichĂšle Touret.
- Alice Kaplan, L'InterprĂšte, Gallimard, 2007
- Gallimard a publié Le Jeu de patience en 1949. Cette premiÚre édition a fait l'objet d'une réédition en deux volumes en 1981. Aucune édition en livre de poche à ce jour.
- Anne Roche « Parpagnacco ou le sourire du chat » (Louis Guilloux, écrivain, dir. Francine Dugast, Marc Gontard, 1999, Presses universitaires de Rennes, p. 211-221).
- Yves Loisel, Louis Guilloux, biographie, 1998, Ăditions Coop Breizh, p. 221.
- Sur le labyrinthe chez Guilloux, voir ValĂ©rie Poussard-Fournaison, La Description selon Louis Guilloux. RĂ©alisme et tragĂ©die, LâHarmattan 2018
- Editions Grasset & Fasquelle, 1953, 9782246129967
- Yves Loisel, Louis Guilloux. Biographie. Coop Breizh, 1998
- Voir Henri Godard, Louis Guilloux, romancier de la condition humaine, Gallimard, 1999)
- cité par Yves Loisel, louis Guilloux, biographie, Coop Breizh, 1998, p. 232
- ThÚse de doctorat en lettres, Université paris III Sorbonne nouvelle, 2015, p. 284-291
- Ibid.
- voir Alexandra Vasic : « Les usages de la presse dans Les Batailles perdues » in Louis Guilloux, un écrivain dans la presse / sous la direction de Jean-Baptiste Legavre, MichÚle Touret, Presses universitaires de Rennes
- La Confrontation, Paris, Gallimard, p. 58
- Alexandra Vasic, « Un auteur à contre-courant ? Louis Guilloux au temps du Nouveau Roman » in Louis Guilloux dans les médias, dir. Jean-Baptiste Legavre, Presses universitaires de Rennes, 2019, p. 201
- voir Alexandra Vasic « Un auteur à contre-courant ? Louis Guilloux au temps du Nouveau Roman » in Louis Guilloux dans les médias, dir. Jean-Baptiste Legavre, Presses universitaires de Rennes, 2019, p. 203.
- voir Alexandra Vasic « Salido, Louis Guilloux et le parti : rendre compte ou régler ses comptes ? Une condamnation en sourdine », Louis Guilloux politique, dir. Jean-Baptiste Legavre et MichÚle Touret, p. 143-161, op. cit.
- voir ValĂ©rie Fournaison-Poussard « ConsĂ©crations dâune voix singuliĂšre, Coco perdu dans la presse », in Louis Guilloux dans les mĂ©dias, op. cit. , PUR, 2019.
- En 1972, Louis Guilloux signe pour la tĂ©lĂ©vision l'adaptation des Thibault de Roger Martin du Gard, et en 1973 celle de trois rĂ©cits de Joseph Conrad, La Ligne d'ombre, La Folie Almayer et Freya des Sept-Ăles (cf. Louis Guilloux sur IMDB).
- Sabrina Parent, « Ăpuisement et Ă©vĂ©nement dans Coco perdu, essai de voix », in LâAtelier de Louis Guilloux, dir. Madeleine FrĂ©dĂ©ric et MichĂšle Touret, Presses universitaires de Rennes, 2012, p. 181-195
- Ibid., p. 192
- Yves Loisel, Louis Guilloux, biographie, p. 216
- cité par Yves Loisel
- Yves Loisel p. 216-217
- voir Yves Loisel, p. 255
- pour une Ă©tude des Carnets, voir Pierre-Jean Dufief « Dit et non-dit dans les Carnets de Louis Guilloux », LâAtelier de Louis Guilloux, (dir. Madeleine FrĂ©dĂ©ric et MichĂšle Touret), PUR, 2012, p. 41-52
- Yves Loisel, p. 259
- Yannick Pelletier, « Louis Guilloux et les Bleus » ; Les Bleus de Bretagne (Colloque présidé par Michel Vovelle), ed. Fédération CÎtes-du-Nord, 1989, Saint-Brieuc 1991.
- Ăd. Sun, 1973 ; rĂ©Ă©ditions sous le titre Ma Bretagne, ed. Folle Avoine, 1993 et 1998.
- Yannick Pelletier, « Un Palante peut en cacher un autre » ; Confrontations, (Bulletin de la Société des amis de Louis Guilloux), 2010.
- Ăd. ChĂȘne, 1977 ; rĂ©Ă©dition 1984.
- Il existe par ailleurs des traductions de Louis Guilloux en breton : La Maison du peuple, Ti ar Bobl, ed. An Here, 1999 et Douze balles montĂ©es en breloque, Daouzed boled aet dâober ur stribilhon, ed. Goater, 2018.
- Yannick Pelletier, « Louis Guilloux et le mal celtique » , Louis Guilloux écrivain (Colloque dirigé par Francine Dugast-Portes et Marc Gontard) ; Presses universitaires de Rennes, 2000.
- Albert Camus, Louis Guilloux, Correspondance (1945-1959), Ădition d'AgnĂšs Spiquel-Courdille , Gallimard, 2013 (ISBN 9782070139262).
- André Malraux, Lettres Choisies 1920-1976 présentées par François de Saint-Cheron, coll. « Blanche », Gallimard, 2012 (ISBN 9782070135943).
- Jean GuĂ©henno et Louis Guilloux, Correspondance Guilloux-GuĂ©henno (1927-1967) - Les paradoxes dâune amitiĂ©, Ă©dition Ă©tablie par Pierre-Yves Kerloc'h, La Part commune, 2010 (ISBN 978-2-84418-154-1).
- Correspondance Jean Paulhan - Louis Guilloux (1929-1962), Ă©dition Ă©tablie par Pierre-Yves Kerloc'h, Ăditions CNRS, 2010.
- Correspondance Louis Guilloux, Georges, Emilienne et Lucie Robert (1920-1970), édition établie par Pierre-Yves Kerloc'h, Spécial Confrontations (no 19), Société des Amis de Louis Guilloux, 2006.
- Toby Garfit, Jean Grenier, un Ă©crivain et un maĂźtre, La Part commune, 2010 (ISBN 2844181708 et 9782844181701).
- Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, Presses universitaires de Rennes.
- Pierre-Yves Kerlocâh et Yves PriĂ©, « Georges Palante - Louis Guilloux - LâamitiĂ© - la fĂȘlure (1917-1921) », Cahiers Louis Guilloux, vol. 2., Ă©ditions Folle Avoine, 2008.
- Frédérique Hébrard La Citoyenne, Flammarion, 1985 (ISBN 208064601X et 9782080646019).
Frédéric Hébrard est la fille d'André Chamson. - Voir Sylvie Golvet, mémoire de DEA, Louis Guilloux dans la vie littéraire de son siÚcle, 1. Recueil de textes et articles. 2. Présence dans les périodiques, sous la direction de MichÚle Touret, Université Rennes 2, année 2001-2002.
- Jean-Baptiste Legavre, « Mourir dans la presse. Les nĂ©crologies de Louis Guilloux », in Louis Guilloux dans les mĂ©dias. Les rĂ©ceptions de lâĆuvre, Jean-Baptiste Legavre dir., avec le concours de MichĂšle Touret, Rennes, PUR, 2019.
- Sylvie Golvet, Louis Guilloux : devenir romancier, Rennes, PUR, 2010.
- Op. cit.
- Arnaud Flici, « Louis Guilloux en portrait. Mise en scĂšne et re-mise en scĂšne iconographique dans la presse (1927-1980) » », in Louis Guilloux dans les mĂ©dias, les rĂ©ceptions de lâĆuvre, op. cit.
- RĂ©my Rieffel, « Lâart du clair-obscur. Les entretiens de Louis Guilloux Ă la radio et Ă la tĂ©lĂ©vision », ibid.
- Voir Jeanyves GuĂ©rin, « La double rĂ©ception de Cripure, thĂ©Ăątre et politique dans les annĂ©es 1960-1970 », ibid. et Adeline Wrona, « Le dĂ©fi de lâactualisation. Du Sang noir Ă Cripure, ibid.
- Voir les recherches dâHenri Godard, Yannick Pelletier.
- Voir Rachel Mazuy, « Une histoire à méandres. Louis Guilloux et la presse communiste », in Louis Guilloux dans les médias, op. cit.
- Voir les relevés effectués par Sylvie Golvet.
- Voir dans Louis Guilloux dans les médias les analyses de Grégoire Leménager pour Le Nouvel Observateur, AgnÚs Spiquel pour la Nouvelle Revue française, Bruno Curatolo pour Esprit et Europe.
- Jean-Charles Ambroise, « Un peuple de papiers. Le monde populaire de Louis Guilloux vu par la presse », ibid.
- Voir ValĂ©rie Poussard-Fournaison, « Coco perdu dans la presse, consĂ©crations dâune voix singuliĂšre », ibid. et de la mĂȘme La Description selon Louis Guilloux, rĂ©alisme et tragĂ©die, Paris, LâHarmattan, 2018.
- Alexandra Vasic, « Un auteur à contre-courant ? Louis Guilloux au temps du Nouveau Roman » in Louis Guilloux dans les médias, op. cit.
- MichÚle Touret, « Une réception au long cours. La réception universitaire de Louis Guilloux », ibid.
- « Carnets de recherches sur l'Ćuvre de Louis Guilloux », sur HypothĂšses (consultĂ© le ).
- « Louis Guiloux », sur Les médiathÚques de la baie (consulté le )
- Jeanyves Guérin, ibid.
- héros de son roman Le Sang noir
- Voir Arnaud Flici, « Le fonds Louis Guilloux des bibliothÚques municipales de Saint-Brieuc » in : L'Atelier de Louis Guilloux [en ligne]. Rennes : Presses universitaires de Rennes, 2012.
- Dans Carrefour, 29 juillet 1976, Pascal Pia écrit : « O.K. Joe ! raconte ce qu'a vu le narrateur lorsqu'en août 1944 il servait d'interprÚte auprÚs des officiers américains chargés d'instruire et de juger le procÚs des GI's, coupables d'avoir violé des paysannes dans une Bretagne qui n'était pas encore entiÚrement libérée, puisque des troupes allemandes tenaient toujours Lorient, Brest et Saint-Malo. Presque toujours ces forceurs de filles étaient des Noirs, que le tribunal condamnait à mort, et qui étaient bientÎt pendus. Une fois pourtant, un Blanc eut à répondre d'un meurtre commis aprÚs boire. Ses juges l'acquittÚrent, sans avoir estimé nécessaire de demander à l'interprÚte la traduction des témoignages », in D'une guerre à l'autre, p. 99.
- http://bca.cotesdarmor.fr/Default/prix-louis-guillloux-2019.aspx
- PrĂ©sentation du prix sur le site des BibliothĂšques des CĂŽtes dâArmor
- (CoordonnĂ©es :48° 06âČ 36âł N, 1° 41âČ 57âł O)
Voir aussi
Bibliographie
- Ălise Dirou, Le Saint Brieuc de Louis Guilloux, Ă©ditions de la Ville Close
- Ădouard Prigent, Louis Guilloux, P.U.B., 1971
- Yannick Pelletier, ThĂšmes et symboles dans l'Ćuvre romanesque de Louis Guilloux, Klincksieck-Presses Universitaires de Rennes 2, 1979
- Yannick Pelletier (directeur), Louis Guilloux, Plein Chant, 1982
- Jean-Louis Jacob, Louis Guilloux romancier du peuple, NoroĂźt, 1983
- Jean-Louis Jacob (dir.), Louis Guilloux, colloque de Cerisy, Calligrammes, 1986
- Yannick Pelletier, Louis Guilloux, de Bretagne et du monde, mémoires d'un responsable, bibliothÚque des CÎtes-d'Armor, 1994
- Yannick Pelletier (directeur), Le Mal absolu (colloque Louis Guilloux et la guerre), Folle Avoine/ Ville de Saint-Brieuc, 1995
- Yannick Pelletier, « Louis Guilloux, de Bretagne et du monde », Ăcrire la Bretagne : 1960-1995, Bernard Hue et Marc Gontard (dir.), Presses universitaires de Rennes, 1995, 237 p., p. 105-116
- Jean-Claude BourlĂšs, Louis Guilloux, les maisons d'encre, Christian Pirot, 1997
- Henri Godard (directeur), Louis Guilloux, Dix-neuf/Vingt, 1997
- Yves Loisel, Louis Guilloux, biographie, Ă©ditions Coop Breizh, 1998
- Walter Redfern, Louis Guilloux, Ear-witness, Rodopi, Amsterdam, 1998
- Dossier Louis Guilloux, Europe, no 839, 1999
- Yannick Pelletier, Louis Guilloux, ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres-ADPF, 1999
- Yannick Pelletier, Des TĂ©nĂšbres Ă l'Espoir, An Here, 1999
- Henri Godard, Louis Guilloux, romancier de la condition humaine, Gallimard, 1999
- Francine Dugast-Portes et Marc Gontard (dir.), Louis Guilloux, Ă©crivain, Presses universitaires de Rennes, 2000 (ISBN 2-86847-529-9)
- Yannick Pelletier, Louis Guilloux et la Bretagne, Blanc Silex, 2004
- Société des Amis de Louis Guilloux, Louis Guilloux et le Voyage (actes du colloque), 2005
- Sylvie Golvet, Louis Guilloux, devenir romancier, Presses universitaires de Rennes, 2010 (ISBN 978-2-7535-1105-7) ; livre en ligne sur le parcours littéraire de Louis Guilloux
- Madeleine Frédéric et MichÚle Touret (dir.), L'Atelier de Louis Guilloux, colloque de Cerisy, Presses universitaires de Rennes, 2011 (ISBN 978-2-7535-1751-6)
- SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux, Des amis, des compagnons au cĆur de la crĂ©ation littĂ©raire (actes des rencontres), 2012
- Jean-Baptiste Legavre et MichĂšle Touret (dir.), Un Ă©crivain dans la presse, Presses universitaires de Rennes, 2012 (ISBN 978-2-7535-3278-6)
- Louis Guilloux. MichĂšle Touret et Sylvie Golvet (Ă©d. prĂ©s. par), O.K., Joe ! Le dossier dâune Ćuvre, Presses universitaires de Rennes, 2016 (ISBN 978-2-753-54772-8)
- Jean-Baptiste Legavre (dir.), Louis Guilloux politique, Presses universitaires de Rennes, 2016 (ISBN 978-2-7535-4895-4)
- Valérie Poussard-Fournaison, La Description selon Louis Guilloux - Réalisme et tragédie, L'Harmattan, 2018 (ISBN 978-2-343-14530-3)
- Jean-Baptiste Legavre (dir.), Louis Guilloux dans les mĂ©dias. Les rĂ©ceptions de l'Ćuvre, Presses universitaires de Rennes , 2019 (ISBN 978-2753578142)
- Yannick Pelletier, Louis Guilloux, in Littérature bretonne de langue française, coll. dir. par P. Rannou, Fouesnant, Yoran Embanner, 2020, p. 225-232
- Ali Chibani, « Dévalorisation du "réfugié". Désir de liberté et éthique romanesque dans Salido de Louis Guilloux », dans Vies et fictions d'exils, sous la direction de Hanen Allouch, Simon Harel, Louis-Thomas Leguerrier, Laurence Sylvain, Presses de l'université de Laval, coll. « Intercultures », 2 février 2021
Discographie
- Louis Guilloux, Le Sang noir, textes choisis par Louis Guilloux et Yannick Pelletier, lus par Louis Guilloux, éditions Coop-Breizh, Spézet
Filmographie
- Roland Savidan et Florence Mahé, Louis Guilloux l'insoumis, Société des Amis de Louis Guilloux et R.S. productions, 70 minutes, 2009 ; éd. CinémathÚque de Bretagne, 2010
- Jean-Marie Drot, Voyage en Bretagne avec Louis Guilloux, droits : INA
- Pierre-André Boutang, Libres propos d'un homme libre : Louis Guilloux, , Institut national de l'audiovisuel, voir en ligne
- Entretien avec Cécile Clairval, émission télévisée de la série Chant profond, INA, 1973
- Entretien avec Bernard Pivot, Apostrophes, 1978, édité en DVD, Gallimard-NRF/INA, 2003
Théùtre
- L'Herbe de mémoire, voyage avec Louis Guilloux, texte et mise en scÚne Anne Quesemand, 1998
Enregistrements radiophoniques
- Entretien avec Roger Vrigny, France Culture, , ,
- Entretien avec Anne Fabre-Luce, France Culture,
- Entretien avec Roger Grenier, France Culture, Ă©mission La vie entre les lignes,
- Entretien avec Jacques Chancel, France Inter, Ă©mission Radioscopie,
- Entretien avec Patrice Galbeau, France Culture, Ă©mission MĂ©morables, 1977
Articles connexes
Liens externes
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- La SociĂ©tĂ© des Amis de Louis Guilloux : biographie et bibliographie exhaustives, enrichies de nombreuses photographies ; Confrontations, revue annuelle de lâassociation
- « Louis Guilloux, un Ă©crivain nourri de lâhistoire de son siĂšcle »
- L'ouvrage Compagnons de Louis Guilloux en classe, Ă©ditĂ© par le CRDP de Bretagne Compagnons est un texte court qui permet dâentrer facilement dans lâĆuvre de Louis Guilloux et de faire dĂ©couvrir cet auteur.
- Le dossier consacré à Louis Guilloux, tiré de l'exposition réalisée à Saint-Brieuc, téléchargeable au format PDF sur la page de la « petite bibliothÚque » de l'ADPF/CulturesFrance Publications
- Les bibliothĂšques municipales de Saint-Brieuc conservent dans leurs collections patrimoniales le fonds d'archives littĂ©raires de Louis Guilloux, acquis pour l'essentiel en 1994 : archives des Ćuvres inĂ©dites et publiĂ©es, correspondance, dossiers de presse, iconographie. Catalogue accessible en ligne.@