Histoire Ă©volutive du vivant
L'histoire évolutive du vivant, ou histoire de l'évolution, est l'histoire des processus par lesquels des populations d'organismes vivants ont acquis et transmis des traits biologiques nouveaux de génération en génération. La répétition de ces processus sur une grande échelle de temps explique l'apparition de nouvelles variétés et espÚces, et finalement la vaste diversité du monde vivant. Les espÚces biologiques contemporaines sont reliées entre elles par une ascendance commune et sont le produit de l'évolution et de la spécialisation sur plusieurs milliards d'années.
Orange : glaciation
Voir aussi : la frise chronologique de l'Univers et Histoire de la Terre
Chronologie simple
.
- â4,54 milliards d'annĂ©es : formation de la Terre.
- â4,4 milliards d'annĂ©es : formation de l'hydrosphĂšre et de la croĂ»te terrestre[1].
- â4,28 milliards d'annĂ©es: plus anciennes formes de vie dont on ait la trace[2].
- â3,8 milliards d'annĂ©es : premiĂšres cellules dont on ait des fossiles, alors que la tempĂ©rature de surface est comprise entre 40 et 80 °C[3].
- â3,7 Ă â3,45 milliards d'annĂ©es (absence de consensus scientifique) : apparition des premiers stromatolithes et de la photosynthĂšse anoxygĂ©nique[4] - [5] - [6].
- â2,45 milliards d'annĂ©es : apparition de la photosynthĂšse oxygĂ©nique.
- â2,4 milliards d'annĂ©es : Grande Oxydation et dĂ©but de la glaciation huronienne.
- â2,2 milliards d'annĂ©es : transition procaryote-eucaryote (apparition des Grypania).
- â2,1 milliards d'annĂ©es : apparition des premiers organismes multicellulaires (Gabonionta)[7].
- â1,5 milliard d'annĂ©es : apparition de la sexualitĂ©[8].
- â575 millions d'annĂ©es : explosion de l'Ădiacarien.
- â500 millions d'annĂ©es : apparition des chordĂ©s.
- â480 millions d'annĂ©es : apparition des plantes terrestres.
- â475 millions d'annĂ©es : extinction Ordovicien-Silurien.
- â400 millions d'annĂ©es : apparition des insectes, des graines et des sarcoptĂ©rygiens (poumons).
- â370 millions d'annĂ©es : extinction du DĂ©vonien.
- â365 millions d'annĂ©es : apparition des tĂ©trapodes.
- â360 millions d'annĂ©es : dĂ©but de la glaciation du Karoo et apparition des amphibiens.
- â330 millions d'annĂ©es : apparition des amniotes.
- â252 millions d'annĂ©es : extinction Permien-Trias.
- â230 millions d'annĂ©es : apparition des dinosaures.
- â220 millions d'annĂ©es : extinction "mineure" du Trias, apparition des mammifĂšres.
- â200 millions d'annĂ©es : extinction Trias-Jurassique.
- â160 millions d'annĂ©es : apparition des euthĂ©riens.
- â150 millions d'annĂ©es : apparition des oiseaux.
- â135 millions d'annĂ©es : apparition des plantes Ă fleurs.
- â66 millions d'annĂ©es : extinction CrĂ©tacĂ©-PalĂ©ogĂšne.
Conditions géologiques et chimiques avant l'apparition de la vie
La naissance de la Terre
La masse terrestre sâest constituĂ©e il y a environ 4,6 milliards dâannĂ©es. Entre â4,5 et â3,9 milliards dâannĂ©es il nây avait ni terre ferme ni ocĂ©ans ni lacs. Ă â3,9 milliards dâannĂ©es la surface de la Terre sâĂ©tait suffisamment refroidie pour former une fine pellicule qui reposait sur le manteau encore en fusion[9]. Ă partir de â3,9 milliards dâannĂ©es et pendant 1,3 milliard dâannĂ©es la surface de la Terre a entamĂ© son refroidissement. La tempĂ©rature est passĂ©e de 1 000 °C Ă environ 300 °C[10].
La « soupe primitive »
LâhydrogĂšne (de symbole H) est lâĂ©lĂ©ment le plus simple et le plus abondant dans lâUnivers[11]. Il est trop lĂ©ger pour ĂȘtre retenu seul dans lâatmosphĂšre terrestre, mais il se combine Ă dâautres Ă©lĂ©ments de lâatmosphĂšre. Avec lâoxygĂšne (O) il forme lâeau (H2O), avec le carbone (C) du mĂ©thane (CH4), avec lâazote (N) de lâammoniac (NH3), etc. ; ces quatre Ă©lĂ©ments (HOCN) sont Ă la base la matiĂšre vivante[10].
La Terre est situĂ©e Ă proximitĂ© dâune source dâĂ©nergie, le Soleil, mais elle en est suffisamment Ă©loignĂ©e pour que ses constituants ne sâĂ©chappent pas sous forme de gaz et que puissent coexister des corps liquides, solides et gazeux. La situation de la Terre est spĂ©cifique : sa distance au Soleil permet le maintien de lâeau sous les formes liquide, solide et gazeuse.
AprĂšs â3,9 milliards dâannĂ©es et pendant des centaines de millions dâannĂ©es, les conditions Ă la surface terrestre (tempĂ©rature, pression, dĂ©charges Ă©lectriques, rayonnement, tourbillons...) rendent possible les rĂ©actions chimiques. Les gaz riches en hydrogĂšne, venus de l'intĂ©rieur de la Terre, rĂ©agissent avec les gaz riches en carbone de l'atmosphĂšre. Les premiĂšres biomolĂ©cules Ă l'origine de la vie sur Terre se forment : glucides, acides aminĂ©s, ARN, ADN[12].
LâARN et lâADN ont la capacitĂ© de se rĂ©pliquer. La rĂ©plication est, dâun point de vue molĂ©culaire, un processus chimique courant[13].
Origine de la vie
Les plus anciens micro-organismes fossiles sont datĂ©s d'au moins 3,5 milliards d'annĂ©es, durant le PalĂ©oarchĂ©en. Lâorigine de la vie sur Terre demeure incomprise, et les processus qui y ont conduit sont souvent hypothĂ©tiques.
L'Archéen et l'évolution des premiÚres cellules
Il y a 4 milliards d'années débute l'Archéen, période au cours de laquelle les cyanobactéries vont apparaßtre et constituer les stromatolithes actuelles. Ces procaryotes (unicellulaires) immobiles (sans flagelle) longtemps appelés algues bleue-vertes sont les premiers organismes à posséder les 2 photosystÚmes leur permettant de pratiquer la photosynthÚse à l'origine de la Grande Oxydation puis de la couche d'ozone qui a pour effet d'absorber la plus grande partie du rayonnement solaire ultraviolet biocide, stimulant ainsi le développement de la biodiversité. Elles participent de ce fait à la réduction de la concentration en CO2 atmosphérique et à l'augmentation de la proportion en oxygÚne. Selon la théorie de l'endosymbiose plastidiale, elles seraient à l'origine des plastes dans les végétaux supérieurs intégrés par symbiose dans leurs cellules.
La cellule
Les biomolĂ©cules se sont concentrĂ©es. Des composĂ©s chimiques prĂ©sents dans la soupe primitive, (les phospholipides), Ă©taient capables dâenfermer dans une membrane une gouttelette dâeau et son contenu. Ce sont ainsi formĂ©es des vĂ©sicules. La membrane permettait les Ă©changes entre lâextĂ©rieur et lâintĂ©rieur. Plusieurs centaines de millions dâannĂ©es plus tard des molĂ©cules dâADN et dâARN ont pĂ©nĂ©trĂ© dans les vĂ©sicules, les transformant en cellules[14]. En fabriquant des protĂ©ines et en produisant encore plus dâADN ces cellules pouvaient se reproduire[13]. Le premier ĂȘtre unicellulaire, LUCA, ancĂȘtre commun Ă tout ce qui est vivant sur la Terre, aurait ainsi vĂ©cu il y a 3,5 Ă 3,8 milliards dâannĂ©es[12].
Les bactéries
La bactĂ©rie est un organisme unicellulaire. Elle nâa pas de noyau. Son patrimoine gĂ©nĂ©tique fondĂ© sur lâADN et lâARN est dispersĂ© dans le milieu aqueux de la cellule[15]. Les premiĂšres bactĂ©ries datent dâil y a environ â3,8 milliards dâannĂ©es. Elles Ă©taient capables de vivre dans lâeau de surface oĂč la tempĂ©rature Ă©tait encore de plus de 90 °C. Des fossiles de bactĂ©ries ont Ă©tĂ© retrouvĂ©s dans des sĂ©diments dâenviron â3,5 milliards dâannĂ©es[12].
Des traces de vie microbienne ont aussi été trouvées dans des roches sédimentaires continentales ùgées de 3,2 milliards d'années, qui se seraient formées dans un lit de riviÚre. Ces microorganismes étaient déjà adaptés au milieu terrestre, et notamment aux sécheresses épisodiques ainsi qu'aux rayonnements ionisants (la couche d'ozone n'existait pas à cette époque)[16].
Déploiement des bactéries
Pendant 1,3 milliard dâannĂ©es, les bactĂ©ries vont sâĂ©tendre sur la planĂšte sous forme de colonies. Du fait de son petit nombre de gĂšnes, une bactĂ©rie nâest pas Ă mĂȘme dâassurer toutes les rĂ©actions chimiques nĂ©cessaires au maintien de la vie et Ă la reproduction. Elle doit donc vivre en Ă©quipe Ă lâintĂ©rieur desquelles les gĂšnes sâĂ©changent. Les Ă©quipes sont composĂ©es de diffĂ©rentes souches. Chaque souche comprend un trĂšs grand nombre dâexemplaires. Les souches de bactĂ©ries vivant Ă proximitĂ© viennent apporter leur contribution en gĂšnes ou en nutriments utiles. Avec le temps la sĂ©lection naturelle rend lâĂ©quipe stable et capable de maintenir des fonctions complexes. Les Ă©quipes se dispersent et finissent par occuper toutes les parties habitables de la planĂšte[17].
Milieu sans oxygĂšne
Les bactĂ©ries peuvent vivre dans des milieux trĂšs divers et dans des solutions salines qui seraient meurtriĂšres pour dâautres organismes[18]. Elles ont pris naissance dans un milieu sans oxygĂšne. Elles tiraient alors leur Ă©nergie du glucose, abondant dans la soupe primitive. Lorsque le glucose sâest fait rare elles lâont synthĂ©tisĂ© elles-mĂȘmes en utilisant lâĂ©nergie solaire et le sulfure dâhydrogĂšne. Dâautres bactĂ©ries ont tirĂ© leur Ă©nergie du gaz carbonique Ă la place du sulfure dâhydrogĂšne. Dans cette derniĂšre opĂ©ration, de lâoxygĂšne est libĂ©rĂ©. Comme elles ont prolifĂ©rĂ© le taux dâoxygĂšne dans lâeau et dans lâatmosphĂšre sâest accru. Il est passĂ© de lâordre de 2 % dans lâatmosphĂšre il y a trois milliards dâannĂ©es Ă 21 % actuellement. Lâaugmentation de la concentration en oxygĂšne a induit une nouvelle fonction, la respiration. Celle-ci fournit un meilleur rendement que le glucose[19].
Capacités évolutives
Les bactĂ©ries sont des organismes sans noyau. Une cellule bactĂ©rienne peut contenir trois cents fois moins de gĂšnes permanents quâune cellule Ă noyau. Elle ne possĂšde quâun nombre minime dâinstructions, juste pour se rĂ©pliquer et se maintenir. Mais grĂące Ă la permĂ©abilitĂ© de leur membrane, les bactĂ©ries Ă©changent constamment entre elles leurs ADN porteurs de gĂšnes. La facilitĂ© et la vitesse de la propagation de lâinformation gĂ©nĂ©tique sont proches de celles des tĂ©lĂ©communications modernes, compte tenu de la complexitĂ© et de la valeur biologique de lâinformation transfĂ©rĂ©e. Ces Ă©changes sont une source de combinaisons et dâĂ©volutions permanentes. Ils permettent une adaptation rapide lorsquâelles sont confrontĂ©es Ă un autre environnement. Lorsquâelles se trouvent dans un milieu particulier, elles reçoivent des particules gĂ©nĂ©tiques dâautres cellules se trouvant dĂ©jĂ dans ce milieu et porteuses des gĂšnes qui leur sont spĂ©cifiques. Il en rĂ©sulte une grande adaptabilitĂ©[20].
Cela ne suffit pas dans les processus dâĂ©volution. LâADN doit ĂȘtre modifiĂ© pour la transmission aux gĂ©nĂ©rations suivantes. La modification se rĂ©alise par mutation. Vu la rapiditĂ© oĂč les bactĂ©ries se multiplient, elles subissent de nombreuses mutations. Une bactĂ©rie rapide se divise environ toutes les vingt minutes. En moins dâun jour, elle peut se multiplier en cinq milliards dâexemplaires. Une division sur un million environ donne naissance Ă une mutation. La plupart des mutants meurent. Mais certaines mutations sont porteuses dâune fonctionnalitĂ© nouvelle. Une bactĂ©rie mutante apportant une novation positive peut rapidement sâĂ©tendre Ă tout son habitat[21].
Adaptation Ă lâenvironnement
AprĂšs avoir atteint une certaine dimension, les Ă©quipes bactĂ©riennes se dispersent. Chacune sâajuste aux conditions locales. Dans le nouveau milieu se trouvent dĂ©jĂ des bactĂ©ries adaptĂ©es Ă cet environnement. Elles fournissent leurs gĂšnes Ă la nouvelle Ă©quipe. Le transfert a lieu trĂšs rapidement. Les bactĂ©ries se rĂ©pandent ainsi dans toutes les parties habitables de la planĂšte[22].
Modification de lâenvironnement
Durant leurs deux premiers milliards dâannĂ©es, les bactĂ©ries ont constamment transformĂ© la surface et lâatmosphĂšre terrestres. Elles ont modifiĂ© la composition de lâeau en produisant des gaz. En dĂ©composant lâeau pour produire de lâĂ©nergie, elles ont dĂ©gagĂ© de lâoxygĂšne[23]. Cet oxygĂšne nâa pas seulement induit la respiration. Il a Ă©galement crĂ©Ă© une couche dâozone dans lâatmosphĂšre. Celle-ci intercepte des rayons solaires et a permis le refroidissement de la Terre. La respiration dĂ©gage du gaz carbonique[19]. Ce processus a modifiĂ© la composition de lâatmosphĂšre en oxygĂšne et en gaz carbonique[24].
Protérozoïque et apparition de multicellularité
L'existence d'Úres glaciaires généralisées il y a 850 à 630 millions d'années environ, une Úre que l'on appelle le Cryogénien, aurait favorisé le regroupement des colonies bactériennes (ou des animalcules les plus primitifs) autour « d'oasis » de vies dans des sources hydrothermales sous-marines ou affleurant en surface. La planÚte étant plongée dans un manteau de glaces, ce qui rend les comportements « individualistes » des micro-organismes défavorables.
Les cellules Ă noyau
Le bond en avant
La division fondamentale entre les formes de vie sur Terre ne rĂ©side pas entre les plantes et les animaux mais entre les cellules sans noyau et les cellules avec noyau. Durant leurs deux premiers milliards dâannĂ©es, les cellules sans noyau ont transformĂ© la surface et lâatmosphĂšre terrestres. Cette phase, trĂšs importante pour le dĂ©veloppement du vivant, a durĂ© prĂšs de deux fois plus longtemps que la phase suivante. Tous les systĂšmes chimiques essentiels de la vie y ont Ă©tĂ© composĂ©s et miniaturisĂ©s[25].
La symbiose
Avec le temps, les populations de bactĂ©ries coĂ©voluaient. Elles Ă©taient devenues des communautĂ©s Ă©troitement interdĂ©pendantes. Elles ne se contentaient pas dâĂ©changes. Des cellules sâaccolaient puis fusionnaient. Une cellule pouvait pĂ©nĂ©trer dans une autre. Elle pouvait conserver sa membrane, formant ainsi un noyau. Dâautres ont perdu leur membrane et ont Ă©tĂ© intĂ©grĂ©es dans le milieu aqueux de la cellule. Toutes emmenaient leur ADN avec elles. De nouvelles entitĂ©s complexes sont nĂ©es de ces fusions. Les cellules Ă noyau avaient jusquâĂ mille fois plus dâADN que les bactĂ©ries[26].
La transition entre les bactĂ©ries et les cellules Ă noyau a Ă©tĂ© si soudaine quâelle ne peut pas ĂȘtre expliquĂ©e par les mutations. Celles-ci sâĂ©talent dans le temps et les changements sont graduels. Le passage au noyau nâa pu se faire que par symbiose, câest-Ă -dire par absorption dâune cellule par une autre. La symbiose crĂ©e sans transition de nouvelles espĂšces. La symbiose a Ă©tĂ© une source majeure dâinnovation dans lâĂ©volution du vivant. Ainsi celle-ci sâest rĂ©alisĂ©e par coopĂ©ration, interactions fortes et dĂ©pendances mutuelles et pas seulement par concurrence[27].
Lâautonomie
Certaines bactĂ©ries pratiquaient la photosynthĂšse. Elles en tiraient lâĂ©nergie. Quand la teneur du milieu en oxygĂšne a augmentĂ©, dâautres bactĂ©ries ont acquis la capacitĂ© de respirer. La respiration accroĂźt considĂ©rablement le rendement Ă©nergĂ©tique. Lorsque les bactĂ©ries ont fusionnĂ© pour former des cellules Ă noyau celles-ci ont possĂ©dĂ© les deux fonctions, celle de photosynthĂšse et celle de respiration. Elles ont Ă©galement, grĂące au noyau, mais pas seulement, enrichi leur patrimoine gĂ©nĂ©tique. Ces cellules Ă©taient devenues autonomes. Il sâagit lĂ dâune innovation majeure reprĂ©sentant un grand bond en avant[28]. La nouvelle cellule pouvait Ă©voluer en nâutilisant que ses propres moyens. Elle allait donner naissance aux vĂ©gĂ©taux et aux animaux[29].
Les cellules sexuelles
La pĂ©nĂ©tration dâun spermatozoĂŻde dans un ovule est caractĂ©ristique des cellules Ă noyau. La sexualitĂ© est une forme de symbiose. Les biologistes estiment que la sexualitĂ© biparentale sâest maintenue parce quâelle augmente la variĂ©tĂ© et accĂ©lĂšre lâĂ©volution. Selon Lynn Margulis, elle ne serait pas cruciale dans le processus de lâĂ©volution. Margulis estime que les organismes complexes sont reliĂ©s Ă la synthĂšse de lâADN, de lâARN et des protĂ©ines et non directement au caractĂšre biparental de la sexualitĂ©. La sexualitĂ© a Ă©tĂ© contournĂ©e par la parthĂ©nogenĂšse. Dâautres formes de multiplication asexuĂ©e existent ou auraient pu ĂȘtre crĂ©Ă©es beaucoup plus Ă©conome en Ă©nergie que la reproduction sexuĂ©e[30].
Les végétaux
Certaines cellules sans noyau ont acquis des pigments bleu-vert. Des bactĂ©ries ont intĂ©grĂ© en plus un pigment jaune ce qui les a rendues proches des vĂ©gĂ©taux. Ces bactĂ©ries Ă©taient devenues autonomes capables de capter lâĂ©nergie solaire et possĂ©dant les fonctions de respiration et de photosynthĂšse. Elles nageaient grĂące Ă leurs flagelles et ont commencĂ© Ă dominer les ocĂ©ans et autres lieux humides de la planĂšte. Elles ont pris la forme dâalgues et de phytoplancton. Le rĂšgne vĂ©gĂ©tal a commencĂ©[31].
La sortie de lâeau
Les algues existaient dĂ©jĂ en tant quâorganismes sans noyau dans le milieu liquide depuis 1 900 millions dâannĂ©es[32]. Leur sortie de lâeau date dâil y a environ 460 millions dâannĂ©es.
Elles habitaient dans les eaux peu profondes exposĂ©es au soleil. De temps en temps, ces zones sâassĂ©chaient. Elles conservaient leur humiditĂ© interne tout en sĂ©chant Ă lâextĂ©rieur. Certaines ont survĂ©cu et se sont multipliĂ©es. Elles nâavaient ni tige ni feuille[33].
Les mousses
Les mousses sont les premiers vĂ©gĂ©taux terrestres. Elles datent dâil y a environ 480 millions dâannĂ©es. Elles dĂ©rivent dâalgues vertes proches de la surface qui se sont retrouvĂ©es Ă©mergĂ©es et ont rĂ©ussi Ă sâadapter. Elles ne possĂšdent encore ni racines ni vraies feuilles. Certaines ont des Ă©cailles qui captent lâeau sur toute la surface. Les symbioses avec des bactĂ©ries leur ont fourni des fonctions qui assureront leur dĂ©veloppement : assimilation de lâeau et des sels minĂ©raux, production de lignine. Celle-ci leur donne une rigiditĂ© qui permettra lâĂ©dification du systĂšme vasculaire[34].
Les fougĂšres
Les fougĂšres sont apparues il y a 400 millions dâannĂ©es. GrĂące Ă la formation de lignine, les racines et les tiges ont pu se dĂ©velopper. Le tissu vasculaire permet de faire circuler dans toute la plante lâeau et les sels minĂ©raux du sol ainsi que les nutriments Ă©laborĂ©s dans les feuilles. Les feuilles se couvrent d'une couche de cire qui limite lâĂ©vaporation. Elles se dotent Ă©galement de stomates qui, en sâouvrant ou en se refermant, rĂ©gulent les Ă©changes gazeux[34].
Les plantes Ă graines
Les plantes Ă graines datent dâil y a 350 millions dâannĂ©es[32]. Le manque dâeau posait aux plantes un dĂ©fi vital. Le dĂ©veloppement des graines a fourni une solution Ă ce problĂšme. La graine, rĂ©sistante, permit Ă lâembryon de la plante dâattendre le moment le plus propice pour se dĂ©velopper[35]. Les graines Ă©taient dissĂ©minĂ©es par le vent et les insectes[36].
Les plantes Ă fleurs
Les Angiospermes datent dâil y a 150 millions dâannĂ©es[32]. Elles ont protĂ©gĂ© leurs ovules dans un ovaire qui donnera le fruit. Elles se sont rapidement rĂ©pandues sur lâensemble des terres Ă©mergĂ©es. Elles dominent la flore actuelle. Câest le rĂ©sultat dâune grande diversitĂ© dâadaptation Ă©volutive[36]. Elles ont pu se doter de fruits durs et de noyaux afin de protĂ©ger leurs embryons. Les coĂ©volutions avec les insectes ont Ă©tĂ© un facteur important de dĂ©veloppement. Elles ont permis la dissĂ©mination des graines. Les animaux ont stoppĂ© certaines de leurs croissances exubĂ©rantes en mangeant leurs fruits et leurs feuilles. Elles ont rĂ©pliquĂ© en Ă©laborant des molĂ©cules toxiques pour se protĂ©ger[37].
Les animaux
Les animaux seraient apparus il y a environ 750 millions d'annĂ©es[38] - [39]. Ils Ă©taient dĂ©nuĂ©s de parties dures. Les cellules sâaccolaient progressivement. Elles prenaient des formes globuleuses ressemblant Ă des vers. Ces animaux se nourrissaient de bactĂ©ries et de cellules sans noyau. Certains associĂ©s par symbiose Ă des microalgues ont construit des massifs coralliens. Dâautres se dĂ©veloppaient sur les tapis microbiens se trouvant aux bords des ocĂ©ans. Peut-ĂȘtre Ă cette Ă©poque existaient dĂ©jĂ des Ă©toiles de mer et des oursins. Les premiĂšres parties dures se sont formĂ©es il y a 580 millions dâannĂ©es. Elles Ă©taient nĂ©cessaires lors du passage Ă la terre ferme pour se protĂ©ger des rayons solaires. Lâadaptation Ă la vie terrestre impliquait pour les animaux des changements trĂšs importants concernant la respiration et pour parer Ă la sĂ©cheresse. Bien quâapparus plus tĂŽt que les plantes, les animaux auront besoin de 35 millions dâannĂ©es de plus quâelles pour passer Ă la terre ferme. Les premiers insectes non ailĂ©s datent dâil y a 400 millions dâannĂ©es. Dans lâeau existaient dĂ©jĂ des poissons Ă mĂąchoires et sur terre des plantes vasculaires. De mĂȘme, lorsque sont apparus les premiers mammifĂšres au sang chaud, les plantes Ă fleurs commençaient dĂ©jĂ Ă se dĂ©velopper[40].
Des changements majeurs Ă©taient nĂ©cessaires pour le passage Ă la terre ferme. La concentration de lâoxygĂšne dans lâair gazeux Ă©tait des milliers de fois supĂ©rieures Ă celles prĂ©sentes dans lâeau. Lâappareil respiratoire qui fonctionne dans lâair Ă©tait Ă crĂ©er. Un revĂȘtement externe, peau ou carapace, devenait nĂ©cessaire pour se protĂ©ger des rayons du Soleil qui brillait directement sans filtre. Surtout, sur la terre, la sĂ©cheresse Ă©tait une menace mortelle permanente. Les organismes qui ont survĂ©cu Ă©taient ceux qui dâune maniĂšre ou dâune autre transportaient avec eux de lâeau. Seul un petit nombre de reprĂ©sentants du rĂšgne animal a rĂ©ussi Ă sâadapter Ă la vie en milieu terrestre. Les animaux dâaujourdâhui sont issus de trois ou quatre groupes dâanimaux aquatiques. Certaines espĂšces vivant aujourdâhui sont retournĂ©es Ă leur environnement maritime. Il en est ainsi de certains reptiles, des phoques et des otaries[41].
Les champignons
Les champignons constituent la troisiĂšme voie de lâĂ©volution des cellules Ă noyau. Leurs cellules peuvent contenir plusieurs noyaux. Leur milieu liquide peut couler plus ou moins librement de cellule en cellule. Ils se nourrissent en absorbant de prĂ©fĂ©rence des substances chimiques. Ils ont coĂ©voluĂ© avec les plantes avec lesquelles ils vivent en symbiose. Leur rĂŽle dans le dĂ©veloppement des plantes est crucial. On en a retrouvĂ© des fossiles dans des tissus vĂ©gĂ©taux remontant Ă plus de 300 millions dâannĂ©es. Sans eux les plantes mourraient par manque de minĂ©raux essentiels[42].
Les champignons transfĂšrent aux plantes de lâeau et des sels minĂ©raux. Ils ont aidĂ© les premiĂšres plantes terrestres il y a 400 Ă 450 millions dâannĂ©es Ă coloniser les terres Ă©mergĂ©es. Ils communiquent avec les racines des plantes soit par contact soit par pĂ©nĂ©tration. Ils prĂ©lĂšvent dans le sol de lâazote organique et minĂ©ral quâils fournissent aux plantes sous forme de vitamines, dâantibiotiques ou dâhormones. Ils leur transmettent de mĂȘme du phosphore, aprĂšs lâavoir transformĂ© en phosphore organique. Ils Ă©laborent des acides aminĂ©s ainsi que bien dâautres Ă©lĂ©ments tels que le zinc, le manganĂšse, le cuivre, le calcium, le potassium[43].
Paléozoïque et la colonisation du milieu terrestre
Lignées passées au milieu terrestre
Cénozoïque : histoire évolutive récente
Lâhomme
On retrouve chez lâhomme les traces aquatiques tĂ©moignant dâune existence ancestrale dans lâeau. Le passage des animaux Ă la vie terrestre sâest effectuĂ© en transportant leur environnement aquatique avec eux. Lâembryon des animaux et de lâhomme se dĂ©veloppe en flottant dans lâhumiditĂ© primordiale dâune matrice. La concentration du sel dans lâeau de mer et dans le sang est, dâun point de vue pratique, identique. La proportion respective de sodium, de potassium et de chlorates dans les tissus humains est Ă©tonnamment similaire Ă celle des ocĂ©ans. Ces sels sont des composĂ©s que les animaux ont transportĂ© avec eux au cours de leur voyage vers la terre ferme[44].
Ăvolution aujourd'hui
L'Ă©volution, bien que lente et rarement observable Ă l'Ă©chelle humaine, peut parfois ĂȘtre dĂ©celĂ©e chez les espĂšces Ă reproduction rapide. Ainsi, les moustiques sont parfois localement devenus rĂ©sistants Ă des insecticides. Il en va de mĂȘme pour les bactĂ©ries responsables de pathologies humaines, souvent multirĂ©sistantes aux antibiotiques.
Enfin, on peut constater le résultat d'une évolution divergente récente dans le cas de la colonie de crabes découverte sous Rome[45]. Ainsi qu'un changement de régime alimentaire et l'apparition de sous-espÚces chez certains lézards, comme Podarcis sicula, avec modifications anatomiques internes et externes.
Le vivant sur une autre planĂšte
Des composĂ©s organiques ont Ă©tĂ© retrouvĂ©s dans des mĂ©tĂ©orites. Ce nâest pas forcĂ©ment un signe de vie en un autre lieu. Il suffit de mettre lâhydrogĂšne, lorsquâil est en grande quantitĂ©, en prĂ©sence de carbone avec des sources dâĂ©nergie pour produire, selon les rĂšgles de la chimie, les constituants de la vie[46].
Six Ă©lĂ©ments seulement constituent le dĂ©nominateur commun de toute la vie et reprĂ©sentent 99 % du poids sec de tout ĂȘtre vivant. Ce sont, outre lâhydrogĂšne et le carbone, lâoxygĂšne, lâazote, le phosphore et le soufre. La proportion de ces Ă©lĂ©ments dans les acides aminĂ©s est constante. Elle se retrouve dans toutes les formes de vie, depuis les bactĂ©ries jusquâau corps humain. Les spĂ©cificitĂ©s de la Terre ne rĂ©sident pas dans ses composants mais dans les conditions de son milieu : humiditĂ©, tempĂ©ratures douces, champ de gravitation. Ce sont ces spĂ©cificitĂ©s qui ont favorisĂ© certaines combinaisons chimiques plus que dâautres[47]. Les combinaisons molĂ©culaires se forment lorsque sont disponibles lâĂ©nergie et le temps[19].
La biosphĂšre, câest-Ă -dire le milieu des ĂȘtres vivants, terre, eau, air, sâest dĂ©veloppĂ©e grĂące Ă la respiration. Celle-ci consomme de grandes quantitĂ©s dâoxygĂšne. Il y a plus de deux milliards dâannĂ©es lâatmosphĂšre terrestre contenait cependant trĂšs peu dâoxygĂšne, seulement 2 %. La vie a pu cependant sây dĂ©velopper. En lâabsence dâoxygĂšne, les bactĂ©ries ont dâabord utilisĂ© la fermentation du glucose. Le glucose Ă©tait abondant dans la soupe primitive. Certaines bactĂ©ries Ă©taient capables de vivre dans les conditions de la soupe primitive oĂč la tempĂ©rature de lâeau de surface Ă©tait encore de plus de 90 °C[48]. Il a Ă©tĂ© retrouvĂ© des bactĂ©ries Ă plus de trois kilomĂštres sous la surface. Elles vivaient totalement isolĂ©es de lâĂ©nergie solaire. Elles produisaient des composants cellulaires en oxydant lâhydrogĂšne et le mĂ©thane et en rĂ©duisant le gaz carbonique prĂ©sent dans les calcaires. Cette dĂ©couverte a confirmĂ© la probabilitĂ© que la vie existe, sous des formes diffĂ©rentes, sur dâautres planĂštes[49].
Dans l'enseignement
L'histoire Ă©volutive est gĂ©nĂ©ralement abordĂ©e en Europe, comme au collĂšge de France[50] Ă Paris, sous un double angle : biologie historique et Ă©volutionnisme. On Ă©tudie lâhistoire de la vie sur Terre et les mĂ©canismes sous-jacents Ă cette histoire, ainsi que les diffĂ©rentes interprĂ©tations de cette histoire et de ces mĂ©canismes. Ces interprĂ©tations ont variĂ© dans l'espace et dans le temps selon les contextes et les cultures ou religions.
Notes et références
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Naissance du vivant » (voir la liste des auteurs).
Notes
Références
- (en) S A Wilde,J W Valley, W H Peck,C M Graham, « Evidence from detrital zircons for the existence of continental crust and oceans on the Earth 4.4 Gyr ago », Nature, no 409,â , p. 175â178 (DOI 10.1038/35051550).
- (en) Matthew S. Dodd, Dominic Papineau, Tor Grenne, John F. Slack, Martin Rittner, Franco Pirajno, Jonathan OâNeil & Crispin T. S. Little, « Evidence for early life in Earth's oldest hydrothermal vent precipitates », Nature, vol. 543, no 7643,â , p. 60â64 (DOI 10.1038/nature21377).
- (en) C. Bounama, S. Franck, W. Von Bloh, « The fate of Earth's ocean », Hydrology and Earth System Sciences, vol. 5, no 4,â , p. 569-576.
- (en) Allen P. Nutman, Vickie C. Bennett, Clark R. L. Friend, Martin J. Van Kranendonk et Allan R. Chivas, « Rapid emergence of life shown by discovery of 3,700-million-year-old microbial structures », Nature, vol. 537, no 7621,â 22 septembre 2016 (publication en ligne : 31 aoĂ»t 2016), p. 535-538 (DOI 10.1038/nature19355, lire en ligne).
- David Larousserie, « Les plus anciennes traces de vie dĂ©couvertes au Groenland », Le Monde,â (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consultĂ© le ).
- (en) Abigail C. Allwood, Minik T. Rosing, David T. Flannery, Joel A. Hurowitz & Christopher M. Heirwegh, « Reassessing evidence of life in 3,700-million-year-old rocks of Greenland », Nature,â (DOI 10.1038/s41586-018-0610-4).
- (en) El Albani et coll., « Large colonial organisms with coordinated growth in oxygenated environments 2.1âGyr ago », Nature, no 466,â , p. 100-104 (DOI 10.1038/nature09166).
- Gilles BĆuf, La biodiversitĂ©, de lâocĂ©an Ă la citĂ©, CollĂšge de France, , p. 7.
- Margulis, p. 35
- Margulis, p. 34.
- Margulis, p. 32.
- Suty 2014, p. 6
- Margulis, p. 58.
- Margulis, p. 49, 51.
- Margulis, p. 57
- (en) Martin Homann, Pierre Sansjofre, Mark Van Zuilen, Christoph Heubeck, Jian Gong et al., « Microbial life and biogeochemical cycling on land 3,220 million years ago », Nature Geoscience, vol. 11,â , p. 665-671 (DOI 10.1038/s41561-018-0190-9).
- Margulis, p. 36, 93.
- Wladimir Vernadsky, La biosphĂšre, Seuil, 2002, p. 188, 189.
- Suty 2014, p. 7.
- Margulis, p. 82, 89, 90, 95.
- Margulis, p. 74, 75, 82, 309.
- Margulis, p. 91 Ă 93
- Margulis, p. 19, 63.
- Margulis, p. 65.
- Margulis, p. 19, 118.
- Margulis, p. 122 Ă 126, 137, 138.
- Margulis, p. 121, 129, 18, 314.
- Suty 2014, p. 7, 8
- Margulis, p. 186.
- Margulis, p. 169 Ă 172.
- Margulis, p. 143, 144.
- Suty 2014, p. 9
- Margulis, p. 187 Ă 189.
- Suty 2014, p. 9, 10.
- Margulis, p. 190.
- Suty 2014, p. 11
- Margulis, p. 192.
- (en-US) Carl Zimmer, « Is This the First Fossil of an Embryo? », The New York Times,â (ISSN 0362-4331, lire en ligne, consultĂ© le )
- (en) John A. Cunningham, Alexander G. Liu, Stefan Bengtson et Philip C. J. Donoghue, « The origin of animals: Can molecular clocks and the fossil record be reconciled? », BioEssays, vol. 39, no 1,â , e201600120 (ISSN 1521-1878, DOI 10.1002/bies.201600120).
- Margulis, p. 187, 190, 192 Ă 195, 198, 200, 201.
- Margulis, p. 200, 201, 202.
- Margulis, p. 207.
- Suty 2015b, p. 25, 30, 31.
- Margulis, p. 202, 203.
- Sous les vestiges de Rome, une colonie de crabes prospĂšre.
- Margulis, p. 47.
- Margulis, p. 44, 47, 48.
- Suty, p. 6, 7.
- Margulis, p. 313.
- Leçon inaugurale d'Armand de RicqlÚs au CollÚge de France [PDF], Chaire de Biologie historique et évolutionnisme, 6 mai 1996.
Voir aussi
Bibliographie
- Lydie Suty, Les végétaux, évolution, développement et reproduction, éditions QuÊ, 2014.
- Lydie Suty, Les végétaux, des symbioses pour mieux vivre, éditions QuÊ, 2015b.
- Lynn Margulis, LâUnivers bactĂ©riel, Albin Michel, 1989.