Glaciation du Karoo
La glaciation du Karoo est une pĂ©riode glaciaire qui dura de â320 Ă â260 millions d'annĂ©es. Ce fut la seconde glaciation du PalĂ©ozoĂŻque, la troisiĂšme Ăšre de lâhistoire de la Terre.
Elle est nommĂ©e d'aprĂšs la tillite du groupe de Dwyka, situĂ© dans la rĂ©gion du Karoo en Afrique du Sud, oĂč les preuves de cette glaciation furent pour la premiĂšre fois clairement identifiĂ©es au xixe siĂšcle.
L'assemblage des plaques tectoniques de la Laurussia et du proto-Gondwana, formant la Pangée, créa une masse continentale massive dans la région Antarctique ; la fermeture de l'océan Rhéique et de l'océan Iapétus perturba la circulation des courants chauds dans la Panthalassa et l'océan Thétys, ce qui entraßna un refroidissement progressif des étés ainsi que des accumulations de neige en hiver, ce qui fit croßtre la taille des glaciers qui couvrirent la majeure partie du Gondwana.
Au moins deux épisodes majeures de glaciation ont été identifiés. Le premier se produisit au Mississippien (359-318 Ma) ; la calotte glaciaire s'étendit depuis un noyau situé en Afrique australe et en Amérique du Sud. Le second eut lieu au Pennsylvanien (318-299 Ma) ; le bouclier glaciaire crût depuis l'Australie et l'Inde.
Glaciations du Paléozoïque tardif
Orange : glaciation
Voir aussi : la frise chronologique de l'Univers et Histoire de la Terre
Selon Eyles et Young, « La glaciation du Dévonien tardif est bien documentée dans trois larges bassins intracratoniques au Brésil (bassins de Solimoes, Amazonas et Paranaiba) ainsi qu'en Bolivie. Au début du CarbonifÚre (env. 350 Ma), les strates glaciaires commencÚrent à s'accumuler dans les bassins sub-andéens de Bolivie, Argentine et Paraguay. Au milieu du CarbonifÚre, la glaciation s'étendit à l'Antarctique, l'Australie, l'Afrique australe, le sous-continent indien, l'Asie et la péninsule arabique. Durant l'accumulation glacaire du carbonifÚre tardif (env. 300 Ma), une grande partie du Gondwana connut des conditions glaciaires. Les dépÎts glaciaires les plus épais du Permo-CarbonifÚre sont ceux du groupe de Dwyka (1 km d'épaisseur) dans le bassin du Karoo en Afrique australe, le groupe Itararé dans le bassin du Paranå, au Brésil (1,4 km) et le bassin de Carnarvon, dans l'est de l'Australie. Les glaciations du Permo-CarbonifÚre sont significatives car elles marquent les changements glacio-eustatiques du niveau des mers qu'on peut retrouver dans les bassins non glaciaires. La glaciation du Gondwana au Paléozoïque tardif pourrait s'expliquer par le déplacement du supercontinent au-dessus du pÎle sud[trad 1] - [1]. »
Au nord de l'Ăthiopie, des reliefs glaciaires tels que des stries glaciaires, des roches moutonnĂ©es et des marques laissĂ©es par le balayage du sol par les glaciers peuvent ĂȘtre trouvĂ©s, enfouis sous les dĂ©pĂŽts glaciaires du CarbonifĂšre et du Permien infĂ©rieur[2].
Causes
L'Ă©volution des plantes terrestres au dĂ©but du DĂ©vonien entraĂźna une Ă©lĂ©vation Ă long terme du niveau d'oxygĂšne. De grandes fougĂšres arborescentes, atteignant 20 mĂštres de hauteur, accompagnĂ©es de lycopodes de 30 Ă 40 mĂštres, dominaient les forĂȘts du CarbonifĂšre qui prospĂ©raient dans des marais de type Ă©quatorial, des Appalaches Ă la Pologne, puis, plus tard, sur les pentes des monts de l'Oural. Le taux d'oxygĂšne atmosphĂ©rique atteignit des niveaux Ă©levĂ©s â on avança 35 %[3], mais des modĂšles rĂ©visĂ©s ramenĂšrent ce taux Ă une valeur comprise entre 15 et 25 %[4] â, et le taux global de dioxyde de carbone s'Ă©tablit Ă moins de 300 parties par million[5], ce qui correspond aux pĂ©riodes glaciaires. Cette rĂ©duction de l'effet de serre s'accompagna d'une accumulation de lignine et de cellulose, provenant des troncs d'arbres et autres dĂ©bris vĂ©gĂ©taux, qui se retrouvĂšrent enfouies dans les sĂ©ries houillĂšres du CarbonifĂšre. La rĂ©duction du taux de dioxyde de carbone fut suffisante pour dĂ©clencher le processus de climat polaire, avec des Ă©tĂ©s trop froids pour permettre Ă la neige accumulĂ©e en hiver de fondre. L'accumulation de six mĂštres de neige suffit Ă crĂ©er une pression telle que les niveaux infĂ©rieurs se transforment en glace.
L'Ă©lĂ©vation de l'albĂ©do causĂ©e par l'extension de l'inlandsis enclencha une boucle de rĂ©troaction positive, permettant aux glaces de s'Ă©tendre encore plus, jusqu'Ă ce que le systĂšme atteigne ses limites. La chute de tempĂ©rature limita la pousse des plantes, et le niveau Ă©levĂ© d'oxygĂšne favorisa les incendies ; mĂȘme humides, les plantes pouvaient brĂ»ler. Ces deux phĂ©nomĂšnes contribuĂšrent Ă relĂącher du dioxyde de carbone dans l'atmosphĂšre, freinant l'effet « Terre boule de neige » et gĂ©nĂ©rant un rĂ©chauffement par effet de serre. Les taux de CO2 remontĂšrent Ă 300 ppm au Permien.
Ces facteurs interrompirent et inversĂšrent l'extension des boucliers glaciaires ; la baisse de l'albĂ©do semble avoir Ă©tĂ© suffisante pour crĂ©er des Ă©tĂ©s plus chauds et des hivers plus doux qui limitĂšrent l'Ă©paisseur des champs de neige dans les zones Ă partir desquelles s'Ă©taient dĂ©veloppĂ©s les glaciers. L'Ă©lĂ©vation du niveau de la mer causĂ©e par le rĂ©chauffement ennoya les plaines oĂč les marĂ©cages anoxiques piĂ©geaient le carbone, le transformant en charbon. La planĂšte prĂ©sentant moins de surfaces susceptibles de sĂ©questrer le carbone, le dioxyde de carbone retourna en plus grande quantitĂ© dans l'atmosphĂšre, contribuant d'autant au rĂ©chauffement. Il y a 250 Ma, la Terre revint Ă un niveau d'oxygĂšne atmosphĂ©rique proche de l'actuel.
Effets
L'Ă©lĂ©vation du niveau d'oxygĂšne durant la glaciation du Karoo eut un effet majeur sur l'Ă©volution des plantes et des animaux. La haute teneur en oxygĂšne et la haute pression atmosphĂ©rique favorisĂšrent des mĂ©tabolismes plus Ă©nergivores et virent l'Ă©mergence de grands vertĂ©brĂ©s terrestres et de trĂšs grands insectes volants, telle Meganeura, une libellule de 75 cm d'envergure[7]. L'Arthropleura, herbivore trapu, lointain ancĂȘtre des mille-pattes, faisait jusqu'Ă 1,8 mĂštre de longueur, Ă l'instar des EuryptĂ©rides (scorpions de mer), tandis que certains scorpions terrestres atteignaient 50 ou 70 centimĂštres.
L'augmentation des niveaux d'oxygÚne conduisit également la végétation à développer une plus grande résistance au feu, et, finalement, à l'apparition des plantes à fleurs. Des études génétiques ont montré que cela se produisit lorsque, un peu plus tard, les Angiospermes se séparÚrent des Cycadophytes et des Gymnospermes[8], à une date encore incertaine, entre 240 et 140 Ma[9] - [10] - [11].
La glaciation du Karoo présente en outre des séquences sédimentaires uniques, appelées cyclothems (en). Elles ont été produites par la répétition des altérations successives des environnements marins et non-marins.
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de lâarticle de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Karoo Ice Age » (voir la liste des auteurs).
Citation originale
- (en) « Renewed Late Devonian glaciation is well documented in three large intracratonic basins in Brazil (Solimoes, Amazonas and Paranaiba basins) and in Bolivia. By the Early Carboniferous (c. 350 Ma) glacial strata were beginning to accumulate in sub-andean basins of Bolivia, Argentina and Paraguay. By the mid-Carboniferous glaciation had spread to Antarctica, Australia, southern Africa, the Indian Subcontinent, Asia and the Arabian Peninsula. During the Late Carboniferous glacial accumulation (c. 300 Ma) a very large area of Gondwana land mass was experiencing glacial conditions. The thickest glacial deposits of Permo-Carboniferous age are the Dwyka Formation (1000 m thick) in the Karoo Basin in southern Africa, the Itarare Group of the Parana Basin, Brazil (1400 m) and the Carnarvon Basin in eastern Australia. The Permo-Carboniferous glaciations are significant because of the marked glacio-eustatic changes in sea level that resulted and which are recorded in non-glacial basins. Late Paleozoic glaciation of Gondwana could be explained by the migration of the supercontinent across the South Pole. »
Références
- (en) Nicholas Eyles et Grant Young, « Geodynamic controls on glaciation in Earth history », dans M. Deynoux, J.M.G. Miller, E.W. Domack, N. Eyles, I.J. Fairchild et G.M. Young (éds.), Earth's Glacial Record, Cambridge University Press, (ISBN 0521548039), p. 10-18
- (en) Ernesto Abbate, Piero Bruni et Mario Sagri, « Geology of Ethiopia: A Review and Geomorphological Perspectives », dans Paolo Billi, Landscapes and Landforms of Ethiopia, Dordrecht & Springer, coll. « World Geomorphological Landscapes », (ISBN 978-94-017-8026-1, lire en ligne), p. 33â64
- (en) Robert A. Berner, « Atmospheric oxygen over Phanerozoic time », PNAS, vol. 96, no 20,â , p. 10955â10957 (PMID 10500106, PMCID 34224, DOI 10.1073/pnas.96.20.10955, Bibcode 1999PNAS...9610955B, lire en ligne)
- (en) Timothy M. Lenton, « The role of land plants, phosphorus weathering and fire in the rise and regulation of atmospheric oxygen », Global Change Biology, vol. 7, no 6,â , p. 613-629 (DOI 10.1046/j.1354-1013.2001.00429.x).
- (en) Peter J. Franks, Dana L. Royer, David J. Beerling, Peter K. Van de Water, David J. Cantrill, Margaret M. Barbour et Joseph A. Berry, « New constraints on atmospheric CO2 concentration for the Phanerozoic », Geophysical Research Letters, vol. 31, no 13,â (DOI 10.1002/2014GL060457, Bibcode 2014GeoRL..41.4685F, lire en ligne)
- (en) H.R. Wanless et J.M. Weller, « Correlation and extent of Pennsylvanian cyclothems », Geological Society of America Bulletin, vol. 43,â , p. 1003â1016 (DOI 10.1130/gsab-43-1003)
- (en) Gauthier Chapelle et Lloyd S. Peck, « Polar gigantism dictated by oxygen availability », Nature, vol. 399,â , p. 114â115 (DOI 10.1038/20099)
- (en) Peter Crane, Else Marie Friis et Kaj Pedersen, « The origin and early diversification of angiosperms », Nature, no 374,â , p. 27-33 (DOI 10.1038/374027a0).
- « Les plantes Ă fleurs seraient apparues plus tĂŽt que prĂ©vu », Science et vie,â (lire en ligne)
- (en) Peter A. Hochuli et Susanne Feist-Burkhardt, « Angiosperm-like pollen and Afropollis from the Middle Triassic (Anisian) of the Germanic Basin (Northern Switzerland) », Front. Plant Sci., vol. 4,â , p. 344 (DOI 10.3389/fpls.2013.00344, lire en ligne)
- (en) M.J. Moore, C.D. Bell, P.S. Soltis et D.E. Soltis, « Using plastid genome-scale data to resolve enigmatic relationships among basal angiosperms », PNAS, vol. 104,â , p. 19363â19368 (lire en ligne)
Bibliographie
- (en) D.J. Beerling et R.A. Berner, « Impact of a Permo-Carboniferous high O2 event on the terrestrial carbon cycle », Proc. Natl. Acad. Sci. U.S.A., vol. 97, no 23,â , p. 12428â12432 (DOI 10.1073/pnas.220280097, lire en ligne)