En France, un ministère est une division de l'administration publique centrale chargé de mettre en œuvre la politique gouvernementale dans un domaine précis. Le ministre, membre du gouvernement qui dirige ce ministère, est nommé par le président de la République. Il est assisté par un cabinet et a autorité sur les administrations de l’État.
Au moment de la Révolution française, les mots ministre et ministère deviennent courants et la Constitution française du 3 septembre 1791 en fixe le nombre à six : Justice, Intérieur, Contributions et revenus publics, Marine, Guerre, Affaires étrangères. Les ministères sont supprimés en avril 1794 mais rétablis dès 1795.
Si la plupart des ministères existaient déjà sous une forme plus restreinte, c'est avec le développement de l'État-providence, au cours du XXe siècle, qu'émergent réellement les ministères, qui deviennent rapidement d'énormes institutions employant des milliers de personnes (ministères des Affaires sociales, de l'Éducation nationale, de l'Industrie, des Postes et Télécommunications, etc.).
Les intitulés et place dans la hiérarchie officielle des ministères sont bien souvent le reflet des politiques menées par un gouvernement. De même les créations, modifications, regroupements (rares) de ministères correspondent aux évolutions de la société : fusion des ministères de l'Urbanisme et des Travaux publics pour donner le ministère de l'Équipement en 1966, création du ministère de l'Environnement dans les années 1970, création du ministère des Droits de la femme en 1981[1], création du ministère de l'Économie solidaire…
Depuis les années 1980, beaucoup de personnalités politiques promettent un « gouvernement resserré », mais au cours de la Ve République, rares sont les gouvernements à être passés sous la barre des 30 membres[2]. De même, certains hommes politiques souhaitent la pérennité des ministères[3]. Le projet de révision constitutionnelle de 2008 prévoyait de limiter le nombre de ministres, mais « cette disposition du projet fut rejetée par l'Assemblée nationale »[4].
Structures permanentes et structures variables
Ni le mot ni même le concept de ministère ne sont dans la Constitution française : elle organise, à très grands traits, les rapports entre le Premier ministre, les autres ministres et les autres organes (Président de la République, Parlement, Conseil d'État, etc.). Selon la Constitution, l'organisation de l'exécutif est une prérogative du gouvernement lui-même, et cette organisation peut, en théorie, être changée librement, sous la seule contrainte du respect des lois garantissant les personnes concernées.
Cependant, la Constitution fait mention de toute une liste d'emplois dont, notamment, les préfets, les recteurs des académies, et les directeurs des administrations centrales. Ainsi la Constitution reconnait-elle implicitement toute une série de structures des ministères : les administrations centrales, les préfectures (et donc, indirectement, les administrations déconcentrées dont le préfet est le chef), et les académies.
L'existence des ministères résulte de décrets, pris « en conseil d'État ». Ces décrets restent en vigueur en permanence, même si le premier acte de l'exécutif, à savoir la formation du gouvernement, en modifie les attributions et les contours, ainsi que la dénomination. À cette occasion, des regroupements ou des séparations peuvent avoir lieu, formalisés par de nouveaux décrets constitutifs ou modificatifs.
Le conseil d'État assure la permanence des ministères : il faut lui soumettre toute modification, et, en tant que juge administratif suprême, il doit savoir à quel ministère il lui faut s'adresser pour faire exécuter une de ses décisions, relative à un problème ancien né parfois longtemps avant que le ministère n'existe, voire avant même la naissance de la Ve République. Les contingences de dénomination sont traitées par deux moyens :
l'emploi de la locution « chargé de » : ainsi existera-t-il toujours un ministère « chargé des anciens combattants », même si rien, dans la structure gouvernementale, ne vient rappeler cela.
pour les grands ministères, l'emploi d'une dénomination permanente, indépendante des vicissitudes locutoires : ainsi le conseil reconnait-il un « ministère de l'intérieur » ou un « ministère de l'agriculture », bien que leurs noms officiels, leurs attributions et leurs périmètres changent plusieurs fois par décennie.
Fonction
Au sein du pouvoir exécutif, les pouvoirs initialement concentrés au sommet sont progressivement diffusés par :
la création, par une loi ou un décret, de structures autonomes, dotées de compétences spécialisés : le gouvernement confie à d'autres organes (des établissements publics d'État, par exemple) certains pouvoirs qu'il détient ;
la création du gouvernement, par laquelle le premier ministre dote les ministres en compétences et champs d'action, à charge pour lui de gérer les trous et les collisions s'il y a lieu ;
l'attribution, par chaque ministre, des pouvoirs dont il est investi à d'autres personnes, puisque le ministre ne peut pas tout faire. Ainsi naissent les ministères.
Les ministères ont deux fonctions de base :
concevoir et superviser des politiques et leur concrétisation (les textes normatifs, lois, règlements et décisions, qui les matérialisent) : c'est la tâche de l'administration centrale ;
En outre, les ministères gèrent des moyens (personnel, argent…) et assurent la tutelle ou le contrôle, dans leurs champs de compétence, d'organes dotés de pouvoirs ou de compétences propres.
À la tête du ministère se trouve le ministre (ou ministre d’État). Le regroupement récent des ministères détachés au fil du temps du ministère de l'Intérieur en « super-ministères » a conduit à la multiplication des ministres délégués, secrétaires d'État ou ministre auprès d'un ministre, qui se voient confier la supervision d'un secteur du ministère.
Les fonctions de membre du Gouvernement sont incompatibles avec l’exercice de tout mandat parlementaire, de toute fonction de représentation professionnelle à caractère national et de tout emploi public ou de toute activité professionnelle (article 23 de la Constitution).
Les attributions de chaque ministre sont fixées par décrets délibérés en conseil des ministres, après avis du Conseil d'État[5], ainsi que les administrations sur lesquelles il a autorité, et celles dont il dispose et auxquelles il fait appel.
La rémunération des ministres est, depuis 2012, de 1,4 fois la moyenne du traitement le plus élevé et du traitement le plus bas perçu par les fonctionnaires occupant des emplois de l'État classés dans la catégorie « hors échelle »[6].
Le cabinet
De 2014 à 2015, Élisabeth Borne fut directrice de cabinet de Ségolène Royal, ministre de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, avant d’être elle-même ministre en 2019. Ce fut également le cas de Dominique de Villepin (directeur de cabinet d’Alain Juppé de 1993 à 1995, avant d’être lui-même ministre entre 2002 et 2005).
Le ministre est aidé dans ses fonctions par son cabinet qui regroupe entre dix et vingt personnes. Il s’agit soit de proches politiques qui travaillent depuis longtemps avec le ministre (anciens attachés parlementaires, militants, collaborateurs dans une mairie), soit de hauts fonctionnaires recrutés dans l’administration, et qui ont choisi de se marquer politiquement. Le directeur de cabinet est généralement issu de cette dernière catégorie. Le sort des membres du cabinet est directement lié au ministre, et en cas de changement de fonctions de celui-ci, tous les membres sont généralement remplacés, les fidèles du ministre le suivent, et les fonctionnaires retournent dans l’administration. Depuis 2001, les membres du cabinet bénéficient d’« indemnités pour sujétions particulières » intégrés à leur fiches de paie (auparavant, ces bonus étaient versés en liquide et n’étaient pas déclarés)[7],[8],[9].
Chaque année, une annexe au projet de loi de finances (« jaune budgétaire ») dresse la situation du personnel affecté dans les cabinets. Selon le député PS René Dosière, le coût d’un ministre et de son cabinet (du temps du gouvernement François Fillon) est de 17 millions d’euros par an. Le poste le plus important est celui du personnel[10],[11],[12].
Administration civile
« Le Gouvernement détermine et conduit la politique de la Nation.
Il dispose de l'administration et de la force armée. »
« Les conseillers d'État, le grand chancelier de la Légion d’honneur, les ambassadeurs et envoyés extraordinaires, les conseillers maîtres à la Cour des comptes, les préfets, les représentants de l’État dans les collectivités d’outre-mer […] et en Nouvelle-Calédonie, les officiers généraux, les recteurs des académies, les directeurs des administrations centrales sont nommés en conseil des ministres. »
Placées sous l’autorité du Premier ministre et de chacun des ministres, les administrations civiles de l’État se composent, d’une part, d’administrations centrales et de services à compétence nationale, d’autre part, de services déconcentrés. La répartition des missions entre les administrations centrales, les services à compétence nationale et les services déconcentrés s’organise selon les principes suivants : Sont confiées aux administrations centrales et aux services à compétence nationale les seules missions qui présentent un caractère national ou dont l’exécution ne peut être déléguée à un échelon territorial. Les autres missions, et notamment celles qui intéressent les relations entre l'État et les collectivités territoriales, sont confiées aux services déconcentrés[13].
Administration centrale
Martine Aubry a travaillé dans l’administration du ministère du Travail et fut directrice des relations du travail entre 1984 et 1987, avant de devenir ministre du Travail, de l’Emploi et de la Formation professionnelle entre 1991 et 1993 (gouvernements Édith Cresson puis Pierre Bérégovoy), puis ministre de l’Emploi et de la Solidarité entre 1997 et 2000 (gouvernement Lionel Jospin).
Le secrétaire général assure une mission générale de coordination des services et de modernisation du ministère. Il peut être chargé, par arrêté du ministre, de missions de coordination particulières, portant sur certains dossiers, ou l'activité de certains services. L'organisation des services centraux de chaque ministère en directions générales, directions et services est fixée par décret, leur organisation en sous-directions est fixée par un arrêté du ministre concerné[14].
Missions, délégations, commissariats, désignent en général des services plus légers et moins pérennes, chargés d'une mission transversale ou ponctuelle. Des commissions interministérielles travaillent également sur des sujets transverses.
Enfin, les inspections disposent d'un rattachement direct au ministre en raison des missions particulières qui leur sont confiées.
Les administrations centrales assurent au niveau national un rôle de conception, d’animation, d’orientation, d’évaluation et de contrôle. À cette fin, elles participent à l’élaboration des projets de loi et de décret et préparent et mettent en œuvre les décisions du Gouvernement et de chacun des ministres[13]. Astreinte au principe d’impartialité de la fonction publique, l’administration incarne la continuité de l’État, quelle que soit la majorité en place[7].
Les services à compétence nationale peuvent se voir confier des fonctions de gestion, d’études techniques ou de formation, des activités de production de biens ou de prestation de services ainsi que toute autre mission à caractère opérationnel présentant un caractère national et correspondant aux attributions du ministre sous l’autorité duquel ils sont placés[13].
Lors de la constitution du gouvernement Édouard Philippe, une circulaire précise les tâches respectives des membres des cabinets ministériels et des directeurs d'administration centrale : les cabinets « doivent être centrés sur des fonctions politiques et veiller à l’explication de l’action et de la communication relative à celle-ci » et les directeurs d’administration centrale « ont en charge de mener à bien les politiques publiques dans le cadre de l’action gouvernementale ». La circulaire recommande de ne pas doubler au cabinet les fonctions de l'administration[18].
Pour exercer leurs missions, les services déconcentrés des administrations civiles de l’État sont, sauf disposition législative contraire ou exception prévue par décret en Conseil d’État, organisés dans le cadre de trois types de circonscriptions territoriales : régionale, départementale, d’arrondissement[19].
La circonscription régionale est l’échelon territorial :
de la mise en œuvre des politiques nationale et communautaire en matière de développement économique et social et d’aménagement du territoire ;
de l’animation et de la coordination des politiques de l’État relatives à la culture, à l’environnement, à la ville et à l’espace rural ;
de la coordination des actions de toute nature intéressant plusieurs départements de la région[13].
Le préfet de région est le garant de la cohérence de l’action de l'État dans la région. Il a autorité sur les préfets de département, il est responsable de l’exécution des politiques de l’État dans la région. Il a autorité sur les chefs des services déconcentrés à l’échelon régional des administrations civiles de l’État[20].
La circonscription départementale est l’échelon territorial de mise en œuvre des politiques nationale et communautaire. L’arrondissement est le cadre territorial de l’animation du développement local et de l’action administrative locale de l’État[13]. Le préfet de département met en œuvre les politiques nationales et communautaires. Il a autorité sur les chefs des services déconcentrés à l’échelon départemental des administrations civiles de l’État. le sous-préfet d'arrondissement est le délégué du préfet dans l'arrondissement[20].
Prise en compte des objectifs de développement durable
Dans l'organisation des ministères, la prise en compte des objectifs de développement durable diffère selon que l'on s'intéresse au fonctionnement interne des ministères, ou bien aux politiques publiques.
Plan ministériel administration exemplaire (PMAE)
Chaque ministère doit établir un Plan ministériel administration exemplaire (PMAE), pour ce qui est du fonctionnement interne du ministère. Ce plan décrit le processus de concertation qui permet de l'élaborer et de le suivre, dresse l'état des lieux de l'écoresponsabilité mise en œuvre dans le fonctionnement des services du ministère et de ses établissements publics sous tutelle, et présente les orientations stratégiques et les plans d'actions pour une durée de cinq ans. Le plan d'action précise les objectifs, les actions, et les structures du ministère responsables des actions[21].
Direction des pêches maritimes et de l'aquaculture (Agriculture + Mer)
Secrétariat général de ministère de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire et de la Forêt[45]
Répartition des fonctionnaires d'État
Au , la fonction publique a un effectif de 5 358 773 personnes, dont 2 398 672 dans la fonction publique d’État, qui sont affectés soit dans un ministère proprement dit, soit dans un établissement public à caractère administratif (EPA). Le tableau ci-dessous dresse la répartition des effectifs selon le ministère.
Répartition des effectifs physiques de la fonction publique de l’État au en France (métropole + DOM)[46],[N 1],[N 2]
Effectifs totaux (ministères + EPA )
Part dans les EPA (en %)
Affaires étrangères et européennes
4 532
12,8
Agriculture, alimentation, pêche, ruralité et aménagement du territoire
46 147
27,8
Ministères économique et financier
217 925
26,9
Culture et Communication
24 889
54,6
Défense et anciens combattants
292 828
2,8
Écologie, développement durable, transports et logement
86 219
16,6
Ministères de l'enseignement
1 300 791
22,6
Intérieur, Outre-mer, Collectivités territoriales et Immigration
Le budget de l’État représente une partie des finances publiques (avec le budget de la sécurité sociale et celui des collectivités territoriales). Il est fixé dans les lois de finances annuelles (lois initiales pouvant être suivies de lois rectificatives).
Le budget est réparti entre missions et programmes. Leur dotations peuvent être différentes de celle des ministères (notamment pour l'action extérieure de l'État, l'enseignement scolaire et la sécurité civile).
En 2014, il est prévu, au budget général, des ressources de 227 milliards d’euros, et des charges de 309 milliards d’euros[47].
Sièges des cabinets ministériels
Les cabinets ministériels sont généralement installés dans d’anciens hôtels particuliers parisiens, avec, dans certains cas, les directeurs des administrations centrales. Les locaux abritent des bureaux, et quelquefois des logements de fonctions.
L'administration centrale du ministère de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie est située en partie dans la paroi sud de l’arche de la Défense.
Champ : emplois principaux, tous statuts. Hors bénéficiaires de contrats aidés.
Le tableau ne répertorie pas les fonctionnaires des COM et à l’étranger. Les effectifs des ministères des Affaires étrangères, de la Défense et dans une moindre mesure de l’Éducation nationale, jeunesse et vie associative et de l’Intérieur, Outre-mer, collectivités territoriales et immigration, sont affectés par la restriction du champ d’analyse.
Marie-Anne Lévèque (dir.), Rapport annuel sur l’état de la fonction publique, Paris, La Documentation française, , 652 p. (ISBN978-2-11-009657-9, lire en ligne), Thème : Emploi public et fonction publique - 1.3 Fonction publique de l’État - Figure 1.3-1 : Répartition des effectifs physiques de la fonction publique de l’État entre ministères et établissements publics à caractère administratif au 31 décembre 2011 en France (métropole + DOM)