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Halite

L’halite, couramment appelé sel gemme dans le langage minier, est une espèce minérale solide composée de chlorure de sodium de formule brute NaCl[3]. Elle est tendre, très légère, fragile, de ténacité cassante, a une saveur saline, puisqu'elle contient du sel en très grande majorité, et contient aussi des traces d'iode, brome, fluor, fer, oxygène et silicium. Elle est contenue dans des roches de type évaporites.

Halite
Catégorie III : halogénures[1]
Image illustrative de l’article Halite
Halite - Mine de Wieliczka, Pologne - (16 Ã— 13 cm)
Général
Numéro CAS 14762-51-7
Classe de Strunz
Classe de Dana
Formule chimique ClNa NaCl
Identification
Masse formulaire[2] 58,443 ± 0,002 uma
Cl 60,66 %, Na 39,34 %,
Couleur incolore, blanc, parfois jaune, orange, rouge orange, jaunâtre, brun, bleu, violet, bleu-gris, noir, violet, grisâtre, rougeâtre, rosâtre, bleuâtre...
Classe cristalline et groupe d'espace hexakisoctaédrique
Fm3m n°225
Système cristallin cubique
Réseau de Bravais faces centrées F
Clivage parfait, sur {100}, {010}, {001}
Cassure conchoïdale
Habitus cristaux cubiques, avec des faces cristallines plongeantes ou fréquents à clivage {100}, en agrégat grenu ou fibreux, en masse compacte rocheuse d'évaporite saline, à textures fines ou grossières, parfois grossièrement granulaire, en croûtes, plus rarement en masse fibreuse ou colonnaire (stalactites) …
Faciès cristaux cubiques à faces lisses, souvent en trémies (évaporites de surface), hexaédriques, par exemple druse de cristaux hexaédriques, rarement octaédriques ou dodécaédriques, parfois en squelette, avec macle.
Échelle de Mohs 2 à 2,5
Trait blanc, mais trace souvent identique à la couleur
Éclat vitreux à vitreux gras
Propriétés optiques
Indice de réfraction 1,5543
Pléochroïsme faible
Biréfringence δ = 0,000
Fluorescence ultraviolet surtout au UV (variable en fonction des impuretés), devient bleu puis brun, après exposition aux UV, luminescence rouge ou rose
Transparence transparent à translucide
Propriétés chimiques
Densité 2,163 (corps pur), le plus souvent entre 2,1 et 2,2, mais entre 2,1 et 2,6 suivant les gisements
Température de fusion 800,4 °C
Solubilité soluble facilement dans l'eau, légèrement soluble dans l'alcool
Comportement chimique colore la flamme en jaune vif ou orangé, gicle au chalumeau
Propriétés physiques
Magnétisme aucun
Radioactivité très rare, halite se présente bleue

Unités du SI & CNTP, sauf indication contraire.

Pure, elle est incolore si les cristaux sont bien formés, ou blanche. La présence d'impuretés peut lui donner une couleur grise, jaunâtre à rougeâtre, brunâtre, noire ou encore bleue ou violette[4].

Le minéral pur, humide au toucher, est beaucoup plus stable que l'halite commune, très souvent déliquescente à cause des impuretés, à l'état de faibles traces comme le chlorure de calcium ou le chlorure de magnésium[5]. L'halite est soluble dans l'eau. Ce critère de solubilité, associé au goût salé, à une forme cubique ou au clivage caractéristiques des cristaux, permet une identification rapide. Chauffée dans une poêle, la matière minérale décrépite, puis fond. Un grain d'halite colore la flamme en jaune vif, caractéristique des ions sodium.

Ce minéral se trouve le plus souvent sous forme de sel marin fossilisé avec d'autres roches évaporites ou salines dans les bassins sédimentaires. Il est indispensable à la vie animale et précieux pour l'économie. Aussi les gisements affleurant en surface ou indiqués par des sources salines sont-ils connus de toute antiquité par les peuples éleveurs[6].

Historique de la description et appellations

Inventeur et étymologie

Cette espèce minérale est connue depuis la préhistoire, mais celui qui en fait la première description minéralogique est Ernst Friedrich Glocker en 1847, qui lui a attribué le nom de « halite ». Ce mot vient du grec ἃλς hals = sel, et λίθος lithos = pierre. C'est James Dwight Dana qui lui donnera son nom définitif en enlevant le « s » final[7].

Synonymes

Il existe pour cette espèce de nombreux synonymes[8] :

  • β-halite ;
  • cachi ; du quechua kallchi qui signifie « sel » en référence aux lagunes saumâtres du Nord-Est de l'Argentine ;
  • halites (Glocker) ;
  • martinsite (Karsten 1845)[9] ;
  • soude muriatée ;
  • muriacite selon la nomenclature de Guyton de Morveau ;
  • sel gemme, qui désigne à l'origine une forme massive d'halite, en usage une fois pilé comme sel de table.
  • sel de terre, sel terreux ou pierreux, sel de salines (mines), pierre de sel.

Caractéristiques physico-chimiques

Mélange

La natrikalite fut d'abord décrite comme espèce minérale par Gilbert Joseph Adam en 1869, puis déclassée comme mélange d'halite et de sylvite[10].

Cristallochimie

L'halite se présente comme deux empilements cubiques compacts interpénétrés. Elle prend la forme d'un réseau cubique d'ions hexacoordonnés, c'est-à-dire que chaque anion est entouré de façon octaédrique par six cations, et réciproquement.

  • Elle sert de chef de file à un groupe de minéraux isostructuraux, qui forme des solutions solides.
Groupe de l'halite
Minéral Formule Groupe ponctuel Groupe d'espace
CarobbiiteKF4/m 3 2/mFm3m
GricéiteLiF4/m 3 2/mFm3m
Halite NaCl4/m 3 2/mFm3m
SylvineKCl4/m 3 2/mFm3m
VilliaumiteNaF4/m 3 2/mFm3m

Cristallographie

La structure de l'halite est surtout celle du chlorure de sodium.

L'halite cristallise dans le système cristallin cubique, avec le groupe d'espace Fm3m (Z = 4 unités formulaires par maille conventionnelle)[11].

  • Paramètre de la maille conventionnelle : = 5,640 2 Ã… (volume de la maille V = 179,43 Ã…3)
  • Masse volumique calculée = 2,16 g/cm3

Cette structure correspond à deux sous réseaux cubiques à face centrée d'ions, décalés de la moitié du côté de la maille selon l'une des directions des côtés de la maille.

Les ions Na+ et Cl− ont chacun une coordinence 6 : n'importe quel ion Cl− est entouré de 6 ions Na+, formant un octaèdre autour du Cl−. Et vice versa, autour de chaque ion Na+ se trouvent comme plus proches voisins 6 ions Cl− formant aussi un octaèdre.

Distinction des cristaux

Les cubes monocristallins sont parfois très gros, avec clivage parfait : ils peuvent atteindre un mètre de côté. Avec l'humidité, ils subissent une dissolution partielle, le plus souvent provoquant un arrondissement des angles.

Les accidents de cristallisation sont néanmoins très fréquents. Ce sont principalement des lacunes structurales, des dislocations, des substitutions... S'ils génèrent des électrons isolés, la couleur bleue tend à s'imposer.

L'halite se distingue de la sylvine, de la sylvinite, de la carnallite, minéraux potassiques par le clivage, le test de flamme, la dureté et le goût salé.

Cristaux de collection

La manipulation de cette espèce minérale, légèrement hygroscopique, nécessite souvent un nettoyage à l'alcool et une conservation au sec.

Gîtes et gisements

Carrière de sel gemme à ciel ouvert à Cardone (Espagne) en 1873.

D'un point de genèse primaire, l'halite peut provenir de l'eau de mer à l'origine des gisements de sel marin, fossiles ou récents, mais aussi de roches ou d'émanations volcaniques ou plutoniques, y compris les eaux thermales, expliquant les eaux salines ou saumâtres des zones endoréiques.

Elle est associée à des couches calcaires, de dolomies, d'argiles, mais le plus souvent à d'autres évaporites, à commencer par le gypse et l'anhydrite. Les lits peuvent avoir une puissance d'environ un mètre à plus de 300 mètres. Les masses salines de faible densité, en particulier les dômes de sel dépassant parfois 10 km de diamètre et 2 kilomètres d'épaisseur, que ses amas contribuent à former, tendent à s'élever et à soulever les couches de terrains supérieures en enveloppes arrondies complexes[12]. Elles sont facilement repérables par diverses méthodes de mesures géophysiques.

En Algérie, le sel gemme est présent sous des épaisseurs avoisinant les 1 000 m, dans les rochers de sel de Djelfa, d'El Outaya à Biskra. Au Sahara, les forages sahariens l’ont également rencontré sous des épaisseurs moyennes de 500 m. On estime les réserves au Sahara à 400 000 milliards de tonnes[13].

Au sud-est de l'Iran, dans les monts Zagros, le sel remonte d'une profondeur de 10 km sous la forme de diapirs salifères qui percent la surface pour former d'énormes amas qui s'écoulent latéralement comme des glaciers de sel sous la pression continue du halite. Le plus célèbre d'entre eux, le Kuh-e-Namak, atteint 400 m de hauteur[14].

Gîtologie et minéraux associés

L'halite est un composant de nombreuses roches évaporitiques, provenant de l'évaporation de lacs ou mers salés. Elle peut se rencontrer en couches importantes dans les dépôts sédimentaires, comme dans le Saulnois lorrain (Varangéville Dombasle, Rosières-aux-Salines en val de Meurthe, Dieuze, Château-Salins, en val de Seille), à Lons-le-Saunier dans le Jura, à Dax dans les Landes, à Salies-de-Béarn dans les Pyrénées-Atlantiques, à Salies-du-Salat dans la Haute-Garonne, mais aussi à Salzbourg ou dans le Salzkammergut en Autriche, en Suisse, à Heilbronn ou Berchtesgaden en Allemagne, dans la province de Wieliczka en Pologne, dans le Sud-Est de la Russie, en Inde, en Iran, en Grande-Bretagne, à Cardona en Espagne, en Ontario, dans les états américains de New-York, du Michigan et de l'Ohio, du Kansas et du Wyoming, dans les dômes de sel du golfe du Mexique par exemple au Texas ou en Louisiane, dans le Permian Basin entre Texas et Nouveau-Mexique, en Arizona et au Nevada, dans le vaste salar d'Uyuni en Bolivie, au Pérou, en Colombie, ou encore associée à d'autres sels potassiques et magnésiens d'origine marine comme à Stassfurt en Saxe allemande ou dans les innombrables lacs alcalins des régions arides, froides ou chaudes, voire associée aux couches minces de sylvinite dans le bassin potassique. Elle apparaît en efflorescences sur de vastes régions arides.

L'halite est associée à divers chlorures, carbonates et sulfates (gypse, sylvine, polyhalite, carnallite, etc.).

Cubes empilés d'halite, échantillon sorti tel quel des mines potassiques de Stassfurt, Saxe-Anhalt Allemagne (ordre de grandeur: 6,7 Ã— 1,9 Ã— 1,7 cm).

Gisements producteurs de spécimens remarquables

  • Autriche
Druses de cristaux hexaédriques du Salzkammergut, par exemple Hallstatt ou Hall
  • Yémen

Préhistoire

Le sel est utilisé pour l'assaisonnement et la conservation des aliments depuis la Préhistoire[16].

Routes du sel gemme

Les routes du sel désignent les routes commerciales d'échanges et de commerce, par lesquelles le sel a été transporté historiquement depuis les régions de production vers les régions consommatrices et déficitaires. Certaines d'entre elles concernaient tout particulièrement le sel gemme.

L'azalaï en langue tamasheq est la caravane de dromadaires menée deux fois par an par les Arabes qui pratiquent le transport et le commerce au travers du désert du Sahara sur près de 1 000 km. Le sel gemme est extrait des mines de Taoudeni au nord du Mali et vendu à Tombouctou et sur d’autres marchés du Sahel. Dans le sens inverse, ils transportaient les esclaves. L'azalaï était un maillon important de la traite orientale.

Au Tibet, les nomades du sel constituaient des caravanes composées de yaks pour transporter du sel depuis les sauneries situées sur des sommets de l'Himalaya pour le troquer après transport dans les plaines contre de l'orge et des aliments de base.

Du sel gemme est également extrait à la main du cœur des contreforts himalayens, dans les mines de Khewra, au Pendjab pakistanais, depuis . Cette mine est la seconde mine de sel en exploitation au monde en termes de production [17]. Alexandre le Grand fut le premier, aux environs de 350 ans avant J.-C., à faire transporter le sel rose de l’Himalaya vers l'Europe.

En Arabie du Sud (Yémen), les mines de sel (halite) de la région de Shabwa et de Tamna' ont engendré un important commerce dans l'Antiquité, tout comme au Moyen Âge, sur la côte de la Tihamâ[18], les diapirs d'as-Salif et de Jabal al-Milh[19].

Exploitation des gisements

Au début des années 1990, la mine de Retsof, dans l'État de New York, comptait parmi les plus grandes salines du monde. Ses principales utilisations sont :

Galerie

Notes et références

  1. La classification des minéraux choisie est celle de Strunz, à l'exception des polymorphes de la silice, qui sont classés parmi les silicates.
  2. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  3. . C'est la forme naturelle du sel de cuisine.
  4. . L'allochromie caractérise l'halite. La couleur provient essentiellement d'impuretés chimiques diverses, d'effets de phénomènes physiques, comme les tensions ou pressions mécaniques, la radioactivité interne ou l'exposition à des rayons lumineux comme les UV. La couleur bleue ou violette est causée par la présence d'électrons libres, libérés par des micro-cassures ou failles mécaniques, ou par des flux de particules, en particulier des photons de haute énergie, émises par la radioactivité naturelle de la roche et reçues par simple exposition. Ces électrons libres sont responsables également d'agrégations colloïdales : les cristaux sont caractérisés par des taches bleues ou violettes intenses. L'orange et surtout le rouge et le rougeâtre proviennent de traces d'oxydes de fer, en particulier d'hématite. Le jaune ou jaunâtre ressort des hydroxydes de fer, goethite ou limonite. Le noir provient de la présence de bitume ou parfois de cendres microscopiques, le rose d'algues microscopiques fossiles, algues de milieu salin très analogues à celles rencontrées dans les saumures des marais salants.
  5. . D'une manière générale, il faut conserver les échantillons en boîte hermétique, sinon les spécimens absorbent la vapeur d'eau atmosphérique et tombent en déliquescence.
  6. . Outre l'usage alimentaire et condimentaire pour les hommes, les animaux domestiqués sont friands de pierre ou léchons de sel. Les aspects chimiques et économiques sont plus particulièrement traités dans l'article "chlorure de sodium".
  7. (en) James Dwight Dana, George Jarvis Brush (1868) A System of Mineralogy: Descriptive Mineralogy, John Wiley & Sons, New York (NY), 5e éd., 827 p., p. 112
  8. « Index alphabétique de nomenclature minéralogique » BRGM
  9. (de) Dietrich Ludwig Gustav Karsten, « Der Martinsit, ein im Steinsalzlager zu Stassfurth aufgefundenes Salz », Journal für praktische Chemie, vol. 36, no 1,‎ , p. 127 (ISSN 0941-1216, DOI 10.1002/prac.18450360129)
  10. Adam, M. (1869) Tableau minéralogique, Paris: 69
  11. ICSD No. 61 662 ; (en) J. E. Nickels, M. A. Fineman et W. E. Wallace, « X-ray diffraction studies of sodium chloride-sodium bromide solid solutions », Journal of Physical Chemistry, vol. 53, no 5,‎ , p. 625-628 (DOI 10.1021/j150470a003)
  12. C'est le cas dans le golfe du Mexique ou dans le Proche-Orient. Des schistes, roches réservoir du pétrole, sont souvent piégés sous le dôme salin. Ce sont des indices souvent fiables pour y forer des puits de pétrole.
  13. , sur elwatan.com, 15 juillet 2018
  14. Patrick De Wever et Jean-Marie Rouchy, Le sel, saveur de la Terre, France, EDP sciences, coll. « Terre à portée de la main », , 96 p. (ISBN 978-2-7598-2049-8), pp. 61-62
  15. Musée du Sel de Salins-les-Bains.
  16. Patrick De Wever et Jean-Marie Rouchy, Le sel, saveur de la Terre, France, EDP sciences, coll. « Terre à portée de la main », , 96 p. (ISBN 978-2-7598-2049-8), p. 68
  17. (en) Camerapix, Spectrum Guide to Pakistan, Interlink Books, , 359 p. (ISBN 978-1-56656-240-9, lire en ligne), p. 150.
  18. (en) Bosence D.W., al-Aawah M. H., Davison I., « Salt domes and their control on basin margin sedimentation: a case of study from the Tihama Plain, Yemen. », Sedimentation and Tectonics in Rift Basins Red Sea: Gulf of Aden, edited by Pursue B. H.,‎ , p. 448-478
  19. (en) Jean-François Breton, « Salt Routes in South Arabia and around the Red Sea », South Arabian Long-distance Trade in Antiquity, Cambridge Scholars Publishing.,‎ , p. 154-173

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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