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Fonction zĂȘta de Riemann

En mathĂ©matiques, la fonction zĂȘta de Riemann est une fonction analytique complexe qui est apparue essentiellement dans la thĂ©orie des nombres premiers. La position de ses zĂ©ros complexes est liĂ©e Ă  la rĂ©partition des nombres premiers. Elle est aussi importante comme fonction modĂšle dans la thĂ©orie des sĂ©ries de Dirichlet et se trouve au carrefour d'un grand nombre d'autres thĂ©ories. Les questions qu'elle soulĂšve sont loin d'ĂȘtre rĂ©solues et elle sert aussi de motivation et de fil conducteur Ă  de nouvelles Ă©tudes, Ă  l'instar du rĂŽle jouĂ© par le grand thĂ©orĂšme de Fermat.

La fonction zĂȘta de Riemann ζ(s) dans le plan complexe. La couleur d'un point s code la valeur de ζ(s) : des couleurs vives indiquent des valeurs proches de 0 et la nuance indique l'argument de la valeur. Le point blanc pour s = 1 est le pĂŽle ; les points noirs sur l'axe rĂ©el nĂ©gatif (demi-droite horizontale) et sur la droite critique Re(s) = 1/2 (droite verticale) sont les zĂ©ros.
Carte des couleurs utilisées dans la figure du dessus.

Premiers travaux sur la fonction zĂȘta par Euler et Riemann

Article de Riemann de 1859 sur la fonction zĂȘta.

Prologue

Le prĂ©sent article commence par la dĂ©finition de la fonction Ă  partir de la sĂ©rie de Dirichlet puis cette dĂ©finition est Ă©tendue au plan complexe privĂ© de 1. On examine ensuite ce qui se passe en 1. La thĂ©orie de la fonction ζ de Riemann dĂ©finit trois rĂ©gions dans le plan complexe, la rĂ©gion de convergence Re(s) > 1, la bande critique 0 ≀ Re(s) ≀ 1, et la rĂ©gion Re(s) < 0. À partir de la relation fonctionnelle, le module de la fonction est estimĂ© dans chacune de ces rĂ©gions. Cela nĂ©cessite des formules permettant d'estimer la fonction ou d'autres fonctions qui lui sont liĂ©es. Puis on Ă©tudie les zĂ©ros. La relation fonctionnelle fournit les zĂ©ros rĂ©els et Ă©galement l’ordre de ces zĂ©ros : ils sont simples. Dans la bande critique, il en existe une infinitĂ©. On estime donc ce nombre N(T) dans un rectangle de hauteur T. Le thĂ©orĂšme de Hardy en place une infinitĂ© sur l'axe Re(s) = 1/2. On estime, avec beaucoup de difficultĂ©, le nombre N0(T) des zĂ©ros dont la partie imaginaire est comprise entre 0 et T et dont la partie rĂ©elle est 1/2. Pour Ă©tudier la rĂ©partition des zĂ©ros, diffĂ©rentes quantitĂ©s les faisant intervenir sont estimĂ©es. Enfin, les conjectures classiques sont examinĂ©es : dĂ©finitions, consĂ©quences, critĂšres Ă©quivalents.

Les recherches sur la fonction zĂȘta constituent un domaine trĂšs technique. La plupart des preuves, nĂ©cessitant une formation spĂ©cialisĂ©e en thĂ©orie analytique des nombres, sont omises ici.

La thĂ©orie de la fonction ζ de Riemann est presque tout entiĂšre dominĂ©e par la question de la rĂ©partition de ses zĂ©ros. Comme l'explique la thĂ©orie gĂ©nĂ©rale des fonctions analytiques, toute fonction mĂ©romorphe s'Ă©crit comme le produit de facteurs faisant apparaĂźtre les pĂŽles et les zĂ©ros de cette fonction. L'hypothĂšse de Riemann selon laquelle tous les zĂ©ros non triviaux de la fonction ζ de Riemann sont de partie rĂ©elle Ă©gale Ă  1/2 renforce encore l'intĂ©rĂȘt pour ces zĂ©ros. Aussi la thĂ©orie s'est-elle dĂ©veloppĂ©e dans plusieurs directions : la premiĂšre est celle de l'Ă©tude des zĂ©ros eux-mĂȘmes. On a cherchĂ© Ă  dĂ©montrer l'hypothĂšse de Riemann elle-mĂȘme avant de se rendre compte des difficultĂ©s. L'objectif est alors devenu plus modeste : dĂ©montrer une partie de l'hypothĂšse de Riemann. D'un autre cĂŽtĂ©, la communautĂ© mathĂ©matique croit en l'hypothĂšse de Riemann, aussi a-t-on cherchĂ© les consĂ©quences de l'hypothĂšse de Riemann en prĂ©vision de sa dĂ©monstration. Cependant chaque nouvelle consĂ©quence de l'hypothĂšse de Riemann est aussi une voie nouvelle pour l'infirmer.

Par exemple, on dĂ©montre que l'on a, sous l'hypothĂšse de Riemann, si C > e2Îł (oĂč Îł = 0,577
 est la constante d'Euler-Mascheroni), pour t assez grand :

Si l'on démontrait l'existence d'une suite (tn) tendant vers l'infini telle que

il en serait fini de l'hypothĂšse de Riemann.

Les conséquences de l'hypothÚse de Riemann sont nombreuses. On a ainsi cherché à les démontrer indépendamment de cette hypothÚse, ce qui s'avéra parfois possible. Et chacune de ces conséquences est devenue un objectif en soi. Devant la difficulté posée par la démonstration de l'hypothÚse de Riemann, on a aussi énoncé des hypothÚses plus faibles qu'on a également tenté de démontrer, sans beaucoup plus de succÚs.

PremiÚres considérations sur la fonction

Définition par la série de Riemann

La fonction zĂȘta de Riemann pour les rĂ©els s > 1.

La fonction ζ de Riemann est une fonction analytique complexe méromorphe définie, pour tout nombre complexe s tel que Re(s) > 1, par la série de Riemann :

.

D'aprÚs la théorie des séries de Dirichlet[note 1], on déduit que la fonction ainsi définie est analytique sur son domaine de convergence. La série ne converge pas en s = 1 car on a

qui tend vers l'infini avec m (voir l'article détaillé « Série harmonique » pour d'autres démonstrations de ce résultat, et une estimation plus précise de la valeur des sommes partielles). La valeur s = 1 est donc une singularité de la fonction.

Valeurs de la fonction zĂȘta pour s entier pair non nul

Euler a calculé (dans le cadre de sa solution au problÚme de Bùle) la valeur de la fonction ζ pour les entiers strictement positifs pairs en utilisant l'expression de sous forme de produit infini[note 2] ; il en a déduit la formule :

valable pour tout entier k > 0, oĂč les B2k sont les nombres de Bernoulli ().

Ces valeurs de ζ(2k) s'expriment donc Ă  l'aide des puissances paires de π[1] :

[note 3]

La formule s'Ă©tend Ă  k = 0 avec (voir infra).

On peut écrire le développement en série de Taylor :

On en dĂ©duit que la sĂ©rie gĂ©nĂ©ratrice des ζ(2k) pour k ≄ 0 est donnĂ©e par :

.

Par exemple, on a : , d'oĂč on dĂ©duit la somme des sĂ©ries : et .

Valeurs de la fonction zĂȘta pour s entier impair

Pour les entiers impairs, le calcul n'est pas si simple. Ramanujan a beaucoup travaillĂ© sur ces sĂ©ries et ApĂ©ry a dĂ©montrĂ© en 1978 que ζ(3), qui vaut environ 1,202 056 9, est irrationnel (voir les articles « Constante d'ApĂ©ry » et « ThĂ©orĂšme d'ApĂ©ry »).

En 2000, Tanguy Rivoal a démontré[2] qu'il existe une infinité de nombres irrationnels parmi les valeurs aux entiers impairs. En 2001, Wadim Zudilin (en) a démontré que l'un au moins des quatre nombres ζ(5), ζ(7), ζ(9) et ζ(11) est irrationnel[3].

On conjecture que toutes les valeurs aux entiers impairs sont irrationnelles et mĂȘme algĂ©briquement indĂ©pendantes sur ℚ(π)[4], en particulier transcendantes.

Valeurs numériques particuliÚres utilisées en physique

  • .

Cette valeur est utilisée pour calculer la température critique d'un condensat de Bose-Einstein dans une boßte à frontiÚre périodique, et pour l'onde de spin des systÚmes magnétiques ;

  • ;
est la constante d'Apéry. Elle intervient dans la formule de la luminance photonique de la loi de Planck.
UnitĂ© : photons⋅s-1⋅m-2⋅sr-1 ;
  • .

Cette constante apparaĂźt quand on intĂšgre la loi de Planck pour obtenir la loi de Stefan-Boltzmann (en dimension 3) en physique.

La constante de Stefan-Boltzman en dimension n est donnée par la formule[5] :
oĂč Γ est la fonction gamma, h est la constante de Planck, c la vitesse de la lumiĂšre dans le vide, et k la constante de Boltzmann.
En dimension 3 :

Cette constante (appelée constante de Stefan-Boltzmann) est également utilisée dans le calcul de la limite basse température de la capacité thermique des solides dans le cadre du modÚle de Debye.

Développements en série de Dirichlet en lien avec quelques fonctions arithmétiques

À partir de la sĂ©rie de Dirichlet de ζ on dĂ©montre les formules suivantes[6] - [7], en faisant appel Ă  la convolution de Dirichlet des fonctions arithmĂ©tiques qui vĂ©rifie :

.

Si Re(s) > 1,

, oĂč τ est la fonction nombre de diviseurs (Ă©galement notĂ©e d) :

puisque

Si Re(s) > 2,

, oĂč σ est la fonction somme des diviseurs : ,

puisque

Les deux derniÚres formules sont des cas particuliers de l'égalité valide pour Re(s) > max (1, Re(a) + 1) avec

, oĂč σa est la fonction somme des puissances a-iĂšmes des diviseurs: ,

puisque

Si Re(s) > 1,

, oĂč ÎŒ est la fonction de Möbius,

puisque

En 1899, La Vallée Poussin démontra qu'il existe une constante K telle que , de sorte que la série précédente converge également pour s = 1, vers 0 :

Ce résultat, conjecturé par Euler, avait déjà été démontré par von Mangoldt en 1897[8]. Von Mangoldt utilise dans sa preuve le théorÚme des nombres premiers, démontré en 1896. Et ce dernier théorÚme est en fait équivalent à la convergence vers 0 de la série ci-dessus, comme l'a finalement établi Edmund Landau en 1911[9] - [10].

Si Re(s) > 2,

, oĂč φ est l'indicatrice d'Euler,

puisque l'indicatrice d'Euler φ vĂ©rifie l'Ă©galitĂ©

Cette formule est un cas particulier de l'égalité valide pour Re(s) > k + 1 avec ,

, oĂč Jk est la fonction totient de Jordan,

puisque

Si Re(s) > 1,

, oĂč λ est la fonction de Liouville.
,

puisque la fonction de Liouville vĂ©rifie l'Ă©galitĂ© oĂč est la fonction caractĂ©ristique (ou indicatrice) des carrĂ©s.

Si Re(s) > 1,

, oĂč ÎŒ est la fonction de Möbius,

puisque

Si Re(s) > 1,

, oĂč Îœ(n) dĂ©signe le nombre de facteurs premiers distincts de n,

puisque

Si Re(s) > 1,

, oĂč τ est la fonction nombre de diviseurs (Ă©galement notĂ©e d).

Si Re(s) > 2,

Cette formule est un cas particulier de l'égalité valide pour Re(s) > 1 + max (0, 2Re(a)) avec ,

puisque oĂč

Si Re(s) > 1,

Cette formule est un cas particulier de l'égalité valide pour Re(s) > 1 et ,

Les deux derniĂšres formules sont des cas particuliers de la formule de Ramanujan[11] valable si Re(s) > 1 + max (0, Re(a), Re(b), Re(a + b)) avec et ,

ce qui se déduit de la relation

Produit eulérien

Le lien entre la fonction ζ et les nombres premiers avait déjà été établi par Leonhard Euler avec la formule, valable pour Re(s) > 1 :

oĂč le produit infini est Ă©tendu Ă  l'ensemble des nombres premiers. Cette relation est une consĂ©quence de la formule pour les suites gĂ©omĂ©triques et du thĂ©orĂšme fondamental de l'arithmĂ©tique. On appelle parfois cette formule produit eulĂ©rien.

Lien avec la répartition des nombres premiers

Un autre lien existe avec cette fois la fonction de comptage π(x) des nombres premiers infĂ©rieurs ou Ă©gaux Ă  x :

On a en effet, pour Re(s) > 1 :

En fait, la position des zĂ©ros de la fonction ζ de Riemann fournit la position des nombres premiers. On peut mĂȘme trouver une formule exprimant chaque nombre premier en fonction des zĂ©ros de la fonction ζ de Riemann.

Expression intégrale

On a la formule intégrale, classique depuis Euler, valide si Re(s) > 1 :

oĂč Γ dĂ©signe la fonction gamma, ce qui (par changement de variable) Ă©quivaut Ă  :

.

On peut voir cette formule comme un cas particulier d'une transformation générale aux séries de Dirichlet[12]. Elle se traduit en disant que la fonction est la transformation de Mellin[13] de la fonction .

DĂ©rivĂ©es de la fonction zĂȘta

Une expression de la dérivée de la fonction ζ est donnée par la série de Dirichlet, convergente si Re(s) > 1 :

La dérivée d'ordre k est donnée par :

Que devient la série de Riemann sur l'axe Re(s) = 1 ?

La thĂ©orie des sĂ©ries de Dirichlet montre que pour s = σ + it, la sĂ©rie de Riemann diverge grossiĂšrement si σ ≀ 0, converge absolument si σ > 1 et diverge si t = 0 et σ ∈ ]0, 1].

Dans le cas restant (σ ∈ ]0, 1] mais t ≠ 0), pour montrer qu'elle diverge aussi et prĂ©ciser comment, il suffit d'affiner un peu la comparaison sĂ©rie-intĂ©grale :

or

donc la série correspondante converge. Quant à l'intégrale , elle est égale, à une constante prÚs, à , de module .

  • si 0 < σ < 1, il en rĂ©sulte que lorsque N tend vers l'infini, ce terme prend des oscillations de plus en plus importantes : la sĂ©rie diverge.
  • si σ = 1 (et t ≠ 0), le module devient Ă©gal Ă  1 / | t |, mais l'argument (mod 2π) ne tend pas vers une constante : la sĂ©rie diverge mais ses oscillations restent bornĂ©es par 1 / | t |.

Extension à ℂ \ {1}

La fonction ζ admet un prolongement analytique à tout le plan complexe, sauf 1. Il existe plusieurs démonstrations, faisant appel à différentes représentations de la fonction ζ.

Par la formule d'Euler-Maclaurin

La formule d'Euler-Maclaurin[14], appliquĂ©e Ă  la fonction x ↩ x–s sur l'intervalle [1, N], donne pour tout entier n diffĂ©rent de 0 :

oĂč les coefficients Bk sont les nombres de Bernoulli (ils sont nuls si k est impair et diffĂ©rent de 1),

oĂč les Bn(x) sont les polynĂŽmes de Bernoulli et oĂč [x] dĂ©signe la partie entiĂšre de x.

En faisant tendre N vers l'infini et en restant dans le demi-plan Re(s) > 1, on en déduit pour tout entier n = 1, 2, 3
 que

Les fonctions x ↩ Bn(x – [x]) Ă©tant pĂ©riodiques et polynomiales sur [0 ; 1[, elles restent bornĂ©es sur l'intervalle d'intĂ©gration, donc l'intĂ©grale Ă  droite converge si Re(s) > 1 – n. Donc le membre de droite dĂ©finit, sur Re(s) > 1 – n, une fonction ζn, holomorphe en dehors de 1, qui prolonge ζ. L'unicitĂ© du prolongement analytique montre que les fonctions ζn et ζn + 1 sont identiques sur Re(s) > 1 – n. Ces identitĂ©s permettent donc de dĂ©finir une unique fonction mĂ©romorphe sur tout le plan complexe (avec un seul pĂŽle en 1), coĂŻncidant avec la fonction ζ dĂ©jĂ  dĂ©finie pour Re(s) > 1 et qu'on appelle encore ζ.

Par une intĂ©grale sur ℝ+

On part de l'expression intégrale vue plus haut, pour tout complexe s tel que Re(s) > 1 :

Le prolongement analytique est réalisé[note 4] en écrivant

La seconde intĂ©grale est une fonction holomorphe de s. On dĂ©compose en sĂ©rie de Taylor dans la premiĂšre. Les Bn dĂ©signant les nombres de Bernoulli, comme on a, pour tout t tel que | t | < 2π

en remplaçant dans la premiÚre intégrale et en intégrant terme à terme, on trouve

La sĂ©rie est convergente et dĂ©finit une fonction holomorphe partout sauf aux entiers nĂ©gatifs ou nuls (car pour s diffĂ©rent de ces valeurs, le rayon de convergence de la sĂ©rie entiĂšre de coefficients Bn/n! n'est pas modifiĂ© lorsqu'on divise ces coefficients par les n + s – 1) et de mĂȘme, au voisinage d'un entier nĂ©gatif – k, elle est la somme d'une fonction holomorphe et du terme

Quand s tend vers – k, Γ(s) ayant un pĂŽle simple en s = – k , ζ(s) est par consĂ©quent la somme d'une fonction qui tend vers 0 et du terme :

Ainsi, le prolongement méromorphe de ζ à tout le plan complexe n'a de pÎle qu'au point 1, et l'on obtient au passage la formule d'Euler[note 5] :

.

Par une intégrale de contour

La fonction ζ(s) se prolonge aussi analytiquement par l'intégrale

Γ Ă©tant la fonction gamma.

C dĂ©signe un lacet longeant l'axe rĂ©el et englobant 0 parcouru de +∞ Ă  +∞ dans le sens trigonomĂ©trique.

Une fois cette formule démontrée initialement pour Re(s) > 1, l'expression à droite restant valable pour toute valeur bornée de s définit donc une fonction analytique. D'aprÚs le théorÚme du prolongement analytique, elle représente le prolongement (sauf en s = 1) de la fonction ζ.

Par la formule sommatoire d'Abel

Utilisant la formule sommatoire d'Abel, on trouve pour Re(s) > 1,

La partie entiĂšre [u] se dĂ©compose en u – {u}, oĂč {u} dĂ©signe la partie fractionnaire de u. On a alors :

Comme {u} est toujours compris entre 0 et 1, l'intĂ©grale est convergente pour Re(s) > 0. À partir du prolongement pour Re(s) > 0 et en appliquant la relation fonctionnelle (valide pour 0 < Re(s) < 1, voir plus loin), on obtient le prolongement pour Re(s) ≀ 0 (sauf en s = 0).

Par la fonction ĂȘta de Dirichlet

On peut encore Ă©tendre la fonction ζ sur Re(s) > 0 Ă  partir de la dĂ©finition de la sĂ©rie alternĂ©e (appelĂ©e fonction ĂȘta de Dirichlet) :

.

Cette sĂ©rie est convergente pour s rĂ©el strictement positif, par application du critĂšre des sĂ©ries alternĂ©es ; il en est en fait de mĂȘme pour Re(s) > 0, ce qui se dĂ©montre en utilisant le lemme d'Abel (on peut aussi montrer plus simplement la convergence absolue de la sĂ©rie ).

[note 6] [15]

Cela réalise ainsi le prolongement de la fonction ζ sur Re(s) > 0, sauf pour

qui sont les zĂ©ros de 1 – 21 – s.

À partir du prolongement pour Re(s) > 0 et en appliquant la relation fonctionnelle (voir plus loin), on obtient le prolongement partout sauf en ces points.

Pour ces points, on peut appliquer soit la sĂ©rie de Dirichlet de 1/ζ, qui converge sur Re(s) = 1, soit une autre relation du mĂȘme genre[16].

De ce que

oĂč O est la notation de Landau, on dĂ©duit que la sĂ©rie[17]

est convergente pour Re(s) = 1[note 7]. En procédant comme pour la fonction η, on montre que :

Il suffit donc de calculer la sĂ©rie seulement pour ces points car ln 3/ln 2 se trouvant irrationnel, le dĂ©nominateur 1 – 31 – s ne peut ĂȘtre nul en mĂȘme temps que 1 – 21 – s (sauf pour s = 1).

La fonction ĂȘta vĂ©rifie Ă©galement

On dĂ©duit, pour Re(s) > 0, sous rĂ©serve de ce qui a Ă©tĂ© dit pour le prolongement par la fonction ĂȘta de Dirichlet pour les points s = 1 + 2ikπ/ln(2), l'expression intĂ©grale :

ou

Par la formule de Landau ou celle de Ramaswami

Dans les formules prĂ©cĂ©dentes, il est Ă  remarquer que le prolongement ne s'obtient que dans une portion du plan et qu'il faut utiliser la relation fonctionnelle pour avoir un prolongement au plan tout entier. Les deux formules qui suivent n'ont pas ce dĂ©faut. Ces deux autres mĂ©thodes de prolongement de ζ, sans conteste les plus simples, sont fondĂ©es, chacune, sur une formule exprimant ζ(s) en fonction de ζ(s + 1), ζ(s + 2), 


On a ainsi la formule publiée par Edmund Landau :

,

étant la factorielle croissante. La démonstration se fait en écrivant que puis en inversant et et en utilisant la série binomiale .

On a aussi la formule de Ramaswami[18] - [note 8] :

Le prolongement analytique s'effectue par bandes de largeur 1. La sĂ©rie de Dirichlet Ă©tant absolument convergente sur Re(s) > 1, la formule choisie prolonge sur Re(s) > 0. En appliquant Ă  nouveau la formule, on prolonge Ă  Re(s) > –1, et ainsi de suite.

Propriétés diverses de la fonction

Comportement asymptotique

Au voisinage de (sur l'axe réel), on a

(on obtient ce développement en comparant le reste de la série à l'intégrale )

DĂ©veloppement de Laurent au voisinage de 1

Thomas Joannes Stieltjes s'intéressa de prÚs à la fonction ζ de Riemann. Il est l'auteur d'une tentative avortée de démonstration de l'hypothÚse de Riemann à partir d'une hypothÚse voisine de celle de Mertens qu'il fut incapable de démontrer.

On a vu plus haut que :

.

Comme {u} est toujours compris entre 0 et 1, l'intégrale est convergente et le terme est borné. Le premier terme vaut aussi , ce qui montre que la fonction ζ admet un pÎle d'ordre 1 en 1 et de résidu 1. Cela constitue le théorÚme de Dirichlet. Le développement en série de Laurent de la fonction ζ(s) s'écrit donc

.

Les coefficients , appelés constantes de Stieltjes ou nombres de Stieltjes, sont donnés par[19] :

.

En particulier, est la constante d'Euler-Mascheroni : .

Matsuoka, en 1985[20], a montré que :

.

On sait aussi qu'asymptotiquement, la moitié de ces nombres sont positifs.

L'équivalent montre que ζ est négative sur l'axe réel juste avant 1[note 9] (elle est positive aprÚs 1 de maniÚre élémentaire puisque tous les termes de la série de Dirichlet sont alors positifs).

Le développement de Laurent à l'ordre 0, , donne la « valeur principale de Cauchy de la fonction » en 1 :

.

Relation fonctionnelle

La fonction ζ satisfait à l'équation fonctionnelle :

valable pour tout nombre complexe s diffĂ©rent de 0 et 1, dĂ©montrĂ©e par Riemann en 1859. Ici, Γ dĂ©signe la fonction gamma.

ReprĂ©sentation de la fonction zĂȘta sur l'axe des rĂ©els entre –7 et 7.

De la relation fonctionnelle, on déduit que, pour s différent de 0 et de 1 :

La fonction Ο dĂ©finie pour s diffĂ©rent de 0 et de 1 par

vérifie

On en déduit que la fonction

est paire : Ξ(s) = Ξ(–s).

On retrouvera ces deux fonctions dans l'étude des zéros non triviaux de ζ.

Valeurs de la fonction zĂȘta pour s entier nĂ©gatif ou nul

Valeurs de la fonction zĂȘta entre –14 et –0,9.

De la dĂ©finition de la fonction zĂȘta par une intĂ©grale sur ℝ+, on a dĂ©duit[22] que pour tout entier naturel n, ζ(–n) est le nombre rationnel suivant :

oĂč Bn + 1 est un nombre de Bernoulli.

Pour n = 0, on a :

Si n est pair mais non nul, le nombre de Bernoulli Bn + 1 est nul, d'oĂč, avec n = 2k et k > 0 :

Si n est impair, n = 2k – 1 avec k > 0 :

Par exemple :

C'est cette relation que Ramanujan Ă©crivit en 1910 dans un article du Journal of the Indian Mathematical Society sous la forme[23] :

« »

Définition de ln ζ et de sa dérivée

La fonction ζ Ă©tant rĂ©elle sur l'axe rĂ©el et plus grande que 1, le logarithme de cette valeur existe et est rĂ©el. Il est donc naturel de choisir, parmi l'infinitĂ© des dĂ©finitions possibles du logarithme d'une fonction analytique, celle qui prolonge le logarithme naturel sur la demi-droite ]1, +∞[. On prolonge donc par continuitĂ© les valeurs de ln ζ qui sont rĂ©elles sur ]1, +∞[.

Présentation élémentaire pour les nombres complexes du demi-plan Re(s) > 1

On part de la formule du produit eulĂ©rien, dont on sait qu'il converge pour tout s dans Re(s) > 1. On peut se limiter Ă  considĂ©rer dans un premier temps s = σ rĂ©el. On prend le logarithme du produit. Cela a un sens puisque ζ(σ) ne s'annule pas sur σ > 1. On a alors

Il reste Ă  dĂ©velopper le logarithme en sĂ©rie entiĂšre, ce qui est possible puisque p ≄ 2 et σ > 1. Cela justifie que l'on dĂ©finisse, pour tout complexe s satisfaisant Re(s) > 1 la sĂ©rie :

Cette série, normalement convergente sur tout compact du demi-plan Re(s) > 1, définit une fonction holomorphe sur ce demi-plan.

Si s = σ > 1 est rĂ©el, alors oĂč ln est le logarithme rĂ©el habituel. On en dĂ©duit que eD(σ) = ζ(σ). Les deux fonctions eD et ζ sont holomorphes sur Re(s) > 1 et elles coĂŻncident sur la demi-droite ]1, +∞[. Par le principe de prolongement holomorphe, on a donc

pour tout complexe s tel que Re(s) > 1. Par dérivation de l'égalité précédente, on obtient immédiatement . En dérivant la série définissant D, on obtient :

de sorte que l'on a, pour Re(s) > 1, l'égalité :

oĂč les seules valeurs de Λ(n) non nulles sont dĂ©finies par Λ(n) = ln p lorsque n = pm, p Ă©tant premier et m entier non nul. Il s'agit de la fonction de von Mangoldt. La dĂ©finition de la sĂ©rie D se rĂ©Ă©crit alors

Enfin en prenant le module de eD(s) = ζ(s) on obtient eRe(D(s)) = |ζ(s)| puis, prenant le logarithme réel on déduit

Convergence des séries de Dirichlet de ln ζ, 1 / ζ et ζ' / ζ sur la droite Re(s) = 1

Pour les séries de Dirichlet de ln ζ et 1 / ζ,

, oĂč ÎŒ est la fonction de Möbius,

l'application de la deuxiÚme formule de Perron montre qu'elles convergent sur l'axe Re(s) = 1 en dehors de s = 1, tandis que la série de Dirichlet de ζ' / ζ

diverge en tout point de l'axe 1.

Extension de ln ζ Ă  Re(s) ≀ 1

Pour les complexes s autres que 1 tels que Re(s) ≀ 1, la dĂ©finition du logarithme de ζ(s) est plus dĂ©licate. La fonction ζ ayant une infinitĂ© de zĂ©ros, ln ζ admet une infinitĂ© de points de branchement. Dans les calculs, on pratique alors des coupures de la maniĂšre suivante. Une premiĂšre coupure est pratiquĂ©e entre –2 et 1 (qui est aussi un point de branchement bien que ζ ne s'y annule pas). Pour les zĂ©ros triviaux, une coupure est pratiquĂ©e sur les intervalles [–4n – 4, –4n – 6[ pour tout n ≄ 0. Pour les autres zĂ©ros, encore hypothĂ©tiques, de la forme ÎČ + iÎł avec ÎČ âˆˆ ]0, 1[, ils sont rĂ©partis symĂ©triquement par rapport Ă  l'axe Re(s) = 1/2. On pratique donc Ă©galement une coupure parallĂšle Ă  l'axe rĂ©el en reliant les deux zĂ©ros symĂ©triques par rapport Ă  l'axe Re(s) = 1/2. Pour les zĂ©ros de l'axe Re(s) = 1/2, la coupure pratiquĂ©e relie le point Ă  l'infini au zĂ©ro considĂ©rĂ© par une ligne parallĂšle Ă  l'axe rĂ©el. Ce faisant, la fonction ln ζ est alors uniforme sur le domaine coupĂ©.

Le choix effectué donne

Représentation de 1/ζ et fonction M de Mertens

La fonction 1/ζ est étudiée conjointement avec la fonction ζ. On a une représentation par une série de Dirichlet sous la formule vue plus haut :

On peut en déduire[24] que pour tout entier k > 1, la probabilité pour que k entiers > 0 pris au hasard soient premiers entre eux est égale à 1/ζ(k), ce qu'on pouvait « prévoir informellement » à partir du produit eulérien mentionné au § « Liens avec les nombres premiers ».

L'application de la formule sommatoire d'Abel donne Ă©galement

oĂč M est la fonction sommatoire de (la fonction de) Möbius : .

La formule intĂ©grale est valable pour Re(s) > 1. L'hypothĂšse de Riemann conjecture que l'intĂ©grale converge et que la relation reste vraie pour Re(s) > 1/2 (s ≠ 1). On sait qu'elle est Ă©galement valable pour s = 1 + it avec t ≠ 0.

La théorie de la fonction M est trÚs obscure et cela probablement pour longtemps. On sait démontrer l'estimation suivante[25] :

dont la preuve dĂ©pend directement de la plus grande rĂ©gion connue dans la bande critique qui ne contient pas de zĂ©ro de la fonction zĂȘta (voir plus bas).

L'hypothÚse de Riemann est équivalente à l'affirmation suivante : pour tout Δ > 0,

Une autre conjecture est l'hypothÚse de Mertens généralisée qui affirme que : , c'est-à-dire que

pour une certaine constante A (voir plus bas). Elle entraĂźne la conjecture de Riemann.

Inégalités

Inégalité de Mertens

En 1898, Franz Mertens démontre[26]

Cette inégalité permet de démontrer que la fonction ζ(s) ne s'annule pas sur Re(s) = 1, ce qui est une étape cruciale dans la démonstration du théorÚme des nombres premiers.

Inégalité de Laforgia et Natalini

L'inégalité de Laforgia et Natalini est la suivante[27] :

pour s > 1.

Inégalité de Ahsan, Lam-Estrada, Lopez-Bonilla et Lopez-Vazquez

Ahsan, Lam-Estrada, Lopez-Bonilla et Lopez-Vazquez ont démontré l'inégalité suivante[28] :

pour s > 1.

Elle implique l'inégalité de Laforgia et Natalini.

Estimation de la fonction dans les diverses régions du plan

Le module de la fonction (u, t) ↩ ζ(u + it) de Riemann pour 0 ≀ u ≀ 3 et 0,1 ≀ t ≀ 200. On notera la pointe due au pĂŽle en 1 et la trĂšs grande irrĂ©gularitĂ© du module.

Presque périodicité

La fonction ζ est presque pĂ©riodique au sens de Bohr dans la rĂ©gion Re(s) > 1. Il en est de mĂȘme de ses dĂ©rivĂ©es. La fonction 1/ζ est Ă©galement presque pĂ©riodique sur Re(s) > 1 ainsi que ses dĂ©rivĂ©es. Par contre sur l'axe Re(s) = 1, la presque pĂ©riodicitĂ© de Bohr cĂšde sa place Ă  la presque pĂ©riodicitĂ© B2, au sens de Besicovitch.

La presque pĂ©riodicitĂ© au sens de Bohr, sur la ligne Re(s) = σ0, signifie qu'Ă  Δ prĂšs, la fonction se rĂ©pĂšte indĂ©finiment dans des intervalles de longueur L(σ0, Δ). Évidemment, plus Δ est petit, plus L(σ0, Δ) est grand.

Estimations dans la région Re(s) > 1

Dans le demi-plan Re(s) = σ > σ0 > 1 la fonction ζ(s) est bornĂ©e. Ses valeurs satisfont Ă  l'inĂ©galitĂ©

Elle n'a donc aucun zĂ©ro dans le demi-plan Re(s) = σ > 1.

Ces deux bornes sont les meilleures possibles : on montre, pour chaque valeur σ, qu'il existe une suite de t tendant vers l'infini ayant cette valeur pour limite de la suite ζ(σ + it).

Franz Mertens dĂ©montra que pour σ > 1, on a

Une estimation, souvent utile, est donnée par la formule suivante pour les valeurs réelles de s supérieures à 1

Elle rĂ©sulte de la formule issue de la formule sommatoire d'Abel dĂ©jĂ  donnĂ©e en remarquant que l'intĂ©grale est toujours positive et affectĂ©e du signe –.

Estimations sur Re(s) = 1

La fonction ζ est presque pĂ©riodique sur le demi plan Re(s) > 1. Elle y est donc bornĂ©e sur tout demi-plan fermĂ© strictement inclus. La prĂ©sence du pĂŽle en 1 empĂȘche toute extension de la presque pĂ©riodicitĂ© au sens de Bohr Ă  un demi-plan plus vaste. Il est donc important de connaĂźtre le comportement de la fonction sur l'axe Re(s) = 1.

La méthode de Vinogradov-Korobov sur les majorations des sommes d'exponentielles permet de montrer que l'on a, pour tout t, l'inégalité

On connaĂźt, sans aucune hypothĂšse, une minoration de l'ordre des fonctions ζ(1 + it) et 1/ζ(1 + it). On a en effet (Îł = 0,577
 est la constante d'Euler-Mascheroni)

et

La fonction n'est donc pas bornĂ©e sur l'axe Re(s) = 1, mĂȘme en dehors du voisinage de 1.

On connaßt, sous l'hypothÚse de Riemann, l'ordre exact des fonctions ζ(1 + it) et 1/ζ(1 + it). On a en effet

et

Estimations sur Re(s) = 0

Utilisant la formule des compléments et la relation fonctionnelle, on trouve pour t non nul

et de ce fait

Estimations dans la région Re(s) < 0

L'application de l'Ă©quation fonctionnelle et de la formule de Stirling, et le comportement asymptotique de sin(σ + it) permet de montrer que

pour σ < 0.

Estimation dans la bande critique

On peut estimer, uniformément dans la bande critique, ζ(s) par la formule

De la mĂ©thode de Vinogradov-Korobov on dĂ©duit la majoration suivante : il existe deux constantes c et C strictement positives telles que pour tout σ ∈ [1/2 ; 1] et t > 3, on ait

Dans l'Ă©tat actuel des connaissances, d'aprĂšs Ford[29], on peut prendre C = 76,2 et c = 4,45. La relation fonctionnelle permet d'estimer le module dans la bande σ ∈ [0 ; 1/2].

Le théorÚme de Valiron

Quand on regarde les applications arithmĂ©tiques de la fonction ζ, on est frappĂ© par l'usage quasi systĂ©matique des fonctions 1/ζ, ζ'/ζ, ou ln ζ mais la fonction ζ elle-mĂȘme apparaĂźt rarement au numĂ©rateur. Comme la rĂ©gion importante est la bande critique 0 ≀ Re(s) ≀ 1, il est important de pouvoir traverser cette bande. Or la prĂ©sence Ă©ventuelle de zĂ©ros sur le chemin complique singuliĂšrement les calculs et les estimations. Le rĂ©sultat suivant sert essentiellement Ă  majorer la fonction 1/ζ sur des chemins bien rĂ©partis.

Dans sa thÚse soutenue en 1914, Georges Valiron a montré qu'il existait une infinité de valeurs de t dans tout intervalle [T, T + 1] pour lesquelles on avait la minoration

pour un certain ÎŽ fixe strictement positif.

On ne connaĂźt aucune valeur de ÎŽ qui convient. On sait seulement que 0 ≀ ÎŽ ≀ 1. Sous l'hypothĂšse de Riemann, on peut prendre ÎŽ aussi petit qu'on veut.

La relation fonctionnelle approchée

Comme indiquĂ© dans la partie consacrĂ©e Ă  l'estimation dans la bande critique, il est possible de calculer la fonction ζ dans la bande critique en utilisant une somme partielle de la sĂ©rie de Dirichlet. La relation fonctionnelle se traduit alors dans une relation approchĂ©e reliant les sĂ©ries de Dirichlet partielles pour les exposants s et 1 – s. C'est la relation fonctionnelle approchĂ©e :

Pour 0 < σ < 1 et 2πxy = t avec x > h > 0, y > h > 0, on a

avec

On peut, avec elle, obtenir une premiÚre estimation de |ζ(1/2 + it)|, l'objectif étant de démontrer l'hypothÚse de Lindelöf (voir plus loin).

La théorie de la fonction mu

On utilise ici les résultats vus plus haut dans la partie « Estimation de la fonction dans les diverses régions du plan ».

L'estimation de ζ dans la partie Re(s) < 0 montre que la fonction t ↩ ζ(σ + it) est d'ordre fini : elle est majorĂ©e par une puissance de t = Im(s).

Dans la rĂ©gion Re(s) > σ0 > 1, la majoration est celle d'une constante.

Graphe de la fonction ÎŒ en fonction de σ. En noir, la partie connue. En jaune la partie supposĂ©e conformĂ©ment Ă  l'hypothĂšse de Lindelöf. En rouge la majoration par la convexitĂ©.

La thĂ©orie des sĂ©ries de Dirichlet montre que dans la bande critique, la fonction est encore d'ordre fini sauf en s = 1. La question qui se pose alors est celle de l'estimation de cet exposant. On appelle traditionnellement ÎŒ(σ) la borne infĂ©rieure des exposants ÎŒ tels que |ζ(σ + it)| â‰Ș tÎŒ.

Le thĂ©orĂšme de PhragmĂ©n-Lindelöf[30] implique que la fonction ÎŒ est une fonction convexe dĂ©croissante de σ.

On a de plus :

  • ÎŒ(σ) = 1/2 – σ pour σ < 0 et
  • ÎŒ(σ) = 0 pour σ > 1.
  • La propriĂ©tĂ© de convexitĂ© impose, dans la bande critique, ÎŒ(σ) ≀ 1/2 – σ/2

mais on ignore la valeur exacte de ÎŒ(σ) pour 0 < σ < 1.

La convexitĂ© donne ÎŒ(1/2) ≀ 1/4 = 0,25.

La relation fonctionnelle approchĂ©e (voir plus haut) donne : ÎŒ(1/2) ≀ 1/6 < 0,16667.

On sait que ÎŒ(1/2) ≀ 32/205 ≈ 0,156098 d'aprĂšs M.N. Huxley[31].

Les zéros

Les zéros triviaux

ZĂ©ros triviaux de la fonction zĂȘta.

Par la relation fonctionnelle, il apparaĂźt que la fonction ζ s'annule pour tous les entiers de la forme –2k, (k > 0) par suite du facteur , mais pas en s = 0 par suite du facteur Γ(1 – s). Ces zĂ©ros sont appelĂ©s les zĂ©ros triviaux.

La relation fonctionnelle permet de plus de montrer que chacun de ces zĂ©ros est simple puisque la valeur de la dĂ©rivĂ©e en –2k est :

Les zéros non triviaux

Double spirale traversant cinq fois l'origine du graphique
Trajectoire de ζ(1/2 + iy) pour y de 0 à 34.
ReprĂ©sentation en bleu de la partie rĂ©elle et en rouge de la partie imaginaire de la fonction ζ(1/2 + ix) sur l'intervalle [0, 100], oĂč l'on voit clairement apparaĂźtre les premiers zĂ©ros non triviaux lorsque les deux courbes se croisent sur l'axe des abscisses.

Il existe d'autres zéros. On obtient de la relation fonctionnelle que la fonction ζ admet une infinité de zéros dans la bande Re(s) ∈ ]0, 1[. Pour cela, on remarque que la fonction

vérifie

On en déduit que la fonction

est paire. On montre que les deux fonctions Ο et Ξ sont deux fonctions entiĂšres d'ordre 1 et, comme Ξ(s) est paire, la fonction s ↩ Ξ(√s) est une fonction entiĂšre d'ordre 1/2 : elle admet donc, d'aprĂšs la thĂ©orie gĂ©nĂ©rale des fonctions entiĂšres, une infinitĂ© de zĂ©ros. Ces zĂ©ros se traduisent par une infinitĂ© de zĂ©ros de ζ dans la bande Re(s) ∈]0, 1[. On ignore pour l'instant si l'hypothĂšse de Riemann (voir plus bas), qui affirme que tous ces zĂ©ros sont de partie rĂ©elle 1/2, est vraie.

Premiers zéros sur la droite critique
± kPartie imaginaire de ρk
1± 14,134 725 141 734 693 790

2± 21,022 039 638 771 554 993

3± 25,010 857 580 145 688 763

4± 30,424 876 125 859 513 210


Représentation sous forme de produit de facteurs primaires (produit de Hadamard)

D'aprÚs le théorÚme de factorisation de Hadamard pour une fonction méromorphe, toute fonction méromorphe s'écrit sous forme de produit de facteurs dits primaires dans lesquels apparaissent les zéros et les pÎles de la fonction. La représentation sous cette forme pour ζ prend la forme

oĂč le produit s'effectue sur les zĂ©ros non-triviaux ρ de ζ et Îł est la constante d'Euler-Mascheroni.

Expressions de ζ'/ζ en fonction des zéros triviaux et non triviaux

IndĂ©pendamment de l'expression en fonction des facteurs primaires de Weierstrass, la valeur ζ(s) peut se calculer en fonction des zĂ©ros non triviaux les plus proches du point s = σ + it. On dĂ©montre que seuls les zĂ©ros Ă  une distance de t infĂ©rieure Ă  1 interviennent vraiment. Le reste s'exprime dans la notation « de Landau » .

Il faut faire attention au fait que les expressions faisant intervenir une somme sur les zĂ©ros ρ = ÎČ + iÎł ne sont gĂ©nĂ©ralement pas commutativement convergentes et que l'ordre de sommation intervient : on somme symĂ©triquement par rapport Ă  1/2. D'autre part, les zĂ©ros ρ sont comptĂ©s autant de fois que leur multiplicitĂ© dans ces sommes.

La premiÚre expression intéressante, déduite du produit de Hadamard précédent, est :

La somme s'effectue sur les zĂ©ros non-triviaux ρ de ζ et Îł est la constante d'Euler-Mascheroni.

On en déduit :

Cette formule montre alors, sans l'hypothĂšse de Riemann,

Avec l'hypothĂšse de Riemann, la sommation peut ĂȘtre considĂ©rablement diminuĂ©e. On a

La bande critique et l'hypothĂšse de Riemann

La sĂ©rie des points blancs marque les points oĂč la fonction zĂȘta s'annule.

On appelle bande critique la bande 0 < Re(s) < 1. Il existe donc une infinitĂ© de zĂ©ros dans la bande critique mais, actuellement, on ne sait pas exactement oĂč. L'hypothĂšse de Riemann affirme qu'ils sont tous de partie rĂ©elle 1/2. On a vĂ©rifiĂ© numĂ©riquement sur plus de 1 500 000 000 zĂ©ros que leur partie rĂ©elle Ă©tait bien 1/2[note 10].

Il a Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© que l'axe Re(s) = 1/2 en avait une infinitĂ©, dont les 2/5 au moins sont simples. On sait Ă©galement que la proportion des zĂ©ros de la forme ÎČ + iÎł en dehors de l'axe Re(s) = 1/2 et tels que |Îł| < T tend vers 0 quand T tend vers l'infini, cette proportion dĂ©croissant Ă©galement Ă  mesure que ÎČ s'Ă©carte de 1/2.

On appelle traditionnellement N(T) le nombre de zéros de la fonction ζ de Riemann dans le rectangle vertical décrit par sa diagonale ]0, 1 + iT]. On note aussi N0(T) le nombre de zéros se trouvant sur le segment [1/2, 1/2 + iT]. On a alors les estimations suivantes :

Ces estimations permettent de donner une estimation asymptotique pour le zĂ©ro de rang n, ÎČn + iÎłn sous la forme

Cette formule montre d'une part que l'ordre m(ρ) de chaque zĂ©ro ρ est majorĂ© par

et d'autre part que la distance entre deux zéros tend vers 0. On a en effet

Pour les zĂ©ros de la droite critique, on sait qu'il existe une constante C telle que, pour tout T ≄ 2 on a

On ne connaßt pas la valeur exacte de la constante C mais Conrey a démontré en 1989 que

Autrement dit, plus de deux cinquiÚmes des zéros de ζ sont sur la droite critique Re(s) = 1/2.

La fonction S(T)

À partir de la fonction entiĂšre Ο, qui satisfait et et dont les zĂ©ros sont les zĂ©ros non triviaux, on trouve avec le principe de l'argument[32]

oĂč , les arguments Ă©tant dĂ©finis par variation continue sur le chemin et en partant de la valeur .

La formule de Stirling complexe donne alors

On connaĂźt relativement peu de chose sur S(T) sans aucune hypothĂšse. On a l'estimation

déjà ancienne et qu'on n'arrive pas à améliorer.

Sous l'hypothĂšse de Riemann, on a

Dans les recherches sur S(T), on a réussi à avoir quelques précisions supplémentaires sur le comportement de S(T) qui reste mystérieux :

dont on déduit que la moyenne de S(T) est égale à zéro.

Cependant Selberg a montré que S(T) était minoré par une quantité tendant vers l'infini pour une infinité de valeurs de T. Sur ces valeurs de T, on a

Selberg a également montré que

qui montre que la moyenne de S2(T) sur [0, T] est (1/2π2) ln ln T.

Edward Charles Titchmarsh a montré d'autre part que S(T) changeait de signes une infinité de fois.

La région sans zéro

RĂ©gion (en bleu) sans zĂ©ro de la fonction zĂȘta.

La plus grande région connue qui ne contient aucun zéro de la fonction ζ est donnée asymptotiquement par la formule suivante[33] :

Les grandes conjectures

L'hypothĂšse de Riemann

Elle exprime que tous les zéros qui se trouvent dans la bande critique sont de partie réelle égale à 1/2. Elle ne dit rien sur la multiplicité des zéros.

Cette hypothÚse, formulée dÚs 1859 par Bernhard Riemann, a de trÚs grandes conséquences dans le comportement asymptotique de nombreuses fonctions arithmétiques qui se trouvent liées à ζ, ainsi que sur l'étude de la répartition des nombres premiers.

Les conséquences sur le comportement de la fonction ζ sont nombreuses. On en donne quelques-unes dans ce qui suit.

Cette hypothÚse reste pour l'instant non démontrée, mais tous les zéros calculés jusqu'ici par ordinateur la vérifient.

ConsĂ©quences de l'hypothĂšse de Riemann sur la croissance de la fonction zĂȘta

L'hypothÚse de Riemann entraine que l'on a Ύ = 0 dans le théorÚme de Valiron. En fait, on montre bien mieux sous l'hypothÚse de Riemann car la fonction ln ζ est alors analytique réguliÚre dans le demi-plan Re(s) > 1/2.

Sous l'hypothĂšse de Riemann, on a, uniformĂ©ment pour tout σ tel que 1/2 < σ0 ≀ σ ≀ 1 :

et mĂȘme plus prĂ©cisĂ©ment, si l'on suppose , on a

De cela on dĂ©duit, pour tout σ > 1/2, car l'exposant dans la formule prĂ©cĂ©dente est infĂ©rieur Ă  0,

Autrement dit, l'hypothÚse de Riemann implique l'hypothÚse de Lindelöf (voir plus bas).

Il en résulte également l'estimation

On peut développer, sous l'hypothÚse de Riemann, une théorie voisine de celle de la fonction mais pour la fonction ζ' (voir #La théorie de la fonction mu).

En supposant σ > 1/2 et appelant Îœ(σ) le plus petit exposant α pour lequel on a , on montre que Îœ(σ) est une fonction convexe dĂ©croissante de σ satisfaisant aux inĂ©galitĂ©s 1 – σ ≀ Îœ(σ) ≀ 2(1 – σ). On montre aussi que la fonction Îœ(σ) de est la mĂȘme fonction Îœ(σ) que celle de ln ζ(σ + it). Mais on ignore encore la valeur de Îœ(σ) pour tout σ ∈ ]1/2, 1[. Pour σ ≄ 1, Îœ(σ) = 0.

L'hypothÚse de Riemann et les zéros de la dérivée ζ'

La question de la position des zéros de la dérivée ζ' est liée également à l'hypothÚse de Riemann. Littlewood a démontré le théorÚme

« Ou bien la fonction ζ ou bien la fonction ζ' a une infinitĂ© de zĂ©ros dans la bande 1 – ÎŽ < σ < 1, ÎŽ Ă©tant une quantitĂ© positive arbitrairement petite. »

et Speiser a démontré que

« L'hypothĂšse de Riemann est Ă©quivalente Ă  l'absence de zĂ©ro non trivial de la dĂ©rivĂ©e ζ' dans le demi-plan σ < 1/2. »

De mĂȘme, Yıldırım[34] a dĂ©montrĂ© que

« L'hypothÚse de Riemann implique que ζ''(s) et ζ'''(s) ne s'annulent pas dans la bande 0 < Re(s) < 1/2. »

L'hypothÚse de Lindelöf et l'hypothÚse de densité

La conjecture de Lindelöf est l'assertion que pour tout Δ > 0

Cela a entre autres pour consĂ©quence immĂ©diate que ÎŒ(1/2) = 0. On connaĂźt alors la valeur exacte de la fonction ÎŒ. Le graphe de ÎŒ est composĂ© des deux seules demi-droites indiquĂ©es, qui se rejoignent en σ = 1/2 Ă  la valeur 0.

Cette hypothÚse a de nombreuses formulations équivalentes intéressantes. En voici deux :

  • Pour tout k ≄ 1, on a
  • Pour tout k ≄ 1, et tout σ > 1/2 on a

L'hypothĂšse de Lindelöf a pour consĂ©quence la rarĂ©faction des zĂ©ros Ă  mesure qu'on s'Ă©carte de l'axe σ = 1/2. Cette derniĂšre propriĂ©tĂ© est appelĂ©e hypothĂšse de densitĂ© quand on la considĂšre par elle-mĂȘme. Appelant N(σ, T) le nombre de zĂ©ros sur la droite Re(s) = σ et dont la partie imaginaire reste infĂ©rieure ou Ă©gale Ă  T, on a, sous l'hypothĂšse de Lindelöf,

Par contre, on ignore si l'hypothÚse de Lindelöf, qui a comme on vient de voir une influence sur la position des zéros, implique ou non l'hypothÚse de Riemann.

Les hypothĂšses de Mertens

Sur une table numĂ©rique allant jusqu'Ă  10 000 de la fonction de Mertens M(x), Mertens en 1897 conjectura que l'on a

Cette conjecture a été réfutée en 1985 par Odlyzko et te Riele. Cependant, la conjecture généralisée de Mertens, qui s'exprime sous la forme

pour un certain A > 1, n'est pas réfutée.

Une troisiĂšme formulation est la forme affaiblie :

La forme généralisée implique la forme affaiblie. La forme affaiblie implique l'hypothÚse de Riemann (et donc l'hypothÚse de Lindelöf) et la simplicité des zéros.

La conjecture des paires corrélées

La conjecture (faible) des paires corrélées exprime que, pour un nombre α > 0,

Cette derniÚre conjecture fait le lien avec la théorie des matrices aléatoires.

La conjecture de Hilbert-Polya

Hilbert et Polya ont suggéré que la conjecture de Riemann serait démontrée si l'on pouvait trouver un opérateur hermitien Ā dont les valeurs propres (nécessairement réelles) soient exactement les parties imaginaires Ek des zéros non triviaux :

Un tel opérateur hermitien n'a pas encore été trouvé explicitement à ce jour. Néanmoins, cette équation aux valeurs propres suggÚre un lien avec un problÚme de mécanique quantique non relativiste qui est précisé dans le paragraphe suivant.

Propriétés statistiques des zéros non triviaux et chaos quantique

Les propriétés statistiques des zéros non triviaux de la fonction ζ ressemblent asymptotiquement à celles des valeurs propres de matrices aléatoires de l'ensemble gaussien unitaire pour les systÚmes non-invariants par renversement du temps (GUE). Cette conjecture est basée sur de nombreux résultats numériques, et fortement supportée par un théorÚme rigoureux de Montgomery[35]. Ceci a conduit le physicien théoricien Michael Berry à conjecturer que les parties imaginaires Ek des zéros non triviaux pouvaient s'interpréter comme les valeurs propres d'un opérateur hamiltonien décrivant un systÚme quantique non relativiste qui serait classiquement chaotique, et dont les orbites classiques ne possÚdent pas la symétrie de renversement du temps[36] - [37] - [38]. Mieux, un opérateur hamiltonien semblant posséder les bonnes propriétés a été exhibé par Berry et Jonathan Keating en 1999[39] - [40].

Les propriĂ©tĂ©s statistiques des zĂ©ros non triviaux continuent d'ĂȘtre l'objet d'intenses recherches, tant numĂ©riques qu'analytiques, ainsi que d'interprĂ©tations probabilistes[41] - [42].

Le problĂšme des moments

Malgré quelques progrÚs, on n'a pas réussi à résoudre la question de l'ordre de ζ dans la bande critique. Le problÚme de l'ordre moyen est lui, partiellement résolu. Il prend la forme de l'estimation de l'expression

Cette estimation est donnée par un théorÚme général sur les séries de Dirichlet :

« Soient et deux sĂ©ries de Dirichlet absolument convergentes, la premiĂšre pour Re(s) > σ0 et la seconde pour Re(s) > σ1.

Alors, pour α > σ0 et ÎČ > σ1, on a

»

En l'appliquant Ă  la fonction ζ, on trouve immĂ©diatement, pour σ > 1

et

On a donc cherchĂ© Ă  Ă©tendre ces formules pour σ ≀ 1.

Le problĂšme gĂ©nĂ©ral des moments est donc l'Ă©valuation des intĂ©grales dĂ©pendantes de k, pour σ ≄ 1/2

Les résultats, désormais classiques, sont les suivants :

  • Pour le moment d'ordre 2 en σ = 1/2
  • Pour le moment d'ordre 2 en σ > 1/2
  • Pour le moment d'ordre 4 en σ = 1/2
  • Pour le moment d'ordre 4 en σ > 1/2

Carlson a montrĂ© que, si l'on appelle σk la borne infĂ©rieure des σ pour lesquels on a , alors

pour 0 < α < 1, la quantitĂ© ÎŒk(α) Ă©tant l'Ă©quivalent de la fonction ÎŒ de ζ pour la fonction ζk.

Les moments d'ordre supérieur à 4 font encore l'objet d'intenses recherches. On sait qu'il existe une constante C(k) telle que

pour 2 ≀ k ≀ 6 et on conjecture qu'il en est ainsi pour les k supĂ©rieurs Ă  6, en particulier 8.

L'importance du problÚme des moments est liée à l'hypothÚse de Lindelöf (voir plus haut).

Applications diverses

RĂ©gularisation ZĂȘta

Par l'intermédiaire de la fonction ζ de Riemann, on a développé une méthode de régularisation des suites divergentes qui a trouvé des applications en physique, notamment dans l'effet Casimir.

DĂ©veloppement en sĂ©rie entiĂšre de ln Γ(1+t)

Une formule due Ă  Euler donne pour | t | < 1

Elle permet Ă  Euler d'Ă©crire[43]

Legendre[44] écrit la formule d'Euler sous la forme plus commode numériquement

Suites de Farey et hypothĂšse de Riemann

Ces suites peuvent ĂȘtre utilisĂ©es pour obtenir des formules Ă©quivalentes Ă  l'hypothĂšse de Riemann.

Fonction de comptage des nombres premiers et théorÚme des nombres premiers

La fonction de comptage des nombres premiers est définie par

La non-annulation de la fonction ζ sur Re(s) = 1 a pour conséquence la véracité de la conjecture de Legendre-Gauss :

La région sans zéro permet ensuite de majorer le reste :

ce qui est encore bien loin de ce qu'on sait démontrer si l'hypothÚse de Riemann est vraie

Le nombre premier de rang n

En 1902, Cipolla montra le développement asymptotique

Grùce à une étude numérique de la fonction ζ, Rosser et Schoenfeld ont montré, pour n supérieur ou égal à 20, que

La borne inférieure a été améliorée par Dusart en 1999 qui montra, pour n >1,

Notes et références

Notes

  1. Les séries de Dirichlet sont une généralisation des séries de Riemann avec un numérateur différent de 1 et qui forme une suite indicée par n.
  2. Il est aussi possible de calculer ζ(2k) Ă  l'aide de l'Ă©galitĂ© de Parseval. Voir Ă  ce propos la page Exercices sur les sĂ©ries de Fourier et la fonction zĂȘta sur WikiversitĂ©.
  3. On trouvera par exemple quatorze dĂ©monstrations (en anglais) de la valeur ζ(2) = π2/6 sur le site internet de Robin Chapman.
  4. Cette méthode de prolongement s'étend aux séries de Dirichlet générales.
  5. Pour une gĂ©nĂ©ralisation de cette section aux fonctions zĂȘta de Hurwitz, avec une preuve plus simple, voir cet exercice corrigĂ© sur WikiversitĂ©.
  6. Le pĂŽle en 1 de ζ est annulĂ© par le terme 1 – 21 – s ; on a (la sĂ©rie harmonique alternĂ©e).
  7. Il existe d'autres dĂ©monstrations : on peut par exemple montrer que la sĂ©rie est en fait convergente pour Re(s) > 0 en appliquant la formule de Cahen pour l'abscisse de convergence simple, les sommes partielles des coefficients ne prenant que l'une des trois valeurs 0, 1, 2. On peut aussi effectuer sur la sĂ©rie un regroupement des termes de la forme en laissant le terme nĂ©gatif Ă  part. Ce faisant, la sĂ©rie est alors une sĂ©rie alternĂ©e dont les termes sont dĂ©croissants (cela se montre facilement car on a 3n – 2 < 3n – 1 < 3n < 3n + 1 < 3n + 2 donc d'une part et d'autre part) et qui converge donc par application du critĂšre des sĂ©ries alternĂ©es pour s rĂ©el. On montre facilement que la sĂ©rie ne converge pas en 0 car ses sommes partielles ne tendent pas vers 0.
  8. La prĂ©sence du facteur 1 – 21 – s dans la formule de Ramaswami montre que le prolongement de ζ par cette formule souffre du mĂȘme problĂšme que celui par la fonction η de Dirichlet.
  9. L'expression : ζ(a) = η(a)/(1 – 21 – a) pour a ∈ ]0, +∞[\{1} donne le mĂȘme rĂ©sultat puisque l'expression η(a) de la fonction η de Dirichlet est positive par le thĂ©orĂšme des sĂ©ries alternĂ©es et que 1 – 21 – a est du mĂȘme signe que a – 1.
  10. L'article détaillé hypothÚse de Riemann précise bien qu'il ne s'agit pas d'une estimation approchée de cette partie réelle, mais d'une démonstration, sans aucune incertitude numérique.

Références

  1. (en) Lennart RĂ„de et Bertil Westergren, Mathematics Handbook for Science and Engineering, , 562 p. (ISBN 978-3-540-21141-9, lire en ligne), p. 194.
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  11. Tenenbaum 2008, p. 248.
  12. Ou la redĂ©montrer directement par la mĂȘme mĂ©thode qui, dans le cas particulier des fonctions zĂȘta de Hurwitz (dont fait partie la fonction ζ de Riemann), est Ă©lĂ©mentaire : voir cet exercice corrigĂ© sur WikiversitĂ©.
  13. (en) Neal Koblitz, P-adic Numbers, p-adic Analysis, and Zeta-Functions, coll. « GTM » (no 58), , 2e éd. (1re éd. 1977) (lire en ligne), p. 47.
  14. Voir Tenenbaum 2008, p. 253 ; P. Cartier, « An Introduction to Zeta-Functions », in (en) M. Waldschmidt, P. Moussa, J.-M. Luck et C. Itzykson (éds.), From Number Theory to Physics [détail des éditions], p. 5-12, et surtout 11-12, suivi ici (aperçu sur Google Livres).
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  21. (en) Luis Baez-Duarte, « Fast proof of functional equation for ζ(s) »,‎ (arXiv math/0305191).
  22. On peut aussi, comme le fait Tenenbaum 2008, p. 233-234 (p. 142 de l'édition en anglais), le déduire de la définition par une intégrale de contour.
  23. Voir l'article 1 + 2 + 3 + 4 + ⋯.
  24. (en) I. M. Vinogradov, Elements of Number Theory, Dover, , 227 p. (ISBN 978-0-486-49530-9, lire en ligne), p. 38 ; (en) J. E. Nymann, « On the probability that k positive integers are relatively prime », J. Number Theory, vol. 4, no 5,‎ , p. 469-473 (DOI 10.1016/0022-314X(72)90038-8) ; (en) Richard A. Mollin, Advanced Number Theory with Applications, CRC Press, coll. « Discrete Mathematics and Its Applications », , 440 p. (ISBN 978-1-4200-8329-3, lire en ligne), p. 220.
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  30. Voir par exemple (en) E. C. Titchmarsh, The Theory of Functions, Oxford University Press, , § 5.65.
  31. (en) M.N. Huxley, « Exponential sums and the Riemann zeta function. V. », Proc. London Math. Soc. (3), vol. 90, no 1,‎ , p. 1-41.
  32. Titchmarsh et Heath-Brown 1987, chap. IX, « General distribution of zeros ».
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  39. (en) Michael V. Berry et Jonathan P. Keating, « H = xp and the Riemann zeros », dans I. V. Lerner et J. P. Keating, Supersymmetry and Trace Formulae: Chaos and Disorder, New York, Plenum Press, (lire en ligne), p. 355-367.
  40. (en) Michael V. Berry et Jonathan P. Keating, « The Riemann Zeros and Eigenvalue Asymptotics », SIAM Review, vol. 41,‎ , p. 236-266 (lire en ligne).
  41. PropriĂ©tĂ©s statistiques de la fonction zĂȘta :
    • (en) Eugene B. Bogomolny et Jonathan P. Keating, « Random matrix theory and the Riemann zeros I : three- and four-point correlations », Nonlinearity, vol. 8,‎ , p. 1115-1131 ;
    • (en) Eugene B. Bogomolny et Jonathan P. Keating, « Random matrix theory and the Riemann zeros II : n-point correlations », Nonlinearity, vol. 9,‎ , p. 911-935 ;
    • (en) Oriol Bohigas, Patricio LebƓuf et M.-J. Sanchez, « Spectral spacing correlations for chaotic and disordered systems », Foundations of Physics, vol. 31,‎ , p. 489-517 (arXiv nlin.CD/0012049) ;
    • (en) Francesco Mezzadri, « Random matrix theory and the zeros of zeta'(s) », Journal of Physics A: Mathematical and General, vol. 36,‎ , p. 2945-2962 (arXiv math-ph/0207044) ;
    • (en) Jonathan P. Keating, « Random matrices and the Riemann zeta-function – a review », dans James M. Hill et Ross Moore, Applied Mathematics Entering the 21st Century : Invited Talks from the ICIAM 2003 Congress, SIAM, , p. 210-225 ;
    • (en) Eugene Bogomolny, Oriol Bohigas, Patricio LebƓuf et A. G. Monastra, « On the spacing distribution of the Riemann zeros: corrections to the asymptotic result », Journal of Physics A: Mathematical and General, vol. 39,‎ , p. 10743-10754 (arXiv math/0602270).
  42. On pourra lire Ă©galement : Philippe Biane, « La fonction zĂȘta de Riemann et les probabilitĂ©s », , JournĂ©es X-UPS.
  43. E043, Commentarii AcademiĂŠ Scientiarum imperialis petropolitanĂŠ, t. VII, 1734-1735, p. 156-157.
  44. Exercices de calcul intégral sur divers ordres de transcendantes et sur les quadratures, t. II, 1811, p. 65.

Voir aussi

Livres en français
  • AndrĂ© Blanchard, Initiation Ă  la thĂ©orie analytique des nombres premiers, Paris, Dunod,
  • Jean-BenoĂźt Bost, Pierre Colmez et Philippe Biane, La Fonction ZĂȘta, Paris, Éditions de l'École polytechnique, , 193 p. (ISBN 2-7302-1011-3)
    Suite d'articles sur diffĂ©rents points de la thĂ©orie analytique des nombres et de la fonction zĂȘta. N'est pas destinĂ© Ă  une Ă©tude systĂ©matique de la fonction zĂȘta de Riemann, en ligne Bost, Colmez et Biane sous forme pdf.
  • Pierre Colmez, ÉlĂ©ments d'analyse et d'algĂšbre (et de thĂ©orie des nombres), Éditions de l'École Polytechnique, (lire en ligne)
    On y trouvera en particulier une démonstration du théorÚme des nombres premiers et de celui de la progression arithmétique.
  • William John Ellison et Michel MendĂšs France, Les Nombres premiers, [dĂ©tail de l’édition]
    MalgrĂ© son titre, il s'agit essentiellement de l'Ă©tude de la fonction zĂȘta de Riemann. On y trouvera aussi une preuve Ă©lĂ©mentaire du thĂ©orĂšme de Hadamard-La VallĂ©e Poussin, une preuve du thĂ©orĂšme de Dirichlet et la dĂ©monstration de la rĂ©gion sans zĂ©ro de Vinogradov-Korobov. À lire pour commencer. Il a aussi l'avantage d'ĂȘtre en français.
  • Jean Favard, Leçons sur les fonctions presque-pĂ©riodiques, Paris, Gauthier-Villars,
    Pour comprendre la thĂ©orie de Bohr des sĂ©ries de Dirichlet dont la fonction zĂȘta fait partie puisqu'elle est presque pĂ©riodique au sens de Bohr dans le demi-plan Ă  droite du pĂŽle 1.
  • GĂ©rald Tenenbaum, Introduction Ă  la thĂ©orie analytique et probabiliste des nombres, Paris, Belin, , 3e Ă©d., 590 p. (ISBN 978-2-7011-4750-5)
Livres en anglais
  • Eberhard Freitag et Rolf Busam, Complex Analysis, Springer, 2e Ă©dition, 2009 (ISBN 978-3-540-25724-0) — La thĂ©orie analytique des nombres, de la dĂ©finition des nombres complexes aux formes modulaires en passant par zĂȘta.
  • Aleksandar Ivić, The Riemann Zeta-Function, John Wiley & Sons, (ISBN 0-471-80634-X, lire en ligne) — Concurrent du traitĂ© de Titchmarsh, un peu plus rĂ©cent.
  • Karatsuba, Basic Analytic Number Theory, Springer-Verlag, 1993 (ISBN 0-387-53345-1) — TrĂšs bon traitĂ©.
  • Serge Lang, Algebraic Number Theory, Addison Wesley,
  • (en) E. C. Titchmarsh et D. R. Heath-Brown, The Theory of the Riemann Zeta-Function, Oxford, OUP, , 2e Ă©d., 412 p. (ISBN 0-19-853369-1) — La bible sur la fonction zĂȘta jusqu'Ă  une Ă©poque rĂ©cente, disons 1990. Reste irremplaçable sur certains sujets. La premiĂšre Ă©dition de 1951 n'a pas beaucoup Ă©tĂ© complĂ©tĂ©e par la seconde de 1986. Heath-Brown s'est contentĂ© d'indiquer pour chaque chapitre l'Ă©tat des connaissances en 1986 sans dĂ©monstration en deux ou trois pages.
  • S. J. Patterson (de), An Introduction to the Theory of the Riemann Zeta-Function, coll. « Cambridge Studies in Advanced Mathematics » (no 14), Cambridge University Press, 1995 (ISBN 0-521-49905-4)

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