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Organomercuriel

Un organomercuriel est un composĂ© organomĂ©tallique contenant une liaison carbone–mercure. Cette liaison est gĂ©nĂ©ralemet trĂšs stable par rapport Ă  l'air et Ă  l'humiditĂ© mais est sensible Ă  la lumiĂšre. Les organomercuriels importants sont le cation mĂ©thylmercure(II) CH3Hg+, le cation Ă©thylmercure(II) CH3CH2Hg+, le dimĂ©thylmercure (CH3)2Hg, le diĂ©thylmercure (CH3CH2)2Hg et la merbromine (Mercurochrome). Le thiomersal est utilisĂ© comme conservateur pour vaccins et mĂ©dicaments administrĂ©s par injection intraveineuse.

Liaison C–Hg.

La toxicité des organomercuriels[1] - [2] présente à la fois des risques et des bénéfices. Le diméthylmercure est particuliÚrement toxique mais a été utilisé comme fongicide et insecticide, tandis que la merbromine et le borate de phénylmercure C6H5HgOB(OH)2 sont utilisés comme antiseptique topique et le nitromersol a été utilisé comme conservateur pour vaccins et antitoxines.

SynthĂšse

On obtient des organomercuriels de nombreuses maniÚres, y compris par réaction directe d'hydrocarbures avec des sels de mercure(II). De ce point de vue, la chimie des organomercuriels ressemble étroitement à celle des composés organiques du palladium et se distingue de celle des organocadmiens.

Mercuration des cycles aromatiques

Les arĂšnes riches en Ă©lectrons subissent une mercuration directe lors du traitement avec l'acĂ©tate de mercure(II) (H3C–COO)2Hg. Celui des deux groupes acĂ©tate qui reste sur le mercure peut ĂȘtre dĂ©placĂ© par l'anion chlorure[3] :

C6H5OH + (H3C–COO)2Hg ⟶ H3C–COOHg–2-C6H4OH + CH3COOH ;
H3C–COOHg–2-C6H4OH + NaCl ⟶ C6H4OH-2–HgCl + CH3COONa.

Addition aux alcĂšnes

Le cation Hg2+ se lie aux alcĂšnes, induisant l'addition d'hydroxyde et d'alcoolate. Par exemple, le traitement de l'acrylate de mĂ©thyle CH2=CHCOOCH3 avec de l'acĂ©tate de mercure(II) (H3C–COO)2Hg dans du mĂ©thanol donne un ester α-mercuriel[4] :

(H3C–COO)2Hg + CH2=CHCOOCH3 ⟶ CH3COO(H3C–COOHg)CHCH2OCH3.

La liaison C–Hg rĂ©sultante peut ĂȘtre clivĂ©e avec du brome Br2 pour donner le bromoalcane correspondant :

CH3COO(H3C–COOHg)CHCH2OCH3 + Br2 ⟶ CH3COOBrCHCH2OCH3 + CH3COOHgBr.

Cette réaction est appelée réaction de Hofmann-Sand[5].

Réaction des composés du mercure(II) avec des équivalents de carbanions

Une voie gĂ©nĂ©rale de synthĂšse des organomercuriels fait intervenir une alkylation avec des rĂ©actifs de Grignard ou des organolithiens. Le diĂ©thylmercure (CH3CH2)2Hg s'obtient par la rĂ©action du chlorure de mercure(II) HgCl2 avec deux Ă©quivalents de bromure d'Ă©thylmagnĂ©sium CH3CH2MgBr, gĂ©nĂ©ralement en solution dans l'Ă©ther diĂ©thylique (CH3CH2)2O[6]. Le diĂ©thylmercure formĂ© est un liquide dense (2,466 g/cm3) qui bout Ă  57 °C Ă  16 torr et est lĂ©gĂšrement soluble dans l'Ă©thanol, soluble dans l'Ă©ther diĂ©thylique. Le diphĂ©nylmercure (C6H5)2Hg, avec un point de fusion de 121 Ă  123 °C, peut ĂȘtre produit par rĂ©action de HgCl2 avec le bromure de phĂ©nylmagnĂ©sium C6H5MgBr, un autre rĂ©actif de Grignard.

Un mode de préparation apparentée implique la formation de phénylsodium C6H5Na en présence de sels de mercure(II)[7].

Autres méthodes

Le mercure(II) peut ĂȘtre alkylĂ© par traitement avec des sels de diazonium en prĂ©sence de cuivre Ă©lĂ©mentaire. C'est de cette façon qu'a Ă©tĂ© prĂ©parĂ© le chlorure de ÎČ-naphtylmercure[8].

Le phĂ©nyl(trichloromĂ©thyl)mercure (en) C6H5HgCCl3 peut ĂȘtre obtenu en produisant du dichlorocarbĂšne CCl2 en prĂ©sence de chlorure de phĂ©nylmercure C6H5HgCl ; le trichloroacĂ©tate de sodium (en) CCl3COONa est une source pratique de carbĂšne[9]. Il libĂšre le dichlorocarbĂšne par chauffage :

C6H5HgCCl3 (en) ⟶ C6H5HgCl + CCl2.

RĂ©actions

Les organomercuriels sont des intermĂ©diaires de synthĂšse polyvalents en raison des conditions bien prĂ©cises dans lesquelles ils subissent un clivage des liaisons C–Hg. Le diphĂ©nylmercure (C6H5)2Hg est une source de radical phĂ©nyle dans certaines synthĂšses. Le traitement Ă  l'aluminium donne du triphĂ©nylaluminium ((C6H5)3Al)2 :

3 (C6H5)2Hg + 2 Al ⟶ ((C6H5)3Al)2 + 3 Hg.

Les organomercuriels réagissent avec les halogÚnes pour donner l'halogénure organique correspondant. Ils sont couramment utilisés dans les réactions de transmétallation avec les lanthanides et les métaux alcalino-terreux.

Le couplage croisĂ© d'organomercuriels avec des halogĂ©nures mĂ©talliques est catalysĂ© par le palladium, ce qui donne une mĂ©thode de formation de liaisons C–C. Ces rĂ©actions sont gĂ©nĂ©ralement peu sĂ©lectives, mais leur sĂ©lectivitĂ© augmente en prĂ©sence d'halogĂ©nures. On a montrĂ© que la carbonylation des lactones peut ĂȘtre obtenue Ă  l'aide de rĂ©actifs Ă  Hg(II) dans les conditions catalysĂ©es au palladium (formation de liaisons C–C et formation d'esters cis)[10].

Applications

En raison de leur toxicitĂ© et de leur nature peu nuclĂ©ophile, les organomercuriels trouvent un nombre limitĂ© d'utilisations. L'oxymercuration (en) des alcĂšnes en alcools avec l'acĂ©tate de mercure(II) (H3C–COO)2Hg forme des intermĂ©diaires organomercuriels. Une rĂ©action apparentĂ©e donnant des phĂ©nols est appelĂ©e rĂ©action de Wolffenstein-Böters (en). La toxicitĂ© des organomercuriels est mise Ă  profit par des antiseptiques comme le thiomersal et la merbromine ou par des fongicides tels que le chlorure d'Ă©thylmercure CH3CH2HgCl et l'acĂ©tate de phĂ©nylmercure (en) C6H5HgOCOCH3.

Les diurétiques mercuriels (en) tels que le Mersalyl ont été autrefois d'usage courant mais ont été remplacés par les thiazides et les diurétiques de l'anse, plus sûrs et à action plus longue, tout en étant actifs par voie orale.

Les thiols sont Ă©galement appelĂ©s mercaptans en raison de leur propension Ă  capturer le mercure. Les thiolates (R–S−) et les thiocĂ©tones (R2C=S) Ă©tant des nuclĂ©ophiles mous, forment des complexes de coordination forts avec le mercure(II), un Ă©lectrophile mou[11]. Ce mode d'action les rend utiles pour la chromatographie d'affinitĂ© pour sĂ©parer les composĂ©s contenant des thiols des mĂ©langes complexes. Par exemple, un gel d'agarose organomercuriel ou des billes de gel sont utilisĂ©s pour isoler des composĂ©s thiolĂ©s tels que la 4-thiouridine dans un Ă©chantillon biologique[12].

Notes et références

  1. (en) Holger Hintelmann, « Organomercurials. Their Formation and Pathways in the Environment », Organometallics in Environment and Toxicology: Metal Ions in Life Sciences,‎ (PMID 20877813, DOI 10.1039/9781849730822-00365, lire en ligne)
  2. (en) Michael Aschner, Natalia Onishchenko et Sandra Ceccatelli, « Toxicology of Alkylmercury Compounds », Organometallics in Environment and Toxicology: Metal Ions in Life Sciences,‎ (PMID 20877814, DOI 10.1039/9781849730822-00403, lire en ligne)
  3. (en) F. C. Whitmore et E. R. Hanson, « o-Chloromercuriphenol », Organic Syntheses, vol. 4,‎ , p. 13 (DOI 10.15227/orgsyn.004.0013, lire en ligne)
  4. (en) Herbert E. Carter et Harold D. West, « dl-Serine », Organic Syntheses, vol. 20,‎ , p. 81 (DOI 10.15227/orgsyn.020.0081, lire en ligne)
  5. (de) K. A. Hofmann et Julius Sand, « Ueber das Verhalten von Mercurisalzen gegen Olefine », Berichte der deutschen chemischen Gesellschaft, vol. 33, no 1,‎ , p. 1340-1353 (DOI 10.1002/cber.190003301231, lire en ligne)
  6. (en) W. A. Herrmann, Synthetic Methods of Organometallic and Inorganic Chemistry Volume 5, Copper, Silver, Gold, Zinc, Cadmium, and Mercury, 1996. (ISBN 3-13-103061-5)
  7. (en) H. O. Calvery, « Diphenylmercury », Organic Syntheses, vol. 9,‎ , p. 54 (DOI 10.15227/orgsyn.009.0054, lire en ligne)
  8. (en) A. N. Nesmajanow, « ÎČ-Naphtylmercuric Chloride », Organic Syntheses, vol. 12,‎ , p. 54 (DOI 10.15227/orgsyn.012.0054, lire en ligne)
  9. (en) Ted J. Logan, « Phenyl(trichloromethyl)mercury », Organic Syntheses, vol. 46,‎ , p. 98 (DOI 10.15227/orgsyn.046.0098, lire en ligne)
  10. (en) Pavel KočovskĂœ, « Reactivity control in palladium-catalyzed reactions: a personal account », Journal of Organometallic Chemistry, vol. 687, no 2,‎ , p. 256-268 (DOI 10.1016/j.jorganchem.2003.07.008, lire en ligne)
  11. (en) Jonathan Clayden, Nick Greeves et Stuart Warren, Organic Chemistry, Oxford University Press, mars 2012, p. 658. (ISBN 978-0-19-927029-3)
  12. (en) Masao Ono et Masaya Kawakami, « Separation of Newly-Synthesized RNA by Organomercurial Agarose Affinity Chromatography », The Journal of Biochemistry, vol. 81, no 5,‎ , p. 1247-1252 (PMID 19428, DOI 10.1093/oxfordjournals.jbchem.a131576, lire en ligne)


C-H He
C-Li C-Be C-B C-C C-N C-O C-F Ne
C-Na C-Mg C-Al C-Si C-P C-S C-Cl C-Ar
C-K C-Ca C-Sc C-Ti C-V C-Cr C-Mn C-Fe C-Co C-Ni C-Cu C-Zn C-Ga C-Ge C-As C-Se C-Br C-Kr
C-Rb C-Sr C-Y C-Zr C-Nb C-Mo C-Tc C-Ru C-Rh C-Pd C-Ag C-Cd C-In C-Sn C-Sb C-Te C-I C-Xe
C-Cs C-Ba * C-Lu C-Hf C-Ta C-W C-Re C-Os C-Ir C-Pt C-Au C-Hg C-Tl C-Pb C-Bi C-Po C-At Rn
Fr C-Ra *
*
Lr Rf Db C-Sg Bh Hs Mt Ds Rg Cn Nh Fl Mc Lv Ts Og
↓
* C-La C-Ce C-Pr C-Nd C-Pm C-Sm C-Eu C-Gd C-Tb C-Dy C-Ho C-Er C-Tm C-Yb
*
*
Ac C-Th C-Pa C-U C-Np C-Pu C-Am C-Cm C-Bk C-Cf C-Es Fm Md No
Liaisons chimiques au carbone
Liaison de base en chimie organique Nombreuses utilisations en chimie
Recherche académique, peu d'usages courants Liaison inconnue / non évaluée
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