AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

Organozincique

Un organozincique est un composĂ© organomĂ©tallique contenant une liaison carbone–zinc[1]. Ce sont des composĂ©s rĂ©actifs qui sont sensibles Ă  l'air et Ă  l'eau. Ils interviennent dans diverses rĂ©actions chimiques importantes telles que la rĂ©action de RĂ©formatski et le couplage de Negishi.

Liaison C–Zn.
Diéthylzinc, premier organozincique synthétisé.

Les organozinciques ont Ă©tĂ© parmi les premiers composĂ©s organomĂ©talliques connus avec une liaison σ entre un atome de carbone et un atome mĂ©tallique. Ils sont moins rĂ©actifs que les organomĂ©talliques analogues, comme les organomagnĂ©siens et les rĂ©actifs de Grignard. Le diĂ©thylzinc Zn(CH2CH3)2 fut le premier organozincique synthĂ©tisĂ©, en 1848 par le chimiste britannique Edward Frankland, en chauffant de l'iodoĂ©thane CH3CH2I en prĂ©sence de zinc Ă©lĂ©mentaire[2] : la rĂ©action produisit un liquide incolore volatil qui s'enflamma spontanĂ©ment au contact de l'air ; auparavant, on ne connaissait que des complexes organiques de l'arsenic et du sel de Zeise ayant des ligands organiques sur un atome mĂ©tallique.

En raison de leur nature pyrophorique, les organozinciques sont gĂ©nĂ©ralement prĂ©parĂ©s Ă  l'abri de l'air. Ils sont instables dans les solvants protiques. Ils sont la plupart du temps prĂ©parĂ©s in situ pour ĂȘtre immĂ©diatement utilisĂ©s sans ĂȘtre isolĂ©s spĂ©cifiquement, mais certains ont Ă©tĂ© isolĂ©s comme substances pures et ont Ă©tĂ© caractĂ©risĂ©s en dĂ©tail[3].

Parmi les organozinciques, on peut distinguer les catĂ©gories suivantes en fonction du nombre de liaisons Zn–C[4] :

  • les diorganozinciques R2Zn, dans lesquels deux ligands alkyle sont liĂ©s Ă  l'atome de zinc ;
  • les hĂ©tĂ©roleptiques, dans lesquels un ligand Ă©lectronĂ©gatif ou monoanionique, par exemple un halogĂ©nure X, est liĂ© Ă  l'atome de zinc, lui-mĂȘme liĂ© Ă  un ligand alkyle ou aryle ;
  • les organozinciques ioniques, qui comprennent les organozincates RnZn− et les cations organozinciques RZnLn+, oĂč L est un ligand.

Liaisons

Dans ses complexes, le zinc(II) adopte plusieurs gĂ©omĂ©tries, gĂ©nĂ©ralement octaĂ©drique, tĂ©traĂ©drique, ainsi que plusieurs gĂ©omĂ©tries pentacoordonnĂ©es. Cette flexibilitĂ© structurale peut ĂȘtre attribuĂ©e Ă  la configuration Ă©lectronique du zinc, qui peut s'Ă©crire [Ar] 3d10 4s2. L'orbitale 3d est complĂšte, de sorte qu'il n'y a pas d'effet de champ de ligand. La gĂ©omĂ©trie de coordination est par consĂ©quent largement dĂ©terminĂ©e par des interactions Ă©lectrostatiques et stĂ©riques[4]. Les organozinciques sont gĂ©nĂ©ralement bi- ou tricoordonnĂ©s, ce qui reflĂšte le fait que les carbanions sont fortement donneurs d'Ă©lectrons.

Les complexes diorganozinciques sont typiquement de la forme R2Zn. Les composĂ©s de type dialkylzinc sont monomĂ©riques avec une coordination linĂ©aire sur l'atome de zinc[5]. La liaison covalente entre les atomes de carbone et de zinc est polarisĂ©e vers l'atome de carbone en raison de la diffĂ©rence d'Ă©lectronĂ©gativitĂ© entre les deux (2,55 pour le carbone contre 1,65 pour le zinc sur l'Ă©chelle de Pauling). Le moment dipolaire des rĂ©actifs diorganozinciques symĂ©triques peut ĂȘtre considĂ©rĂ© comme nul dans ces complexes linĂ©aires, ce qui explique leur solubilitĂ© dans les solvants apolaires comme le cyclohexane. Contrairement Ă  d'autres alkyles binaires mĂ©talliques, les espĂšces diorganozinciques ont une faible affinitĂ© pour la complexation avec les solvants de type Ă©ther. Les liaisons dans les composĂ©s R2Zn sont dĂ©crites comme mettant en Ɠuvre des hybridations sp sur l'atome de zinc[4].

L'atome de zinc a par conséquent deux orbitales d liantes et trois orbitales d non liantes disponibles pour établir des liaisons. En l'absence de ligands donneurs d'électrons, l'atome de zinc ne peut compléter ses orbitales, de sorte qu'il se lie à un nombre relativement restreint de groupes alkyle et aryle. La liaison d'un halogÚne à l'atome de zinc accentue le caractÚre donneur et accepteur de ces orbitales, ce qui permet la formation de clusters, par exemple en faisant intervenir des ligands pontants[4].

SynthĂšse

Il existe plusieurs méthodes pour obtenir des organozinciques. Les composés de type diorganozinc disponibles dans le commerce sont le diméthylzinc Zn(CH3)2, le diéthylzinc Zn(CH2CH3)2 et le diphénylzinc Zn(C6H5)2. Ce sont des réactifs chers et difficiles à manipuler. Il est également possible de produire ses organozinciques in situ à partir de précurseurs organobromés qui sont meilleur marché[6] :

Dans l'exemple ci-dessus, le bromobenzÚne C6H5Br est converti en phényllithium C6H5Li par réaction avec quatre équivalents de n-butyllithium CH3CH2CH2CH2Li. Une transmétallation avec le chlorure de zinc ZnCl2 donne ensuite le diphénylzinc Zn(C6H5)2.

À partir de zinc Ă©lĂ©mentaire

La mĂ©thode de synthĂšse du diĂ©thylzinc Zn(CH2CH3)2 par Edward Frankland mettait en Ɠuvre de l'iodoĂ©thane CH3CH2I avec du zinc. Ce dernier doit ĂȘtre activĂ© pour faciliter la rĂ©action d'oxydorĂ©duction. L'une des formes activĂ©es du zinc utilisĂ©es par Frankland Ă©tait le couple zinc-cuivre[2] :

2 CH3CH2I + 2 Zn0 ⟶ Zn(CH2CH3)2 + ZnI2.

Le zinc peut Ă©galement ĂȘtre activĂ© sous forme de mĂ©tal de Rieke par rĂ©duction du chlorure de zinc ZnCl2 avec du potassium. Cette forme s'est rĂ©vĂ©lĂ©e utile pour des rĂ©actions telles que le couplage de Negishi et le couplage de Fukuyama. La formations de rĂ©actifs organozinciques est facilitĂ©e lorsque les halogĂ©noalcanes ou les halogĂ©nures d'aryle portent des substituants attirant les Ă©lectrons, comme les nitriles et les esters[7] - [8].

Echange de groupes fonctionnels

Les deux interconversions les plus courantes de groupes fonctionnels du zinc sont avec les halogĂ©nures et le bore, qui sont catalysĂ©es avec de l'iodure de cuivre(I) CuI et des bases. L'intermĂ©diaire borĂ© est produit par une hydroboration suivie par un traitement au diĂ©thylzinc. Cette synthĂšse met en Ă©vidence l'intĂ©rĂȘt des organozinciques en soulignant leur sĂ©lectivitĂ© pour le site le plus rĂ©actif de la molĂ©cule tout en formant des agents de couplage utiles[9].

Cette rĂ©action de transfert de groupes fonctionnels peut ĂȘtre utilisĂ©e pour des allylations, ou d'autres rĂ©actions de couplage, comme celui de Negishi[10].

  • (en) Exemples de transferts de groupes fonctionnels.
    (en) Exemples de transferts de groupes fonctionnels.

Notes et références

  1. (en) Paul Knochel, Nicolas Millot, Alain L. Rodriguez et Charles E. Tucker, « Preparation and Applications of Functionalized Organozinc Compounds », Organic Reactions,‎ (DOI 10.1002/0471264180.or058.02, lire en ligne)
  2. (de) Edward von Frankland, « Ueber die Isolirung der organischen Radicale », Justus Liebigs Annalen der Chemie, vol. 71, no 2,‎ , p. 171-213 (DOI 10.1002/jlac.18490710205, lire en ligne)
  3. (en) Christoph Elschenbroich, Organometallics, 3e Ă©d., Wiley-VCH, Weinheim, 2006. (ISBN 978-3-527-29390-2)
  4. (en) The Chemistry of Organozinc Compounds, John Wiley & Sons, 2006. (ISBN 978-0-470-09337-5)
  5. (en) John Bacsa, Felix Hanke, Sarah Hindley, Rajesh Odedra, George R. Darling, Anthony C. Jones et Alexander Steiner, « The Solid‐State Structures of Dimethylzinc and Diethylzinc », Angewandte Chemie International Edition, vol. 50, no 49,‎ , p. 11685-11687 (PMID 21919175, PMCID 3326375, DOI 10.1002/anie.201105099, lire en ligne)
  6. (en) Jeung Gon Kim et Patrick J. Walsh, « From Aryl Bromides to Enantioenriched Benzylic Alcohols in a Single Flask: Catalytic Asymmetric Arylation of Aldehydes », Angewandte Chemie International Edition, vol. 45, no 25,‎ , p. 4175-4178 (PMID 16721894, DOI 10.1002/anie.200600741, lire en ligne)
  7. (en) Reuben D. Rieke, « Preparation of Organometallic Compounds from Highly Reactive Metal Powders », Science, vol. 246, no 4935,‎ , p. 1260-1264 (PMID 17832221, DOI 10.1126/science.246.4935.1260, Bibcode 1989Sci...246.1260R, lire en ligne)
  8. (en) Ei-ichi Negishi, « A genealogy of Pd-catalyzed cross-coupling », Journal of Organometallic Chemistry, vol. 653, nos 1-2,‎ , p. 34-40 (DOI 10.1016/S0022-328X(02)01273-1, lire en ligne)
  9. (en) Falk Langer, Lothar Schwink, Arokiasamy Devasagayaraj, Pierre-Yves Chavant et Paul Knochel, « Preparation of Functionalized Dialkylzincs via a Boron−Zinc Exchange. Reactivity and Catalytic Asymmetric Addition to Aldehydes », The Journal of Organic Chemistry, vol. 61, no 23,‎ , p. 8229-8243 (PMID 11667810, DOI 10.1021/jo961129n, lire en ligne)
  10. (en) Hiroshi Naka, Keisuke Ito, Masahiro Ueno, Koji Kobayashia et Yoshinori Kondo, « Generation of arylzinc reagents through an iodine–zinc exchange reaction promoted by a non-metallic organic superbase », New Journal of Chemistry, vol. 34, no 8,‎ , p. 1700-1706 (DOI 10.1039/C0NJ00202J, lire en ligne)

Liens externes


C-H He
C-Li C-Be C-B C-C C-N C-O C-F Ne
C-Na C-Mg C-Al C-Si C-P C-S C-Cl C-Ar
C-K C-Ca C-Sc C-Ti C-V C-Cr C-Mn C-Fe C-Co C-Ni C-Cu C-Zn C-Ga C-Ge C-As C-Se C-Br C-Kr
C-Rb C-Sr C-Y C-Zr C-Nb C-Mo C-Tc C-Ru C-Rh C-Pd C-Ag C-Cd C-In C-Sn C-Sb C-Te C-I C-Xe
C-Cs C-Ba * C-Lu C-Hf C-Ta C-W C-Re C-Os C-Ir C-Pt C-Au C-Hg C-Tl C-Pb C-Bi C-Po C-At Rn
Fr C-Ra *
*
Lr Rf Db C-Sg Bh Hs Mt Ds Rg Cn Nh Fl Mc Lv Ts Og
↓
* C-La C-Ce C-Pr C-Nd C-Pm C-Sm C-Eu C-Gd C-Tb C-Dy C-Ho C-Er C-Tm C-Yb
*
*
Ac C-Th C-Pa C-U C-Np C-Pu C-Am C-Cm C-Bk C-Cf C-Es Fm Md No
Liaisons chimiques au carbone
Liaison de base en chimie organique Nombreuses utilisations en chimie
Recherche académique, peu d'usages courants Liaison inconnue / non évaluée
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.