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Histoire d'El-Harrach

El-Harrach (anciennement Maison-Carrée) est une localité d'Alger en Algérie. Simple lieu-dit sur la route de la capitale algérienne au milieu du XIXe siÚcle, un petit village de colonisation française s'y crée spontanément dans les années 1840, jusqu'à devenir 12e ville d'Algérie au début des années 1950. La localité fut ensuite absorbée par l'agglomération algéroise à laquelle Maison-Carrée est rattachée administrativement en 1959 en tant que 11e arrondissement. Le territoire historique d'El-Harrach est aujourd'hui partagé entre plusieurs communes et arrondissements de la wilaya d'Alger, ses faubourgs constituant certains des quartiers les plus populaires et populeux de la ville.

Histoire d'El-Harrach

PĂ©riodes anciennes

La plus ancienne trace d'une présence humaine aux alentours de la localité d'El-Harrach a été consignée par un scientifique français dans le quartier de Belle-Vue, au début des années 1930. Il s'agit d'un instrument préhistorique découvert prÚs de l'embouchure de Oued El Harrach, se présentant sous la forme d'une petite hache en pierre polie et dont la datation remonterait au Néolithique[1].

Sinon, l'archĂ©ologie n'a jamais mis au jour de vestiges sur le site d'El-Harrach ou dans ses alentours immĂ©diats, et rien ne peut donc indiquer une origine antique pour la ville elle-mĂȘme. Certes, dans sa Description gĂ©nĂ©rale de l’Afrique, le chroniqueur espagnol Luis del Marmol Carvajal (1520-1600) affirme que « La ville de Sasa (?), que PtolĂ©mĂ©e appelle Tipaso [Tipaza], est dĂ©truite et ses Ă©difices se voient au levant d’Alger, sur les bords de la MĂ©diterranĂ©e sarde, Ă  l’O. de la citĂ© de MĂ©tafuz [Matifo]. Cette ville a Ă©tĂ© de plus de 3 000 habitants. Son emplacement Ă©tait joint Ă  la riviĂšre qu’on appelle Huet el-Harrax [Oued El-Harrach] ; quelques-uns prĂ©tendent qu’elle a Ă©tĂ© Ă©difiĂ©e avant Alger par les anciens africains. Elle fut dĂ©truite ensuite par le peuple de Mozgane [Beni Mazghanna] qui sont des gens plutĂŽt basanĂ©s que blancs, ayant leur principale population en Libye d’oĂč ils sont devenus puissants dans cette province d'Alger et en furent les maĂźtres avant que les Romains entrassent en Afrique. Ce sont des BerbĂšres africains parlant une langue qu’ils appellent Mozgana ou Mozabia qui est au contraire et diffĂ©rente de celle que parlent les autres africains. Finalement cette citĂ© dĂ©truite et les Ă©crivains disent qu’elle est plus ancienne qu’Alger et quelques-uns l’appellent le Vieil-Alger »[2], et certains auteurs postĂ©rieurs ont repris l'information telle qu'elle[3]. Mais, il s'agit manifestement d'une erreur car, dĂšs 1875, le Français Albert Devoulx fait remarquer que Marmol ne faisait que reprendre une fausse information du gĂ©ographe maghrĂ©bin Hassan b. Mohammad al-WazzĂąn (dit LĂ©on l'Africain, v. 1494 - v. 1554) qui, dit-il, « prenant Alger pour Caesarea [Cherchell], attribue la dĂ©nomination de Sasa, qu’il prend on ne sait oĂč, aux ruines de Tipaza, changĂ©e par lui en Tipaso »[4]. NĂ©anmoins, si le texte de Marmol sur une prĂ©tendue origine antique du site et de la vile, il nous permet de constater que le nom de Oued El-Harrach Ă©tait dĂ©jĂ  en usage au XVe siĂšcle. Il s'agit de la plus ancienne mention du nom car, un siĂšcle plus tĂŽt, LĂ©on l'Africain ne le cite pas dans son ouvrage sur la description du Maghreb, bien que certains ont cru l'identifier dans le passag oĂč il indique qu'Ă  l'E. d'Alger « se voient des moulins sur un petit fleuve, qui sert Ă  toutes les commoditĂ©s de la citĂ©, tant Ă  boire qu'Ă  autre chose »[5], alors qu'il s'agit lĂ , plus probablement, du Oued Kheniss (act. Oued Kniss) qui coule Ă  une distance plus proche des murs d'Alger et qui est donc plus susceptible de servir de source d'eau pour les usages courant de ses habitants.

PĂ©riode ottomane

AprÚs l'installation des frÚres Barberousse à Alger dans les années 1514-1516, et la création de la Régence ottomane en 1519, Alger se transforme subitement en acteur majeur dans l'Histoire du Maghreb et de la Méditerranée, et c'est aussi à partir de ce moment que le site de la future ville de Maison-Carrée/El-Harrach commence à faire son apparition dans les sources historiques, essentiellement au rythme des expéditions chrétiennes, qui vont mener de maniÚre assez réguliÚre des flottes et des armées européennes devant les murs et les bastions qui entouraient la capitale algérienne, faisant alors apparaitre la position d'El-Harrach comme un des principaux points stratégique de la région algéroise.

XVIe siĂšcle

1541

Portrait (v.1547) Ă©questre de Charles V, dit Charles Quint, empereur du Saint-Empire et roi d'Espagne.

– L'empereur Charles Quint dĂ©cide de prendre personnellement la tĂȘte d'une grande expĂ©dition en vue de soumettre la ville d'Alger dont la puissance n'avait cessĂ© de croitre et qui constituait dĂ©sormais une sĂ©rieuse menace pour ses domaines et son commerce en MĂ©diterranĂ©e. Toutefois, si les effectifs Ă©taient beaucoup plus importants que pour la prĂ©cĂ©dente expĂ©dition espagnole [6], c'est pratiquement un scĂ©nario identique qui allait se rĂ©pĂ©ter : le dĂ©barquement (environ 26 000 hommes) se fera encore une fois prĂšs l’embouchure de l'oued El-Harrach, sur sa rive gauche et, trois jours plus tard, l'empereur et sa garde Ă©tablissaient de nouveau leur camp sur les hauteurs de Koudiet Essaboune. Alger, dĂ©fendue Ă  ce moment par le beylerbey Hassan Agha (1535 Ă  1543), se retrouva encerclĂ©e et se voyait pratiquement perdue vu la taille du corps expĂ©ditionnaire. Mais, comme par miracle, une nouvelle grosse tempĂȘte Ă©clate dans la nuit du 25 octobre[7] et emporte quelque 150 navires de la flotte impĂ©riale. Au petit matin du 26 octobre, les dĂ©fenseurs profitent de l’épais brouillard et de la pluie battante pour surprendre une partie de l’armĂ©e espagnole qu'ils parviennent Ă  bousculer alors que, pendant ce temps, l'amiral gĂ©nois AndrĂ©a Doria avait retirĂ© ce qui restait de sa flotte Ă  l’abri derriĂšre le cap Matifou, de l'autre cĂŽtĂ© de la baie et, craignant d'ĂȘtre lui-mĂȘme coupĂ© de la mer et capturĂ© par les AlgĂ©riens, Charles-Quint ordonne une retraite gĂ©nĂ©rale pour rejoindre ce qui restait de la flotte Ă  Matifou.

Les conditions mĂ©tĂ©orologiques difficiles rendaient le mouvement des troupes trĂšs difficiles et les impĂ©riaux furent ainsi poursuivis et harcelĂ©s par les unitĂ©s algĂ©roises et par la cavalerie des tribus makhzen alliĂ©es tout au long du trajet. Les rives de l'oued El-Harrach sont atteintes le alors que cours d'eau Ă©tait en crue. Mais, le danger imminent obligea les Espagnols Ă  traverser Ă  guĂ© (le franchissement a dĂ» avoir lieu soit sur la plage au niveau de l'embouchure soit plus en amont, lĂ  oĂč se situe le pont de nos jours). On raconte que l'Empereur lui-mĂȘme dut traverser entre deux lignes de mousquetaires avec l'eau qui lui arrivait aux aisselles. En tout, les assaillants auraient laissĂ© plus de 2 000 morts et disparus rien que sur la route entre Tafourah et le lieu-dit Oued El-Harrach et, le 1er novembre, ce sont seulement 11 000 soldats qui vont quitter Alger vivants, laissant Ă  la ville une rĂ©putation d'invincibilitĂ© et une lĂ©gende qu'elle entretiendra pour les trois siĂšcles qui vont suivre.

Les chefs de la RĂ©gence tirĂšrent certaines leçons de ces deux expĂ©ditions, et prirent soin de fortifier immĂ©diatement la colline de Koudiet Essaboune en y Ă©rigeant une importante forteresse (act. Fort l'Empereur, juste Ă  cĂŽtĂ© de l'HĂŽtel El Aurassi). Par contre, rien ne permet d'affirmer que des dispositions particuliĂšres furent prises dĂšs cette Ă©poque du cĂŽtĂ© d'El-Harrach, et le fait que l'armĂ©e espagnole eut traversĂ© Ă  guĂ© laisse croire qu'il n'existait pas encore de pont permanent Ă  cet endroit. On pourrait donc supposer que le site d'El-Harrach devait ĂȘtre encore totalement vierge au milieu du XVIe siĂšcle

1581

  • SĂ©journant plusieurs fois Ă  Alger entre 1578 et 1581, le moine espagnol Diego de Haedo dĂ©crit la ville et ses alentours en citant notamment « l'immense et fertile Motija (Mitidja) qui est coupĂ©e dans sa partie mĂ©diane par une grande riviĂšre prenant naissance dans les montagnes Ă©loignĂ©es vers le Sud. Sur cette riviĂšre, il existe un grand nombre de moulins dont la ville d'Alger fait usage sur ses moutures pendant toute l'annĂ©e »[8]. LĂ , la position de la riviĂšre au milieu de la Mitidja, sa longueur notable et l'Ă©loignement de ses sources vers le Sud ne laisse aucun doute sur son identification avec Oued El-Harrach. On note aussi que, comme avec LĂ©on l'Africain au siĂšcle prĂ©cĂ©dent, l'existence de nombreux moulins Ă  eau sur les rives des oueds de l'AlgĂ©rois.

XVIIe siĂšcle : un point de passage

1697

Le dey d'Alger, Hadj-Ahmed Pacha b. Hadj-Mosly (1695 à 1699), fait bùtir un pont de pierre (qanatra) sur l'emplacement de l'actuel « Pont Blanc » d'El-Harrach.

Emporté par les eaux ou fortement endommagé quelque temps plus tard, cet ouvrage est la toute premiÚre construction humaine attestée par des sources historiques sur le site de la future ville d'El-Harrach.

XVIIIe siĂšcle : une position militaire

1710

Le bey Mustapha Bouchelaghem, gouverneur de l'Ouest et jusque-lĂ  favori du dey Baba-Ali Chaouche Pacha (1710 Ă  1718), se rĂ©volte et tente un coup de force contre Alger. Ses troupes seront toutefois Ă©crasĂ©es sur les rives de l'oued El-Harrach oĂč il fut lui-mĂȘme capturĂ© et dĂ©capitĂ©. L'endroit exact de l'affrontement n'est pas connu, mais s'il eut lieu sur la route d'Alger il est trĂšs probable que ce soit sur le site actuel de la ville d'El-Harrach, ce qui expliquerait par ailleurs la fortification du lieu quelques annĂ©es plus tard.

1721

Sur ordre du dey Mohamed b. Hassan Pacha (1718 Ă  1723), un fortin est bĂąti sur la colline (appelĂ©e alors DrĂąa’ El-Harrach) surplombant oued El-Harrach Ă  l’endroit oĂč il Ă©tait traversĂ© par le pont de pierre[9]. SurnommĂ© Bordj el-Qanatra, l'ouvrage Ă©tait conçu, en premier lieu, pour la surveillance de l’accĂšs au pont et donc Ă  la route d’Alger (TrĂźq el-SoltĂąn), mais il servira aussi de dĂ©pĂŽt d’armes et de munitions pour un dĂ©tachement de cavalerie mis sous le commandement de l’Agha des Arabes (Ă©quivalent du ministre de l’intĂ©rieur dans le rĂ©gime de la RĂ©gence d’Alger), d’oĂč l'autre nom qu'on lui donnera plus tard : Bordj l’Agha.

Gravure (XIXe siÚcle) illustrant la vue de Bordj l'Agha, dit la "Maison carrée", par un officier français aux alentours de 1832.

1725

1er octobre - Dans une lettre datĂ©e de ce jour, le mĂ©decin et naturaliste français Jean-AndrĂ© Peyssonnel qui Ă©tait de passage dans la RĂ©gence d'Alger, signale l'existence du Bordj d'El-Harrach et donne quelques informations sur sa consistance et sur sa place dans le systĂšme de dĂ©fense de la baie d'Alger Ă  cette Ă©poque : « La rade est dĂ©fendue par plusieurs forts. On trouve du cĂŽtĂ© de l’E., Ă  quatre lieues de distance de la ville, un fort de vingt piĂšces de canon, bĂąti sur le point du Cap Matifou, qui dĂ©fend le mouillage qu’il y a de ce cĂŽtĂ©-lĂ . Au fond de la rade, prĂšs de la riviĂšre de l’Arache, il y en a un autre Ă  peu prĂšs de mĂȘme force ; on en trouve un troisiĂšme Ă  un quart de lieue de la ville, et un quatriĂšme prĂšs de la porte de Bab-Azzoun, au Sud de la ville »[10].

1736

  • Le dey Ibrahim b. Ramdane Pacha (1731 Ă  1745) ordonne d'importants travaux de reconstruction sur le pont d’El-Harrach. Le fait est commĂ©morĂ© par une inscription en langue arabe placĂ©e sur le parapet du pont et qui demeura en place jusqu'aux premiĂšres dĂ©cennies du XXe siĂšcle avant d'ĂȘtre remise au musĂ©e des AntiquitĂ©s d'Alger oĂč elle se trouve encore de nos jours.

1775

Plan des opérations pour la prise d'Alger lors de l'expédition espagnole de 1775

juin-juillet - Ayant appris qu'une expĂ©dition espagnole commandĂ©e par le comte Alejandro O'Reilly venait d'ĂȘtre lancĂ©e contre Alger, le dey Mohamed b. Othman (1766 Ă  1791) ordonne Ă  tous les beys de provinces et aux tribus du makhzen de dĂ©pĂȘcher leurs contingents pour dĂ©fendre la capitale. Salah bey de Constantine arrive fin juin et installe son campement devant le pont de l'Harrach. Il y est aussitĂŽt rejoint par des dĂ©tachements algĂ©rois menĂ©s par Hassan Khaznadji. Le 1er juillet, la flotte est en vue d'Alger. Une semaine plus tard on commence Ă  pilonner les batteries cĂŽtiĂšres qui s'Ă©talaient entre l'embouchure de l'oued El-Harrach et celle de l'oued Kheniss (act. oued Kniss) afin de prĂ©parer le dĂ©barquement qui commencera effectivement le . Pendant ce temps, le commandement algĂ©rien s’étant rĂ©uni au campement d’El-Harrach, il fut dĂ©cidĂ© d'attaquer immĂ©diatement avant que l'ennemi n'achĂšve de dĂ©barquer toutes ses forces. Toutefois, lorsque l'assaut algĂ©rien fut lancĂ© plus de 7 500 soldats espagnols et une douzaine canons Ă©taient dĂ©jĂ  Ă  terre. De violents combats eurent donc lieu sur la plage puis, Ă  la fin de la journĂ©e, les pertes espagnoles (191 officiers et 2 428 hommes de troupe entre morts et blessĂ©s selon les sources) furent telles que les chefs de l'expĂ©dition dĂ©cident d'abandonner la partie et de rembarquer les survivants. Les 200 morts algĂ©riens furent enterrĂ©s sur place (ce cimetiĂšre que les locaux appelaient toppanat el-moudjahidine Ă©tait encore visible Ă  l'Ă©poque française), et cette annĂ©e fut longtemps fameuse chez les AlgĂ©rois sous le nom de 'Âam e-Rmell ("AnnĂ©e du Sable" ou "AnnĂ©e de la Plage").

À noter que les sources relatives Ă  l'expĂ©dition de 1775 citent le pont de l'Harrach mais ne font pas mention du Bordj El-Qanatara lui-mĂȘme. Toutefois, le fait que le point de ralliement convenu pour les contingents algĂ©riens ait Ă©tĂ© fixĂ© devant le pont et en contrebas de Koudiet El-Harrach et que la convention des commandants eut lieu lĂ -bas, prĂ©suppose que des provisions et des stocks militaires devaient ĂȘtre disponibles sur place. Il est donc probable que le Bordj signalĂ© dans les annĂ©es 1724-1725 existait toujours Ă  cette date.

XIXe siĂšcle : un domaine de l'Agha

1822

Yahia Agha, homme fort du régime du dey Hussein Pacha (1818 à 1830) à cette date, fait reconstruire le vieux Bordj El-Qantara d'El-Harrach. L'édifice fut agrandi et on y installa des magasins pour munitions et autres approvisionnements militaires. Il devint dÚs lors le lieu de rassemblement de la mhalla annuelle qui se réunissait avant cela au Djenùne El-Agha (act. Marché Clauzel à Alger). Les travaux auraient été achevés en 1824.

Pour cette pĂ©riode tardive, nous disposons d’informations assez prĂ©cises sur le fonctionnement du Bordj d'El-Harrach. Le fort recevait l’Agha accompagnĂ© de sa garde (environ 500 hommes) Ă  la veille de chaque mouvement de troupes vers l’intĂ©rieur du pays (la mhalla, expĂ©ditions contre des tribus insoumises, etc.). En dehors de cela, l’édifice demeurait sous la responsabilitĂ© d’un petit dĂ©tachement de la garde de l’Agha commandĂ© par un officier (chaouche) et abritait, en mĂȘme temps, l’intendant financier de la RĂ©gence (Oukil el-Kharradj). On y entreposait en permanence un lot d’armes Ă  feu et de munitions, des armes blanches, des tentes et quatre ou cinq canons de petit calibre ainsi que 200 Ă  300 chevaux avec leur Ă©quipement[11].

1827

Hadj Ahmed Bey b. Mohamed Cherif (1786-1851)

Début des hostilités entre la Régence d'Alger et le Royaume de France à la suite de l'incident diplomatique dit « affaire du chasse-mouche », la flotte française imposant dÚs lors un sévÚre blocus maritime à la ville d'Alger.

Pendant ce temps, les intrigues de sĂ©rail se poursuivaient Ă  la cour du Dey. Ainsi, on raconte que le riche Hadj-Ahmed bey de Constantine -qui Ă©tait Ă  ce moment en conflit avec Yahia Agha depuis quelque temps- parvint Ă  faire douter le dey Hussein de la loyautĂ© de son ministre, l'accusant notamment d'avoir des visĂ©es sur le pouvoir et qu'il se constituait un parti parmi les chefs des tribus makhzen dont, il est vrai, Yahia Ă©tait fort apprĂ©ciĂ©. On prĂ©tendit aussi que les travaux de fortification qui venaient d'ĂȘtre effectuĂ©s au bordj d'El-Harrach avaient pour seul but d'offrir une citadelle Ă  l'Agha et de lui assurer une base fortifiĂ©e en cas de difficultĂ©s. On ne saura probablement jamais quelles furent les intentions rĂ©elles de Yahia Agha, mais le fait est que le dey Hussein ne fut pas insensible Ă  ces ragots et qu'il disgracia Yahia peu de temps aprĂšs, d'abord en le faisant remplacer au poste par son gendre Ibrahim Agha, avant d'ordonner son exĂ©cution dans sa retraite Ă  Blida quelque temps plus tard.

1830

MalgrĂ© deux annĂ©es de blocus et de pourparlers, la crise avec la France n'a pas Ă©tĂ© rĂ©solue. On savait Ă  Alger qu'une attaque Ă©tait imminente et on s'affaira Ă  renforcer les dĂ©fenses aussi rapidement que possible. En arrĂȘtant ses plans de bataille, le commandement algĂ©rien Ă©tait parti de l'hypothĂšse (devenue Ă©vidence depuis maintenant trois siĂšcles) que l’offensive chrĂ©tienne sera entamĂ©e par un dĂ©barquement de troupes sur les plages qui s'Ă©tendent entre les embouchures des Oued El-Harrach et Oued Kheniss. Sur cette base, et dĂšs le Printemps de cette annĂ©e, le camp principal de l'Agha fut installĂ© Ă  Bordj El-Qantara afin de surveiller la baie tout en s’assurant les voies de ravitaillement et de renfort par le S. et par l’E. Ainsi, le , lorsque la flotte française vint mouiller dans la baie de Sidi-Fredj la surprise sera rĂ©elle chez les algĂ©riens et si l’on se hĂąta alors de transfĂ©rer le camp de l'armĂ©e vers StaouĂ©li ça sera uniquement pour y subir la dramatique dĂ©faite qui va ouvrir la route d'Alger au corps expĂ©ditionnaire français. Trois semaines plus tard, le , la ville tombait et la RĂ©gence aura vĂ©cu.

Pendant ce temps, tout comme Salah Bey cinquante-cinq ans auparavant, Hadj-Ahmed Bey Ă©tait accouru de Constantine avec des renforts et campait avec ses troupes autour de Bordj El-Qantara d’El-Harrach lorsque lui parvint la nouvelle de la capitulation du Dey et de l'entrĂ©e des Français Ă  Alger. Il dĂ©cide alors d'Ă©vacuer les lieux et de rentrer dans sa province et, rapporte une source française : « On raconte que, le jour de son dĂ©part de l’Arach, il [Hadj-Ahmed Bey] Ă©tait dĂ©jĂ  Ă  cheval, lorsque tout Ă  coup, se retournant vers Alger et dressĂ© sur ses Ă©triers, il s’écria : « je vois d’ici Alger pour la derniĂšre fois peut-ĂȘtre ; car, je fais serment de n’y jamais rentrer, tant qu’elle sera soumise aux ChrĂ©tiens ou aux Turcs »[12]. Le propos attribuĂ© ici au bey est trĂšs certainement romancĂ©, mais quoi qu'il en soit, l'Ă©pisode ottoman Ă  Alger s'achĂšve effectivement sur ces faits et commence alors la pĂ©riode coloniale française en AlgĂ©rie.

Période coloniale française

Jusque-lĂ , on a vu que le site -encore inhabitĂ©- d'El-Harrach n'a revĂȘtu qu'une valeur stratĂ©gique et militaire, comme point de passage obligĂ© vers Alger depuis l'Est et le Sud. Cette situation ne va pas vraiment changer au cours des premiĂšres annĂ©es de l'occupation française, et ce n'est qu'un peu moins d'une trentaine d'annĂ©es aprĂšs la prise d'Alger qu'un premier hameau de colonisation va se former sur les lieux.

Depuis le début du XIXe siÚcle au moins, les territoires de la Mitidja qui s'étendent sur la rive droite de oued l'Harrach relevaient de la circonscription tribale (outùn) des Beni Moussa el-Outa (« de la plaine »). Cette tribu recouvrait globalement les régions actuelles de Bougara (anciennement Rovigo), Larba, Meftah (anc. Rivet), Sidi-Moussa et une partie d'El-Harrach (anc. Maison-Carrée), le cours du oued marquant la limite de leur territoire de ce cÎté.

L'Ă©tat du lieu-dit Koudiet El-Harrach au moment oĂč arrivent les Français Ă  Alger est assez bien connu. Hormis le bordj perchĂ© sur la colline de la rive droite, et le pont de pierre traversant l’Harrach Ă  un peu moins de 600 mĂštres en contrebas, il y avait trĂšs peu de constructions dans les alentours. A environ 400 mĂštres au S.-E. du fort, lĂ  oĂč se trouvent de nos jours la mosquĂ©e et le quartier de Sidi Embarek se trouvait la qubba (« marabout ») de ce saint homme dont on ne sait pratiquement rien. Tout autour de cette zone, la campagne Ă©tait gĂ©nĂ©ralement inculte et essentiellement couverte de broussailles. A l'exception de certaines fermes traditionnelles (haouche) Ă©parpillĂ©s, le paysage Ă©tait surtout animĂ© par les troupeaux de chĂšvres et de moutons gardĂ©s par des bergers locaux, alors qu'une bonne partie du vallon oĂč se trouve de nos jours le centre-ville d'El-Harrach constituait une zone de marĂ©cages dont les plus importants recouvraient le point de confluence entre le cours du oued Smar avec celui de oued l'Harrach, prĂšs de la zone oĂč se situent de nos jours la rue SaĂŻd Mokrani sur la rive Nord et les dĂ©pĂŽts de Naftal sur la rive Sud. C'est aussi un peu plus au S.-O. de cette rĂ©gion, que se trouvait une autre qubba, prĂšs ou dans ce qui Ă©tait appelĂ© alors Haouche Ouali Dadda (Ă  2 700 m au S.-E. du Bordj, en face de ce qui est de nos jours la Prise-d'Eau d'El-Harrach) mais qui fut tĂŽt dĂ©molie et dont il ne reste aucune trace. Enfin, le point le plus Ă©loignĂ© au Sud, celui qui marquait un peu les confins de ce territoire avec les vastes Ă©tendues de la Mitidja, Ă©tait la qubba de Sidi RzĂźn, autre marabout local dont on ignore l'histoire, lĂ  oĂč se trouve encore de nos jours le cimetiĂšre Ă©ponyme, Ă  plus de 4 km du fort et un peu au-delĂ  du quartier des Trois-Caves et de l'HĂŽpital Salim-Zmirli.

En somme, la principale infrastructure -si on peut appeler cela comme ça- Ă©tait la route d’Alger elle-mĂȘme (qu'on appelait TrĂźq El-SoltĂąn ou « Route du Roi ») qui passait par cette zone et qui donnait toute son importance au site. À cette date, en sortant d'Alger par Bab-Azzoun, on se dirigeait vers Hamma et on poursuivait vers l'Est sur le chemin qui suivait les tracĂ©s actuels des rues de Tripoli Ă  Hussein Dey et Hassan-Bey (anc. rue d’Alger) Ă  El-arrach pour dĂ©boucher sur le pont de l'Harrch sur sa rive gauche. De lĂ , on traversait la plaine par l'actuel centre-ville d’El-Harrach (rue qui longe le siĂšge de l'APC), oĂč il y avait apparemment une fontaine d'eau potable aujourd’hui disparue. De lĂ , la route poursuivait progressivement en pente avant de monter en zigzags vers le bordj en suivant le mĂȘme chemin (act. avenue Ghiboub Boualem) qui passe de nos jours par le lycĂ©e Ourida Meddad. Une fois passĂ©e devant la caserne de l'Agha au sommet du plateau, la route se traçait tout droit en suivant l'actuelle rue des FrĂšres Ouddak avant de rejoindre les champs d'El-Alia (de nos jours grand cimetiĂšre) et de continuer ainsi vers l'Est. Telle Ă©tait, en somme, la topographie du lieu-dit El-Harrach en 1830.

1830-1836 : un poste frontiĂšre

1830

Général Bertrand Clauzel (1772-1842)

(AoĂ»t) - Le fort dit de Bordj El-Harrach, demeurĂ© dĂ©sert depuis le retrait de Hadj-Ahmed Bey et de ses troupes vers Constantine, ainsi que le pont de pierre sur l'Harrach sont investis par des troupes françaises. En dĂ©couvrant les lieux, les soldats nomment tout simplement « la maison carrĂ©e » ce grand Ă©difice quadrangulaire puis, assez rapidement, ce nom deviendra commun chez les Français pour dĂ©signer l'endroit lui-mĂȘme et ses alentours, tandis que la vieille qantarat el-Harrach deviendra simplement « Pont de l'Harrach ».

À environ 12 km des murs d'Alger (dont la limite se situait alors Ă  Bab-Azoun) cette position de la Maison CarrĂ©e constituait le point avancĂ© pour les français, et tout ce qui se situait au-delĂ  Ă©tait un territoire hostile. Cependant, si le fort en lui-mĂȘme fut occupĂ© sans rĂ©sistance, l'installation des Français sur les lieux va s'avĂ©rer beaucoup plus compliquĂ©e, car les marĂ©cages qui baignaient Ă  l'Ă©poque toute la partie basse du vallon rendaient l’air trĂšs insalubre pour les EuropĂ©ens et, dĂšs les premiĂšres semaines d'aoĂ»t, le taux de maladie et de mortalitĂ© parmi les troupes Ă©tait tel que le commandement français ordonna l'Ă©vacuation de la garnison permanente de la Maison-CarrĂ©e, et instaura Ă  la place une rotation de cinq jours aux divers rĂ©giments stationnĂ©s Ă  Alger afin de limiter l'exposition des hommes aux maladies.

() - La rĂ©gion de l'Harrach et de la Maison CarrĂ©e intĂ©resse subitement le gĂ©nĂ©ral Bertrand Clauzel, commandant en chef de l'armĂ©e d'Afrique, et grand partisan de la colonisation de l'AlgĂ©rie. Il acquiert en ce jour le Haouch Ouali Dadda (le nom sera orthographiĂ© le plus souvent « Oulid Adda » par la suite) - qui Ă©tait un bien waqf au marabout Ouali Dadda Ă  Alger - contre une rente annuelle de 100 boudjous algĂ©riens (180 francs d’époque, versĂ©s Ă  un certain Sidi Hadj Hamidou RaĂŻs, cheikh de la confrĂ©rie concernĂ©e) ainsi que le Bordj de la Maison CarrĂ©e lui-mĂȘme. Pour ce qui est du fort, la transaction consista en une reprise par le gĂ©nĂ©ral de la rente de 60 francs que payait jadis Yahia Agha Ă  la mĂȘme confrĂ©rie pour le terrain tandis que les hĂ©ritiers de l'Agha recevaient, en Ă©change de leur renoncement Ă  la propriĂ©tĂ© du bĂątiment, une ancienne boutique du beylik Ă  Alger que Clauzel aurait payĂ© 1 200 francs de sa poche. ArrivĂ© sur les lieux le lendemain de l'acquisition, Clauzel constate que les bĂątiments avaient Ă©tĂ© pillĂ©s par les locaux (boiserie enlevĂ©e, terrasse dĂ©foncĂ©e, etc.) et estima les dĂ©gĂąts Ă  quelque 4 000 francs d’époque. Il dĂ©cide alors de fortifier la bĂątisse et d’y Ă©tablir un poste militaire avec 500 hommes et 60 chevaux en stationnement permanent, sauf entre juin et septembre oĂč l'on craignait trop pour la santĂ© des soldats[13]. Clauzel sera rappelĂ© de ses fonctions Ă  Alger un mois plus tard () et la position militaire sera maintenue dans la Maison-CarrĂ©e, mais s'il sera honorĂ© du titre de marĂ©chal (), ces deux acquisitions harrachies seront pour lui la source de tracas avec l'administration française comme nous le verrons plus loin.

1831

Général Pierre BerthezÚne (1775-1847)

() - El-Hadj Mohamed b. Zamoun, chef des Flissa de Kabylie, se rĂ©unit avec un chĂ©rif algĂ©rois nommĂ© El-Hadj Ali b. Sidi SĂąadi au lieu-dit Sidi Arzin (lĂ  oĂč se trouve de nous jours le cimetiĂšre de Sidi-Rzine Ă  la sortie Sud d'El-Harrach en allant vers Baraki) sur la rive droite de l'oued El-Harrach dans le but de coordonner une nouvelle action contre les forces françaises. Le chef kabyle, qui Ă©tait Ă  la tĂȘte de 4 000 hommes, avait Ă©tabli son camp Ă  cet endroit depuis quelques jours et y attendait l'arrivĂ©e d'autres contingents de l’Est, tout en recevant des munitions et des vivres de Blida. Pendant ce temps, divers dĂ©tachements sortaient chaque jour du campement pour aller piller les possessions coloniales des alentours, attaquant Ă  quelques reprises le fort de la Maison-CarrĂ©e et, capturant un officier du gĂ©nie (un certain Gautier en ce jour puis, le , menant une grande violente attaque contre la Ferme-ModĂšle (act. Baba-Ali) en amont de l'oued El-Harrach. Les Français n'Ă©taient pas ignorants de ces projets et, dĂšs le , le gĂ©nĂ©ral Pierre BerthezĂšne -commandant en chef des troupes françaises en AlgĂ©rie Ă  cette Ă©poque- fit mouvement, depuis Alger, Ă  la tĂȘte d’une division de 3 000 hommes et parvient Ă  disperser le camp de Sidi Arzin. La rĂ©volte est ainsi Ă©touffĂ©e dans l'Ɠuf, mais Ben Zamoun et les siens rentrent dans leurs villages en emmenant El-Hadj Ali qui continuera ainsi Ă  exhorter les populations de Kabylie contre l'invasion française.

La situation à Maison-Carrée et sa région n'en restera pas tendue et la presse française[14] rapporte pour la derniÚre semaine de juillet que « les troupes sont toujours harcelées par les Bédouins. Les garnisons de la Ferme-ModÚle et de la Maison-Carrée n'ont pas un moment de repos, et on ne cesse pas d'entendre la fusillade sur ces deux points ».

(Août) - Voulant maintenant asseoir l'autorité française de maniÚre totale sur la Mitidja, les impératifs sécuritaires exigeaient du commandement militaire français en Algérie une présence forte et permanente au poste de la Maison-Carrée, notamment aprÚs les événements de juillet. Mais, les contraintes sanitaires restaient un réel obstacle à un telle démarche et on prit donc la décision de faire assécher les marais situés immédiatement en contrebas du fort afin de permettre un séjour plus long pour la garnison. La tùche fut confiée essentiellement à la troupe, mais on procéda aussi à la réquisition de 500 Algériens des alentours et 300 prisonniers civils, et il ne faudra pas moins de sept mois de travail pour parvenir à un premier résultat, plus ou moins satisfaisant.

1832

Colonel Maximilien Joseph de Schauenburg (1784-1838)

() - Fameux massacre des Ouffia dans les environs de la Maison-CarrĂ©e. OrdonnĂ©e par le duc de Rovigo et exĂ©cutĂ©e par le colonel Maximilien Joseph Schauenburg, voici ce que rapporte le baron Pichon, intendant civil d'Alger Ă  l'Ă©poque, au sujet de ce drame : « [
] Les Ouffia, une tribu amie, qui Ă©tait venue se placer depuis notre arrivĂ©e Ă  Alger, sous la protection de la Maison-CarrĂ©e, qui alimentait ce poste de menues denrĂ©es, qui en recevait journellement les officiers et les soldats, a Ă©tĂ© surprise, encore endormie dans ses tentes, et fusillĂ©e ou sabrĂ©e au point du jour, sans rĂ©quisition ni sommation prĂ©alable [
] pour un vol commis sur son territoire la veille [
]. Tout le bĂ©tail Ă©pars sur le territoire qu’elle occupait, et qui Ă©tait en partie la propriĂ©tĂ© de tiers habitant la montagne ou la ville d’Alger, a Ă©tĂ© ramassĂ©, amenĂ© au poste, vendu Ă  l’amiable Ă  M. Carstensen, agent consulaire du Danemark [
]. Le produit en a Ă©tĂ© rĂ©parti Ă  la troupe expĂ©ditionnaire (un bataillon de la LĂ©gion Ă©trangĂšre et un escadron de Zouaves) [
]. De nombreuses femmes, amenĂ©es Ă  la Maison-CarrĂ©e, ont Ă©tĂ© renvoyĂ©es le second ou troisiĂšme jour, pour donner la sĂ©pulture Ă  leurs maris ou Ă  leurs parents, et le sein Ă  leurs enfants. Le nombre des morts a Ă©tĂ© estimĂ© de 80 Ă  100 »[15]. Il ajoute que l'opĂ©ration aurait produit un butin d'environ 2 000 moutons (vendus 5 fr par tĂȘte), 700 bƓufs (20 fr par tĂȘte) et 30 chameaux (100 fr par tĂȘte).

() - La nouvelle du massacre des 'Oufia Ă©mut les tribus de la rĂ©gion et l’infatigable El-Hadj Ali b. Sidi SĂąadi ne manqua pas de se saisir de l’évĂ©nement pour attiser les ressentiments des clans de Kabylie contre les Français. Ainsi, quelques semaines Ă  peine aprĂšs l'incident, les chefs des tribus Isser et Amraoua furent informĂ©s qu’un dĂ©tachement de soldat français allait chaque jour rĂ©colter du foin dans les prairies de la Rassauta (act. Ras El-SĂŽta, dans les environs de Bordj-El-Kifane). Une centaine de cavaliers furent rapidement rĂ©unis et mis en embuscade en ce jour, Ă  quelques centaines de mĂštres du fort de la Maison-CarrĂ©e : entre 30 et 52 hommes de la LĂ©gion Ă©trangĂšre furent ainsi surpris et tuĂ©s au combat[16]. À ce sujet, une source française de l'Ă©poque rapporte que « Cette perte ayant fort irritĂ© le duc de Rovigo, il a Ă©tĂ© occupĂ© tout le mois de juin Ă  chercher les moyens d’aller opĂ©rer sur la cĂŽte, au-delĂ  de Matifou, une attaque surprise punitive sur les Arabes. Ses efforts sont demeurĂ©s sans rĂ©sultat »[17]. À la mi-juin, la position de Maison-CarrĂ©e fut Ă©vacuĂ©e comme Ă  l'accoutumĂ©e pour des raisons sanitaires.

  • Depuis Paris, le marĂ©chal Clauzel revendique officiellement la propriĂ©tĂ© de la Maison-CarrĂ©e et du Haouch Ouali-Dadda auprĂšs de l'administration française. Il rĂ©clama aussi l’ancien DjenĂąne l’Agha Ă  Alger (qui deviendra Villa Clauzel). Or, la validitĂ© de ces acquisitions Ă  Maison-CarrĂ©e fut contestĂ©e par le colonel Lemercier qui, au nom de l'armĂ©e, avait prouvĂ© devant le tribunal musulman (MadjlĂšs) Ă  Alger que les matĂ©riaux qui avaient jadis servi Ă  la construction de cette caserne (sous Yahia Agha) avaient Ă©tĂ© prĂ©levĂ©s des magasins et ateliers du beylik, que leur transport fut effectuĂ© au moyen de corvĂ©es et que les maçons employĂ©s furent payĂ©s par le Khodja du Dey. Il s’agissait donc, selon Lemercier, d’une propriĂ©tĂ© de l’État et elle n’aurait jamais dĂ» ĂȘtre vendue par les hĂ©ritiers de Yahia Agha ni achetĂ©e par le marĂ©chal Clauzel Ă  titre privĂ©. Finalement, le tribunal reconnut bien le fort de Maison-CarrĂ©e comme propriĂ©tĂ© du beylik, mais ne se prononça pas au sujet de la ferme. On offrit pourtant une somme de 5 300 francs par an au marĂ©chal Clauzel comme prix de location de l’édifice, mais il refusa et ce fut le dĂ©but d'une interminable bataille juridique auprĂšs des administrations parisiennes.

Face Ă  l’insistance de Clauzel (que beaucoup de gens en France accusaient d'enrichissement illicite et de spoliations), Lemercier Ă©tablira en que le domaine dit de Ouali-Dadda Ă©tait pour sa part un bien de corporation (waqf) et ne manqua pas de rappeler que le marĂ©chal Clauzel avait lui-mĂȘme promulguĂ© un arrĂȘtĂ© interdisant les transactions immobiliĂšres sur ce genre de biens. Fin 1834, l'affaire Ă©tait sur le point de se conclure en la dĂ©faveur du marĂ©chal pour les deux propriĂ©tĂ©s harrachies, mais en 1835 il est Ă  nouveau nommĂ© commandant en chef Ă  Alger ce qui donnera un coup de frein Ă  la querelle. RelevĂ© de ses fonctions Ă  la suite de l'Ă©chec de l'expĂ©dition contre Constantine (), les dĂ©bats reprendront de plus belle et s'Ă©taleront jusqu'au , date Ă  laquelle est officialisĂ© un accord de compromis avec le MinistĂšre français de la Guerre : le marĂ©chal cĂšde dĂ©finitivement Ă  l’État le fort de la Maison CarrĂ©e proprement dit ainsi que 30 hectares de terrain pris autour du bĂątiment, le tout pour une somme de 40 000 francs. Il garde par-contre la ferme de Ouali-Dadda en toute propriĂ©tĂ©[18].

() - Un groupe de trente soldats de la LĂ©gion EtrangĂšre qui menaient une reconnaissance Ă  l'Est de leur position de la Maison-CarrĂ©e se font surprendre par des combattants locaux et sont tuĂ©s[19]. À cette date, le fort Ă©tait tenu par un bataillon de la LĂ©gion EtrangĂšre et un autre bataillon du 10e LĂ©ger[20].

() - La presse française[21] Ă©voque le projet du MarĂ©chal Clauzel d'installer 600 familles europĂ©ennes (dont 200 allemandes venues de BaviĂšre et 400 françaises) en vue de la colonisation de la Mitidja, 300 d'entre elles devant ĂȘtre Ă©tablies autour de Maison-CarrĂ©e.

() - La presse coloniale rapporte[22] : « Depuis l'horrible extermination de la tribu des Ouffia, qui a servi à épouvanter les Bédouins auprÚs desquels M. Savary n'obtiendra jamais aucune confiance, les Français s'en ressentiront en toute occasion. Les Bédouins ont à présent des vedettes sur tous les points. On ne les surprendra plus ; c'est à leur tour de nous prendre en défaut. Ils se sont derniÚrement cachés dans des broussailles et là ils ont attendu une reconnaissance de 28 hommes, sortis de la Maison-Carrée, et les ont impitoyablement massacrés. Le général prétend que ce sont des déserteurs de la Légion EtrangÚre qui ont excité à ce massacre, comme si nous ne connaissions pas assez les Bédouins pour savoir qu'ils n'ont pas besoin de stimulant pour se porter à ces excÚs. Ils lui joueront bien d'autres tours ».

() - On signale des attaques meurtriÚres par des hommes de tribus locales contre les diligences françaises assurant la liaison entre Alger et la Maison-Carrée[23].

(fin juillet) - Le fort de la Maison-CarrĂ©e est momentanĂ©ment abandonnĂ© par la garnison française, et la position se voit investie pour un temps par des locaux. Pendant ce temps, des renseignements circulaient Ă  Alger sur la concentration quelque 20 000 combattants Ă  Matifou en vue d'une grande attaque sur la Maison-CarrĂ©e qui Ă©tait, dit-on, prĂ©vue pour le 15 aoĂ»t[24]. Cette nouvelle ne manqua pas d'affoler le commandement français, surtout que les rumeurs allaient bon train Ă  ce sujet et donnaient un officier d'artillerie anglais Ă  la tĂȘte des tribus soulevĂ©es. Finalement, aucune attaque n'eut lieu Ă  la date attendue. NĂ©anmoins, la position de Maison-CarrĂ©e Ă©tait toujours abandonnĂ©e en octobre 1832, la prĂ©sence française en AlgĂ©rie Ă©tant ayant alors reculĂ© jusqu'aux murs d'Alger et Oran[25].

1833

  • Le capitaine Claude-Antoine Rozet, cartographe et capitaine du GĂ©nie dans l’armĂ©e française d’Afrique, dĂ©crit le fort de Maison-CarrĂ©e Ă  la suite d'un passage sur les lieux : « Ce bĂątiment est un carrĂ© de 85 mĂštres de cĂŽtĂ© le pourtour est formĂ© d'arcades sous lesquelles il y a des mangeoires pour les chevaux. Au milieu de ce carrĂ© s'en trouve un autre qui contient des Ă©curies fermĂ©es et des magasins Ă  fourrage ». Quelques mois plus tĂŽt, le colonel Lemercier prĂ©cisait dans une de ses lettres que l'Ă©difice avait de la place pour « 500 hommes, 60 chevaux et 20 officiers », ce qui diffĂšre sensiblement des chiffres consignĂ©s sur les registres militaires puisqu'ils indiquent, pour fin 1833 Ă  Maison-CarrĂ©e, une garnison de 626 hommes et 326 chevaux.
  • Concernant LamoriciĂšre : « M. Keller raconte, d’aprĂšs le sergent Chemin qui les a conservĂ©s, des incidents curieux : « Un jour, LamoriciĂšre escortait un convoi ; en arrivant au pont de l’Arach, il voit la rive opposĂ©e couverte d’Arabes qui assiĂ©geaient littĂ©ralement la Maison CarrĂ©e. Il dĂ©tĂšle ses chevaux, range ses voitures au bord de l’eau pour abriter ses soldats et de lĂ  fait mordre la poussiĂšre Ă  quiconque essaye de passer le pont. FatiguĂ©s d’assiĂ©ger de front cet obstacle, une partie des Arabes courent chercher un guĂ© un peu plus loin ; en un clin d’Ɠil, LamoriciĂšre en profite pour atteler ses voitures, passer le pont, se faire jour Ă  travers l’ennemi et pĂ©nĂ©trer dans le fort ». Une autre fois, il accompagnait le capitaine du gĂ©nie Goujon au-delĂ  de l’Arach, « Tout Ă  coup la crĂȘte des collines voisines se garnit de burnous blancs. La retraite Ă©tait impossible, et pendant que LamoriciĂšre rappelle Ă  ses cinquante zouaves qu’il faut du moins mourir en braves, quatre des chefs arabes se dĂ©tachent de la foule et arrivent au galop sommer la petite troupe de se rendre. Avec la rapiditĂ© de l’éclair, LamoriciĂšre trouve le moyen de changer les rĂŽles et de prendre l’offensive. Allant au-devant des cavaliers, il plante tranquillement devant eux la mire qui lui servait Ă  prendre ses nivellements, et d’un ton impĂ©rieux leur dĂ©clare en arabe qu’ils sont morts tous les quatre s’ils ne jurent pas au nom de Mahomet de laisser les Français se retirer librement. Surpris de cette audace, les Arabes prĂȘtent le serment qu’on leur demande, et les zouaves s’en retournent comme ils Ă©taient venus, le fusil en bandouliĂšre »[26].

(octobre) - Sur ordre du Maréchal Clauzel[27], les tout premiers travaux d'assainissement sont lancés dans les zones marécageuses de l'Harrach prÚs de la Maison-Carrée.

1834

(31 janvier) - Dans un acte notarial établi en ce jour à Alger, on apprend qu'un certain : « Ahmed ben Kaddour ben Khalifa-el-Bladi, propriétaire à Blida, au nom et comme mandataire de Kaïd-Ahmed, propriétaire à Aïn-el-Sekhouna, a donné à titre de bail à rente annuelle et perpétuelle à M. Antoine-Mederic Villeret, propriétaire à Alger, une ferme située à Aïn-el-Sekhouna, quartier de l'Aracht prÚs de la Maison-Carrée et de la ferme de Validada, pour une rente annuelle de 250 francs »[28].

Ce document est intĂ©ressant Ă  plusieurs titres. Tout d'abord, il s'agit probablement de la toute premiĂšre acquisition de terrain pour but colonisation europĂ©enne effectuĂ©e sur le territoire de ce qui deviendra ville de Maison-CarrĂ©e/El-Harrach, le Mr Villeret en question Ă©tant Ă©tabli Ă  Alger depuis 1831 et faisant donc partie des tout premiers colons installĂ©s en AlgĂ©rie dans le sillage de la prise d'Alger par les Français. Contrairement Ă  beaucoup d'installations coloniales prĂ©coces de la Mitidja, l'affaire de Villeret verra une certaine rĂ©ussite et lui permit d'amasser une petite fortune en quelques annĂ©es, avant qu'il ne finisse tuĂ© sur les lieux -en 1839- lors des troubles dans la Mitidja qui ont prĂ©cĂ©dĂ© la reprise de la guerre avec l'Emir Abdelkader[29]. D'un autre cĂŽtĂ©, le domaine AĂŻn-Skhouna objet de la transaction, est celui-lĂ  mĂȘme qui sera acquis -une cinquantaine d'annĂ©es plus tard- par un autre colon, Mr. Altairac, et qui finira par devenir la plus importante zone industrielle de Maison-CarrĂ©e et une des plus anciennes de toute l'AlgĂ©rie. Enfin, on voit encore apparaitre sur le document le nom de l'ancienne ferme constituĂ©e en waqf pour le marabout Ouali-Dadda Ă  l'Ă©poque ottomane et dont le nom deviendra un toponyme pour le lieu aprĂšs diverses altĂ©rations dans les usages administratifs français ("Validada", "Oulid-Adda", "Oulid-Hadda" 
 etc.).

(1er mars) - Établissement, par les autoritĂ©s militaires françaises, d'une des plus anciennes cartographies du site de la future ville de Maison-CarrĂ©e[30]. Hormis l'emplacement de la caserne (c'est-Ă -dire la "maison carrĂ©e" proprement dite) et celui du pont de l'Harrach ainsi que le tracĂ© des routes, on y observe surtout les zones oĂč s'Ă©tendaient encore les marĂ©cages le long des berges de l'harrach et de ol'ued Smar. On note aussi que le site n'abritait encore aucune construction Ă  cette date, si ce n'est quelques blockhaus et la ferme de Ouali-Dadda.

(Juin) - La tribu des Arib, jusque-lĂ  dispersĂ©s dans la Mitidja, est rĂ©unie par les autoritĂ©s coloniales en une seule tribu makhzen et Ă©tablie prĂšs de Maison-CarrĂ©e sous les ordres du caĂŻd Ben Zekri. Les hommes de la tribu assument dĂšs lors le rĂŽle d'une « police de la plaine » pour le compte des Français[31]. Les sources françaises indiquent que ces 'Arib sont en fait une fraction de la grande tribu des 'Arib de la rĂ©gion de AĂŻn-Bessam. Ce groupe « vint asseoir des tentes au pied de la maison carrĂ©e, Ă  deux lieues d'Alger »[32] Ă  la suite de conflits tribaux qui auraient Ă©clatĂ© dans le chaos qui a suivi l'occupation d'Alger par les Français. Il s'agirait donc d'une installation toute rĂ©cente dans la Mitidja d'une population semi-nomade. L'idĂ©e en elle-mĂȘme serait du gĂ©nĂ©ral Voirol qui aurait tentĂ© de la mettre en Ɠuvre dĂšs 1833, le but Ă©tant de sĂ©dentariser et de convertir ces groupes turbulents (ils s'adonnaient au brigandage depuis leur venue dans la plaine) Ă  la vie d'agriculteurs tout en leur confiant la dĂ©fense des positions de Fort-de-l'Eau et de la Maison-CarrĂ©e[33].

L'expĂ©rience ne semble pas avoir eu de suites, mais cette tentative de rĂ©organisation s'insĂšre dans la volontĂ© globale du rĂ©gime colonial de combler le vide de l'ancien systĂšme politico-administratif hĂ©ritĂ© de la RĂ©gence qui s'Ă©tait en partie Ă©croulĂ© aprĂšs la chute du rĂ©gime. Et si cette volontĂ© se manifeste si prĂ©cocement dans la Mitidja, c'est parce que cette plaine, rappelons-le, Ă©tait la seule rĂ©gion rĂ©ellement soumise Ă  l'autoritĂ© française Ă  l'Ă©poque, le reste de l'AlgĂ©rie n'Ă©tant pas encore conquis : Ă  l'Est le Bey Hadj-Ahmed continuait Ă  rĂ©sister depuis Constantine, tandis qu'Ă  l'Ouest commençait Ă  briller, cette annĂ©e-mĂȘme, l’étoile d'un jeune chĂ©rif de la rĂ©gion de Mascara, El-Hadj Abdelkader b. Mahieddine.

1836

(EtĂ©) - Un journal colonial[34] rapporte ce qui suit Ă  propos de la garnison de Maison-CarrĂ©e : « En 1830, 1831, et mĂȘme 1832, les rĂ©giments ne faisaient qu'un sĂ©jour de cinq jours dans ces cantonnements et ce peu de temps suffisait pour rendre un grand nombre de soldats malades. Depuis deux ans la garnison n'y est presque pas changĂ©e et les malades n'y sont pas plus nombreux qu'ailleurs ».

Cependant, la situation était moins reluisante sur le terrain car, si l'état sanitaire des troupes stationnées dans la caserne s'était effectivement améliorée depuis l'assÚchement des marais les plus proches, les alentours immédiats du fort et du pont de l'Harrach demeuraient insalubres de telle sorte que les quelques civils européens qui tenteront de s'y installer entre 1836 et 1838 seront tous emportés par la maladie. A ce stade donc, aucune colonie de peuplement ne s'était encore constitué à Maison-Carrée et rien n'indiquait que cela se fera un jour.

1837-1844 : base d'opĂ©ration contre l’émir Abdelkader

1837

AprÚs plus de trois années de guerre contre les Français dans l'Ouest de l'Algérie, l'émir Abdelkader parvient à leur imposer le Traité de la Tafna par lequel ils reconnaissent formellement sa souveraineté sur les anciens beyliks (provinces) de l'Ouest et du Titteri. En contrepartie, Abdelkader reconnaßt la souveraineté française sur la ville d'Alger et sur la plaine de la Mitidja. DÚs lors, avec l'installation des agents de l'Emir à Médéa et sur les hauteurs de l'Atlas blidéen, la position de Maison-Carrée vit son importance militaire augmenter auprÚs des Français car le bordj et le pont verrouillaient la route d'Alger depuis l'Est et le Sud.

(26 mai) - Des cavaliers de la tribu des Béni Moussa mÚnent une série d'attaques contre les positions françaises à la Maison-Carrée et dans d'autres points de la Mitidja[35].

1838

(Avril) - Le dĂ©putĂ© français Solvet, voyageant en AlgĂ©rie, fait un passage par Maison-CarrĂ©e la rĂ©gion et consigne ses impressions dans une lettre qui sera publiĂ©e la mĂȘme annĂ©e : « [
] le 14 avril, par une belle matinĂ©e de printemps, je partis d’Alger avec Mr. Paul Aubin [
]. Sortis de la ville par la porte Bab-Azzoun, nous suivĂźmes cette route Ă  perte de vue qui conduit au pont de l’Harrach [
]. En deux heures nous arrivĂąmes Ă  la maison carrĂ©e, le dernier de nos postes militaires vers cette partie de la plaine de la Mitidjah, et nous nous engageĂąmes ensuite dans une route tracĂ©e Ă  gauche, au milieu des broussailles, sans trop savoir si elle nous conduisait directement Ă  notre destination. Nous cheminions depuis une heure environ, et nous n’avions rencontrĂ© que quelques femmes indigĂšnes prĂšs d’un puits au bord de la route, et puis au loin un Arabe qui courut aprĂšs notre voiture en nous demandant du tabac, lorsque ayant montĂ© une petite colline, notre vue se plongea tout Ă  coup sur des constructions europĂ©ennes, au milieu desquels s’élevait une jolie maison avec une espĂšce de clocher surmontĂ© d’une grande croix de fer : c’était la Rassauta [
] »[36].

On voit de ce rĂ©cit que le site ne reprĂ©sentait toujours pas plus qu'un lieu de passage et une position militaire. Pourtant, Ă  cette Ă©poque, commence Ă  se constituer Ă  Maison-CarrĂ©e les premiĂšres habitations lorsque, tirant profit de la sĂ©curitĂ© relative acquise aprĂšs le TraitĂ© de la Tafna l'avancĂ©e de travaux d'assĂšchement et de drainage des marĂ©cages de l'oued El-Harrach de l'oued Smar, quelques EuropĂ©ens commencent Ă  s'Ă©tablir dans les le voisinage du fort. Il s’agissait alors pour l'essentiel d’aventuriers et de marginaux : des civils engagĂ©s dans quelques activitĂ©s en relation avec l’approvisionnement et le divertissement des soldats de la garnison (vente d'alcool frelatĂ©, prostitution
 etc.) ou d'ex-colons agricoles de la Mitidja et du Sahel dont l’entreprise n’avait pas rĂ©ussi et qui durent abandonner leurs terres aprĂšs s'ĂȘtre retrouvĂ©s criblĂ©s de dettes. Ainsi, avec l'Ă©closion dĂ©sordonnĂ©e de quelques barques prĂ©caires autour de la caserne, se crĂ©a l'embryon d'un hameau qui sera nommĂ© Maison-CarrĂ©e.

(12 avril) - Les soldats de la LĂ©gion EtrangĂšre sont mobilisĂ©s dans la construction d'une route menant de la Maison-CarrĂ©e vers le nouveau camp militaire qui venait d'ĂȘtre Ă©tabli sur l'oued Hamiz Ă  l'Est[37]. Il s'agit donc du tout premier tronçon de ce qui deviendra la Route Nationale n°5.

(1er septembre) - Une incursion de quelque 80 cavaliers de la tribu des Hadjout est signalée prÚs de Maison-Carrée. L'attaque aurait échoué et les assaillants y laissent un mort[38].

(18 septembre) - Nouvelle attaque des Hadjout dans la rĂ©gion de Maison-CarrĂ©e : 120 bƓufs et 136 moutons appartenant Ă  des fournisseurs de l'armĂ©e française sont pris Ă  la ferme Oulid-Adda[39].

(20 septembre) - Bien qu'officiellement ralliĂ©e Ă  l'Ă©mir Abdelkader, la tribu des Hadjout ne cessa jamais de harceler les Ă©tablissements europĂ©ens nouvellement installĂ©s dans la Mitidja. Ainsi, un journal colonial[40] nous apprend qu'en ce jour un de leurs raids fut dirigĂ© contre la ferme du "Haouch Oulid Adda" prĂšs de la Maison-CarrĂ©e d'oĂč ils auraient pris de force quelque 136 bƓufs. Il s'agit en fait de l'ancienne ferme dite de Ouali-Dadda dont la formulation a progressivement changĂ© depuis l'occupation française, et qui reste encore de nos jours un toponyme sous la forme de "Haouche Ouled-Hadda".

1839

(15 juillet) - Les relations de l'Emir Abdelkader avec les Français Ă  Alger se tendent de plus, surtout depuis son installation Ă  MĂ©dĂ©a d'oĂč il s'Ă©tait mis Ă  contacter les diverses tribus du centre du pays en vue de les rallier Ă  son Etat. Pendant ce temps, les tribus alliĂ©es Ă  l'Emir lançaient de plus en plus d'attaques contre les intĂ©rĂȘts français et les fermes et installations coloniales dans la Mitidja[41], cherchant manifestement Ă  effrayer les colons et les pousser Ă  quitter le pays tout en essayant de pousser le commandement français Ă  rĂ©agir car l'Emir avait dĂ©cidĂ© de rompre la longue trĂȘve qui le liait aux Français et cherchait des occasions pour reprendre les hostilitĂ©s. Parmi ces opĂ©rations, on rapporte en ce jour la mort de M. Vaillard prĂšs de sa ferme d'AĂŻn-Skhouna Ă  Maison-CarrĂ©e, dĂ©capitĂ© en plein jour par un groupe de cavaliers locaux[42].

(4 septembre) - Un reporter local dĂ©crit dans un journal français[43] la situation de la Maison-CarrĂ©e Ă  cette date : « La ferme d'Oulid Adda est admirablement situĂ©e Ă  un quart de lieue de la Maison-CarrĂ©e d'oĂč elle apparaĂźt comme un joli pavillon. Une belle route y conduit ; un labyrinthe formĂ© de cactus Ă©gaie agrĂ©ablement le voyageur qui veut y parvenir ; un coq surmonte un lĂ©ger clocher qui donne Ă  ce passage l'air d'un ermitage. Mais passĂ© le seuil de la porte, c'est le tableau le plus repoussant que l'on puisse rendre, Une malpropretĂ© rĂ©pugnante fait dĂ©tourner les regards qui ne se reportent que sur des objets en lambeaux et dĂ©goĂ»tants. La guerre ou la peste a passĂ© par lĂ  sans doute ; ma voix est restĂ©e sans Ă©cho ; je n'ai pu trouver personne. Un petit pĂątre m'a dit que les habitants avaient fui pourchassĂ©s par les fiĂšvres et la misĂšre ».

(14 septembre) - Le correspondant algĂ©rois d'un journal français[44] rapporte en ce jour : « Les fiĂšvres continuent Ă  exercer de grands ravages dans toute la plaine de la Mitidja, et notamment aux abords de l'Aratch. Les colons de tous les pays qui peuplent certaines parties de la plaine sont dans un Ă©tat pitoyable et murmurent hautement contre la lenteur des travaux d'assainissement. Un bataillon du 24e de ligne, fort de 700 hommes, fut envoyĂ© derniĂšrement Ă  un camp prĂšs de l'Arach pour y tenir garnison. Cette position est si malsaine qu'il n'est restĂ© que 40 hommes valides et un caporal. [...] Je suis allĂ© avant-hier faire une excursion Ă  la Maison-Carre ; en arrivant, j'entrai dans une auberge pour prendre quelques rafraĂźchissements, mais j'eus devant les yeux un spectacle qui me fit bien vite remonter Ă  cheval ; un maitre d'hĂŽtel et un charretier venaient de mourir. Je repartis pour kouba et Birmadreis oĂč l'Ă©tat sanitaire est excellent ».

(2 novembre) - PrĂ©textant du franchissement du dĂ©filĂ© des Portes de Fer par les troupes françaises conduites par les fils du Roi de France Ă  la mi-septembre, l’Emir Abdelkader reprend officiellement la guerre contre les Français en AlgĂ©rie.

Dans un premier temps, l'Émir porte les hostilitĂ©s au plus prĂšs d'Alger, par l'entremise des tribus qui lui sont alliĂ©es dans la rĂ©gion, notamment les Hadjout dont les cavaliers se dĂ©chaĂźnent aussitĂŽt contre les Ă©tablissements coloniaux qu'ils peuvent atteindre dans la Mitidja. La situation sĂ©curitaire se dĂ©tĂ©riore rapidement dans la rĂ©gion, obligeant en quelques jours les colons europĂ©ens Ă  fuir les fermes hameaux coloniaux qui s'Ă©taient constituĂ©s durant les neuf annĂ©es de trĂȘve. La position de Maison-CarrĂ©e redevient aussitĂŽt la position dĂ©fensive la plus avancĂ©e en couverture d'Alger, et le fort devient dĂšs lors le point de ralliement pour tous les Français et leurs alliĂ©s. La situation Ă©tait grave et la presse française de l'Ă©poque ne manqua pas de rapporter les Ă©vĂšnements au fil des jours et des semaines qui ont suivi la reprise des hostilitĂ©s :

(24 novembre) - Une lettre envoyĂ©e d'Alger et publiĂ©e dans la presse française[45] dĂ©clare : « Nous sommes dans la plus cruelle incertitude, l'autoritĂ© n'ayant rien publiĂ©. On dit que le nombre des morts est considĂ©rable. On parle de 500 Ă  600 tĂȘtes coupĂ©es. Tout l'artillerie et toutes les troupes disponibles sont parties. Le service de la place est fait par la milice. Nos troupes ont ordre de ne pas faire quartier. C'est une guerre d'extermination qui commence [...]. Aujourd'hui, les environs d'Alger sont impraticables. 4 000 Arabes rĂŽdent dans la plaine [...]. L'ennemi a attaquĂ© un nouveau village de la plaine et y a mis tout Ă  feu et Ă  sang ; toutes les tribus douteuses sont passĂ©es Ă  l'armĂ©e d'Abdelkader, les tribus loyales ont Ă©tĂ© ravagĂ©es et pillĂ©es ; quelques-unes se sont retirĂ©es en dĂ©sordre autour de Maison-CarrĂ©e, emmenant tout ce qui avait Ă©chappĂ© au sac. On dit que les pertes de nos alliĂ©s sont immenses. 42 colons Ă©tablis dans les fermes de la plaine ont Ă©tĂ© dĂ©capitĂ©s, et leurs terres ont Ă©tĂ© dĂ©vastĂ©es et incendiĂ©es ».

En fait, les autoritĂ©s militaires françaises ayant Ă©tĂ© totalement prises au dĂ©pourvu, la garnison de Maison-CarrĂ©e assumera pratiquement tout l'effort d'Ă©vacuation et de regroupement des centres de colonisation europĂ©enne de la Mitidja car ils ne pouvaient dĂ©sormais plus ĂȘtre dĂ©fendus. Un autre journal[46] rapporte pour la mĂȘme date du 24 novembre : « Les habitants s'accordent Ă  accuser l'imprĂ©voyance du MarĂ©chal, qui plein de souvenirs de sa promenade princiĂšre, avait totalement nĂ©gligĂ© la sĂ©curitĂ© de nos Ă©tablissements dans la plaine. Il s'est si bien laissĂ© surprendre par les Ă©vĂšnements qu'en moins de deux jours tous nos camps ont Ă©tĂ© cernĂ©s, les fermes rasĂ©es ou brulĂ©es et plaine envahie jusqu'aux portes d'Alger. En effet, la ville est sur la dĂ©fensive, et les courriers allant Ă  la Maison-CarrĂ©e ou Ă  Kouba ont Ă©tĂ© surpris et dĂ©capitĂ©s. Deux jours ont suffi pour perdre les fruits de neuf annĂ©es de colonisation ! ».

La premiĂšre phase des opĂ©rations de l'Émir semblait Ă  ce moment achevĂ© avec succĂšs dans la mesure oĂč la Mitidja Ă©tait littĂ©ralement vidĂ©e de toute prĂ©sence française, permettant aux troupes algĂ©riennes de circuler quasi librement. La suite devait ĂȘtre un resserrement de cet Ă©tau autour d'Alger, mais pour cela il fallait traverser oued l'Harrach et donc faire sauter le verrou que constituait le fort de la Maison-CarrĂ©e car il bloquait totalement l'accĂšs au pont. DĂšs lors, on verra des attaques de plus en plus violentes ĂȘtre menĂ©es contre la position de Maison-CarrĂ©e.

(6 dĂ©cembre) - Une correspondance algĂ©roise datĂ©e de ce jour rapporte[47] : « MalgrĂ© tous les renforts envoyĂ©s au camp du Fondouk, on n'a pas osĂ© tenter une sortie et il a fallu que nos braves soldats vissent sous leurs yeux brĂ»ler nos fermes et les tentes des tribus amies sans pouvoir leur porter secours. Tous les habitants de ces fermes et de ces tribus qui sont parvenus Ă  se sauver, au nombre de plus de 2 000, sont en ce moment Ă  la Maison-CarrĂ©e ». La lettre d'un officier en poste Ă  la Maison-CarrĂ©e et datĂ©e du mĂȘme jour s'avĂšre plus prĂ©cise sur la situation[48] : « M. le lieutenant-gĂ©nĂ©ral RuhliĂšre a Ă©tabli ici son quartier-gĂ©nĂ©ral. Il dĂ©sirait bien aller en avant, mais les troupes manquent, et dans ce moment l'ennemi a presque toutes ses forces dans la province. Il parait que les Arabes mettent le feu partout ; les tribus alliĂ©es ont Ă©tĂ© saccagĂ©es et ceux de leurs habitants qui ont pu sauver leur tĂȘte sont arrivĂ©s ici ; nous avons prĂšs de 3 000 rĂ©fugiĂ©s europĂ©ens ou arabes. Depuis l'occupation, la colonie n'avait traversĂ© crise aussi grave ».

Illustration (1843) d'un "Cavalier Rouge" d'Abd El-Kader. Il s'agit du tout premier corps de soldats rĂ©guliers d'AlgĂ©rie, que l'Émir s'efforça de constituer au cours de la longue pĂ©riode de paix qui suivit le "TraitĂ© de la Tafna". Portant un uniforme rouge semblable Ă  celui du corps des Zouaves et portant des Ă©paulettes pour indiquer les grades, les Français les ont aperçus pour la toute premiĂšre fois le 10/12/1839 lors des combats dans la Mitidja.
Illustration (1843) d'un soldat de l'infanterie réguliÚre de l'Emir Abdelkader.

(10 dĂ©cembre) - « [...] Le 10 Abdelkader a passĂ© la Chiffa Ă  la tĂȘte de 5 Ă  6 000 combattants, sans compter ceux qu'il avait envoyĂ© sur l'Harach. Il a fallu dĂšs lors abandonner le camp de l'Harach qui ne pouvait ĂȘtre d'aucun secours Ă©tant trop avancĂ©. Les BĂ©douins y ont mis le feu aussitĂŽt ; les maisonnettes des environs ont Ă©tĂ© Ă©galement la proie des flammes. [...] L'ennemi a fait plusieurs tentatives pour passer l'Harach du cĂŽtĂ© de la Maison-CarrĂ©e, mais le pont est gardĂ© par deux piĂšces d'artillerie. Plusieurs combats ont eu lieu ces jours derniers en avant de la Maison-CarrĂ©e ; il parait que les Arabes sont dissĂ©minĂ©s sur tous les points par groupes de 1 000, 1 200 et 1 500. Nous tenons tout juste les camps de Bouffarik et de Blida dans la plaine de la Mitidja, mais ils sont cernĂ©s. Les Arabes ont coupĂ© la route qui conduit au camp de Fondouk et de l'Arbah par la Maison-CarrĂ©e, en sorte que l'artillerie partie hier pour ces camps s'est vue forcĂ©e de rentrer »[49].

(11 décembre) - Les combats font rage durant toute cette journée à Maison-Carrée et dans les alentours, les Français « ayant été refoulés jusque sous les retranchements de ce poste, et le canon seul et la mitraille ont pu faire éloigner les Arabes »[50].

(14 dĂ©cembre) - Une lettre adressĂ©e Ă  un journal français [51] nous apprend : « Le 14 l'on s'est battu presque tout le jour autour de la Maison-CarrĂ©e et ce n'est que la mitraille de ce poste qui a pu dĂ©cider les Arabes Ă  l'abandonner. Quelques hommes sortis de ce fort pour repousser les attaques avaient Ă©tĂ© refoulĂ©s par les BĂ©douins dans des marais boueux oĂč ils Ă©taient enfoncĂ©s presque jusqu'Ă  la ceinture ; ils y auraient Ă©tĂ© probablement massacrĂ©s sans l'artillerie de ce poste. Pendant toute la journĂ©e, la plaine a Ă©tĂ© couverte non pas de flammes, car il n'y a plus rien pour en faire, tout est dĂ©truit, mais de fumĂ©e ; les Arabes brĂ»lent jusqu'aux plus petites traces de vĂ©gĂ©tation ; ils sembleraient vouloir dĂ©truire le sol, comme pour le purger ou le punir de ce qu'ils appellent les souillures des chrĂ©tiens ». Une autre lettre datĂ©e du mĂȘme jour par un officier français sur place donne plus de dĂ©tails sur les combats : « Le 14, la Maison-CarrĂ©e a Ă©tĂ© attaquĂ©e par de 3 ou 4 000 Arabes ; on ne sait pas s'ils s'en sont emparĂ©s ou s'ils ont Ă©tĂ© repoussĂ©s de suite, mais nous avons perdu une trentaine d'hommes sur ce point ». Venant de France et Ă  peine dĂ©barquĂ©s au port d'Alger, 550 hommes du 3e LĂ©ger ont Ă©tĂ© immĂ©diatement dirigĂ©s vers la Maison-CarrĂ©e, tandis que le 15e et le 58e Ă©taient dĂ©jĂ  en route depuis Alger aussi[52].

(15 décembre) - Chez les Français, On compte une vingtaine de morts dan les combats de la journée autour de Maison-Carrée[53].

(16 décembre) - On signale un combat de cavalerie devant la Maison-Carrée[54]. Les Français annoncent 40 tués dans leurs rangs dont un capitaine[55].

(17 dĂ©cembre) - Nouvelle journĂ©e de combats violents devant les murs de la Maison-CarrĂ©e. Mais, les Français commencent alors Ă  se ressaisir et engagĂšrent un grand effort en vue de sĂ©curiser ce point vital de leur dĂ©fense : « [...] Nos troupes ayant reçu l'ordre d'Ă©vacuer la Maison-CarrĂ©e, les Arabes ne tardĂšrent pas Ă  s'en emparer, et il parait qu'ils y aient Ă©tabli leur quartier-gĂ©nĂ©ral ; l'ennemi se trouvait e force sur ce point. En mĂȘme temps, le gĂ©nĂ©ral RulhiĂšres recevait l'ordre de se rapprocher avec la colonne mobile, plusieurs camps rapprochĂ©s d'Alger se disposaient aussi Ă  envoyer des troupes. Enfin, un vaisseau de ligne dĂ©barquait Ă  l'embouchure de l'Arach 1 100 hommes de troupes fraiches. Tout annonce que l'ennemi, pris entre deux feux, a Ă©prouvĂ© de grandes pertes. On porte le nombre de tuĂ©s Ă  4 000, mais ce chiffre est probablement exagĂ©rĂ©, quoi qu'on se soit battus avec acharnement de part et d'autre »[56]. Un autre article[57] se montre plus prĂ©cise : « Le lendemain les Arabes se prĂ©sentĂšrent au nombre de 4 ou 5 000 ; ils furent aussitĂŽt cernĂ©s par la brigade mobile venant de la Ferme-ModĂšle, par 7 ou 800 hommes venus des camps de Fondouk et de Kara-Mustapha, par une colonne du 17e LĂ©ger et du 48e de Ligne dĂ©barquĂ©s prĂšs le cap Matifou ».

En somme, ce sont prĂšs de 10 000 hommes qui se seraient combattus ce jour-lĂ  devant le bordj de la Maison-CarrĂ©e. Les pertes algĂ©riennes furent apparemment sĂ©vĂšres : « Le combat de la Maison-CarrĂ©e a Ă©tĂ© une vĂ©ritable boucherie. Nos soldats avaient une cruelle vengeance Ă  exercer et ils ont Ă©tĂ© sans pitiĂ© ; ils n'ont fait qu'un petit nombre de prisonniers; la cavalerie qui a chargĂ© constamment poussait les Arabes vers nos colonnes qui les recevaient avec de la mitraille. On assure qu'il y est restĂ© plus de 2 000 Arabes sur le terrain et autant de blessĂ©s. Depuis l'affaire de la Maison-CarrĂ©e on ne voit dans la plaine que des groupes assez rares ; il parait que les contingents des tribus se sont Ă©clipsĂ©s ; quant Ă  l'armĂ©e rĂ©guliĂšre de l'Émir on la dit campĂ©e entre Blida et MĂ©dĂ©a »[58]. En fait, au moment mĂȘme ou la bataille de Maison-CarrĂ©e faisait rage, l'Émir Abdelkader s'Ă©tait engagĂ© avec toute son armĂ©e rĂ©guliĂšre contre les positions françaises Ă  Blida et il se fera lui aussi battre sĂ©vĂšrement. Cette journĂ©e marqua un tournant dans la guerre car les pertes subies par les AlgĂ©riens ont littĂ©ralement consommĂ© leurs forces aprĂšs plusieurs semaines les offensives sont ininterrompues. Conscient de la nouvelle donne, l'Émir se retire Ă  MĂ©dĂ©a dans l'espoir de pouvoir rallier de nouvelles tribus Ă  travers le pays pour reconstituer ses forces, laissant le commandement des opĂ©rations dans la Mitidja Ă  son plus brillant lieutenant, Ahmed Ben-Salem, gouverneur (khalifa) de la province du Sebaou. La nature du conflit va dĂšs lors changer dans le sens oĂč les AlgĂ©riens, sans encore abandonner la partie, vont se limiter au harcĂšlement permanent des positions françaises partout oĂč ils le pouvaient Ă  travers la plaine, sans presque jamais s'engager dans des affrontements majeurs oĂč les Français avaient clairement prouvĂ© leur supĂ©rioritĂ© en nombre et en moyens.

(18 dĂ©cembre) - La presse française[59] rapporte en ce jour : « on prenait des prĂ©cautions extraordinaires pour la dĂ©fense de l'extĂ©rieur et de l'intĂ©rieur de la place, que quatre camps avaient Ă©tĂ© abandonnĂ©s, que la Maison-CarrĂ©e avait Ă©tĂ© fortifiĂ©e de maniĂšre Ă  la mettre Ă  l'abri de toute attaque ultĂ©rieure et sĂ©rieuse. L'hĂŽpital du Dey d'Alger, qui se trouve en dehors de la place, a Ă©tĂ© aussi fortifiĂ©, attendu qu'on craignait qu'il ne fĂ»t attaquĂ©. On a donnĂ© des armes et des munitions Ă  tous ceux qui pouvaient en porter. Il ne se passe pas de jour que des colons ne paient de leur vie quelque acte d'imprudence. Il suffit de s'Ă©loigner de quelques minutes de la ville et de se promener isolĂ© pour tomber dans un guet-apens et ĂȘtre massacrĂ©. On retrouve toujours les cadavres auxquels on enlĂšve toujours la tĂȘte et qu'on mutile aprĂšs. [...] Les Arabes, ne pouvant traverser l'Arach, viennent tous les jours essayer de passer sur le pont construit par les Romains et qui se trouve vis-Ă -vis de la Maison-CarrĂ©e ; mais deux piĂšces de canon dĂ©fendent ce passage. Les Arabes ont fait des efforts dĂ©sespĂ©rĂ©s. Pendant toute la journĂ©e d'avant-hier, on s'est battu en deçà de la Maison-CarrĂ©e ; on a entendu trĂšs distinctement la fusillade. Le mĂȘme jour, les Arabes ont coupĂ© la route qui communique par la Maison-CarrĂ©e avec les camps de Fondouck et de l'Arbah, en sorte que l'artillerie, partie hier sous bonne escorte, avec des munitions, etc., a Ă©tĂ© forcĂ©e de rebrousser chemin. [...] M. le gĂ©nĂ©ral RulhiĂšres est toujours Ă  Bouffarick, d'oĂč il dirige toutes les affaires de la plaine. Les autres gĂ©nĂ©raux de la division gardent toujours aussi les mĂȘmes positions : le gĂ©nĂ©ral Dampierre, Ă  la Maison-CarrĂ©e ; le gĂ©nĂ©ral Rostolan, Ă  Douera ; le gĂ©nĂ©ral Duvivier, Ă  Blida. Le commandement de la place est confiĂ© au lieutenant-colonel Marengo ».

1840

() - Le fort de Maison-CarrĂ©e ayant Ă©tĂ© pratiquement vidĂ© de sa garnison pour les besoins d'une parade militaire avec les deux fils du roi de France qui se trouvaient en visite Ă  Alger, un groupe de cavaliers algĂ©riens organise une razzia dans les alentours et parvient Ă  enlever un grand troupeau de bƓufs appartenant Ă  l'armĂ©e française. La nouvelle aurait mis le MarĂ©chal de Bourmont en rage, probablement Ă  cause du camouflet en prĂ©sence des fils de son souverain, mais aussi parce que la guerre de l'Émir dans la Mitidja avait grandement diminuĂ© les disponibilitĂ©s en viande et autres denrĂ©es alimentaires dont le ravitaillement Ă©tait trĂšs difficile Ă  ce moment[60].

() - Une dĂ©pĂȘche[61] du commandement militaire français Ă  son ministre de tutelle Ă  Paris en du 30/04/1840 rapporte que « dans la nuit du 27 au 28, les troupes de Ben-Salem, de Mahieddine, rĂ©unies, ont traversĂ© l'Haratch, et au point du jour, quelques-uns de leurs cavaliers se sont prĂ©sentĂ©s aux environs de Bir-Khadem [...]. AprĂšs avoir Ă©tĂ© repoussĂ©s du Sahel, les Arabes se sont dirigĂ©s sur la Maison-CarrĂ©e pour attaquer les Aribs, nos alliĂ©s, qui s'y trouvent campĂ©s depuis qu'ils ont Ă©tĂ© autorisĂ©s Ă  s'Ă©tablir sur ce point ; mais M. le gĂ©nĂ©ral Rostolan les a prĂ©cĂ©dĂ©s, et quelques coups de fusil seulement ont Ă©tĂ© Ă©changĂ©s. Deux maisons de campagne entre Bir-Khadem et la Ferme-ModĂšle ont Ă©tĂ© pillĂ©es ; une personne a Ă©tĂ© tuĂ©e, deux ont Ă©tĂ© enlevĂ©s par l'ennemi, qui a mis le feu Ă  des tas de roseaux prĂšs de la ferme de Oulid-Adda. Nous avons cinq blessĂ©s. Les Arabes se sont retirĂ©s, partie dans la direction de l'Arba, partie dans celle de la Regaya. Ils Ă©taient au nombre de 14 Ă  1.500 hommes environ ». Cette razzia plutĂŽt musclĂ©e du khalifa Ahmed Ben-Salem (accompagnĂ© ici par Mahieddine qui Ă©tait chef des Beni-Slimane du Titteri) a semble-t-il provoquĂ© une certaine panique dans la Mitidja et Ă  Alger, les gens Ă©tant encore sous le choc des attaques de la fin 1839. Le MarĂ©chal ValĂ©e relativise alors : « L'Ă©vĂšnement a rĂ©pondu quelques alarmes dans la population indigĂšne de la campagne, et plusieurs familles sont rentrĂ©es en ville. Les Ă©vĂ©nements qui rĂ©ellement ne sont que fort peu de chose, ayant Ă©tĂ© singuliĂšrement dĂ©naturĂ©s dans la ville d'Alger, par suite d'informations incomplĂštes, je n'ai pas voulu tarder Ă  vous les faire connaitre ».

() - Un Européen est tué par des cavaliers locaux à quelques centaines de mÚtres du bordj de la Maison-Carrée[62].

() - Ben-Salem, gouverneur (khalifa) de l’Emir Abdelkader pour la province du Sebaou, rĂ©unit 1 600 hommes[63] (incluant ses troupes rĂ©guliĂšres et des contingents de tribus kabyles alliĂ©es) et mĂšne une attaque contre le fort de Maison-CarrĂ©e. La garnison française y fut harcelĂ©e durant plusieurs jours, alors qu'une incursion est poussĂ©e jusqu'au Hamma dans les faubourgs d'Alger. Au retour de cette opĂ©ration audacieuse, Ben-Salem et ses cavaliers furent pris sous le feu des canons de la Maison-CarrĂ©e au moment oĂč ils traversaient oued El-Harrach par son embouchure. Cela n'empĂȘcha pas leur retraite, mais un boulet de canon tirĂ© depuis le bordj aurait emportĂ© El-HassaĂŻn b. Zamoun, fils du fameux chef de la tribu des Flissa de Kabylie[64].

Pour ce qui est de la bataille mĂȘme, un soldat de la garnison de Maison-CarrĂ©e rapporta Ă  un journal français[65] sa version dĂ©taillĂ©e des Ă©vĂšnements qui eurent lieu ce jour-lĂ  : « Le 15 Mai Ă  3h du matin, les postes dĂ©pendants de la Maison-CarrĂ©e ayant fait connaitre au commandant supĂ©rieur de ce camp qu'une fusillade Ă©tait engagĂ©e du cĂŽtĂ© du guĂ© de Constantine et de la redoute de Kouba, la garnison prit aussitĂŽt les armes pour se porter du cĂŽtĂ© oĂč l'ennemi s'Ă©tait montrĂ©. [
] Au moment oĂč la colonne, partie de la Maison-CarrĂ©e, allait gravir le coteau sur lequel est construite la redoute du pont de l'Arach (rive gauche), nous fumes informĂ©s par l'officier de cavalerie qui rentrait de reconnaissance avec 30 cavaliers, que l'ennemi Ă©tait massĂ© en grand nombre sur la rive droite au guĂ© de l'embouchure et que plusieurs centaines de cavaliers Ă©taient dĂ©jĂ  sur la rive gauche et semblaient vouloir se diriger sur Alger. Il Ă©tait alors 5h 3/4 du matin. Le chef du 4e Bataillon de la LĂ©gion EtrangĂšre commandant supĂ©rieur, fit changer de direction Ă  la colonne pour la porter immĂ©diatement au-devant de l'ennemi et le combattre. La colonne composĂ©e de : 1) 89 cavaliers et 4 officiers sous les ordres d'un capitaine du 8e RĂ©giment de Chasseurs ; 2) 193 hommes d'infanterie dont 9 officiers (58e RĂ©giment, 2e Bataillon, 43 Voltigeurs, LĂ©gion EtrangĂšre, 150 hommes) sous les ordres du capitaine du 58e RĂ©giment, s'est avancĂ©e sur la route qui conduit de la Maison-CarrĂ©e Ă  Alger et, arrivĂ©e Ă  hauteur de la redoute des dunes, elle a Ă©tĂ© dirigĂ©e sur le guĂ© de l'embouchure oĂč Ă©taient rĂ©unis le gros des Arabes. Ceux qui Ă©taient sur la rive gauche et dont une cinquantaine s'Ă©tait dĂ©jĂ  Ă©parpillĂ©e autour d'Hussein-Dey, qu'ils n'ont pas dĂ©passĂ©, ayant aperçu les troupes de la Maison-CarrĂ©e, se rĂ©unirent aussitĂŽt sur la plage pour revenir sur leurs pas et traverser le guĂ© et rejoindre Ben-Salem qui Ă©tait restĂ© sur la rive droite. Il Ă©tait trop tard : ils trouvĂšrent le guĂ© gardĂ© par nos troupes, et Ă  l'instant oĂč ils arrivĂšrent Ă  200 pas de ce passage, l'escadron de cavalerie Ă  la tĂȘte duquel s'Ă©tait mi le commandant supĂ©rieur, chargea Ă  fond sur eux et en fit un grand carnage. Pendant la charge, l'infanterie s'Ă©tait dĂ©ployĂ©e de maniĂšre Ă  protĂ©ger la cavalerie menacĂ©e par Ben-Salem qui occupait la rive droite et qui essayait de passer le guĂ© pour venir au secours des siens. Un feu de deux rangs bien nourri et celui d'une piĂšce de 8 placĂ©e Ă  1,200 mĂštres de ce point dans la redoute des dunes ne permirent pas Ă  ce chef d'exĂ©cuter son projet. Les Arabes aprĂšs avoir essuyĂ© la charge de la cavalerie, ne songĂšrent plus qu'Ă  repasser l'Arrach en emportant leurs morts et leurs blessĂ©s, ce qu'ils firent avec de nouvelles pertes, car ils Ă©taient forcĂ©s de passer sous le feu de l'infanterie et la cavalerie, plusieurs d'entre eux se sont jetĂ©s Ă  la mer pour gagner Ă  la nage l'autre rive de l'Arach, mais ils y ont trouvĂ© la mort qu'ils cherchaient Ă  Ă©viter. Les cavaliers se servant de leurs fusils les ont tuĂ©s. Cette prĂ©cipitation empĂȘcha l'ennemi de pouvoir enlever tous ses morts ; 5 cadavres restĂšrent encore sur la plage et furent enterrĂ©s le lendemain pas les soins nos soldats. Il serait difficile de prĂ©ciser les pertes de l'ennemi ; seulement ils ont Ă©tĂ© vus pendant l'action ramassant leurs morts et leurs blessĂ©s en assez grand nombre et dans la mĂȘme journĂ©e, enterrant leurs morts autour d'un marabout situĂ© entre la Rassauta et la Maison-CarrĂ©e ; ils en ont Ă©galement enterrĂ© au marabout de Sidi-Kaleb entre la Maison-CarrĂ©e et le Fondouk ».

() « Le 26, le feu brûlait encore du cÎté de la Maison-Carrée ; il parait que le farouche Ben-Salem n'est pas loin de là. La fumée qui s'élÚve des feux de la plaine dérobe la vue de l'Atlas. Les Arabes ont attaqué la Maison-Carrée ; mais ils ont été repoussés par les Couloughlis et les Aribs, faibles débris de tribus indigÚnes chargées de la défense de ce point »[66].

() - Selon l'ordre du jour de l'armĂ©e française affichĂ© Ă  Alger en ce jour[67], un sĂ©rieux affrontement eut lieu contre les forces alliĂ©es Ă  l'Emir Abdelkader dans la rĂ©gion de Maison-CarrĂ©e : « L'ennemi s'est prĂ©sentĂ© ce matin au nombre de 1 800 cavaliers sur divers points pour pĂ©nĂ©trer dans le Sahel, sous les ordres d'El-Berkani, ex-bey de MĂ©dĂ©ah, et Ben-Salem de Sebaou. La ligne de nos avant-postes a Ă©tĂ©, attaquĂ©e sur un dĂ©veloppement de quatre kilomĂštres, et nombre d'Arabes avaient pĂ©nĂ©trĂ© par les ravins, lorsque les reconnaissances envoyĂ©es des camps voisins, dĂšs la diane battue Ă  trois heures, ont arrĂȘtĂ© le mouvement de l'ennemi dans le Sahel. ForcĂ©s de repasser l'Arasch, les Arabes ont pris position sur les hauteurs d'Oulidadda pendant que les indigĂšnes nos auxiliaires, chargĂ©s de la garde de la Maison-CarrĂ©e, dĂ©fendaient les approches- de ce dernier point, soutenus bientĂŽt par un dĂ©tachement de la lĂ©gion Ă©trangĂšre venu du petit camp d'Hussein-Dey. AttaquĂ© de tous cĂŽtĂ©s Ă  l'arrivĂ©e des divers camps, l'ennemi a abandonnĂ© toutes ses positions. Une de ses colonnes a Ă©tĂ© chargĂ©e avec intelligence et intrĂ©piditĂ© par le 3e Escadron du 5e Hussards, sous les ordres de M. le capitaine de Laborde. Dans la mĂȘlĂ©e, l'ennemi a eu de 25 Ă  30 hommes tuĂ©s. Un des cavaliers rĂ©guliers a Ă©tĂ© pris, ainsi que cinq chevaux et quantitĂ© d'armes ; deux hussards seulement ont Ă©tĂ© blessĂ©s, grĂące Ă  la vigueur avec laquelle la charge a Ă©tĂ© menĂ©e par le capitaine ».

() - Un affrontement assez sérieux est signalé sous les murs du bordj de la Maison-Carrée[68].

La situation sĂ©curitaire devenant alors intenable, les autoritĂ©s militaires de la Maison-CarrĂ©e ordonnent Ă  tous les EuropĂ©ens, jusque-lĂ  dispersĂ©s autour du fort, de se regrouper dans un secteur prĂ©dĂ©fini en bas du vallon. Quelques maisons improvisĂ©es vont alors former un petit hameau sur la rive droite de l'Harrach, entre le vieux pont (oĂč il y avait une fontaine d’eau) et le contrebas de la colline oĂč se tient le bordj, et c'est ainsi que se constitua le noyau de la future ville de Maison-CarrĂ©e.

1841

GĂ©nĂ©ral Bugeaud (1784-1849) en AlgĂ©rie. Il fut d'abord Gouverneur GĂ©nĂ©ral et chef de l'armĂ©e française en AlgĂ©rie en 1836-1837 oĂč il lutta contre le premier soulĂšvement de l'Emir Abdelkader avec qui il finit par signer le "TraitĂ© de la Tafna". AprĂšs la reprise de la guerre par l'Emir en 1839 et l'incapacitĂ© des gĂ©nĂ©raux qui se sont succĂ©dĂ© Ă  Alger d'en venir Ă  bout, le gouvernement français le rappelle et il occupera de nouveau le poste de 1841 Ă  1847)

() - Une attaque menée en ce jour contre les tribus des Zerouùla et des Béni Sùada provoquera leur reddition quelques jours aprÚs, lorsque prÚs de 30 familles se rendent à la Maison-Carrée en amenant tous leurs biens, pour demander grùce et se place sous la protection des Français sur place[69], sachant que leur défection les rendait désormais cible licite pour les troupes de Ben-Salem.

En fait, avec le retour du Général Bugeaud (il est de nouveau nommé au poste fin 1840 et s'installe et arrive à Alger le 22/02/1841), le commandement français en Algérie va adopter une toute nouvelle stratégie pour contrer l'Emir Abdelkader : les troupes françaises seront désormais organisées en colonnes mobiles et, au lieu de se fixer sur des positions fortifiées pour défendre Alger ou les installations coloniales de la Mitidja, elles mÚneront sans cesse des attaques dévastatrices contre les terres et les tribus ralliées à l'Emir. Cette politique offensive finira trÚs rapidement par payer, provoquant la terreur parmi les populations algériennes, déjà trÚs éprouvées par l'effort inédit qu'avait demandée la reprise de la guerre par l'Emir, et qui voyait aussi ses maigres ressources systématiquement détruites par les Français.

() - Au fil des semaines, le flux des redditions parmi les anciennes tribus alliĂ©es de l'Emir Abdelkader dans la rĂ©gion n'a pas cessĂ© de grandir, et une trop grande concentration de population algĂ©rienne finit par se constituer aux alentours du bordj de la Maison-CarrĂ©e. Les autoritĂ©s militaires françaises ont pu entrevoir un danger dans cette situation et s'affaira Ă  y mettre de l'ordre. Ainsi, le gĂ©nĂ©ral Bugeaud publie en ce jour un arrĂȘtĂ©[70] qui stipule en premier lieu qu'il ne sera plus reçu, dans la province d'Alger, les soumissions individuelles « ou de familles d'Arabes ayant ou non fait partie des tribus du Sahel ou de la Metidja », seuls les chefs de tribus Ă©tant dĂ©sormais admis Ă  traiter de la soumission de leurs groupes respectifs. L'arrĂȘtĂ© prĂ©cise ensuite (article 4) que les tribus qui seront acceptĂ©es ultĂ©rieurement devront attendre qu'un territoire leur soit dĂ©signĂ©, tandis que celle dont la reddition avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© acceptĂ©e jusqu'Ă  cette date « seront rĂ©unis dans le territoire situĂ© entre la Maison-CarrĂ©e, l'Arach et la mer. Les limites de ce territoire seront indiquĂ©es du cĂŽtĂ© des terres par des lignes apparentes. Ils seront placĂ©s sous l'autoritĂ© d'un KaĂŻd qui sera nommĂ© par nous et relĂšvera du bureau arabe. DĂ©fense expresse leur est faite de franchir l'Arach, si ce n'est dans le cas et sous les conditions dĂ©terminĂ©es ci-aprĂšs », la condition en question Ă©tant de figurer sur un registre officiel des personnes autorisĂ©es Ă  franchir oued l'Harrach pour travailler dans les chantiers de l'administration coloniale ou ceux des colons europĂ©ens (article 5). Ces registres devaient ĂȘtre tenus par les caĂŻds des tribus et les personnes autorisĂ©es devaient porter une mĂ©daille distinctive, de maniĂšre permanente et visible, tant qu'ils se trouveront dans la rive gauche et la remettre Ă  leur caĂŻd Ă  leur retour : « Les Arabes cantonnĂ©s qui seront trouvĂ©s circulant de jour et sans armes en dehors des limites du territoire dĂ©signe en l'article 4 sans ĂȘtre porteurs de la mĂ©daille et sans justifier qu'ils se rendent au travail pour lequel ils seraient engagĂ©s ou qu'ils en reviennent, seront arrĂȘtĂ©s et conduits devant le KaĂŻd, qui leur infligera une amende de 10 francs et une peine corporelle. Ceux desdits indigĂšnes qui, mĂȘme porteurs de mĂ©dailles et employĂ©s comme ouvriers par l'administration ou par des particuliers, seraient trouvĂ©s circulant au dehors du territoire indiquĂ© dans les circonstances ci-aprĂšs, seront Ă©galement arrĂȘtĂ©s et punis, Ă  savoir : l) En cas de circulation de jour avec armes, d'1 Ă  5 ans d'emprisonnement ; 2) en cas de circulation de nuit et sans armes, de 5 ans Ă  10 ans de travaux forcĂ©s ; 3) en cas de circulation, la nuit, avec armes, de la peine de mort ». Aussi, l'arrĂȘtĂ© prĂ©voit (article 5) qu'il sera « Ă©tabli entre le pont de l'Arach et la Maison-CarrĂ©e un marchĂ© Ă  jours fixes dont l'emplacement et les Ă©poques pĂ©riodiques seront dĂ©terminĂ©s par un arrĂȘtĂ© du Directeur de l'IntĂ©rieur approuvĂ© par nous et oĂč se feront exclusivement les Ă©changes avec lesdits indigĂšnes ».

L'idĂ©e Ă  ce moment Ă©tait donc d'abord de mettre fin immĂ©diatement au danger d'une trop grande concentration de tribus autour de la position de Maison-CarrĂ©e tout en gardant ces tribus nouvellement soumises hors d'atteinte des hommes de l'Emir Abdelkader, et en mĂȘme temps de en mettre en place l'Ă©bauche d'une organisation qui permettrait d'exploiter de la main d'Ɠuvre locale sans trop mettre en danger la sĂ©curitĂ© de la colonie algĂ©roise, faisant ainsi du cours de l'Oued l'Harrach une sorte de frontiĂšre et du pont de Maison-CarrĂ©e un point de transit et de contrĂŽle obligatoire. Ces dispositions seront bien entendu validĂ©es pour un temps seulement sur le plan officiel. Mais, il n'en reste pas moins que la future ville de Maison-CarrĂ©e tiendra trĂšs longtemps ce rĂŽle de porte d'entrĂ©e pour Alger et de point de chute principal pour les migrations de populations algĂ©riennes de l'intĂ©rieur du pays, notamment les rĂ©gions centrales le Titteri et du DĂźra, vers Alger. Par-contre, et mĂȘme si elle ne sera pas immĂ©diatement concrĂ©tisĂ©e du fait de la guerre qui se poursuit du caractĂšre provisoire des installations Ă  Maison-CarrĂ©e, l'idĂ©e du marchĂ© devant servir de point de jonction contrĂŽlĂ© entre le monde des tribus algĂ©riennes et la colonie europĂ©enne d'Alger, persistera dans ls faits et constituera mĂȘme le vĂ©ritable point de dĂ©part pas l'existence de la future ville de Maison-CarrĂ©e, une dizaine d'annĂ©es plus tard.

(23 mars) - Un rapport du gĂ©nĂ©ral Bugeaud, datĂ© de ce jour, Ă  son gouvernement sur le dĂ©roulement de la guerre en AlgĂ©rie mentionne : « Le bruit s'est rĂ©pandu il y a trois jours, qu'Abd- el-Kader venait avec Ben-Salem et une nombreuse cavalerie attaquer la Rassauta et la Maison-CarrĂ©e. J'ai envoyĂ© dans la nuit deux bataillons et les gendarmes maures s'embusquer en avant de la Maison-CarrĂ©e. Rien n'ayant paru, le lendemain les troupes sont rentrĂ©es, et hier six cents chevaux ont attaquĂ© le poste indigĂšne de la Rassauta : aprĂšs avoir tiraillĂ© pendant deux heures, cette cavalerie s'est retirĂ©e emportant 7 Ă  8 blessĂ©s et laissant un cheval mort. Nous avons eu un blessĂ© »[71].

(12 avril) - Dans un ordre gĂ©nĂ©ral de l'armĂ©e française d'Afrique datĂ© de ce jour, on peut lire ce qui suit : « Aujourd’hui, 400 chevaux de l’Est commandĂ©s par Ben-Salem sont venus attaquer des indigĂšnes amis Ă©tablis Ă  la Rassauta. M. le lieutenant PellĂ© est parti de la Maison-CarrĂ©e avec 300 tirailleurs indigĂšnes, a marchĂ© sur les Arabes, les a mis en fuite, en a tuĂ© plusieurs et les a poussĂ©s jusqu’à Sidi-Khaled [
] ». Ce fut lĂ  la derniĂšre incursion que mĂšnera le khalifa Ben-Salem dans la Mitidja. Le fort de Maison-CarrĂ©e devient dĂšs lors une base d'oĂč sont lancĂ©es les colonnes de l'armĂ©e française contre les alliĂ©s de l'Ă©mir plus qu'une position dĂ©fensive. Par-ailleurs, la zone Ă©tant dĂ©sormais sĂ©curisĂ©e, les colons europĂ©ens purent reprendre leurs activitĂ©s Ă  Maison-CarrĂ©e[72].

(15 avril) - Lettre du gĂ©nĂ©ral Bugeaud au ministre français de la Guerre Ă  propos du cantonnement des Arabes de la Maison-CarrĂ©e[73]. Bugeaud Ă©tait effectivement un fervent promoteur de la colonisation du territoire conquis et n'hĂ©sitait pas Ă  s'investir personnellement sur le terrain. Ainsi, face au peu d'empressement des vĂ©tĂ©rans de l'armĂ©e de s'engager dans son projet de colonisation militaire, il se dĂ©plaça « accompagnĂ© du directeur de l'IntĂ©rieur, de trois gĂ©nĂ©raux et d'un nombreux Ă©tat-major Ă  la colonie de l'Harrach pour inaugurer ce qu'il appelait la fĂȘte du labourage. Grand nombre de dames, Ă  la suite de Mme Bugeaud, et beaucoup de notables s'Ă©taient joints au cortĂšge champĂȘtre. Soixante charrues Ă©taient rĂ©unies en avant de la Maison-CarrĂ©e. Il mit pied Ă  terre et traça lui-mĂȘme un sillon "pour montrer aux Arabes", dit la feuille officielle, qu'il n'en Ă©tait pas Ă  son coup d'essai ».

En fait, profitant aussi de l'accalmie dans la rĂ©gion, la garnison du fort de la Maison CarrĂ©e avait entamĂ© de grands travaux d'assĂšchement des marais qui bordaient les rives de l'oued Smar et rendirent la rĂ©gion un peu plus habitable pour les europĂ©ens. ParallĂšlement Ă  cela, en exĂ©cution d'un grand plan de fortification imaginĂ© par ce mĂȘme Bugeaud en vue de sĂ©curiser la zone de colonisation française autour d'Alger, on entama le creusage d'un fossĂ© qui va s'Ă©taler jusqu'Ă  Bir-Touta au S. et qui sera achevĂ© en 1842.

(octobre) - « Le gouverneur-gĂ©nĂ©ral s'occupa d'organiser l'administration des tribus qui venaient se ranger sous notre autoritĂ©. Nous leur avions prouvĂ© que nous Ă©tions plus forts qu'Abdelkader ; il nous restait Ă  leur montrer que nous Ă©tions plus sages et que nous savions faire respecter nos amis. À la fin d'automne, quand il passa en revue les libĂ©rables de la garnison d'Alger et des camps environnants, il les engagea vivement Ă  accepter les terres qu'il pouvait mettre Ă  leur disposition ; quelques-uns se dĂ©cidĂšrent Ă  rester en Afrique, et ce fut pour l'annĂ©e suivante un exemple utile. Le lendemain de cette revue, il se rendit Ă  la colonie de l'Arracht pour ouvrir le labourage. Soixante charrues avaient Ă©tĂ© rĂ©unies devant la Maison-CarrĂ©e. Le gĂ©nĂ©ral Bugeaud traça un sillon de maniĂšre Ă  faire voir aux Arabes que ce n'Ă©tait pas son coup d'essai »[74].

(novembre) - « Depuis quelque temps une activitĂ© Ă©nergique est imprimĂ©e aux travaux entrepris par l'armĂ©e et par l'administration pour prĂ©parer et amener la colonisation du pays. [
] De semblables dispositions ont Ă©tĂ© prises Ă  l'Ă©gard de familles arabes demeurĂ©es fidĂšles ou ralliĂ©es Ă  notre cause. Le nombre de ces familles rĂ©unies autour de la Maison-CarrĂ©e est dĂ©jĂ  considĂ©rable et il s'accroit chaque jour ; presque toutes appartiennent aux anciennes tribus des BĂ©ni Moussa, BĂ©ni Khelil et de Khachna, et qui habitaient la plaine avant la guerre. Elles se sont hĂątĂ©es, disent-elles, de fuir la misĂšre et les vexations qu'elles Ă©prouvaient sous la domination d'Abdelkader, aussitĂŽt qu'elles ont trouvĂ© moyen d'Ă©chapper Ă  la surveillance des gardes que l'Emir entretient depuis deux ans autour d'elles. 200 hectares pris parmi tes terres voisines de la Maison-CarrĂ©e et de la Rassauta vont ĂȘtre labourĂ©es et ensemencĂ©es par ces indigĂšnes ; l'administration leur fournit les bƓufs et les instruments de labour, elle leur accorde en outre des semences qui seront rendues aprĂšs la rĂ©colte avec addition d'un tiers de la paille. Ces sortes d'arrangements sont habituels pour les Arabes, et il n'est pas douteux qu'ils y seront fidĂšles. Tels sont en rĂ©sumĂ© les travaux et les soins par lesquels l'armĂ©e se repose en hiver des fatigues de la guerre, et la part qu'elle apporte dans l'Ɠuvre immense de la colonisation du pays »[75].

(20 dĂ©cembre) - La presse coloniale rapporte pour ce jour : « Le gouverneur-gĂ©nĂ©ral, accompagnĂ© de M. le comte Guyot, directeur de l'intĂ©rieur, de M. le gĂ©nĂ©ral du gĂ©nie baron de Berthois et de MM. les gĂ©nĂ©raux Lyautey et Changarnier, vient de consacrer quatre jours Ă  visiter l'obstacle continu, dans le but de s'assurer du bien-ĂȘtre et de l'Ă©tat sanitaire des troupes, d'encourager les travaux et d'Ă©tudier une maniĂšre de garder l'enceinte. [
] Les extrĂ©mitĂ©s des deux lignes qui se trouvent dans des lieux saints seront seules garnies de blockhaus dont la garde sera fournie par l'infanterie indigĂšne ou française stationnĂ©e a Blidah, ColĂ©ah et la Maison-CarrĂ©e. Il n'y aurait point de blockhaus dans la plaine ; mais les deux lignes seraient parcourues par des patrouilles de cavalerie partant, au Sud de Medeah et Mebdouh, au Nord de ColĂ©ah et d'une des collines qui dominent l'oued Karma. La partie de la plaine serait donc renfermĂ©e entre quatre petits corps de cavalerie qui communiqueraient entre eux par des moyens tĂ©lĂ©graphiques d'une installation trĂšs simple, de maniĂšre que tout Ă©vĂ©nement, dĂ©couvert par l'un des corps, put ĂȘtre signalĂ© aux autres en peu de temps. Il est probable que l'enceinte sera terminĂ©e avant l'Ă©tĂ© prochain. M. le gouverneur est aussi allĂ© visiter la ligne d'obstacle de l'Arratch, et la colonie arabe qui a Ă©tĂ© Ă©tablie en avant et autour de la Maison-CarrĂ©e, et qui s'est grossie depuis six semaines d'une centaine de familles, formant un total d'environ 500 personnes qui ont fui la domination de l'Emir. M. le marĂ©chal Clausel a, sur la demande de. M.le gouverneur-gĂ©nĂ©ral, autorisĂ© les familles indigĂšnes appartenant a la colonie arabe Ă©tablie auprĂšs de la Maison-CarrĂ©e, d'ensemencer Ă  leur profit les terres dĂ©pendant de sa ferme de Ouali-Dada »[76].

1842

(9 février) - Plus de 23 familles de la tribu des Béni-Moussa se présentent au fort de la Maison-Carrée pour faire leur reddition aux Français.

(10 fĂ©vrier) - Des chasseurs europĂ©ens signalent la prĂ©sence de lions dans les alentours du fort de Maison-CarrĂ©e, une lionne accompagnĂ©e de son petit ayant mĂȘme attaquĂ© et blessĂ© leurs deux accompagnateurs algĂ©riens[77].

(20 mars) - On signale une attaque contre le bordj de la Maison-Carrée, suivi aussitÎt par une expédition punitive de plusieurs unités de Zouaves, qui seraient rentrées le lendemain avec une soixantaine de prisonniers[78].

  • Durant l'annĂ©e 1842, le bordj de la Maison-CarrĂ©e est tenu par un dĂ©tachement de tirailleurs et de cavaliers indigĂšnes, commandĂ©s par un officier des Zouaves[79].

1843

(16 mai) - AprĂšs une rude bataille, la Smala l'Emir Abdelkader (grand camp mobile qui servait de capitale itinĂ©rante), est prise par les troupes françaises du Duc d'Aumale dans la rĂ©gion de Boghar. Ce dĂ©sastre marqua la fin de la rĂ©sistance de l'Emir contre les Français en AlgĂ©rie, mĂȘme si le khalifa Ahmed Ben-Salem va poursuivre la lutte pour un temps et avec le peu de moyens qu'il pourra encore mobiliser.

Dans l'immĂ©diat, et aussitĂŽt la bataille achevĂ©e, le butin ainsi que la majoritĂ© des prisonniers algĂ©riens (prĂšs de 3 500 personnes) sont dirigĂ©s vers le camp de la Maison-CarrĂ©. PrĂšs d'un mois plus tard (14/06/1843), les troupeaux de moutons et autres bestiaux qui avaient Ă©tĂ© saisis (les sources françaises parlent de 15.000 tĂȘtes au total) sont mises en vente Ă  Maison-CarrĂ©e. Pour ce qui est des prisonniers, les gens de condition modeste furent transfĂ©rĂ©s vers l'Oranie pour y ĂȘtre employĂ©s Ă  diverses tĂąches, tandis que les chefs et leurs familles devaient aller rejoindre l’Émir dans sa prison sur l'Ăźle Sainte-Marguerite en France[80].

1844

(25 avril) - La presse coloniale rapporte pour ce jour[81] que : « La colonne qui va opĂ©rer dans l'Est d'Alger pour abattre le drapeau de Ben Salem, restĂ© debout chez les Flissas, s'est rĂ©unie le 25 du mois courant Ă  la Maison-CarrĂ©e oĂč elle a bivouaquĂ© [
] ». Il s'agissait de concentrer un corps de 8 000 hommes qui allaient ĂȘtre rĂ©partis en trois colonnes sous les ordres des gĂ©nĂ©raux Gentil et Corte ainsi que le colonel Schmitt[82]. Le Gouverneur GĂ©nĂ©ral arrive Ă  Maison-CarrĂ©e le lendemain et, une fois les prĂ©paratifs achevĂ©s, l'armĂ©e fait mouvement vers l'Est le 27 mai.

1844-1846 : un premier village éphémÚre

1844

Bien qu'une relative accalmie toucha la Mitidja Ă  partir de 1841, la fin officielle de la longue guerre de l'Emir Abdelkader marque un retour dĂ©finitif au calme dans la rĂ©gion. Cela avait permis aux Français, dans un premier temps, d'achever tranquillement les derniers travaux d’assĂšchement des marais de l'Harrach et de rĂ©soudre ainsi une grande partie les problĂšmes sanitaires qui empĂȘchaient jusqu'alors l'occupation permanente du site de la Maison-CarrĂ©e et ses alentours. La zone devient dĂšs lors habitable Ă  longueur d'annĂ©e pour les EuropĂ©ens et, la fin de la guerre aidant, on observe presque aussitĂŽt aprĂšs un foisonnement d'opĂ©rations fonciĂšres qui conduiront en quelques annĂ©es Ă  l'apparition de nombreuses fermes et plantations coloniales[83] sur les terres environnantes, et dont certaines vont mĂȘme marquer la toponymie gĂ©nĂ©rale de la rĂ©gion jusqu'Ă  nos jours.

Bien que la Maison-CarrĂ©e ne constitue dĂ©sormais plus une frontiĂšre ou une limite Ă  la prĂ©sence française, la position restera encore Ă  ce stade de valeur essentiellement militaire et comme principale base de dĂ©part pour les expĂ©ditions françaises qui vont s'enfoncer de plus en plus loin en territoire algĂ©rien. NĂ©anmoins, la documentation officielle de l'administration commence au mĂȘme moment Ă  Ă©voquer des perspectives coloniales pour la rĂ©gion, notamment le gĂ©nĂ©ral Bugeaud qui, on l'a vu au cours de la guerre, avait toujours manifestĂ© un intĂ©rĂȘt pour le site de Maison-CarrĂ©e et qui, dans un rapport datĂ© de cette annĂ©e, prĂ©conise qu'il y soit Ă©tabli un centre de peuplement français : « Je partage l'opinion du colonel du gĂ©nie sur l'avantage qui rĂ©sulterait de la crĂ©ation d'un centre de population sur ce point [Maison-CarrĂ©e], lieu d'Ă©tape pour une partie des Arabes qui apportent leurs denrĂ©es au marchĂ© d'Alger ». Pourtant, aucune action officielle concrĂšte ne sera engagĂ©e dans l'immĂ©diat et, lorsque vont se former quelques masures et modestes habitations autour du bordj de la Maison-CarrĂ©e, ce tout premier hameau sera le fruit d'une dynamique totalement spontanĂ©e et sans aucune planification des autoritĂ©s coloniales.

() - Un acte notarial datĂ© de ce jour atteste que la « ferme connue sous le nom de Haouch-el-Alia, situĂ©e dans le BĂ©ni-Moussa, Ă  1,5 km de la Maison-CarrĂ©e ; limitĂ©e d'une part par la propriĂ©tĂ© de M. Masseyk, d'autre part par l'Haouche-Ben-Selama, appartenant au domaine ; traversĂ©e par la route d'Alger au Fondouk », est acquise par un certain Adolphe Cordier, propriĂ©taire et rĂ©sident alors Ă  Alger[84]. ne dizaine d'annĂ©es plus tard, il y lancera une culture de coton[85], et deviendra d'ailleurs un des notables de Maison-CarrĂ©e oĂč il sera propriĂ©taire de plusieurs terrains et immeubles. A noter que l'un des voisins citĂ©s, Alexandre Van-Masseyk en l'occurrence, fera l'acquisition d'une ferme nommĂ©e Haouche-El-Temak dont les terrains recouvrent Ă  peu prĂšs tous les quartiers qu'on nomme de nos jours Tamaris et les Bananiers.

() – Un arrĂȘtĂ© ministĂ©riel[86] reconnait officiellement en ce jour qu'un « hameau de la Maison-CarrĂ©e » (on comptait Ă  cette date une dizaine de maisons sur les lieux) comme « village de peuplement français ». Le texte prĂ©cise en prĂ©ambule que : « ConsidĂ©rant que le hameau de la Maison-CarrĂ©e ne fait partie d'aucune commune, et qu'il importe nĂ©anmoins d'y Ă©tablir un reprĂ©sentant de l'autoritĂ© civile dans l'intĂ©rĂȘt de la police comme aussi de l'Ă©tat civil des personnes qui le composent ». Administrativement, le nouveau village ainsi que son vaste territoire sont rattachĂ©s Ă  la colonie d'Hussein-Dey qui constituait Ă  l'Ă©poque une section de la commune de Kouba. Pour gĂ©rer les affaires locales le texte prĂ©voyait la dĂ©signation d'un « adjoint spĂ©cial », mais il se trouve qu'un ”adjoint du maire pour Maison-CarrĂ©e” Ă©tait dĂ©jĂ  en poste le 03 septembre 1844 en la personne d'un certain Philibert GuĂ©net[87], mais qui ne tarda pas Ă  dĂ©missionner et remplacĂ© par Jean-Louis-Jules Rogues le 11 novembre 1844[88]. Sinon, la tradition locale rapporte que le tout premier habitant civil du village de Maison-CarrĂ©e Ă©tait un nommĂ© Antonio Lluch, originaire de Catalogne (Espagne).

1845

(juin) - Une invasion de sauterelles traverse Maison-Carrée et ses alentours[89]

(2 septembre) - CrĂ©ation, par un certain M. Delachanterie, d'une compagnie de transport (Omnibus Africain) devant Ă©tablir et gĂ©rer une liaison permanente entre la Maison-CarrĂ©e et ce qui Ă©tait appelĂ© Ă  l'Ă©poque "HĂŽpital du Dey"[90]. Il s'agit lĂ  de la toute premiĂšre liaison rĂ©guliĂšre de transport public entre le lieu-dit Maison-CarrĂ©e et la ville d'Alger, et on peut tirer certaines informations intĂ©ressantes de l'annonce faite Ă  l'Ă©poque dans la presse par l'initiateur du projet : « Les voies de communications rayonnant d'Alger sur les communes et sur les admirables campagnes qui l'entourent ont, jusqu'Ă  ce jour, Ă©tĂ© desservies par des voitures incommodes et que le peu de soin apportĂ© Ă  leur construction, la maladresse et l'incurie de leurs conducteurs, presque toujours grossiers et adonnĂ©s Ă  la boisson, rend dangereuses, ainsi qu'il rĂ©sulte des frĂ©quents accidents arrivĂ©s aux voyageurs, [
] carrioles peu solides, mal suspendues, mal entretenues, ouvertes Ă  tous vents ; mais il est temps de songer Ă  doter la capitale de l'AlgĂ©rie d'Omnibus Ă  l'instar de ceux de Paris, c'est-Ă -dire de voitures rĂ©unissant Ă  la soliditĂ© qui fait la sĂ©curitĂ© des voyageurs, l'Ă©lĂ©gance et le confortable rĂ©clamĂ©s par les classes aisĂ©es du pays et les nombreux Ă©trangers qui viennent le visiter. PersuadĂ©s que remplir une semblable lacune, ce serait Ă  la fois servir la population et crĂ©er une nouvelle source de produits pour les capitaux qui commencent Ă  affluer Ă  Alger, nous avons conçu le projet de fonder en commandite un service d'omnibus qui, partant de l'hĂŽpital du Dey (route de la Pointe Pescade), de 20 minutes en 20 minutes, desserviraient Alger, l'Agha, les deux Mustapha et la Maison-CarrĂ©e, en passant par le Jardin-d'Essai et Hussein-Dey. Ces voitures seraient au nombre de douze, construites en France sur le modĂšle le plus nouveau de Paris, Ă  stalles et pouvant contenir commodĂ©ment douze voyageurs. Chaque voiture aura son conducteur et son cocher en livrĂ©e ; elles seront convenablement relayĂ©es, et feront, en 14 heures de marche et partant du siĂšge de l'administration, un total de 278 voyages par jour. AprĂšs avoir envisagĂ© ce projet sous le point de vue de l'utilitĂ© publique, premiĂšre condition de succĂšs dans toutes les entreprises de ce genre, nous avons dĂ» l'examiner en dĂ©tail sous le rapport des bĂ©nĂ©fices prĂ©sumĂ©s qu'il pouvait offrir aux actionnaires. À cet Ă©gard, la premiĂšre chose Ă  faire, c'Ă©tait de savoir le nombre approximatif des voyageurs parcourant la banlieue. Or, des renseignements administratifs certains, que justifient nos propres observations, nous ont convaincus que le mouvement de la population, dans un rayon de 4 Ă  5 kilomĂštres d'Alger, occupait journellement 160 voitures, et que la masse brute des recettes de ces voilures dĂ©passait, par jour, 3.000 fr. dont un tiers peut ĂȘtre hardiment imputĂ© au bĂ©nĂ©fice des entrepreneurs »[91].

(septembre) - La presse coloniale rapporte : « Le prĂ©jugĂ© des indigĂšnes, qui croient que la peste est annoncĂ©e par les apparitions de sauterelles sahariennes, parait s'ĂȘtre communiquĂ© aux EuropĂ©ens. Du moins, parmi ceux-ci, le bruit a couru plus d'une fois, depuis trois mois, que ce flĂ©au sĂ©vissait tantĂŽt sur un point, tantĂŽt sur un autre. Bien que ces bruits se soient toujours trouvĂ©s sans fondement, ils ne laissent pas de se reproduire. Ainsi, on prĂ©tendait ces jours-ci que la peste Ă©tait Ă  la Maison-CarrĂ©e, assertion qui ne reposait absolument sur rien. [
] En dĂ©mentant de la - maniĂšre la plus formelle ce qui a Ă©tĂ© dit relativement Ă  la Maison-CarrĂ©e, nous ajouterons que jusqu'au moment oĂč nous Ă©crivons la santĂ© publique est trĂšs-satisfaisante, mĂȘme sous le rapport des maladies qui rĂšgnent habituellement Ă  cette Ă©poque de l'annĂ©e »[92].

(6 novembre) - Un important incendie Ă©clate dans les forĂȘts et broussailles qui vont des alentours immĂ©diats du fort de la Maison-CarrĂ©e jusqu'Ă  ce qui Ă©tait nommĂ© Haouche Ben-Selama. Les autoritĂ©s militaires françaises immĂ©diatement accuser les indigĂšnes (alors mĂȘmes que ceux-ci avaient perdus deux meules dans l'incident). Mais, une enquĂȘte va par la suite Ă©tablir que c'Ă©tait des charbonniers italiens et maltais qui Ă©taient Ă  l'origine du feu.

1846

(18 mai) - Article de presse[93] : « Notre premier soin, ne le perdons jamais de vue, doit ĂȘtre de nous Ă©tablir sĂ»rement, solidement et dĂ©finitivement en Afrique ; pour cela nous ne devons rien nĂ©gliger ; or, comme nous ne pouvons arriver Ă  ce but que par des Ă©migrations europĂ©ennes, et surtout, disons-le encore, par des Ă©migrations françaises, ce sont les colons europĂ©ens qui doivent ĂȘtre d'abord l'objet de toute notre sollicitude et non pas des indigĂšnes qui ne comprennent pas ce que nous faisons pour eux et qui n'ont rĂ©pondu jusqu'Ă  prĂ©sent Ă  toutes nos avances que par des trahisons multipliĂ©es ou par l'indiffĂ©rence la plus profonde, Ă  tel point qu'aux environs immĂ©diats d'Alger, les Hadjoutes, les Krachna, les Beni-Khelill les Beni-Moussa et -ce qui est bien plus frappant encore- les Aribs qui ont plantĂ© leurs tentes autour de la Maison-CarrĂ©e Ă  une heure de distance de la porte Bab-Azzoun, et qui viennent chaque jour au marchĂ© de la ville, sont encore exactement aujourd'hui ce qu'ils Ă©taient il y a quinze ans. Et ce fait s'est rĂ©pĂ©tĂ© sur tous les points du territoire, sauf quelques exceptions individuelles qui ne changent rien aux conclusions que l'on en doit tirer. Ne comptons donc pas sur l'Ă©lĂ©ment indigĂšne, nous ne devons rien en attendre d'ici Ă  un laps de temps qui sera nĂ©cessairement fort long, mais comptons seulement sur l'Ă©lĂ©ment europĂ©en, qui seul peut assurer notre domination et nous indemniser de nos sacrifices -nous n'aurons pas de trop de toutes nos ressources pour l'encourager et le favoriser. Plus tard, quand nous aurons pris possession de la terre d'une maniĂšre irrĂ©vocable, quand nous pourrons ĂȘtre certains de l'avenir, alors nous nous occuperons des Arabes. Jusque-lĂ , bornons-nous Ă  leur donner protection et justice ; soumettons-les Ă  une police vigilante et cherchons encore si l'on veut, Ă  agir sur l'enfance par l'Ă©ducation, mais n'allons pas plus loin ; nous ne leur devons pas davantage et toute autre conduite serait de la niaiserie politique. Si nous pouvons obtenir leur neutralitĂ©, nous aurons dĂ©jĂ  beaucoup fait, et nous devrons nous en estimer trĂšs heureux ».

() – Une violente crue de l'oued El-Harrach provoque de grosses inondations Ă  Maison-CarrĂ©e. Le reporter d'un journal colonial nous raconte le drame : « Les eaux couvraient tout le terrain compris entre les collines du Sahel, celle oĂč est assise la Maison CarrĂ©e et toute l'Ă©tendue de la plaine que l'Ɠil peut embrasser jusqu'au monticule de la ferme d'Oulid Adda. Vers 9h, l'inondation Ă©tait dans toute son Ă©tendue et grossissait encore quoi que l'eau s'Ă©coulĂąt avec une fureur et une rapiditĂ© effrayantes »[94]. L'article prĂ©cise que sept des onze maisons qui constituaient le hameau Ă  cette date avaient disparu dans la matinĂ©e, et qu’elles furent suivies d’une auberge nommĂ©e « La Nouvelle France » qui engloutit Ă  elle seule une dizaine de personnes. Au total, il y eut 23 morts parmi les habitants et la situation Ă©tait telle que le village aurait pu ne plus exister.

Tout Ă©tait Ă  refaire.

1846-1868 : un nouveau départ

1847

(8 avril) - AprĂšs de longues nĂ©gociations avec les Français, on annonce la reddition dĂ©finitive de Ahmed Ben-Salem, ancien khalifa d'Abdelkader pour le Sebaou qui s'Ă©tait retranchĂ© en Kabylie depuis la dĂ©faite et la reddition de l'Emir. Il est accueilli officiellement en ce jour par les autoritĂ©s coloniales dans le bordj de la Maison-CarrĂ©e oĂč il reçoit les honneurs militaires[95].

1848

(9 décembre) - Création officielle du "Département d'Alger", regroupant alors toute la partie centrale de l'Algérie.

1849

1850

Quatre années aprÚs la destruction quasi totale de la premiÚre installation de colons européens sur le site de Maison-Carrée, les quelques rescapés de la catastrophe de 1846 vivaient dans la plus grande misÚre, tandis que quatre familles espagnoles nouvellement arrivées de Mahon (Baléares) sont venues se joindre à eux. En guise d'aide, les autorités coloniales leur construisent un petit nombre de nouvelles maisons à titre gracieux, relançant ainsi le noyau du village.

1851

Plan (av. 1851) du domaine de la Rassauta et des territoires dépendants (Fort-de-l'Eau, Maison-Blanche, les Aribs), à l'exception de Maison-Carrée qui ne lui était pas encore attachée.

(22 août) - Par décret présidentiel daté de ce jour, le modeste hameau de Maison-Carrée est érigé en section administrative.

Il s'agit lĂ  de l'acte de naissance officiel de la future ville de Maison-CarrĂ©e. En mĂȘme temps, le dĂ©cret proclame le rattachement de Maison-CarrĂ©e (dĂ©pendant jusque-lĂ  de la commune d'Hussein Dey) Ă  la commune de plein exercice de la Rassauta qu'on venait aussi de crĂ©er[96] avec un certain François Trottier pour tout premier maire. Selon les registres de l'administration coloniale, le hameau et ses alentours comptaient Ă  cette date 26 maisons (valant 92 000 francs d'Ă©poque), 11 hangars, 20 Ă©curies ou Ă©tables, 8 greniers ou silos et 20 puits (d'une valeur de 26 150 francs). On y entretenait 38 chevaux, 18 mulets, 2 Ăąnes, 213 bƓufs, 107 vaches, 10 chĂšvres, 41 moutons et 97 porcs. Les fermes, qui totalisaient 1 383 hectares de concessions et 7 665 arbres plantĂ©s, Ă©taient Ă©quipĂ©es de 36 charrues, 27 voitures et 8 tombereaux.

Pour ce qui est de la Rassauta, c'Ă©tait un Ă©tablissement colonial totalement artificiel et plutĂŽt improvisĂ©. L'idĂ©e des autoritĂ©s Ă©tait alors de rĂ©unir trois secteurs jusque-lĂ  distincts en une seule entitĂ© administrative : 1) le hameau de Maison-CarrĂ©e Ă  l'extrĂȘme Ouest du territoire et avec la rive droite de oued l'Harrach pour limite ; 2) le hameau de Fort-de-l'Eau (51 maisons) sur la cĂŽte ; et, enfin, ce qui Ă©tait proprement appelĂ© Ă  l'Ă©poque 3) « Concessions de la Rassauta », soit une sĂ©rie de fermes et de maisons Ă©talĂ©es sur environ 8 kilomĂštres (depuis Fort-de-l'Eau Ă  l'Ouest jusqu'au Haouch El-Merdja Ă  l'Est), crĂ©Ă© en 1835 par l'attribution d'un immense domaine de 3 000 hectares au prince polonais Sviatopolk de Mir-Misky. L'affaire du prince n'ayant pas rĂ©ussi, il rĂ©trocĂ©da la propriĂ©tĂ© en 1844 Ă  un comte espagnol qui se retirera Ă  son tour l'annĂ©e d'aprĂšs. La rĂ©organisation administrative de 1851 avait donc pour but de redonner vie Ă  ce projet de colonisation officielle, mais l'affaire semblait Ă  jamais marquĂ©e par l'improvisation : au moment de la crĂ©ation de la commune, le site de la Rassauta n'Ă©tait encore qu'une ferme et on se rĂ©signa Ă  installer provisoirement son centre administratif de la nouvelle commune hors de son territoire, Ă  Hussein-Dey. Ce provisoire dura un moment, le chef-lieu fut d'abord transfĂ©rĂ© vers le hameau de Maison-Blanche (act. Dar El-BeĂŻda), ensuite vers celui du Retour-de-la-Chasse (act. Bab-Ezzouar), toujours Ă  titre temporaire. Pour finir, le chef-lieu sera Ă©tabli Ă  Maison-CarrĂ©e (act. El-Harrach) une dizaine d'annĂ©es plus tard et, prenant dĂ©finitivement acte de l'Ă©chec du centre de colonisation de la Rassauta, elle sera officiellement rebaptisĂ©e commune de Maison-CarrĂ©e.

(2 décembre) - Un coup d'Etat est mené en France par le prince-président Louis-Napoléon Bonaparte, qui abolit la IIe République et se proclame empereur sous le nom de Napoléon III.

Dans les jours qui suivent ce coup de force, plusieurs centaines d'opposants au nouveau rĂ©gime sont arrĂȘtĂ©s en France, notamment les rĂ©publicains et hommes de gauche, et seront par la suite massivement transfĂ©rĂ©s vers le bordj de Maison-CarrĂ©e[97] qui se transforme ainsi en bagne pour prisonniers politiques.

1852

(18 janvier) - On signale la présence d'une panthÚre avec ses deux petits dans les broussailles qui s'étendent sur les deux bords de oued l'Harrach, entre la ferme Ouali-Dada à Maison-Carrée et le Gué-de-Constantine. Une battue est organisée en ce jour par les autorités locales afin de chasser le fauve[98].

1853

1854

1855

(9 juillet) - Par arrĂȘtĂ© du ministĂšre français de la guerre[99], le vieux bordj de la Maison-CarrĂ©e cesse de servir Ă  la garnison et se voit transformĂ© en prison exclusivement destinĂ©e aux « indigĂšnes » algĂ©riens.

Selon le document, la mesure intervient sur proposition du Gouverneur Général de l'Algérie et était motivée par le fait que les centres pénitenciers du Sud de la France étaient saturés et qu'ils ne pouvaient plus recevoir les condamnés algériens qui étaient jusqu'alors transférés en France. Les bùtiments de l'ancien fort (déjà désaffecté depuis quelque temps et n'abritaient donc plus de troupes) sont ainsi transformés "provisoirement" en Maison centrale de l'Harrach, réservée aux individus algériens des deux sexes qui sont condamnés aux peines de réclusion, de travaux-forcés ainsi qu'aux peines correctionnelles supérieures à une année[100].

L'Ă©tablissement pĂ©nitencier ainsi crĂ©Ă© fut amĂ©nagĂ© pour accueillir 500 prisonniers. Il en comptait dĂ©jĂ  300 Ă  son ouverture[101], et il Ă©tait soumis Ă  la mĂȘme rĂ©glementation que les "maisons centrales" qui existaient alors en territoire français, Ă  la diffĂ©rence qu'il demeurait sous la juridiction du Ministre de la guerre qui en nommait le directeur et en rĂ©glait le budget. Il est donc clair que, aux yeux des contemporains, le bordj demeurait une installation militaire et que son affectation Ă  cet usage civil n'Ă©tait en principe que temporaire, mais qui durera finalement prĂšs de 60 ans.

((31 décembre) - On compte officiellement à cette date 310 habitants sur le territoire de Maison-Carrée, tous européens. Sur ce total, 60 personnes vivaient dans le village proprement dit, tandis que les 250 restants se répartissaient sur les diverses fermes et maisons isolées des alentours[102].

1856

() - La presse[103] signale un dĂ©bordement des eaux de l'Harrach Ă  la suite d'une violente tempĂȘte.

() - Remaniement du territoire de la commune de la Rassauta par l'administration coloniale.

La commune comprend dĂ©sormais « le territoire de la Rassauta proprement dit et ceux du Fort-de-l'Eau, de la Maison-CarrĂ©e avec la Maison-Blanche, d'AĂŻn-Taya avec AĂŻn-BeĂŻda, Rouiba avec Matifoux, qui forment quatre sections de commune. La commune de la Rassauta est dĂ©limitĂ©e de la maniĂšre suivante : Au NORD, la mer depuis l'embouchure de Oued El-Harrach jusqu'Ă  l'embouchure de Oued ReghaĂŻa. À l'EST, l'Oued ReghaĂŻa qu'on remonte jusqu'Ă  l'endroit oĂč il reçoit l'Oued El-Biar [...]. Au SUD l'ancienne route d'Alger et de Dellys jusqu'Ă  sa rencontre avec l'Oued Khemis, qu'on remonte jusqu'Ă  un petit chemin conduisant Ă  la route d'Alger au Fondouk, et de ce dernier chemin jusqu'Ă  son embranchement avec celui d'Alger Ă  l'Arba. À l'OUEST, le chemin de l'Arba Ă  Alger, qu'on parcourt du S. au N. jusqu'Ă  sa rencontre avec l'Oued El-Harrach qu'on descend jusqu'Ă  son embouchure, point de dĂ©part »[104]. Ce rĂ©amĂ©nagement maintenait la limite Ouest de la commune de la Rassauta avec celle d'Hussein Dey le long de l'oued El-Harrach, ce qui faisait dĂ©pendre la rive droite de Maison-CarrĂ©e et sa rive gauche de deux circonscriptions diffĂ©rentes. De son cĂŽtĂ© Est, la limite de la section de Maison-CarrĂ©e (le hameau comptait 65 habitants Ă  cette date) Ă©tait fixĂ©e par ce qui Ă©tait appelĂ© Haouch Tamaris (du cĂŽtĂ© Nord de la RN5 jusqu'Ă  la mer) limitrophe de la section de Fort-de-l'Eau, et par Haouch el-Aliya (au Sud de la RN5) et Haouch Ben Hamida (tout au Sud) qui jouxtaient la section de Maison-Blanche.

1857

Toile intitulĂ©e "Les Filles de la CharitĂ©" du peintre Armand Gautier (1825-1894). fondĂ©e en France au XVIIe siĂšcle, la congrĂ©gation catholique des Filles de la CharitĂ© de St Vincent-de-Paul Ă©tait Ă©tablie Ă  Alger depuis 1842, oĂč ses 52 nones assuraient des soins dans les hospices publics et crĂ©Ăšrent des salles d’asile et des salles d'Ă©cole gratuites comme Ă  Maison-CarrĂ©e en 1860.

(janvier) - Pour subvenir Ă  certains besoins du pĂ©nitencier de la Maison-CarrĂ©e, l'administration fait appel aux SƓurs de la CharitĂ© de St. Vincent-de-Paul dont l'ordre Ă©tait installĂ© Ă  Alger depuis 1842, et Ă  qui furent confiĂ©s la cuisine, la lingerie et l'infirmerie de la prison. Un prĂȘtre, l'abbĂ© Brissonet, leur fut aussi adjoint pour assurer le service religieux (et assurait en mĂȘme temps le service pour les hameaux de Maison-Blanche, Houche-Hamidi et RouĂŻba), ce qui justifia la fondation d'une paroisse sur les lieux[105] alors que le hameau de Maison-CarrĂ©e Ă©tait encore trĂšs peu habitĂ© Ă  l'Ă©poque.

InstallĂ©es donc Ă  Maison-CarrĂ©e, les religieuses furent logĂ©es au dĂ©part au premier Ă©tage de l'angle S.-O. du bordj et leur chapelle (installĂ©e dans un couloir sĂ©parant leur logement de celui du curĂ©) devint automatiquement l'Ă©glise paroissiale sous le nom de St George. Pour sa part, le logement du curĂ© (situĂ© au-dessus de la porte principale du fort qui donnait sur la route) va servir de presbytĂšre (jusqu'en 1877). Quelques annĂ©es plus tard, alors que la localitĂ© commençait peu Ă  peu Ă  prendre forme, la petite chapelle ne paraissait plus adĂ©quate et l'on peut lire dans le compte-rendu des dĂ©libĂ©rations du Conseil Municipal du le vƓux de faire construire une vĂ©ritable Ă©glise paroissiale Ă  Maison-CarrĂ©e, Ă©voquant la promiscuitĂ© des lieux et la gĂȘne que cela occasionne, particuliĂšrement lors des enterrements oĂč il faut porter les cercueils « perpendiculairement pour franchir l'escalier Ă©troit et tortueux qui mĂšne Ă  la chapelle » et les mĂ©saventures que cela avait occasionnĂ© sur quelques cadavres[106]. Il faudra, toutefois, attendre plus d'une dĂ©cennie avant de voir ce vƓu se rĂ©aliser.

1858

Le village de Maison-CarrĂ©e compte Ă  cette date 363 habitants, tous europĂ©ens, parmi lesquels 108 espagnols. La population algĂ©rienne Ă©tait encore inexistante dans le village Ă  cette Ă©poque, mais on compte dĂ©jĂ  prĂšs de 800 indigĂšnes travaillant dans les nombreuses fermes et plantations coloniales du canton[107].

(1er février) - Madelaine Pons, fille d'un journalier, est la plus ancienne naissance conservée pour l'état-civil de Maison-Carrée.

- Un auteur français [108] Ă©voque en dĂ©crivant la rĂ©gion d'Alger « La Maison CarrĂ©e (en arabe Bordj el H’arrach) oĂč l’on passe l’Harrach sur un pont turc restaurĂ© et agrandi, et que domine le grand Ă©difice qui lui a donnĂ© son nom, ancien fort devenu un pĂ©nitencier pour les condamnĂ©s indigĂšnes ». En faut, jusque-lĂ  rĂ©servĂ©e aux condamnĂ©s algĂ©riens de droit commun, la prison maison-carĂ©enne allait bientĂŽt s'ouvrir aux prisonniers europĂ©ens et accueillera, dans les annĂ©es Ă  suivre, l'essentiel des opposants politiques au rĂ©gime de NapolĂ©on III et deviendra le plus cĂ©lĂšbre des bagnes français sous le IIe Empire.

1859

(23 novembre) - Sous l'effet de pluies torrentielles survenues dans la nuit, oued l'Harrach et ses affluents débordent de leurs lits et provoquent d'importantes inondations dans toute la partie centrale de la Mitidja.

Toutefois, le village de Maison-Carrée s'en est tiré sans grands dégùts cette fois-ci, si ce n'est la frayeur des habitants dont la mémoire était encore traumatisée par la catastrophe de 1846. ConcrÚtement, c'est surtout ce qui était nommé Haouche Baraki qui a le plus souffert de ces inondations[109].

1860

(Printemps) - Création de la toute premiÚre salle d'école dans l'histoire de Maison-Carrée.

Ce fut l'Ɠuvre du curĂ© du village, l'abbĂ© Brissonet, qui -juste avant de quitter la ville en ce dĂ©but d'annĂ©e- parvint Ă  mettre en place une modeste salle de classe, avec l'aide des SƓurs de St. Vincent et en faisant appel Ă  la charitĂ© privĂ©e. Le Conseil municipal de Maison-CarrĂ©e se fĂ©licita de l'initiative et s'empressa de voter un budget pour l'entretien de l'institutrice, une religieuse appelĂ©e SƓur CouturiĂ©, et qui restera finalement en place jusqu'en 1900, soit prĂšs de quarante ans. Le bĂątiment de ce premier Ă©tablissement scolaire (situĂ© en contrebas de l'actuel lycĂ©e Ourdida Meddad d'El-Harrach et qu'on appelait "École des SƓurs") subsistera jusqu'aux premiĂšres annĂ©es de l'indĂ©pendance algĂ©rienne en 1962. Il abrite de nos jours un Ă©tablissement spĂ©cialisĂ© dans l'enseignement aux jeunes sourds-muets.

- L'abbé Calvet devient curé de l'église de Maison-Carrée. Il restera en poste plus de 14 ans.

(18 septembre) - L'empereur Napoléon III visite pour la deuxiÚme fois l'Algérie.

Accompagné de son épouse l'impératrice Eugénie, il passe cette journée à Maison-Carrée ou de grandes festivités sont organisées par les autorités coloniales en leur honneur, notamment une frande fantasia de cavaliers des diverses tribus de la région.

1861

(9 janvier) - Un débordent de l'Harrach provoque d'importantes inondations à travers la Mitidja, et tout particuliÚrement à Maison-Carrée.

La presse algĂ©roise [110] rapporte Ă  ce sujet : « La Mitidja n'est plus qu'un vaste lac. La premiĂšre nouvelle du dĂ©sastre nous a Ă©tĂ© donnĂ©e hier par un de nos abonnĂ©s. Parti d'Alger Ă  11h pour se rendre Ă  la Rassauta, il dut s'arrĂȘter au pont de l'Harrach qu'il ne put franchir. Le village de la Maison-CarrĂ©e Ă©tait submergĂ© ; plusieurs habitants avaient dĂ» abandonner leurs demeures et se rĂ©fugier dans le fort. Depuis ce matin, l'Harrach ne cessait de charrier des matĂ©riaux de toutes sortes, tels que madriers, poutres, planches ... etc. Des ponts entiers, appartenant Ă  des particuliers, avaient Ă©tĂ© enlevĂ©s et Ă©taient venus se briser contre les arcades du pont dit Romain. Des bƓufs, des moutons et des amas considĂ©rables de foin et de paille, provenant de meules enlevĂ©es par les eaux, ont Ă©tĂ© entraĂźnĂ©s vers la mer. La diligence venant de l'Arbah a dĂ» rĂ©trograder Ă  la hauteur de la propriĂ©tĂ© Gimbert. À ces dĂ©tails, nous ajouterons les suivants, fournis par des tĂ©moins oculaires : c'est Ă  7h30 du matin que la crue des eaux a commencĂ© Ă  se faire sentir hier, Ă  la Maison-CarrĂ©e. Cependant la circulation a Ă©tĂ© possible jusqu'Ă  2h de l'aprĂšs-midi. L'inondation a atteint sa plus grande violence entre minuit et 3h du matin, et c'est seulement Ă  partir de 6h de la matinĂ©e d'aujourd'hui qu'elle a commencĂ© Ă  dĂ©croĂźtre. L'eau est montĂ©e jusqu'Ă  un 1,50 m dans les maisons situĂ©es dans la partie basse du village, et jusqu'Ă  20 cm dans l'auberge du Vieux-Sergent, placĂ©e sur la hauteur. Les habitations qui ont le plus souffert sont celles sieur Bose, forgeron, et de madame Juane Gomila, qui tenait un cafĂ© Ă  l'entrĂ©e du village Ă  droite. À 3h, aujourd'hui, quelques Arabes ont traversĂ© Ă  guĂ© le bas du village et la route de l'Arbah ; les voitures ont commencĂ© Ă  passer Ă  4h30 ».

(9 avril) - Sous le titre de "TrĂ©sor Ă  Maison-CarrĂ©e", la presse algĂ©roise[111] rapporte : « Une nouvelle curieuse, s'est rĂ©pandue ces jours-ci a Alger. On prĂ©tend que peu aprĂšs la prise d'Alger, le chef des janissaires casernĂ©s Ă  la Maison-CarrĂ©e serait parti pour la Tunisie aprĂšs avoir enfoui sous la porte du bordj une somme de quatre millions de francs. Il y a six ans environ, un Arabe qui connaissait le secret de la cachette vint s'assurer que rien n'y avait Ă©tĂ© dĂ©rangĂ©, puis il repartit pour Tunis sans parler de l'affaire a personne. Cet Arabe est mort depuis, mais avant de mourir il a confiĂ© le secret Ă  un habitant de Tunis. Celui-ci est arrivĂ©, il y a quelque temps, Ă  Alger. Il a commencĂ© par reconnaĂźtre que la cachette Ă©tait intacte et telle qu'on la lui avait dĂ©crite. Puis il est allĂ© faire une dĂ©claration Ă  l'autoritĂ© française en rĂ©clamant la moitiĂ© des sommes qui seraient dĂ©couvertes sur ses indications ; on la lui a promise ; on a formĂ© une commission d'employĂ©s de l'intendance militaire et des domaines, et tout le monde est parti pour la Maison-CarrĂ©e. On va faire les fouilles nĂ©cessaires. Aboutiront-elles Ă  quelque rĂ©sultat ? Nous le souhaitons, mais nous ne pouvons nous empĂȘcher d'ĂȘtre un peu incrĂ©dules, tant d'espoir de dĂ©couvertes semblables s'est souvent trouvĂ© vain depuis notre arrivĂ©e en AlgĂ©rie ».

(30 juin) - Un dénombrement de la population du département d'Alger compte un total de 5.127 habitants (2.660 européens et 2.467 indigÚnes) sur le territoire de la commune de la Rassauta, dont 1.295 (641 européens et 654 indigÚnes) dans la section de commune de Maison-Carrée seule[112].

(8 aoĂ»t) - À la suite d'un changement de rĂ©sidence, le maire François Trottier dĂ©missionne de son poste dans la commune de la Rassauta, et laisse la place Ă  Aristide Tisserand qui Ă©tait jusque-lĂ  adjoint au maire pour la section de Maison-CarrĂ©e[113].

(22 août) - Par décret impérial, le hameau de Maison-Carrée est officiellement érigé en centre-annexe de la commune de la Ressauta.

Le mĂȘme texte fixe le conseil municipal de la commune de la Rassauta Ă  11 personnes (4 français, 2 Ă©trangers europĂ©ens et 1 indigĂšne musulman) en plus du maire et de trois adjoints (1 pour le chef-lieu, 1 pour la section de Maison-CarrĂ©e et 1 pour celle de Fort-de-l'Eau).

A cette date, le petit village de Maison-CarrĂ©e comptait une population -encore exclusivement europĂ©enne- de 216 habitants.

(25 dĂ©cembre) - À la suite du remaniement administratif effectuĂ© en aoĂ»t, un arrĂȘtĂ© de la prĂ©fecture d'Alger[114] dĂ©signe un nouveau conseil municipal pour la commune de la Rassauta.

Est ainsi nommĂ© maire le colon Alexandre Van-Maseyk, alors qu'Adolphe Cordier est dĂ©signĂ© maire-adjoint pour la section de Maison-CarrĂ©e oĂč tous les deux ont d'importantes propriĂ©tĂ©s. Les autres membres du conseil sont tout simplement reconduit, Ă  savoir : Charles Mauge comme maire-adjoint pour la section de Fort-de-L'Eau ; les propriĂ©taires Jacques-Eustaches Aumont, Alexandre Boulanger, Pierre Valentin et Onesyme Pasquier comme conseillers municipaux français ; Segui Ramon et M. Juanico comme conseillers europĂ©ens Ă©trangers et enfin un agriculteur nommĂ© Mohamed b. Ali comme conseiller indigĂšne musulman.

1862

(3 avril) - Un arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral datĂ© de ce jour autorise un certain "Jean Michel Ă  Ă©tablir une briqueterie Ă  deux fours, sur un terrain de la propriĂ©tĂ© Dupy, au lieu-dit Haouche CaĂŻd-Ahmed prĂšs de la Maison-CarrĂ©e, commune de Kouba"[115].

(mai) - Un marché hebdomadaire aux bestiaux est officiellement crée à Maison-Carrée.

InstituĂ© par un arrĂȘtĂ© de la PrĂ©fecture d'Alger, le marchĂ© fut initialement lancĂ© pour la journĂ©e de Jeudi de chaque semaine, avant qu'un deuxiĂšme dĂ©cision prĂ©fectorale ne le transfĂšre vers le Vendredi Ă  partir de dĂ©cembre 1862[116]. Depuis lors, appelĂ© communĂ©ment par les algĂ©riens SĂ»q el-MĂąl ("MarchĂ© aux Bestiaux"), SĂ»q el-Djem'Ăą ("MarchĂ© du Vendredi") ou simplement SĂ»q El-HarrĂąch ("MarchĂ© de Maison-CarrĂ©e"), le marchĂ© -idĂ©alement situĂ© sur la route d'Alger Ă  l'Ă©poque- connaĂźtra trĂšs rapidement le grand succĂšs pour devenir, 20 annĂ©es, plus tard le plus grand marchĂ© d'AlgĂ©rie et un des plus importants de toute l'Afrique du Nord.

() - Inauguration officielle de la ligne ferroviaire Alger-Blida, la toute premiÚre infrastructure de chemin de fer dans l'histoire de l'Algérie[117].

ProjetĂ©e par les autoritĂ©s coloniales dĂšs 1844[118], cette liaison avec Blida est approuvĂ© par le Conseil gĂ©nĂ©ral de la province d'Alger en mars 1847 dans le cadre d'une ligne Alger-Oran dont elle devait ĂȘtre la premiĂšre Ă©tape. Les travaux commencent en mai 1858, sur un tracĂ© qui fut Ă©tabli sur la base du moindre coĂ»t possible, ce qui imposa le choix du passage par Maison-CarrĂ©e, seul point de transit commode vers la Mitidja en venant d'Alger car il permettait aux ingĂ©nieurs d'Ă©viter les collines du Sahel. Une fois les premiers travaux de terrassement achevĂ©s par des unitĂ©s de l'armĂ©e française, la rĂ©alisation de la ligne est confiĂ©e Ă  la sociĂ©tĂ© concessionnaire PLM (Paris-Lyon-MĂ©diterranĂ©e) qui fut sĂ©lectionnĂ©e, parmi les six compagnies ferroviaires françaises de l'Ă©poque, du fait qu'elle Ă©tait la plus proche gĂ©ographiquement de l’AlgĂ©rie et, de ce fait, le type de voie ferrĂ©e de cette premiĂšre ligne algĂ©rienne sera la voie large qui Ă©tait celui de la ligne Paris-Marseille, alors que tandis que les gares Ă©taient bĂąties selon le modĂšle adoptĂ© pour la Bourgogne. À Maison-CarrĂ©e, cette premiĂšre gare restera en activitĂ© jusqu'Ă  la fin des annĂ©es 1980, avant d'ĂȘtre dĂ©molie dans le cadre d'un grand programme de modernisation des chemins de fer par le gouvernement algĂ©rien et remplacĂ©e par la gare actuelle de la SNTF d'El-Harrach.

1863

(31 juillet) - Alexandre Van-Masseyk, maire de la Ressauta et grand propriétaire terrien à Maison-Carrée et sa la région, est nommé au conseil général de la province d'Alger en remplacement d'un certain M. Martin démissionnaire[119]. Son mandat devait courir jusqu'en 1866.

- Mise en service du Moulin Sainte-Corinne à Maison-Carrée.

ÉrigĂ© sur la rive gauche de oued l'Harrach (le quartier qui existe sur les lieux de nos jours se dit encore Sinkouri en langage populaire) par un colon français du nom de Depuis, cette petite usine est la plus ancienne minoterie de Maison-CarrĂ©e et, en mĂȘme temps, la toute premiĂšre source d’électricitĂ© que connut la localitĂ©. RachetĂ©e en 1873 par Marius de Soliers (dit aussi Dessoliers)[120], elle restera encore fournisseur exclusif de Maison-CarrĂ©e en Ă©lectricitĂ© jusqu'en , date Ă  laquelle la concession sera transfĂ©rĂ©e Ă  la SociĂ©tĂ© AlgĂ©rienne d’Éclairage & de Force pour une durĂ©e de 30 ans.

1864

1865

Selon un dĂ©nombrement, la population du canton de Maison-CarrĂ©e (annexe de la commune de la Rassauta), se chiffre cette annĂ©e Ă  1 659 habitants[121].

() - TrÚs tÎt le matin, on signale un tremblement de terre à Maison-Carrée et ses alentours[122].

() - Menant une visite officielle en AlgĂ©rie, l’empereur NapolĂ©on III fait une halte en ce jour dans le village de Maison-CarrĂ©e. Ainsi, dĂšs que le cortĂšge impĂ©rial traverse le pont de l'Harrach, il est accueilli sur la rive droite par Aexandre Van-Maseyk[123], maire de la Rassauta, qui fit une allocution Ă  cette occasion. Le cortĂšge prend ensuite le chemin de l’Est et passe par l'ancien fort de Maison-CarrĂ©e qui abritait alors la prison. À ce moment prĂ©cis, l'empereur aurait Ă©tĂ© interpellĂ© par une femme algĂ©rienne qui demanda grĂące pour son fils emprisonnĂ© et qui lui fut accordĂ©e.

1866

(25 avril) - On signale une importante invasion de sauterelles à Maison-Carrée et ses alentours[124]. La propriété d'un certain M. Cauday fut particuliÚrement touchée, et les autorités mettent à sa disposition 100 détenus de la prison de l'Harrach pour essayer chasser les insectes nuisibles.

(22 août) - Alexandre Van-Masseyk est reconduit pour un nouveau mandat de conseiller général de la province d'Alger pour le compte de la circonscription de la Rassauta (dont faisait partie Maison-Carrée) dont il était encore le maire[125].

1867

() - Création d'un poste d'interprÚte au pénitencier de la Maison Centrale de l'Harrach à Maison-Carrée[126].

() - Tenue du premier « Conseil de Fabrique » de Maison-Carrée. La réunion eut lieu au presbytÚre du village en présence de son premier président, Adolphe Cordier, et des membres fondateurs Van-Maseyk, Gimbert et le Comte de la VilliÚre qui possédaient à eux quatre toutes les propriétés de la commune à cette époque.

1868

La population du village de Maison-Carrée dépasse le seuil de 1 000 habitants.

1869-1882 : une petite ville en plein essor

La fin des annĂ©es 1860 marque un vĂ©ritable essor dĂ©mographique pour la petite localitĂ© de Maison-CarrĂ©e, essentiellement par l'afflux de nouveaux colons catalans et mahonnais. Le petit hameau passe ainsi d'environ 200 habitants Ă  plus d'un millier en 1868, alors que sur l'ensemble du territoire communal de la Rassauta le nombre des habitants stagnait Ă  1 690. Cette Ă©volution rapide de Maison-CarrĂ©e fut aussi renforcĂ©e par un certain essor Ă©conomique, essentiellement dĂ» Ă  lĂ  la crĂ©ation du marchĂ© aux bestiaux et Ă  la construction du chemin de fer.

Tout cela contrastait avec l'Ă©chec du centre de colonisation officiel qu'Ă©tait censĂ©e ĂȘtre la Rassauta. Misant sur les terres fertiles de cette zone, le rattachement du petit hameau de Maison-CarrĂ©e (qui dĂ©pendait jusqu'alors d'Hussein-Dey) comme annexe Ă  la Rassauta lorsque celle-ci fut promue en commune de plein exercice en 1856 s'inscrivait dans cette mĂȘme dĂ©marche. Mais, Ă  la fin des annĂ©es 1860, l'administration coloniale constatera dĂ©finitivement l'Ă©chec du projet de la Rassauta et, prenant acte du fait que le site de Maison-CarrĂ©e abritait prĂšs de 80 % de la population europĂ©enne de la commune, dĂ©cidera d'y transfĂ©rer officiellement et le chef-lieu de la circonscription.

1869

(31 juillet) - Alexandre Van-Masseyk, maire de la Rassauta, obtient un nouveau mandat de trois ans au conseil général de la province d'Alger[127].

() - Par dĂ©cret impĂ©rial, le chef-lieu de la commune de la Rassauta est transfĂ©rĂ© Ă  Maison-CarrĂ©e et ladite circonscription rebaptisĂ©e "commune de Maison-CarrĂ©e". Le territoire de la commune demeurerait tel que fixĂ© en 1856, et le corps municipal gardait la mĂȘme composante et la mĂȘme organisation qu'avant : un maire ; cinq adjoints (dont quatre devaient rĂ©sider dans chacune des sections qui composaient la commune), huit conseillers municipaux (dont cinq Français ou naturalisĂ©s français, deux Ă©trangers europĂ©ens et un indigĂšne musulman) : Alexandre Van-Maseyk fut maintenu comme maire et Adolphe Cordier demeurait son adjoint pour la section de Maison-CarrĂ©e.

- Le cardinal Charles Lavigerie, archevĂȘque catholique d’Alger, fait construire un grand monastĂšre Ă  Maison-CarrĂ©e.

ErigĂ© sur une petite colline surplombant la mer, Ă  environ 2 km du village de Maison-CarrĂ©e, le monastĂšre est baptisĂ© du nom de Saint-Joseph. Un an plus tard, Lavigerie en fera un noviciat et y installera la maison-mĂšre de l'Ordre missionnaire des PĂšres Blancs qu’il venait de fonder, et il en confia la direction au moine jĂ©suite François-Joseph Desbillons.

DĂšs lors, les moines appelĂ©s PĂšres Blancs commencent Ă  amĂ©nager les vastes terrains qui entouraient le couvent, plantant en premier lieu un grand vignoble qui prendra le nom de Domaine d'Oulid Adda, et qui se fera rapidement connaĂźtre entre par un son muscat de l'Harrach[128]. En , l'abbĂ© Charmelant dĂ©crira avec fiertĂ© les rĂ©sultats obtenus par les PĂšres Blancs Ă  Maison-CarrĂ©e : « Cette propriĂ©tĂ©, qui est aujourd'hui notre maison mĂšre, Ă©tait, il y a six ans, un immense territoire couvert de broussailles, de palmiers nains et que le voisinage des eaux croupissantes de l'Harrach rendait des plus malsaines. En 1869 et 1870, Ă  mesure que les broussailles s'arrachaient, nous y avons plantĂ© une quantitĂ© considĂ©rable d'Eucalyptus en massifs et en allĂ©es le long de nos champs ou de nos vastes jardins, ce qui donne Ă  cette propriĂ©tĂ© nouvelle l'aspect d'un vieux domaine aux arbres et aux forĂȘts sĂ©culaires. Mais le rĂ©sultat le plus merveilleux, c'est que la fiĂšvre intermittente qui venait si souvent arrĂȘter nos orphelins dans leurs travaux agricoles a disparu peu Ă  peu, en sorte qu'aujourd'hui cette propriĂ©tĂ© est une des plus saines des environs d'Alger, aprĂšs avoir Ă©tĂ© la plus fiĂ©vreuse »[129].

Bien plus tard, en 1899, cette grande et florissante plantation sera officiellement rachetĂ©e par la SociĂ©tĂ© ImmobiliĂšre & Agricole de l’Harrach. On change alors l'ancien nom et cette de Domaine d'Oulid Adda en Les Coteaux de l’Harrach. En rĂ©alitĂ©, ladite sociĂ©tĂ© Ă©tait une propriĂ©tĂ© de la congrĂ©gation des PĂšres-Blancs et elle Ă©tait dirigĂ©e par des ecclĂ©siastiques, cette transaction n'Ă©tant qu'une astuce mue par la crainte de voir l’État faire mainmise sur ce bien ecclĂ©siastique, Ă  une Ă©poque oĂč foisonnaient en France les politiques anticlĂ©ricales et les lois relatives Ă  la laĂŻcitĂ©.

AprĂšs l’indĂ©pendance de l'AlgĂ©rie en 1962, les anciens terrains des PĂšres-Blancs seront peu Ă  peu recouverts par les habitations et les citĂ©s qui constituent de nos jours le quartier de Mohamadia (ex. Lavigerie), ainsi que les deux lycĂ©es Abane Ramdane et Ahmed Taoufik El-Madani. Le bĂątiment principal du couvent, celui qui abritait la maison-mĂšre de l'Ordre Ă  l'origine, devint un institut public de formation professionnelle alors que le bĂątiment annexe (l'ancien orphelinat) fut converti en centre spĂ©cialisĂ© dans l'enseignement aux enfants handicapĂ©s. Mais tout cet ensemble fut finalement dĂ©moli en 2014, laissant place au complexe de la Grande MosquĂ©e d'Alger dont la construction fut achevĂ©e en 2018.

1870

(10 mars) - Un fait divers, datĂ© de jour et rapportĂ© dans la presse locale[130], indique qu'il existait Ă  cette date une brigade de gendarmerie Ă  Maison-CarrĂ©e et que certains habitants s'adonnaient Ă  la pĂȘche sur l'Harrach pour gagner leur vie.

(20 mai) - Un dĂ©cret impĂ©rial promulguĂ© en ce jour crĂ©e officiellement la commune d'Hussein-Dey (jusque-lĂ  simple section de la commune de Kouba) et fixe ses limites Ă  l'article 2 comme il suit : « La commune d'Hussein-Dey conserve les limites de l'ancienne section de mĂȘme nom, sauf en ce qui concerne la partie qui est voisine de la commune de Maison-CarrĂ©e. De ce cĂŽtĂ©, la commune aura pour limite le pont viaduc du chemin de fer et les dĂ©pendances Ă  partir du pont viaduc jusqu'Ă , et y compris la maison portant no 12, la barriĂšre fixĂ©e en face de la maison portant le no 12 avant le moulin SauliĂšre et de cette barriĂšre une ligne droite jusqu'Ă  l'Harrach ».

(14 septembre) - Par arrĂȘtĂ© de la PrĂ©fecture d'Alger, les territoires des deux localitĂ©s de Maison-Blanche et Fort-de-L'Eau sont sĂ©parĂ©s de la commune de Maison-CarrĂ©e pour former une nouvelle circonscription administrative en reprenant le nom de Commune de la Rassauta[131].

Il y eut toutefois une querelle entre les deux administrations sur la dĂ©limitation exacte de leurs limites communes, ce qui nĂ©cessita une enquĂȘte de la prĂ©fecture et l'Ă©mission d'un arrĂȘtĂ© complĂ©mentaire prĂ©cisant que « Les limites sĂ©paratives entre les communes de Maison-CarrĂ©e et la Rassauta sont fixĂ©es comme il suit : 1° L'Oued Boumsia, depuis sa rencontre avec le chemin de Larbaa Ă  la RĂ©ghaĂŻa jusqu'Ă  l'Oued Smar ; 2° L'Oued Smar, depuis son embranchement avec l'Oued Boumsia jusqu'au point oĂč il est canalisĂ© ; 3° De ce point, l'Oued Smar canalisĂ© jusqu'Ă  sa rencontre avec la route mĂ©diane, et sa continuation pendant un parcours de 1.230 mĂštres environ, jusqu'Ă  la rencontre d'un canal privĂ© formant la limite entre les propriĂ©tĂ©s Cordier Ă  l'Ouest et SĂ©nĂ©clause Ă  l'Est ; 4° Ce canal privĂ© formant un coude Ă  l'Est, entre la propriĂ©tĂ© Cordier Ă  l'Ouest et la propriĂ©tĂ© Mantout Ă  l'Est, jusqu'Ă  la route d'Alger Ă  Dellys et Constantine ; 5° Cette route Ă  l'Ouest sur un parcours de 30 mĂštres environ jusqu'Ă  un chemin d'exploitation se dirigeant vers la ferme Villa ; 6° Ce chemin jusqu'Ă  une haie de cactus qui limite la ferme Villa avec la propriĂ©tĂ© Bernis ; 7° La haie de cactus jusqu'Ă  un autre chemin se dirigeant vers la mer en ligne droite, et cette droite prolongĂ©e jusqu'Ă  la mer »[132].

- Selon un dĂ©nombrement de population, la commune de Maison-CarrĂ©e compte Ă  cette date un total de 1 693 habitants, dont 1 053 europĂ©ens (62 %) et 640 musulmans (38 %). Toutefois, les EuropĂ©ens occupent l'essentiel de la ville alors que les populations musulmanes vivent encore en grande majoritĂ© dans les zones extra-urbaines de la commune.

1871

(19 avril) - La presse locale rapporte que l'insurrection subite des tribus kabyles ralliées au Bachagha al-Mokrani provoque un mouvement de panique dans l'E. de Mitidja, provoquant l'exode de certaines populations européennes des régions de Rouïba et de Réghaïa vers Maison-Carrée, en ayant emporté avec eux tous leurs troupeaux[133].

(31 octobre) - En complĂ©ment des dĂ©cisions prises en 1866 de diviser le dĂ©partement d'Alger en circonscriptions Ă©lectorales pour Ă©lire les dĂ©lĂ©guĂ©s des communes au Conseil gĂ©nĂ©ral du dĂ©partement[134], un arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral datĂ© de ce jour fixe le nombre et la distribution des sections municipale.

Pour ce qui concerne Maison-Carrée, la commune constitue une seule section et ouvre droit à l'élection de 9 conseillers généraux (6 français, 4 étrangers européens et 2 indigÚnes musulmans).

(27 novembre) - Elections municipales en Algérie[135].

1872

- Les nommĂ©s Feradi Ould Salem, Mohamed Ould Daho b. Chadedi et Larbi Ould Si Kaddour, tous condamnĂ©s par la justice coloniale pour des affaires de droit commun, s'Ă©chappent des mains de la gendarmerie Ă  Maison-CarrĂ©e oĂč ils Ă©taient emprisonnĂ©s, et rejoignent aussitĂŽt la bande du cĂ©lĂšbre bandit Bouziane dans l'Oranais[136].

(23 décembre) - Un certain Bourlier est élu au conseil général du département d'Alger pour la circonscription de Maison-Carrée[137].

1873

() - AprĂšs maintes pĂ©ripĂ©ties et des annĂ©es d'attente, une Ă©glise catholique est enfin construite Ă  Maison-CarrĂ©e. BaptisĂ©e du nom du SacrĂ©-CƓur de JĂ©sus, la nouvelle Ă©glise est officiellement consacrĂ©e en ce jour par le Cardinal Lavigerie, archevĂȘque d'Alger.

Annoncé dÚs 1869 par le curé du village, l'abbé Calvet, l'édifice fut conçu par un bureau d'architecte algérois (FrÚres Mazali) et réalisé par les entrepreneurs Mangellas & Lespasé pour un budget de 40.000 Francs d'époque rassemblés auprÚs de divers donateurs locaux. On fit toutefois face à des difficultés financiÚres au cours de la réalisation et il fallut une demande formelle du Cardinal au Gouverneur Général d'Algérie pour obtenir une aide de 10.000 Francs des autorités et achever le projet.

1874

(Mars) - Un bureau télégraphique est ouvert pour la premiÚre fois à Maison-Carrée[138].

(4 avril) - La presse rapporte le meurtre d'un certain Barthélemy SintÚs par son ami Jean Myr, tous deux employés comme domestiques et résidents chez un fermier de Maison-Carrée, M. Florit. L'affaire suscita beaucoup d'émotion dans le village[139].

(juin) - Une nouvelle invasion de sauterelles est signalée à Maison-Carrée et sa région[140].

(31 octobre) - Un arrĂȘtĂ© du Gouverneur gĂ©nĂ©ral d'AlgĂ©rie rĂ©organise le dĂ©partement d'Alger selon 26 circonscriptions Ă©lectorales.

À cette occasion, Maison-CarrĂ©e devient chef-lieu de la 10e Circonscription qui recouvrait recouvre les communes de Maison-CarrĂ©e proprement dite, ainsi que celles de RĂ©ghaĂŻa, la Rassauta, AĂŻn-Taya, l'Alma (act. Boudouaou), St.Pierre-et-St.Paul et Fondouck.

- AprÚs le décÚs de l'abbé Calvier, un certain Sabatiet lui succÚde comme 3e curé de la paroisse catholique de Maison-Carrée.

(novembre) - Parmi la liste des travaux communaux autorisés par l'administration coloniale au cours de ce mois, on peut noter pour la commune de Maison-Carrée ceux relatifs à un "Etablissement du marché sur un nouvel emplacement pour un montant de 16.600 francs"[141].

Le document ne donne pas plus de précisions sur le marché concerné, ce qui laisse penser qu'il s'agissait du grand marché hebdomadaire qu'abritait la ville, et qui aurait été donc situé à un endroit différent que celui, juste derriÚre le bùtiment de la mairie (qui n'existait pas encore à cette date), qu'on lui connaitra par la suite jusqu'en 1953.

1875

1876

(1er janvier) - La commune de maison-Carrée compte une population totale de 1.695 habitants.

- L'AbbĂ© Lecorchet succĂšde Ă  Sabatier Ă  la tĂȘte de la paroisse catholique de Maison-CarrĂ©e, devenant le 4e curĂ© dans l'histoire de la ville.

1877

(16 décembre) - Une violente crue de l'Harrach frappe Maison-Carrée.

1878

(juin) - De grands travaux de transformation sont effectués sur le vieux pont ottoman de l'Harrach à Maison-Carrée.

Des projets de remplacement du vieux pont turc de Maison-CarrĂ©e sont Ă©voquĂ©s par les autoritĂ©s coloniales dĂšs aoĂ»t 1851. Mais, l'idĂ©e restera au stade de vƓux jusqu'en 1875 oĂč on Ă©voqua la construction d'un nouveau pont, Ă  la fois parce que l'ancien ouvrage devenait trop exigu par rapport Ă  la croissance importante du trafic sur cette route stratĂ©gique, mais aussi pour avoir constatĂ© que sa forme en arcades Ă©troites le transformait carrĂ©ment en barrage lors des crues de oued l'Harrach, et que cela favorisait le flĂ©au des inondations dans la petite ville de Maison-CarrĂ©e. La direction des travaux publics proposa alors au gouvernement de la colonie de modifier le pont existant pour corriger ces problĂšmes, mais il faudra attendre l'Ă©tĂ© 1878 pour voir aboutir ce dernier projet.

Ainsi, l'ancien pont turc (dont la derniĂšre restauration connue datait de 1736) fut consolidĂ© sur ses deux extrĂ©mitĂ©s, tandis que sa partie centrale et ses arcades en pierre sont supprimĂ©s et remplacĂ©s par un long tablier mĂ©tallique, de 4 mĂštres de largeur, appuyĂ© sur une seule assise Ă©troite. Au cours des travaux, Ă  partir du 19 juin 1878, la circulation sera partiellement dĂ©viĂ©e vers une passerelle en charpente, tandis que les troupeaux d'animaux et les convois de gros tonnage se verront obligĂ©s de traverser l'oued Ă  guĂ©[142]. Une fois achevĂ©e, cette nouvelle configuration changea totalement l'apparence du pont de l'Harrach, mais elle ne va finalement durer qu'une trentaine d'annĂ©es puisque l'ouvrage sera totalement dĂ©mantelĂ© en 1911 et remplacĂ© par le pont en bĂ©ton que nous connaissons encore de nos jours Ă  El-Harrach sous le nom de "Pont du 8 Mai 1945" ou, plus communĂ©ment, "Pont Blanc".

1879

- La compagnie PLM inaugure la deuxiÚme ligne ferroviaire en Algérie. Reliant Alger à Constantine, la nouvelle ligne se détache de la ligne Alger-Blida-Oran à Maison-Carrée dont la gare devient ainsi un embranchement de toutes les lignes à destinations d'Alger, consacrant et renforçant son rÎle de porte obligée de la capitale algérienne. Par ailleurs, cette nouvelle desserte vers l'Est dotera la commune de Maison-Carrée d'une seconde station au niveau de l'Oued Smar.

  • Dans un article de presse [143] Ă©voquant l'industrie du lin en AlgĂ©rie, on peut lire ce qui suit : « Il s'Ă©tait montĂ© dans l'intervalle Ă  AĂŻn-Taya, localitĂ© situĂ©e Ă  20 km d'Alger, ainsi qu'Ă  Maison-CarrĂ©e, deux petites usines de teillage ; elles avaient succombĂ© en 1873 et le matĂ©riel en avait Ă©tĂ© dispersĂ©. Tout rĂ©cemment, il vient de se former, sur les bords de la petite riviĂšre l'Arrach, Ă  dix minutes de son embouchure et Ă  km d'Alger, entre Hussein-Dey et Maison-CarrĂ©e, sous la raison sociale Hartog & Cie, un nouvel Ă©tablissement Ă©tabli dans le but d'Ă©tudier le rendement d'une broyeuse-teilleuse pour laquelle il a Ă©tĂ© pris derniĂšrement un brevet en France : cette usine expĂ©die couramment une certaine quantitĂ© de lin teillĂ© Ă  l'Ă©tranger ».

1880

1881

(19 avril) - Un document administratif fait Ă©tat du paiement par la commune de Maison-CarrĂ©e d'une somme de 15 000 francs en mars, en guise de quote-part dans les travaux de construction de caniveaux pavĂ©s avec bordures de trottoirs sur la RN n° 5 pour la partie de son tracĂ© qui traverse le village[144].

- Félix Déssoliers, et propriétaire des Moulins Déssoliers à Maison-Carrée et grand colon européen dans la région, est élu député algérien au parlement français.

(28 décembre) - Un dénombrement de la population donne un total de 1.567 habitants pour l'agglomération de Maison-Carrée, et 3.049 habitants pour l'ensemble de la commune[145].

Par la mĂȘme occasion, le document Ă©numĂšre l'ensemble des hameaux et centres de peuplement qui constituaient Ă  l'Ă©poque le territoire de la commune de Maison-CarrĂ©e, ce qui peut nous donner une idĂ©e sur l'origine ancienne de certains toponymes qui existent encore de nos jours dans la rĂ©gion d'El-Harrach. Les lieux citĂ©s dans le document sont repris ici dans l'ordre et suivant l'orthographe qui y figure : Oulid-Adda, El-Alia, Oued-Smar, El-Tamek, Ben-Hamida, Boutreiek, AĂŻn-Skhouna, Ouled-FĂ©lite, Nehidi, Ouled-Ahmed, Bou-Fasli, Ouled-Ferrah, Schraba, SĂŻda-Fokania, SeĂŻda-Tahtania, Mimouna, Ben-Amar, Chamely, Ben-Cheab, Ouled-Chaouche, Ben-Athmen et Ben-Abdeltif.

1882-1920 : une petite ville qui s'industrialise

1882 : l'industriel Antoine-Frédéric Altairac, colon français établi à Alger depuis 1843, installe une usine de tannerie-corroierie à Maison-Carrée.

Plan (daté d'avril 1938) du domaine Altairac à Maison Carrée.

Occupant un terrain de 300 hectares se situant alors Ă  la sortie Sud du village de Maison-CarrĂ©e, la zone (qui s'appelle encore de nos jours « Lantirak » dans le langage populaire local) se trouve aujourd'hui en amont du quartier Kourifa Ă  El-Harrach. À l'origine, cette propriĂ©tĂ© s'appelait Haouche AĂŻn-Skhouna (parfois orthographiĂ© Ain-Schrouna sur les documents français) et abritait une plantation agricole qu'un autre colon du nom de Gimbert avait acquise dans les annĂ©es 1848 puis revendue Ă  Antoine Altairac en 1878. Cette tannerie, qui devait alimenter en cuirs les autres manufactures algĂ©roises d'Altairac, est donc la premiĂšre vĂ©ritable industrie installĂ©e Ă  Maison-CarrĂ©e et mĂȘme l'une des toutes premiĂšres en AlgĂ©rie.

La fabrique employait au dĂ©part quelque 150 personnes puis, en 1885, il y sera adjoint une briqueterie-tuilerie de 200 employĂ©s alors qu'on maintenait une partie des terrains pour diverses productions agricoles : un vignoble, des orangers, des cĂ©rĂ©ales et mĂȘme des mĂ»riers pour un Ă©levage de ver Ă  soie), ainsi que des Ă©tables oĂč on Ă©levait des mulets, lĂ  encore pour les besoins de l’armĂ©e coloniale en AlgĂ©rie.

Alors que la main-d’Ɠuvre industrielle Ă©tait toute europĂ©enne au dĂ©but (essentiellement des ouvriers espagnols), les employĂ©s de la partie agricole du site (environ 100 personnes) Ă©taient dĂ©jĂ  en partie constituĂ©s d’AlgĂ©riens indigĂšnes. Au vu de la taille encore modeste du village de Maison-CarrĂ©e Ă  cette Ă©poque, cet afflux de travailleurs marquera deux tournants qui vont influer grandement sur l'Ă©volution de la ville par la suite. Le premier est la transformation progressive de la population europĂ©enne en prolĂ©tariat industriel alors que la rĂ©gion avait jusque-lĂ  un caractĂšre exclusivement agricole, ce qui va dĂ©jĂ  transformer la politique locale comme nous le verrons plus loin. Le second aspect important est que cette transformation va aussi commencer Ă  drainer des populations algĂ©riennes de l'intĂ©rieur du pays qui viendront dĂ©sormais Ă  Maison-CarrĂ© pour cherche des opportunitĂ©s de travail permanent, et non plus seulement comme lieu de transit ou comme place de nĂ©goce que leur offrait le grand marchĂ© du vendredi. Pour s'en rendre compte, il suffit d'observer que la population totale de Maison-CarrĂ©e dans les annĂ©es 1880-1885 avoisinait les 3 500 habitants (dont les 2/3 Ă©taient encore des EuropĂ©ens), alors que les usines Altairac allaient vite occuper prĂšs de 500 personnes en emplois directs. Plus tard, des logements seront installĂ©s pour les manƓuvres ainsi qu'une petite Ă©cole, ce qui donnera au site les airs d'un faubourg prolĂ©taire dans une localitĂ© qui avait jusque-lĂ  une vocation agricole et commerciale pour l'essentiel.

- Fondation de la distillerie Bomati & Botella à Maison-Carrée.

Lancé au départ par deux européens de Maison-Carrée, Vincent Bomati et M. Botella, l'établissement se spécialisa dans la production d'une liqueur d'anisette commercialisée sous le nom de Anis-Diamant, et qu'ils obtenaient -disaient-ils- par un procédé de distillation qui serait de leur propre invention. L'affaire fut par la suite reprise par Botella seul puis, aprÚs sa mort en 1923, devint Ets. Veuve Botella & FrÚres[146]. Le produit, qui était ùprement trÚs apprécié des Européens à Alger, sera commercialisé jusqu'au début des années 1940 avant de disparaßtre.

La distillerie occupait le rez-de-chaussée d'une maison qui existe encore de nos jours à El-Harrach. Elle se situe à l'angle de la rue de la villa mauresque qui abrite la section FLN (qasma) d'El-Harrach et de l'ancienne salle de cinéma Le Ritz.

(23 octobre) - Le Conseil général du département d'Alger redéfinit les composantes des conseils municipaux de sa juridiction. Celui de la commune de Maison-Carrée est alors porté à 12 conseillers dont 8 français, 2 étrangers européens et 2 musulmans[147].

(15 novembre) - Une élection au Conseil général du département d'Alger est organisée dans la 10e Circonscription (qui couvrait les communes de Maison-Carrée, l'Alma, Menerville, Blad-Guitoun, Aïn-Taya, Fondouk et St-Pierre-St-Paul), à la suite de la démission du conseiller ArlÚs-Dufour[148].

Parmi les nombreuses candidatures qui prennent part à la course, on note celle d'Antoine-Frédérdic Altairac, l'industriel nouvellement établi à Maison-Carrée qui fait à cette occasion son entrée en politique en représentant inavoué de la droite et des milieux cléricaux catholiques dont il était proche. Pour sa part, la gauche était menée par le candidat Charbonnier, médecin et maire de Rouiba.

1883

(Mai) - Établissement Ă  Alger du premier rĂ©seau tĂ©lĂ©phonique en AlgĂ©rie.

À Maison-CarrĂ©e, c'est l'usine Altairac qui sera le tout premier abonnĂ© local Ă  ĂȘtre reliĂ©e Ă  Alger par voie tĂ©lĂ©phonique[149].

(23 septembre) - Élections dĂ©partementales Ă  Maison-CarrĂ©e (10e Circonscription).

Le scrutin se joue entre l'ingénieur-civil et architecte D. Panchioni (du Parti Républicain Indépendant, gauche) et l'industriel F.-A. Altairac (droite). C'est finalement le premier qui sort vainqueur avec 118 voix, mais la régularité du scrutin est trÚs fortement contestée par les partisans d'Altairac et celui-ci, apparemment bien appuyé, va aussitÎt entamer des actions légales et réussira effectivement à faire annuler le scrutin.

- 5e curĂ© catholique dans l'histoire de la ville, l'AbbĂ© Fouques succĂšde Ă  Lecorchet Ă  la tĂȘte de la paroisse de Maison-CarrĂ©e.

1884

(6 avril) - Alors qu'il avait dĂ©jĂ  assistĂ© Ă  la premiĂšre sĂ©ance plĂ©niĂšre du nouveau Conseil GĂ©nĂ©ral du dĂ©partement d'Alger, D. Panchioni est informĂ© par la justice que son Ă©lection comme conseiller de la 10e Circonscription est annulĂ©e. Un nouveau scrutin est donc organisĂ© Ă  en ce jour avec les mĂȘmes protagonistes, mais il en sortira un rĂ©sultat totalement inverse puisque c'est Altairac qui sera Ă©lu cette fois-ci.

Les rĂ©sultats dĂ©taillĂ©s de l’élection peuvent nous donner une image intĂ©ressante, Ă  la fois de la situation politique qui prĂ©valait parmi la population europĂ©enne de la commune Ă  cette Ă©poque, mais aussi sur le poids devenu prĂ©pondĂ©rant de Maison-CarrĂ©e dans la rĂ©gion : les inscrits Ă©taient au nombre 365 et les votants 319. Sur les six communes qui constituaient cette 10e Circonscription, Maison-CarrĂ©e a donnĂ© 111 voix (sur un total de 186) Ă  Altairac et 38 voix (sur un total de 133) Ă  Panchioni[150]. La commune reprĂ©sentait donc Ă  elle-seule prĂšs de la moitiĂ© du corps Ă©lectoral de toute la circonscription, alors que la masse des 111 votants qui y ont donnĂ© leurs voix Ă  Altairac donne une idĂ©e sur le poids qu'avaient pris les prolĂ©taires europĂ©ens au sein de la population locale, mais aussi du rĂŽle pris dĂ©sormais par l'industriel dans l'Ă©conomie locale.

De son cĂŽtĂ©, la presse de gauche ne manqua pas de dĂ©noncer cette victoire des "rĂ©actionnaires et des clĂ©ricaux", accusant Altairac d'ĂȘtre la marionnette de certains potentats de la droite conservatrice en AlgĂ©rie (notamment le Cardinal Lavigerie par le biais de ses PĂšres Blancs), d'avoir achetĂ© des Ă©lecteurs et d'avoir mĂȘme faussĂ© le rĂ©sultat par l'afflux massif de ses employĂ©s qu'il aurait intimidĂ©s afin qu'ils votent pour lui, sachant que son score Ă  Maison-CarrĂ©e lors de l’élection annulĂ©e de septembre Ă©tait de 74 voix[151]. La polĂ©mique va ainsi se poursuivre durant des semaines et des mois, et la mĂȘme presse de gauche se fera un immense plaisir de ridiculiser l'Ă©lu Altairac (qui Ă©tait apparemment illettrĂ©) lorsqu'il s'Ă©tait trouvĂ© incapable de lire un simple rapport lors de sa premiĂšre sĂ©ance au Conseil GĂ©nĂ©ral[152]. De son cĂŽtĂ©, le vieux capitaliste ne manquera pas de faire appel Ă  ses propres soutiens conservateurs et en arriva mĂȘme Ă  faire attrouper quelque 300 employĂ©s de son usine devant les locaux de journaux qui lui sont hostiles, profitant en certainement en cela de leurs orientations catholiques vu qu'ils Ă©taient presque tous issus de l'Ă©migration catalane, ou jouant carrĂ©ment de la pression et de la vĂ©nalitĂ© comme l'affirmaient ses adversaires.

(10 mai) - Élection municipale Ă  Maison-CarrĂ©e.

Louis Garry, propriétaire d'une ferme située aux environs du couvent des PÚres-Blancs à Lavigerie (act. Mohammadia), est élu maire. Les autres membres du nouveau conseil municipal sont Déjean (adjoint au maire), Ménimur, Cordier, Pons, Verdier, Frédéric Altarirac, Lafon, Lubet, Narbonne, Duhan, Padovani, Cézanne, Beaulieu, Troney et Escudier[153].

(14 juillet) - L'évasion de cinq détenus de la prison centrale de l'Harrach met la petite ville de Maison-Carrée en émoi. Deux parmi eux étant de dangereux criminels condamnés à perpétuité, une prime fut annoncée par les autorités pour leur capture et c'est pratiquement tous les colons européens de Maison-Carrée qui se lancent dans une battue pour ratisser les alentours, mais les fugitifs ne furent jamais attrapés[154].

(23 août) - La presse locale[155] rapporte qu'un important incendie s'était déclaré dans la ferme Garry, propriété du maire de Maison-Carrée.

(10 novembre) - À la suite d'une dĂ©libĂ©ration du Conseil municipal de Maison-CarrĂ©e, la prĂ©fecture d'Alger Ă©tablit en ce jour un arrĂȘtĂ© qui crĂ©e une compagnie de sapeurs-pompiers Ă  Maison-CarrĂ©e. ConstituĂ©e au dĂ©part de 15 hommes, son effectif sera augmentĂ© Ă  25 hommes quatre mois plus tard[156].

1885

(5 janvier) - Un tremblement de terre est signalé à Maison-Carrée. Aucune perte n'est enregistrée, mais la secousse causa un peu de panique parmi la population du village[157].

(28 fĂ©vrier) - La presse locale rapporte un fait divers survenu en ce jour : « le sieur Mustapha ben Zaiya, garde-champĂȘtre indigĂšne de Maison-CarrĂ©e, a arrĂȘtĂ© le nommĂ© Ali ben Daman, ĂągĂ© de 45 ans et habitant Ă  El-Thmac (Maison-CarrĂ©e) prĂ©venu de viol et vol sur la personne de Fadhma bent Si Mohamed Zouaoui, ĂągĂ©e de 13 Ă  14 ans. L'inculpĂ© mis Ă  la disposition de M. le Juge de paix, est Ă©crouĂ© Ă  la prison de l'Arrach »[158].

(30 mars) - La presse locale rapporte une autre affaire de viol survenue à Maison-Carrée et impliquant cette fois-ci un ressortissant marocain nommé Mimoun b. Hassein et une dame européenne nommée marie Planet épouse Denand, nouvellement installée dans le village [159].

(6 juin) - À la suite de la publication d'un dĂ©cret au Journal Officiel, « Il est crĂ©Ă© Ă  Maison-CarrĂ©e (AlgĂ©rie) une justice de paix ressortissant au tribunal de premiĂšre instance du tribunal d'Alger. La circonscription de cette justice de paix se composera des communes de Maison-CarrĂ©e, Maison-Blanche, Fort-de-L'Eau, Rouiba, AĂŻn-Taya, ReghaĂŻa, Fondouk [...][160] ».

Il s'agit de la toute premiÚre fois que Maison-Carrée abrite le siÚge d'une institution judiciaire, confirmant ainsi l'ascension continue de la petite ville parmi les autres colonies européennes de la région. Les premiÚres nominations documentées à cette occasion sont celles d'un certain M. Encausse comme greffier, Baille comme interprÚte et Bastide comme huissier[161], alors que le premier juge de paix à y siéger est un certain M. Ripert qui, décédé trois mois plus tard, sera remplacé par son suppléant Verdier[162].

(19 avril) - La presse locale rapporte que « Les pluies torrentielles qui sont tombĂ©es tous ces temps-ci ont occasionnĂ© dans la plaine de la Mitidja des accidents de personnes et des pertes matĂ©rielles Ă©normes. À Maison-CarrĂ©e, l'Harrach a dĂ©bordĂ©, inondant villages, plaines et vignes. Cinq malheureux pontonniers auraient Ă©tĂ© victimes de leur dĂ©vouement en voulant porter secours aux fermes environnantes »[163]. On indique ailleurs : « A la Maison-CarrĂ©e, oued El-Harrach ayant dĂ©bordĂ© au moment oĂč les pontonniers exĂ©cutaient des manƓuvres avec un pont rĂ©cemment prĂȘtĂ© au gĂ©nie militaire par le dĂ©partement, ce pont a Ă©tĂ© emportĂ© par les eaux. Sur six pontonniers montĂ©s dans des bacs, cinq ont pĂ©ri » [164].

- Maison-Carrée compte un total de 4.756 habitants dont 3.062 Européens agglomérés dans le village à proprement parler[165].

1886

(8 aoĂ»t) - La presse locale rapporte les nouvelles d'un suicide qui eut lieu en ce jour Ă  Maison-CarrĂ©e. Il s'agit d'un employĂ© qui, aprĂšs avoir passĂ© la soirĂ©e dans un cafĂ© proche du pont de l'Harrach, tenta de se tuer par une arme Ă  feu qu'il portait sur lui. Ayant apparemment ratĂ© son premier coup, il se tira dessus plusieurs fois avant de succomber, une des balles ayant au passage blessĂ© mortellement le cafetier qui avait accouru avec un autre ami pour l'arrĂȘter[166].

(29 octobre) - Une importante inondation de oued l'Harrach submerge Maison-CarrĂ©e et ses alentours. La route d'Aumale est ainsi coupĂ©e de la circulation, et on signale des dĂ©gĂąts importants dans l'usine Altirac qui dut s'arrĂȘter[167].

(1er décembre) - Une nouvelle crue de l'oued Harrach produit des inondations du cÎté de l'usine Alatirac et provoque cette-fois ci l'interruption du transport ferroviaire sur la ligne de l'Est[168].

(4 dĂ©cembre) - La presse locale rapporte un nouveau fait divers dramatiques survenus Ă  Maison-CarrĂ©e. Il s'agit d'une nommĂ©e Clara, ĂągĂ©e de 24 ans qui, ayant apparemment Ă©tĂ© dĂ©laissĂ©e par son amant, elle lui tire dessus quatre balles d'un revolver juste au moment oĂč il sortait du marchĂ© de Maison-CarrĂ©e. Le monsieur, un certain Charles Monger, Ă©tait laitier Ă  Baraki et il entretenait une relation avec elle depuis un moment car elle travaillait comme bonne chez ses parents et elle se trouvait apparemment enceinte de lui au moment des faits. Quoi qu'il en soit, il s'en sortit miraculeusement avec une simple blessure sous un Ɠil, tandis que la malheureuse fut arrĂȘtĂ©e et traduite en justice[169].

1887

(5 mars) - DĂ©cĂšs d'Antoine-FrĂ©dric Altairac, patron de la plus ancienne industrie Ă  Maison-CarrĂ©e et en mĂȘme temps conseiller gĂ©nĂ©ral de la 10e Circonscription du dĂ©partement d'Alger.

(3 avril) - Élections dĂ©partementales Ă  Maison-CarrĂ©e.

Alors que les journaux de gauche remettaient sur le devant de la scÚne politique locale la candidature de Panchioni à la suite de la mort d'Antoine-Frédéric Altirac et de la vacance du poste de représentant de la 10e Circonscription au Conseil général du département d'Alger, Frédéric Altairac, fils aßné du défunt, démissionne de son poste au conseil municipal à Maison-Carrée et annonce sa candidature pour succéder à son pÚre au conseil départemental. Le résultat du vote à Maison-Carrée sera finalement de 148 voix (sur 279 pour l'ensemble de la 10e Circonscription) pour Altairac et 35 (sur 143) pour Panchioni[170].

(Juin) - Construction de l'HÎtel-de-Ville de Maison-Carrée.

Le projet de doter Maison-CarrĂ©e d'un nouveau siĂšge municipal apparait pour la premiĂšre fois dans un appel d'offres publiĂ© par le maire Louis Garry dans la presse du 27/07/1885, Ă©tant alors prĂ©cisĂ© que le bĂątiment projetĂ© allait abriter Ă  la fois les services de la mairie et ceux de la justice de paix qui venait d'ĂȘtre crĂ©Ă©e Ă  Maison-CarrĂ©e. Conçu par un architecte algĂ©rois du nom de Voinot, le coĂ»t du projet Ă©tait initialement estimĂ© Ă  96.641 francs d'Ă©poque[171], mais la note grimpera par la suite jusqu'Ă  atteindre 250.000 francs[172] Ă  son achĂšvement en 1887. JugĂ© trop luxueux et hors de prix pour la taille et les moyens de la commune Ă  l'Ă©poque, cette construction suscita une violente polĂ©mique durant des mois, entre ceux (la gauche surtout) qui jugeaient la dĂ©pense trop onĂ©reuse et superflue et les partisans du maire Garry qui, en plus d'une rĂ©putation assez sulfureuse comme nous le verrons plus loin, n'hĂ©sitait pas Ă  lever des taxes spĂ©ciales pour financer son projet.

(octobre) - M. Guieu, tout premier juge de paix du canton de Maison-Carrée, est relevé de son poste et muté vers le canton de Sebdou à la suite d'une cabale qu'aurait monté contre lui le maire Louis Garry et son parti conservateur.

L'affaire ne manqua donc pas de prendre une dimension politique[173] et, dĂšs le 26 octobre, on voit six parmi les huit maires des communes constituant le canton de Maison-CarrĂ©e adresser une protestation officielle au ministre français de la justice de l'Ă©poque, l'accusent ouvertement d'avoir pris cette dĂ©cision sur instigation de ce qu'ils appellent les "milieux rĂ©actionnaires" de la rĂ©gion et comme sanction envers le magistrat en question pour ses convictions "rĂ©publicaines". Tous les maires signataires (Fort-de-L'Eau, Rouiba, Arbatache, Fonfouk, Maison-Blanche et Cap-matifou) Ă©taient comptĂ©s sur les partis de gauche alors le maire de Maison-CarrĂ©e Ă©tait justement le principal absent de cette pĂ©tition et que soutenaient prĂ©cisĂ©ment ces milieux de la droite catholique et conservatrice au mĂȘme titre que le conseiller gĂ©nĂ©ral FrĂ©dĂ©ric Altairac.

1888

- Le village de Maison-CarrĂ©e compte Ă  cette date 4 340 habitants[174]

(Mai) - Élection municipale Ă  Maison-CarrĂ©e.

Hormis le maire sortant, Louis Garry, qui est réélu pour un nouveau mandat, les membres du nouveau conseil municipal sont : les propriétaires Déjean, Cordier et Lebailly ; les viticulteurs Coste et Faucher ; les entrepreneurs H. Brignole, Mélia et Padovani ; les négociants Bonneville et Tarsaud ; le vétérinaire Pons ; le contremaßtre SigondÚs ; le pharmacien Nicolas Zévaco ; le débitant Mazoyer ; le mécanicien Toja ; le comptable Bauhardt et le régisseur Landry[175].

(12 dĂ©cembre) - Dans une lettre publiĂ©e dans un journal algĂ©rois[176], des habitants de Maison-CarrĂ©e se plaignent du service trĂšs insuffisant de l'unique mĂ©decin que la commune mettait Ă  leur disposition, et qui n'habitait mĂȘme pas le village.

1889

(22 juin) - Maßtre Alphonse Pourterre (né à Alger en 1859, mort en 1913) ouvre un bureau de notaire à Maison-Carrée.

(24 juin) - Une violente altercation survient entre un ferronnier de la forge Renaudin de Maison-CarrĂ©e et deux individus, un certain Juan Fernandez et son fils Francisco, appartenant Ă  un campement de nomades "gitanos" installĂ©s depuis peu prĂšs de la ville, dans le lit de oued l'Harrach. À la suite d'une dispute au sujet du prix, le pĂšre fut bousculĂ© et, voyant cela, le fils alla se munir d'un fusil pour revenir, dix minutes plus tard, tirer sur le personnel prĂ©sent. Un ouvrier de 25 ans appelĂ© Lamy, sourd-muet, fut tuĂ© sur le coup. En essayant de prendre la fuite, Francisco Fernandez est vite assailli par la foule et se fait carrĂ©ment lyncher, avant de se faire trainer Ă  la gendarmerie moitiĂ© mort[177].

Par la suite, deux autres comparses sont arrĂȘtĂ©s, mais l'un parvint mystĂ©rieusement Ă  s'Ă©chapper de la prison municipale oĂč il sĂ©journait. Le village de Maison-CarrĂ©e Ă©tait en Ă©moi Ă  la suite de cette affaire, Ă  tel point que le maire dĂ©cide alors de chasser toute la communautĂ© gitane de passage dans la commune et de leur interdire tout accĂšs[178].

(1er septembre) - Élections dĂ©partementales

A Maison-Carrée, le résultat du vote se présente comme il suit : 254 inscrits, 151 votants dont 143 voix pour Altairac, conseiller général sortant, et à peine 2 voix pour son adversaire du jour, un certain Boulanger. Le résultat fut identique dans le reste de la circonscription avec 187 votants en tout, dont 161 voix pour Altairac et 11 pour Boulanger.

(septembre) - Élections lĂ©gislatives françaises

Dans la circonscription de Maison-Carrée, c'est le député sortant Latellier -soutenu par la droite et le conseiller général Frédéric Altairac- qui est élu.

1890

- L'AbbĂ© Chanudet prend la tĂȘte de la paroisse de Maison CarrĂ©e. 6e curĂ© catholique dans l'histoire de la ville, il eut un court ministĂšre de deux ans qui fut essentiellement marquĂ© par la dĂ©gradation inquiĂ©tante du bĂątiment de l'Ă©glise - pourtant ĂągĂ©e de sept ans seulement Ă  cette date- qui nĂ©cessita la construction d'un mur de soutĂšnement le long de la route afin d'endiguer le mouvement du sol. Cette mesure ralentit l'aggravation du problĂšme mais ne parvint pas le rĂ©soudre dĂ©finitivement.

(23 décembre) - Des pluies torrentielles provoquent une crue de oued l'Harrach et une inondation assez importante dans le centre-ville de Maison-Carrée[179].

1891

(21 janvier) - Une demande, formulée par la commune de Maison-Carrée, pour le transfert au mardi de chaque semaine du traditionnel marché aux bestiaux (qui se tient le vendredi depuis sa création), est refusée par l'administration coloniale[180].

(2 février) - Installation du premier réseau téléphonique à Maison-Carrée.

Huit annĂ©es aprĂšs l'introduction du tĂ©lĂ©phone en AlgĂ©rie, un arrĂȘtĂ© du ministĂšre français du commerce (datĂ© du 02/02/1891) autorise "la crĂ©ation Ă  Maison-CarrĂ©e d'un rĂ©seau tĂ©lĂ©phonique annexe au rĂ©seau d'Alger, fixant Ă  150 francs le prix de l'abonnement"[181]. Le service deviendra effectivement opĂ©rationnel en ce jour[182].

(21 mai) - Une importante invasion de criquets pĂšlerins est signalĂ©e Ă  Maison-CarrĂ©e. ÉtalĂ© au dĂ©part sur une surface de km x km Ă  l'est de la commune[183], l'essaim passe rapidement sans faire trop de dĂ©gĂąts[184], mais une nouvelle vague sera signalĂ©e une dizaine de jours plus tard oĂč seront touchĂ©s les vignobles des propriĂ©tĂ©s Cordier, Lebailly et Panny[185].

(novembre) - La presse[186] rapporte les nouvelles de l'arrestation d'une grande bande de malfaiteurs Ă  Maison-CarrĂ©e. Il s'agissait d'un groupe d'europĂ©ens sans domicile qui s'Ă©taient Ă©tablis dans une sorte de camp de fortune dans les dunes qui bordent le rivage en face du monastĂšre des PĂšres-Blancs (act. Mohamadia), et d'oĂč ils organisaient diverses opĂ©rations de vol dont n'ont Ă©tĂ© Ă©pargnĂ©s ni le curĂ© de la ville ni le couvent des SƓurs de la charitĂ© !

(9 novembre) - Un violent orage éclate dans la nuit et provoque la crue, non pas de oued l'Harrach comme à l'accoutumée, mais celle de oued Ouchaiah qui causa quelques inondations mineures dans les environs de Maison-Carrée[187].

1892

(7 mars) - CrĂ©ation de la Compagnie des Chemins de Fer sur Routes de l'AlgĂ©rie (C.F.R.A) qui entreprend aussitĂŽt les travaux de construction de trois lignes de locomotives Ă  vapeur pour desservir l’AlgĂ©rois, dont l'une allait relier Saint-EugĂšne Ă  Maison-CarrĂ©e[188].

(mai) - Élection municipale Ă  Maison-CarrĂ©e

(mai) - L'AbbĂ© Reboul succĂšde Ă  Chanudet Ă  la tĂȘte de la paroisse catholique de Maison-CarrĂ©e. 7e curĂ© dans l'histoire de la ville, son trĂšs court ministĂšre de deux mois se distingua par l'insolite cambriolage de l'Ă©glise par des malfrats qui en saccagĂšrent l'intĂ©rieur. C'est l'AbbĂ© Valence qui lui succĂ©dera en juillet de la mĂȘme annĂ©e et il ne cessera, Ă  son tour, de faire face aux difficultĂ©s de restauration et d'entretien de l'Ă©difice dont l'Ă©tat ne cessera plus d'inquiĂ©ter les autoritĂ©s locales. ParallĂšlement Ă  cela, cette mĂȘme annĂ©e verra la nomination de Monseigneur Livinhac, archevĂȘque d'Oxhyrinque, Ă  la tĂȘte de l'Ordre des PĂšres Blancs dans leur maison-mĂšre Ă  Maison-CarrĂ©e, poste qu'il va alors garder pour les trente annĂ©es Ă  venir, soit jusqu'Ă  sa mort en novembre 1922.

(23 mai) - Une invasion de criquets pÚlerins est signalée à Maison-Carrée en direction d'Alger.

(7 septembre) - Alors que la fĂȘte annuelle de Maison-CarrĂ©e battait son plein, une explosion survient dans un magasin de la ville oĂč plusieurs AlgĂ©riens Ă©taient rĂ©unis pour prĂ©parer la poudre devant leur servir dans une fantasia. Trois d'entre eux sont griĂšvement blessĂ©s dans l'accident et dont au moins un va succomber dans la soirĂ©e[189].

(28 novembre) - Une décision du Gouverneur général d'Algérie approuve la création d'une "école mixte avec classe enfantine" à Aïn-Skhouna[190]. Il s'agissait en fait d'une école construite, à titre privé, par l'entreprise Altairac sur le site de ses propres usines à Maison-Carrée et devant servir à son personnel qui était aussi logé sur place.

1893

(janvier ?) - Une ligne téléphonique relie Alger à Blida par Maison-Carrée[191].

(20 aoĂ»t) - Élections lĂ©gislatives françaises en AlgĂ©rie

Dans la commune de Maison-Carrée, il y eut 182 votants sur 285 inscrits pour le résultat suivant : Delamare (67 voix), Latellier (43), Paul Samary (gauche radicale, 41 voix) et Broussais (25). Le résultat au niveau de 1ere Circonscription du département d'Alger (dont faisait partie Maison-Carrée) fut toutefois différent avec Latellier en premiÚre place (3410 voix), suivi de Samary (2898) et de Delmare (645)[192].

(Septembre) - Alors qu'il se trouvait en pleine campagne pour les Ă©lections gĂ©nĂ©rales du dĂ©partement d'Alger, la presse de gauche rapporte plusieurs scandales financiers impliquant le maire de Maison-CarrĂ©e Louis Garry et son receveur postal et ami intime Demargny, ainsi que le maire d'El-Attaf qui, parait-il, dirigeait carrĂ©ment sa commune depuis sa rĂ©sidence Ă  Maison-CarrĂ©e[193]. Alors qu'une sĂ©rie d'enquĂȘtes judiciaires sont lancĂ©es Ă  son encontre, Garry prend d'abord la fuite vers GenĂšve avant que la nouvelle de sa mort ne se rĂ©pande dans le village quelques semaines plus tard[194] et que sa dĂ©pouille ne soit finalement rapatriĂ©e Ă  Maison-CarrĂ©e le 14/10/1893. On apprend par exemple, dans l'un des nombreux articles de presse qui furent dĂ©diĂ©s Ă  cette affaire, qu'une maison de jeu clandestine existait Ă  Maison-CarrĂ©e et que le dĂ©funt maire lui-mĂȘme frĂ©quentait sans gĂȘne, de mĂȘme que le gardien-chef de la prison de l'Harrach et d'autres fonctionnaires locaux.

(Octobre) - Élections dĂ©partementales Ă  Maison-CarrĂ©e.

A Maison-Carrée et dans la 10e Circonscription d'Alger, Frédéric Altairac perd son siÚge de conseiller général aprÚs avoir obtenu 221 voix contre 257 pour son adversaire de gauche[195].

(19 novembre) - Le maire Louis Garry étant décédé et son adjoint Déjean ayant démissionné avec les dix-sept autres membres du conseil municipal, des élections communales sont convoquées pour ce jour à Maison-Carrée[196].

SuccÚs pour la gauche radicale cette fois-ci, c'est Louis-EugÚne Lebailly qui devient maire de Maison-Carrée. Les nouveaux membres élus au conseil à cette occasion sont Nicolas Zévaco, Pierre Mélia, Taja, Larsaud, Keller, Rey, Berger, Crocherie, Mazoyer, Simonin et Cergé[197].

1894

(avril) - Lors de débats au Conseil Général du département d'Alger sur les mesures susceptibles d'encourager et faciliter l'exportation d'ovins d'Algérie, les conseillers Vivarez, Joayne et Delamare[198] proposent pour la premiÚre fois de créer une nouvelle piste qui serait destinée au transfert des troupeaux entre le grand marché aux bestiaux de Maison-Carrée et le port d'Alger, en évitant la route traditionnelle.

En fait, Ă  peine deux annĂ©es aprĂšs son ouverture, la ligne de train lĂ©ger des CFRA provoqua la saturation de la route traditionnelle d'Alger (qui suivait Ă  l'Ă©poque le tracĂ© des actuelles rue d’Alger, avenue de Tripoli et rue Hassiba Benbouali), les rails ayant monopolisĂ© une partie de la chaussĂ©e alors que la voie Ă©tait dĂ©jĂ  trĂšs fortement sollicitĂ©e par l'important flux de bĂ©tail transitant du marchĂ© de Maison-CarrĂ©e vers les abattoirs d’Alger et, plus encore, avec l’apparition de l’automobile en cette fin de XIXe siĂšcle. Le problĂšme Ă©tait tellement ressenti que les autoritĂ©s locales ne cessaient de faire pression sur les Ă©lus et l'administration, d'oĂč le vote ladite proposition par le Conseil GĂ©nĂ©ral d'Alger. Les services de la prĂ©fecture Ă©tudiĂšrent les tracĂ©s possibles dĂšs octobre 1894 puis une Ă©tude fut commandĂ©e, en 1896, sur ce qui fut appelĂ© « chemin littoral devant relier Maison-CarrĂ©e Ă  Alger par le bord de mer ». L'idĂ©e Ă©tait encore de rĂ©server cette seconde route exclusivement au passage des troupeaux, d’oĂč la dĂ©nomination de « piste Ă  mouton » puis de « route moutonniĂšre » qui s'attachera au projet. La piste projetĂ©e devait ainsi longer l'ancienne « route d’Alger » jusqu’à Hussein Dey aprĂšs avoir coupĂ© les lignes du « Polygone de Tir » (il s’agit d’une partie du bord de mer de ce qui est communĂ©ment appelĂ© « plage Mazella » et « Les Sablettes »), alors que la traversĂ©e de oued El-Harrach devait se faire sur un nouveau pont Ă  construire en face de la propriĂ©tĂ© des PĂšres blancs Ă  Lavigerie (act. Mohammadia). Mais, finalement, le coĂ»t du projet (estimĂ© Ă  800 000 fr d’époque pour 12 km) parut exorbitant et le Gouvernement GĂ©nĂ©ral d’AlgĂ©rie ne lui donna pas suite dans un premier temps. La municipalitĂ© de Maison-CarrĂ©e va nĂ©anmoins s'y attacher et sans cesse revenir Ă  la charge Ă  ce sujet, jusqu'Ă  ce qu'elle obtienne enfin satisfaction une quinzaine d'annĂ©es plus tard.

(Novembre) - Election municipale à Maison-Carrée.

1895

(24 février) - Inauguration par la CFRA de la ligne de tramway à vapeur reliant Saint-EugÚne (act. Bologhine) à Maison-Carrée.

Longue de 11,6 km, le terminus de la ligne se situait Ă  ce stade sur la rive gauche et opĂ©rait, Ă  son lancement, une trentaine de rotations par jour dans les deux sens, chacune reliant les deux terminus (via Hussein Dey, le Champ-de-ManƓuvre et Bab El Oued) en 50 minutes environ. Pendant ce temps, on poursuivait les travaux pour la prolongation de la ligne depuis Maison-CarrĂ©e vers Rovigo (act. Bougara) et Larbaa.

(3 avril) - Par un arrĂȘtĂ© de la PrĂ©fecture d'Alger datĂ© de ce jour, il est crĂ©Ă© Ă  Maison-CarrĂ©e un commissariat de la sĂ»retĂ© dont la juridiction devait couvrir, en plus de Maison-CarrĂ©e elle-mĂȘme, les communes de Maison-Blanche, Fort-de-l'Eau, Hussein-Dey et Kouba[199].

(24 octobre) - Lors d'une séance tenue en ce jour, le Conseil général du département d'Alger adopte une résolution portant sur l'étude d'une possible « voie pour le passage des moutons entre Alger et Maison-carrée »[200]. Il s'agit en fait de la premiÚre mention officielle du projet d'aménagement d'une seconde route vers Alger, mais qui ne verra le jour qu'une trentaine d'années plus tard sous le nom de « Route moutonniÚre ».

1896

(3 mai) - Élections municipales en AlgĂ©rie

À Maison-CarrĂ©e, le nouveau conseil municipal se compose de Lebailly (rĂ©Ă©lu maire), des adjoints Henri Tuja et Pierre MĂ©lia[201], des conseillers europĂ©ens Crocherie, Dejean, GalĂ©a, Tarsaud, Bachelot, PalomĂšs, PĂ©rez, LĂ©piney, ZĂ©vaco, Gardier, Dantoine, Delalande, Berger, Vial, Pitavin, SigaudĂšs, Lubet ainsi que des conseillers indigĂšnes Sadallah et Boughella[202].

(19 mai) - Un crime est signalĂ© Ă  Maison-CarrĂ©e. Il s'agit d'un charretier nommĂ© GĂ©labert retrouvĂ© mort par coups de couteau Ă  l'entrĂ©e du village, et dont l'assassin Ă©tait un repris de justice espagnol, Manuel EgĂ©a, lui aussi habitant de Maison-CarrĂ©e, sera recherchĂ© durant plusieurs semaines avant d'ĂȘtre arrĂȘtĂ©.

(28 mai) - Journée particuliÚrement mouvementée à Maison-Carrée : on y signale la tentative de viol d'un espagnol nommé Pepe sur une petite fille de quatre ans et, presque simultanément, une violente altercation sur la place du village entre un charretier et deux Algériens dont l'un, un nommé Tahar, a fini sortir un révolver et a failli faire feu si ce n'est l'intervention du maire Lebailly et d'autres[203].

(19 juin) - La question de l'insĂ©curitĂ© ne cesse de revenir sur la scĂšne Ă  Maison-CarrĂ©e et un article postĂ© par un habitant (signĂ© "Un vieux colon") nous offre pas mal d'informations intĂ©ressantes sur la perception qu'avaient les colons europĂ©ens Ă  cette Ă©poque du pays : « Cette rĂ©gion n'est pas au diable dans ces pays dĂ©shĂ©ritĂ©s qui n'ont ni moyens de communication, ni police organisĂ©e ; elle n'est pas dans quelque commune mixte oĂč domine l'Ă©lĂ©ment indigĂšne et oĂč l'insuffisance des moyens de rĂ©pression est Ă  l'Ă©tat endĂ©mique. Cette rĂ©gion c'est Maison-CarrĂ©e, une commune bien française celle-lĂ , par sa situation aux portes d'Alger, sur deux lignes de chemin de fer, pourvue de sa police, de sa gendarmerie, de ses gardes-champĂȘtres et de tout l'appareil de la justice et de la loi. Or, Maison-CarrĂ©e est en ce moment mise au pillage par une bande de voleurs qui ont jetĂ© leur dĂ©volu sur les moutons des propriĂ©taires du pays. Du 10 au 15 juin, cette bande a volĂ© chez M. Aourou 49 moutons, SintĂšs 77, Camps 43, mantout 39 et 40 autres chez un autre propriĂ©taire. [...] On voit que l'audace des auteurs de ces vols n'est pas banale, et qu'ils doivent se sentir bien sĂ»rs de leur affaire pour commettre dans le mĂȘme pays et cinq jours d'intervalle une telle sĂ©rie de larcins ! M. Grevy avait raison, la sĂ©curitĂ© nous l'aurons ... quand, dĂ©couragĂ©s et ruinĂ©s, nous reprendront le bateau pour Marseilles »[204].

(24 septembre) - Inauguration par la CFRA de la ligne de tramway vapeur reliant Maison-Carrée à l'Arba.

DĂ©jĂ  prĂ©vue en prolongation de la ligne St.-EugĂšne Ă  Maison-CarrĂ©e, cette nouvelle liaison demanda la construction d'un deuxiĂšme pont sur l'Harrach. Long de 60 mĂštres, l'ouvrage (communĂ©ment appelĂ© el-Qantara el-Kahla ou "Pont Noir", il fut livrĂ© en aoĂ»t 1896) permettait Ă  l'Ă©poque la traversĂ©e des petits trains de la CFRA vers un nouveau terminus situĂ©e au centre-ville Maison-CarrĂ©e (Ă  ne pas confondre avec la gare PLM sur la rive gauche qui abrite encore de nos jours la gare SNTF d'El-Harrach) qui se situait sur l'actuelle rue SaĂŻd Mokrani (juste derriĂšre le collĂšge al-Farazdaq), et dont le bĂątiment principal -encore existant mais peu visible depuis l'extĂ©rieur- servira plus tard (aprĂšs la fermeture de la ligne au dĂ©but des annĂ©es 1930) comme siĂšge de l'organisme municipal chargĂ© des routes et chaussĂ©es et qui se trouve de nos jours mitoyen de l'antenne ANEM d'El-Harrach. Depuis ce point, la ligne (dont les rails Ă©taient plus Ă©troits que ceux de la ligne PLM car conçus pour des trains plus lĂ©gers assimilĂ©s Ă  des tramways) se dirigeait vers la place de la Mairie par l'act. avenue du 5 juillet 1962, empruntait ensuite l'act. rue Belkacem Tabount et dĂ©bouchait sur le "Pont Noir" par lequel ses trains traversaient l'Harrach vers la rive gauche et suivre, Ă  partir de lĂ , la route ordinaire d'Alger par Hussein-Dey (act. avenue de Tripoli).

1897

(19 janvier) - PremiÚre exécution d'une peine de mort par guillotine attestée à Maison-Carrée.

Le condamnĂ© est un ressortissant espagnol nommĂ© Manuel ÉgĂ©a qui avait assassinĂ© de trois coups de couteau (le 17 mai 1896) un certain M. GĂ©labert, entrepreneur Ă  Maison-CarrĂ©e pour un motif assez banal. Le meurtrier n'en Ă©tait pas Ă  sa premiĂšre affaire puisque, quelques annĂ©es plus tĂŽt, il fut condamnĂ© Ă  un an de prison pour avoir, Ă  la suite d'une dispute, frappĂ© de treize coups de couteau un de ses camarades. AprĂšs sa condamnation dĂ©finitive, EgĂ©a est conduit en ce jour de la prison Barberousse Ă  Alger jusqu'Ă  la mairie de Maison-CarrĂ©e oĂč il arrive Ă  4 h 40. InformĂ© Ă  5 h 45 de la sentence, l'homme se montra d'abord calme et dĂ©clara « je savais que j'allais ĂȘtre exĂ©cutĂ©. Mais on ne meurt qu'une fois ». AprĂšs s'ĂȘtre confessĂ© Ă  un prĂȘtre, il fuma plusieurs cigarettes et but deux verres de rhum. Puis, jugeant que l'affaire traĂźnait trop Ă  son goĂ»t, il s'emporta Ă  un moment en criant « C'est bien long ! Mierda ! Qu'est-ce qu'on attend pour m'exĂ©cuter ? ». ConfiĂ© aux exĂ©cuteurs, il discuta avec eux pendant la toilette, allant jusqu'Ă  s'asseoir de lui-mĂȘme sur le tabouret. Il quitte ensuite la mairie d'un pas ferme, les yeux baissĂ©s pendant qu'il parcourait les 30 mĂštres qui sĂ©parent l'HĂŽtel de Ville de la guillotine. Quelques cris « A mort ! » retentissent dans l'assistance Ă  la chute du couperet Ă  6 h 30.

(6 mars) - Une violente tempĂȘte provoque, dans la nuit, un dĂ©bordement de l'Oued El-Harrach et une nouvelle inondation Ă  Maison-CarrĂ©e.

- PremiÚre parution du Bulletin Municipal de Maison-Carrée, organe officiel et mensuel de la municipalité.

1898

- Établissement du tout premier bureau de poste Ă  Maison-CarrĂ©e.

SituĂ© dans un local exigu de la rue Arago (act. rue Ahmed Aoun), ce premier office postal sera d'abord agrandi en 1920 avant d'ĂȘtre transfĂ©rĂ© dĂ©finitivement vers de nouveaux locaux en 1921. Le nouveau bĂątiment, appelĂ© "immeuble Bomati"[205] parce qu'il appartenait Ă  l'origine au grand propriĂ©taire immobilier Vincent Bomati, se situait Ă  cĂŽtĂ© du Groupe Scolaire (act. collĂšge al-Farazdaq) dont on allait entamer la construction et de ce qui Ă©tait encore appelĂ© "Place des Palmiers" (act. Jardin Abdelhamid b. Badis). Le bĂątiment en question existe encore et abrite toujours la Poste d'El-Harrach.

(6 mars) - Inondation à Maison-Carrée à la suite d'une crue de l'oued Harrach.

(26 avril) - Une nouvelle crue importante de l'Harrach provoque de nombreux dĂ©gĂąts dans la ville de Maison-CarrĂ©e et sa pĂ©riphĂ©rie, causant notamment l'arrĂȘt de l'usine Dessoliers[206].

(16 Octobre) - Les CFRA inaugurent une deuxiĂšme ligne de chemin de fer lĂ©ger au dĂ©part de Maison-CarrĂ©e, reliant cette fois-ci la ville Ă  la localitĂ© de Rovigo (act. Bougara) dans la Mitidja sur 25,6 km. Cette ligne va subsister jusqu'en dĂ©cembre 1934.

(4 décembre) - AprÚs la création d'une assemblée coloniale appelée à délibérer sur le budget algérien (les Délégations FinanciÚres d'Algérie), le premier tour des élections des délégués financiers se tient en ce jour à travers le pays.

Dans la circonscription de Maison-Carrée, c'est le notable et pharmacien Nicolas Zévaco qui sera élu pour cette toute premiÚre assemblée, en compagnie d'un certain C. Boniface. Par la suite, si ce dernier ne se fera plus entendre, Zévaco se maintiendra en poste dans toutes les législatures, et ce jusqu'aux derniÚres élections qui vont précéder son décÚs en juin 1928 et dans lesquels il se fera remplacer par son fils Raoul.

1899

(avril) - L'AbbĂ© Barreau succĂšde Ă  Favier Ă  la tĂȘte de la paroisse catholique de Maison-CarrĂ©e. Il restera curĂ© de la localitĂ© jusqu'en janvier 1922 et il y sera enterrĂ© Ă  sa mort en novembre 1924.

1900

(Septembre ?) - Inauguration de la premiÚre véritable école publique à Maison-Carrée.

Projet lancé par la municipalité en août 1899, le nouvel établissement était nommé Groupe Scolaire de Maison-Carrée et consistait au départ de quatre classes réservées aux enfants européens de la localité. Une vingtaine d'années plus tard, à la fin de la 1ere Guerre mondiale, l'école sera rebaptisée du nom de Laverdet qui y exerçait comme professeur et qui avait trouvé la mort au cours du conflit. L'édifice existe encore de nos jours et abrite un établissement d'enseignement moyen sous le nom de collÚge Al-Farazdaq d'El-Harrach.

1901

1902

(11 janvier) - Le correspondant local d'un journal français rapporte, dans l'édition de ce jour, quelques informations intéressantes concernant la vie quotidienne à Maison-Carrée :

Des questions d'hygiĂšne d'abord lorsqu’il se plaint que "les propriĂ©taires ne tiennent aucun compte de l'avis ordonnant le blanchiment des immeubles. Certaines maisons laissent Ă  dĂ©sirer au point de vue de l'hygiĂšne. La caserne de la gendarmerie elle-mĂȘme Ă  besoin d'ĂȘtre recrĂ©pie"[207]. Il Ă©voque ensuite des problĂšmes d'insĂ©curitĂ© tels que perçus par les europĂ©ens Ă  l'Ă©poque, dĂ©crivant la police municipale de Maison-CarrĂ©e qui opĂšre, depuis quelques jours, de nombreuses arrestations d'indigĂšnes, et qui se demande si on ne "pourrait pas dresser des procĂšs-verbaux aux cafetiers qui logent des indigĂšnes non munis de permis de voyage ?"[208]. Plus intĂ©ressant encore, environ trois mois aprĂšs ces dĂ©pĂȘches, le mĂȘme correspondant raconte avec satisfaction comment les deux problĂšmes auraient Ă©tĂ© trĂšs astucieusement solutionnĂ©s par la municipalitĂ© et son "dĂ©vouĂ© agent indigĂšne, le nommĂ© Tahar, qui a profitĂ© des leçons d’hygiĂšne de son ancien chef, M. Labri, aujourd'hui commissaire de police Ă  l'Arba, par un procĂ©dĂ© des plus simples, et qui consiste a transformer en corvĂ©e une demi-journĂ©e de prison dont les indigĂšnes en dĂ©faut sur la loi de l'indigĂ©nat, que l'on trouve dans nos cafĂ©s maures sans permis de voyage sont passibles". Il ajoute ensuite -avec une note de lyrisme raciste- que "avec quelques exemples de ce procĂ©dĂ©, ces derniers ne s'aventureront plus dans notre commune et iront chercher ailleurs un soleil plus clĂ©ment Ă  leur fainĂ©antise qui les conduit toujours au vol"[209].

(23 janvier) - Devant la dĂ©gradation de l'hygiĂšne dans le village, le maire de Maison-CarrĂ©e promulgue un arrĂȘtĂ© interdisant formellement aux habitants de dĂ©poser leurs ordures sous les ponts ou sur les rives de l'Harrach[210].

(27 avril) - Elections législatives.

A Maison-Carrée (1ere Circonscription), on voit s'affronter le député sortant, l'anti-juif Edouard Drumont, et son concurrent républicain Maurice Colin. L'atmosphÚre, trÚs particuliÚre, était celle de la querelle anti-juive qui caractérisa toute la scÚne politique française en Algérie à cette époque. Ainsi, soutenu par le maire Lebailly et le conseiller municipal Zeévaco, le candidat républicain animait une conférence électorale dans une salle de la mairie de Maison-Carrée lorsque son adversaire, accompagné de toute une bande de partisans, y débarqua et il s'ensuivit une altercation fit annuler le meeting.

(Mai) - Elections municipales en Algérie.

L'industriel Frédéric Altairac, ancien conseiller municipal de Maison-Carrée et conseiller général pour la 10e Circonscription depuis 1887, est élu maire d'Alger. Il restera en poste jusqu'en 1908.

(3 juin) - Une brÚve invasion de sauterelles est enregistrée à Maison-Carrée, mais passe sans grands dégùts[211]. Une nouvelle nuée est signalée deux jours plus tard, mais causa d'importants dégùts dans les fermes et les cultures des alentours, notamment la propriété Soleri et le vignoble des PÚres-Blancs à Lavigerie[212].

(18 juillet) - Une épidémie de fiÚvre typhoïde se répand parmi la troupe stationnée dans la caserne de Belfort à Maison-Carrée[213], occupée à cette époque par une unité du Génie. Causée par des problÚmes d'insalubrité de l'eau potable, cette situation sanitaire forcera le commandement français à Alger d'évacuer le site pour un temps.

(21 août) - Des nouvelles concernant la fermeture imminente de la caserne de Belfort mettent la population européenne de Maison-Carrée en émoi, ce qui fut immédiatement relayé par la municipalité : « Le Conseil municipal de Maison-Carrée a décidé de signaler à l'autorité militaire le préjudice que cause au commerce local l'évacuation des troupes hors de cette commune et la prier de faire rentrer celle-ci, le plus tÎt possible, dans leur ancienne garnison. Il a émis également que la construction d'une caserne soit entreprise d'urgence, afin de voir supprimer les inconvénients résultant de l'installation défectueuse des troupes. [...] le Ministre de la guerre a prié le commandant du 19e Corps de lui rendre compte des dispositions qu'il adoptera en vue de la réintégration des locaux évacués. Il est aussi recommandé au général Caze de continuer à faire étudier, par les services intéressés, la question encore pendante de l'emplacement à choisir pour la construction des nouveau casernements »[214].

1903

1904

(27 avril) - Tard dans la nuit, oued l'Harrach et oued Smar débordent de leurs lits et provoquent d'importantes inondations à Maison-Carrée et sa région. Furent particuliÚrement touchés les usines Galéa et Altairac, le dépÎt électrique et les installations des chemins de fer, ainsi que beaucoup d'immeubles au Sud de la localité, sur la route de Rivet (act. Meftah). La conduite des eaux d'alimentation ayant été emportée, la ville fut privée d'eau potable un certain temps[215].

1905

(1er mai) - Elections municipales en Algérie.

A Maison-Carrée, parmi les nouveaux élus au Conseil municipal se trouvait le commerçant Michel Redon (né à Maison-Carrée en 1871), poste qu'il ne quittera plus durant les 30 années à venir.

- Fondation de l’ École d’Agriculture AlgĂ©rienne Ă  Maison-CarrĂ©e.

Il s’agissait en fait d'un transfert de l’ancienne École Pratique d’Agriculture (installĂ©e depuis 1880 Ă  RouĂŻba, annexe de la commune de Maison-CarrĂ©e Ă  l'Ă©poque) vers ce qui Ă©tait appelĂ© « Plateau de Belfort » Ă  Maison-CarrĂ©e. Le nouvel Ă©tablissement occupait 63 hectares et disposait de grands jardins, d’espaces pour les cultures expĂ©rimentales, d’un vignoble de 25 hectares, d’une station botanique et possĂ©dait aussi un jardin maraĂźcher s'Ă©talant jusqu'au lieu-dit Les Cinq-Maisons. En plus des bĂątiments d’enseignement qui y furent construits selon un trĂšs beau style nĂ©o-mauresque, on y trouvait des Ă©tables diverses, un atelier de prĂ©paration des aliments, un silo Ă  grains et fourrages ainsi qu’une cave et un rucher. Ayant gagnĂ© une solide rĂ©putation, l'Ă©cole devient en 1947 un Institut National d'Agriculture d'Alger.

AprĂšs l'indĂ©pendance de l'AlgĂ©rie, l'Ă©tablissement continuera d'exister d'abord comme Institut National Agronomique (INA) Ă  partir de 1968, ensuite comme École Nationale SupĂ©rieure Agronomique (ENSA) d'El-Harrach depuis 2008, date Ă  laquelle il y eut une extension assez importante de sa superficie par l'adjonction de terrains annexes.

- Inauguration du Marché couvert de Maison-Carrée.

DiscutĂ© par municipalitĂ© dĂšs 1902, le projet d'un grand marchĂ© couvert est lancĂ© en janvier 1904 sur la base d'un concours. Le plan choisi Ă©tait en charpente mĂ©tallique, suivant un style de construction qui Ă©tait trĂšs en vogue Ă  l'Ă©poque. SituĂ© en face de la mairie, ce marchĂ© existe encore de nos jours, mais se trouve en assez mauvais Ă©tat de conservation. RebaptisĂ© MarchĂ© Zakaria aprĂšs l'indĂ©pendance de l'AlgĂ©rie, il sert dĂ©sormais de marchĂ© aux vĂȘtements pour moitiĂ© et de galerie aux poissons pour l'autre moitiĂ©, la ruelle (act. rue Ahmed AĂŻt-Mohand) qui le traverse Ă©tant Ă  son tour occupĂ©es Ă  longueur de journĂ©e par les Ă©tals de fortune et lui sert comme un prolongement.

- La SociĂ©tĂ© des Produits Chimiques d’Alger, qui possĂ©dait une usine de fabrication d’acide sulfurique Ă  Maison-CarrĂ©e, dĂ©cide de transfĂ©rer son activitĂ© de la rive droite vers la rive gauche de l'Oued El-Harrach. Or, s’agissant d’une activitĂ© trĂšs polluante, l'idĂ©e provoqua une vive rĂ©action de la part des riverains et de certains membres du conseil municipal. Ils firent remarquer que la rive gauche relevait administrativement de la commune d’Hussein Dey et que, de ce fait, c’est ladite circonscription qui allait bĂ©nĂ©ficier des dividendes financiers de cette installation alors que la ville de Maison-CarrĂ©e aura toujours Ă  supporter les dĂ©sagrĂ©ments et les rejets industriels ainsi que les frais financiers qui en dĂ©coulent, sachant que les habitants de ce qui Ă©tait appelĂ© alors « quartier de l’Harrach » (il s’agit en fait des anciennes maisons qui jouxtaient directement les berges de l’oued et dont une bonne partie n’existe plus de nos jours) souffraient dĂ©jĂ  Ă©normĂ©ment des odeurs pestilentielles que dĂ©gageait une usine d’engrais de la sociĂ©tĂ© Holden.

L'oued en lui-mĂȘme restait pourtant praticable Ă  cette Ă©poque. Certes, un arrĂȘtĂ© municipal du proclame une interdiction de baignade dans les parties de oued El-Harrach et de oued Smar qui traversent la ville de Maison-CarrĂ©e ("depuis des ponts de la voie ferrĂ©e au Sud jusqu’à 200 m aprĂšs le pont CFRA" ou El-Qantara El-Kahla au Nord, prĂ©cise-t-on dans le document). Toutefois, la mairie ne justifie pas cette dĂ©cision par des considĂ©rations de santĂ© publique, mais par le fait que de nombreux accidents de noyade furent enregistrĂ©s et par le fait que les baigneurs revĂȘtaient souvent des tenues jugĂ©es indĂ©centes pour les mƓurs de l’époque. Le seul Ă©lĂ©ment d'hygiĂšne contenu dans cet arrĂȘtĂ© concerne l'interdiction faite aux riverains de laver leur linge sur ce mĂȘme parcours. Quoi qu'il en soit, cette mesure ne semble pas avoir eu l'effet escomptĂ© puisqu'un nouvel arrĂȘtĂ© sera promulguĂ© en pour rappeler une fois encore aux habitants que la baignade Ă©tait interdite dans l’oued.

1905

1906

(4 mars) - PubliĂ©s en ce jour[216], les rĂ©sultats du recensement de 1905 donnent pour la localitĂ© de Maison-CarrĂ©e une population totale de 7 582 habitants dont 4 612 europĂ©ens (soit 61 %, y compris 1 338 personnes qui ne portent toujours pas la nationalitĂ© française) rĂ©partis sur 1 007 mĂ©nages, et 2 970 musulmans (39 %, dont 63 Marocains et Tunisien) rĂ©partis sur 585 mĂ©nages. En dehors du pĂ©rimĂštre urbain, on dĂ©nombre sur le territoire de la commune 410 maisons, 283 gourbis et 4 tentes.

(20 septembre) - Par dĂ©cret prĂ©sidentiel datĂ© de ce jour, le « quartier dit de la gare PLM de la commune d’Hussein-Dey et comprenant une superficie de 61 hectares 53 ares » est officiellement rattachĂ© Ă  la commune de Maison-CarrĂ©e, rĂ©unissant pour la premiĂšre fois la rive droite et la rive gauche de l'Harrach au sein de la mĂȘme circonscription depuis 1856.

(12 octobre) - Une dĂ©cision de la prĂ©fecture d’Alger datĂ©e de ce jour prononce l’expulsion, sous escorte de la gendarmerie, d’un certain Hamoud b. Lakhdar Djouabi vers Maison-CarrĂ©e d’oĂč il est originaire au motif qu’il constituait un danger pour l’ordre public dans la capitale. Nous avons lĂ  le plus ancien exemple de « truand » harrachi attestĂ© par une source historique.

- Une crue exceptionnelle de Oued El-Harrach inonde une nouvelle fois la ville de Maison-CarrĂ©e, l’eau y ayant atteint plus de m dans certains quartiers et laissa plusieurs victimes selon la presse. Une fois l'orage passĂ©, des travaux de curage des berges furent entrepris par la municipalitĂ© et l'embouchure fut dĂ©sensablĂ©e dans l'espoir d'attĂ©nuer ce phĂ©nomĂšne rĂ©current.

1907

- À la suite d'une petite polĂ©mique entre la sociĂ©tĂ© de chemin de fer PLM et la municipalitĂ© de Maison-CarrĂ©e Ă  propos de l’amĂ©nagement d’un terrain vague jouxtant la gare ferroviaire, un accord est finalement conclu entre les deux parties pour la construction d’un escalier en pierre. Si l’ancienne gare de Maison-CarrĂ©e sera dĂ©molie vers la fin des annĂ©es 1980 et remplacĂ©e (au mĂȘme endroit) par l'actuelle gare SNTF d'El-Harrach, ledit ouvrage en maçonnerie construit en 1907 (formant Ă  la fois un escalier Ă  double rampe et un mur de soutĂšnement) existe encore de nos jours, bien qu'assez mal conservĂ©.

1908

(10 novembre) - Un violent orage provoque une crue de l'Oued El-Harrach et une inondation dans la zone industrielle de Maison-Carrée, et particuliÚrement les usines Altairac.

1909

(27 janvier) - Inauguration d'une nouvelle ligne des CFRA, reliant cette fois-ci Maison-CarrĂ©e Ă  la localitĂ© de AĂŻn-Taya (20 km).

(15 fĂ©vrier) - Lors de la session ordinaire du conseil municipal tenue en ce jour, le maire LĂ©on Lebailly fait lecture de la rĂ©ponse reçue de l’AcadĂ©mie d'Alger sur le projet de construction d’une nouvelle Ă©cole Ă  Maison-CarrĂ©e[217]. Le document est intĂ©ressant, dans le sens oĂč il nous Ă©claire sur la gĂ©ographie de la ville Ă  cette date et sur l’apprĂ©ciation que l'on avait de ses diffĂ©rents quartiers Ă  l'Ă©poque :

« Au sujet de l’emplacement de la future Ă©cole primaire projetĂ©e Ă  Maison-CarrĂ©e, mon avis est qu’il conviendrait de ne pas trop l’éloigner du centre de la ville, vers oĂč convergent toutes les voies de communication. N’étaient la rĂ©putation d’insalubritĂ© que possĂšdent, Ă  tort peut-ĂȘtre, les quartiers du centre, et l’inquiĂ©tude que pourraient en Ă©prouver certains pĂšres de famille s’ils voyaient l’école s’y Ă©difier, c’est vers ces quartiers mĂȘmes que se porterait mon choix. Le quartier PLM n’est pas trĂšs Ă©loignĂ© du centre, mais pour y accĂ©der, il faut traverser la voie du chemin de fer. Il peut en rĂ©sulter un certain danger. Peut-ĂȘtre aussi, le voisinage de certaines usines ne serait-il pas sans prĂ©senter quelques inconvĂ©nients. Le quartier de Belfort est tout Ă  fait sain ; malheureusement, il s’étend sur un plateau dont les facilitĂ©s d’accĂšs ne sont pas trĂšs grandes et, surtout, il est trĂšs Ă©loignĂ© du centre. À mon avis, le meilleur emplacement [
] c’est celui du lot de terrain oĂč se trouvent l’ancienne Ă©cole de filles et le presbytĂšre. La proximitĂ© du centre-ville, le voisinage de la forĂȘt, la salubritĂ© de l’endroit et le magnifique horizon qu’on y dĂ©couvre, contribuent Ă  rendre ce site parfaitement appropriĂ© Ă  nos desseins, d’autant plus que la municipalitĂ© peut y disposer de 6 000 m2 d’aprĂšs les renseignements que vous avez bien voulus me donner. Il ne prĂ©sente qu’un seul inconvĂ©nient [
] la dĂ©clivitĂ© du sol Ă©tant considĂ©rable, des glissements de terrain sont Ă  craindre. [
] Mais s’il Ă©tait possible de faire disparaĂźtre cette menace d’insĂ©curitĂ© je me prononcerais sans hĂ©siter pour cet emplacement ».

Finalement, le conseil dĂ©cida de suivre la recommandation de l’AcadĂ©mie et d’abandonner l’idĂ©e initiale d'acheter un terrain dans le quartier de Belfort et dont les propriĂ©taires, M. SintĂšs et M. KanouĂŻ, avaient dĂ©jĂ  Ă©tĂ© approchĂ©s par le maire. Pourtant, cinq ans plus tard, la municipalitĂ© va revenir Ă  sa premiĂšre dĂ©cision et le terrain en question sera effectivement acquis par la ville afin d’y construire un deuxiĂšme groupe scolaire, mais qui sera destinĂ© aux jeunes filles dans un premier temps. Toutefois, l'opĂ©ration ayant Ă©tĂ© effectuĂ©e quelques semaines Ă  peine avant le dĂ©but de la 1re Guerre Mondiale, la rĂ©alisation du projet sera reportĂ©e de quelques annĂ©es.

(mars) - Souhaitant promouvoir certaines voies de communication de la commune en routes vicinales, les autoritĂ©s entament des dĂ©marches avec certains propriĂ©taires locaux afin qu’ils cĂšdent des portions de leurs terrains Ă  la municipalitĂ© de Maison-CarrĂ©e. Il s’agissait notamment du chemin reliant alors " la RN n°5 Ă  Fort-de-l’Eau " (act. Bordj-El-Kifane) et qui nĂ©cessitait que ce qui Ă©tait appelĂ© « chemin du Parc Bomati » soit cĂ©dĂ© Ă  la commune. ApprochĂ© par le maire Ă  cet effet, le propriĂ©taire (il s'agit de Vincent Bomati) accepte bien la cession d’une bande de terrain, mais sous certaines conditions et notamment le droit de crĂ©er sur le terrain en façade de ladite voie (act. rue Abdelouahab Guetaf Ă  El-Harrach) autant de rues qu’il lui conviendrait d’ouvrir pour accĂ©der Ă  la route une fois celle-ci Ă©rigĂ©e en chemin d’intĂ©rĂȘt commun. Un accord fut conclu sur cette base et c’est ainsi que va naĂźtre peu Ă  peu le quartier « du Parc Bomati », et qu'on appelle encore de nos jours « le Parc » pour sa partie la plus ancienne et « BoumĂąati » pour les zones qui ont Ă©tĂ© construites au cours des annĂ©es 1990.

(9 mai) - Inauguration de l’hippodrome du Caroubier par l' Association Hippique de l’Harrach qui organise, en ce jour, le tout premier pari mutuel. L'Hippodrome existe encore de nos jours alors que tout un quartier s'est dĂ©veloppĂ© dans les environs sous le nom d' al-Kharrouba. En fait, il s'agissait Ă  l'origine d'un simple lieu-dit, Ă  la sortie de Maison-CarrĂ©e sur la route d'Alger, oĂč se tenait un grand arbre de caroubier et dont on se servait communĂ©ment pour dĂ©signer la station du tramway des CFRA qui y faisait halte.

1910

- Création de la Société des courses de l'Harrach par Frédéric Altairac, Michel Redon et d'autres notables de Maison-Carrée.

(20 mars) - Tenue du 1er CongrÚs des Maires du département d'Alger.

Maison-CarrĂ©e y est reprĂ©sentĂ©e par son maire de l'Ă©poque, Louis Lebailly, qui se fait mĂȘme Ă©lire comme un des trois assesseurs du bureau du CongrĂšs[218].

1911

(mars) - Selon la presse algéroise, un insecte nouvellement découvert (nommé Eupedis par les scientifiques) provoque des ravages dans les vignobles à Maison-Carrée[219].

() - Une nouvelle crue de l'Oued El-Harrach a lieu Ă  Maison-CarrĂ©e. L'alerte lancĂ©e dĂšs 22h00 du soir prĂ©cĂ©dent, le cours de l'oued dĂ©borde rapidement au matin et provoque les inondations les plus violentes jamais enregistrĂ©es jusque-lĂ , les eaux ayant atteint 2,80 m dans le cafĂ© nommĂ© « Les PyrĂ©nĂ©es » selon certains tĂ©moignages de l'Ă©poque. Parmi les victimes de la catastrophe, on dĂ©nombre un gendarme qui se serait noyĂ© dans au centre-mĂȘme de la ville en tentant de secourir des passants. La municipalitĂ© de Maison-CarrĂ©e dĂ©cidera par la suite de dĂ©limiter un pĂ©rimĂštre non constructible le long des berges de l’Oued et le fera respecter de maniĂšre trĂšs stricte.

- La population de la commune de Maison-CarrĂ©e se chiffre Ă  9 678 habitants, dont 60 % d’EuropĂ©ens et 40 % d’AlgĂ©riens musulmans.

1912

- Fondation du Racing Club de Maison-CarrĂ©e (RCMC), premier club de football dans l'histoire de la ville. CrĂ©Ă© par Nicolas ZĂ©vaco, pharmacien et grand notable de Maison-CarrĂ©e, le RCMC deviendra le club attitrĂ© des EuropĂ©ens de la ville. Évoluant au sein de la Ligue d'Alger de Football Ă  sa crĂ©ation en 1920, la participation du club maison-carrĂ©en sera modeste puisqu'il ne semble pas avoir remportĂ© de trophĂ©e jusqu'Ă  sa disparition en 1962.

(11 mars) - La presse[220] rapporte les nouvelles d'un crime qui eut lieu Ă  Maison-CarrĂ©e. L'affaire se dĂ©roula vers 7h du matin dans le marchĂ©-couvert, lorsqu'un ouvrier nommĂ© Henri Scala fut mortellement poignardĂ© au cƓur par un collĂšgue Ă  lui, un certain Joseph Guardiola. Les deux hommes, habitant Alger et employĂ©s par une entreprise locale sur le chantier de construction d'une nouvelle prison Ă  Belfort, se seraient bagarrĂ©s la veille sur un sujet banal avant que la situation ne s'envenime et n'aboutisse au drame : un premier coup fut assĂ©nĂ© par le meurtrier sur la Place de la RĂ©publique ; la victime s'enfuit en direction du MarchĂ©-couvert oĂč elle fut rattrapĂ©e et achevĂ©e. L'auteur fut aussitĂŽt arrĂȘtĂ© par un agent de la police municipale qui se trouvait sur les lieux.

(Printemps) - Une période de sécheresse s'annonce à Maison-Carrée et provoque de grands soucis pour les agriculteurs locaux[221].

(6 avril) - Livraison Ă  la circulation du nouveau pont de l'Harrach[222]. Plus large que l'ancien et totalement en bĂ©ton (technologie encore nouvelle Ă  l'Ă©poque), l'ouvrage vint remplacer le vieux pont ottoman dont les derniers vestiges sont dĂ©molis en mĂȘme temps que le tablier mĂ©tallique qui lui fut adjoint dans les annĂ©es 1870.

L'idĂ©e de faire rĂ©parer le vieux pont est Ă©voquĂ©e une premiĂšre au sein du Conseil municipal de Maison-CarrĂ©e en mars 1897[223]. Par la suite, les archives indiquent que le sujet Ă©tait encore en discussion en fĂ©vrier 1906, l'administration coloniale ayant alors examinĂ© plusieurs projets d’élargissement et de reconstruction et qu'il fut mĂȘme question Ă  un moment de modifier carrĂ©ment le tracĂ© de la RN5 et de dĂ©localiser totalement l’emplacement du pont hors de Maison-CarrĂ©e, idĂ©e que les habitants et propriĂ©taires de ce qui Ă©tait appelĂ© « quartier de l’Harrach » (appuyĂ©s par le puissant Jacques Duroux dont le tracĂ© annoncĂ© en projet traversait justement des immeubles Ă  lui) s’opposĂšrent Ă  cette option et le gouverneur Charles Jonnart finit par accepter que la reconstruction du pont se fasse au mĂȘme emplacement. Les travaux furent entamĂ©s vers 1910, et l'Ă©difice final est celui-lĂ  mĂȘme qui se trouve de nos jours Ă  El-Harrach de nos jours sous le nom de "Pont du 1er novembre" ou, plus communĂ©ment, le « Pont Blanc » (el-Qantara el-Bidha) qui constitue un des points les plus distinctifs de la ville.

(5 mai) - Élections municipales Ă  Maison-CarrĂ©e.

Le premier tour (5 mai) annonce la victoire de la liste de Frédéric Altairac qui est élu maire, et de son allié Jacques Duroux qui devient 1er adjoint avec un certain Michel Germain comme 2nd adjoint. Toutefois, ce premier résultat sera ùprement contesté par le maire sortant Léon Eldine qui porta bien l'affaire devant les tribunaux, mais sans succÚs.

Une semaine plus tard, le rĂ©sultat du 2e tour des Ă©lections (tenu le 12 mai) fut lui aussi l'objet de contestation de la part des candidats Trudhumeau et Gintestet. Ceux-ci eurent plus de succĂšs puisque le tour se verra effectivement annulĂ© par le Conseil d'État par un arrĂȘtĂ© datĂ© du 04/03/1913 qui ordonne la rĂ©Ă©dition du scrutin pour les 8 candidats dans un dĂ©lai de deux mois. L’élection sera ainsi tenue le 18/05/1913 et c'est un certain EugĂšne Boisset, lui aussi de la liste Altairac, qui sortira finalement vainqueur de cette interminable bataille avec 640 voix sur un total de 1.030 votants[224].

(mai) - Ouverture au public de l'Electric-Théùtre, premiÚre salle de spectacles à Maison-Carrée. Propriété d'un certain Di Martino, l'établissement était aussi nommé Eden-Théùtre et il abrita peu aprÚs les toutes premiÚres projections cinématographiques dans l'histoire de la ville.

- Inauguration de la Maison Centrale de l'Harrach. Il s'agissait d'un nouvel Ă©tablissement pĂ©nitentiaire en remplacement de l'ancienne prison abritait le vieux bordj de la Maison-CarrĂ©e depuis 55 ans et qui, remis de nouveau Ă  l'armĂ©e française, reprit sa fonction de caserne[225]. Ladite prison, situĂ©e quelques centaines de mĂštres en amont de l'ancienne, mais toujours dans le quartier de Belfort, Ă©tait la plus vaste et l'une des plus modernes du pays en son temps, sans que cela n'empĂȘche totalement les Ă©vasions pour les plus tĂ©mĂ©raires puisque, Ă  peine inaugurĂ©e, la presse algĂ©roise annonce la fuite d'un certain Ahmed b. Ali b. Amar b. DjemĂąa, puis son arrestation six semaines plus tard[226]. Cet Ă©tablissement existe encore de nos jours et reste une des prisons les plus connues d'AlgĂ©rie.

(Juin) - Nouvelle affaire sordide Ă  Maison-CarrĂ©e : selon la presse[227] locale, un Ă©picier de la ville, nommĂ© Mellah Boudjemaa b. Mohamed et ĂągĂ© de 70 ans, s'est fait agresser dans sa boutique et dĂ©cĂ©da des suites des coups de couteaux qu'il avait reçu de son agresseur. Le meurtrier, un adolescent de 15 ans nommĂ© Bouaklaz Yahia, fut arrĂȘtĂ© le soir-mĂȘme et, tout en reconnaissant les faits, affirma avoir agi par vengeance du vieillard qui lui aurait fait des avances. Le vieil Ă©picier Ă©tant connu de longue date Ă  Maison-CarrĂ©e, il n'y eut nul tĂ©moignage dĂ©favorable sur sa moralitĂ©, ce qui vaudra une condamnation Ă  8 annĂ©es de rĂ©clusion pour le jeune meurtrier en janvier 1913.

(22 décembre) - Sous l'intitulé d'insuffisance de la force de police à Maison-Carrée, un petit article de presse[228] exprime la vision européenne de la situation sécuritaire dans la ville à cette époque : "Deux agents, un brigadier et un garde, voilà de quoi se compose notre police, en face d'une véritable armée de malandrins attirée à Maison-Carrée par les prisons, surtout par celle de femmes. Les malfaiteurs indigÚnes sont aussi nombreux et se recrutent parmi cette jeunesse oisive qui passe ses journées et ses nuits à jouer aux cartes, dans les cafés maures et à exploiter les marchés".

(29 décembre) - Dans une lettre à la presse locale, un européen habitant à Maison-Carrée critique les autorités locales et rapportent sa vision sur l'état de la ville à cette époque : "Depuis que Jacques Duroux, sous le pseudonyme d'Altairac, est maire de Maison-Carrée, notre cité est d'une saleté repoussante. Nos marchés servent de dortoirs et de remises aux gitanos et aux indigÚnes vagabonds"[229].

1913

(3 janvier) - Un certain Amrouz Ali b. Hadj-SaĂŻd, originaire d'un petit village du cĂŽtĂ© de DrĂąa El-Mizane oĂč il aurait commis -quelques semaines auparavant- un meurtre contre une europĂ©enne, se fait arrĂȘter Ă  Maison-CarrĂ©e par un agent indigĂšne nommĂ© Gunorni.

(15 avril) - Alors que l'unité se trouvait en opération au Maroc, le commandement de l'Armée française d'Afrique décide de retirer trois bataillons du 1er régiment de tirailleurs algériens (RTA) pour créer un nouveau régiment qui sera nommée 5e Régiment de tirailleurs algériens (5e RTA). Au grand dam de la localité de Dellys vers laquelle était au départ prévue cette affectation, et au grand bonheur des habitants européens du quartier Belfort, le 1er bataillon de cette nouvelle unité ainsi que son quartier-général et dépÎt d'armes seront établis dans le vieux bordj de la Maison-Carrée, et dont le nom restera désormais étroitement lié au 5e RTA, jusqu'à la dissolution du corps en mai 1941[230].

(6 mai) - Le premier conseil de révision pour le recensement des conscrits indigÚnes au service militaire français se tient à Maison-Carrée.

Le service militaire obligatoire a été institué pour les musulmans d'Algérie en février 1912[231], prévoyant alors un recensement annuel des jeunes hommes indigÚnes dans chaque commune, pour un systÚme de conscription partielle par tirage au sort, sachant que ces conscrits musulmans seraient astreints à un service de trois années alors que les européens se servaient que deux ans.

De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, cette mesure fut perçue trĂšs nĂ©gativement par les algĂ©riens et le dĂ©but de son application suscita mĂȘme des altercations et des incidents Ă  certains endroits du pays. L'administration coloniale procĂ©da alors avec prudence et il fut dĂ©cidĂ© de limiter l'exercice 1912 Ă  la moitiĂ© des communes seulement, de et traiter l'autre moitiĂ© en 1913. La commune de Maison-CarrĂ©e fit partie de cette seconde vague et la tenue de ce premier conseil de rĂ©vision suscitait clairement des inquiĂ©tudes de la part des autoritĂ©s locales vu qu'un dispositif sĂ©curitaire particulier a Ă©tĂ© dĂ©ployĂ© autour de la mairie en ce jour selon ce qui est rapportĂ© par la presse.

Finalement, l'opération se déroula dans le calme et il en sortit un total de 154 inscrits indigÚnes dont 16 furent déclarés bons pour le service. Sur le nombre restant 3 personnes sont ajournées, 2 sont excusées, 2 comptabilisés comme erreurs d'inscription, 38 sont exemptées, 28 dispensées, 48 sont inscrites d'office, 8 sont inscrites dans d'autres communes et enfin 15 personnes sont écartés par le tirage au sort[232].

(22 juin) - Meurtre en public Ă  Maison-CarrĂ©e : en soirĂ©e, Ă  la sortie d'une fĂȘte de mariage, un certain Beddaouche Salah b. Braham se fait interpeller au niveau du dĂ©pĂŽt des CFRA, par Akoun Larbi b. Belkacem (45 ans) et El-Haoussine b. Belkacem (24 ans, habitant Plateau-SauliĂšre) qui le tuent Ă  coup de matraque et de couteau aprĂšs une brĂšve altercation. ArrĂȘtĂ©s le lendemain Ă  Alger, les deux meurtriers reconnaissent les faits et affirment avoir agi pour l'honneur de leur famille, la victime ayant selon eux dĂ©tournĂ© une de leurs parentes[233].

(29 juin) - Élections dĂ©partementales en AlgĂ©rie.

À Maison-CarrĂ©e (10e circonscription), il y eut 758 votants sur un total de 1 174 inscrits, et le vainqueur du scrutin fut FrĂ©dĂ©ric Altairac (635 voix) contre un certain Fabrega[234].

(4 juillet) - Un nouveau crime passionnel secoue Maison-CarrĂ©e. Le meurtrier est, cette fois-ci, un rĂ©sident espagnol du nom d'Amer Juan qui poignarde son Ă©pouse dans le quartier de Belfort. L'homme n'en Ă©tait pas Ă  son premier forfait si l'on croit la presse de l'Ă©poque car, une annĂ©e plus tĂŽt (), il avait tirĂ© sur sa pauvre femme avec un revolver Ă  la suite d'une dispute mais s'est vu absout par le jury de la Cour d'Assise d'Alger et, Ă  peine un mois aprĂšs sa libĂ©ration de prison, il revint Ă  la charge dĂšs la premiĂšre occasion et parvient cette fois-ci Ă  mettre fin aux jours de la malheureuse avec un couteau de boucher. Il sera alors condamnĂ© Ă  15 ans de rĂ©clusion criminelle[235].

(22 août) - Le marché aux bestiaux de Maison-Carrée se hisse au premier rang en Algérie e terme de volumes traités et devient un des plus importants marchés de toute l'Afrique du Nord française. Ayant été un des principaux moteurs de la croissance économique et démographique à Maison-Carrée depuis les années 1860, le grand marché drainait -chaque vendredi- une foule de plus en plus importante de gens de l'intérieur du pays vers la ville, ce qui ne manquait pas de susciter de nombreux problÚmes de sécurité pour les autorités coloniales locales, avec parfois des proportions dangereuses.

Ainsi, la presse algéroise[236] de ce jour rapporte les faits une violente altercation qui eut lieu entre un maquignon algérien et un Européen de Maison-Carrée, rapidement transformée en une rixe impliquant plus de 150 Algériens et plusieurs Européens, et suscitant un tel désordre qu'on songea carrément à faire intervenir la troupe pour ramener l'ordre. Quels que soient les motifs à l'origine, cet incident aurait mis en émoi les habitants européens de Maison-Carrée ainsi que les autorités municipales.

(9 septembre) - Dans une lettre ouverte publiĂ©e dans la presse locale[237] par un riverain de oued l'Harrach se plaint aux autoritĂ©s nous donne quelques prĂ©cieuses informations sur la situation Ă©cologique Ă  cette Ă©poque : « Depuis ce matin, l'oued l'Harrach est noir comme de l'encre et un grand nombre de poissons morts surnagent Ă  sa surface, ce qui indique qu'un poison assez violent et d'une grande quantitĂ© a dĂ» ĂȘtre dĂ©versĂ© dans cette riviĂšre. Qu'on s'imagine le tort que cela peut faire aux riverains, soit par les maladies causĂ©es par la corruption de ces poissons ou l'ingestion de ceux qui seront vendus dans nos parages, soit par l'arrosage des lĂ©gumes, ou par l'emploi d'une eau acidulĂ©e dans les usines. Ajoutez encore le dĂ©peuplement presque complet de poissons ; le mauvais breuvage par les troupeaux de passage Ă  Maison-CarrĂ©e, etc. Cette eau malpropre restera stagnante relativement jusqu'Ă  la nouvelle crue, car l'embouchure de la riviĂšre Ă©tant presque obstruĂ©e, l'Ă©coulement ne s'en fait qu'excessivement lentement ».

(28 octobre) - Un cabinet d'Ă©tude notariale est instituĂ© Ă  Maison-CarrĂ©e, par un arrĂȘtĂ© dĂ©partemental, au nom d'un certain M. Masson. RĂ©clamĂ© depuis quelques annĂ©es dĂ©jĂ  par les habitants[238], il s'agissait du tout premier notaire dans l'histoire de la ville[239].

(29 octobre) - Une dĂ©pĂȘche du Gouverneur gĂ©nĂ©ral d'AlgĂ©rie prescrit officiellement « la dĂ©limitation du domaine public fluvial des Oueds Smar et el-Harrach entre les ponts des routes nationales n°5 et n°8 Ă  Maison-CarrĂ©e ».

Un arrĂȘtĂ© prĂ©fectoral fixe en ce jour les limites du domaine publique fluvial sur les deux berges de oued l'Harrach Ă  Maison-CarrĂ©e.

(30 novembre) - Élections des reprĂ©sentants aux DĂ©lĂ©gations FinanciĂšres d'AlgĂ©rie.

Dans la 5e Circonscription électorale, dont fait partie la commune de Maison-Carrée, le poste de « délégué non-colon » voit s'affronter deux grands notables de la ville : d'un cÎté le pharmacien Raoul Zévaco (délégué sortant, candidat du Parti Républicain) et de l'autre l'industriel Jacques Duroux (candidat du Parti Réactionnaire). Tout au long des semaines qui précÚdent le scrutin, une campagne des plus musclées sera menée par les deux camps et on ne compte plus les accusations de fraude que s'échangÚrent les partisans des deux candidats[240]. Zévaco sera finalement réélu, mais avec une si courte majorité (18 voix) que le résultat suscitera encore de vives polémiques entre les [241] des mois aprÚs la proclamation des résultats. Une altercation eut ainsi lieu entre le conseiller municipal Léon Eldine qui présidait la commission de recensement et le commissaire de police Coquelin qu'il accusait de l'avoir menacé dans l'exercice de ses fonctions[242] et dont l'affaire sera portée devant la justice. Finalement, c'est Nicolas Zévaco qui remporta le scrutin.

1914

(juillet) - DĂ©clenchement de la 1re Guerre Mondiale.

La France ayant dĂ©clarĂ© la guerre Ă  l'Allemagne, l'ordre de mobilisation gĂ©nĂ©rale est officilement publiĂ© par le gouvernement. À ce titre, et en plus des divers bataillons du 5e RTA stationnĂ©s dans la caserne de Belfort qui vont se relayer sur le front, une partie importante de la population masculine de Maison-CarrĂ©e sera enrĂŽlĂ©e dans les rangs de l'armĂ©e française jusqu'Ă  la fin du conflit, Ă  tel point que certaines usines de la ville cesseront l'activitĂ© durant plusieurs semaines faute de main-d’Ɠuvre[243].

Au fil des semaines et des mois que va durer la Grande Guerre, on annoncera réguliÚrement des morts et des blessés au front parmi les mobilisés maison-carréens, le plus connu d'entre eux étant l'adjudant Laverdet (mort au front en janvier 1915), instituteur au Groupe Scolaire de Maison-Carrée et dont l'établissement portera le nom aprÚs la fin de la guerre[244].

1915

1916

(1er juin) - Une nouvelle crue de l'Oued El-Harrach provoque de grandes inondations à Maison-Carrée.

(20 novembre) - Un macabre fait divers provoque une vive émotion à Maison-Carrée. Il s'agit du meurtre par strangulation d'une européenne, Marguerite Ferrer, ùgée de 31 ans et habitant avec son pÚre prÚs des usines Altairac. Le crime était apparemment motivé par le vol du domicile.

1917

(juillet) - Sur demande du Gouvernement Général d'Algérie, une Compagnie Française du Froid-Sec est établie à Maison-Carrée pour gérer un nouvel entrepÎt frigorifique industriel.

PropriĂ©tĂ© de l’administration coloniale Ă  l'origine, cette usine fut concĂ©dĂ©e Ă  la sociĂ©tĂ© Froid-Sec avec un bail de 10 ans. PremiĂšre du genre en AlgĂ©rie, l'installation Ă©tait Ă  la pointe de la technologie Ă  l'Ă©poque et, considĂ©rant le marchĂ© aux bestiaux de Maison-CarrĂ©e Ă©tait le plus important du pays Ă  cette date, l'investissement paraissait trĂšs prometteur en thĂ©orie. Il en fut pourtant rien comme nous pouvons le lire dans la presse de l'Ă©poque, parfois non sans humour[245]: « L'existence de cette malheureuse sociĂ©tĂ© a Ă©tĂ© marquĂ©e par des aventures absolument navrantes. Les appareils de rĂ©frigĂ©ration Ă  air confinĂ©, conçus selon les brevets P. Fleury, dont elle a entrepris la construction et l'exploitation depuis 1911, ont englouti en dix ans 8 millions de francs. AprĂšs tout, les frigorifiques ne sont pas chargĂ©s d'Ă©viter les coulages d’argent. Ils auraient pu, tout au moins, assurer la conservation des matiĂšres pĂ©rissables qui leur Ă©taient confiĂ©es. Mais voici le hic ! Le Froid sec n'est pas un froid ordinaire. Il ne conserve pas ! Le scandale des moutons avariĂ©s de l’'usine de Maison-CarrĂ©e avait si fortement Ă©mu les autoritĂ©s que l’interdiction d'exporter le bĂ©tail fut levĂ©e dare-dare. Il aurait Ă©tĂ© du dernier saugrenu, en effet, de laisser le « Froid Sec » transformer scientifiquement la viande fraĂźche en vigoureux asticots, alors que la mĂ©tropole ne pouvait faire face aux besoins de la consommation avec un cheptel amoindri. Le retour Ă  la libertĂ© d’exportation se traduisit par la fermeture du trop cĂ©lĂšbre Ă©tablissement de Maison-CarrĂ©e qui traitait, de la maniĂšre que l'on sait, 2 500 moutons par jour. Autre complication : le contrat d'exploitation passĂ© entre la SociĂ©tĂ© et le gouvernement de l'AlgĂ©rie expirait le 1er janvier dernier, l'usine de Maison-CarrĂ©e devant revenir Ă  cette date Ă  l'administration. Or, les commissaires des comptes avouaient, dans le rapport prĂ©sentĂ© Ă  l’assemblĂ©e du dernier, que les bĂ©nĂ©fices rĂ©alisĂ©s Ă  Maison-CarrĂ©e n'avaient pas Ă©tĂ© suffisants pour amortir complĂštement les installations. Voici donc les pertes d'argent qui viennent se superposer avec les pertes de frigo ! On croirait vraiment que l'expression « jouer de malheur » a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e spĂ©cialement pour le « Froid sec ». Un dernier mot pour terminer. Une assemblĂ©e tenue le dernier a autorisĂ© le conseil Ă  se faire ouvrir des crĂ©dits en banque pour un total de 31 000 000 francs. Cela s'appelait poĂ©tiquement alors un crĂ©dit de campagne. Par exemple, il serait curieux de savoir quel est l’établissement de crĂ©dit assez dĂ©sĂ©quilibrĂ© pour subventionner une entreprise aussi artistement piquĂ©e des vers ! Les maigres dividendes de 5 francs par action pour l'exercice 1918 et de 6 francs pour 1919, distribuĂ©s au dĂ©triment de la situation financiĂšre, absolument dĂ©plorable au reste, devaient cependant dessiller les yeux des plus aveugles. Aussi les cours des actions du « Froid sec » tombent-ils, comme les moutons de Maison-CarrĂ©e, en liquĂ©faction. De 167, niveau maximum atteint en 1920, on en est Ă  22,50 francs ». En effet, Ă  partir de 1920, les difficultĂ©s financiĂšres vont ainsi devenir le lot ordinaire de l'entreprise[246] avant que l'activitĂ© ne cesse totalement en 1924 et que l'affaire ne se solde par la banqueroute totale en 1926[247]. Cette situation inquiĂ©tait au plus haut point le conseil municipal de Maison-CarrĂ©e. On y Ă©voqua l’idĂ©e de rouvrir l’usine et d’y adjoindre un abattoir intercommunal[248] (il n'existait encore Ă  cette date qu'un petit abattoir de fortune au niveau du marchĂ© aux bestiaux) dĂšs 1922, sans suite. En , une SociĂ©tĂ© FinanciĂšre pour l’Industrie (SFPI) -qui gĂ©rait de nombreux abattoirs en France- propose aux autoritĂ©s coloniales d’ouvrir des abattoirs modernes dans l’ancienne usine Froid-Sec de Maison-CarrĂ©e et d’en reprendre la gestion en mĂȘme temps, mais cette proposition ne reçut aucune rĂ©ponse car, Ă  la mĂȘme Ă©poque, la municipalitĂ© d’Alger Ă©tudiait la crĂ©ation des grands abattoirs d’Hussein Dey dont l’emplacement avait dĂ©jĂ  reçu l’aval enthousiaste des bouchers algĂ©rois pour sa proximitĂ© de la ville. Finalement, il faudra attendre 1926 pour voir l'Ă©tablissement reprendre l'activitĂ© avec la crĂ©ation d'une nouvelle sociĂ©tĂ©, la SACANA.

On notera au passage que l’endroit oĂč se trouve l'usine (sur la route qui mĂšne vers la zone de Lavigerie et qui Ă©tait donc assez excentrĂ© par rapport du centre-ville) devint vite un lieu-dit car on disait communĂ©ment, Ă  l'Ă©poque, « Froid-sec » pour dĂ©signer la zone. L'usine frigorifique (mise en arrĂȘt depuis les annĂ©es 1990), d'une architecture assez Ă©lĂ©gante, existe encore de nos jours et se trouve juste Ă  cĂŽtĂ© des abattoirs et de la brigade de gendarmerie d'El-Harrach.

1918

(18 février) - Le Conseil municipal de Maison-Carrée décide de rebaptiser le groupe scolaire de la commune (construit en 1900) du nom du lieutenant Laverdet, mort au combat en 1915 et enseignant dans l'école de Maison-Carrée avant sa mobilisation et son départ pour le front[249].

(11 novembre) - Fin officielle de la IIe Guerre Mondiale avec la victoire de la France et ses alliés sur l'Allemagne.

La commune de Maison-CarrĂ©e comptait alors parmi ses ressortissants 123 personnes (dont 22 algĂ©riens musulmans) mortes au combat entre Mai 1914 et Novembre 1918.

1919

(fĂ©vrier) - La Compagnie Centrale d’Énergie Électrique entame les premiĂšres dĂ©marches auprĂšs de la municipalitĂ© de Maison-CarrĂ©e en vue de l’installation d’une distribution de gaz pour le chauffage et la cuisine Ă  travers la ville.

(11 mars) - Un affaissement de terrain provoque l’effondrement d'un des murs de soutĂšnement du pont mĂ©tallique des CFRA Ă  Maison-CarrĂ©e (act. el-Qantara el-Kahla) et Ă  un grave affaiblissement des supports de l'ouvrage. Le pont se voit alors fermĂ© Ă  la circulation et les liaisons du tramway entre Maison-CarrĂ©e et Alger trĂšs perturbĂ©s pour un temps.

(28 mars) - RĂ©agissant Ă  des rumeurs sur un transfert imminent du 5e RTA de sa caserne de Belfort et son remplacement par un bataillon d’artillerie, le maire de Maison-CarrĂ©e LĂ©on Eldine adresse une lettre aux autoritĂ©s militaires de la colonie pour exprimer la prĂ©occupation de sa communautĂ© Ă  ce sujet.

La lecture de certains passages de la missive est intĂ©ressante, dans le sens oĂč elle nous Ă©claire sur la façon dont les EuropĂ©ens de Maison-CarrĂ©e (l'exemple Ă©tant applicable Ă  l'ensemble de l'AlgĂ©rie) concevaient Ă  l'Ă©poque la relation avec les AlgĂ©riens musulmans, et on y retrouve des Ă©chos de certains incidents qui survenaient apparemment de maniĂšre assez rĂ©currente depuis un certain temps, notamment au niveau du marchĂ© : « Il est un point, Mon GĂ©nĂ©ral, sur lequel je me permets d’attirer votre attention. Maison-CarrĂ©e est un centre essentiellement passager, le siĂšge d’un des plus grands marchĂ©s de la Colonie, oĂč se groupent chaque semaine par milliers les indigĂšnes : au point de jonction des principales routes de pĂ©nĂ©tration dans l’intĂ©rieur des lignes de chemins-de-fer, la ville semble ĂȘtre le refuge de tous les gens sans aveu. La police y est extrĂȘmement difficile, et les commencements de nefra ont souvent nĂ©cessitĂ© l’intervention de la troupe. D’autre part, le groupe pĂ©nitentiaire de Maison-CarrĂ©e abrite 800 Ă  900 dĂ©tenus dont 400 forçats qui travaillent au-dehors, chez des propriĂ©taires, et une rĂ©volte de ces individus, toujours possible, ne pourrait ĂȘtre rĂ©primĂ©e que par la force armĂ©e. Les troupes d’artillerie ont service spĂ©cial qui ne leur permettrait pas d’avoir toujours prĂȘt Ă  marcher un effectif suffisant pour assurer la rĂ©pression. Pour toutes ces raisons, je me permets d’insister, Mon gĂ©nĂ©ral, pour obtenir le maintien Ă  Maison-CarrĂ©e, sinon de la portion centrale du rĂ©giment de Tirailleurs, du moins du dĂ©pĂŽt avec un effectif de troupe suffisant pour garantir la sĂ©curitĂ© ». Concernant le 5e RTA, on prit contact avec un des conseillers gĂ©nĂ©raux de Maison-CarrĂ©e, Mr Altairac, et on le pria d’aller vĂ©rifier cette information auprĂšs du commandement local de l’armĂ©e coloniale, et on eut alors des assurances de la part des chefs que cette unitĂ© n’allait pas ĂȘtre dĂ©placĂ©e de ses casernements de Maison-CarrĂ©e ».

Quelques semaines aprĂšs cet Ă©change, et Ă  la suite de la promulgation de la Loi du qui abolissait les restrictions prĂ©cĂ©dentes et autorisant tout « Ă©lecteur indigĂšne » (ils sont au nombre de 157 dans la commune de Maison-CarrĂ©e cette annĂ©e) Ă  disposer d’une arme Ă  feu s’ils le souhaitent, le conseil municipal de Maison-CarrĂ©e joint sa voix Ă  celle d’autres communes coloniales et souhaitent ouvertement que l’ancienne rĂ©glementation soit rĂ©introduite, prĂ©cisant que « la facilitĂ© avec laquelle les indigĂšnes obtiennent l’autorisation de dĂ©tenir une arme peut avoir une rĂ©percussion trĂšs grave sur la sĂ©curitĂ© », ou encore que « La loi prĂ©citĂ©e a Ă©tĂ© votĂ©e inconsidĂ©rĂ©ment et il est de toute urgence d’un attĂ©nuer les effets si l’on ne veut pas perdre le bĂ©nĂ©fice des sacrifices consentis pour la pacification de la Colonie ». Fait assez rare pour ĂȘtre notĂ©, les quelques indigĂšnes membres du conseil municipal sont invitĂ©s Ă  s’exprimer sur la question. Le conseiller Bouchenack aurait alors dĂ©clarĂ© que « beaucoup de ses coreligionnaires, propriĂ©taires ou commerçants, habitant la commune depuis de longues annĂ©es et leur passĂ© d’honnĂȘtetĂ©, leur loyalisme envers la France sont garants de l’usage qu’ils feront de l’arme mise entre leurs mains ; mais estime que la plus Ă©lĂ©mentaire prudence commande de ne pas gĂ©nĂ©raliser la mesure », propos qu’approuva son collĂšgue Abderrahmane selon le PV d’une des sessions ordinaires du conseil municipal.

(7 mai) - PrÚs de 200 ouvriers des tannerie et briqueterie Altairac à Maison-Carrée se mettent en grÚve, réclamant la mise en place de la journée de travail de 8h et la revalorisation des salaires à 8 et 14 francs selon les catégories[250].

(19 juin) - Nouveau mouvement de grÚve dans la région de Maison-Carrée. Il s'agit cette fois-ci d'une soixantaine d'ouvriers qualifiés de l'usine frigorifique dite Froid-Sec qui réclament une revalorisation de leur prime de déplacement. L'affaire se termine vite par le licenciement des grévistes, mais l'incident rapporté par la presse locale[251] permet de savoir que les meneurs du mouvement étaient des ouvriers recrutés en France (des Parisiens et deux Marseillais) tandis que la majorité étaient des Espagnols.

(septembre) - L'augmentation continue des prix des denrĂ©es alimentaire atteint de telles proportions Ă  Maison-CarrĂ©e que le maire Louis Eldine promulgue un arrĂȘtĂ© municipal qui place le prix de vente de certains produits dans les marchĂ©s de la ville sous son autoritĂ©[252].

(octobre) - À sa crĂ©ation, la section de Maison-carrĂ©e pour l'Organisation des Anciens Combattants compte quelque 200 adhĂ©rents locaux.

(octobre) - Les affaires de vol et violences de tout genre atteignent un niveau inouï à Maison-Carrée, la presse locale[253] rapportant pas moins d'une quinzaine d'incidents de différents niveaux de gravité pour cette période, dont des cas de meurtre.

(30 novembre) - Élection Ă  Maison-CarrĂ©e pour la dĂ©signation des six conseillers municipaux indigĂšnes.

Le rĂ©sultat du scrutin sera toutefois annulĂ© par dĂ©cision du conseil de la prĂ©fecture d'Alger (12/01/1920) et, malgrĂ© la contestation de la dĂ©cision par les candidats SĂąad-Allah Mahfoud et Ammeur Mohammed, ça sera confirmĂ© par le Conseil d'État Ă  Paris (10/01/1921)[254].

(7 décembre) - Sa liste ayant obtenu une large majorité dans le nouveau Conseil municipal, le républicain Léon Tourenne est élu maire de Maison-Carrée et succÚde ainsi à Léon Eldine qui avait tenu le poste durant toute la durée de guerre de 1914-1918. Crocherie et Redon furent élus respectivement 1er et 2e adjoint au maire[255].

(dĂ©cembre) - Membre du Conseil municipal de Maison-CarrĂ©e depuis 1912, Jacques Duroux devient conseiller gĂ©nĂ©ral de la circonscription et parviendra Ă  obtenir, peu de temps aprĂšs, la prĂ©sidence du Conseil gĂ©nĂ©ral d'Alger oĂč il se maintiendra jusqu'en 1937.

(dĂ©cembre) - Protestant contre une nouvelle augmentation des tarifs de la CFRA, une lettre du maire de Maison-CarrĂ©e nous donne quelques indications sur la situation des transports reliant la localitĂ© Ă  la ville d'Alger Ă  cette Ă©poque : « Le service des voyageurs laisse absolument Ă  dĂ©sirer. Des motrices sont rĂ©servĂ©es pour les voyageurs partant d’Alger et allant au-delĂ  du Jardin-d’Essai, mais les instructions de la CFRA ne sont pas toujours respectĂ©es, et il s’ensuit que nombre d’habitants de Maison-CarrĂ©e ne rentrent chez eux qu’aprĂšs avoir stationnĂ© des heures Ă  un des arrĂȘts intermĂ©diaires ». Par ailleurs, un dĂ©cret municipal datĂ© de ce mois et fixant le tarif des « courses par cochers » dans la commune et vers les autres localitĂ©s Ă©numĂšre les divers lieux de station de l’époque : « Ferme d’HumiĂšres, Ouled-Adda, SĂ©minaire des PĂšres-Blancs, El-Alia, Cinq-Maisons, Ferme Altairac, la GlaciĂšre, Usine Altairac, École d’Agriculture, Quartier PLM, Quartier Belfort, CressonniĂšre, Froid-Sec, Prise-d’Eau, Sidi-Herzine, Caroubier, Hippodrome, Oued Smar ».

1920-1941 : Âge d'or de la colonie europĂ©enne, Ă©mergence d'une sociĂ©tĂ© "indigĂšne" harrachi

1920

(11 avril) - Election municipale à Maison-Carrée.

(Avril) - Jacques Duroux, dĂ©jĂ  conseiller gĂ©nĂ©ral de Maison-CarrĂ©e (10e Circonscription) et en mĂȘme temps prĂ©sident du Conseil gĂ©nĂ©ral du dĂ©partement d'Alger, se fait Ă©lire aux DĂ©lĂ©gations FinanciĂšres d'AlgĂ©rie.

(27 mai) - Tenue à Alger du CongrÚs des Maires d'Algérie.

Regroupant presque tous les maires des communes du pays, le CMA exprimait surtout les vƓux et volontĂ©s des EuropĂ©ens du pays envers l'administration coloniale et le pouvoir politique français de maniĂšre gĂ©nĂ©rale. Contrairement au premier congrĂšs de 1910 oĂč ont prĂ©valu les sujets budgĂ©taires et financiers, ce congrĂšs gĂ©nĂ©ral fut organisĂ© Ă  l'initiative de certains maires dans un contexte politique assez tendu suite la promulgation, en 1919, de ce qui Ă©tait appelĂ© "Loi Jonnart" [256] sur le statut des indigĂšnes d'AlgĂ©rie.

La presse europĂ©enne locale considĂšre ainsi que ce congrĂšs fut revĂȘtu dĂšs le dĂ©part du « caractĂšre trĂšs prĂ©cis d'une protestation en masse de l'Ă©lĂ©ment français d'AlgĂ©rie contre les dangereuses utopies d'une politique indigĂšne aveugle et susceptible de compromettre gravement, dans un avenir plus ou moins Ă©loignĂ©, l'Ă©tablissement de la France dans le Nord de l'Afrique »[257], et on peut effectivement constater qu'il rĂ©gnait un certain climat d'apprĂ©hension parmi les Ă©lus locaux europĂ©ens face Ă  la montĂ©e du nationalisme algĂ©rien. Les maires de Kabylie dĂ©noncent ainsi ce qu'ils estimaient ĂȘtre le rĂ©sultat de la "politique indigĂšne" incarnĂ©e par la Loi Jonnart, et expriment au congrĂšs leur « dĂ©sarroi, inquiĂ©tude, malaise, insĂ©curitĂ©, mĂ©fiance entre Français et IndigĂšnes, retours aux guĂ©rillas, aux nafra entre çoff reconstituĂ©s par la passion Ă©lectorale rĂ©veil du fanatisme et de l'esprit nationaliste musulman »[208].

Pour sa part, Maison-CarrĂ©e Ă©tait reprĂ©sentĂ©e par son maire de l'Ă©poque, LĂ©on Tourenne qui, contrairement Ă  son prĂ©dĂ©cesseur Lebailly en 1910 (oĂč il fut Ă©lu membre assesseur au bureau du congrĂšs), ne figure pas parmi les meneurs de la rĂ©union ne se fit dĂ©signer Ă  aucun poste de responsabilitĂ©. Toutefois, l'unique intervention qu'il aurait eue dans les dĂ©bats fut faite au deuxiĂšme jour des travaux, dans la rubrique sĂ©curitĂ© oĂč, allant dans le sens de toute une sĂ©rie de mesures rĂ©pressives Ă  l'Ă©gard des algĂ©riens souhaitĂ©es par les nombreux autres maires participants, il exprima le vƓu de voir rĂ©tabli le droit de perquisition des gendarmes chez les indigĂšnes sans attendre l'ordre des autoritĂ©s judiciaires[208].

(31 mai) - Dans le cadre d'actions de solidaritĂ© avec les villes françaises touchĂ©es par les grandes destructions de la guerre de 1914-1918, le maire LĂ©on Tourenne et le Conseil municipal de Maison-CarrĂ©e dĂ©cident du parrainage de la ville de PĂ©ronne dans la Somme, et ouvrent Ă  cet effet une souscription gĂ©nĂ©rale de dons auprĂšs de la population, des entreprises et des associations locales. Cette action rĂ©sultera de l'envoi Ă  la petite ville française, de 1920 Ă  1923, d'une somme de 35 000 francs d'Ă©poque.

(aoĂ»t) - La municipalitĂ© de Maison-CarrĂ©e annonce la construction d’une Ă©cole primaire supĂ©rieure pour jeunes-filles, la quatriĂšme du genre dans tout l’AlgĂ©rois Ă  cette Ă©poque.

Le site choisi est dĂ©crit par le maire Ă  la commission des travaux du conseil municipal : « [
] il se trouve sur les hauteurs qui dominent la ville, prĂšs du village de Belfort, entre les deux routes qui conduisent de Maison-CarrĂ©e Ă  l’École d’Agriculture. Vaste et bien exposĂ©, sans voisinage douteux ou gĂȘnant, il convient parfaitement Ă  l’édification d’un Ă©tablissement scolaire avec internat, qui n’aura rien Ă  envier pour l’exposition, le confort et l’hygiĂšne, Ă  l’école primaire supĂ©rieure de garçons ». Cette nouvelle EPS de filles est de nos jours la vielle Ă©cole primaire situĂ©e juste en face du jardin public de Belfort (qui n'Ă©tait pas encore amĂ©nagĂ© Ă  cette date). Sur ce lieu, s’appelait Ă  l'Ă©poque « Plateau des Pins », le terrain oĂč l'Ă©cole fut construite avait Ă©tĂ© achetĂ© par la municipalitĂ© Ă  un notable de la ville, Mr. Bomati, celui-lĂ  mĂȘme Ă  qui appartenaient les grands terrains qui vont devenus lotissement du "Parc Bomati" (act. quartier du Parc). Une dizaine d'annĂ©es plus tard, lorsqu'une nouvelle Ă©cole pour garçons sera Ă©difiĂ©e Ă  Belfort, l'Ă©cole de filles sera transfĂ©rĂ©e vers l'ancienne Ecole Primaire SupĂ©rieure de garçons qui abrite encore de nos jours le lycĂ©e de jeunes-filles Ourida Meddad d'El-Harrach.

(août) - La presse locale[258] rapporte des cas d'évasion de la prison centrale de l'Harrach à Maison-Carrée.

(septembre) - En apprenant que les terrains dits Ă  l'Ă©poque du « Polygone de tir » (il s'agit d'une zone militaire qui Ă©tait rĂ©servĂ©e aux exercices d’artillerie qui s'Ă©talait sur ce qu'on appelle encore de nos jours plage Mazella) allaient ĂȘtre dĂ©saffectĂ©s par l'armĂ©e française, la municipalitĂ© de Maison-CarrĂ©e espĂ©rait se voir concĂ©der ces Ă©spaces afin d’y faire construire des installations balnĂ©aires pour les habitants, mais la nouvelle fut finalement dĂ©mentie par les autoritĂ©s militaires. ParallĂšlement Ă  cela, on Ă©voqua au sein du conseil municipal la possible viabilisation de ce qui Ă©tait appelĂ© alors « chemin des Cinq-Maisons ». Long de 530 m, ce sentier aboutissait alors dans la « propriĂ©tĂ© Mazella[259] », celle-ci n’étant sĂ©parĂ©e du rivage que par des terrains appartenant Ă  la SociĂ©tĂ© ImmobiliĂšre, et il se trouve que celle-ci proposait de cĂ©der une bande de terrain Ă  la commune pour que ledit chemin soit prolongĂ© jusqu’à la mer en contournant le terrain de la sociĂ©tĂ© et non en la traversant comme le demandait la municipalitĂ©. Un compromis sera trouvĂ© quelque temps plus tard.

(16 septembre) - À la suite d'une panne technique, un avion (de type Breguet 300-HP) qui survolait la ville de Maison-CarrĂ©e s'Ă©crase sur les vignobles de la SociĂ©tĂ© ImmobiliĂšre de l'Harrach prĂšs du monastĂšre des PĂšres-Blanc Ă  Lavigerie (act. Mohamadia). Les deux officiers français qui pilotaient l'appareil s'en sortent indemnes[260]. A cette Ă©poque, le premier terrain d'aviation construit en AlgĂ©rie occupait la façade maritime face Ă  Hussein-Dey, sur la rive gauche de oued El-Harrach et c'est probablement de lĂ  que l'avion avait pris son envol.

(novembre) - Un dĂ©cret du Gouvernement GĂ©nĂ©ral d'AlgĂ©rie proclame que : « [
] La voie neuve, d’une longueur de 7 376 m, Ă  ouvrir, entre le port d’Alger et la ville de Maison-CarrĂ©e, partie sur le domaine public maritime et partie entre la voie du chemin de fer d’Alger Ă  Oran et le littoral ; ladite voie ayant son origine au Sud des terre-pleins de l’arriĂšre-port d’Agha, suivant de plus ou moins prĂšs la ligne susvisĂ©e du chemin de fer Paris-Lyon-MĂ©diterranĂ©e d’Alger Ă  Oran, s’en dĂ©tachant pour contourner le cimetiĂšre d’Hussein-Dey et le Polygone de l’artillerie en empruntant le chemin du Polygone, la rejoignant au Caroubier et aboutissant sur la RN 5 d’Alger Ă  Constantine [
] Ă  la sortie du pont biais existant sous les voies Paris-Lyon-MĂ©diterranĂ©e ».

En fait, il s’agit lĂ  du tracĂ© prĂ©cis et dĂ©finitif de la fameuse « Route MoutonniĂšre » qui Ă©tait attendue depuis plus de quinze ans par les autoritĂ©s locales de Maison-CarrĂ©e. En prĂ©vision du lancement effectif de la rĂ©alisation, le dĂ©cret dĂ©clare tous les travaux en relation avec ce projet sont d’utilitĂ© publique et prĂ©voit un dĂ©lai de cinq annĂ©es pour son exĂ©cution.

1921

Selon les rĂ©sultats d'un recensement gĂ©nĂ©ral, la commune de Maison-CarrĂ©e compte Ă  ce moment de son histoire une population de 11 290 habitants (dont 53 % d’EuropĂ©ens, 47 % d’AlgĂ©riens musulmans) rĂ©partie comme il suit : Maison-CarrĂ©e ville = 8 901 habitants (61 % EuropĂ©ens), banlieue = 2 389 habitants (25 % EuropĂ©ens), et s’y ajoutent 2 685 personnes comptĂ©es Ă  part (militaires, prisonniers, Ă©tudiants, ecclĂ©siastiques). Mais, si l'essor dĂ©mographique ne se dĂ©ment toujours pas Ă  Maison-CarrĂ©e, la situation Ă©conomique de la localitĂ© n'Ă©tait pas reluisante Ă  cette Ă©poque et le taux de chĂŽmage Ă©tait tel que certaines associations locales adressĂšrent des vƓux et des demandes Ă  l'administration coloniale pour que les recrutements et embauches se fassent en prioritĂ© au profit des ressortissants français[261].

(9 janvier) - Poursuivant son ascension sur la scÚne politique algérienne et française, Jacques Duroux -conseiller municipal à Maison-Carrée- sort vainqueur des élections sénatoriales tenues en ce jour, et qu'il avait brigué au nom du Parti radical-socialiste de Georges Clemenceau dont il était devenu un membre trÚs influent. Duroux gardera son poste de sénateur jusqu'en 1938.

(juillet) - Inauguration de la 15e FĂȘte FĂ©dĂ©rale de Gymnastique de l’Afrique du Nord qui se tient cette annĂ©e Ă  Maison-CarrĂ©e.

Importante manifestation sportive Ă  l'Ă©poque, la ville voit affluer Ă  cette occasion quelque 1 200 athlĂštes reprĂ©sentant une cinquantaine de clubs de gymnastique de toute l'Afrique du Nord française. Maison-CarrĂ©e ne disposant pas en ce temps d'un stade municipal ni de salles de sport, les Ă©preuves du concours furent toutes organisĂ©es dans ce qui Ă©tait appelĂ© "champs de manƓuvre du quartier Belfort"[262], grand espace situĂ© derriĂšre la caserne du 5e RTA et qui se trouve de nos jours inclus dans ce qu'on appelle "caserne de Bellevue".

1922

(1er janvier) - Le chanoine Repetecci, 11e curĂ© catholique dans l'histoire de la ville, succĂšde Ă  l'AbbĂ© Barreau Ă  la tĂȘte de la paroisse de Maison-CarrĂ©.

(22 mars) - On a vu que, dĂšs les premiĂšres annĂ©es qui ont suivi la fin de la PremiĂšre Guerre mondiale, la ville de Maison-CarrĂ©e connaĂźt de sĂ©rieux problĂšmes d'insĂ©curitĂ© ou, tout au moins, que les sujets sĂ©curitaires deviennent une prĂ©occupation rĂ©currente pour les autoritĂ©s coloniales. Ainsi, lors des dĂ©bats au Conseil municipal de ce jour, nous apprenons que les vols ne se comptaient plus depuis un certain temps et on considĂ©ra que cette situation Ă©tait due Ă  l’insuffisance du personnel de police locale depuis que le 5e RTA de la caserne de Belfort avait retirĂ© Ă  la municipalitĂ© les patrouilles de Tirailleurs qui Ă©taient jadis mis Ă  sa disposition pour l’organisation de rondes nocturnes dans la ville. Le maire prend acte de la situation et entame des dĂ©marches auprĂšs des deux DĂ©lĂ©guĂ©s financiers de Maison-CarrĂ©e, Duroux et Boniface, ainsi que du Conseiller gĂ©nĂ©ral Altairac, afin que les autoritĂ©s coloniales y fassent installer une Brigade mobile de gendarmerie.

(13 dĂ©cembre) - Par un arrĂȘtĂ© du Gouvernement GĂ©nĂ©ral d'AlgĂ©rie datĂ© de ce jour, le tout premier bureau de l'administration des domaines est instituĂ© Ă  Maison-CarrĂ©e. Ouvert officiellement en mars 1923, le service en question Ă©tait prĂ©vu pour couvrir l'ensemble du canton judiciaire de Maison-CarrĂ©e, ses locaux Ă©tant Ă  l'Ă©poque situĂ©s sur la Route d'Alger (act. rue Hassan-Bey Ali), juste Ă  cĂŽtĂ© de l'Ă©tude notariale de la ville que tenait encore Ă  l'Ă©poque M. Messon[263].

(31 dĂ©cembre) - La gestion municipale de Maison-CarrĂ©e affiche, pour l'exercice 1922, affiche une situation financiĂšre en nette amĂ©lioration avec un total des recettes de 809 617 francs et des dĂ©penses de 643 151 francs[264].

1923

Dans un rapport adressĂ© au maire de Maison-CarrĂ©e, le mĂ©decin communal Dr Gautier nous Ă©claire un peu sur la situation sanitaire de certaines franges de la population de la commune Ă  cette Ă©poque : « [
] Il existe enfin une troisiĂšme catĂ©gorie d’indigents, ce sont les Kabyles et les Marocains qui travaillent dans les fermes sur le territoire de la commune. C’est ainsi que certains sont occupĂ©s en ce moment au dessĂšchement des marais de l’oued Smar. Ces hommes vivent dans des conditions hygiĂ©niques dĂ©favorables ; les Ă©pidĂ©mies de typhus et de paludisme les atteignent largement ».

- Des travaux d'assainissement et de régularisation sont effectués sur le cours de l'oued Smar à Maison-Carrée.

(1er avril) - Une dĂ©lĂ©gation du parlement français, se trouvant en mission dans divers points de l'AlgĂ©rie, se rendent Ă  la mairie de Maison-CarrĂ©e oĂč ils rencontrent le Conseil municipal et les grands notables de la colonie. Ils rendent ensuite visite Ă  l'Institut agricole Ă  Belfort.

(24 mai) - Un avion s'écrase prÚs des usines Altairac à Maison-Carrée. Il s'agit du deuxiÚme accident du genre que connait la localité, avec cette fois-ci le décÚs de l'un des deux pilotes impliqués, un certain adjudant Baumann[265].

1924

- Au bout de cinq années de travaux, la tant attendue "Route MoutonniÚre" est inaugurée et officiellement ouverte à la circulation.

Reliant Maison-Carrée au centre d'Alger par le bord de mer en évitant le centre d'Hussein-Dey, cette artÚre (act. Avenue de l'ALN) est plus tard devenue une autoroute, et elle reste encore de nos jours le principal chemin d'accÚs vers Alger-Centre, que ce soit en provenance d'El-Harrach ou de l'Est du pays de maniÚre générale.

(novembre) - Inauguration d'un "Monument aux Morts", sur la Place de la RĂ©publique (act. Place du 5 juillet 1962), en hommage aux 256 ressortissants de la commune qui sont morts dans les combats de la Grande Guerre de 1914-1918.

L'idĂ©e d'un monument commĂ©moratif local est Ă©voquĂ©e pour la premiĂšre fois en novembre 1918 par le maire de l'Ă©poque, L. Eldine, au cours du tout premier conseil municipal qui s'Ă©tait tenu aprĂšs la fin de la guerre. InspirĂ©e par la trĂšs influente Association des Anciens Combattants, l'initiative sera promue par tous les responsables politiques locaux Ă  chaque fĂȘte (les cĂ©lĂ©brations se tenaient Ă  l'origine dans le cimetiĂšre chrĂ©tien Ă  Belfort) et occasion nationale française. Pourtant, ce n'est qu'en novembre 1920 que le projet sera rĂ©ellement pris en compte par les autoritĂ©s, avec l'installation au niveau de la mairie d'un "ComitĂ© du Monument aux Morts pour la Patrie" mis sous la prĂ©sidence de Crocherie, adjoint-au-maire et doyen des membres du conseil municipal de Maison-CarrĂ©e[266] Ă  l'Ă©poque.

A l'origine, l'emplacement du monument devait se situer au Square Altairac (act. Jardin Abdelhamid Ibn-Badis). Mais il fallut quelque temps pour rassembler les fonds nécessaires et, début 1923, le projet fut modifié pour que le monument -une grande statue posée sur un haut socle- soit finalement érigé sur la Place de la République, à l'angle de ce qui était alors Rue de Constantine (act. Rue Ahmed Tarkhouche) et rue d'Aumale (act. Avenue du 5 Juillet 1962), juste en face du siÚge de la mairie de Maison-Carrée.

À partir de cette date, le lieu devient l'endroit habituel de toutes les commĂ©morations officielles françaises Ă  Maison-CarrĂ©e, mais aprĂšs l'indĂ©pendance de l'AlgĂ©rie en 1962, la sculpture sera emmenĂ©e par les EuropĂ©ens qui quittent la ville et disparaĂźtra du paysage de la placette d'El-Harrach. Par-contre, le socle monumental subsiste encore, ayant Ă©tĂ© transformĂ© Ă  son tour en stĂšle commĂ©morative, mais en mĂ©moire de la centaine de harrachis tombĂ©s durant la Guerre de LibĂ©ration algĂ©rienne de 1954-1962.

1925

- Fondation de l'École des Arts & MĂ©tiers Ă  Maison-CarrĂ©e, renommĂ©e peu aprĂšs Institut Industriel d’AlgĂ©rie.

La crĂ©ation d'un Ă©tablissement technique similaire Ă  ceux qui existaient jusqu'alors uniquement en France fut dĂ©cidĂ©e par les DĂ©lĂ©gations FinanciĂšres d'AlgĂ©rie au cours de la guerre de 1914-1918[267] et ce fut un terrain mitoyen de l'Institut Agricole dans le quartier de Belfort Ă  Maison-CarrĂ©e et acquis par le Gouvernement GĂ©nĂ©ral Ă  l'industriel A.-F. Altairac qu'il fut Ă©tabli. Une vingtaine d'annĂ©es plus tard, l'Ă©tablissement se verra fermĂ© dans la tourmente de la 2e Guerre Mondiale (1939-1945) pour rouvrir Ă  nouveau ses portes en 1958 comme École Nationale d’IngĂ©nieurs. AprĂšs l'indĂ©pendance de l'AlgĂ©rie, l'Ă©tablissement deviendra École Nationale Polytechnique (ENP) en 1963[268], et il reste encore de nos jours parmi les Ă©tablissements scientifiques les plus renommĂ©s du pays, plus de 10 000 ingĂ©nieurs en diverses disciplines scientifiques et techniques Ă©tant sortis de ses bancs depuis 1962.

(6 juin) - Selon les archives locales, les deux hĂ©ritiĂšres d’un certain Mr. Boisse dĂ©posent en ce jour un dossier auprĂšs de la mairie de Maison-CarrĂ©e en vue du lotissement d’une propriĂ©tĂ© situĂ©e « entre la rue Arago et la route nationale no 5, d’Alger Ă  Constantine », soit les actuelles rue Ahmed Aoune et avenue Boualem Gheboub. Les deux dames obtiennent l'autorisation de lotir quelques semaines plus tard et l’endroit deviendra au fil des constructions un petit quartier qu’on appelle encore de nos jours « CitĂ© Boise », situĂ© juste en contrebas de l'ancienne Ă©glise et du lycĂ©e Ourida Meddad.

(19 juin) - À la suite d'une intervention de Achour Oumedjkane, membre indigĂšne du Conseil municipal, la mairie de Maison-CarrĂ©e dĂ©cide de la crĂ©ation d’un « Bureau de bienfaisance musulman » car il n’y existait jusque-lĂ  qu’un bureau de bienfaisance « europĂ©en », mĂȘme s'il faudra attendre juillet 1927 pour voir enfin se concrĂ©tiser cette caisse d'aide aux nĂ©cessiteux musulmans de la commune. Par la mĂȘme occasion, le compte-rendu de cette mĂȘme sĂ©ance nous apprend qu’il existait dĂ©jĂ  Ă  cette Ă©poque une « mosquĂ©e de Sidi Embarek » et qu'elle recevait des donations de la part des fidĂšles.

(19 octobre) - Un Ă©change de missives, datĂ© de ce jour, entre la municipalitĂ© de Maison-CarrĂ©e et le colonel Jacomet (commandant de la caserne du 5e RTA Ă  Belfort et futur maire de Maison-CarrĂ©e) nous apprend qu’une « maison de tolĂ©rance » existait alors Ă  Maison-CarrĂ©e. L'objet des lettres est que les alentours de cet Ă©tablissement deviennent le thĂ©Ăątre de nombreuses rixes et agressions, ce qui poussa la mairie Ă  demander qu’une patrouille soit mise en place entre 19 het 21 h afin de sĂ©curiser le passage des Ă©coliers et des ouvriers. Les militaires donnent leur accord pour cette requĂȘte.

Ladite maison close se situait sur la route qui mĂšne vers les usines Altairac et Duroux. Il s’agissait apparemment d’un lieu Ă  la fois connu et dĂ©criĂ© dans la ville, puisqu'on retrouve de nombreuses fois le conseil municipal discuter de plaintes Ă  ce sujet. Ainsi, au cours de l’étĂ© 1926, la propriĂ©taire des lieux demande une autorisation pour la surĂ©lĂ©vation de l’immeuble et pour en confier la gĂ©rance Ă  une nommĂ©e Oualed AĂŻcha. Paradoxalement, et alors que le conseil dĂ©cide de la fermeture de ce lieu Ă  cause de son emplacement (jugĂ© trop exposĂ© sur une grande rue), un des conseillers indigĂšnes, Ali Kaouadji[269], juge la dĂ©cision arbitraire et prie le maire de revoir sa position. Pourtant, en , ce mĂȘme Kaouadji appuiera son collĂšgue Achour Oumedjkane lorsque ce dernier se plaindra devant le conseil que le quartier PLM soit « actuellement envahi par des femmes indigĂšnes de mauvaise vie venant d’Alger, qui se rendent aux hĂŽtels existants pour y passer la nuit » car cela provoquait des rĂ©clamations de la part des habitants « qui craignent que leurs femmes ou leurs filles soient confondues avec elles ». Par ailleurs, en , la mairie de Maison-CarrĂ©e reçoit une demande officielle d’une certaine Frih Hadja bent Benmalek b. Rezka pour l’installation d’une nouvelle maison de tolĂ©rance dans le lotissement Fouquereau, entre les quartiers PLM et Sainte-Corine. AussitĂŽt, l’adjoint au maire Michel Redon protesta auprĂšs du conseil et demanda que la requĂȘte soit refusĂ©e en dĂ©clarant sans dĂ©tour que « DĂ©jĂ , le quartier Sainte-Corine nous vaut assez d’indĂ©sirables indigĂšnes sans que la maison de tolĂ©rance vienne encore en attirer un plus grand nombre, sans tenir compte du dĂ©sagrĂ©ment de ce voisinage au point de vue de la morale publique ». Quelques annĂ©es plus tĂŽt, le Bulletin municipal[270] Ă©voquait les dĂ©sagrĂ©ments que causaient les « femmes indigĂšnes dites gitanes ». Celles-ci parcouraient souvent les rues de la ville en Ă©tat d’ivresse, se livraient Ă  des gestes vulgaires, tenaient des propos obscĂšnes et se prostituaient. La municipalitĂ© publie alors un arrĂȘtĂ© stipulant qu’il Ă©tait dĂ©sormais interdit Ă  ces femmes d’accĂ©der aux cafĂ©s et dĂ©bits de boissons de la ville, qu’ils soient europĂ©ens ou indigĂšnes, de mĂȘme qu’il leur Ă©tait interdit de sĂ©journer dans les hĂŽtels de Maison-CarrĂ©e, qu’elles soient seules ou accompagnĂ©es. D’autres mesures viendront renforcer ses dispositions au cours des annĂ©es suivantes.

(8 novembre) - Maurice Violette, gouverneur gĂ©nĂ©ral d'AlgĂ©rie (1925-1927) est reçu Ă  l'HĂŽtel de ville de Maison-CarrĂ©e par le maire LĂ©on Tourenne ainsi que les autres membres du conseil municipal et les notables de la ville, lors d'une courte visite qu'il avait menĂ© Ă  l’École d'Agriculture de Belfort[271].

Il est Ă  noter ici que M. Violette sera un des deux initiateurs (en 1927) du fameux projet de loi dite "Blum-Violette" sur le statut des indigĂšnes algĂ©riens. PrĂ©voyant l'octroi de l'Ă©galitĂ© de droit avec les EuropĂ©ens Ă  une minoritĂ© de Musulmans, cette initiative fera de lui l’ennemi jurĂ© des français d’AlgĂ©rie Ă  l'Ă©poque et il sera particuliĂšrement combattu au parlement français par le sĂ©nateur maison-carĂ©en Jacques Duroux, pourtant de gauche.

1926

(20 janvier) - Un arrĂȘtĂ© de la PrĂ©fecture d’Alger proclame dans sa prĂ©face : « [
] portant rĂšglement sur la constitution de fonctionnement et les attributions des djemaas de douars dans les communes mixtes : ConsidĂ©rant que le quartier de Sainte-Corine sis dans la commune de Maison-CarrĂ©e est assez Ă©loignĂ© de l’agglomĂ©ration europĂ©enne et compte 1 200 indigĂšnes, qu’il y aurait intĂ©rĂȘt Ă  ce qu’un chef de fraction soit dĂ©signĂ© dans ce quartier pour en assurer spĂ©cialement la surveillance [
] ». À cette occasion, un emploi de « chef de fraction » est crĂ©Ă© par l’administration coloniale et un certain Mahfoud Dahache est nommĂ© au poste. Deux ans plus tard (novembre 1928), on retrouve ce mĂȘme personnage adressant une demande d’allocation auprĂšs du conseil municipal. Lisant sa lettre Ă  ses collĂšgues, le maire LĂ©on Tourenne nous apprend que, pour justifier cette demande, Mr Dahache affirme « qu’il est souvent appelĂ© en tĂ©moignage, soit au Commissariat de police, soit Ă  la Justice de Paix, pour les dĂ©lits commis par les habitants de son agglomĂ©ration, dont la mentalitĂ© n’est pas des meilleures, qu’en outre il lui faut assez souvent accompagner le brigadier PrĂ©tro dans ses tournĂ©es, ce qui a pour rĂ©sultat de lui faire perdre d’assez nombreuses journĂ©es et que n’ayant d’autres ressources que son travail, il ne peut pas arriver Ă  suffire aux besoins de sa famille qui se compose de sa femme et de cinq enfants ». Le maire appuie ces affirmations et reconnaĂźt que depuis sa nomination en tant que chef de faction il s’acquitta bien de son travail, et c'est ainsi qu'on lui accorde une allocation annuelle de 600 francs.

(7 mars) - Un dĂ©nombrement de la population fait ressortir un total de 14 648 habitants pour la commune de Maison-CarrĂ©e, dont 41 % d'EuropĂ©ens et 59 % d'AlgĂ©riens musulmans. On note que ces derniers ont enregistrĂ©, en cinq ans, une augmentation de 2 188 habitants contre 1 170 chez les EuropĂ©ens et reprĂ©sentent -pour la premiĂšre fois de l'histoire de la commune- la majoritĂ© de la population de la commune. Pour l'heure, les EuropĂ©ens demeurent encore majoritaires dans la ville proprement dite (56 % sur 11 529 habitants du pĂ©rimĂštre urbain), mais -Ă  l'image de l'ensemble du pays- la croissance de la population musulmane ne va plus se dĂ©mentir et bientĂŽt les « indigĂšnes » deviendront l'Ă©lĂ©ment majoritaire Ă  Maison-CarrĂ©e, tant dans la ville elle-mĂȘme que dans le reste de la commune, ce qui ne sera pas sans consĂ©quences pour l'avenir comme on le verra.

(26 mars) - La presse locale[272] rapporte la mĂ©saventure d'un certain Fahloud Bouzid, habitat de Maison-CarrĂ©e et soldat engagĂ© dans l'armĂ©e française qui venait de rentrer de Syrie aprĂšs la fin de son contrat. Or, en ce jour et alors qu'il Ă©tait rentrĂ© chez-lui depuis quelques semaines, il se voit arrĂȘtĂ© par les autoritĂ©s militaires et mis en prison dans la caserne du 5e RTA Ă  Belfort sous le motif de dĂ©sertion. Bien que le malheureux disposait de tous les documents attestant de sa libĂ©ration du service, on ne voulut rien savoir et il restera aux arrĂȘts jusqu'en fĂ©vrier 1928, date Ă  laquelle l'erreur sera enfin reconnue par l'administration militaire, mais sans pour autant ĂȘtre dĂ©dommagĂ© du grave prĂ©judice subi ni mĂȘme ouvrir droit Ă  la moindre demande d'excuses.

(avril) - La place Altairac (act. Jardin Abdelhamid Ibn-Badis) à Maison-Carrée est aménagée en square. Le plus ancien de la ville, agrémenté d'un kiosque à musique en 1928, il s'agit du jardin public qui se trouve encore de nos jours en face du collÚge Al-Farazdaq (anc. école Lavderdet) et du bureau de poste d'El-Harrach.

(29 octobre) - Lors de dĂ©bats au conseil municipal, une intervention du conseiller musulman Kaouadji nous apprend que « des difficultĂ©s s’élĂšvent frĂ©quemment entre les notables indigĂšnes de Maison-CarrĂ©e, relativement au Marabout de Sidi-Mbarek. Certains d’entre eux revendiquent la propriĂ©tĂ© du terrain l’avoisinant. Quelques-uns rĂ©clament l’expulsion de l’oukil. Pourtant le terrain appartient Ă  la communautĂ©, ayant Ă©tĂ© acquis au moyen de souscriptions, et j’estime que c’est Ă  tort que le mufti, sollicitĂ© par quelques indigĂšnes de Maison-CarrĂ©e, intervient dans un sens qui ne peut qu’ĂȘtre prĂ©judiciable Ă  l’Association ». Le maire LĂ©on Tourenne rĂ©pond alors en rappelant que « le Marabout de Sidi-Embarek existait bien avant l’achat du terrain avoisinant par les consorts Zidane ; il avait Ă©tĂ© cĂ©dĂ© aux indigĂšnes de Maison-CarrĂ©e par Mr. Van Maseyk. Lors de l’acquisition de la parcelle de terrain situĂ©e autour du Marabout, quelques indigĂšnes, dont les chefs des familles Zidane, Bentoumi, etc. se sont prĂ©sentĂ©s pour faire Ă©tablir l’acte de vente Ă  intervenir avec Mr Van Maseyk. Malheureusement, dans cet acte il n’a pas Ă©tĂ© indiquĂ© que la vente Ă©tait faite au nom de la communautĂ©, dont les indigĂšnes prĂ©sents n’étaient que les reprĂ©sentants ». le maire reconnaĂźt qu'« il est bien exact que le terrain n’a pu ĂȘtre payĂ© que grĂące aux collectes qui ont Ă©tĂ© faites parmi la population indigĂšne », mais prĂ©cise en mĂȘme temps que le conseil municipal n’était pas compĂ©tent dans l’affaire et qu’il ne pouvait intervenir qu’à titre officieux pour essayer de trouver une solution avec les concernĂ©s.

(7 dĂ©cembre) - La SociĂ©tĂ© d’Éclairage & de Force (qui Ă©tait aussi le fournisseur de la ville en Ă©lectricitĂ© depuis 1903) achĂšve l’installation des canalisations nĂ©cessaires et inaugure la premiĂšre alimentation de la ville de Maison-CarrĂ©e en gaz naturel[273].

(13 dĂ©cembre) - De violents orages frappent la rĂ©gion d'Alger et on peut lire en ce jour dans la presse coloniale que : « Les orages ont Ă©galement Ă©prouvĂ© Maison-CarrĂ©e et ses environs oĂč les dĂ©bordements de la riviĂšre de l'Harrach sont toujours Ă  craindre. [...] L'abondance et la violence de la pluie ont fait dĂ©border l'un des affluents de l'-Harrach, l'oued OuchaĂŻa, petite riviĂšre qui se diverse un peu avant d'arriver Ă  Maison-CarrĂ©e au lieu-dit « la GlaciĂšre » envahit l'usine Ă©lectrique si complĂštement inondĂ©e, qu'il Ă©tait impossible d'y pĂ©nĂ©trer. La route nationale a Ă©tĂ© envahie par l'eau et la vase ; entre Hussein-Dey et Maison-CarrĂ©e, il y avait par endroits, sur la route, prĂšs de trois mĂštres d'eau. Le canal Dessoliers qui est parallĂšle Ă  l'Harrach a dĂ©bordĂ© provoquant des dĂ©gĂąts ; la crue de l'Harrach est trĂšs forte ; son dĂ©bordement est Ă  craindre : toutes les dispositions prĂ©ventives ont Ă©tĂ© prises. L'haine Ă©lĂ©vatoire des eaux de Maison-CarrĂ©e a dĂ» ĂȘtre arrĂȘtĂ©e par suite du manque de courant Ă©lectrique »[274].

(17 dĂ©cembre) - CrĂ©ation de la SociĂ©tĂ© des Abattoirs & Conserves alimentaires du Nord de l'Afrique (SACANA), qui succĂšde Ă  l'ancienne entreprise Froid-Sec dans l'exploitation de l'usine frigorifique de Maison-CarrĂ©e[275]. La nouvelle sociĂ©tĂ© fut d'abord l'idĂ©e, en septembre 1926, des Établissements Ravilly Ă  Rennes (Bretagne, France) dont le propriĂ©taire signa un traitĂ© avec le Gouvernement GĂ©nĂ©ral de l'AlgĂ©rie lui donnant Ă  bail pour trente ans l'abattoir industriel de Maison-CarrĂ©e. Louis Ravilly[276] mit alors en place une sociĂ©tĂ© anonyme, la SACANA, dont il Ă©tait actionnaire majoritaire, et qui s'avĂ©ra trĂšs lucrative dans un premier temps[277], mais qui retombera une nouvelle fois dans l'inactivitĂ© au dĂ©but des annĂ©es 1930 comme nous pouvons le lire une revue spĂ©cialisĂ©e de l'Ă©poque[278] : Il faut citer encore, comme important Ă©tablissement frigorifique, l'abattoir industriel de Maison CarrĂ©e. Construit Ă  la fin de la guerre, il prĂ©sente les mĂȘmes dĂ©fauts que beaucoup d'Ă©tablissements analogues, crĂ©Ă©s en France vers la mĂȘme Ă©poque : il a Ă©tĂ© conçu pour un dĂ©bit auquel le pays ne peut pas suffire. On a oubliĂ© que durant neuf mois de l'annĂ©e au moins, le mouton d'AlgĂ©rie, Ă©tique et sentant le suint, ne vaut pas la peine d'ĂȘtre congelĂ©, car son Ă©coulement serait impossible. On a oubliĂ© aussi les conditions trĂšs dĂ©fectueuses de l'Ă©levage indigĂšne et les terribles ravages que font, dans les troupeaux, la sĂ©cheresse ou les maladies. Aussi, quelle fut sa destinĂ©e ? À peine mis en service, et finie la pĂ©riode d'extrĂȘme pĂ©nurie de viande qui seule justifiait son existence, il dut fermer ses portes. Repris, il y a quelques annĂ©es, par une sociĂ©tĂ© qui fournissait, surtout l'armĂ©e, en viande congelĂ©e, il servit principalement d'entrepĂŽt d'importation et ne fit du mouton local que par intermittence. Il vient, Ă  nouveau, de retomber dans l'inaction, par suite de la dĂ©faillance de la sociĂ©tĂ© qui l'exploitait, et il est vraisemblable qu'il n'en sortira qu'au moyen d'une transformation radicale pour le rendre plus apte aux conditions d'exploitation locale. PrĂ©vu, pour une marche continue et pour un trĂšs gros dĂ©bit de viande, il est muni d'un matĂ©riel beaucoup trop puissant pour les ressources du pays. Il comporte, en effet, outre un imposant matĂ©riel de manutention mĂ©canique, deux compresseurs Ă  ammoniac, l'un de 575 000 frigories/heure, l'autre de 300 000 frigories/heure. Ce dernier est encore beaucoup trop puissant pour les simples besoins de la conservation. Il ne serait justifiĂ© que si l'on pouvait fabriquer environ 50 t de viande congelĂ©e par jour. Or, dans l'Ă©tat actuel de l'Ă©levage et des moyens de communication, il est impossible de lui assurer ce dĂ©bit. Nous pensons donc que cet Ă©tablissement, au lieu de se spĂ©cialiser uniquement dans la viande congelĂ©e, devra diviser ses locaux et sa puissance frigorifique pour permettre la fabrication de la glace, la conservation des fruits, Ă©ventuellement le traitement des vins, en fonctionnant avec des frais gĂ©nĂ©raux beaucoup plus rĂ©duits.

1927

(9 juillet) - Inauguration de la XXIe FĂȘte FĂ©dĂ©rale de Gymnastique d'Afrique du Nord Ă  Maison-CarrĂ©e. Cette manifestation qui rassemble des centaines d'athlĂštes est ainsi abritĂ©e pour la seconde fois dans la ville aprĂšs la XVe Ă©dition qui eut lieu en 1921.

1928

(été) - La municipalité de Maison-Carrée procÚde à l'aménagement de la rue Arago (act. rue Ahmed Aouen), une des principales artÚres de la ville à l'époque, par la construction d'un imposant mur de soutÚnement qui la sépare -encore de nos jours- de ce qui était appelé alors "route supérieure de Belfort" (act. avenue Boualem Ghiboub) qui, pour rappel, constituait encore le tracé la RN5 à cette époque époque.

(6 juin) - DécÚs de Nicolas Zévaco. Premier pharmacien et grand notable à Maison-Carrée, il était membre du conseil municipal de la ville et un des deux représentants de la circonscription aux Délégations FinanciÚres d'Algérie depuis leur création en 1898, et dont il s'était retiré uniquement au cours de la derniÚre élection pour y laisser la place à son fils aßné Raoul. Membre du conseil d'administration du trÚs influent journal L'Echo d'Alger (qui fut d'ailleurs acheté par son concitoyen Jacques Duroux en 1927), Zévaco était -depuis plus de vingt-ans à ce moment- un les hommes politiques les plus influents de la colonie française d'Algérie et, à ce titre, ses obsÚques dans le cimetiÚre chrétien de Maison-Carrée virent le rassemblement de milliers de gens et d'une bonne partie de la classe politique et administrative d'Algérie.

(dĂ©cembre) - Les acquĂ©reurs terrains dans le lotissement formĂ© quelque temps auparavant entre les vieux quartiers PLM et de Sainte-Corine par un certain EugĂšne Fouquereau se plaignent auprĂšs du maire de Maison-CarrĂ©e, LĂ©on Tourenne, du non-respect d’engagements pris par le lotisseur : Ă©gouts inutilisables, eau courante toujours pas disponible, routes impraticables en temps de pluie
 etc. La municipalitĂ© avait Ă  de nombreuses reprises mis en demeure Mr. Fouquereau afin qu'il procĂšde aux travaux nĂ©cessaires, mais sans rĂ©sultat et l’on porta finalement on affaire devant la PrĂ©fecture d'Alger[279]. Un an plus tard, la situation demeurait la mĂȘme et on voit alors le conseiller indigĂšne Achour Oumedjkane faire un rapport au conseil municipal[280] Ă  ce sujet et nous informe sur les conditions de vie de la population musulmane de Maison-CarrĂ©e Ă  l'Ă©poque : « [
] Cette agglomĂ©ration comprend prĂšs de 13 000 habitants et offre le spectacle le plus lamentable aux abords de Maison-CarrĂ©e, un foyer d’infection dont les dangers sont certains. Il y a lĂ -bas prĂšs de 70 propriĂ©taires qui ont construit sans alignement, sans souci d’hygiĂšne, quelques puits ont Ă©tĂ© creusĂ©s, mais la majeure partie de la population se sert de l’eau du canal qui est rouge d’argile au moment des crues et qui charrie des matiĂšres dangereuses Ă  la santĂ©. Les dĂ©potoirs de l’agglomĂ©ration et des eaux mĂ©nagĂšres courent Ă  ciel ouvert dans les ruelles puantes, pas d’égouts ». Les requĂȘtes des habitants sont alors rĂ©sumĂ©es en quatre points : amener l’eau courante au quartier par l’installation de trois bornes fontaines ; la construction de deux Ă©gouts collecteurs ; l’éclairage Ă©lectrique des ruelles ; le cimentage des rigoles et il prĂ©cise que la population Ă©tait mĂȘme disposĂ©e Ă  fournir la main-d’Ɠuvre et Ă  payer la majeure partie des dĂ©penses induites par ces travaux. Le maire va nĂ©anmoins refuser de donner suite Ă  ces requĂȘtes au motif que la situation mĂȘme de ce quartier rendait de tels travaux impossibles Ă  envisager. Ces problĂšmes ne seront toujours pas rĂ©glĂ©s en 1930 et on verra alors la prĂ©fecture ordonner l’interdiction de toute nouvelle construction dans ce lotissement jusqu'Ă  nouvel ordre. Le quartier Fouquerau existe encore de nos jours Ă  El-Harrach.

1929

(1er mai) - Election municipale à Maison-Carrée

L'industriel Georges Altairac (fils aßné de l'ancien maire Frédéric Altairac), est élu maire, tandis que le vieux Léon Eldine revient au poste d'adjoint au maire.

(novembre ?) - Inauguration de ce qui était appelé alors Les Halles de Maison-Carrée.

RĂ©alisĂ©es dans le cadre d'un plan plus large de rĂ©amĂ©nagement du vieux marchĂ© Ă  bestiaux de Maison-CarrĂ©e, ces galeries faisaient partie intĂ©grante du marchĂ© Ă  l'origine et furent conçues Ă  comme espace exclusivement dĂ©diĂ© Ă  la boucherie et la volaille[281] qui se pratiquaient jusqu'alors en plein air et dans des conditions d'hygiĂšne nĂ©cessairement douteuses. La construction nĂ©cessita toutefois le dĂ©mĂ©nagement d'un stand et d'une salle de gymnastique qui appartenaient Ă  la SociĂ©tĂ© de Tir & d’Éducation Physique, une association locale trĂšs active qui occupait les lieux depuis la fin du XIXe s. Le bĂątiment existe encore de nos jours, abritant le trĂšs rĂ©putĂ© marchĂ© aux lĂ©gumes d'El-Harrach.

(novembre) - On apprend de la lettre d'un ancien soldat indigÚne et mutilé de guerre (un certain Amar Melouane, habitant le quartier du Parc Bomati), que la ville de Maison-Carrée compte en tout, à cette époque, trois médecins nommés Dr Gauthier, Dr Danger et Dr Djabour[282].

1930

- Inauguration du Stade ZĂ©vaco Ă  Maison-CarrĂ©e[283]. D'une capacitĂ© de 15 000 spectateurs, ce nouveau stade remplaça un premier terrain qui Ă©tait Ă©quipĂ© de gradins en bois. TrĂšs bel Ă©quipement selon les normes de l'Ă©poque, il comptait encore parmi les rares vĂ©ritables stades de football en AlgĂ©rie. Son enceinte deviendra naturellement le bastion du RCMC dont le prĂ©sident Ă  ce moment n'Ă©tait autre que Raoul ZĂ©vaco (d'oĂč le nom de "Stade ZĂ©vaco"), riche propriĂ©taire et grand notable de la ville, qui Ă©tait propriĂ©taire du terrain (situĂ© en face de la minoterie Duroux et des usines Altairac) et premier pourvoyeur de fonds de sa construction. Ce stade restera la principale infrastructure sportive de la commune de Maison-CarrĂ©e durant plus de vingt annĂ©es, soit jusqu'Ă  la construction du Stade Lavigerie (act. Stade du ) au dĂ©but des annĂ©es 1950. Le vieux stade ZĂ©vaco pĂ©riclitera rapidement aprĂšs l'indĂ©pendance de l'AlgĂ©rie en 1962 et la disparition du RCMC, abandonnĂ© dĂšs les annĂ©es 1970 puis dĂ©moli et redevenu terrain vague dans les annĂ©es 1980. Le Stade ZĂ©vaco renaĂźtra de ses cendres en avril 2006, sous la forme d'un petit complexe sportif communal avec plusieurs terrains de jeu et d'entrainement ainsi qu'une salle omnisport[284] qu'on baptisera du nom d'un des anciens militants FLN-ALN de la ville tombĂ© durant la guerre de libĂ©ration algĂ©rienne.

(novembre) - Menaçant ruine et ne prĂ©sentant plus de garanties de sĂ©curitĂ© suffisantes pour le public, la vieille Ă©glise de Maison-CarrĂ©e (construite en 1873) se voit dĂ©finitivement fermĂ©e par les autoritĂ©s municipales. Le service du culte catholique est alors transfĂ©rĂ© vers une chapelle de fortune qui fut installĂ©e, Ă  titre provisoire, dans une salle des fĂȘtes appartenant Ă  l'association catholique de Foucauld (fondĂ©e et administrĂ©e par le curĂ© de Maison-CarrĂ©e, le chanoine Repeticci, depuis 1923) qui se situait tout en bas de la rue MarĂ©chal Foche (act. rue Bouamama).

1931

(14 janvier) - Inauguration officielle de la mosquée de Maison-Carrée[285].

La construction de ce lieu de culte avait fait l'objet d'une demande de la part du conseiller municipal Bouchenack, au nom de ses collĂšgues musulmans, dĂšs aoĂ»t 1921. Cette requĂȘte reçoit alors l’aval du maire LĂ©on Tourenne qui l’estima « parfaitement justifiĂ©e en ce sens que la population indigĂšne de Maison-CarrĂ©e et des centres voisins est devenue trĂšs importante et qu’il n’existe pas de mosquĂ©e dans la rĂ©gion ». Mais, un mois plus tard, l’administration coloniale rĂ©pond nĂ©gativement, invoquant la loi de sĂ©paration des Églises de l’État qui interdisait la construction de tout Ă©difice religieux sur le budget public. Les conseillers indigĂšnes demandent alors qu’un terrain leur soit concĂ©dĂ© par la commune, et qu’on les autorise Ă  organiser une souscription auprĂšs de la population musulmane de la ville pour couvrir les frais de construction de la mosquĂ©e souhaitĂ©e. La municipalitĂ© accepte cette requĂȘte et offre un terrain situĂ© sur le cĂŽtĂ© Est du marchĂ© aux bestiaux, en bordure de ce qui Ă©tait Ă  l'Ă©poque la rue Marceau. Il faudra nĂ©anmoins attendre pour voir le Service des Affaires IndigĂšnes au niveau du Gouvernement GĂ©nĂ©ral de l’AlgĂ©rie donner son accord pour l’organisation de la quĂȘte. Mais ledit service invoqua une nouvelle fois la loi de sĂ©paration pour s’opposer Ă  l’octroi gratuit du terrain par la commune « [
] l’emplacement de cette mosquĂ©e est situĂ© sur le terrain domanial qui a Ă©tĂ© concĂ©dĂ© Ă  la commune pour l’installation de son marchĂ© par dĂ©cret du 2 janvier 1864, cette commune ne pourrait aliĂ©ner aucune partie de ce terrain sans y avoir Ă©tĂ© autorisĂ©e par dĂ©cret », tout en prĂ©cisant que ladite autorisation serait certainement refusĂ©e Ă  la municipalitĂ© « si elle Ă©tait demandĂ©e en vue de la rĂ©alisation du projet dont il s’agit ». Une querelle administrative allait s'ensuivre : le maire de Maison-CarrĂ©e rĂ©pondra Ă  l’administration que la parcelle de terrain en question ne faisait pas partie du terrain domanial concĂ©dĂ© en 1864 pour le marchĂ©, mais provenait d’un Ă©change qui fut consenti entre la commune et une certaine SociĂ©tĂ© Civile des Orphelinats Agricoles d’AlgĂ©rie en 1874 [286], et pour lequel la commune a dĂ» cĂ©der Ă  cette sociĂ©tĂ© un terrain de 1,3 hectares [287] en Ă©change de « deux anciennes batteries no 11 et 12, situĂ©es sur le territoire de Maison-CarrĂ©e, rive droite de l’Harrach, avec le terrain en dĂ©pendant, lesquelles batteries avaient Ă©tĂ© concĂ©dĂ©es gratuitement par dĂ©cret impĂ©rial le 2 janvier 1864 ». On propose nĂ©anmoins que le terrain (d’une superficie de 200 m2 environ) soit cĂ©dĂ© Ă  la collectivitĂ© qui va gĂ©rer la future mosquĂ©e pour un prix symbolique de 10 fr le m2, et non Ă  titre gracieux comme il Ă©tait prĂ©vu au dĂ©part. Quelques mois plus tard, l’administration des domaines va confirmer les faits avancĂ©s par la mairie et on lĂšvera toute opposition quant au lancement du projet, mais non sans imposer que le prix de cession des terrains soit supĂ©rieur Ă  20 fr le m2, bien que l’emplacement pouvait ĂȘtre sujet Ă  inondation. Entre-temps, le chantier Ă©tait dĂ©jĂ  lancĂ© Ă  l’étĂ© 1922, mais il s’avĂ©ra vite que les sommes rĂ©coltĂ©es par la quĂȘte seraient insuffisantes et les travaux s'arrĂȘtĂšrent aux fondations dĂšs .

La situation restera ainsi bloquĂ©e durant des annĂ©es, et le projet Ă©tait pratiquement tombĂ© dans l’oubli si ce n’est les efforts des conseillers Achour Oumedjkane et Kaouadji qui le rappellent au nouveau maire, Georges Altairac, en et rĂ©clament que la parcelle soit prĂ©servĂ©e lorsque seront lancĂ©s les travaux de rĂ©amĂ©nagement prĂ©vus pour le MarchĂ© aux bestiaux. Les travaux venaient alors de reprendre sur le chantier et le maire donna son assentiment pour le site et demanda qu’une mahekma soit aussi bĂątie par la municipalitĂ© Ă  cĂŽtĂ© de la nouvelle mosquĂ©e.

L'édifice, qui porte le nom de Mosquée El-Imùm al-Echafii depuis l'indépendance en 1962, a été démoli en et se trouve actuellement en reconstruction suivant de nouveaux plans.

(15 janvier) - De violents orages traversent l'AlgĂ©rois et provoquent une violente crue de l'oued El-Harrach qui inonde la ville de Maison-CarrĂ©e et sa rĂ©gion durant deux jours entiers : "Les affluents qui environnent Maison-CarrĂ©e et particuliĂšrement l'oued Smar qui longe la voie ferrĂ©e depuis Maison-Blanche et vient se jeter dans la riviĂšre de l'Harrach prĂšs des usines Altairac, grossissant dĂ©mesurĂ©ment d'heure en heure, les services municipaux de la ville, lançaient une premiĂšre alerte, Ă  22h informant les habitants d'un danger imminent. À 3h du matin la sirĂšne dĂ©chirait la nuit de son bruit lugubre. Les flots furieux de l'Harrach commençaient leur Ɠuvre dĂ©vastatrice. Les eaux sortant de leur ancien lit dĂ©tournĂ©, en amont du pont qui se trouve prĂšs de la voie ferrĂ©e Ă  hauteur de la briqueterie Altairac, dĂ©ferlaient avec force dans la rue principale du village menant Ă  l'Arba, balayant tout sur son passage, pĂ©nĂ©trant dans les maisons et se dirigeant vers le marchĂ©, qui Ă©tait bientĂŽt complĂštement inondĂ©, ainsi que la place de la mairie. D'un autre cĂŽtĂ© le torrent continuait aussi sa course vers le pont en ciment armĂ© qui traverse l'entrĂ©e de Maison-CarrĂ©e, battant terriblement les arches et les eaux ne tardaient pas Ă  passer sur le tablier du pont en fer des CFRA. À 4h15 du matin, la cote atteignait dĂ©jĂ  7 mĂštres et Ă  4h45 toute la partie basse de Maison-CarrĂ©e Ă©tait envahie de tous cĂŽtĂ©s par de vĂ©ritables vagues d'eaux terreuses, jusqu'Ă  une hauteur de prĂšs de 90 cm. À 8h, la cote Ă©tait Ă  7,95 m. Les berges disparaissaient de plus en plus sous les eaux qui, vers 10h du matin, noyaient la place de la Mairie et les maisons environnantes. On cotait Ă  ce moment 8,50 m. Les grilles et le jardin en façade de l'HĂŽtel de ville Ă©taient enlevĂ©s par le torrent ainsi que tout ce qui se trouvait sur son passage. Le marchĂ© n'Ă©tait plus qu'une immense mer rougeĂątre, roulant en furie et charriant avec elle nombre de bƓufs, moutons, chevaux, bourricots et autres animaux ainsi que toutes sortes d'objets hĂ©tĂ©roclites : chaises, tables, bancs, tonneaux, ustensiles divers 
 etc. que leurs propriĂ©taires risquant eux-mĂȘmes d'ĂȘtre emportĂ©s avaient Ă©tĂ© dans l'impossibilitĂ© de sauver du dĂ©sastre dont Ă  l'heure actuelle on ignore la grande Ă©tendue. Les habitants qui n'ont pas quittĂ© leur demeure dans la nuit, se sont rĂ©fugiĂ©s aux Ă©tages supĂ©rieurs et y sont prisonniers, l'eau entourant les habitations de toutes parts. Sur la place de l'HĂŽtel de ville l'eau dĂ©passe de 80 cm au moins, le perron de la mairie ; la crue a atteint au moment culminant 8,80 m, Ă©tant de 40 cm seulement en dessous de celle de 1911, comme l'indique la plaque apposĂ©e aussitĂŽt aprĂšs les inondations de cette annĂ©e-lĂ , Ă  la sortie du pont principal de Maison-CarrĂ©e[288]."

En fait, les dĂ©gĂąts sont si importants et la situation si dramatique en 1931 qu'on considĂ©ra qu'il s'agissait des pires inondations qu'ait connue la ville depuis celles de 1911, qui avaient tant marquĂ© les mĂ©moires. Quelques semaines plus tard, le Gouverneur GĂ©nĂ©ral d'AlgĂ©rie J. Carde fait constituer une commission censĂ©e statuer sur les mesures capables de rĂ©gler dĂ©finitivement le problĂšme des inondations de oued l'Harrach et ses affluents. Pour la ville de Maison-CarrĂ©e, les solutions qui se sont dĂ©gagĂ©es portent sur la nĂ©cessitĂ© d'un endiguement de l'ensemble des rives et la profonde modification du systĂšme des Ă©gouts pour empĂȘcher le refoulement des eaux, ce qui sera effectivement rĂ©alisĂ© au cours des mois et annĂ©es qui ont suivi. Mais, les mesures les plus importantes identifiĂ©es par la commission portaient sur une diminution du dĂ©bit de l'oued en amont de son cours, ce qui nĂ©cessiterait une sĂ©rie de barrages et de rĂ©servoirs dont les travaux coĂ»teraient trop cher pour qu'ils soient rĂ©ellement envisagĂ©s par l'administration coloniale Ă  cette Ă©poque.

(Hiver) - Un deuxiĂšme jardin public est amĂ©nagĂ© Ă  Maison-CarrĂ©e, dans le quartier de Belfort cette fois-ci. Pour sa rĂ©alisation, la municipalitĂ© avait acquis le terrain d’un certain Émile CoulbouĂ©e, un des membres du conseil municipal, et lui attribuera initialement le nom de square Pierre Bordes en l’honneur du Gouverneur GĂ©nĂ©ral d’AlgĂ©rie qui avait cĂ©lĂ©brĂ© le Centenaire de l’AlgĂ©rie française, avant de le rebaptiser du nom du roi belge Albert Ier en avril 1934.

(Octobre) - Un troisiÚme pont sur l'Harrach est construit à Maison-Carrée.

Objet d'un appel public Ă  concours le en dĂ©cembre 1929[289], ce pont s'inscrivait en fait dans le projet plus global de dĂ©viation de la Route Nationale n°5, qui traversait jusque-lĂ  l'agglomĂ©ration de Maison-CarrĂ©e et qui devrait dĂ©sormais contourner la ville par le N. Il s'agit de l'ouvrage en bĂ©ton que traverse encore de nos jours la RN5 au niveau de Mohamadia en allant vers Cinq-Maisons, flanquĂ© dĂ©sormais par un autre pont parallĂšle dĂ©diĂ© Ă  la traversĂ©e de l'oued par la ligne de tramway. A l'Ă©poque, la presse de l'Ă©poque [290] rapportait l'effet attendu de cette construction sur la diminution des embouteillages qui asphyxiaient dĂ©jĂ  Maison-CarrĂ©e, mais on Ă©voque en mĂȘme temps les craintes de certaines parties locales sur son positionnement du pont en aval du cours de oued et le risque de le voir se transformer en barrage en cas de crue hivernale, aggravant ainsi l'intensitĂ© les inondations dont souffrait la Maison-CarrĂ©e depuis toujours. On y apprend ainsi que, sur la base de ces rĂ©serves, le maire Georges Altairac avait dĂ©cidĂ© d'allonger le tablier du pont Ă  135 mĂštres et d'ajouter au plan initial une troisiĂšme arche pour maximiser les ouvertures sous le pont et permettre Ă  plus d'eau d'y couler vers la mer en cas de crue.

- Un dĂ©nombrement de la population donne un total de 21 686 habitants pour la commune de Maison-CarrĂ©e, dont seulement 40 % d’EuropĂ©ens. Cette Ă©volution dĂ©mographique Ă©tant maintenant un fait irrĂ©versible, elle ne sera pas sans consĂ©quences politiques par la suite car les quartiers musulmans de Maison-CarrĂ©e tendront de plus en plus Ă  constituer des terreaux fertiles pour le mouvement national algĂ©rien dont la ville deviendra un des principaux bastions Ă  Alger.

1932

Une deuxiĂšme brigade de Gendarmerie mobile est installĂ©e Ă  Maison-CarrĂ©e, portant le nombre de gendarmes en service dans la localitĂ© de six Ă  douze hommes. Pour satisfaire cette demande de la municipalitĂ©, on dut mettre Ă  disposition des autoritĂ©s militaires des locaux assez spacieux accueillir pour le nouvel effectif (onze logements, des bureaux et des Ă©curies pour six chevaux) et pour cela le maire choisit un terrain militaire situĂ© en bas de ce qui Ă©tait alors École Primaire SupĂ©rieure pour jeunes-filles (act. lycĂ©e Ourdida Meddad), et qui fut acquis sur le budget de la commune. Ce bĂątiment, qui existe toujours, continua Ă  servir de siĂšge pour une brigade de Gendarmerie nationale algĂ©rienne aprĂšs l'indĂ©pendance du pays en 1962, avant d'ĂȘtre dĂ©saffectĂ© au dĂ©but des annĂ©es 1990 et faire usage depuis lors de logement pour des familles d'anciens gendarmes.

1933

(Septembre) - La construction d'une nouvelle École primaire supĂ©rieure est achevĂ©e Ă  Maison-CarrĂ©e. SituĂ© prĂšs de ce qui Ă©tait encore Ă  l'Ă©poque l'École Industrielle (act. École nationale polytechnique) Ă  Belfort, le nouvel Ă©tablissement scolaire Ă©tait constituĂ© de 11 classes au dĂ©part et destinĂ© Ă  l'instruction primaire des garçons europĂ©ens. À la suite de cela, l'ancienne EPS (inaugurĂ©e en 1915) situĂ©e Ă  cĂŽtĂ© de l'Ă©glise de la ville est convertie en Ă©cole primaire de jeunes-filles avec internat. Les deux Ă©tablissements existent encore de nos jours Ă  El-Harrach, le premier abritant dĂ©sormais un Institut National de Formation des Personnels de l'Éducation (INFPE) tandis que le second est le lycĂ©e de jeunes filles Ourida Meddad.

(30 octobre) - Le gouverneur général de l'Algérie, Jules Carde, effectue une visite officielle à Maison-Carrée et s'y réunit avec le maire Georges Altairac et les autres autorités locales.

Les divers discours rapportĂ©s par la presse Ă  cette occasion[291], on apprend qu'un certain nombre de projets d'infrastructures Ă©taient en cours dans la commune, notamment l'agrandissement sur 73 hectares de l'Ă©tablissement militaire situĂ© "sur la route de Rivet" au Sud-Est de la ville, afin d'accueillir l'État-major d'une brigade de cavalerie, un groupement d'artillerie et une partie du 5e RTA, un rĂ©giment de Chasseurs d'Afrique, un bataillon du GĂ©nie, un dĂ©tachement des Trains d'Ă©quipage ainsi qu'un nouveau siĂšge pour l'École de Cavalerie IndigĂšne. En plus des travaux d'assainissement dĂ©finitif des berges de l'oued Smar que ce projet exigera, ce sont en tout 3 000 personnes qui devront peupler ce qui Ă©tait appelĂ© la "CitĂ© militaire de Maison-CarrĂ©e" aprĂšs cet amĂ©nagement[292]. De nos jours, cet ensemble - encore assez imposant dans la topographie de la ville d'El-Harrach- abrite dans ce qui est communĂ©ment appelĂ© "Caserne de Beaulieu" Ă  la sortie du quartier Sidi-Embarek, ou plus prĂ©cisĂ©ment l'Ecole Militaire SupĂ©rieure du MatĂ©riel.

1934

- La construction rĂ©cente de nombreux immeubles dans la zone dite des Cinq-Maisons pousse la municipalitĂ© de Maison-CarrĂ©e Ă  entreprendre des premiers travaux d’amĂ©nagement et de voirie dans cette zone, notamment par la mise en place d’un Ă©gout. Le quartier existe encore de jours et dĂ©pend de la commune de Mohamadia.

Photographie de Guillaume-Laurent Moll, dit Guy Moll (1910-1934). Mort dans un accident de course en Italie, il est enterrĂ© Ă  Maison-CarrĂ©e oĂč il rĂ©sidait.

(22 août) - Décédé quelques jours auparavant sur le circuit automobile de Pescara (Italie), le pilote de course Guy Moll (un natif de Rivet, act. Meftah) et champion de plusieurs grands prix est enterré en ce jour à Maison-Carrée en présence de tous les notables de la région[293].

(dĂ©cembre) - Les propriĂ©taires (quelque 35 maisons et dĂ©jĂ  300 Ă  400 habitants) du quartier Belle-Vue s'Ă©tant adressĂ©s Ă  la municipalitĂ© pour que les rues de leur lotissement reçoivent une dĂ©nomination officielle, le conseil municipal donne une suite favorable Ă  leur requĂȘte Ă  sa session de dĂ©cembre et, parmi les artĂšres citĂ©es dans le PV, on retiendra particuliĂšrement ce qui Ă©tait appelĂ© jusque-lĂ  « chemin vicinal no 5 » (dit « chemin des Batteries ») et qui fut baptisĂ© du nom du cardinal Lavigerie : il s'agit de la route qui menait au vieux couvent des PĂšres blancs et dont le nom s’étendra plus tard Ă  l’ensemble de la zone oĂč se situe le couvent. Lorsque ces terrains seront sĂ©parĂ©s du quartier Belle-Vue par le nouveau tracĂ© de la RN5 au dĂ©but des annĂ©es 1940, se distinguera clairement un quartier Lavigerie, future commune de Mohammadia.

1935

(19 mai) - L'élection du maire à Maison-Carrée se déroule dans des conditions trÚs tendues.

La presse algĂ©roise rapporte Ă  ce sujet : « Les 37 conseillers municipaux ont procĂ©dĂ© hier Ă  l'Ă©lection du maire de la localitĂ©. On sait qu'une campagne particuliĂšrement violente fut menĂ©e, au cours de laquelle les Ă©lus indigĂšnes dont dĂ©pendait la majoritĂ© au conseil furent l'objet de menaces diverses et dont certaines, consignĂ©es par des procĂšs-verbaux, tombent sous le coup de la loi. Depuis ces agissements, certaines mesures de police avaient Ă©tĂ© prises et, depuis 48 heures, Maison-CarrĂ©e vivait dans une atmosphĂšre irrespirable. Les rĂ©sultats du scrutin dĂ©montrent la manƓuvre qui a pesĂ© sur la libertĂ© des conseillers indigĂšnes. Ils ont tous Ă©tĂ© obligĂ©s de voter pour la liste Tourenne. [...] L'aprĂšs-midi, la ville vĂ©cut dans une agitation qui, fort heureusement, n'amena aucun incident. En quittant la mairie, M. Tourenne sortit portĂ© par des Arabes et se prĂ©senta Ă  la foule en compagnie du 3e adjoint, M. Ratto, tous deux coiffĂ©s de la chĂ©chia musulmane »[294].

À cette Ă©poque, le conseil municipal Ă©tait constituĂ© de 23 Ă©lus europĂ©ens et de 11 indigĂšnes, et il se trouve que les voix quasi unanimes de ces derniers avaient effectivement fait gagner LĂ©on Tourenne et ses amis de la droite dans tous les postes : Tourenne lui-mĂȘme est Ă©lu maire, NoĂ© Bernard 1er adjoint, Vincent Pons 2e adjoint, Charles Ratto 3e adjoint et Moktar Khlifi devient 4e adjoint.

(23 janvier) - Fondation de l' Union Sportive Musulmane de Maison-Carrée (USMMC, qui deviendra USMH à partir de 1977). La genÚse du club remonterait à juin 1931 selon les traditions locales, lorsqu'un certain Rabah Sahraoui assista à une rencontre de football entre jeunes musulmans au quartier Belfort (act. Hassan Badi) et qu'un agent de la police française vint les disperser sans raison apparente. Sahraoui songea alors à mettre en place un club réservé aux jeunes musulmans harrachis et fut rapidement rejoint par un groupe d'amis dont les noms furent gardés en mémoire : Aïssa Hadj-Benslimane, Nacer Hadj, Abdellah Kara, Abdelkader Teffahi, Boualem Ghaboub et Mohamed Zekraoui. C'est ainsi que naquit l'USMMC qui évolua d'abord dans un cadre amical jusqu'à son affiliation officielle par les autorités en janvier 1935. Ce qui est avéré, c'est que Benaïssa Kheroubi (coiffeur de métier et habitant la rue Chanzy à l'époque) fut le premier président du club et qu'il eut à ses cÎtés un Comité Directeur constitué dans un premier temps de Slimane Smaoui, Aïssa Benhadj, Mùali Si-Mohamed et Mokhtar Khalifi. Le siÚge du club était situé au 18, avenue Georges-Clemenceau à Maison-Carrée.

Cependant, le caractÚre trop clairement "musulman" de l'association, ainsi que les liens trop prononcés de ses membres avec les milieux nationalistes du PPA suscita la méfiance des autorités coloniales et, sur injonction de la Préfecture d'Alger, le conseil d'administration du club sera remanié dÚs juillet 1935[295] : Lakhdar BenallÚgue devient alors président et se fait seconder par Antoine Grola (1er vice-président) et Ahmed Djebboune (2e vice-président). Abdelkader Benyoucef est nommé secrétaire général, Yahia Benyahi secrétaire-adjoint et Amar Akli contrÎleur. Les autres membres du conseil, tous assesseurs, étaient Abdelkader Kara, A. Maza, Benyagoub Dine, Ali Bouaziz, S. Hamidou, N. Foudil, N. Kraoua, Y. Benabi, A. Touabia, A. Kadra, A. Aït-Ouadda, M. Hadidi, S. Gueri, Abdelkader Guenfoud, K. Deboub, H. Saci, R. Mendab et B. Chegma.

(12 novembre) - À la suite d'une crue importante de oued El-Harrach et oued Smar, la ville de Maison-CarrĂ©e est une nouvelle fois envahie par les eaux.

1936

- Un dĂ©nombrement de la population donne un total de 24 595 habitants pour la commune de Maison-CarrĂ©e, dont 14 516 AlgĂ©riens musulmans (59 %) et 10079 EuropĂ©ens (41 %). Cette mĂȘme opĂ©ration nous renseigne, par la mĂȘme occasion, sur le dĂ©coupage qui Ă©tait en vigueur pour la ville Ă  cette Ă©poque : Quartier de la Mairie, du Square Altairac, du Centre, de la Banque, des Pins, de Sidi-Embarek, des Usines, de Belfort, des Cinq-Maisons, Bellevue, de la Rive gauche, de PLM, Sainte-Corine, Lotissement Fouquereau.

(12 fĂ©vrier) - Lors d'une visite du prĂ©fet d'Alger, M. Bourrat, Ă  Maison-CarrĂ©e une rĂ©union est tenue Ă  l'hĂŽtel-de-ville avec le maire LĂ©on Tourenne et les autres membres du conseil municipal. Le discours du maire Ă  cette occasion, rapportĂ© par la presse locale[296], nous Ă©claire un peu sur la situation gĂ©nĂ©rale de la localitĂ© Ă  cette Ă©poque. En premier lieu la question du chĂŽmage, car la situation Ă©conomique semble trĂšs difficile et le maire Ă©voque quelque 200 chĂŽmeurs (europĂ©ens et algĂ©riens confondus) qui ne cessent de rĂ©clamer du travail dans la ville, mais sans qu'on puisse leur trouver des dĂ©bouchĂ©s. Il Ă©voque une dĂ©pense de 200 000 francs l'annĂ©e prĂ©cĂ©dente en aides au chĂŽmage et en subsides en nature ("soupe populaire") pris sur le budget communal. Vient ensuite le problĂšme de l'alimentation en eau potable car le dĂ©bit des puits dont la ville tire ses ressources ne suffit plus Ă  satisfaire les besoins d'une population en constante augmentation, et encore moins avec la garnison qui se voyait sur le point d'augmenter de maniĂšre consĂ©quente. Furent enfin Ă©numĂ©rĂ©s les principaux projets attendus pour la ville : la construction d'un abattoir moderne, l'agrandissement ou le dĂ©placement des deux cimetiĂšres (il s'agit du cimetiĂšre chrĂ©tien qui existe encore Ă  Belfort et celui dit de Sidi-Tayeb qui lui est adjacent), la construction d'une Ă©cole maternelle Ă  Belfort, l'ouverture d'une- Ă©cole maternelle indigĂšne rue KlĂ©ber (act. rue ????), l'assainissement de la citĂ© militaire aux abords de l'oued Smar, la mise en Ă©tat des rues privĂ©es et la construction d'un Ă©gout collecteur.

(4 mai) - Les communistes et les partis de la gauche organisent une manifestation Ă  Maison-CarrĂ©e, ce qui poussa le maire LĂ©on Tourenne Ă  publier un arrĂȘtĂ© municipal dĂšs le lendemain pour interdire tout attroupement en ville[297].

- Inauguration d’une nouvelle citĂ© militaire Ă  Maison-CarrĂ©e,

Etabli sur les vastes terrains (encore vides à l'époque) avoisinant le vieux marabout de Sidi Embarek au Sud-Est de la ville, cet ensemble militaire vint s'ajouter à celui, déjà trÚs imposant, qui s'était développé autour de la vieille caserne de Belfort, et renforça grandement le statut de ville-garnison qui avait toujours marqué Maison-Carrée depuis le début de la période coloniale française.

De nos jours, le site (communĂ©ment appelĂ©e "caserne de Beaulieu" par les locaux) abrite l' École Militaire SupĂ©rieure du MatĂ©riel de l'ANP.

(Eté) - Le bùtiment de l'ancienne église de Maison-Carrée (désafecté et fermé par les autorités depuis 1930 pour raisons de sécurité) est finalement démolie.

Des appels aux dons sont aussitĂŽt lancĂ©es par le clergĂ© local en vue de la construction -sur le mĂȘme lieu- d'un nouvel Ă©difice pour le culte catholique, et dont les Ă©tudes avaient dĂ©jĂ  Ă©tĂ© lancĂ©es en 1932.

(11 septembre) - Promulgation d'une loi instituant la Police d'Etat dans quatre communes d'Algérie, dont Maison-Carrée[298]

(10 dĂ©cembre) - Crue de l'oued El-Harrach et nouvelles inondations Ă  Maison-CarrĂ©e. Toutefois, les dĂ©gĂąts furent moins importants que lors de l’inondation de novembre 1935.

1937

(août) - Le Conseil municipal de Maison-Carrée donne son assentiment au lotissement de la propriété dite des « Pins Maritimes ».

Ces terrains, situĂ©s Ă  cheval entre les territoires de la commune de Maison-CarrĂ©e et de Fort-de-l’Eau, appartenaient alors Ă  deux europĂ©ens du nom de Goyard et Rolland, le premier Ă©tant lui-mĂȘme membre du Conseil municipal de Maison-CarrĂ©e. De nos jours, le "quartier des Pins" dĂ©pend de la commune de Mohamadia.

(27 aoĂ»t) - Messali Hadj, chef charismatique du Parti du peuple algĂ©rien (PPA) et du mouvement nationaliste algĂ©rien, est arrĂȘtĂ© par les autoritĂ©s et internĂ© pour la premiĂšre fois dans la prison de l'Harrach Ă  Maison-CarrĂ©e.

RelĂąchĂ© peu de temps aprĂšs, Messali reprend aussitĂŽt ses activitĂ©s politiques et tiendra mĂȘme un grand meeting nationaliste Ă  Maison-CarrĂ©e en . Alors que les quartiers musulmans de la ville sont devenus un bastion du mouvement Ă  Alger, la section du parti Ă©tait menĂ©e par Abdelkader Guenfoud (president), Bennanoune (secrĂ©taire), Ahmed Mokrane (vice-prĂ©sident) et ChĂ©rif Slimani (trĂ©sorier).

Vincent Pons (1905-1941). Militant de droite fasciste (Parti Populaire Français PPF), élu au Conseil municipal de Maison-Carrée à partir de 1919 et adjoint au maire en 1935, il devient Conseiller général de la 10e Circonscription en 1937 puis assume l'intérim du maire de Maison-Carrée 1941, deux mois avant son décÚs.

(25 octobre) - Elections départementales en Algérie.

A Maison-Carrée, le mandat de conseiller général de la 10e Circonscription était quasiment devenu une chasse gardée de la famille Altairac depuis plus de cinquante ans. Ainsi, Frédéric Altairac siégeait à ce moment depuis 18 années, aprÚs avoir succédé à son pÚre Georges Altairac à son grand-pÚre Frédéric-Antoine Altairac avant lui. Ce sera donc une immense surprise à Alger lorsque sera annoncée la victoire à cette élection de Vincent Pons, conseiller municipal depuis 1919 et adjoint au maire de Maison-Carrée depuis mai 1935[299].

1938

(fĂ©vrier) - Élections aux DĂ©lĂ©gations FinanciĂšres d'AlgĂ©rie.

À Maison-CarrĂ©e (10e Circonscription), le dĂ©lĂ©guĂ© sortant Raoul ZĂ©vaco se voit battre par le candidat du Parti Social Français, le Dr Lasserre par 764 voix contre 525[300].

(12 mars) - Inauguration ce qui était appelé "cité indigÚne" dans le quartier PLM à Maison-Carrée.

Inauguré en ce jour par le préfet d'Alger Bourrat et les autorités municipales, l'ensemble fut conçu par les architectes Guerineau et Bastelica sous la forme de 210 petits logements à deux piÚces répartis sur des sortes de maisons semi-collectives à deux étages. La cité fut bùtie sur la colline (jusque-là vierge de constructions) qui fait face au vieux quartier européen de Belfort sur la rive opposée de l'oued, et avait pour but de recaser une partie des familles algériennes qui peuplaient jusqu'alors le quartier insalubre de Sainte-Corine en contre-bas. Une mosquée sera par la suite érigée sur le lieu, alors que le projet prévoyait déjà une extension de la cité à 816 logements. Le site existe encore de nos jours, communément appelé "quartier PiLeM", et reste une des parties les plus populaires d'El-Harrach.

(30 octobre) Inauguration de la nouvelle église de Maison-Carrée.

Plus de huit annĂ©es aprĂšs la dĂ©molition de l'ancienne Ă©glise construite en 1873, un nouveau lieu de culte catholique est enfin construit dans la ville, sur le mĂȘme emplacement que l'ancienne et sous le nom d' Eglise du SacrĂ©-CƓur de JĂ©sus. Se voulant trĂšs moderne Ă  l'Ă©poque, le nouveau bĂątiment fut conçu en 1932 par le cabinet d'architecture GuĂ©rineau & BastĂ©lica selon un plan basĂ© sur de grands cubes droits censĂ©s symboliser l'idĂ©e de la "maison carrĂ©e". Cependant, les plans initiaux vont s'avĂ©rer un peu trop ambitieux par rapport aux moyens financiers rassemblĂ©s et, tout en gardant la forme d'ensemble, le rendu final de l'Ă©glise va abandonner le trĂšs haut clocher qui Ă©tait prĂ©vu Ă  l'origine et la longueur mĂȘme de l'Ă©difice fut rĂ©visĂ©e Ă  la baisse par mesure d'Ă©conomie, donnant ainsi le bĂątiment que nous connaissons.

Concernant le financement du projet, il fut essentiellement alimentĂ© par les dons privĂ©s versĂ©s en local Ă  l'association catholique de Foucauld. Mais, il est Ă  noter que (contrairement Ă  la mosquĂ©e de Maison-CarrĂ©e oĂč la municipalitĂ© avait refusĂ© toute participation en 1921 au motif que la loi française interdisait l’engagement de fonds publics dans des Ă©difices de culte) la mairie ne trouva pas d’inconvĂ©nient Ă  financer partiellement la construction de l'Ă©glise, de mĂȘme qu’elle avait pris en charge les frais d’amĂ©nagement du local provisoire pour le culte catholique lorsque la dĂ©cision de fermeture de l’ancienne Ă©glise avait Ă©tĂ© prise en 1930. Les travaux furent entamĂ©s en janvier 1838 et l'Ă©glise est inaugurĂ©e, Ă  peine dix mois plus tard, par l'archevĂȘque d'Alger Mgr Laynaud, accompagnĂ© du curĂ© de la ville Repiticci et tous les notables europĂ©ens de Maison-CarrĂ©e, notamment le maire LĂ©on Tourenne.

L'Ă©difice existe encore de nos jours Ă  El-Harrach. Il servit d'abord, aprĂšs l'indĂ©pendance de l'AlgĂ©rie en 1962, comme bibliothĂšque communale puis Au dĂ©but des annĂ©es 2000 et alors que le bĂątiment de la mairie menaçait ruine, il abrita pour un moment les services de l'Ă©tat-civil d'El-Harrach avant d'ĂȘtre Ă  nouveau rĂ©amĂ©nagĂ©e en bibliothĂšque lorsque l'hĂŽtel-de-ville fut restaurĂ© et qu'il reprit ses anciennes fonctions.

Photographie (v.1939) de la façade Est de l'Ă©glise du SacrĂ©-CƓur de Maison-CarrĂ©e, peu aprĂšs sa construction.

1939

(15 juillet) - Tenue à Maison-Carrée du congrÚs constitutif de la Fédération Nationale des Scouts Musulmans Algériens.

L’évĂ©nement, qui eut lieu exactement dans le quartier du Lido (act. citĂ© 225 logements Ă  Mohamadia), fut organisĂ© par l'Ă©nergique Mohamed Bourass, jeune militant du mouvement national algĂ©rien, fondateur du premier groupe de scouts algĂ©riens (en 1936) et un des dirigeants de l'USMMC. Bourass Ă©tait aussi proche des milieux rĂ©formistes de l' Association des UlĂ©mas Musulmans AlgĂ©riens qui parraina cette initiative et dont le fondateur, cheikh Abdelhamid Benbadis (qui Ă©tait un ami personnel de Bourass), prĂ©sida lui-mĂȘme ce premier congrĂšs des SMA.

(4 aoĂ»t) - Messali Hadj est Ă  nouveau arrĂȘtĂ© par les autoritĂ©s coloniales, et rejoint 41 des cadres du PPA (dont Zakaria, Lahouel, Marouf, Belamine, Khider et Douar) Ă  la prison de l'Harrach qui devient, de fait, le centre directeur du parti. L'Ă©lite du nationalisme algĂ©rien demeura ainsi Ă  Maison-CarrĂ©e jusqu'au , date Ă  laquelle la plupart d'entre eux seront condamnĂ©s par un tribunal militaire et transfĂ©rĂ©s vers le bagne de LambĂšse pour d'y purger des peines de travaux forcĂ©s. Parmi eux, on pouvait compter Mokrane Bourmache (dit Ouazzani), ancien chef de la section PPA de Maison-CarrĂ©e ainsi que celui qui Ă©tait en fonction depuis 1938, Ali Bennanoune.

1940

(20 février) - Se plaignant de grandes dissensions qui déchiraient le Conseil municipal de Maison-Carrée, Léon Tourenne démissionne de son poste de maire.

L'intĂ©rim devait en principe ĂȘtre assumĂ© par son 1er adjoint, NoĂ© Bernad, mais celui-ci Ă©tait dĂ©jĂ  mobilisĂ© pour la guerre et les passations durent se faire directement avec Vincent Pons, le 2e adjoint [301].

(26 avril) - Le Conseil municipal de la ville d'Alger décide de l'acquisition d'une grande propriété de 120 hectares, dite "Domaine El-Alia" (situé alors à l'extrémité orientale de la commune de Maison-Carrée) en vue de l'aménagement d'un nouveau cimetiÚre. De son cÎté, le conseil municipal de Maison-Carrée votera son accord pour ce projet en décembre et ce fut effectivement réalisé au cours de l'année 1940.

Le cimetiÚre, qui fut dÚs sa fondation la plus grande nécropole d'Algérie, existe encore de nos jours sous le nom de "CimetiÚre d'El-Alia". En plus de milliers de gens du commun, musulmans et non-musulmans, le site abrite les sépultures de tous les chefs d'Etat algériens depuis l'indépendance, ainsi que tous les leaders de la guerre de 1954-1962 et les personnalités illustres de la nation (notamment l'Emir Abdelkader) dans ce qui est appelé le "Carré des Martyrs".

(26 avril) - La presse locale[302] rapporte : "Depuis quelques jours, M. S. propriĂ©taire aux Quatre-Chemins (commune de Maison-CarrĂ©e), constatait que chaque nuit des inconnus dĂ©robaient des pommes de terre dans ses champs. [...] et dĂ©cida donc de sur- veiller lui-mĂȘme son champ en compagnie de son fils. Dans la nuit de mercredi Ă  jeudi, vers 2h du matin, M. S. et son fils, aperçurent quatre ou cinq indigĂšnes occupĂ©s Ă  arracher des pommes de terre qu ils mettaient dans un sac. M. S. et son fils tirĂšrent. Un des indigĂšnes tomba et resta sur le terrain tuĂ© net. Un autre dut ĂȘtre griĂšvement blessĂ© car on trouva sur le soi de larges taches de sang. M. Mandeville, juge d'instruction de la 5e Chambre, entendit M. S. et son fils qui ne seront pas inquiĂ©tĂ©s. La police recherche activement les autres voleurs".

1941

(25 janvier) - Une grave mutinerie éclate à Maison-Carrée.

Il s'agit de la rĂ©volte de quelque 800 soldats algĂ©riens dont l'unitĂ©, l'ancien 5e RTA dissoute en 1940, se trouvait sur le point d'ĂȘtre envoyĂ©e en Syrie par affectation au nouveau RĂ©giment de Marche du Levant (RML). Or, la situation au sein de la caserne de Belfort Ă©tait dĂ©jĂ  trĂšs tendue Ă  l'Ă©poque, du fait que les soldats musulmans Ă©taient brimĂ©s par les officiers français qui, non contents de leur imposer une discipline plus stricte que celle en vigueur dans les rĂ©giments français, leur imposaient en plus des mesures vexatoires et les empĂȘchaient notamment d'observer les rĂšgles du Ramadan[303]. On Ă©voqua par la suite la duretĂ© du colonel du rĂ©giment qui, pensant devoir amĂ©liorer une troupe de mĂ©diocre qualitĂ©, avait soumis les hommes Ă  de longues marches et des exercices rĂ©pĂ©titifs et froissa dĂ©libĂ©rĂ©ment leur susceptibilitĂ© de musulmans en organisant, le vendredi, des sĂ©ances d'entraĂźnement particuliĂšrement rigoureux. Les autoritĂ©s coloniales affirmeront plus tard qu'il se trouvait parmi les mutins des hommes faits prisonniers par les Allemands en 1940 et retournĂ©s par la propagande nazie, tandis que certains soldats croyaient carrĂ©ment que leur action coĂŻnciderait avec une action germano-espagnole destinĂ©e Ă  mettre fin Ă  la domination française en AlgĂ©rie.

Quoi qu'il en soit, la colĂšre qui couvait dans le camp finit par exploser peu aprĂšs l'annonce du dĂ©part vers le Levant, les esprits ayant Ă©tĂ© particuliĂšrement attisĂ©s par le refus de toutes les permissions et visites familiales alors que, comme l'indiquera par la suite une enquĂȘte interne, le taux d'absentĂ©isme chez les officiers français de l'unitĂ© Ă©tait indĂ©cent. Autre Ă©lĂ©ment en cause, la situation politique algĂ©rienne qui Ă©tait en effervescence Ă  cette Ă©poque, ce qui se manifestait de maniĂšre particuliĂšrement palpable dans les villes et quartiers algĂ©rois Ă  forte concentration musulmane comme c'Ă©tait le cas Ă  Maison-CarrĂ©e : « Dans cette banlieue d’Alger, le PPA Ă©tait solidement implantĂ© et l’incarcĂ©ration de Messali Hadj et d’une dizaine de cadres du parti, avait renforcĂ© le climat d’hostilitĂ© des AlgĂ©riens envers les autoritĂ©s. Dans une mosquĂ©e de Maison-CarrĂ©e et dans plusieurs cafĂ©s maures, le PPA avait tenu des rĂ©unions avec des militaires. Le , Ă  l’annonce d’un prochain dĂ©part de 800 tirailleurs du RML au Levant, la mutinerie Ă©clate Ă  l’heure du couvre-feu. Les insurgĂ©s massacrent le capitaine et une dizaine de sous-officiers mĂ©tropolitains, pillent le magasin d’armes installĂ© dans le vieux bordj turc, se rĂ©pandent en ville et tirent sur des passants en faisant une dizaine de tuĂ©s et des blessĂ©s. Le prĂ©fet PagĂšs, ancien officier de la LĂ©gion Ă©trangĂšre et les autoritĂ©s militaires rĂ©agiront aussitĂŽt. La plupart des mutins encerclĂ©s regagneront la caserne, mais d’autres prirent le maquis. Ils seront tous apprĂ©hendĂ©s quinze jours plus tard et les meneurs seront fusillĂ©s. Bien que les mutins n’aient pas cherchĂ© Ă  attaquer la prison et Ă  libĂ©rer Messali qui avait recommandĂ© le calme, l’administration Ă©tablit un rapport entre la propagande antimilitariste du PPA et la mutinerie. L’affaire Ă©tait d’autant plus grave qu’aprĂšs la dĂ©faite militaire, le prestige de la France Ă©tait au plus bas en Orient [
] »[304]. Le soulĂšvement fut une totale surprise, et il le fut plus encore par la violence qui le caractĂ©risa : une fois l'armurerie forcĂ©e et les officiers tuĂ©s, une partie des mutins se seraient dirigĂ©s vers le centre-ville, en contrebas du quartier de Belfort, abattant les EuropĂ©ens croisĂ©s en chemin et proclamant le djihad contre la France, tandis que d'autres encerclaient quelque 200 personnes dans une salle de cinĂ©ma proche. En tout, prĂšs de 23 civils europĂ©ens seront tuĂ©s dans l'affaire et de nombreux autres blessĂ©s, avant que la mutinerie ne soit matĂ©e par le 5e RĂ©giment de Chasseurs d'Afrique, la gendarmerie, la garde mobile et la police. AprĂšs la mort ou la capture de tous les mutins, neuf soldats considĂ©rĂ©s comme meneurs furent : « exĂ©cutĂ©s en grande cĂ©rĂ©monie devant les garnisons rassemblĂ©s d'Alger, Hussein-Dey et Maison-CarrĂ©e, le 5e RTA dĂ©sarmĂ© placĂ© au premier rang vingt-trois autres sont exĂ©cutĂ©s plus tard [...] au total deux cents Ă  trois cents hommes seront tuĂ©s au cours de la rĂ©pression »[305].

Dans les jours et les semaines qui suivent l’évĂ©nement, la nouvelle de ce qui deviendra la fameuse "Mutinerie de Maison-CarrĂ©e" va se rĂ©pandre comme une trainĂ©e de poudre Ă  travers le pays, notamment dans les villages de la Mitidja oĂč un vent de panique souffla sĂ©rieusement parmi les colons europĂ©ens qui se mirent Ă  s'armer Ă  une assez grande Ă©chelle par crainte d'un soulĂšvement gĂ©nĂ©ral des populations musulmanes. L'apprĂ©hension n'Ă©tait pas moindre chez les autoritĂ©s et on voit ainsi Pierre Ordioni, directeur du cabinet du PrĂ©fet d'Alger et un des principaux meneurs des opĂ©rations de chasse contre les mutins, insister sur le fait que les soldats exĂ©cutĂ©s " ont levĂ© leur index de la main droite vers le ciel "[306] et affirme y voir la marque du PPA et du nationalisme algĂ©rien. Bien que les mutins, manifestement sans commandement ni plan ou objectifs prĂ©cis, n'aient pas tentĂ© d'attaquer la prison de Maison-CarrĂ©e -qui se trouve Ă  quelques centaines de mĂštres de la caserne- oĂč Ă©tait emprisonnĂ© Messali Hadj et les autres cadres du PPA, l'ombre de la rĂ©bellion ne manqua pas de planer sur le procĂšs du leader nationaliste qui s'ouvrira deux mois plus tard, en mars 1941. En somme, il s'agit d'un Ă©vĂ©nement marquant pour les gens de l'Ă©poque et qui prĂ©figure directement les Ă©vĂ©nements tragiques de et de la guerre d'AlgĂ©rie qui Ă©clatera en 1954.

(17 avril) - Une certaine "Zarah bent Khalouk, chanteuse ambulante, demeurant à Maison-Carrée" est condamnée à trois mois de prison par le tribunal correctionnel d'Alger, pour "propos défaitistes" (sic)[307]

- Le RCMC accĂšde Ă  la finale de la Coupe d'Alger de football.

(25 avril) - Vincent Pons, conseiller municipal à Maison-Carrée depuis 1919, conseiller général de la circonscription depuis 1937 et maire par intérim depuis deux mois, décÚde subitement d'une crise cardiaque alors qu'il était à peine ùgé de 46 ans[308].

Passé la surprise, le conseil municipal tùcha de suivre l'ordre de succession réglementaire et ce fut donc à Charles Ratto, 3e adjoint au maire, de prendre la succession[309].

(30 avril) - À peine dĂ©signĂ© comme maire par intĂ©rim de Maison-CarrĂ©e, Charles Ratto reçoit son ordre de mobilisation pour la guerre. Or, la liste des adjoints Ă©lus se voyait Ă©puisĂ©e avec lui et le Conseil municipal fut alors conviĂ© par le prĂ©fet d'Alger Ă  se rĂ©unir en ce jour afin de dĂ©signer, par vote, l'un des membres restants pour assurer la fonction. Ca sera alors le conseiller Zennati, ancien cadre du fisc local, ancien juge de paix et doyen d'Ăąge du conseil, qui fut Ă©lu[310].

(27 mai) - ArrĂȘtĂ© puis condamnĂ© Ă  mort pour collaboration avec les Allemands, le nationaliste algĂ©rien Mohamed Bourass est exĂ©cutĂ© en ce jour par les autoritĂ©s coloniales françaises, sur le champ de tir du Carroubier Ă  Maison-CarrĂ©e.

(7 juin) - Charles Gaubert, préfet honoraire et inspecteur général de l'administration, est nommé maire de Maison-Carrée par le Gouverneur général d'Algérie.

1942-1954 : 12e ville d'Algérie

1942

(28 fĂ©vrier) - À la suite du dĂ©cĂšs le 28/01/1942 de l'entrepreneur GaĂ«tan Corrao, 2e adjoint au maire Favier de Maison-CarrĂ©e, un arrĂȘtĂ© du Gouverneur gĂ©nĂ©ral d'AlgĂ©rie nomme en ce jour ses collĂšgues au conseil municipal, Thomas MoralĂšs et le commandant Paul Valabella qui Ă©tait aussi le chef de la LFC locale, respectivement comme 2e et 3e adjoints au maire.

1943

(4 juillet) - L’explosion accidentelle d'un train de munitions dans la gare de Maison-CarrĂ©e provoque la destruction d'une partie du quartier dit Ă  l'Ă©poque « de la Gare PLM ». On compte 543 appartements dĂ©truits et pas moins de 105 immeubles endommagĂ©s par la violente dĂ©flagration. Mais, hormis les pertes humaines enregistrĂ©es, cette catastrophe vint surtout aggraver une crise de logement qui Ă©tait dĂ©jĂ  trĂšs aiguĂ« parmi la population de la rive gauche de la ville.

(Août ?) - Dans le sillage des changements opérés dans le régime politique et dans l'administration français aprÚs la défaite devant les Allemands, une commission spéciale est désignée par le régime de Vichy pour administrer la ville et la commune de Maison-Carrée. On compte Raoul Zévaco parmi ses membres.

1944

(1er mars) - DécÚs à l'ùge de 83 ans de Léon Tourenne. Ancien commandant des sapeurs-pompiers de Maison-Carrée ensuite longtemps secrétaire général de la mairie, il fut plusieurs fois maire de la commune depuis sa premiÚre élection en 1920 jusqu'à sa démission en juin 1941.

(9 septembre) - DécÚs de Jacques Duroux. Un des plus grands industriels d'Algérie en son temps et probablement détenteur de la premiÚre fortune du pays dont héritera essentiellement son fils Jean. L'ancien sénateur était alité depuis 1941 des suites d'une attaque cardiaque alors qu'il s'était retiré de la vie politique en avril 1938 aprÚs l'échec du gouvernement de Front populaire en France dont il fut un fervent supporter. Il est inhumé dans un caveau familial dans le cimetiÚre européen de Maison-Carrée.

1945

1946

1947

1948

1949

1950

(27 août) - Pour protester contre la décision de la municipalité de rétablir le poste de "caïd" à Maison-Carrée, et ce malgré le refus des élus musulmans, la section locale du MTLD appelle la population musulmane à un meeting politique en ce jour.

Tenue dans une salle des fĂȘtes de la ville, la manifestation est prĂ©sidĂ©e par MedjaĂŻ, conseiller municipal MTLD, et animĂ©e par Omar Khaled, adjoint-au-maire de Maison-CarrĂ©e et le dĂ©putĂ© MTLD Ahmed MĂ©zerna. Ces Ă©lus du "2e CollĂšge" se succĂ©dĂšrent ainsi devant la foule nombreuse pour dĂ©noncer la mainmise des EuropĂ©ens sur tous les leviers du pouvoir local et leur refus de considĂ©rer les demandes des Ă©lus musulmans, tout en stigmatisant cette dĂ©cision de rĂ©tablissement du post de caĂŻd, la jugeant anachronique et humiliante pour la population musulmane [311].

- Dans le but de résorber les bidonvilles qui, occupés exclusivement par la population musulmane défavorisée, ne cessaient de se développer dans la périphérie algéroise, les autorités coloniales décident de la création d'un certain nombre de « cités d'urgence ».

La premiÚre de ces cités, avec 700 logements, sera justement établie à Maison-Carrée. Conçue par les architectes français Fayette et Magrou, l'idée du projet était de d'offrir constructions horizontales centrées sur un patio afin, pensait-on, de mieux coller au mode de vie des populations algériennes[312].

1951

(16 mars) - De nouveaux locaux de la gare des CFRA sont inaugurés à Maison-Carrée[313].

1952

1953

- PrĂšs d'un siĂšcle aprĂšs son implantation, le marchĂ© aux bestiaux qui se tenait derriĂšre la mairie de Maison-CarrĂ©e est dĂ©finitivement fermĂ© et dĂ©mĂ©nagĂ© par les autoritĂ©s municipales vers un nouvel emplacement situĂ© Ă  la sortie Sud de la ville Ă  cette Ă©poque, prĂšs du quartier Sainte-Corine sur la rive gauche, lĂ  oĂč se trouvent encore de nos jours ce qui est communĂ©ment appelĂ© el-KouĂąra ("Les Écuries") d'El-Harrach.

Pour ce qui est de l'ancien site du marché, on y entama immédiatement la construction d'une grande cité HLM qui prendra le nom de Cours de France (act. Cours Aïssat Idir), suivie quelqus années plus tard d'un nouveau commissariat de police et d'un parc des sports, donnant ainsi au centre-ville d'El-Harrach la configuration qu nous lui connaissons aujourd'hui.

- Abdelkader Azzouz, jeune boxeur de l'USMMC est sacré champion de France amateur pour la saison 1952/1953.

1954

- L'avocat Amar Bentoumi, un ancien militant du PPA, se présente pour les élections dans la circonscription de Maison-Carrée au nom de l'UDMA. Toutefois, les élections ayant été truquées par les autorités coloniales, c'est un candidat « administratif » qui sera finalement élu.

1954-1962 : une banlieue d'Alger en guerre

1954

(1er novembre) - Déclenchement par le FLN de la Guerre de libération nationale algérienne en organisant divers attentats à travers le pays. On ne note toutefois aucune opération à Maison-Carrée ou dans sa région cette nuit-là.

A cette date, la population de Maison-CarrĂ©e se chiffre Ă  51 017 habitants, le nombre des AlgĂ©riens (36 280 hab.) Ă©tant dĂ©sormais Ă  plus du double de celui des EuropĂ©ens (14 737 hab.). À noter, toutefois, que le rĂ©sultat de ce recensement concerne l’ensemble de l’arrondissement et il est prĂ©cisĂ© que le total en question se partage entre une population agglomĂ©rĂ©e de l’ordre de 39 951 habitants et une population Ă©parse de 11 066 habitants et Ă  tout cela s’ajoutent 4 127 personnes au titre d’habitants non sĂ©dentaires (Ă©tudiants internes, militaires, etc.).

1955

- Dans l'espoir de rallier les populations algĂ©riennes en amĂ©liorant leurs conditions de vie, l'administration coloniale procĂšde Ă  la construction d'un ensemble d'habitations Ă  caractĂšre social Ă  Alger, et notamment les 300 logements de Maison-CarrĂ©e dits « de premiĂšre urgence », suivant les plans de l'architecte Roland Simounet. Comme leur nom l'indique, ces citĂ©s Ă©taient prĂ©vues dans les annĂ©es 1950 comme solution provisoire censĂ©e Ă©radiquer les bidonvilles en attendant des solutions dĂ©finitives, et elles furent donc conçues pour une dĂ©molition rapide et facile. Or, situĂ© prĂšs de Djenane Mabrouk dans la commune de Bourouba, ce quartier existe encore de nos jours Ă  El-Harrach sous le nom de CitĂ© d'Urgence.

1956

(avril) - Lancement des travaux de dĂ©doublement de la RN5 et de la Route MoutonniĂšre oĂč le trafic routier Ă©tait passĂ© de 2.700 vĂ©hicules en 1939 Ă  12.000 en 1952, pour atteindre plus de 22.000 en 1957.

Confiés à l'entreprise Laurent, ces travaux incluront l'élargissement du pont de l'Harrach entre le Carroubier et Lavigerie, ainsi que le réaménagement de ce qui était appelé à l'époque carrefour Polignac.

(28 avril) - Dans le cadre d'un plan d'escalade de la guerre contre la présence française en Algérie, les réseaux du FLN-ALN mÚnent une série de neuf attentats à travers l'agglomération algéroise, dont un à Maison-Carrée[314]. Cette flambée de violence dans la capitale se poursuivra durant les semaines et mois à venir et conduira les autorités coloniales à organiser une politique de répression sans équivalent, notamment aprÚs la remise des pleins pouvoirs à l'armée française qui marque le début de la Bataille d'Alger.

(20 aoĂ»t) - À la suite d'une grande rĂ©union des chefs du FLN-ALN (congrĂšs de la Soummam), on procĂšde Ă  la rĂ©organisation du territoire avec la constitution d'une Zone Autonome d'Alger (ZAA) indĂ©pendante des wilayas IV (AlgĂ©rois) et III (Kabylie) sous le commandement militaire de Larbi Ben-Mhidi, et dont dĂ©pendra Maison-CarrĂ©e et sa rĂ©gion.

- Le FLN-ALN proclame une interdiction aux sportifs algériens de participer aux compétitions officielles françaises.

À l'instar des autres clubs musulmans du pays, l'USMMC annonce Ă  ce moment son retrait du championnat et le boycott de toutes les Ă©preuves compĂ©titions pour se conformer au mot d'ordre. Par ailleurs, certains de joueurs, comme Lahcene Mohamed Zeghnoun, et mĂȘme le prĂ©sident en exercice du club, Abdallah Benamar, vont carrĂ©ment rejoindre le maquis, suivis peu aprĂšs par le sportif Boualem Kaouadji et le boxeur Khelif Tenah. Tous vont tomber les armes Ă  la main dans les rangs de l'ALN au cours des annĂ©es qui suivent.

Pour sa part, l'USMMC ne reprendra sa place dans le championnat d'Algérie qu'aprÚs l'indépendance du pays en 1962.

- Inauguration des 2 000 logements de la citĂ© La Montagne, selon des plans Ă©tablis par l'architecte Roland Simounet.

(26 septembre) - Rachid Kourifa, responsable du secteur de Maison-CarrĂ©e au sein de la Zone Autonome d'Alger du FLN-ALN, est tuĂ© par une patrouille de l'armĂ©e française qu'il aurait croisĂ©e par hasard, juste aprĂšs avoir lui-mĂȘme exĂ©cutĂ© un certain Zinet, jugĂ© collaborateur avec l'ennemi par l'organisation. Premier harrachi tombĂ© les armes Ă  la main dans la Guerre de LibĂ©ration algĂ©rienne, ses funĂ©railles donnĂšrent lieu, quelques jours plus tard, Ă  un grand rassemblement populaire et furent marquĂ©es par un discours nationaliste du cheikh Rabie Bouchama, membre de l'Association des UlĂ©mas AlgĂ©riens et lui-mĂȘme habitant de Maison-CarrĂ©e oĂč il militait clandestinement dans les rangs du FLN. Cette manifestation populaire improvisĂ©e, qui fut d'ailleurs trĂšs scrutĂ©e par les services de police français, ne manqua pas de choquer la population europĂ©enne car ce fut la toute premiĂšre fois que la population musulmane, importante Ă  Maison-CarrĂ©e, exprimait ouvertement et publiquement sa sympathie pour la cause du nationalisme algĂ©rien.

(12 novembre) - Une bombe artisanale explose dans le Monoprix de Maison-Carrée et laisse neuf blessés graves[315].

1957

(28 janvier) - Début de la grÚve insurrectionnelle de huit jours ordonnée par le FLN à Alger. TrÚs largement suivie dans les quartiers musulmans de Maison-Carrée, l'opération aurait été coordonnée localement par Rabah Terki, professeur au lycée de la ville et militant nationaliste.

(3 mars) - A 23h, Larbi Ben-M'hidi, chef du FLN-ALN à Alger, est transféré à la prison de Maison-Carrée aprÚs son arrestation par les autorités coloniales.

(5 mars) - Arrestation de Nelly Forget, assistante sociale à Maison-Carrée et militante du FLN. Elle sera mise au secret et torturée dans la Villa Sésini à Alger[316]. Accusée d'abord de distribution de tracts pour le compte des insurgés, on lui reprocha surtout d'avoir aidé un autre Européen pro FLN à organiser un attentat, mais elle sera finalement libérée faute de preuves.

- Construction de la cité les Eucalyptus dans la zone de Bachdjerrah, suivant des plans des architectes français G. Bize et J. Ducollet.

- Parmi les harrachis tombĂ©s dans les rangs du FLN-ALN au cours de cette annĂ©e, on compte Mohamed Abzar (nĂ© en 1917) dont un des fils deviendra maire d'El-Harrach aprĂšs l’indĂ©pendance et Mohamed Boukhari (nĂ© 1933).

1958

La commune de Maison-carrée est délestée d'une partie de son territoire avec la création de la commune d'Oued Smar.

(13 mai) - Les Ă©vĂ©nements s’accĂ©lĂšrent en AlgĂ©rie oĂč les chefs de l’armĂ©e française tentent de prendre le pouvoir sous le couvert d’un ComitĂ© de Salut Public, s'opposant Ă  la IVe RĂ©publique et qui est proclamĂ© en ce jour. PrĂ©sidĂ© par le gĂ©nĂ©ral Massu, le comitĂ© d’Alger comptait 45 membres dont quatre indigĂšnes avec un certain Mahmoud (ou Mohand) SaĂŻd Madani, syndicaliste et contremaĂźtre Ă  la SAPCE de Maison-CarrĂ©e. ÂgĂ© de 57 ans et pĂšre de sept enfants, l'homme affichait le plus de zĂšle pour la cause coloniale et fut invitĂ© Ă  ce titre Ă  faire un discours depuis le balcon du Gouvernement GĂ©nĂ©ral d'oĂč il proclame : « Depuis 127 ans, la France est en AlgĂ©rie. Lorsqu’elle est arrivĂ©e ici, elle y a trouvĂ© deux millions de musulmans. C’est grĂące Ă  elle, Ă  sa civilisation, Ă  ses mĂ©thodes, grĂące Ă  toutes ses rĂ©alisations que les musulmans sont aujourd’hui prĂšs de dix millions. Les États-Unis, eux, par contre, ont rapidement fait disparaitre les milliers d’hommes Peaux-Rouges qui habitaient les territoires qu’ils ont conquis, alors qu’ici la France a fait de nous des hommes dignes de ce nom ». Il sera Ă©gorgĂ© par le FLN en 1960, pendant la visite du gĂ©nĂ©ral de Gaulle en AlgĂ©rie.

(15 juillet) – La presse annonce le dĂ©mantĂšlement d'une cellule FLN Ă  Maison-CarrĂ©e et la mort d'un militant dans l'opĂ©ration.

Pendant ce temps, et alors que la Bataille d'Alger battait son plein, le général Massu inaugure le premier Centre de Formation de la Jeunesse Algérienne (CFJA), géré par la SAS, à Maison-Carrée.

(26 dĂ©cembre) – Un pompiste du quartier des Cinq-Maisons Ă  Maison-CarrĂ©e est assassinĂ© avec ses deux enfants dans son domicile Ă  RĂ©ghaĂŻa.

1959

(17 janvier 1959) - Ayant découvert ses liens avec les réseaux du FLN, les services de sécurité français procÚdent à l'arrestation, en pleine nuit, du cheikh Rabie Bouchama, directeur de l'école Ethabat (affiliée à l'Association des Ulémas) à Maison-Carrée. Il sera mis au secret puis torturé à mort.

(21 fĂ©vrier) - La commune de Maison-CarrĂ©e devient le 10e Arrondissement du Grand Alger[317]. Comptant dĂ©sormais trois subdivisions (Maison-CarrĂ©e, Oued-Smar, Baraki), cette Ă©tape est importante dans le sens oĂč Maison-CarrĂ©e cesse officiellement d'exister comme « petite ville proche d'Alger », pour devenir une zone suburbaine et banlieue Est de la ville d'Alger.

(22 fĂ©vrier) - 11 h 05, une grenade lancĂ©e dans le CafĂ© des PyrĂ©nĂ©es, situĂ© rue Alexandre (act. rue SaĂŻd Mokrani) Ă  Maison-CarrĂ©e, fait un blessĂ© europĂ©en et un algĂ©rien. À 11h20, une seconde grenade est lancĂ©e devant le bar Les AlliĂ©s Ă  la rue ZĂ©vaco (act. rue Ahmed Terkouche) en centre-ville et faisant 9 blessĂ©s tous algĂ©riens.

(7 mai) – Le cadavre d’un AlgĂ©rien Ă©gorgĂ© est retrouvĂ© sur les bords de Oued El-Harrach, non loin de la voie ferrĂ©e Alger-Constantine.

(16 juin) - 9 h 30, une grenade est lancée contre une voiture dans le quartier Sainte-Corine faisant trois blessés.

(26 juin) – 12h40, une grenade est lancĂ©e devant le cafĂ©-hĂŽtel de Provence (Ă  l’angle des rues DuperrĂ© et Chanzy de l'Ă©poque) tuant un AlgĂ©rien et blessant 12 autres ainsi qu’un EuropĂ©en.

() - Une grenade est lancĂ©e devant le bar La Gambetta Ă  Maison-CarrĂ©e (4 blessĂ©s).

() - Un obus de mortier modifié est désamorcé à Maison-Carrée. Il était programmé pour exploser à 12 h 30.

() - Un soldat français du 408e R.A.A est porté disparu à Maison-Carrée.

() - 19 h 55, une grenade est lancée devant le bar Continental à Maison-Carrée, mais sans faire de victimes.

() - 19 h 05, une grenade est lancée devant le Café de la Correspondance à Maison-Carrée (rue Aristide Briand de l'époque), tuant une personne et en blessant 10 autres, tous des Algériens selon la presse.

() - 1 h 05, un certain Meftah Tiguer est égorgé chez lui à la Cité Grigori (Houch-Adda) de Maison-Carrée.

() - 20 h 50, une grenade est lancée devant le café Le Coq Hardi dans le quartier de Belfort (rue Arago), sans faire de victimes.

() - 12 h 40, une grenade est lancée devant le Bar du Commerce à Maison-Carrée : un Algérien est tué, 5 autres et 4 Européens sont blessés.

() - Lancement des travaux de construction d'une usine de montage de voitures Renault à Maison-Carrée.

Les premiers véhicules seront produits en 1960, et l'usine -qui bénéficiait au départ d'un monopole officiel pour l'Algérie- poursuivra son activité aprÚs l'indépendance. Toutefois, la politique économique du gouvernement ayant commencé à changer aprÚs 1965, les relations avec Renault ne cesseront de se détériorer, jusqu'à son retrait définitif de l'usine de Maison-Carrée en 1971.

() - 19 h 50, une grenade est lancĂ©e devant le Bar Bellevue dans le quartier du mĂȘme nom Ă  Maison-CarrĂ©e : 1 AlgĂ©rien est tuĂ©, un autre et 2 EuropĂ©ens sont blessĂ©s.

- Début de construction de l'usine Simca dans la zone industrielle de Maison-Carrée.

- L'année vit la mort au combat d'un certain nombre de harrachis engagés dans les rangs du FLN-ALN. Les plus connus étaient Boualem Ghaboub (37 ans), Abderrahmane Zeghnoun (30 ans) et Mouloud Kourifa (37 ans), ce dernier étant le frÚre ou le cousin de Rachid Kourifa.

1960

() - Déposée par la militante FLN Zohra Amrane (dite Malika), une bombe artisanale explose dans la gare de Maison-Carrée en faisant plusieurs blessés et des dégùts importants.

() – Inauguration par AndrĂ© Jacomet, SG de l'Administration coloniale en AlgĂ©rie, des 450 logements de la citĂ© ARM.-AF. de Maison-CarrĂ©e. La citĂ© existe encore de nos jours.

() - À 19 h 50, une grenade est lancĂ©e devant le CafĂ© de la Correspondance Ă  Maison-CarrĂ©e (rue d'Alger) mais n'explose pas.

(1er juillet) - À 23 h 50, explosion d'une bombe artisanale placĂ©e sous la voiture d'un certain Dr Fleck dans le quartier de Bellevue.

() – 16 h 30, dans la seconde attaque du genre contre l'Ă©tablissement, une grenade est lancĂ©e devant bar du Coq Hardi Ă  Belfort, mais sans laisser de victimes.

() – 22 h 10, grenade lancĂ©e devant le bar Le Terminus dans la placette de Maison-CarrĂ©e sans causer de victimes.

() – 21 h 45, une grenade est lancĂ©e contre un groupe de militaires français dans la rue d’Aumale Ă  Maison-CarrĂ©e, sans laisser de victimes.

() – Une bombe artisanale explose devant le Monoprix de Maison-CarrĂ©e et blesse seize personnes.

() – Raoul ZĂ©vaco, directeur du journal Les Échos d’Alger, et son fils sont assassinĂ©s dans leur rĂ©sidence secondaire au Chenoua prĂšs de Tipaza.

() – 16 h 30, le colon Pierre Nouvion est assassinĂ© dans sa ferme Ă  km de Maison-CarrĂ©e.

() – 17 h 0, une grenade est lancĂ©e devant le cafĂ© L’Alliance de l’avenue Georges-Clemenceau Ă  Maison-CarrĂ©e causant des dĂ©gĂąts matĂ©riels.

() – Le FLN ordonne de grandes manifestations dans tous les quartiers algĂ©rois Ă  majoritĂ© musulmane. Dans la rĂ©gion d'El-Harrach, le mot d'ordre est largement suivi et les Ă©vĂ©nements se dĂ©roulĂšrent comme il suit : « [...] dans le quartier La GlaciĂšre, une manifestation commence vers 11 h 30. Un jeune escalade un poteau et y accroche un drapeau algĂ©rien. Il est abattu par les militaires. On saura plus tard qu’il s’agissait du chahid ChĂ©rif Bouarioua ChĂ©rif, ĂągĂ© de 18 ans. Vers 12 h des manifestants venant de LĂ©veilley et de l’Oued-Ouchayah descendent le chemin des oliviers. Des femmes sont en tĂȘte du cortĂšge, brandissant des drapeaux. Les militaires interviennent. À Haouch Adda, entre Hussein-Dey et Maison-CarrĂ©e, Ă  15 h, les manifestants descendent de la CitĂ© Évolutive, des quartiers des Eucalyptus et PLM. On envoie les chars de la caserne toute proche pour les arrĂȘter. À Maison-CarrĂ©e vers 15 h dĂ©bouchent sur la place des camions bondĂ©s d’AlgĂ©riens brandissant des drapeaux. Ils se regroupent et tentent de marcher vers Belfort. Ils brandissent des banderoles : « Vive le FLN », « AlgĂ©rie algĂ©rienne ». Ils sont arrĂȘtĂ©s par les soldats sortis de la caserne. Les chars arrivent et tirent dans la foule. Les manifestants refluent vers le quartier PLM qui est investi par les blindĂ©s vers 16 h 30. Les tirs s’arrĂȘtent aprĂšs 17 h 30 »[318]. La presse française de mĂ©tropole[319] reprendra l'incident qui a coĂ»tĂ© la vie au jeune Bouarioua avec quelques dĂ©tails : « [...] vers 11 h 30, un homme monte sur un poteau pour y accrocher un drapeau algĂ©rien. SommĂ© par des militaires français de descendre, il refusa et fut immĂ©diatement abattu. Son corps fut alors enrobĂ© dans le drapeau vers-blanc-rouge et exposĂ© sur le parechoc d'un camion militaire Ă  travers tout le quartier musulman ».

Photographie (1960) coloriĂ©e d'une partie de la ville de Maison-CarrĂ©e. On y voit l'Ă©cole maternelle (act. École primaire Abdelhamid Tata) au premier plan Ă  droite de l'image et, au fond en haut, l'Ă©glise du SacrĂ©-CƓur.

(21 dĂ©cembre) – Les autoritĂ©s militaires instaurent le couvre-feu de 0 h Ă  5 h dans tout Alger, sauf dans le 10e arrondissement oĂč il est fixĂ© de 21 h Ă  5 h.

1961

- Le prĂȘtre catholique Jean Scotto, grand sympathisant du FLN et de la cause algĂ©rienne, est nommĂ© Ă  la tĂȘte de la paroisse de Maison-CarrĂ©e. Il y restera en poste jusqu'au dĂ©but 1963, et c'est dans la commune d'El-Harrach qu'il prendra officiellement sa nationalitĂ© algĂ©rienne Ă  l'indĂ©pendance.

(11 novembre) - Un groupe de quatre combattants affiliĂ© Ă  la cellule FLN-ALN de Maison-CarrĂ©e tombent dans une embuscade au Lotissement Michel (rue NoĂ«l l'Amoureux). MitraillĂ©s dans leur vĂ©hicule sans sommation par une unitĂ© de CRS français, les officiers BoudjemĂą MessaoudĂšne (dit El-Bekari) et Boualem Meghraoui y laisseront la vie tandis que le chauffeur, Mbarek Bouteldji, sera arrĂȘtĂ© et torturĂ© dans la caserne du GĂ©nie Ă  Hussein-Dey avant de se voir incarcĂ©rĂ© dans la prison Barbeousse jusqu'en 1962.

(28 novembre) - Alors qu'AndrĂ© Palacio, chef de l'unitĂ© chargĂ©e de la traque du gĂ©nĂ©ral Salan au sein des services de sĂ©curitĂ© français, est gravement blessĂ© par balle dans un attentat de l'OAS Ă  Alger, son frĂšre est abattu le jour mĂȘme par un autre groupe Ă  Maison-CarrĂ©e.

(décembre) - Moïse Choukroun, notable juif et vice-président de l' Association Culturelle de Maison-Carrée est tué dans un attentat de l'OAS qui justifiera son assassinat dans un tract pour le fait d'avoir malgré l'ordre général de mobilisation, tenté de quitter le territoire algérien pour s'établir en France, l'organisation ayant interdit, sous peine de mort, tout déplacement vers la métropole.

1962

(20 janvier) - René Villard, chef de France Résurrection, est assassiné à Maison-Carrée par Philippe Le Pivain, chef de la cellule locale de l'OAS. L'homme avait rassemblé autour de lui des chrétiens, des juifs, des musulmans et des francs-maçons afin de mettre en place une solution permettant aux Pieds-Noirs de rester en Algérie et de conserver des liens avec la France. Proche du colonel Rémy, par le biais du marquis de Montpeyrous et du comte de CharbonniÚre, et de certains réseaux de la Résistance, il était en liaison avec Jacques Chaban-Delmas et Alain Peyrefitte.

(5 février) - Le Docteur Maxime Fleck, adjoint au Maire et ancien président de l'UNR, est assassiné à Maison-Carrée par trois algériens affiliés à l'OAS.

(27 fĂ©vrier) - La caserne de la Gendarmerie Mobile situĂ©e dans le quartier Bellevue Ă  Maison CarrĂ©e est attaquĂ©e au bazooka par l’OAS, causant l'explosion des stocks d’essence et de munitions qui Ă©taient entreposĂ©s.

(19 mars) - Cessez-le-feu en Algérie.

(21 avril) - L'OAS mĂšne une campagne de terreur dans l'espoir d'empĂȘcher l'indĂ©pendance algĂ©rienne. Cette journĂ©e fut particuliĂšrement sanglante Ă  Alger et sa banlieue, avec un total de 23 attentats.

À Maison-CarrĂ©e, ce fut un bombardement au mortier de la citĂ© musulmane de Diār Djemā'a. Le bilan est de deux morts et plus de 30 blessĂ©s.

(4 mai) - Un certain Henri Peny, jeune Ă©tudiant europĂ©en de 19 ans, est arrĂȘtĂ© par les gardes mobiles françaises alors qu'il peignait une inscription en faveur de l'OAS. EmmenĂ© Ă  la brigade de Maison-CarrĂ©e, il aurait Ă©tĂ© livrĂ© Ă  la Force locale et ne fut plus revu depuis.

(22 mai) - Un charnier constitué de plusieurs cadavres d'européens est retrouvé dans la zone de Haouche Adda à Maison-Carrée. Il s'agit trÚs probablement d'un groupe de personnes enlevées par les hommes de la Zone Autonome d'Alger du FLN, qui agissait sous les ordres du commandant Azzedine dans une guerre sans pitié contre l'OAS.

(23 juin) - Ramenés essentiellement de Kabylie, 259 harkis sont regroupés à Maison-Carrée avec leurs familles par les autorités militaires françaises qui les avaient mis sous la protection de la troupe, et finalement évacués vers Marseille à bord du navire La Fayette.

(3 juillet) - Référendum autodétermination et indépendance de l'Algérie.

En tout, on compte la mort de 505 harrachis pendant la guerre d'Algérie, dont au moins 156 étaient natifs de Maison-Carrée.

Depuis l'Indépendance

AprÚs l'indépendance de l'Algérie en 1962, la ville de Maison-Carrée prend officiellement le nom arabe par lequel le lieu et la localité qui s'y était constituée furent toujours appelés chez les autochtones algériens, El-Harrach.

Années 1960

1962

  • Les toutes premiĂšres rĂ©union du Gouvernement Provisoire de la RĂ©publique AlgĂ©rienne (GPRA) aprĂšs son entrĂ©e en AlgĂ©rie se tiennent dans les bĂątiments de l' École Nationale Polytechnique de Belfort, Ă  Maison-CarrĂ©e.

1963

1964

1965

1966

(1er mai - Hocine AĂŻt Ahmed, un des chefs historiques du FLN, devenu opposant et fondateur du FFS aprĂšs l'indĂ©pendance, parvient Ă  s'Ă©vader de la prison d'El-Harrach oĂč il Ă©tait dĂ©tendu depuis 1964 pour se rĂ©fugier en Suisse.

1967

1968

Les grandes entreprises et industries du pays sont nationalisĂ©es par le gouvernement algĂ©rien et, parmi elles, on comptait les usines Altairac de Maison-CarrĂ©e (le domaine agricole avait Ă©tĂ© dĂ©jĂ  nationalisĂ© en 1963). À cette date, l'Ă©tablissement -centenaire- employait prĂšs de 1 000 personnes mais la famille Altairac (ils avaient jusque-lĂ  tentĂ© de rester en AlgĂ©rie pour garder leurs biens) trouvait beaucoup de difficultĂ©s Ă  le gĂ©rer convenablement Ă  la suite du dĂ©part massif de la population europĂ©enne de la ville dont Ă©tait issu l'essentiel de l'encadrement.

1969

Années 1970

1970

  • Fondation de l' École Polytechnique d'Architecture & d'Urbanisme (EPAU) dans le quartier de Hassan Badi Ă  El-Harrach.
  • Fondation de l' École Nationale SupĂ©rieure VĂ©tĂ©rinaire (ENSV), qui porte aujourd'hui le nom de Rabie Bouchama.

1974

(19 juin) - Alors que le club Ă©voluait encore en Division RĂ©gionale (D2 du championnat algĂ©rien Ă  l'Ă©poque), l'USMMC accĂšde pour la premiĂšre fois de son histoire Ă  une finale de la Coupe d’AlgĂ©rie. Lors de cette rencontre contre le W.A Tlemcen (D1), l'Ă©quipe harrachi avait pour titulaires Selmi, Tahar, Belabed, Hamoui, Kabri, Mokore, SĂ©bia, Chenafi, Hadjeloun, Zitoun, Lahcen et Benahmed qui fut l’auteur de l'unique but du match et qui offrit le titre de la saison 73/74 Ă  l'USMMC.

1971

1972

1973

1974

1975

(27 mars) - Mise en place par le gouvernement algérien d'un Plan d'Orientation Générale de développement et d'aménagement de l'agglomération d'Alger (POG)[320]. Il s'agissait du premier plan urbain établi pour Alger depuis l'indépendance du pays, et il prévoyait le déplacement progressif du centre de gravité urbaine et la déconcentration des activités économiques depuis le centre historique (Alger-Centre) vers les communes de la périphérie Est, depuis El-Harrach jusqu'à Réghaïa. C'est dans cette optique que, dans les années et décennies qui ont suivi, seront installés de grands équipements structurants (Université des Sciences & Technologies, Centre des Expositions, etc.) et de nouvelles zones d'habitat (cités de Bab-Ezzoar, Dar-Baida, etc.) dans cette zone et c'est cette évolution qui fera définitivement d'El-Harrach une commune du noyau central d'Alger et non plus une agglomération périphérique comme elle l'était à l'époque coloniale. Considérant la topographie fort accidentée des zones à l'Ouest d'Alger, cette extension vers l'Est paraissait logique et trÚs rationnelle à la base. Elle se fera toutefois aux dépens de riches terres agricoles de la Mitidja et donc au prix d'une nette fragilisation de la vie agraire. Ce constat fut fait dÚs 1979 et l'on suspendit alors le POG jusqu'en 1983, date à laquelle un nouveau Plan Urbain de Développement d'Alger (PUD) fut élaboré avec, pour cette fois-ci, une orientation de l'extension urbaine vers le sud-ouest.

  • L'USMMC accĂšde pour la premiĂšre fois de son histoire Ă  la 1re Division du Championnat de football d'AlgĂ©rie, et il jouera dĂšs lors en D1 sans interruption jusqu'en 1999.

1976

1977

  • À la suite d'une rĂ©forme gĂ©nĂ©rale du football algĂ©rien, beaucoup de clubs du championnat algĂ©rien changent leurs dĂ©nominations, et c'est notamment le cas de l'USMMC qui devient USMH aprĂšs son parrainage par l'entreprise publique SONAREM dont il adopte par ailleurs les couleurs (jaune et noir).

1978

1979

Années 1980

1980

1981

1982

1983

1984

  • L'USMH termine la saison sportive comme vice-champion d'AlgĂ©rie. Sous la direction de Mokhtar Belabed comme entraineur, le club harrachi se classe second du Championnat de D1 en talonnant d'un seul point le G.C Mascara (menĂ© en ce temps par le grand Lakhdar Belloumi).

() - Un dĂ©cret portant sur la rĂ©organisation du dĂ©coupage administratif est promulguĂ© dans le Journal Officiel. Les nouvelles limites de la commune d'El-Harrach sont ainsi fixĂ©s: Point de dĂ©part : au nord, autopont de Oued El-Harrach avec la voie ferrĂ©e qu’on suit vers le sud jusqu’au tronçon de chemins de fer au niveau de Lakhdaria ; on traverse la RN 38 vers l’est jusqu’à l’intersection avec la rocade sud, on suit celle-ci jusqu’à Oued Smar canalisĂ© qu’on suit jusqu’à la limite de la caserne pour l’inclure jusqu’au CW 118 ; ensuite on remonte pour suivre la limite de la prison jusqu’au carrefour Belfort ; on prend vers l’est jusqu’à l’intersection de la RN 5 ; on remonte celle-ci jusqu’à l’auto pont d’El-Harrach.

Le reste de l'ancien territoire d'El-Harrach fut constitué en nouvelles communes, notamment celles de Bourouba et de Mohamadia.

1985

() - L'USMH représente l'Algérie à la Coupe arabe des clubs champions de football tenue à Baghdad et termine la compétition à la seconde position aprÚs l'équipe irakienne d'Al-Rasheed.

1985

1986

1987

() - L'USMH remporte sa deuxiÚme Coupe d'Algérie. Entrainés par Brahim Ramdani, l'USMH (titulaires : Nouri, Serim, Kerraz, Bechouche, Herabi, IfticÚne, Lounici, Benomar, E-Djezzar, Meziani et Medane) remporte la deuxiÚme Coupe d'Algérie de son Histoire, aprÚs avoir vaincu la J.S Bordj-Menaïl par un score de 1-0.

1988

1989

Années 1990 : les années de plomb

1990

1991

1992

  • L'USMH termine la saison sportive Ă  la seconde place du Championnat national de football (D1), Ă  quatre points M.C Oran qui est sacrĂ© champion avec Abdelhafid Tasfaout.

1993

() - Violent accrochage entre militaires et un groupe armé au quartier La Faïence. La bataille durera deux jours et se soldera par plusieurs morts dont un certain Belabraout, chef du groupe armé selon la presse.

(1er septembre) - Houari Yacoun, muezzin dans une des mosquĂ©es d’El Harrach est assassinĂ© par des inconnus.

(octobre) - L'USMH reprĂ©sente l'AlgĂ©rie dans la Coupe de la CAF et parvient Ă  atteindre les 1/4 de finale avant d'ĂȘtre battu par le club tanzanien du Simba S.C qui sera finaliste.

() - Mort de 9 policiers dans une embuscade Ă  El Harrach, ainsi que le greffier en chef du tribunal de Blida.

() - Une dame ĂągĂ©e de 54 ans est tuĂ©e d'une balle perdue lors d'un ratissage de l'armĂ©e Ă  la citĂ© Bomati.

() - Youcef Sebti, professeur d'agronomie Ă  l'Institut National d'Agronomie d'El-Harrach depuis 1969 et Ă©crivain, est assassinĂ© durant la nuit par un groupe armĂ© dans son appartement de fonction dans le quartier Hassan-Badi (anc. Belfort). Il s'agit d'une des premiĂšres opĂ©rations visant les intellectuels algĂ©riens aprĂšs le dĂ©clenchement des violences islamistes dans annĂ©es 1990. ParallĂšlement Ă  cela, des sources mĂ©diatiques[321] indiquent qu'au moins 1 800 personnes, forces de sĂ©curitĂ© et civils confondus, auraient Ă©tĂ© victimes de morts violentes dans la rĂ©gion d'El-Harrach depuis l'annulation du scrutin de .

1994

  • Mehdi Abbas Allalou, chef d'un petit parti politique, est victime d'une tentative d'assassinat devant chez lui[322]

1995

() - Khadija Aissa, enseignante à l'Institut National d'Agronomie d'El-Harrach, est assassinée aux alentours de son lieu de travail.

() - Ratiba Hadji, enseignante Ă  l’École Polytechnique d’Architecture et d’Urbanisme d’El-Harrach, est assassinĂ©e devant l'Ă©tablissement tandis que son Ă©poux est griĂšvement blessĂ©.

1996

() - L'avocat Mohamed Zoubeiri est enlevé à El-Harrach par des inconnus. Il sera retrouvé mort le lendemain.

() - Un groupe de 12 hommes armĂ©s, menĂ©s par un nommĂ© Sahraoui, sont tuĂ©s par les forces de sĂ©curitĂ© au cours de la nuit Ă  El Harrach.

() - Un certain Ali Zeddam ainsi que son épouse, son fils et ses deux filles sont assassinés à El-Harrach.

() - Une Ă  3 personnes sont tuĂ©es et 54 blessĂ©es dans un attentat Ă  la bombe contre un cafĂ© proche du siĂšge de la daĂŻra (sous-prĂ©fecture) d'El-Harrach.

1997

() - Un engin explose dans un minibus Ă  El-Harrach, faisant 4 morts et 18 blessĂ©s.

1998

() - Explosion d'une bombe Ă  la gare d'El-Harrach, sans laisser de victimes.

() - Une bombe artisanale explose dans le marché de Bomati à El-Harrach. Bilan : 16 morts et plus de 60 blessés.

() - L'USMH est sacrĂ© champion d'AlgĂ©rie de football pour la premiĂšre fois de son histoire. Dans un match Ă  rebondissements face Ă  l'USMA, les harrachis (titulaires : Diab, Yahia, Oueld Mata, Kasri , Kerrache, Kabri, Fekkid, Lounici (Cap.), Benaissi, Benchikha et Boutaleb) furent longtemps menĂ©s 2 buts Ă  0 et ont mĂȘme ratĂ© un penalty en premiĂšre pĂ©riode. Par la suite, Ă  compter de la 65e minute de jeu, ils rĂ©ussissent Ă  marquer 3 buts entiers alors que le club adverse rate l'Ă©galisation sur penalty en fin de partie.

1999

(octobre) - L'USMH représente l'Algérie dans la Ligue des Champions d'Afrique et parvient à atteindre le 2e Tour de la compétition avant de se faire éliminer par l'ASEC Mimosa du Nigéria.

Le vieux club se trouvait alors une pĂ©riode de crise et ses rĂ©sultats en championnat lui valent d'ĂȘtre relĂ©guĂ© en D2 Ă  la fin de la saison, et ce pour la premiĂšre fois depuis son accession en 1975. Un sursaut sera observĂ© lors de la saison suivante (2000/2001) oĂč il occupera la 3e place du classement et retrouva la D1. Mais ca ne durera pas plus d'une annĂ©e et l'USMH sera de nouveau relĂ©guĂ© en D2 Ă  partir de la saison 2001/2002 et y restera sept longues annĂ©es.

Depuis 2000

2000

Photographie (v. 2000) de lancien HÎtel-de-ville de Maison-Carrée (construit en 1887). le bùtiment abrite encore de nos jours le siÚge de l'APC (mairie) d'El-Harrach.

2002

2001

() - Un garde communal est tué et un autre blessé dans un attentat à El-Harrach.

() - Une bombe de faible intensité explose dans la matinée au marché aux puces de Bomati à d'El-Harrach, faisant 2 blessés et quelques dégùts matériels minimes.

2002

2003

2004

() - Ibrahim Errahmani Nasser, dit Abou-Hafss, imam de la mosquée El-Arbaoui de Belle-Vue à El-Harrach est assassiné en pleine rue à sa sortie de la priÚre du Dohr. TrÚs apprécié de la population, sa mort cause un grand émoi à travers toute la ville.

2005

2006

() - Crash d'un avion cargo d'Air Algérie prÚs de la ville de Piacenzia en Italie causant la mort des trois membres de l'équipage. Le commandant de bord, Mohamed Abdou ùgé de 43 ans, était un habitant de quartier de Mohammadia.

() - Une bombe artisanale explose, aux environs de 20h, devant l’enceinte de l’École militaire dans le quartier de Sidi-M'barek Ă  El-Harrach, faisant 6 blessĂ©s lĂ©gers.

2007

2008

2009

2010

2011

(1er mai) - L'USMH est finaliste de la Coupe d'Algérie pour la troisiÚme fois de son histoire. Toutefois, la jeune équipe harrachi ne parvient pas à s'imposer face à la JSK qui remporte finalement le titre avec un score de 1-0.

2012

(3 juin) - Lancement des travaux d'un grand projet d'aménagement et d'assainissement des berges de Oued El-Harrach, depuis son embouchure jusqu'à la région de Baraki en passant par la ville d'El-Harrach.

(juin) - Entrée en service du tramway d'Alger à El-Harrach.

2013

2014

2015

() - Entrée en service du métro d'Alger à El-Harrach.

Photographie (2015) de la station de métro El-Harrach-Centre.

Notes et références

  1. Article : « Hache polie de l'embouchure de l'Harrach », in Bulletin de la Société archéologique, historique & géographique du département de Constantine, édition d'octobre 1933.
  2. (es) L. Marmol, Descripción general de África, sus guerras y vicisitudes, desde la fundación del mahometismo hasta el año 1571, Tome II
  3. Ferdinand Denis, Fondation de la RĂ©gence d'Alger Volume II (1837)
  4. Société Historique Algérienne, Revue Africaine Tome XIX p. 298
  5. LĂ©on l'Africain, De l'Afrique, contenant la description de ce pays Tome I, p. 621. Trad. de Jean Temporal, 1830
  6. Hernån Cortés, le fameux conquistador du Mexique aurait compté parmi les officiers de l'expédition.
  7. La lĂ©gende locale racontera plus tard que c'est un saint homme de la ville, Ouali Dadda, qui aurait provoquĂ© la terrible tempĂȘte
  8. D. Haëdo, Topographie et Histoire générale d'Alger, Trad. Monnereau et A. Berbrugger 1870
  9. Revue Africaine no 104, mars-Avril 1874, p. 113
  10. J.-M. Peyssonnel, Relation d'un voyage sur les CĂŽtes de Barbarie, Librairie de Gide, 1838
  11. ComitĂ© du Vieil Alger, Feuillets d’El-DjazaĂŻr, 1936 Tome II p. 91
  12. Revue Africaine 1870/03, p. 206
  13. L.-A. Pichon, Alger sous la domination française, Ed. Théophile Barrois & Benjamin Duprat, 1833
  14. Journal Le Globe, Ă©dition du 09/08/1831.
  15. Alger sous la domination française, p. 132-133
  16. E. Pellissier, Annales AlgĂ©riennes, Éd. Anselin & Gaultier, 1836, Tome II p. 30. La LĂ©gion fut fondĂ©e en 1831 sous la forme de cinq bataillons rĂ©partis par nationalitĂ©. Alger reçut les premiers lĂ©gionnaires dĂšs le second trimestre de cette annĂ©e et ce sont les bataillons allemand et suisse qui furent stationnĂ©s Ă  Maison-CarrĂ©e, cet incident constituant en fait le baptĂȘme de feu pour l'ensemble de la LĂ©gion.
  17. Alger sous la domination française, p. 291
  18. À la mort du marĂ©chal Clauzel (), la propriĂ©tĂ© du haouch Ouali-Dadda passe Ă  ses hĂ©ritiers qui, Ă  leur tour, vont cĂ©der la ferme Ă  un certain M. Boisqueret de La ValliĂšre le .
  19. Journal Le Temps, Ă©ditions du 23/06 et 11/07/1832.
  20. Journal La Quotidienne
  21. Journal Le Moniteur Universel, Ă©dition du 29/06/1832).
  22. Journal La Tribune des DĂ©partements, Ă©dition du 03/07/1832.
  23. Journal du Commerce de la Ville de Lyon, Ă©dition du 08/08/1832.
  24. Journal des Débats Politiques & Littéraires, édition du 27/08/1832.
  25. Journal La Quotidienne, Ă©dition du 21/10/1832.
  26. M. Rastoul, Le général de LamoriciÚre, , p. 48.
  27. Journal Le Constitutionnel, Ă©dition du 05/06/1833
  28. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 10/02/1834.
  29. Journal La France, Ă©dition du 24/07/1839.
  30. Mis sous la direction d'un certain colonel Perrier, les travaux d'Ă©laboration d'une carte topographique de l'AlgĂ©rie commencent dĂšs 1830 par les ingĂ©nieurs gĂ©ographes du corps expĂ©ditionnaire français qui dĂ©terminent, justement vers l'embouchure de l'Harrach, une base de 5 016 m qui servira de cĂŽtĂ© de dĂ©part Ă  la premiĂšre triangulation du territoire d'Alger (Louis Figuier, L'AnnĂ©e scientifique & industrielle, 1884).
  31. Annales Algériennes, Tome II p. 122
  32. C.-A. Rozet & E.-H. Carette, Description de l'Algérie, Ed. Firmin Didot, 1856, p. 114
  33. Annales Algériennes, Tome II p. 123
  34. Le Moniteur Algérien,
  35. Journal Gazette de France, Ă©dition du 05/06/1837.
  36. L.-C. Solvet, Voyage Ă  la Rassauta, Ed. M. Olive 1838
  37. Journal Le SĂ©maphore de Marseille, Ă©dition du 27/04/1838.
  38. Journal La France, Ă©dition du 11/09/1838.
  39. Journal Le SĂ©maphore de Marseille, Ă©dition du 28/09/1838. Journal Le Drapeau Tricolore, Ă©dition du 06/10/1838.
  40. Le Moniteur Algérien du 21 septembre 1838, Alger
  41. Journal La Gazette de France, Ă©dition du 23/07/1839.
  42. Journal Le SiĂšcle, Ă©dition d 22/07/1839.
  43. Journal Le Toulonnais, 04/09/1839
  44. Journal La Gazette du Languedoc, Ă©dition d 24/09/1839.
  45. Journal Le Constitutionnel, Ă©dition du 04/12/1839.
  46. Journal La France, Ă©dition du 06/12/1839.
  47. Journal La Gazette du Languedoc, Ă©dition du 15/12/1838).
  48. Journal Le Constitutionnel, Ă©dition du 16/12/1839.
  49. Journal des débats Politiques, édition du 14/12/1839.
  50. Journal La Gazette de France, Ă©dition d 22/12/1839.
  51. Journal Le Toulonnais, Ă©dition du 18/12/1839.
  52. Journal Le Commerce, Ă©dition du 23/12/1839.
  53. Journal Le Constitutionnel, Ă©dition du 24/12/1839.
  54. Journal Le Phare, Ă©dition du 28/12/1839.
  55. Journal Le Commerce, Ă©dition du 30/12/1839.
  56. Journal Le Constitutionnel, Ă©dition du 27/12/1839.
  57. Journal Le SiĂšcle, Ă©dition du 28/12/1839.
  58. Journal L'Echo Rochelais, Ă©dition du 31/12/1838.
  59. Journal L’Éclaireur de la MĂ©diterranĂ©e, Ă©dition du 18/12/1839.
  60. Journal des DĂ©bats Politiques, Ă©dition du 26/04/1840.
  61. Journal Le SiĂšcle, Ă©dition du 11/05/1840.
  62. Journal Le SĂ©maphore de Marseille, Ă©dition du 09/04/1840.
  63. Journal La Presse, Ă©dition du 27/05/1840.
  64. G. Bugeaud, Lettre au Flissa, 21 avril 1844.
  65. Journal Le Temps, Ă©dition du 24/06/1840).
  66. Journal La Quotidienne, Ă©dition du 14/08/1840.
  67. Journal La Presse, Ă©dition du 11/08/1840.
  68. Journal Le Moniteur Universel, Ă©dition du 20/11/1840.
  69. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 16/02/1841.
  70. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 08/03/1841.
  71. Journal Le Courrier, Ă©dition du 05/04/1842.
  72. La guerre va se poursuivre jusqu'à la reddition de l'émir Abdelkader en 1847. Mais en réalité, ses forces sont progressivement amoindries dÚs 1841 et, aprÚs avoir été chassées du Titteri, il ne représentera plus une menace sérieuse sur la Mitidja.
  73. Roger German, La Politique indigĂšne de Bugeaud, p. 303
  74. L. Le Saint, Fastes de l'Algérie ancienne et moderne, , p. 77.
  75. Journal Le Commerce, Ă©dition du 08/12/1841.
  76. Journal La Pesse, Ă©dition du 20/12/1841
  77. Journal L'Hermine, Ă©dition du 20/02/1842.
  78. Journal Le Censeur de Lyon, Ă©dition du 02/04/1842.
  79. Journal l'Afrique, Ă©dition du 02/09/1844.
  80. Journal La Presse, Ă©dition du 26/06/1843.
  81. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 30/04/1844
  82. Hippolyte Dumas de Lamarche, Les Turcs et les Russes : histoire de la guerre d'Orient, p. 44
  83. Journal Le Moniteur Universel, Ă©dition du 20/11/1852.
  84. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 20/12/1846.
  85. Journal La Gazette, Ă©dition du 26/11/1855.
  86. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 10/11/1844.
  87. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 14/09/1844.
  88. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 14/11/1844.
  89. Journal L'Afrique Ă©dition du 26/06/1845.
  90. Journal L'Afrique, Ă©dition du 02/09/1845.
  91. Journal L'Afrique, Ă©dition du 16/08/1845.
  92. Journal L'Afrique, Ă©dition du 06/09/1845.
  93. Journal La Presse, Ă©dition du 18/05/1846.
  94. ournal Le Moniteur Algérien, édition du 05/11/1846
  95. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 10/04/1847.
  96. République Française, Bulletin officiel des Actes du gouvernement Vol. 15
  97. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 03/08/1883.
  98. Journal Le Constitutionnel, Ă©dition du 21/01/1852.
  99. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 25/07/1855.
  100. Selon le RĂ©pertoire GĂ©nĂ©ral du Droit français (Edition 1903) : RĂ©gime PĂ©nitentiaire, Section VI : DĂ©pĂŽts de forçats et de relĂ©guĂ©s (pages 454-455) : « le dĂ©pĂŽt de forçats et de relĂ©gables de l'Harrach, au bourg de Maison-CarrĂ©e, Ă  12 kilomĂštres Sud-Est d'Alger. L'Harrach comprend trois quartiers bien distincts : 1) le quartier correctionnel, annexe de la prison dĂ©partementale d'Alger, la Casbah ; 2) le dĂ©pĂŽt des forçats ; 3) le dĂ©pĂŽt des relĂ©gables, qui sont absolument isolĂ©s des autres dĂ©tenus. La proportion des Arabes par rapport aux EuropĂ©ens est au moins des 4/5 pour le dĂ©pĂŽt des forçats et relĂ©gables, et des 3/4 seulement pour le quartier correctionnel » .
  101. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 10/11/1855.
  102. Journal Le Moniteur Algérien, édition du 29/02/1856.
  103. Journal La Gazette de France, Ă©dition du 24/12/1856.
  104. Journal Militaire Officiel Vol. 1856 no 2 p. 534
  105. Décret impérial du 28 janvier 1857
  106. Mensuel Algérie Catholique, édition d'octobre 1936.
  107. Indicateur Général de l'Algérie, V. Bérard (1858).
  108. O. McCarthy, Description GĂ©ographique, Economique & Politique de l’AlgĂ©rie, 1858.
  109. Journal Le Moniteur Universel, Ă©dition du 04/12/1859.
  110. Journal L'Akhbar, Ă©dition du 10/01/1861.
  111. Journal L'Akhbar, Ă©dition du 09/04/1861.
  112. Recueil des Actes administratifs du Département d'Alger, année 1861.
  113. ArrĂȘtĂ© n°221 du 08/08/1861.
  114. ArrĂȘtĂ© prĂ©fectoral n°206 du 25/12/1861.
  115. ArrĂȘtĂ© prĂ©fectoral n°77 du 03/04/1862.
  116. ArrĂȘtĂ© prĂ©fectoral n°195 du 27/11/1862.
  117. Journal Le Constitutionnel, Ă©dition du 20/08/1862.
  118. Journal L'Afrique, Ă©dition du 22/12/1844.
  119. Journal La Gazette, Ă©dition du 14/08/1863.
  120. L’établissement figure sur une Carte d’Alger et ses environs, datĂ©e de 1873, sous l'intitulĂ© "Moulin Dessoliers" (http://plichet.pagesperso-orange.fr/algerie/moulin.htm).
  121. O. Teissier, Algérie, géographie, histoire, statistique, description des villes, villages et hameaux, organisation des tribus, nomenclature des khalifaliks, aghaliks et kaïdats, , p. 54.
  122. Journal Le Moniteur Universel, Ă©dition du 25/01/1865.
  123. A. Challamel, Livre d'Or de l'Algérie, 1890, p. 563
  124. Journal Le Temps, Ă©dition du 11/06/1866.
  125. Journal L'Avenir National, Ă©dition du 25/08/1866.
  126. DĂ©cret du 22/01/1867.
  127. Journal Le Moniteur Universel, Ă©dition du 08/08/1869.
  128. La production de cette plantation Ă©tait trĂšs rĂ©duite au dĂ©part et servait presque exclusivement Ă  fournir des vins de messe pour la communautĂ© monastique locale, avant s'Ă©tendre progressivement Ă  tous les couvents de la congrĂ©gation Ă  travers le monde, puis Ă  d’autres paroisses en France.
  129. MinistÚre français de l'Instruction publique & des cultes, Revue des sociétés savantes, 1877
  130. Journal Le Moniteur Universel, Ă©dition du 01/04/1869.
  131. ArrĂȘtĂ© prĂ©fectoral du 14/09/1870.
  132. ArrĂȘtĂ© prĂ©fectoral du 29/12/1870.
  133. Journal Le Gaulois, Ă©dition du 28/04/1871.
  134. ArrĂȘtĂ© du Gouverneur gĂ©nĂ©ral d'AlgĂ©rie du 24/10/1866.
  135. Décret présidentiel du 12/10/1871.
  136. Journal La Presse, Ă©dition du 23/05/1876.
  137. Journal Officiel de la République Française, édition du 30/12/1872.
  138. Journal Officiel de la République Française, édition du 04/04/1874.
  139. Journal Le Droit, Ă©dition du 04/10/1874.
  140. Journal Le Soleil, Ă©dition du 02/07/1874.
  141. Recueil des documents administratif du Département d'Alger, année 1874 document n°183 du 04/12/1874.
  142. ArrĂȘtĂ© dĂ©partemental n°114 du 19/06/1878.
  143. P. P. Dehérain, Annales agronomiques, , p. 455.
  144. Décret présidentiel n° 10571 du 19/04/1881.
  145. Receuil des Actes administratifs du Département d'Alger, année 1883
  146. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 17/08/1923.
  147. Circulaire préfectorale du 01/11/1882.
  148. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 27/10/1882.
  149. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 03/05/1883.
  150. Journal Le Petit Colon algérien, édition du 03/04/1884.
  151. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 10/04/1884.
  152. Journal Le Petit Colon algérien, édition du 27/04/1884.
  153. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 22/05/1884.
  154. Quotidien Journal Le XIXe SiĂšcle, Ă©dition du 27/07/1884.
  155. Journal Le Petit Colon, Ă©dition du 25/08/1884.
  156. ArrĂȘtĂ© prĂ©fectoral n°48 du 22/03/1885.
  157. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 06/01/1885.
  158. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 05/03/1886.
  159. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 23/01/1886.
  160. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 12/06/1885.
  161. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 10/06/1885.
  162. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 30/11/1885.
  163. Journal Le Courrier de Blida, Ă©dition du 19/04/1885.
  164. Journal Le Radical, Ă©dition du 19/04/1885
  165. La Grande Encyclopédie, Société des Savants & Gens de Lettres, Tome 22 (1885-1902)
  166. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 09/08/1886.
  167. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 31/10/1886.
  168. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 08/12/1886.
  169. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 07/12/1886.
  170. Journal Le Petit Colon Européen, édition du 07/04/1887.
  171. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 27/07/1885.
  172. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 27/06/1887.
  173. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 25/11/1887.
  174. In : Édouard Dalles, Alger, Boufarik, Blidah & leurs environs : Guide gĂ©ographique, historique et pittoresque (2e Ă©dition), 1888.
  175. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 30/04/1892.
  176. Journal Le Patriote Algérien, édition du 12/12/1888).
  177. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 27/06/1889.
  178. Journal Le Patriote Algérien, édition du 21/07/1889.
  179. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 26/12/1890.
  180. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 22/01/1893.
  181. Journal Le petit Colon Algérien, édition du 17/02/1891.
  182. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 13/04/1891.
  183. JournalLe Petit Colon Algérien, édition du 24/05/1891.
  184. Journal Le Patriote Algérien, édition du 27/05/1891.
  185. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 04/06/1891.
  186. Journal L'Indépendant de Mascara, édition du 26/11/1891.
  187. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 11/11/1891
  188. Ces concessions à la CFRA résultent des conventions signées par un certain Edmond Caze avec le Département d'Alger le 01/05/1891, et approuvées par décret du gouvernement français le 16/01/1892.
  189. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 08/09/1892.
  190. Journal Général de l'Algérie et de la Tunisie, édition du 24/11/1892.
  191. Journal Général de l'Algérie et de la Tunisie, édition du 27/11/1892.
  192. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 21/08/1889.
  193. Journal Le Petit Colon Algérien, éditions du 05/09 et 11/09/1893.
  194. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 12/10/1893.
  195. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 11/10/1893.
  196. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 02/11/1893.
  197. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 29/11/1893.
  198. Journal GĂ©nĂ©ral de l’AlgĂ©rie, Ă©dition du 11/03/1897.
  199. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 17/05/1895.
  200. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 28/10/1895.
  201. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 20/05/1896.
  202. Périodique "Bulletin Municipal de Maison-Carrée, édition du 08/01/1899.
  203. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 29/05/1896.
  204. Journal Le Petit Colon Algérien, édition du 19/06/1896.
  205. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 02/03/1921.
  206. Bulletin Municipal de la Ville d'Alger, Ă©dition du 17/06/1898
  207. Journal Les Nouvelles, Ă©dition du 11/01/1902.
  208. Idem.
  209. Journal Les Nouvelles, Ă©dition du 16/03/1902.
  210. Journal Les Nouvelles, Ă©dition du 23/01/1902.
  211. Journal Les Nouvelles, Ă©dition du 04/06/1902.
  212. Journal Les Nouvelles, Ă©dition du 09/06/1902.
  213. Journal Les Nouvelles, Ă©dition du 21/07/1902.
  214. Journal Les Nouvelles, Ă©dition du 03/10/1902.
  215. Journal La Presse, Ă©dition du 29/04/1904.
  216. Bulletin Municipal de Maison-Carrée, édition du 4 mars 1906
  217. Compte-rendu publié dans le Bulletin Municipal de Maison-Carrée
  218. Compte-rendu de la réunion pléniÚre du 20/03/1910 du CongrÚs des Maires du département d'Alger.
  219. "Les Echos d'Alger", Ă©dition du 26/03/1912
  220. "Les Echos d'Alger", Ă©dition du 21/03/1912
  221. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 31/03/1912.
  222. "Les Echos d'Alger", Ă©dition du 11/04/1912
  223. Journal Général de l'Algérie et de la Tunisie, édition du 18/03/1897.
  224. "Les Echos d'Alger", Ă©dition du 19/05/1913
  225. L'idĂ©e d'un transfert de la prison de l'Harrach vers de nouveaux bĂątiments fut discutĂ©e au sein des dĂ©lĂ©gations financiĂšres Ă  la sĂ©ance du , l'administration coloniale ayant formulĂ© ce vƓu du fait que l'occupation de l'ancien bordj de par les autoritĂ©s civiles Ă©tait faite Ă  titre gracieux et que les militaires pouvaient y mettre fin Ă  n'importe quel moment
  226. "Les Échos d'Alger", Ă©dition du 14/06/1912
  227. Journal L'Echo d'Alger, Ă©ditions du 16/06/1912 et du 30/01/1913.
  228. Journal L’Écho d'Alger, Ă©dition du 22/12/1912.
  229. Journal L'Algérie Politique & Littéraire, édition du 29/12/1912.
  230. Transféré alors à Dellys, le 5e RTA sera recréé en 1951 en Algérie comme 5e Bataillon de Tirailleurs Algériens, ensuite, le 1er novembre 1961, comme 5e Régiment de Tirailleurs. Il sera définitivement dissous en octobre 1962.
  231. DĂ©cret du 03/02/1912.
  232. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 07/05/1913.
  233. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 23/06/1913.
  234. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 30/06/1913.
  235. Journal Les Échos d'Alger, Ă©dition du 03/04/2018
  236. "Les Echos d'Alger", Ă©dition du 23/08/1913
  237. Journal L’Écho d'Alger, Ă©dition du 17/09/1913.
  238. Journal L'Echo d'Algerc, Ă©dition du 12/07/1912.
  239. Journal Les Echos d'Alger, Ă©dition du 16/12/1913
  240. Journal Les Échos d'Alger, Ă©dition du 27/11/2013
  241. Journal Les Échos d'Alger, Ă©dition du 03/12/1913
  242. Journal L’Écho d'Alger, Ă©dition du 29/04/1914.
  243. Journal L’Écho d'Alger, Ă©dition du 18/10/1914.
  244. Journal Les Echos d'Alger, Ă©dition du 31/01/1915.
  245. Journal Le Sémaphore algérien, édition du 22/06/1921
  246. Le Journal des Finances, Ă©ditions du 20/08/9121, 28/10/1921, 22/06/1923. Le Journal des chemins de fer, Ă©dition du 07/10/1922
  247. Revue générale du Froid, édition de janvier 1925.
  248. L’Écho d’Alger, Ă©dition du 13/04/1925.
  249. Décret présidentiel du 18/01/1919.
  250. Journal L’Écho d'Alger, Ă©dition du 08/05/1919.
  251. L’Écho d'Alger, Ă©dition du 20/06/2020.
  252. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 06/09/1919.
  253. Journal L'Echo d'Alger, Ă©ditions du 23 et 24/10/1919.
  254. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 11/01/1921.
  255. Journal L’Écho d'Alger, Ă©dition du 11/11/1919.
  256. Loi du 04 FĂ©vrier 1919
  257. Journal L'Evolution Algérienne & Tunisienne, édition du 05/06/1920
  258. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 31/08/1920.
  259. Du nom du propriétaire européen Jean Mazella qui, en 1924, obtient de la municipalité un contrat de deux années pour assurer la collecte des ordures et des immondices dans la ville de Maison-Carrée.
  260. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 17/09/1920.
  261. Dans une sĂ©ance tenue le 24 mars 1921, la section locale de l'Union Nationale des Anciens Combattants publie une rĂ©solution oĂč elle demande que les marchĂ©s de travaux publics soient exclusivement accordĂ©s aux Français et que le recrutement d'Ă©trangers dans les entreprises soit plafonnĂ© Ă  10 % des effectifs (L'Écho d'Alger, Ă©dition du 27/03/1921).
  262. Journal L'Echo d'Alger, Ă©ditions du 22/08/1920, 10/07/1921.
  263. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 09/03/1923
  264. Compte-rendu de la réunion ordinaire du Conseil Municipal de Maison-Carrée du 11/06/1923.
  265. Journal L'Echo d'Alger, Ă©ditions du 25 et 26/05/1923.
  266. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 26/11/1920.
  267. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 09/02/1923.
  268. ArrĂȘtĂ© ministĂ©riel du 25/06/1963
  269. Deux Kaoudji natifs de Maison-Carrée, probablement les fils de ce conseiller ou ses neveux, s'engageront plus tard dans les rangs du FLN-ALN et tomberont au cours de la Guerre de Libération algérienne, Abdellah en 1957 et Boualem, qui était joueur à l'USMMC, en mai 1962.
  270. Édition du mois de septembre 1919.
  271. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 09/11/1925.
  272. Journal Le Mutilé, édition du 02/09/1928.
  273. Le projet du gaz de ville datait de fĂ©vrier 1919, mais il ne put ĂȘtre concrĂ©tisĂ© qu'aprĂšs de nombreux retards. À noter que les deux premiers branchements mis en place fin 1926 Ă©taient ceux de l’ Institut Agricole (act. INA) et de l’ École Industrielle Coloniale (act. École Polytechnique).
  274. Les Annales coloniales, Ă©dition du .
  275. Journal Le Mercure africain, Ă©dition du 25/03/1927.
  276. ÂgĂ© de quarante et un ans en 1932, L. Ravilly sera arrĂȘtĂ© par la police Ă  Rennes en sa qualitĂ© d'administrateur de sa sociĂ©tĂ© bretonne, une plainte ayant Ă©tĂ© dĂ©posĂ©e contre lui par un actionnaire qui l'accusait de trafiquer les bilans. À cours du procĂšs, l'expertise judiciaire Ă©tablit que le bilan de 1928 des Ets. Ravilly avait Ă©tĂ© effectivement falsifiĂ©
  277. La valeur des actions seraient passées de 25 Franc à 100 lors de son introduction en bourse trois ans plus tard (Le Journal des Finances, édition du 27/09/1929 ; Le Mercure Africain, 10/10/1929)
  278. Mensuel Revue Générale du Froid, édition de janvier 1932.
  279. Bulletin Municipal de Maison-Carrée, procÚs-verbal de la séance du 17/12/1928 du Conseil municipal.
  280. Bulletin Municipal de Maison-Carrée, procÚs-verbal de la séance du 29/12/1929 du Conseil municipal.
  281. Journal L'Afrique du Nord Illustrée, édition du 05/09/1931.
  282. Journal Le Mutilé d'Algérie, édition du 10/11/1929.
  283. Journal les Echos d'Alger, Ă©dition du 23/12/1929
  284. Quotidien El-Watan, Ă©dition du 05/04/2006.
  285. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 14/01/1931.
  286. Acte notarial Ă©tabli le 18 avril 1874
  287. Ce terrain appartenait jadis Ă  un certain M. de LavalliĂšre et qui l’avait concĂ©dĂ© Ă  la commune de Maison-CarrĂ©e le 10 janvier 1866
  288. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 17/01/1931.
  289. Journal Le Mutilé Algérien, édition du 05/12/1929
  290. Journal L'Echo, Ă©ditions du 06 et 13/10/1931
  291. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 31/10/1933.
  292. Journal Le Mutilé, édition du 5 novembre 1933.
  293. Journal Le Petit Marocain, édition du 23 août 1934.
  294. Journal L'Écho d'Alger, Ă©dition du 20 mai 1935.
  295. Voulant Ă  tout prix empĂȘcher le foisonnement de clubs sportifs Ă  caractĂšre communautaire, les autoritĂ©s prĂ©fectorales diffusent une circulaire en 1930 qui oblige toutes les associations sportives musulmanes d'intĂ©grer dans leurs effectifs un quota de trois joueurs europĂ©ens puis cinq Ă  partir de 1935. L'annĂ©e suivante, une nouvelle circulaire exigea de tous les clubs sportifs de compter dans leurs structures dirigeantes des EuropĂ©ens sous peine d'ĂȘtre dissoutes.
  296. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 12/02/1936.
  297. Journal L'Echo d'Alger.
  298. Journal Officiel de la République Française, édition du 11/09/1936.
  299. Journal La Liberté, édition du 28/10/1937.
  300. Le Petit Journal, organe du PSF, Ă©dition du 07/02/1938
  301. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 21/02/1940.
  302. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 26/04/1940
  303. A.Rey-Goldzeiguer, Aux origines de la Guerre d'Algérie, p. 53.
  304. Jacques Simon, Le PPA : Parti du peuple algérien, 1937-1947
  305. Anthony Clayton, Histoire de l'Armée Française en Afrique 1830-1962
  306. P. Ordioni, Tout commence Ă  Alger, p. 144.
  307. Journal L'Écho d'Alger, Ă©dition du 17 avril 1941.
  308. Journal L'Écho d'Alger, Ă©dition du 26 avril 1941.
  309. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 01/05/1941.
  310. Journal L'Echo d'Alger, Ă©dition du 01/05/1941).
  311. Journal Algérie Libre, édition du 01/09/1950.
  312. C'est à la suite de cette premiÚre expérience à Maison-Carrée, jugée satisfaisante par les autorités, que d'autres cités du genre seront lancées à Alger en 1951-1952, notamment la cité de la CarriÚre Jaubert à Bab El Oued.
  313. Journal l'Echo d'Alger, Ă©dition du 17/03/1951.
  314. Journal Les Échos d'Alger, Ă©dition du 29 et .
  315. Journal Les Échos d'Alger, Ă©dition du 13 novembre 1956.
  316. Les Échos d'Alger, Ă©dition du . Le Figaro du
  317. DĂ©crets no 59-321 du 24/02/1959 et no 60-163 du 24/02/1960 portant sur l'organisation de la Commune d'Alger. Les conseillers municipaux dĂ©signent dĂ©sormais un maire-adjoint d’arrondissement et, Ă©ventuellement, un adjoint chargĂ© de l’état-civil
  318. Boualem Touarigt, « Manifestations du 11 décembre 1960 »', in Revue Mémoria, édition du 24/11/2012.
  319. Le Monde, Ă©dition du 19/09/1960
  320. Ordonnance 75-22 du 27 mars 1975
  321. https://www.refworld.org/docid/3ae6ab038.html
  322. PrĂ©sident d'un Parti du Peuple pour l’UnitĂ© et l’Action), l'homme survit Ă  deux balles d'arme Ă  feu et se rĂ©fugiera peu aprĂšs en Espagne d'oĂč il ne reviendra qu'en 2008.

Bibliographie

  • Francis Nolan, Les PĂšres blancs entre les deux guerres mondiales, Paris, coll. MĂ©moire d'Église, Ă©ditions Karthala, traduit de l'anglais par RaphaĂ«l Deillon Miss. Afr., 2015
  • Jean-Claude Ceillier, Histoire des missionnaires d'Afrique (PĂšres blancs). De la fondation par Mgr Lavigerie jusqu’à la mort du fondateur (1868-1892), Paris, Ă©ditions Karthala, 2008, 303 pages
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