Ahmed Bey
Ahmed Ben Mohamed ChĂ©rif, aussi connu sous le nom d'Ahmed Bey ou Hadj Ahmed Bey (en arabe : ۧÙŰۧۏ ŰŁŰÙ ŰŻ ۚۧÙ), nĂ© en 1786, Ă Constantine, et mort le , Ă Alger, est le dernier bey de Constantine dans la rĂ©gence d'Alger, de 1826 Ă 1848[1]. Il est le successeur de Mohamed Menamenni Bey ben Khan.
Ahmed Bey | |
Bey de la RĂ©gence d'Alger | |
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Biographie | |
Nom de naissance | Ahmed ben Mohamed Chérif |
Origine | algérienne |
Date de naissance | |
Lieu de naissance | Constantine |
Date de décÚs | (à 65 ans) |
Lieu de décÚs | Alger |
Titre | |
Bey de Constantine | |
â | |
Prédécesseur | Mohammed Bey Malamli |
Durant son rÚgne au Constantinois, il est connu pour avoir dirigé, avec la population locale, une résistance farouche contre l'expansion française en Algérie[2].
Sa résistance à l'occupation française a inspiré les nationalistes et révolutionnaires algériens[3].
Biographie
Origines
Ahmed est le fils de Mohamed Chérif, un Kouloughli ayant occupé de hautes fonctions dans le beylik de l'Est[4], et de El Hadja Rékia, fille de Ben Ganah[5], originaire de petite Kabylie[6].
Son grand-pĂšre paternel est le bey Ahmed El Kolli, qui rĂšgne Ă Constantine de 1756 Ă 1771[7].
DĂ©buts
Ahmed reçoit une éducation assez variée. En 1805, alors qu'il est à peine ùgé de 18 ans, Abdallah Bey lui concÚde le titre de Caïd (chef) des tribus Haraktas avec pour titre Caid el Aouassi (titre honorifique et notable), pour ses qualités de cavalier et son courage. Il a sous ses ordres, un corps de cavalerie de 300 hommes, appelés Derras, et plusieurs agents qui l'aident dans l'exercice de ses fonctions[7].
à l'assassinat de Abdallah Bey, Ahmed se démet de ses fonctions, et se retire de la province, jusque l'arrivée de Naaman Bey, qui le renomme Caid el Aouassi. Naaman, assassiné à son tour, est remplacé par Tchikar Bey, qui épouse une tante d'Ahmed. Sous ce bey, et pendant deux ans encore, Ahmed continue ses fonctions de Caid el Aouassi[7].
Il entreprend son pĂšlerinage Ă La Mecque qui dure 15 mois, il rencontre en Ăgypte plusieurs personnages cĂ©lĂšbres, notamment MĂ©hĂ©met Ali, son fils Ibrahim Pacha et Toussoun Pacha. Il apprend la mort de plusieurs membres de sa famille, et sâempresse de retourner dans sa province[8].
En 1818, grĂące Ă lâappui de Hussein Dey, il est Ă©levĂ© au grade de khalifa (officier) du bey Ahmed El Mamelouk - il conserve cette fonction Ă lâavĂšnement des beys suivants : Mohamed El Mili, et Braham El Gharbi - et l'annĂ©e suivante, il est chargĂ© de porter Ă Alger le tribut du bey[8].
Devenu un personnage important dans le Beylik, Ahmed en vient Ă gĂ©rer les affaires au lieu et place de son bey. Cela lui vaut des jalousies, et des inimitiĂ©s. MenacĂ© de mort, il quitte Constantine, pour se rĂ©fugier Ă Alger. Il est remplacĂ© dans sa fonction par Mahmoud, fils de Tchaker Bey, qui deviendra lâun de ses plus farouches ennemis. Entre 1819 et 1826, Ahmed sâinstalle Ă Alger, bĂ©nĂ©ficiant de la protection du dey Hussein[8].
Le , a lieu un tremblement de terre dans la région de Blida, la ville et sa population est totalement détruite ; sur une population de 15 000 habitants, 800 échappent au désastre[9].
Le dey l'envoie à Houna el Kadous, aux environs d'Alger, et lui donne la jouissance de l'haouch Ouled Baba. En cette période, Ahmed Bey se livre à ses passions, comme l'agriculture, la chasse et l'élevage des chevaux[9], tout en prenant part aux expéditions qui ont lieu de temps à autre contre les tribus des environs. à deux reprises, il sauva l'armée du Dey qui s'était maladroitement engagée en Kabylie, chez les Aït Menad, puis chez les Aït Djennad[9].
Ces deux actions lui concilient l'affection du dey, qui, pense à lui pour le remplacement du bey en place, Hamza, dont il est mécontent[10].
Bey de Constantine (1826-1837)
En , Ahmed est nommé bey de Constantine, puis s'installe à Dar El bey, bùtiment affecté à la résidence officielle des gouverneurs de la province[10]. Durant les premiÚres années de son gouvernement, Constantine s'embellit, et se voit agrandie de plusieurs grandes constructions, dont son palais, commencé en 1828, et terminé en 1832[11].
En , Ahmed Bey arrive Ă Alger avec le tribut annuel de sa province (lezma), et en mĂȘme temps, a lieu l'expĂ©dition d'Alger dirigĂ©e par le gĂ©nĂ©ral de Bourmont. Dans ses MĂ©moires, il indique[11] :
« En 1830, je m'Ă©tais rendu Ă Alger pour accomplir la visite obligĂ©e (desnouch) que chaque bey rendait au pacha tous les trois ans. J'Ă©tais bey de Constantine depuis quatre ans, et c'Ă©tait la deuxiĂšme fois que je m'acquittais de ce devoir. Je n'Ă©tais nullement prĂ©parĂ© Ă combattre les Français. Le Dey Hussein m'avait pourtant fait connaĂźtre leurs projets, par une dĂ©pĂȘche oĂč il me mandait en mĂȘme temps Ă n'avoir Ă m'occuper que de BĂŽne, ne me manifestant aucune inquiĂ©tude ni pour sa capitale, ni pour lui-mĂȘme. Je me prĂ©sentai donc , comme en temps ordinaire, apportant la lezma. J'avais, comme escorte, environ 400 cavaliers, plutĂŽt plus que moins. Les principaux chefs qui m'accompagnaient, Ă©taient Ouled-Mokran, Ben-Mamelaoui-Agha, le cheik des Righas, le caĂŻd Smala, El-Arbi-CaĂŻd-Ben-Achour et le cheik Bou-Ghenan. Me prĂ©sentant Ă Hussein, il me dit aussitĂŽt : "Vous n'avez que le temps de vous porter Ă la rencontre des Français , qui vont dĂ©barquer Ă Sidi-Ferruch. Je connais le point oĂč ils doivent dĂ©barquer ; je le connais, et par des lettres de leur pays , et par un Ă©crit imprimĂ© en France, que m'ont fait passer mes agents de Malte et de Gibraltar". Je sortis promptement d'Alger, et me portai sur le point oĂč l'armĂ©e s'Ă©tait rassemblĂ©e. L'on y tint un conseil, ayant pour objet les mesures Ă prendre pour la dĂ©fense du pays. Ce conseil se composait.des personnages suivants : L'agha Braham, beau-fils du dey ; le bey de Titteri, Mustapha; le khodja El-Kheid, le khalifa du bey de l'Ouest. Les confĂ©rences eurent lieu prĂšs de Sidi-Ferruch. »
Ahmed Bey, qui se trouvait sur le champ de bataille, propose Ă Hussein Dey une stratĂ©gie : laisser les troupes françaises dĂ©barquer sur les plages, et avancer Ă lâintĂ©rieur du pays, pour ensuite les prendre en tenaille entre les forces algĂ©riennes dĂ©ployĂ©es Ă lâintĂ©rieur du pays, et celles qui sâinfiltreraient Ă lâarriĂšre des soldats français, afin de couper leurs liaisons avec les bateaux de dĂ©barquement. Cette stratĂ©gie vise Ă battre les troupes françaises dĂ©barquĂ©es sans possibilitĂ© pour les bateaux dâintervenir[12]. Mais le dey dâAlger prĂ©fĂšre sâen tenir aux avis de son gendre, lâAgha Ibrahim, et combattre sur les plages lâarmĂ©e française, mieux Ă©quipĂ©e expĂ©rimentĂ©e, dâoĂč une dĂ©faire cuisante en huit jours. Il sâensuit, toujours dans ses MĂ©moires :
« Le dĂ©barquement des Français eut lieu ; et, aprĂšs qu'ils eurent ainsi triomphĂ© de notre rĂ©sistance, nous rĂ©solĂ»mes de les attendre dans la plaine de StaouĂ«li, qu'on garnit de quelques canons. Le pacha avait fait distribuer des canons Ă tous ceux qui avaient des commandements dans l'armĂ©e, ou qui, comme moi, Ă©taient venus de points Ă©loignĂ©s. Ces canons furent pris par les Français, dans le combat livrĂ© Ă StaouĂ«li. Le mien avait eu le mĂȘme sort ; mais, ayant rĂ©uni mes cavaliers, je fus assez heureux pour le reprendre. Ce ne fut cependant pas sans faire de grandes pertes, car je perdis plus de deux cents hommes. Je n'en rendis pas moins grĂące Ă Dieu , qui m'avait permis de conserver ce qui m'avait Ă©tĂ© confiĂ© par mon souverain. »
Les troupes françaises ayant triomphé de l'armée algérienne à la bataille de Staoueli, se portent sur le Bordj Mouley Hassan (le fort l'Empereur), qu'elles attaquent. Une capitulation est alors signée entre le dey et le général Bourmont, et, le lendemain, les Français entrent dans Alger[13].
Ahmed Bey, à l'attaque du fort, est à l'Ouled el kélaï ; il s'avance ensuite jusqu'à Aïn Rebat, il est toujours accompagné des siens, auxquels sont venus se joindre tous les fuyards de la ville, au nombre de 1 500 à 1 600. Le lendemain de l'entrée des Français dans la ville, Ahmed campe au pont d'El-Kantara, de l'autre cÎté de la riviÚre. Le lendemain, au matin, il se dirige vers le Khamis, et, le soir, il campe au Fondouk (Sel-Fenadek)[13].
Le lendemain, Ahmed poursuit sa marche vers l'Est, en se portant sur les Ouled Zetoun, oĂč il reçoit une dĂ©pĂȘche du gĂ©nĂ©ral Bourmont, qui l'engage a venir demander l'aman : il y rĂ©pond en continuant sa marche. Il s'approche de Constantine lorsqu'on vint lui annoncer que, pendant son absence, un autre bey avait Ă©tĂ© proclamĂ© Ă sa place : il s'en dĂ©fit facilement, aidĂ©, par son officier, Ali ben AĂŻssa[13].
DÚs son retour à Constantine, en 1831, Ahmed Bey et sa communauté se considÚrent en guerre sainte (djihad) contre les Français[2].
Modernisation de l'armée et résistance
Il rĂ©organise l'armĂ©e sur le modĂšle Ă©gyptien d'abord, il dĂ©truit le corps de janissaires, avec l'aide de tous les habitants de la province, puis se concentre sur une force permanente de 2 000 zouaoua (Kabyles) Ă pied, et 1 500 cavaliers arabes[13]. Il crĂ©e divers ministĂšres, et place Ă la tĂȘte du principal d'entre eux, Moustapha Saheb Ettabaa. Il s'attache en mĂȘme temps Ă se concilier l'amitiĂ© de ses oncles maternels dont l'influence dans le Sahara peut lui apporter du soutien en cas d'attaque française[13].
En 1832, il confie à son lieutenant, Ali ben Aïssa, le soin de soumettre la population de BÎne, dont les habitants repoussent l'autorité du bey, et sollicitent la protection de la France[14].
En 1835, le cholĂ©ra, qui vient d'affliger Alger, se porte sur Constantine, oĂč il rĂšgne avec force pendant 17 jours. Ahmed en est atteint lui-mĂȘme. Il raconte, dans ses MĂ©moires, comme tĂ©moignant de l'intensitĂ© de l'Ă©pidĂ©mie[15].
Premier siĂšge de Constantine
En 1836, lâarmĂ©e française, composĂ©e de 8 800 hommes, commandĂ©e par le MarĂ©chal Clauzel, gouverneur gĂ©nĂ©ral de lâAlgĂ©rie, secondĂ© par lâun des fils du roi de France, le Duc de Nemours, quitte BĂŽne le , pour se prĂ©senter devant Constantine le dans lâaprĂšs-midi. LâarmĂ©e constantinoise, composĂ©e de deux corps distincts, lâun assurant la dĂ©fense en ville (2 400 hommes dirigĂ©s par Ali ben AĂŻssa et Mohamed Belebdjaoui), lâautre battant la campagne sous la barriĂšre d'Ahmed Bey (5 000 cavaliers et 1 500 fantassins), laisse venir Ă elle lâennemi, pour lâenfermer entre lâattaque et la dĂ©fense. La stratĂ©gie constantinoise sâavĂ©re payante, et lâarmĂ©e française, contrairement Ă ses espĂ©rances, doit livrer bataille et essuyer une lourde dĂ©faite qui a un profond retentissement tant en France, quâau niveau international[15].
Poursuite de la lutte
En 1837, fort de son premier succĂšs, Hadj Ahmed Bey adopte la mĂȘme stratĂ©gie pour affronter lâennemi dans sa nouvelle tentative. Le gĂ©nĂ©ral DamrĂ©mont, nouveau gouverneur gĂ©nĂ©ral de lâAlgĂ©rie, tirant les leçons de la prĂ©cĂ©dente bataille, met au point un nouveau plan pour assiĂ©ger Constantine. Cette nouvelle stratĂ©gie, et les erreurs et contradictions du commandement constantinois permet aux troupes françaises dâentrer en ville le [15].
Depuis deux jours dĂ©jĂ , Constantine est au pouvoir de la France, qu'Ahmed est encore dans ses environs. Le troisiĂšme, aprĂšs avoir ralliĂ© tous les siens, il se dirige dans le sud, d'aprĂšs les conseils que lui en avait donnĂ©s son plus proche parent, Bou-Aziz-Ben-Gannah. Ahmed est Ă El Asnam lorsqu'il reçoit, du gĂ©nĂ©ral ValĂ©e, une dĂ©pĂȘche par laquelle il l'invite Ă venir demander l'aman. Trois jours aprĂšs cette dĂ©pĂȘche, il en reçoit une nouvelle, qu'il laisse sans rĂ©ponse, comme la premiĂšre. Il continue sa marche pour se rendre a Bouacif, aux confins du Tell. Dans cette marche il est arrĂȘtĂ© par Ferraht-Ben-SaĂŻd, qui s'est engagĂ© a le capturer, et Ă le livrer Ă la France. Un combat s'engage entre ces deux chefs : Ferraht y perd environ 300 hommes, et s'enfuit ensuite Ă Souf, au-delĂ des Zibans[15].
Il écrit au sultan ottoman Mahmoud II, qui, depuis longtemps, lui faisait espérer des secours pour pouvoir se maintenir dans son indépendance contre la France.
Bou-Aziz accompagne Ahmed depuis son dĂ©part de Constantine : ils se sĂ©parent Ă Bouacif, aprĂšs quelques diffĂ©rend survenus entre eux. Ahmed passe alors chez les Haraktas, oĂč il reste deux mois.
En 1839[15], l'armĂ©e française franchit les portes de fer, sous le commandement du duc d'OrlĂ©ans[15]. Cette mĂȘme annĂ©e, une colonne, partie de Constantine, s'approche du camp d'Ahmed ; et il reçoit une dĂ©pĂȘche qui devait ĂȘtre suivie d'une attaque, s'il n'y faisait pas une rĂ©ponse dans le sens dĂ©sirĂ© : il lĂšve aussitĂŽt son camp, et se porte vers le Dhir, oĂč il passe l'hiver[16].
Au printemps une nouvelle colonne marche sur les Haraktas, probablement Ă cause de leurs relations avec Ahmed. Ceux-ci, aussitĂŽt, appellent Ahmed Ă leur secours : il s'y rend. AprĂšs quoi, Ahmed rentre dans le Dhir, ou il fixe sa demeure. Il y est depuis 2 ans lorsqu'il passe chez les Hanenchas, oĂč il ne sĂ©journe que deux mois. Il se porte alors dans les AurĂšs, avec l'intention d'y rĂ©unir sa famille, ainsi que tous les objets qu'il y avait fait passer aprĂšs la perte de sa capitale[16].
AprĂšs un an de sĂ©jour dans l'AurĂšs, Ahmed en sort avec les Ouled Djerradj, qui sont venus lui demander de se rendre avec eux dans le Hodna. Toutefois, avant d'obtempĂ©rer Ă leur demande, il se porte avec eux contre Ahmed bel Hadj, officier de l'Ă©mir Abdelkader, qui occupe Biskra. Un combat s'est engagĂ© entre ces deux chefs, le dernier perdit 40 hommes et 30 fusils, et se renferma d'y rester longtemps aussitĂŽt dans la ville, oĂč Ahmed ne peut pĂ©nĂ©trer[16].
Celui ci prend alors la route de l'Hodna, avec les Ouled Djerradj, et s'y Ă©tablit, dans l'intention d'y rester longtemps. Mais il n'est plus dans la destinĂ©e du bey dĂ©chu de pouvoir compter encore sur quelques jours de repos. Et, en effet, informĂ© bientĂŽt aprĂšs, par le cheikh des Righa, qu'une colonne française, sortie de SĂ©tif, marche sur lui, il part pour se rendre auprĂšs de ce mĂȘme chef, afin de se concerter avec lui sur la dĂ©fense. Chemin faisant, une rencontre a lieu entre son goum et la colonne : le goum perd 6 hommes et 9 chevaux, et Ahmed ne va pas plus loin. Il rentre alors dans l'Hodna, oĂč il sĂ©journe encore quatre mois. AprĂšs quoi, il se rend chez les Ouled Soltane, avec lesquels il vĂ©cut pendant un an et demi. Une colonne, partie de SĂ©tif, s'est portĂ©e contre ces montagnards, Ahmed les rassemble pour marcher sur la colonne, mais il ne peut que les accompagner de ses vĆux, retenu, bientĂŽt aprĂšs, par une maladie grave[16].
Les Ouled Soltane ayant rencontrĂ© la colonne, les français se battent pendant deux jours, mais sans aucun rĂ©sultat, ni d'un cĂŽtĂ©, ni de l'autre. 8 jours aprĂšs, la mĂȘme colonne rĂ©apparait sur le mĂȘme point, et ils se battent de nouveau. Aucun rĂ©sultat dĂ©finitif n'eut encore lieu cette fois. Le duc d'Aumale, alors commandant supĂ©rieur de la province, vient d'accomplir son expĂ©dition des Ziban (1844). AprĂšs quelques jours de repos, Ă Constantine, il marche sur Ahmed, avec les Tellia et toutes les tribus nomades. Les forces d'Ahmed se composent seulement de 700 hommes, tant cavaliers que fantassins et des Ouled Soltane, tribu assez nombreuse. Les deux colonnes en viennent aux mains, et le combat dure deux jours et une nuit[16]. Ahmed est des plus vifs. Voici, du reste, ce qu'il dit lui mĂȘme, dans ses MĂ©moires :
« Nous combattions pendant deux jours avec une ardeur et un acharnement tel, que je puis dire que câest le combat le plus sanglant auquel jâai assistĂ©. Dieu mâest tĂ©moin que depuis mon enfance jâai entendu la poudre parler bien des fois »[17].
Ce combat est promptement suivi de deux autres, car tous trois ont lieu dans le court espace de 15 jours, et tous trois aussi le mercredi, ce que Ahmed fait remarquer dans ses MĂ©moires. Au dernier combat, Ahmed est dangereusement malade, de sorte qu'il ne peut y prendre une part personnelle. Il est alors gisant dans un bois, d'oĂč il entendait les coups de feu des combattants[17].
La nuit venue, il est emportĂ© sur les Ă©paules des siens, et il passe alors si prĂšs des colonnes françaises, qu'il en voit les sentinelles. Il voyage ainsi toute la nuit, jusqu'Ă El-Bir, oĂč il compte s'arrĂȘter : il ne le peut pas, Ă©tant suivi, dans sa marche, par une colonne française. Il se dirige alors sur le mont Metlili, oĂč il passe un jour et une nuit. Son Ă©tat ne s'est pas amĂ©liorĂ©. Cependant, il faut qu'il continue sa marche. il est transportĂ© alors Ă El Daya, oĂč il ne rĂ©alise qu'un court sĂ©jour. De lĂ , il se porte chez les BĂ©ni Ferradj, oĂč il passe la nuit. Les BĂ©ni Ferradj ont un village : Ahmed s'y rend le lendemain et y reste plusieurs jours. Il part ensuite pour El Mana, oĂč il se fixe, aprĂšs avoir passĂ© quelque temps dans ta maison d'Ibn el Abbas, son ami. Dans son dernier combat avec la colonne française, Ahmed z tout perdu, de sorte qu'il a le plus grand besoin de s'arrĂȘter pour se refaire, et de toutes les maniĂšres. Ahmed est Ă El Mana depuis un an, lorsque les Ouled Abdi viennent l'y chercher, pour le prier de se porter, avec eux, contre une colonne qui marche sur leur tribu : il se met Ă leur tĂȘte, et marche Ă la rencontre de la colonne. Les deux partis s'Ă©tant rencontrĂ©s, la lutte s'engage, mais, Ă peine Ă©tait-elle commencĂ©e, que les Ouled Abdi lĂąchent pied. Ahmed s'en revient tout seul, avec son goum, Ă El Mana. Toutefois, ne se croyant plus en sĂ»retĂ© dans cette contrĂ©e, il l'a quitte bientĂŽt aprĂšs. Il se fixe alors sur le djebel Ammor Kaddou[17].
Reddition
Environ deux ans se sont Ă©coulĂ©s depuis qu'Ahmed est dans le djebel Ahmar Khadou, lorsqu'il reçoit du commandant supĂ©rieur de Biskra, Marcel de Saint-Germain, une dĂ©pĂȘche par laquelle cet officier supĂ©rieur lui mande qu'il serait temps de faire cesser la longue hostilitĂ© qui existait entre lui et la France. Cette dĂ©pĂȘche est bien accueillie, et ne tarde pas Ă ĂȘtre suivie de plusieurs autres. AprĂšs quoi, une nouvelle correspondance s'engage entre Ahmed et le Commandant supĂ©rieur du cercle de Batna, auquel ressortissait le commandement de Marcel de Saint-Germain[17].
Ahmed meurt le dans sa 65e année. Selon ses désirs, il est inhumé à Alger au marabout de Sidi Abderrahman et-Thaùlibi, prÚs de la porte Bab El Oued. Son mausolée en marbre est surmonté d'un turban[18].
Famille
Hadj Ahmed Bey a eu deux filles et un fils, Mohammed Chérif, mort en 1832 ùgé de 5 ans. Ses six épouses sont toutes filles de Cheikhs des Ayar, des Jlass, des Drid et des Hanachia influents de la région[19] :
- une fille de la tribu de Gerfa vers TĂ©bessa.
- une fille descendante du sud.
- Aichouche des ouled Abdeslam, du clan des Amokrane de la Qalaa[20]
- une fille descendante d'un pacha d'Alger, allié de Constantine.
- une fille El-Hanachia, apparentée aux Drid.
- une femme de sa tribu, qui meurt deux mois aprĂšs son mariage (sans enfant).
- un fils Youssef Ben Hafiz Khodja , avec Mouni Ben Rekaib .
Ahmed Bey dans la littérature
A Alger, au pied de Sidi Abd-er-Rahman, Maupassant décrit la tombe « du célÚbre Ahmed, bey de Constantine qui fit dévorer par des chiens le ventre des prisonniers français »[21]
Notes et références
- (en) Jamil M. Abun-Nasr, A History of the Maghrib in the Islamic Period, Cambridge University Press, (ISBN 9780521337670, lire en ligne), p. 255
- Abdeljelil Temimi, « Le drapeau constantinois Ă l'Ă©poque de Hadj Ahmed, dernier Bey de Constantine », Revue de l'Occident musulman et de la MĂ©diterranĂ©e, vol. 15, no 1,â , p. 323â326 (DOI 10.3406/remmm.1973.1252, lire en ligne, consultĂ© le )
- (en) Phillip C. Naylor, Historical Dictionary of Algeria, Rowman & Littlefield, (ISBN 9780810879195, lire en ligne), p. 65
- Nasredine GuĂ©nifi, Ahmed Bey l'algĂ©rien, Ăditions alpha, (ISBN 9789947886083, lire en ligne), p. 15
- Recueil des notices et mémoires de la Société archélologique de la province de Constantine, vol. 11, Alessi et Arnolet, (lire en ligne), p. 92
- Raoul Julien François de Lartigue, Monographie de l'AurÚs, Imprimerie à vapeur Marle-Audrino, (lire en ligne)
- Jean-Louis Guyon, Voyage d'Alger aux Ziban, l'ancienne Zebe, en 1847 avec atlas oĂč figurent les principales oasis de cette contrĂ©e ... par M. le docteur Guyon, Imprimerie du Gouvernement, (lire en ligne), p. 283-284
- Jean Louis GeneviĂšve Guyon, Voyage d'Alger aux Ziban, l'ancienne Zebe, en 1847, Impr. du gouvernement, (lire en ligne), p. 284-285
- Jean-Louis-GeneviĂšve Guyon, Voyage d'Alger au Liban, l'ancienne Lebe en 1847..., (lire en ligne), p. 285
- Recueil des notices et mémoires de la Société archéologique de la province de Constantine, Alessi et Arnolet, (lire en ligne), p. 8
- Jean-Louis-GeneviĂšve Guyon, Voyage d'Alger au Liban, l'ancienne Lebe en 1847..., (lire en ligne), p. 286
- Abdeljelil Temimi, Le Beylik de Constantine et កÄdÌČj Ê»Aáž„med Bey (1830-1837), Revue d'histoire maghrĂ©bine, , p. 197
- Jean-Louis-GeneviĂšve Guyon, Voyage d'Alger au Liban, l'ancienne Lebe en 1847..., (lire en ligne), p. 287-288
- Moritz Wagner, Lettres sur l'expédition de Constantine, (lire en ligne), p. 106-107
- Jean-Louis-GeneviĂšve Guyon, Voyage d'Alger au Liban, l'ancienne Lebe en 1847..., (lire en ligne), p. 288
- Jean-Louis-GeneviĂšve Guyon, Voyage d'Alger au Liban, l'ancienne Lebe en 1847..., (lire en ligne), p. 289
- Jean-Louis-GeneviĂšve Guyon, Voyage d'Alger au Liban, l'ancienne Lebe en 1847..., (lire en ligne), p. 290
- Jean Louis GeneviĂšve Guyon, Voyage d'Alger aux Ziban, l'ancienne Zebe, en 1847, Impr. du gouvernement, (lire en ligne), p. 296
- Jean Cuisenier, Ăconomie et parentĂ©:leurs affinitĂ©s de structure dans le domaine turc et dans le domaine arabe, Ăditions de l'Ăcole des hautes Ă©tudes en sciences sociales, , p. 375
- Robin (Colonel, Nil Joseph), L'insurrection de la Grande Kabylie en 1871, , Généalogie des Mokrani
- Maupassant, DâAlger Ă Tunis , in La vie errante,