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Programme Surveyor

Le programme Surveyor de la NASA est un programme d'exploration de la Lune par des engins automatiques qui a joué un rôle important dans la préparation des missions du programme Apollo. En 1960, le Jet Propulsion Laboratory (JPL) lance officiellement un projet d'étude scientifique de notre satellite qui doit mettre en œuvre une sonde spatiale capable d'effectuer un atterrissage sur le sol lunaire pour l'étudier in situ.

Programme Surveyor
Sondes spatiales ( Lune )
Description de cette image, également commentée ci-après
Une maquette terrestre d'une sonde Surveyor.
Données générales
Organisation Drapeau des États-Unis NASA
Constructeur Drapeau des États-Unis Hughes Aircraft
Programme Surveyor
Domaine Étude in situ de la Lune
Type de mission Atterrisseur
Nombre d'exemplaires 7
Statut Missions terminées
Lancement 1966-1968
Lanceur Atlas-Centaur
Protection planétaire Catégorie II[1]
Caractéristiques techniques
Masse au lancement 995-1 036 kg
Propulsion Solide/Liquide
Δv 2,7 km/s (rĂ©trofusĂ©e)
Contrôle d'attitude Stabilisé sur 3 axes
Source d'Ă©nergie Panneau solaire
Puissance Ă©lectrique 90 W
Principaux instruments

Les responsables de la NASA orientent ce projet en 1961 pour en faire un programme de reconnaissance afin de préparer le débarquement de l'homme sur la Lune. Plusieurs sondes Surveyor sont programmées avec désormais comme objectif principal la mise au point d'une méthode d'atterrissage en douceur ainsi que l'étude du sol lunaire et de sa topographie. La Lune est à l'époque mal connue et les scientifiques n'ont pas de certitude sur la consistance du sol lunaire. Il est impératif de connaître ce paramètre pour valider la conception du train d'atterrissage des modules lunaires Apollo.

Le JPL conçoit une sonde spatiale de type atterrisseur dont la fabrication est confiĂ©e Ă  la sociĂ©tĂ© Hughes Aircraft. Le projet rencontre de nombreux problèmes : surcoĂ»ts, impasses techniques et rĂ©visions dramatiques du cahier des charges. Les sondes Surveyor sont, pour l'Ă©poque, des engins complexes et innovants : il s'agit des premières sondes spatiales conçues pour se poser en douceur sur un autre corps cĂ©leste. Construites autour d'un treillis de tubes en aluminium qui leur donne une apparence arachnĂ©enne, elles nĂ©cessitent la mise au point de plusieurs dispositifs Ă©lectroniques et moteurs innovants : une grosse rĂ©trofusĂ©e aux performances remarquables, des moteurs verniers Ă  poussĂ©e modulable, deux radars dont les donnĂ©es sont utilisĂ©es par un système d'atterrissage automatique qui doit ĂŞtre capable de poser la sonde sur un terrain aux caractĂ©ristiques inconnues. Ces sondes de près d'une tonne sont bien plus lourdes que les vĂ©hicules spatiaux amĂ©ricains qui les ont prĂ©cĂ©dĂ©es et qui ne dĂ©passent pas 300 kg. Lorsque le programme dĂ©bute, il n'existe pas de lanceur amĂ©ricain assez puissant pour lancer une telle masse ; la NASA choisit d'utiliser le lanceur Atlas associĂ© Ă  un Ă©tage Centaur en cours de dĂ©veloppement ; celui-ci inaugure l'utilisation de l'hydrogène liquide qui permet de tripler les performances du lanceur Atlas-Agena utilisĂ© jusque-lĂ . Mais sa mise au point est beaucoup plus longue que prĂ©vu et le premier lancement d'une sonde Surveyor, initialement programmĂ© pour 1963, n'a lieu qu'en 1966.

Entre 1966 et 1968, sept sondes Surveyor sont lancĂ©es parmi lesquelles cinq remplissent leur mission avec succès. Elles fournissent des informations rassurantes sur les propriĂ©tĂ©s mĂ©caniques du sol lunaire qui se rĂ©vèle apte Ă  supporter le module lunaire Apollo. Par contre, les retombĂ©es scientifiques du programme sont limitĂ©es car les nombreux instruments scientifiques prĂ©vus initialement ne sont pas installĂ©s faute d'un Ă©tage Centaur suffisamment puissant. La camĂ©ra prĂ©sente sur toutes les sondes permet nĂ©anmoins de prendre plus de 87 000 photos du sol lunaire et les trois dernières sondes emportent un instrument qui permet d'analyser la composition chimique du sol. Compte tenu de la complexitĂ© de la mission assignĂ©e aux sondes et malgrĂ© les retards et les surcoĂ»ts, le programme est considĂ©rĂ© comme une rĂ©ussite du programme spatial amĂ©ricain.

Le programme Surveyor consistant à construire et à lancer 7 sondes spatiales Surveyor vers la Lune coûte au total 469 millions de dollars américains.

Contexte

Le programme Surveyor est lancé au tout début de la conquête spatiale alors qu'une compétition dont les enjeux sont essentiellement politiques s'est engagée entre l'Union soviétique et les États-Unis.

La course Ă  l'espace

Lorsque le programme Surveyor est officiellement lancĂ© en 1960, il s'est Ă©coulĂ© moins de trois ans depuis que l'Union SoviĂ©tique a placĂ© en orbite le premier satellite artificiel nommĂ© Spoutnik 1. La guerre froide entre les États-Unis et l'Union soviĂ©tique bat son plein et les deux pays tentent de multiplier les premières spatiales pour prouver la supĂ©rioritĂ© de leur système politique. Dans cette course Ă  l'espace, les SoviĂ©tiques disposent de deux avantages : ils ont dĂ©marrĂ© leur programme spatial plus tĂ´t et surtout leurs lanceurs, dĂ©rivĂ©s comme ceux des AmĂ©ricains de missiles balistiques porteurs de charges nuclĂ©aires, sont beaucoup plus puissants car ils sont conçus pour porter des bombes atomiques aux dimensions plus importantes que les bombes nuclĂ©aires amĂ©ricaines[2] : dès 1960, l'Union SoviĂ©tique dispose du lanceur Molnia capable de lancer vers la Lune une sonde spatiale de 1,5 tonne[3] alors que le lanceur concurrent amĂ©ricain, l'Atlas-Agena, ne peut lancer que 300 kg vers la mĂŞme destination.

Les premières missions spatiales vers la Lune

Du fait d'un lanceur de puissance très limitée, les premières sondes lunaires américaines sont de petite taille (ici Pioneer 3, qui a été envoyé sur un Juno II).

L'exploration de la Lune, corps céleste le plus accessible depuis la Terre, figure dans les objectifs des programmes spatiaux des deux pays. L'URSS réussit dès à lancer la sonde spatiale Luna 1 qui effectue le premier survol de la Lune ; en octobre de la même année, Luna 3 parvient à photographier la face cachée de notre satellite. Les premières sondes américaines du programme Pioneer (1958-1960) qui poursuivent le même objectif sont victimes d'une série de défaillances[4]. Le programme Ranger (1960-1963) prend le relais avec des sondes plus complexes permettant d'effectuer des photos de la Lune mais ne connaît ses premiers succès qu'en 1963 après six échecs consécutifs. Le développement d'une deuxième génération de sondes interplanétaires américaines démarre au début des années 1960 avec le programme Mariner qui doit permettre d'explorer les planètes inférieures du Système solaire (Terre, Vénus, Mercure) tandis que le programme Surveyor est chargé d'effectuer des investigations scientifiques de la Lune après un atterrissage en douceur sur son sol[5].

La Lune : un satellite mal connu

À l'époque où les premières sondes spatiales sont lancées vers la Lune, ce satellite naturel de la Terre, pourtant proche, garde une grande part de mystère. L'origine des cratères - cratère d'impact ou cratère volcanique - qui parsèment sa surface ne fait pas l'unanimité : certains rejettent encore l'idée que ceux-ci aient été créés par l'impact de météorites, une théorie élaborée quelques années auparavant[N 1]. Le mode de formation des mers lunaires est également l'objet de controverses. La communauté scientifique est à peu près unanime sur le fait qu'elles sont constituées par de la lave mais il y a divergence sur son origine : volcanisme ou impact de météorite[6]. Il existe d'autres explications comme celle avancée par l'astronome Thomas Gold qui est largement diffusée dans les médias à la grande fureur du milieu scientifique : pour Gold, les mers sont formées par l'accumulation de débris produits par l'érosion des cratères et des parties les plus élevées de la surface lunaire ; cette poussière, prédit-il plus tard, va engloutir les sondes et les vaisseaux qui se poseront sur le sol lunaire[7]. Certains chercheurs, comme le lauréat du prix Nobel de chimie Harold Clayton Urey, pensent que contrairement à la Terre, la Lune n'est pas une planète différenciée et qu'elle est constituée du matériau primitif présent à la formation du Système solaire (théorie de la Lune froide)[8]. Le sol lunaire intrigue également car les observations effectuées depuis la Terre avec des instruments dans des bandes allant des rayons X aux ondes radio indiquent une grande porosité du matériau de surface qui est nommé plus tard « régolithe[9] ». Enfin, on ne dispose, à l'époque, que de quelques mauvaises photographies de la face cachée de la Lune prises par la sonde soviétique Luna 3.

Historique

Le lancement du programme

Au printemps 1960, le développement du programme Surveyor est officiellement lancé et confié par la NASA à son laboratoire de recherche, le Jet Propulsion Laboratory (JPL) situé à Pasadena en Californie.

Le Jet Propulsion Laboratory

Le Jet Propulsion Laboratory (JPL) est un laboratoire créé par le California Institute of Technology (CalTech) et administré par celui-ci. Après avoir été un établissement de l’Armée de terre américaine (US Army) de 1943 à 1958, il fait partie des centres qui sont placés sous la direction de la NASA lorsqu'elle est créée en 1958. Le JPL a forgé son expérience dans le domaine spatial en développant durant la Seconde Guerre mondiale les JATO (Jet-Assisted Take-Off) puis en concevant dans les années 1950 les missiles tactiques Sergeant et Corporal. Le JPL pose sa candidature en 1955 pour fournir le premier lanceur américain en association avec l'Agence des missiles balistiques (ABMA) de l'Armée de terre américaine de Huntsville (Alabama) dirigée par Wernher von Braun mais il échoue au profit du projet Vanguard proposé par le laboratoire de la Marine américaine (US Navy). Il fournit toutefois le premier satellite artificiel du pays, Explorer 1. Le JPL, dont le domaine de compétence au sein de la NASA est l'exploration du Système solaire, s'est également vu confier les programmes des sondes spatiales Ranger et Mariner. Son statut très particulier[N 2] lui donne une grande autonomie vis-à-vis des dirigeants de l'agence spatiale. Lors des premières discussions en 1959 sur les programmes futurs, les dirigeants du JPL tentent de remettre en question la priorité accordée par la direction de la NASA au programme d'exploration de la Lune. Fiers de leurs réalisations, le personnel du JPL et ses dirigeants souhaitent conserver le mode de fonctionnement hérité des projets passés qui reposent notamment sur des structures légères et un recours limité à la sous-traitance[10] - [11] - [12].

Les objectifs du programme Surveyor

Les sondes Lunar Orbiter sont développées dans le cadre d'un programme distinct après la scission du programme Surveyor originel.

Le programme Surveyor a pour objectif initial de dĂ©velopper deux engins spatiaux : un orbiteur qui doit Ă©tudier la Lune depuis l'orbite lunaire et un atterrisseur qui doit se poser en douceur sur la Lune pour une Ă©tude in situ. Cette configuration sera reprise pour le programme Viking[13]. Il est prĂ©vu que les deux sondes spatiales comportent des organes communs[14]. Selon les plans initiaux du JPL, sept atterrisseurs destinĂ©s Ă  valider la technique d'atterrissage doivent d'abord ĂŞtre lancĂ©s avant de laisser la place Ă  13 atterrisseurs « scientifiques » chargĂ©s de 160 kg d'instruments dont trois camĂ©ras, des sismomètres, spectromètres, foreuses, un laboratoire pour analyser les Ă©chantillons[15]... Ă€ la demande de la direction de la NASA, le JPL accepte avec rĂ©ticence de renoncer Ă  dĂ©velopper en interne les sondes et de lancer un appel d'offres pour sous-traiter la conception dĂ©taillĂ©e, la fabrication et les tests de l'atterrisseur[16]. Une consultation auprès de quatre constructeurs[N 3] est lancĂ©e en [17] ; la proposition du constructeur Hughes Aircraft est retenue en . Selon le cahier des charges Ă©tabli par le JPL, la future sonde doit peser 1 125 kg après sĂ©paration avec son lanceur et 320 kg Ă  l'atterrissage sur la Lune. Elle doit emporter 114 kg d'instruments scientifiques et doit de plus permettre de valider une mĂ©thode d'atterrissage en douceur sur le sol lunaire. Il est prĂ©vu que la sonde fonctionne au minimum durant la pĂ©riode Ă©clairĂ©e d'une journĂ©e lunaire. Le premier vol est planifiĂ© pour 1964[18]. Compte tenu de sa masse, la sonde doit ĂŞtre lancĂ©e par un lanceur Atlas comportant un deuxième Ă©tage Centaur en cours de dĂ©veloppement qui seul permet de lancer vers la Lune une telle masse. L'Ă©tage Centaur inaugure l'utilisation de l'hydrogène liquide qui doit permettre de tripler les performances du lanceur Atlas-Agena utilisĂ©e jusque-lĂ  pour les missions interplanĂ©taires.

En 1961, les objectifs du programme Surveyor sont modifiĂ©s pour inclure les opĂ©rations de reconnaissance nĂ©cessaires au programme Apollo. Les sondes Surveyor doivent permettre de valider la technique d'atterrissage en douceur sur la Lune et l'architecture du train d'atterrissage qui seront mis en Ĺ“uvre par le futur module lunaire Apollo[19]. Il est en effet nĂ©cessaire de vĂ©rifier que les hypothèses de rĂ©sistance du terrain sont conformes aux prĂ©visions des responsables du programme Apollo : ceux-ci indique en 1962 au constructeur du module lunaire que le sol lunaire est capable de supporter une charge de 8,4 N/cm2 avec un enfoncement limitĂ© Ă  15 cm. En 1964, la NASA raffine ces contraintes en prenant l'hypothèse qu'une pression statique de 0,7 N/m2 exercĂ©e sur le sol lunaire ne doit pas conduire Ă  un enfoncement de plus de 10 cm et qu'une charge dynamique de 8,4 N/cm2 n'entraĂ®nerait pas un enfoncement supĂ©rieur Ă  30 cm[20]. En 1962, le JPL doit Ă  la fois faire face aux Ă©checs de ses sondes Ranger et aux problèmes soulevĂ©s par la conception de l'atterrisseur Surveyor. Les dirigeants de la NASA dĂ©cident de dĂ©velopper l'orbiteur dans le cadre d'un programme distinct : le programme Lunar Orbiter est confiĂ© au Centre de recherche de Langley[13]. La construction de l'orbiteur donne lieu Ă  un appel d'offres qui est remportĂ© en 1963 par Boeing[19].

Une sonde complexe

L'atterrisseur Surveyor est beaucoup plus complexe à développer que les sondes spatiales qui l'ont précédé. Plusieurs composants entièrement nouveaux doivent être mis au point pour permettre l'atterrissage en douceur et, malgré le recours à l'étage Centaur, les ingénieurs peinent à rester en dessous de la masse maximale autorisée. La rétrofusée chargée d'annuler la plus grande partie de la vitesse de la sonde à l'approche de la Lune n'est pas une nouveauté car un engin semblable a été développé auparavant pour les sondes Ranger mais c'est à cette époque le propulseur à propergol solide le plus performant, tout en étant très compact pour ne pas allonger la coiffe du lanceur et alourdir celui-ci. Les trois moteurs verniers chargés de la phase finale de l'atterrissage sont également développés spécifiquement pour Surveyor. Ils se caractérisent par une poussée modulable et même orientable pour l'un d'entre eux, ce qui en fait des engins complexes malgré leur puissance modeste. La partie la plus originale de la sonde est le système de radar Doppler chargé de contrôler la descente en fournissant l'altitude et les vitesses horizontale et verticale au calculateur qui pilote en retour l'action des moteurs verniers pour permettre à la sonde de se poser en douceur. Le train d'atterrissage doit être développé sans disposer de données précises sur la consistance du sol lunaire et les obstacles présents à la surface. La sonde hérite par contre des techniques mises au point pour les sondes Mariner et Ranger développées à la même époque, telles que la stabilisation sur 3 axes, le viseur d'étoiles et la structure tubulaire[16] - [21].

Le développement de l'étage Centaur en difficulté

L'explosion au décollage du lanceur Atlas-Centaur en 1965 (vol AC-5) rase le pas de tir.

Toutes les sondes interplanĂ©taires amĂ©ricaines contemporaines (Mariner, Lunar Orbiter, Ranger) ont une masse infĂ©rieure Ă  350 kg qui leur permet d'ĂŞtre lancĂ©es par les lanceurs amĂ©ricains existants. La rĂ©ussite du programme Surveyor est liĂ©e Ă  l'aboutissement du dĂ©veloppement de l'Ă©tage Centaur qui lui seul permet Ă  l'ensemble Atlas-Centaur de propulser la sonde de plus d'une tonne vers sa destination lunaire. L'Ă©tage supĂ©rieur Centaur met pour la première fois en Ĺ“uvre le couple d'ergols hydrogène liquide-oxygène liquide, très performant mais Ă©galement très difficile Ă  maĂ®triser. Ce projet, dont les dĂ©buts remontent Ă  1958, accumule les retards : le premier exemplaire dĂ©colle pour un essai en (AC-1) mais c'est un Ă©chec. L'affaire est jugĂ©e suffisamment grave pour dĂ©clencher une enquĂŞte du Congrès des États-Unis. Compte tenu des rĂ©sultats obtenus jusque-lĂ , les performances de l'Ă©tage Centaur sont revues Ă  la baisse avec d'importantes consĂ©quences pour la sonde Surveyor : la masse maximale de celle-ci doit passer de 1 125 kg Ă  975,2 kg ce qui rĂ©duit mĂ©caniquement la masse de la charge utile Ă  28,6 kg contre 114 kg Ă  l'origine. En , après de nombreux dĂ©bats entre diffĂ©rentes factions internes, la NASA dĂ©cide de renoncer aux Surveyor « scientifiques » : la sonde n'est dĂ©sormais plus qu'un engin de reconnaissance technologique au service du programme Apollo. Entre 1963 et 1965, plusieurs tentatives de rĂ©intĂ©grer une instrumentation scientifique complète sont effectuĂ©es ; un temps, il est mĂŞme envisagĂ© que la sonde emporte un petit rover de 45 kg capable de parcourir 1,6 km et chargĂ© d'effectuer un relevĂ© systĂ©matique du terrain grâce Ă  un pĂ©nĂ©tromètre et une camĂ©ra. Mais toutes ces tentatives - il y a 101 modifications consĂ©cutives de la configuration de dĂ©part - Ă©chouent[22] - [15] - [23].

Pour assurer une gestion plus efficace du projet Centaur, la supervision du développement est confiée fin 1962 au Centre spatial Lewis. Le projet passe en priorité nationale en , ce qui lui garantit une meilleure qualité de service de la part des sous-traitants. Pour limiter les risques, le responsable du Centre spatial Lewis, Abe Silverstein, supprime la possibilité de rallumer le moteur sur la première version de l'étage, ce qui représente un casse-tête technique avec l'utilisation de l'hydrogène liquide. L'équipe chargée du développement de la sonde Surveyor s'oppose fermement à cette décision mais en vain. Cette restriction implique que les lancements effectués sur l'année ne peuvent être recalés en orbite et sont susceptibles d'aboutir à un atterrissage sur la Lune durant la période nocturne, une opération qui risque de compromettre le fonctionnement de la sonde. Les essais extensifs et l'implication des acteurs du projet permettent de résoudre un grand nombre de problèmes techniques qui n'ont parfois pas été détectés jusque-là[23]. Après un lancement réussi le du vol Atlas-Centaur 2 (AC-2), les échecs s'accumulent soit du fait du premier étage Atlas (AC-3 le , AC-5 le ) soit de celui de l'étage Centaur (AC-4 le , AC-8 le ). Les ingénieurs de la NASA découvrent en effectuant des essais au sol, qu'en impesanteur l'hydrogène liquide se plaque le long des parois et que les évents, réagissant mal, libèrent à la fois les gaz résultant de l'évaporation progressive de l'hydrogène ainsi que de l'hydrogène liquide créant un couple de forces à l'origine de mouvements incontrôlés du lanceur. Une solution est trouvée mais le projet s'attire pour la deuxième fois les foudres de représentants du Congrès et de la presse américaine[24].

La direction du JPL remise en question

Dès son lancement, le programme Surveyor souffre d'un encadrement trop léger au sein du JPL compte tenu de sa complexité qui est mal évaluée par les responsables. Il y a également une certaine désaffection du personnel pour ce projet développé principalement par une société extérieure, contrairement aux habitudes du centre spatial. Les changements majeurs intervenus en cours de développement dans le cahier des charges et les problèmes récurrents du lanceur finissent par mettre le programme en difficulté[25]. La situation est particulièrement grave en 1964. Devant les problèmes rencontrés par le fabricant des moteurs verniers, le JPL décide, à contrecœur, compte tenu de l'avancement du projet, de se tourner vers un autre constructeur. Alors qu'un nouveau fournisseur est désigné, le premier contractant parvient à redresser la barre. La mise au point du système de mesure de vitesse par Doppler et du radar altimètre rencontrent d'importantes difficultés techniques. Ce dernier doit en effet piloter l'ensemble des manœuvres de la phase d'atterrissage ce qui n'a jusque-là jamais été réalisé ; ce type de système, qui permet à un hélicoptère d'atterrir sans visibilité, n'est d'ailleurs toujours pas généralisé aux engins terrestre 20 ans plus tard. Deux essais réalisés avec des copies grandeurs réelles de la sonde adaptés à la gravité terrestre pour qualifier le système d'atterrissage en douceur se soldent par la destruction des sondes[16].

Ces problèmes se cumulent avec les échecs répétés des sondes spatiales du programme Ranger également géré par le JPL. Les dirigeants de la NASA demandent à plusieurs reprises au responsable du JPL, William Hayward Pickering, de réformer son organisation et de mieux prendre en considération les alertes remontées par le siège. Le programme est désormais sur le chemin critique du programme Apollo car les données que les sondes doivent collecter sur le sol lunaire peuvent amener des modifications dans la conception du module lunaire Apollo qui doit déposer les astronautes sur la Lune. La NASA envisage le remplacement de Pickering et la suppression des versements à Caltech, à qui l'agence spatiale demande en vain d'assumer ses responsabilités. Le renforcement de l'équipe du projet et la mise en place de procédures permettent d'aplanir progressivement les problèmes[26].

Le lancement de la première sonde Surveyor

L'enfoncement modéré de la semelle du train d'atterrissage de Surveyor 1 dans le sol lunaire apporte une réponse rassurante aux responsables du programme Apollo (photo prise le ).

Le , les SoviĂ©tiques parviennent Ă  poser en douceur la sonde Luna 9 sur le sol lunaire. Elle rĂ©alise la première photographie panoramique du site d'atterrissage grâce Ă  un miroir tournant lentement autour de la camĂ©ra. Au bout de trois jours la sonde s'Ă©teint après avoir Ă©puisĂ© son accumulateur. La sonde Luna est beaucoup plus rudimentaire que la sonde Surveyor mais l'astronautique soviĂ©tique vient une nouvelle fois de rĂ©ussir une première avant son homologue amĂ©ricain[27]. Quatre mois plus tard, le , le lanceur Atlas-Centaur (AC-10) s'envole de l'aire de lancement LC-36A de la base de lancement de Cap Kennedy en emportant Surveyor 1, la première sonde opĂ©rationnelle d'une masse de 995 kg[28]. Cette mission doit principalement permettre de valider les dispositifs les plus complexes de la sonde, notamment sa capacitĂ© Ă  effectuer des corrections de trajectoire Ă  mi-course entre la Terre et la Lune, maintenir les tĂ©lĂ©communications durant le vol et depuis le sol lunaire, rĂ©aliser un atterrissage contrĂ´lĂ© ainsi que qualifier l'Ă©tage Centaur pour le lancement de missions interplanĂ©taires. Les objectifs secondaires sont de parvenir Ă  obtenir des tĂ©lĂ©mesures relatives au fonctionnement des diffĂ©rents sous-systèmes de la sonde. Les objectifs de moindres importances sont l'obtention d'images d'un des pieds du train d'atterrissage et du sol environnant après l'arrivĂ©e sur le sol lunaire, la mesure de la rĂ©flectivitĂ© radar de la surface de la Lune, de la rĂ©sistance mĂ©canique du sol et des tempĂ©ratures[29].

La NASA doute de la rĂ©ussite de la mission de Surveyor 1 car de nombreuses modifications de dernière minute sont effectuĂ©es sur la sonde[28]. D'ailleurs les quatre premières sondes, dites « Block I », emportent un Ă©quipement scientifique rĂ©duit Ă  une camĂ©ra et des jauges chargĂ©es de mesurer les forces qui s'exercent Ă  l'atterrissage ; pour les responsables du programme, ces sondes doivent surtout permettre la mise au point du dĂ©roulement de la mission[13]. Contre toute attente le vol du lanceur puis celui de Surveyor se dĂ©roulent sans aucune anomalie[N 4]. La sonde atterrit le dans l'ocĂ©an des TempĂŞtes (« Oceanus Procellarum ») après avoir rebondi de quelques centimètres. Une photo d'une des semelles faiblement enfoncĂ©e dans le sol lunaire transmise immĂ©diatement Ă  la Terre permet de constater que la sonde n'a pas Ă©tĂ© engloutie par le rĂ©golithe comme l'avancent les plus pessimistes[28]. Ce succès inattendu suscite un important intĂ©rĂŞt du public aux États-Unis non dĂ©nuĂ© de chauvinisme[30]. De nombreuses photographies sont prises par la camĂ©ra embarquĂ©e au cours des jours suivants avant une interruption temporaire de 2 jours pour limiter l'Ă©chauffement de l'Ă©lectronique alors que le Soleil culmine au-dessus de la sonde (). Les opĂ©rations de photographie reprennent par la suite et le Ă  la fin de la pĂ©riode Ă©clairĂ©e de la première journĂ©e lunaire, 10 338 photos ont Ă©tĂ© prises et transmises. La sonde est mise en hibernation durant la longue nuit lunaire. Lorsque le Soleil rĂ©apparaĂ®t le , la sonde refuse de rĂ©pondre aux commandes envoyĂ©es depuis la Terre. Le , elle se rĂ©active et plusieurs centaines de photos sont prises par la suite. Ă€ la fin de la deuxième journĂ©e lunaire, le JPL met fin Ă  la mission. La sonde continue de rĂ©pondre aux signaux envoyĂ©s jusqu'au huitième jour lunaire, transmettant des donnĂ©es jusqu'au [28] - [30].

Cratère photographié par Surveyor 1.

Les missions Surveyor suivantes

Les sites d'atterrissage des missions des programmes Surveyor, Luna et Apollo.

Six missions succèdent Ă  Surveyor 1 entre 1966 et 1968, dont quatre rĂ©ussies. Le , l'Atlas-Centaur AC-7 qui emporte la sonde Surveyor 2 effectue un vol parfait mais l'un des moteurs verniers de la sonde refuse de fonctionner lors des corrections de trajectoire Ă  mi-parcours malgrĂ© plusieurs manĹ“uvres commandĂ©es depuis la Terre. La sonde incontrĂ´lable s'Ă©crase sur la Lune[31]. La sonde suivante n'est lancĂ©e que 6 mois plus tard pour permettre la mise au point d'un Ă©tage Centaur rĂ©allumable en orbite : cette version permet d'Ă©largir la fenĂŞtre de lancement et de disposer d'un plus grand choix de zones d'atterrissage. La mission Surveyor 3 est lancĂ©e le puis, après un transit vers la Lune et une phase d'atterrissage sans incident, rĂ©ussit Ă  se poser mais de manière peu conventionnelle : les moteurs verniers ne s'arrĂŞtent pas comme prĂ©vu car le radar ne reçoit plus les rĂ©flexions du sol. Les moteurs verniers rĂ©agissent Ă  chaque fois que la sonde se pose en tentant de maintenir la sonde verticale, ce qui la fait redĂ©coller. La sonde rebondit ainsi Ă  trois reprises sur le sol lunaire, la première fois Ă  plus de 10 mètres de hauteur, avant que l'Ă©quipe sur Terre envoie un ordre d'extinction aux moteurs. L'explication la plus probable est que le radar d'atterrissage a Ă©tĂ© leurrĂ© par le rebord du cratère dans lequel la sonde s'est posĂ©e. Bien que faisant partie des sondes du Block I, Surveyor 3 emporte une petite pelle disponible en principe uniquement sur la version suivante mais avec un nombre de jauges plus limitĂ© ; celle-ci permet d'obtenir des informations supplĂ©mentaires sur la structure du sol lunaire[32]. La sonde Surveyor 4 est lancĂ©e le , mais le contact avec l'engin est perdu deux minutes et demie avant son atterrissage peu après la mise Ă  feu de sa rĂ©trofusĂ©e. Surveyor 5, lancĂ©e le , frĂ´le l'Ă©chec : une valve dĂ©fectueuse laisse s'Ă©chapper l'hĂ©lium qui permet de pressuriser le carburant des moteurs verniers. Le plan de vol est modifiĂ© dans l'urgence pour limiter le recours aux moteurs verniers et la rĂ©trofusĂ©e est volontairement mise Ă  feu Ă  une altitude beaucoup plus basse que prĂ©vu. Lorsque les moteurs verniers prennent le relais, la sonde se trouve Ă  une altitude de 1 300 mètres (au lieu de 10 km) mais la vitesse a Ă©tĂ© rĂ©duite Ă  30 m/s (au lieu de 150 m/s). La sonde se pose sans problème dans la Mer de la TranquillitĂ© sur la pente Ă  20° d'un petit cratère Ă  30 km de son objectif. Surveyor 5 est la première sonde de la version Block II mieux Ă©quipĂ©e en instruments scientifiques ; elle emporte un analyseur Ă  rayons alpha qui est utilisĂ© avec succès pour dĂ©terminer les principaux Ă©lĂ©ments chimiques prĂ©sents dans le sol environnant. Au cours de la mission, les moteurs verniers sont mis Ă  feu durant une demi-seconde pour tester la manière dont la surface est Ă©rodĂ©e par le souffle des moteurs et en dĂ©duire certaines de ses caractĂ©ristiques mĂ©caniques[33].

La sonde Surveyor 6 est lancĂ©e le et se pose sans encombre dans la plaine de Sinus Medii ; ce site avait Ă©tĂ© retenu successivement pour les sondes dĂ©faillantes Surveyor 2 et Surveyor 4 et devait servir de lieu d'atterrissage de rechange pour la première mission Apollo. Comme pour Surveyor 5, un test de remise Ă  feu des moteurs verniers est rĂ©alisĂ© mais cette fois-ci la poussĂ©e exercĂ©e est Ă  la fois plus longue (2,5 secondes) et latĂ©rale : soulevĂ©e par la brève impulsion de ses moteurs, la sonde s'Ă©lève de 3,5 mètres tout en se dĂ©plaçant de 2,5 mètres. Les photos prises avant et après permettent de constater que les traces d'Ă©rosion du sol par le souffle des tuyères sont rĂ©duites. Une nouvelle analyse de la composition du sol par l'analyseur Ă  rayons alpha produit des rĂ©sultats comparables Ă  ceux fournis par Surveyor 5[34]. Ă€ l'issue de la mission de Surveyor 6, tous les objectifs assignĂ©s au programme sont remplis. Les responsables du programme dĂ©cident qu'ils peuvent dĂ©sormais prendre un risque pour rĂ©pondre aux attentes des scientifiques. Surveyor 7 est lancĂ© le et doit se poser près du cratère Tycho dans une zone couverte de dĂ©bris rocheux Ă©jectĂ©s par l'impact Ă  l'origine du cratère donc peu propice Ă  un atterrissage rĂ©ussi. Tycho est un cratère relativement rĂ©cent qui a Ă©tĂ© choisi par les gĂ©ologues parce qu'il semble prĂ©senter une formation gĂ©ologique très diffĂ©rente des mers qui ont Ă©tĂ© explorĂ©es jusque-lĂ  dans le cadre du programme Surveyor. MalgrĂ© le caractère chaotique de la zone d'atterrissage, la sonde rĂ©ussit un atterrissage parfait Ă  2,5 km du point visĂ©. La sonde emporte Ă  la fois une pelle et un analyseur Ă  rayons alpha. Pour abaisser ce dernier, qui reste bloquĂ© en position haute, les opĂ©rateurs sur Terre ont recours aux services de la pelle. Le sol se rĂ©vèle plus mou que celui des prĂ©cĂ©dents sites et sa composition est lĂ©gèrement diffĂ©rente avec une proportion de fer nettement infĂ©rieure (2 % au lieu de 5 %)[35].

Les missions Surveyor[36]
SondeDate du lancementMasse (kg)
totale/atterrissage
Lieu d'atterrissagePrincipaux instruments embarquésRésultat
Surveyor 1995,2 / 294Océan des TempêtesCaméraSuccès
Surveyor 2- /292-CaméraÉchec
Surveyor 31026/296Mer de la ConnaissanceCaméra, pelleSuccès
Surveyor 41038/283-Caméra, pelleÉchec
Surveyor 51006/303Mer de la TranquillitéCaméra, analyseur à rayons alphaSuccès
Surveyor 61006/300Sinus MediiCaméra, analyseur à rayons alphaSuccès
Surveyor 71039/306Cratère TychoCaméra, pelle, analyseur à rayons alphaSuccès

La fin du programme

Le module lunaire (Apollo 12) se pose en 1969 à proximité de Surveyor 3 pour que son équipage étudie les effets des conditions lunaires sur la sonde.

En 1965, les responsables du programme Surveyor envisagent de rĂ©intĂ©grer Ă  partir de la cinquième mission les instruments scientifiques qui ont Ă©tĂ© Ă©liminĂ©s Ă  cause des problèmes rencontrĂ©s au cours du dĂ©veloppement de l'Ă©tage Centaur. Il est alors prĂ©vu que la masse de la sonde soit portĂ©e Ă  1 100 kg et qu'elle puisse emporter 52 kg d'instruments scientifiques dont notamment trois camĂ©ras, une foreuse, un sismomètre, et un dĂ©tecteur de micromĂ©tĂ©orites. Peu après, le nombre de missions planifiĂ© passe de 7 Ă  10 : la première sonde scientifique doit dĂ©sormais ĂŞtre la huitième. Fin 1966, les contraintes budgĂ©taires entrainent finalement la suppression des trois dernières missions mettant fin aux espoirs d'un volet scientifique du programme. En , l'Ă©quipage d'Apollo 12 rĂ©ussit Ă  poser son LEM non loin de Surveyor 3 : la camĂ©ra et la pelle de la sonde sont dĂ©tachĂ©es et sont ramenĂ©es sur Terre par l'Ă©quipage pour Ă©tudier l'effet de leur exposition prolongĂ©e au vide de l'espace. La camĂ©ra est aujourd'hui exposĂ©e au National Air and Space Museum de Washington[37]. Ă€ son achèvement, les sommes dĂ©pensĂ©es pour dĂ©velopper les sondes Surveyor s'Ă©lèvent Ă  469 millions US$, soit le quadruple de l'estimation initiale et un montant supĂ©rieur au cout cumulĂ© des deux programmes de sondes spatiales contemporains Ranger (260 millions) et Lunar Orbiter (200 millions). Si ce dĂ©passement peut paraitre important, il n'est en rĂ©alitĂ© pas très Ă©loignĂ© de ce qui est constatĂ© sur les quinze programmes spatiaux amĂ©ricains de l'Ă©poque : leur cout est en moyenne multipliĂ© par 3,5 par rapport Ă  l'estimation initiale[38] - [39] - [40].

Caractéristiques techniques des sondes Surveyor

Un des moteurs verniers d'une sonde Surveyor.

La structure

La structure centrale de la sonde Surveyor est constituĂ©e d'un treillis ouvert de tubes en aluminium en forme de pyramide tronquĂ©e sur lesquels sont montĂ©s les diffĂ©rents sous-systèmes et la charge utile (voir SchĂ©ma 1 et SchĂ©ma 2 plus bas). Son apparence arachnĂ©enne, l'absence d'enveloppe extĂ©rieure qui souligne la disparition des contraintes aĂ©rodynamiques dans le vide, le dĂ©marque des sondes amĂ©ricaines qui l'ont prĂ©cĂ©dĂ©. Le train d'atterrissage comporte trois jambes montĂ©es sur une charnière et fixĂ©es aux angles de la pyramide : celles-ci comportent des absorbeurs de choc dans leur partie supĂ©rieure et se terminent par des pieds en forme de larges semelles cylindriques de 13 cm de haut et de 20 cm de diamètre Ă  la base. Ceux-ci sont Ă©galement conçus pour se dĂ©former si la vitesse verticale Ă  l'arrivĂ©e est Ă©levĂ©e. D'autres absorbeurs de choc de 20 cm de haut, rĂ©alisĂ©s comme les prĂ©cĂ©dents avec une structure de type nid d'abeilles en aluminium, sont montĂ©s sous l'armature principale. Lorsque le train d'atterrissage se dĂ©forme au contact avec le sol en abaissant la structure centrale de la sonde, ces blocs neutralisent l'Ă©nergie rĂ©siduelle. L'empattement est de 4,3 mètres pour une hauteur totale de 3 mètres. Les diffĂ©rents Ă©quipements sont dispersĂ©s sur cette structure ouverte ce qui reflète l'organisation très dĂ©centralisĂ©e du projet chez le constructeur de la sonde, Hughes Aircraft. Cette disposition contraire aux principes modernes de regroupement par sous-systèmes, ne contribuait pas Ă  optimiser la masse de l'engin mais permit de le faire Ă©voluer très facilement au fur et Ă  mesure des missions[41].

Schéma 1. Vue du dessus d'une sonde Surveyor.

1. Semelle du train d'atterrissage
2. Mire
3. RĂ©servoir de comburant
4. Caméra
5. RĂ©servoir de pressurisation
des moteurs de contrĂ´le d'altitude
6. Boitier C
7. Analyseur Ă  particules alpha
8. RĂ©servoir de pressurisation
des moteurs verniers

9. Moteur vernier
10. Antenne omnidirectionnelle
11. Mire
12. Réservoir de la rétrofusée
13. Moteur de contrĂ´le d'altitude
14. Jauge de contrainte
15. Accéléromètre
16. RĂ©servoir de carburant
17. Convertisseur signal

18. Capteur solaire
19. Viseur d'Ă©toiles
20. Groupe de capteurs
21. Boitier B
22. Antenne radar vitesse
23. Transformateur
24. Antenne radar vitesse et altitude
25. Boitier A
26. RĂ©flecteur solaire

Schéma 2. Configuration à l'atterrissage d'une sonde Surveyor.

1. Semelle du train d'atterrissage
2. Bloc Ă©crasable
3. Antenne radar vitesse et altitude
4. Moteur vernier
5. Analyseur Ă  particules alpha
6. Antenne omnidirectionnelle

7. Caméra
8. Antenne grand gain
9. Système d'orientation de l'antenne et du panneau solaire
10. Capteur du panneau solaire
11. Panneau solaire
12. Système de déverrouillage du train d'atterrissage

La propulsion

Schéma 3. Rétrofusée d'une sonde Surveyor

1. Bloc de propergol solide
2. Bâti moteur
3. Longeron (avec isolant)
4. Point d'attache du radar AMR
5. Capteur thermique
6. RevĂŞtement isolant

7. RĂ©servoir (94 cm de diamètre)
8. Système de mise à feu
9. Système d'armement
10. Isolant renforcé
11. Col de la tuyère.

La sonde dispose de trois ensembles de propulseurs : une rétrofusée qui est utilisée pour annuler la quasi-totalité de la vitesse à l'approche de la Lune, trois moteurs verniers dont le rôle principal est de freiner la sonde durant la descente sur le sol lunaire et enfin trois paires de petits propulseurs à gaz froid chargés de maintenir l'orientation de la sonde[42].

La rĂ©trofusĂ©e, chargĂ©e de faire chuter la vitesse de la sonde de 2 750 m/s Ă  environ 159 m/s Ă  l'approche de la Lune, est un propulseur Ă  propergol solide Thiokol TE-364 d'une poussĂ©e de 40 kN (4 tonnes). Le moteur est constituĂ© d'un rĂ©servoir sphĂ©rique en acier de 94 cm de diamètre contenant le propergol d'oĂą Ă©merge une longue tuyère en partie enfoncĂ©e dans le rĂ©servoir (voir SchĂ©ma 3). Le moteur a une impulsion spĂ©cifique de 275 Ă  280 secondes[43].

Les trois moteurs verniers, dont la poussĂ©e peut ĂŞtre modulĂ©e entre 140 et 470 N, brĂ»lent du monomĂ©thylhydrazine et du peroxyde d'azote qui s'enflamment spontanĂ©ment lorsqu'ils sont mis en contact (hypergolique). Carburant et comburant sont envoyĂ©s dans les tuyères par de l'hĂ©lium sous pression. La sonde embarque 81 kg de carburant rĂ©partis dans 6 rĂ©servoirs sphĂ©riques (deux par moteurs) qui sont maintenus Ă  une tempĂ©rature acceptable par une combinaison d'isolants thermiques et de rĂ©sistances chauffantes. La poussĂ©e d'un de ces trois propulseurs est par ailleurs orientable de 6° de part et d'autre de son axe avec un degrĂ© de libertĂ© qui lui permet d'agir sur le roulis. Ces moteurs sont chargĂ©s d'effectuer les corrections de trajectoire, de maintenir l'orientation de la sonde durant le fonctionnement de la rĂ©trofusĂ©e et de freiner la sonde durant la dernière phase d'atterrissage[44].

Les radars

Pour parvenir à atterrir en douceur sur le sol lunaire, la sonde dispose de deux radars. Le premier, dit AMR (altitude marking radar), est installé au débouché de la tuyère, de la rétrofusée et a un usage très ponctuel : il doit mesurer la distance à laquelle se trouve la Lune et initialiser la séquence de mise à feu de la rétrofusée lorsqu'une valeur programmée est atteinte. Le second radar, dit RADVS (radar altitude Doppler velocity sensing), prend alors le relais du premier après l'extinction de la rétrofusée et alimente en données le calculateur de bord durant la phase de descente jusqu'à l'atterrissage. Il dispose de deux antennes qui lui permettent de calculer d'une part la distance au sol et d'autre part la vitesse verticale et horizontale de la sonde par rapport à celui-ci par effet Doppler[45].

Les télécommunications et l'énergie

La sonde est surmontĂ©e d'un mât implantĂ© de manière dissymĂ©trique Ă  mi-distance entre deux des coins de la structure pyramidale. Ă€ son sommet se trouvent l'antenne de tĂ©lĂ©communications grand gain (grand dĂ©bit 27 db) de forme plane et un panneau solaire. Trois moteurs Ă©lectriques permettent d'ajuster l'orientation pour que ces deux Ă©quipements soient dirigĂ©s respectivement vers la Terre et vers le Soleil. L'orientation du panneau solaire vers le Soleil est commandĂ©e depuis la Terre compte tenu du dĂ©placement relativement lent du Soleil dans le ciel une fois la sonde posĂ©e sur le sol lunaire (0,5° par heure). La sonde dispose par ailleurs de deux antennes omnidirectionnelles Ă  faible gain, Ă©galement montĂ©es sur un petit mât articulĂ©. Les transmissions, qui utilisent la bande S, peuvent se faire Ă  faible puissance (100 mW) ou Ă  forte puissance (10 W). Le panneau solaire d'une superficie de 0,855 m2 est en position repliĂ©e le long du mât durant le lancement. Il fournit 90 W qui sont stockĂ©s dans une batterie argent-zinc d'une capacitĂ© de 176 A-h. Celle-ci dĂ©livre directement une tension de 22 V. Une batterie auxiliaire de 45 A-h est installĂ©e sur les modèles 1 Ă  4 pour permettre Ă  la sonde d'ĂŞtre opĂ©rationnelle immĂ©diatement après l'atterrissage. Les concepteurs de la sonde ont choisi d'allĂ©ger au maximum la tâche du calculateur embarquĂ© : les diffĂ©rentes opĂ©rations sont tĂ©lĂ©commandĂ©es depuis la Terre grâce Ă  un langage comprenant 256 types d'instruction. Les valeurs d'une centaine de paramètres sont transmises pĂ©riodiquement par la sonde au contrĂ´le au sol[46].

Le contrĂ´le d'orientation et le contrĂ´le thermique

La sonde est stabilisée 3 axes : le contrôle de l'orientation de la sonde utilise deux senseurs solaires (un capteur moins précis pour le premier repérage et un senseur fin), un viseur d'étoiles développé dans le cadre du programme Mariner qui est maintenu pointé vers l'étoile Canopus et des gyroscopes. Les corrections d'orientation sont effectuées à l'aide de trois paires de petits propulseurs à gaz froid installés au-dessus des semelles du train d'atterrissage qui éjectent de l'azote stocké dans un réservoir sphérique d'une contenance de kg. Le contrôle thermique est à la fois passif grâce à des couches d'isolants et des peintures réfléchissantes et actif. Deux boitiers regroupant l'électronique — télécommunications, calculateur de bord, transformateur électrique — sont isolés sur le plan thermique grâce à une double paroi dans laquelle est inséré un isolant constitué de 75 feuilles de mylar sur un support d'aluminium. Le contrôle thermique actif maintient dans les boitiers la température dans une fourchette compatible avec les caractéristiques de l'électronique grâce à des caloducs chargés d'évacuer la chaleur vers des radiateurs situés au sommet des boitiers et des résistances électriques chargées au contraire de maintenir une température assez élevée[41] - [47].

DĂ©roulement d'une mission

Opérations de préparation de la sonde Surveyor 5 avant son lancement.
Lancement de Surveyor 1 par une fusée Atlas-Centaur en 1966.

La fenĂŞtre de lancement

La fenêtre de lancement des sondes Surveyor est déterminée par plusieurs paramètres. La sonde se pose au tout début de la période éclairée d'une journée lunaire (soit quatorze jours terrestres) pour pouvoir remplir sa mission avant que le Soleil n'atteigne son zénith et ne crée des conditions thermiques défavorables. Pour les premières missions, le point d'injection sur la trajectoire Terre-Lune est déterminé de manière rigide par l'heure de lancement. En effet, compte tenu des incertitudes sur la capacité de l'étage Centaur à pouvoir être mis à feu à deux reprises, la sonde ne stationne pas sur une orbite d'attente jusqu'à l'obtention d'un alignement favorable. L'injection vers la Lune est directe, toutefois les réserves de carburant de l'étage Centaur permettent d'élargir la fenêtre de lancement à quelques heures par jour. La durée du transit vers la Lune est fixée par la vitesse de la sonde sur son trajet, elle-même déterminée par les capacités du lanceur et celle de la rétrofusée. Au moment de la phase critique de l'atterrissage, l'antenne de Goldstone doit pouvoir recevoir les signaux de la sonde. En pratique, la durée du transit entre la Terre et la Lune est comprise entre 61 et 65 heures. Tous les sites d'atterrissage, sauf celui de Surveyor 7, sont situés près de l'équateur pour limiter la consommation de carburant et les manœuvres à l'arrivée. Pour la mission de Surveyor 1, première de la série et à haut risque, le site d'atterrissage retenu est situé quasiment à la verticale locale du point d'arrivée de la sonde à proximité de la Lune[48].

Le lancement et le transit vers la Lune

Le lanceur est tirĂ© depuis la base de Cape Canaveral en Floride. Contrairement Ă  l'Atlas-Agena, la trajectoire du lanceur n'est pas corrigĂ©e depuis le sol mais est modifiĂ©e de manière continue par le système de guidage logĂ© dans l'Ă©tage Centaur. Parvenu Ă  l'altitude de 120 km, la coiffe en fibre de verre est larguĂ©e[N 5]. L'Ă©tage Centaur est mis Ă  feu alors que le lanceur a atteint une altitude de 155 km. Les moteurs de l'Ă©tage Centaur sont arrĂŞtĂ©s automatiquement lorsque la vitesse atteinte est de 10,5 km/s. Il s'est alors Ă©coulĂ© 438 secondes depuis la mise Ă  feu du second Ă©tage et 689 secondes depuis le dĂ©collage. La sonde se trouve Ă  une altitude de 166 km et Ă  3 600 km au sud-ouest de Cape Canaveral lorsqu'elle entame son transit vers la Lune. La sonde est dĂ©sormais placĂ©e sur une orbite fortement elliptique autour de la Terre avec un pĂ©rigĂ©e de 160 km et un apogĂ©e de 384 000 km. Cette trajectoire est calculĂ©e pour que la sonde, lorsqu'elle atteint son apogĂ©e, tombe dans le champ d'attraction de la Lune[49].

L'étage Centaur utilise la liaison électrique reliée à la sonde pour envoyer la commande de déploiement de la partie inférieure des jambes d'atterrissage du train d'atterrissage et de l'antenne grand gain. Ces parties de la sonde sont repliées sous la coiffe pour limiter le volume occupé. Le calculateur de l'étage Centaur déclenche alors le cisaillement de la ligne électrique puis 5 secondes plus tard la séparation du lanceur et de la sonde[N 6]. Cette dernière se met à pivoter à l'aide de ses petits moteurs de contrôle d'attitude pour orienter son panneau solaire en direction du Soleil. Elle pivote d'abord autour de son axe principal à la vitesse de 0,5° par seconde jusqu'à ce qu'un premier senseur solaire ayant un champ optique de 196° × 10° détecte l'astre puis elle pivote sur ses autres axes jusqu'à ce qu'un deuxième senseur solaire plus sensible (au champ optique plus étroit) détecte le Soleil. Le panneau solaire est alors libéré par une petite charge pyrotechnique et est orienté de manière à être perpendiculaire au mât et face au Soleil. L'étage Centaur utilise ses moteurs de contrôle d'orientation pour entamer une rotation de 180° puis, alors qu'il a effectué la moitié de son changement d'orientation, déclenche brièvement ses moteurs puis purge ses réservoirs pour écarter sa trajectoire de celle de la sonde et ne pas risquer d'entrer dans le champ optique du viseur d'étoiles. Celui-ci est utilisé quatre heures plus tard pour figer l'orientation de la sonde. À mi-course, la sonde quitte cette orientation pour placer ses moteurs verniers dans la position adéquate afin d'effectuer une petite correction de trajectoire (delta-v de 3 m/s pour Surveyor 1)[49].

Schéma 4. Trajectoire d'une sonde entre la Terre et la Lune.

La phase d'atterrissage

Surveyor 6 sur la Lune : résultat du souffle du moteur vernier rallumé après l'atterrissage.

L'arrivĂ©e sur la Lune se fait selon une trajectoire hyperbolique sans mise en orbite intermĂ©diaire autour de notre satellite. La Lune Ă©tant dĂ©pourvue d'atmosphère, l'arrivĂ©e au sol avec une vitesse nulle repose sur la capacitĂ© des moteurs Ă  rĂ©duire la vitesse liĂ©e au transit et gĂ©nĂ©rĂ©e par la gravitĂ© lunaire. La trajectoire retenue pour les sondes Surveyor consiste Ă  annuler la vitesse horizontale par rapport au sol lunaire Ă  une dizaine de kilomètres d'altitude puis Ă  se laisser tomber Ă  la verticale sous l'effet de la gravitĂ© lunaire en annulant 90 % de la vitesse gĂ©nĂ©rĂ©e par celle-ci. Cette stratĂ©gie prudente mais relativement normale compte tenu de l'absence d'expĂ©rience Ă  l'Ă©poque du programme Surveyor, est par contre peu efficace sur le plan Ă©nergĂ©tique comme le montrent les modifications apportĂ©es au plan de vol de Surveyor 5 qui a pu atterrir en entamant la descente verticale Ă  seulement 1,3 km du sol en utilisant beaucoup moins d'ergols[50].

En pratique, 30 minutes avant l'atterrissage, la sonde s'oriente de manière Ă  aligner l'axe de la rĂ©trofusĂ©e avec le vecteur vitesse en utilisant le senseur solaire et le viseur d'Ă©toiles. Lorsque le radar AMR dĂ©tecte que le sol lunaire n'est plus qu'Ă  100 km, il dĂ©clenche la sĂ©quence de mise Ă  feu de la rĂ©trofusĂ©e : au bout de 8 secondes, les moteurs verniers sont allumĂ©s afin de maintenir l'orientation de la sonde durant le fonctionnement de la rĂ©trofusĂ©e. Celle-ci est allumĂ©e une seconde plus tard alors que l'altitude est tombĂ©e Ă  76 km : les gaz gĂ©nĂ©rĂ©s par la rĂ©trofusĂ©e expulsent l'antenne du radar AMR fixĂ©e Ă  la sortie de la tuyère. L'action de la rĂ©trofusĂ©e fait chuter la vitesse en moyenne[N 7] de 2 750 m/s Ă  159 m/s en 40 secondes. Dix secondes après son extinction, la rĂ©trofusĂ©e et son rĂ©servoir sont Ă©jectĂ©s alors que l'altitude est de 10 km : la masse de la sonde passe de 995 kg Ă  340 kg Ă  l'issue de cette phase. La sonde entame alors une descente contrĂ´lĂ©e en utilisant ses moteurs verniers pilotĂ©s par le calculateur embarquĂ©. Celui-ci exploite les donnĂ©es fournies par le radar altimètre qui, Ă  l'aide de 4 faisceaux Ă©lectromagnĂ©tiques, mesure Ă  la fois l'altitude, la vitesse verticale et au cours de la dernière phase, la vitesse horizontale par effet Doppler. ArrivĂ©e Ă  4,5 mètres du sol, les moteurs verniers sont Ă©teints et la sonde tombe en chute libre et atterrit avec une vitesse verticale d'environ 5 m/s et une vitesse horizontale quasi nulle[50] - [51].

RĂ©sultats scientifiques

Émetteur et détecteurs de l'analyseur à particules alpha.
L'analyseur à particules alpha de Surveyor 5 est abaissé sur le sol lunaire.

La charge utile des sondes Surveyor, qui devait comporter initialement plus d'une dizaine d'instruments scientifiques, a été simplifiée à l'extrême à la suite des problèmes de performance de l'étage Centaur. Les instruments emportés ont pour objectif principal de déterminer les caractéristiques du sol et du relief lunaire en vue des atterrissages du module lunaire Apollo.

Les instruments scientifiques

Les instruments installés sur les sondes ont varié en fonction des missions :

  • une camĂ©ra est embarquĂ©e sur toutes les missions. Elle permet d'effectuer une vue panoramique sur 360° et peut ĂŞtre orientĂ©e en azimut de -65° Ă  +40° (+90° Ă  partir de Surveyor 6). Sa rĂ©solution est de mm Ă  4 mètres et la mise au point peut se faire de 1,23 mètre Ă  l'infini. Le champ optique peut aller de 25,3 Ă  6,43° mais en pratique seules les deux valeurs extrĂŞmes sont utilisĂ©es. La camĂ©ra comporte 3 filtres de couleurs et un filtre polarisant. Le rĂ©glage et l'orientation de la camĂ©ra sont commandĂ©s depuis la Terre. La lumière incidente est transformĂ©e en signaux Ă©lectriques par un tube Vidicon. La camĂ©ra permet de produire des images avec deux dĂ©finitions : 600 lignes ou 200 lignes. Deux mires accrochĂ©es sur une antenne omnidirectionnelle et au-dessus d'une des semelles du train d'atterrissage facilitent le rĂ©glage de l'appareil[52] ;
  • une pelle est installĂ©e sur les sondes Surveyor 3 et Surveyor 7. Elle est utilisĂ©e pour tester la rĂ©sistance du sol Ă  la pression et Ă  l'impact ainsi que pour creuser des tranchĂ©es afin d'analyser le sol en profondeur. La pelle est longue de 12 cm et large de cm. Elle est montĂ©e Ă  l'extrĂ©mitĂ© d'un dispositif articulĂ© qui lui permet de gratter le sol sur une distance comprise entre 58 et 163 centimètres de son point d'attache sur un des cĂ´tĂ©s de l'atterrisseur. Elle peut ĂŞtre dĂ©placĂ©e latĂ©ralement sur un arc de 112° et ĂŞtre soulevĂ©e jusqu'Ă  une hauteur de 102 cm au-dessus du sol puis abaissĂ©e avec une certaine vigueur sous l'effet combinĂ© de la gravitĂ© lunaire et d'un ressort afin de tester les propriĂ©tĂ©s mĂ©caniques du sol. La pelle peut ĂŞtre Ă©galement positionnĂ©e Ă  46 cm en dessous du niveau des pieds de l'atterrisseur. La pelle est Ă©quipĂ©e de capteurs permettant de connaitre les forces appliquĂ©es[53] - [13] ;
  • un analyseur Ă  particules alpha est installĂ© sur les sondes Surveyor 5, 6 et 7. Il utilise une source radioactive (Curium 242) pour bombarder un Ă©chantillon du sol. Des dĂ©tecteurs de particules alpha et de protons placĂ©s Ă  cĂ´tĂ© de la source Ă©mettrice analysent les particules renvoyĂ©es par l'Ă©chantillon soumis au bombardement. En fonction de l'Ă©nergie de ces particules, la composition atomique de l'Ă©chantillon peut ĂŞtre dĂ©duite assez prĂ©cisĂ©ment. Le dispositif est installĂ© dans un boitier dont la partie infĂ©rieure est ouverte et qui est maintenu dans une plage de tempĂ©ratures acceptable grâce Ă  des revĂŞtements isolants et une rĂ©sistance Ă©lectrique. Il est accrochĂ© Ă  un support sur le corps du satellite durant le transit vers la Lune puis abaissĂ© après l'atterrissage Ă  l'aide d'une corde en nylon sur le sol lunaire pour permettre l'analyse. Celle-ci dure plusieurs heures. Seul l'Ă©chantillon de sol situĂ© Ă  la verticale du lieu de stockage de l'analyseur peut ĂŞtre analysĂ©. Surveyor 7 qui emporte Ă©galement une pelle, a pu l'utiliser pour dĂ©placer l'analyseur et effectuer des analyses Ă  des emplacements diffĂ©rents[54] ;
  • des aimants destinĂ©s Ă  dĂ©tecter les matĂ©riaux sensibles Ă  un champ magnĂ©tique sont installĂ©s sur les sondes Ă  partir de Surveyor 5. Un aimant et une barre de contrĂ´le non magnĂ©tisĂ©e sont fixĂ©s sur un des pieds du train d'atterrissage de cette sonde et de la suivante. Pour la sonde Surveyor 7, les aimants sont installĂ©s sur deux de ses pieds ainsi que sur la pelle[55].

Les résultats obtenus

Les principales donnĂ©es collectĂ©es par le programme Surveyor sont les 87 674 photos prises par la camĂ©ra depuis la surface de la Lune dont 98 % au cours du premier jour lunaire de chaque mission[56]. Les scientifiques tirent plusieurs conclusions de ces images. La profondeur des cratères bordĂ©s de blocs rocheux photographiĂ©s leur permet d'estimer l'Ă©paisseur de la couche de rĂ©golithe, cette poussière rĂ©sultant des impacts rĂ©pĂ©tĂ©s des mĂ©tĂ©orites : celle-ci varie de 1 Ă  20 mètres selon les sites. La distribution des cratères de quelques centimètres Ă  quelques dizaines de mètres observĂ©s autour des sites d'atterrissage confirment l'anciennetĂ© du bombardement subi par la Lune[57]. L'analyseur Ă  particules alpha a permis de dĂ©terminer que les trois premiers Ă©lĂ©ments chimiques composant les Ă©chantillons testĂ©s sont l'oxygène (57 %), le silicium (20 %) et l'aluminium (7 %). Ce sont dans cet ordre les Ă©lĂ©ments les plus frĂ©quents dans la croute terrestre. L'Ă©chantillon de sol du site situĂ© en hauteur visitĂ© par Surveyor 7 diffère de ceux analysĂ©s dans les plaines : la proportion du groupe du fer (qui va du titane au cuivre) est plus forte. Ces rĂ©sultats, très diffĂ©rents par ailleurs de la composition des mĂ©tĂ©orites, Ă©cartent l'hypothèse d'une Lune vestige du matĂ©riau primitif prĂ©sent Ă  la formation du système solaire[58].

Dans l'optique du programme Apollo, les propriĂ©tĂ©s mĂ©caniques du sol lunaire ont fait l'objet d'une Ă©tude particulièrement approfondie. Le sol qui a la consistance du sable mouillĂ© est compressible mais sa rĂ©sistance Ă  la compression augmente rapidement avec la profondeur et atteint 5,5 N/cm2 Ă  cm[59]. Cette rĂ©sistance est largement compatible avec le train d'atterrissage du module lunaire qui doit amener les hommes sur la Lune. Les sondes Surveyor n'ont pas pu effectuer d'atterrissage de prĂ©cision près des sites susceptibles d'ĂŞtre retenus pour le programme Apollo ; les responsables de la NASA devront partir de l'hypothèse que les constatations faites sur les propriĂ©tĂ©s du sol lunaire par les missions Surveyor s'appliquent aux futurs sites d'atterrissage des missions habitĂ©es. Cette hypothèse s'avèrera fondĂ©e[60].

Galerie de photos prises par des sondes Surveyor

  • MosaĂŻque de photos du cratère Tycho prises par Surveyor 7.
    Mosaïque de photos du cratère Tycho prises par Surveyor 7.
  • Petit cratère photographiĂ© par Surveyor 1.
    Petit cratère photographié par Surveyor 1.
  • Surveyor 7 avant et après une brève mise Ă  feu des moteurs verniers pour tester la tenue mĂ©canique du sol lunaire.
    Surveyor 7 avant et après une brève mise à feu des moteurs verniers pour tester la tenue mécanique du sol lunaire.
  • Surveyor 7 : terrain vallonnĂ© au nord est du site d'atterrissage.
    Surveyor 7 : terrain vallonné au nord est du site d'atterrissage.

Notes et références

Notes

  1. En 1892, le géologue américain Grove Karl Gilbert est le premier à attribuer la création de tous les cratères lunaires à des impacts en expliquant le mécanisme qui leur donne. Mais la théorie dominante au cours du demi-siècle suivant déclare que les cratères sont dus à des phénomènes volcaniques. L'astrophysicien et industriel Ralph Belknap Baldwin (en) apporte des arguments solides dans son ouvrage The Face of the Moon publié en 1949, fruit de ses observations et de ses connaissances dans le domaine des explosifs. À la fin des années 1950, cette explication par des impacts de météorites n'est pas encore totalement approuvée.
  2. Le JPL a un droit de veto sur les orientations de programme de la NASA qui le concernent. Il est administré (théoriquement) par Caltech à qui la NASA verse la somme annuelle de 2 millions US$ pour cette prestation (une somme très importante à cette époque). Ces clauses contraignantes sont acceptées par les dirigeants de la NASA qui espèrent bénéficier en retour de contacts privilégiés avec le monde universitaire et celui de la recherche par le biais du JPL. Paradoxalement, celui-ci est à l'époque peu apprécié des chercheurs qui reprochent aux membres du centre leur désinvolture dans le développement des charges utiles scientifiques et leur absence de considération pour le travail qu'ils effectuent.
  3. Hughes Aircraft, North American, Space Technology Laboratories et McDonnell Aircraft
  4. Le guidage assuré par l'étage Centaur est si précis qu'il crée un problème : la sonde Surveyor disposait d'une certaine quantité de carburant pour corriger sa route sur la trajectoire Terre-Lune mais ce carburant se révéla superflu du fait de la qualité de la prestation de l'étage Centaur. Les ingénieurs du JPL durent trouver une solution pour se débarrasser de cet excès de poids avant l'atterrissage sur la Lune.
  5. Les chiffres dans ce paragraphe sont ceux du vol de Surveyor 1 avec injection directe vers la Lune.
  6. Toutes ces actions sont déclenchées au moyen de petites charges pyrotechniques qui libèrent des goupilles et la séparation/mise en position a recours à des ressorts.
  7. La poussée de la rétrofusée dépend de la température du moteur qui permet une combustion chimique plus ou moins efficace. Cette température dépend à son tour de l'exposition au Soleil de la structure externe de la rétrofusée, facteur mal maitrisé par les concepteurs de la sonde.

Références

  1. (en) Office of Planetary Protection, « All of the planets, all of the time : Solar System Missions », NASA, (consulté le ).
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  7. (en) Don E. Wilhelms, To a Rocky Moon : A Geologist's History of Lunar Exploration, (lire en ligne), chap. 1 (« A Quiet Prelude 1892–1957 »), p. 26-27
  8. (en) Don E. Wilhelms, To a Rocky Moon : A Geologist's History of Lunar Exploration, (lire en ligne), chap. 1 (« A Quiet Prelude 1892–1957 »), p. 19-20
  9. (en) Don E. Wilhelms, To a Rocky Moon : A Geologist's History of Lunar Exploration, (lire en ligne), chap. 3 (« The Earthbound View 1961–1963 »), p. 67-69
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  60. (en) Dean Eppler (NASA), Data Collection by Robotic Precursors in Support of Projet Apollo, (lire en ligne [PDF]), p. 18.

Sources

Ouvrage de référence :

  • (en) David M. Harland, Paving the way for Apollo 11, Springer, , 472 p. (ISBN 978-0-387-68131-3)
    Histoire détaillée des programmes de sondes lunaires américaines (Surveyor, Ranger, Lunar Orbiter) liés au programme Apollo.

Ouvrages de la NASA :

  • (en) Oran W. Nicks, Far travelers : The Exploring Machines, (lire en ligne)
    Monographie de la NASA sur les sondes spatiales de la NASA (document NASA n° Special Publication-480).
  • (en) Virginia P. Dawson et Mark D. Bowles, Unmanned Space Project Management Surveyor and Lunar Orbiter, (lire en ligne)
    Histoire des programmes Surveyor et Lunar Orbiter (document NASA n° Special Publication-4901).
  • [PDF] (en) NASA, Surveyor Program Results, (lire en ligne)
    Résultats scientifiques du programme (document NASA n° Special Publication-184).
  • (en) NASA Surveyor Project staff, Surveyor V mission report Part I Mission Description and Performance (technical report 32-1246,
    Rapport technique effectué à la suite du vol de Surveyor V.
  • [PDF] (en) Erasmus H. Kloman, Taming Liquid Hydrogen : the Centaur upper stage rocket (1958-2002), (lire en ligne)
    Histoire du développement de l'étage Centaur (document NASA n° Special Publication-4230).
  • [PDF] (en) Sam W. Thurman, Surveyor Spacecraft Automatic Landing System, (lire en ligne)
    Exposé sur le déroulement de l'atterrissage des sondes Surveyor.

Autres :

  • (en) Don E. Wilhelms, To a Rocky Moon : A Geologist's History of Lunar Exploration, (lire en ligne)
    Histoire de la recherche scientifique sur la Lune au début de l'ère spatiale (1957-1972)
  • (en) Andrew J. Ball et al, Planetary Landers and entry Probes, Cambridge University Press, , 340 p. (ISBN 978-0-521-12958-9)
    Concepts des atterrisseurs et analyse des principaux développements dans le domaine.

Annexes

Articles connexes

Lien externe

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