Gaz de couche
Le « gaz de couche » parfois dit « gaz de houille » [1] (expression qui a aussi un autre sens) ou gaz de charbon, est un gaz, principalement constituĂ© de mĂ©thane, qui est piĂ©gĂ© (adsorbĂ©) au cĆur de la matrice solide du charbon (charbon bitumineux et anthracite surtout) dans les bassins houillers, dans les micropores du charbon non exploitĂ© ou incomplĂštement exploitĂ©. Ce gaz a d'abord Ă©tĂ© connu comme « grisou », si redoutĂ© des mineurs en raison des explosions souvent mortelles de poches de gaz accumulĂ© dans certaines galeries.
ClassĂ© dans la famille des gaz de roche-mĂšre et localement extrait de couches de charbon non exploitable car « soit trop profondes, soit de trop mauvaise qualitĂ© pour donner lieu Ă une exploitation miniĂšre classique » (comme dans le cas des charbons de bas-rang du bassin de la Powder River), il est (selon un bilan de l'IFP publiĂ© en 2013) exploitĂ© industriellement « dans plus d'une douzaine de pays dans le monde »[2]. Son origine gĂ©ologique est principalement « thermogĂ©nique », mais il contient une certaine proportion de « gaz biogĂ©nique »[3] (d'origine bactĂ©rienne, produit par certaines archaeobacteriae dites « mĂ©thanogĂšnes »[4]). Ă grande profondeur lĂ oĂč le charbon n'a pas Ă©tĂ© exploitĂ©, ce gaz est prĂ©sent sous forme quasi-liquide en raison de la pression Ă laquelle il est soumis, mais il est gĂ©nĂ©ralement fortement « adsorbĂ© » dans la matrice charbonneuse.
Les caractĂ©ristiques physiques et chimiques du charbon, ainsi que sa profondeur (pression/tempĂ©rature) conditionnent la plus ou moins grande capacitĂ© d'un charbon Ă adsorber et dĂ©sorber le mĂ©thane[5] Ă un « rythme d'exploitation » plus ou moins rapide (variable dans l'espace et dans le temps). Selon sa nature et son histoire gĂ©ologique le charbon est en effet plus ou moins saturĂ© en gaz de couche[6]. Dans les meilleurs gisements (par exemple le bassin houiller de la riviĂšre Powder dans le Wyoming), contrairement Ă beaucoup de « gaz naturels conventionnels », le mĂ©thane de houille contient trĂšs peu d'hydrocarbures plus lourds (tels que le propane ou le butane, peu d'azote (moins de 3 %[7]) et peu de CO2 (moins de 3 %[7]). Toutefois, certaines veines de charbon (telles que celles de certaines rĂ©gions de lâllawarra Coal Measures, dans le NSW, Australie) contiennent naturellement peu de mĂ©thane et beaucoup de CO2.
Son comportement in situ (en profondeur et sous haute pression) est encore mal compris (il ne peut ĂȘtre dans ces conditions assimilĂ© Ă un gaz parfait, de plus sa composition varie, de mĂȘme que celle des charbons dans lesquels il est adsorbĂ©), mais dans certaines conditions, il peut ĂȘtre dĂ©sorbĂ© et valorisĂ© comme source d'Ă©nergie ou de carbone pour la carbochimie, mais câest aussi un puissant gaz Ă effet de serre sâil est perdu dans lâatmosphĂšre et, comme toutes les sources dâĂ©nergies fossiles, il produit du CO2 quand on le brĂ»le.
Vocabulaire
Les anglophones utilisent le sigle CBM pour « coalbed methane » qui désigne de maniÚre générale le méthane houiller, alors que le sigle ECBM (pour enhanced coal bed methane) désigne le méthane extrait de la houille au moyen des techniques modernes[8].
Il fait partie des « gaz naturels non conventionnels » (avec les gaz de schiste, les hydrates de méthane (clathrates sous-marins ou des pergélisols), ou le CH4 dissous dans certaines eaux souterraines salines)[9].
En Australie, on parle de « coal seam gas » (en abrégé CSG[10]).
De petites failles ou fractures naturelles des couches de charbon (dites « cleats » pour les anglophones) peuvent également accumuler du grisou si elles ne sont pas remplies d'eau, par exemple aprÚs un pompage ou dans une zone de cÎne de rabattement de nappe.
Caractérisation et typologies des gaz de couche
Selon l'origine, thermique ou biogénique
Le gaz dĂ©sorbĂ© d'une couche de charbon est le plus souvent principalement d'origine thermique, Ă©tant issu de la dĂ©gradation de la matiĂšre organique par pyrolyse lente sous l'effet de la pression et de la chaleur au fur et Ă mesure que le charbon s'enfonce dans le sous-sol. Cependant la part biogĂ©nique (produite par des microbes en phase anaĂ©robie, il y a des millions d'annĂ©es) varie de 10 % Ă plus de 90 %[11], et certains gisements prĂ©sentent une part biogĂ©nique plus importante, voire dominante, notamment dans certains charbons sub-bitumineux et de haut rang d'houillification : on en connait dans plus de trente bassins houillers dans le monde, le plus riche Ă©tant est celui du « Bassin houiller de la riviĂšre Powder » (Powder River Basin) dans le Wyoming riche en mines Ă ciel ouvert. Dans ces charbons sub-bitumineux, environ 89 % du mĂ©thane est d'origine biogĂ©nique et le gaz biogĂ©nique de ce bassin reprĂ©sente environ 15 % des ressources en gaz de couche des Ătats-Unis, la production en charbon reprĂ©sentant environ 40 % de la production totale des Ătats-Unis (en 2011).
L'analyse isotopique du gaz permet de préciser son origine.
Selon la technologie
En raison du comportement diffĂ©rent des gaz adsorbĂ©s dans un charbon, la composition du gaz extrait Ă partir d'une mĂȘme couche de charbon (quel que soit son rang) peut considĂ©rablement varier selon la profondeur et les techniques de « stimulation », « dĂ©sorption » et extraction utilisĂ©es : technique passive de rĂ©cupĂ©ration (pour le grisou), active (du pompage Ă la dĂ©sorption par mise en dĂ©pression, Ă©ventuellement aprĂšs une activation par cavitation ou fracturation du gisement) et plus ou moins assistĂ©e ou rĂ©activĂ©e par des techniques de stimulation du gisement, par fracturation hydraulique, injection de produits chimiques, etc.) (voir exemple ; tableau ci-dessous, pour l'Allemagne sur la base des donnĂ©es disponibles en 2002, selon Thielemann (2002)[12].
Teneurs mesurées en Allemagne pour cinq composants (en % du volume extrait) du gaz de couche (en gras) et du gaz de mine/grisou selon Thielemann ()[12] | ||||
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Gaz (Composé chimique) | Symbole chimique | Gaz de couche | Gaz de mine/grisou (activement pompé) | Gaz de mine/grisou spontanément désorbé dans les mines désaffectées |
MĂ©thane | CH4 | 90 - 95 Vol.-% | 25 - 60 Vol.-% | 30 - 95 Vol.-% |
Dioxyde de carbone | CO2 | 2 - 4 Vol.-% | 1 - 6 Vol.-% | 1 - 15 Vol.-% |
Monoxyde de carbone | CO | 0 Vol.-% | 0,1 - 0,4 Vol.-% | 0 Vol.-% |
OxygĂšne | O2 | 0 Vol.-% | 7 - 17 Vol.-% | 0 Vol.-% |
Azote | N2 | 1 - 8 % | 4 - 40 % | 5 - 32 % |
Histoire
Ce gaz a d'abord été connu comme « grisou », si redouté des mineurs en raison des explosions souvent mortelles de poches de gaz accumulé dans certaines galeries.
Des colons américains du Wyoming en ont aussi trouvé de petites quantités, d'origine a priori biogénique et issu de charbons de bas rang superficiels ou d'origine thermique et provenant alors de charbons de haut rang[13], en forant des puits de prélÚvement d'eau dans des zones charbonneuses superficielles[13], en particulier dans le bassin de la Powder River lors de forages peu profonds visant à trouver de l'eau dans les années 1950 (source : Olive, 1957 cité par JonesDeBruin1990[13]). Quelques forges ou ranches de cette région en ont ainsi utilisé pour leurs besoins en énergie dÚs 1916[13].
Ă la fin du XXe siĂšcle, alors que les gisements pĂ©troliers et gaziers conventionnels sâĂ©puisent, une filiĂšre industrielle « gaz de houille » apparait (dans les annĂ©es 1980 aux Ătats-Unis[14]). En 2013, elle est principalement active aux Ătats-Unis, au Canada et se dĂ©veloppe en Australie qui en possĂšde aussi de riches gisements[10] - [14], mais la Chine, la Russie et moindrement lâInde disposent des principales ressources mondiales[14]. En Europe, le Royaume-Uni, la Pologne, la France et la Belgique font de la prospection[14] (Ă©tudient l'exploitation du grisou de dĂ©gazage de mines ou de site en attente d'ĂȘtre exploitĂ© par des galeries de mines[15].
L'industrie miniÚre et gaziÚre porte ses efforts sur les méthodes permettant de le désorber de sa matrice en exploitant des puits spéciaux aboutissant à des forages dirigés, horizontaux ou suivant le pendage de la veine de charbon, l'absence de galeries et de personnel réduisant le coût.
Essentiellement constituĂ© de mĂ©thane, le gaz de couche est aussi un puissant gaz Ă effet de serre (le mĂ©thane est Ă court terme plus de vingt fois plus actif que le CO2 en termes de facteur de rĂ©chauffement de lâatmosphĂšre.), ce qui explique pour partie que cette exploitation soit source de controverses.
Technologies dâextraction
L'extraction du gaz de couche se fait selon deux approches.
La récupération « passive » du grisou
Le grisou est « naturellement » exprimé dans tous les vides creusés dans le charbon et a fortiori par des mines de charbon anciennes.
Sa rĂ©cupĂ©ration se pratique par exemple en France depuis les annĂ©es 1970 avec MĂ©thamine (devenu Gazonor) dans le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais en France. Cette activitĂ© nâest pas source de polĂ©miques, puisque ce grisou est spontanĂ©ment libĂ©rĂ© dans les vides rĂ©siduels (700 millions de mĂštres cubes de vides[16] originellement laissĂ©s par les 2 milliards de tonnes de charbon et stĂ©riles extraites de ce seul bassin[16]) par le charbon mis hors dâeau.
Ce gaz est valorisé comme combustible. La combustion du méthane, qui sans cela s'échapperait à l'atmosphÚre et contribuerait fortement à l'effet de serre, permet de le transformer en CO2 dont le potentiel de réchauffement global (PRG) est trÚs inférieur (par définition, le PRG du CO2 est égal à 1, alors que celui du méthane est de 25 à 100 ans et de 72 à 20 ans). En France, la récupération et la combustion du grisou permet d'éviter l'émission de 500 000 t/an de CO2éq (en 2017)[17].
La production de grisou est dans une certaine mesure auto-entretenue : aprĂšs la mise hors dâeau, du grisou peut se dĂ©sorber lentement dans la cavitĂ©, puis le changement de pression dans la matrice modifie favorablement la porositĂ© et la permĂ©abilitĂ© du charbon par des mouvements de rĂ©traction et gonflement de la matrice charbonniĂšre. Une fois le gaz dĂ©sorbĂ©, la pression quâil exerçait dans les pores et micropores du charbon diminue et ceux-ci rĂ©trĂ©cissent ; le dĂ©bit dâexpulsion du gaz par le charbon diminue tandis qu'au contraire, le rĂ©trĂ©cissement des pores fait que l'ensemble de la matrice se dĂ©compresse, ce qui peut augmenter la libĂ©ration du gaz circulant plus ou moins rapidement dans la couche selon sa porositĂ©. Dans dâanciens bassins trĂšs exploitĂ©s tels que le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais, lâimportance des affaissements et dĂ©rĂšglements de surface laisse penser que les couches sont notablement fracturĂ©es. Câest ainsi que Gazonor a pu et peut encore exploiter des quantitĂ©s significatives de mĂ©thane remontant spontanĂ©ment des anciens rĂ©seaux de puits et galeries des houillĂšres.
La récupération assistée de gaz de couche
1) par pompage et mise en dépression du charbon,
2) par « cavitation » associée au pompage mise en dépression. En bleu : l'eau, en rose : le méthane qui était piégé dans le charbon (gaz de couche)
La récupération assistée exploite les techniques pétroliÚres ou gaziÚres de forage pour extraire plus de gaz du charbon.
AprÚs avoir d'abord utilisé (comme dans l'industrie pétroliÚre) des forages verticaux, depuis quelques années et en s'inspirant des techniques développés pour le gaz de schiste, divers opérateurs gaziers cherchent à exploiter plus intensément le gaz de couche dans le charbon par des forages dits horizontaux (en réalité d'abord verticaux puis orientés de maniÚre à suivre la direction de la veine de charbon, en s'inscrivant dans son épaisseur, dans une « plage » de 100 à 1 500 mÚtres voire plus).
Diverses techniques de fracturation ou de « stimulation de la roche mĂšre » peuvent aussi ĂȘtre utilisĂ©es.
La technique devenue la plus courante consiste à mettre en dépression la veine de charbon en lui soutirant au moyen d'une pompe puissante l'eau qu'elle contient. De l'eau et du gaz sont de la sorte libérés et ensuite séparés dans le puits de remontée et/ou en surface. Le gaz est ensuite séché puis envoyé à une station de compression qui l'injecte dans un gazoduc.
RĂ©cemment et aux Ătats-Unis, des logiciels ont Ă©tĂ© crĂ©Ă©s pour permettent Ă quelques opĂ©rateurs de surveiller Ă distance les mesures de pression/dĂ©pression de « plusieurs centaines Ă plusieurs milliers de puits Ă la fois, rĂ©partis sur des centaines d'hectares », afin de dĂ©tecter les pannes et besoins de maintenance au plus tĂŽt[18].
L'« eau de production » est l'eau qui Ă©tait prĂ©sente dans le charbon, et celle involontairement aspirĂ©e dans d'Ă©ventuelles nappes proches (rabattement de nappe induit par le pompage). Ces eaux peuvent ĂȘtre Ă©vacuĂ©es de diffĂ©rentes façons : via une rĂ©injection dans des formations gĂ©ologiques isolĂ©es ; par Ă©vaporation Ă partir de « bassins d'Ă©vaporation » ; rejet dans les cours d'eau ou parfois dans un rĂ©seau d'irrigation. Dans tous les cas, des prĂ©cautions s'imposent en raison d'une charge minĂ©rale souvent trĂšs Ă©levĂ©e (principalement du bicarbonate de sodium, des chlorures et traces de mĂ©taux lourds ou de radionuclĂ©ides antĂ©rieurement piĂ©gĂ©s dans le charbon).
Les techniques dâextraction horizontale tendent Ă se gĂ©nĂ©raliser (95 % des sites actuels de production de gaz de couche dans le monde (l'INERIS BRGM 2013).
Ces techniques sont plus adaptĂ©es aux couches de charbon les plus Ă©paisses, peu faillĂ©es et peu plissĂ©es, ou supposent une parfaite maitrise des forages et une trĂšs bonne connaissance de lâĂ©paisseur, largeur, pendage et plis des couches de charbon Ă exploiter (informations acquises ou approchĂ©es par l'analyse sismique, l'Ă©tude d'Ă©chantillons et la modĂ©lisation du sous-sol...).
Des essais et projets envisagent des exploitations par forages horizontaux exĂ©cutĂ©s Ă partir d'une mĂȘme plate-forme en surface.
La technique de mise en dĂ©pression par pompage d'eau permet thĂ©oriquement d'extraire des gaz piĂ©gĂ©s dans le charbon (naturellement micro-fracturĂ©) plus facilement que dans les schistes, sans fracturation hydraulique (« fracking » pour les anglophones), mais selon un rapport de l'INERIS et du BRGM (2013), des techniques de « fracturation » sont de plus en plus utilisĂ©es, et [« trĂšs semblables » Ă celles mises en Ćuvre pour l'exploitation des gaz et huiles de schiste (grandes quantitĂ©s d'eau, adjuvants chimiques, injection de proppant ou agents de soutĂšnement) du massif, ou des techniques de « stimulation »][19] alternatives (sans injection de produits chimiques). Ces techniques sont utilisĂ©es en dĂ©but d'exploitation ou durant celle-ci pour relancer une production faiblissante[14]. Elles visent Ă accroĂźtre la porositĂ© et la permĂ©abilitĂ© de la roche-mĂšre aux gaz et Ă l'eau, qui sont alors plus facilement drainĂ©s vers les puits Ă partir des « nappes » de houille, et avec des dĂ©bits plus importants ; « les configurations de gisement ne nĂ©cessitant pas ce type de travaux prĂ©alables demeurent en effet rares Ă lâĂ©chelle internationale »[14].
Alternatives : plusieurs procĂ©dĂ©s de gazĂ©ification in situ de veines souterraines de charbon ont Ă©tĂ© tentĂ©s[20] Ă la fin du XXe siĂšcle, mais avec des rĂ©sultats mitigĂ©s ou mauvais[20] ; des risques de feux de mines existent si l'on opĂšre de mĂȘme prĂšs de la surface.
On a aussi cherché à fabriquer des carburants liquides à partir du charbon[21].
La perméabilité des réservoirs
La permĂ©abilitĂ© du rĂ©servoir (ensemble de veines de charbon) est un facteur-clĂ© pour lâexploitation du gaz car elle a une grande influence sur les propriĂ©tĂ©s physicochimiques d'un gaz de couche mais surtout sur son accessibilitĂ© et sur sa vitesse de dĂ©sorption ; de trĂšs lente dans un substrat peu permĂ©able Ă trĂšs Ă©levĂ©e dans un charbon trĂšs poreux ou en situation de dĂ©compression ou au contraire de forte surpression[22]. Les charbons micro-poreux aux pores de moins de deux nanomĂštres contiennent et dĂ©sorbent le plus de gaz de couche. La porositĂ© est liĂ©e au « type macĂ©ral »[5].
La houille constitue un rĂ©servoir assez faiblement permĂ©able pour ce mĂ©thane. Selon le type de charbon, le substrat-rĂ©servoir prĂ©sente une structure en microfeuillets et/ou microfracturĂ©e, selon deux types de microfractures : en rĂ©seaux de microfissures « bout-Ă âbout » (matrice plus permĂ©able) ou « Ă angles droits » (moindre permĂ©abilitĂ©) avec un rapport de 1 Ă 17 entre ces permĂ©abilitĂ©s ; on dit que cette permĂ©abilitĂ© est anisotrope.
Ă grande Ă©chelle, des rĂ©seaux de microfailles et failles ou des effets de pression diffĂ©rentiĂ©e de la veine modulent la permĂ©abilitĂ© au sein dâune mĂȘme veine, de mĂȘme que la proximitĂ© des limites de la veine (« frontiĂšres lithologiques »).
Ă petite Ă©chelle, lâĂ©coulement des fluides dans les rĂ©servoirs de mĂ©thane houiller emprunte gĂ©nĂ©ralement des chemins orthogonaux. Cette mauvaise permĂ©abilitĂ© fait que les aires de drainage autour des puits de mĂ©thane de houille sont souvent de forme elliptique. Ă cette Ă©chelle, la permĂ©abilitĂ© dĂ©pend de :
- la quantité /densité des pores / volume moyen) ;
- les types de pores (forme) ;
- la connectivité des pores entre eux (« porosité libre » / « porosité piégée »).
Ces caractéristiques varient selon le « lithotype » dominant dans la zone exploitée.
La taille et la connectivitĂ© des pores peuvent ĂȘtre mesurĂ©es par le pĂ©trographe sur des Ă©chantillons frais par « porosimĂ©trie au mercure »[22] - [23] jusquâĂ des pores dâenviron 0,003 ÎŒm au moins[24]. Les Ă©chantillons peuvent ĂȘtre dĂ©shydratĂ©s afin que la prĂ©sence d'eau dans la roche ne fausse pas la mesure de porositĂ©[25].
La profondeur et le type de « gisement » sont aussi deux paramĂštres importants de la pression de remplissage des pores et sur la nature des gaz qui s'y logent. Ces paramĂštres sont pris en compte pour tenter de modĂ©liser diffĂ©rents types de rĂ©servoirs de gaz de houille[26]. Des tests de sorption sous haute pression d'un gaz (mĂ©thane) ou multigaz (ex : mĂ©thane, hydrocarbures plus lourds, azote et/ou CO ou CO2) peuvent aussi ĂȘtre faits, mais ils sont faits sur des charbons « secs » remontĂ©s du fond, dont les caractĂ©ristiques ont pu changer[26].
Propriétés intrinsÚques affectant la production de gaz
Le gaz de houille est essentiellement constituĂ© de mĂ©thane, avec une faible proportion dâĂ©thane, dâazote, de dioxyde de carbone et de quelques autres gaz. Les propriĂ©tĂ©s intrinsĂšques de chaque charbon dĂ©terminent la composition exacte du gaz, et la quantitĂ© de gaz qui peut en ĂȘtre extraite[27].
Porosité du charbon
Le porosité des réservoirs de houille est habituellement trÚs faible (de 0,1 à 10 % dans le meilleur des cas).
Teneurs et capacité d'adsorption du charbon
La capacité d'adsorption du charbon est mesurée par le volume de gaz adsorbé par unité de masse de charbon. Elle est habituellement exprimée en SCF (standard cubic feet, le volume (en pieds cubes dans les pays anglosaxons) mesuré aux conditions normales de température et de pression) de gaz par tonne de charbon. En France, la teneur effective ou potentielle d'un charbon en gaz (CH4 seul ou avec d'autres gaz) s'exprime en mÚtres cubes de CH4 (et/ou de CO2) par tonne de charbon.
La plus grande partie du gaz prĂ©sent dans les couches de charbon l'est sous forme adsorbĂ©e. Quand un « rĂ©servoir » est mis en production, câest dâabord lâeau prĂ©sente dans les espaces de fracture qui est pompĂ© ; cette mise en dĂ©pression amĂ©liore ou provoque la dĂ©sorption du gaz Ă partir de la matrice charbonneuse.
La teneur rĂ©elle d'un charbon en place peut parfois ĂȘtre faible (voire nulle) par rapport Ă la capacitĂ© totale thĂ©orique d'adsorption, qui varie selon le type et la « qualitĂ© » du charbon. Le contexte gĂ©ologique a une grande importance ; pour un charbon formĂ© Ă la mĂȘme Ă©poque, voire dans un mĂȘme bassin, il a pu contribuer Ă une fuite du gaz Ă©mis lors de la houillification, ou au contraire Ă un bon piĂ©geage dans le charbon. On trouve ainsi des taux de mĂ©thane adsorbĂ© variant de 100 Ă 800 SCF/tonne pour les veines de charbon Ă©tudiĂ©es aux Ătats-Unis. L'INERIS cite pour sa part pour le CH4, des valeurs oscillant selon les conditions de formation gĂ©ologique du charbon entre 0 et 15 m3/t et « exceptionnellement » plus[28].
Perméabilité fracturale du charbon
Comme indiquĂ© prĂ©cĂ©demment, et conformĂ©ment Ă la thĂ©orie de la percolation, câest la permĂ©abilitĂ© permise par le rĂ©seau de micro-fracture qui dĂ©termine les voies dâacheminement du gaz dans la couche charbonneuse. Plus grande est cette permĂ©abilitĂ©, plus Ă©levĂ©e sera la production potentielle de gaz.
Dans la plupart des couches de charbon testĂ©es aux Ătats-Unis, cette permĂ©abilitĂ© Ă©tait de 0,1 Ă 50 millidarcys. La permĂ©abilitĂ© des rĂ©servoirs fracturĂ©s peut ĂȘtre augmentĂ©e en appliquant certains stress au rĂ©servoir, ce quâon fait avec les techniques de fracturation hydraulique qui doivent cependant ĂȘtre soigneusement maĂźtrisĂ©e pour ne pas pousser le gaz hors de la veine ou du systĂšme visant Ă le drainer jusquâau puits de rĂ©cupĂ©ration. Le charbon prĂ©sente une permĂ©abilitĂ© assez sensible aux stress mĂ©caniques, permettant ce que les industriels appellent des opĂ©rations de « stimulation » de la production.
Ăpaisseur de la formation et pression initiale du rĂ©servoir
La teneur en méthane varie fortement selon les conditions de la formation du charbon et selon la nature géologique du « réservoir » (intégrité, faillage, etc.).
LâĂ©paisseur de la couche de charbon nâest donc pas nĂ©cessairement proportionnelle au volume de gaz potentiellement extractible. Pour quâun rĂ©servoir libĂšre beaucoup de gaz, il faut quâil en contienne beaucoup et que la diffĂ©rence de pression entre le puits et la couche de charbon soit aussi importante que possible, comme c'est le cas avec n'importe quel rĂ©servoir productif.
Certaines formations de charbon (et de schistes) peuvent prĂ©senter des concentrations rentables de gaz quelle que soit l'Ă©paisseur de la formation et dâautres non. Par exemple, dans le bassin houiller de Cherokee (Sud Kansas), un puits a remontĂ© une quantitĂ© importante de gaz dâune couche de charbon peu Ă©paisse (1â2 pieds) alors quâune autre couche deux fois plus Ă©paisse nâa Ă peu prĂšs rien produit.
Composition macérale
Le potentiel gazier d'une veine de houille dĂ©pend aussi de la nature du charbon[5] ; et plus prĂ©cisĂ©ment de sa rĂ©partition, de sa structure (homogĂ©nĂ©itĂ©/hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ©) et, indirectement de sa composition en macĂ©raux (les macĂ©raux sont des entitĂ©s pĂ©trographiques ; l'Ă©quivalent microscopique des minĂ©raux, mais dans les roches fossiles dâorigine organique). La teneur en macĂ©raux et le type de charbon ne semblent pas avoir une importance directe, mais ils influencent indirectement (Ă plusieurs Ă©chelles) la microfissuration du charbon, qui elle a une grande importance pour la dĂ©sorption du gaz.
De maniĂšre gĂ©nĂ©rale, une teneur Ă©levĂ©e en vitrinite (caractĂ©ristique des charbons « brillants » est par exemple prĂ©dictive dâune chance plus Ă©levĂ©e d'extraction rentable (mais lente) de gaz de houille, alors quâune teneur Ă©levĂ©e en inertinite (caractĂ©ristique propre aux charbons mats) augure un mauvais rendement)[5], mais il existe des exceptions, encore mal comprises Ă cette rĂšgle (par exemple liĂ©s Ă la prĂ©sence de vastes systĂšmes de microfractures non minĂ©ralisĂ©es)[5]. Les minĂ©raux contenus dans le charbon ne jouent pas (ou pratiquement pas) de rĂŽle dans l'adsorption du « gaz de houille » mais il a Ă©tĂ© constatĂ© que certains charbons riches en minĂ©raux dĂ©sorbaient plus rapidement le mĂ©thane qu'ils contenaient[5].
Autres paramĂštres
Parmi les autres paramÚtres affectant notamment la densité en gaz du charbon figurent :
- la densité initiale du charbon ;
- la concentration initiale du gaz (en phase gazeuse) dans le charbon ;
- le seuil critique de saturation en gaz ;
- la saturation irréductible en eau ;
- la perméabilité relative (à l'eau et au gaz).
Rendements
En termes de taux de mĂ©thane et de soufre, la qualitĂ© du gaz de houille est souvent bonne, mais les rendements des puits dâexploitation sont gĂ©nĂ©ralement bien moindres que ceux exploitant des rĂ©servoirs conventionnels de gaz naturel, avec typiquement un maximum Ă environ 0,1 m3/s par forage (8 500 m3/j), et ils peuvent gĂ©nĂ©rer d'importants coĂ»ts initiaux voire des Ă©checs ou des problĂšmes environnementaux en cas de couches de charbon trop fines, ou perturbĂ©es par des lacunes et/ou discordances d'origine respectivement sĂ©dimentaires et gĂ©ologiques ou sismiques.
Les profils de production des puits sont généralement caractérisés par une courbe en cloche, avec une production de gaz qui augmente dans un premier temps alors que de l'eau est pompée dans la couche (phase de désorption maximale) avant un débit rapidement déclinant.
Certains opĂ©rateurs injectent du CO2 ou de l'azote sous trĂšs haute pression par un autre puits pour stimuler le gisement et « pousser » le gaz restant vers le puits dâextraction.
Qualité du gaz
Aspects chimiques et énergétiques
- La teneur en mĂ©thane du gaz de couche est gĂ©nĂ©ralement excellente et trĂšs rĂ©guliĂšrement supĂ©rieure Ă 90 % de mĂ©thane. Outre du CO, CO2, H2, N2, de la vapeur d'eau et des composĂ©s soufrĂ©s et acidifiants (H2S principalement), des produits indĂ©sirables tels que le radon et le mercure peuvent ĂȘtre prĂ©sents. Le soufre est nettoyĂ© par divers procĂ©dĂ©s de dĂ©sulfuration, mais on commence Ă avoir du mal Ă le commercialiser, le marchĂ© Ă©tant saturĂ©. Selon l'EPRI, le charbon contient naturellement de 0.02 Ă 0,25 ppm de mercure (avec une moyenne de 0,09 ppm, soit beaucoup de 1 Ă 2 ordres de grandeur de plus que dans le fioul), le mercure est un mĂ©tal volatil toxique, qui peut ĂȘtre condensĂ© par un refroidissement Ă basse tempĂ©rature, mais qu'il faut ensuite durablement entreposer dans de bonnes conditions.
- Si la teneur en mĂ©thane du gaz de houille est infĂ©rieure Ă 85 % de mĂ©thane, il peut ne pas ĂȘtre commercialisable ou injectable dans le rĂ©seau de gaz, bien quâĂ©ventuellement valorisable dans certaines centrales thermiques avec des configurations spĂ©cifiques de ces centrales.
Aspects physiques
- Une autre caractéristiques intéressante pour un éventuel exploitant, est de connaitre la répartition de l'hydrocarbure entre ses phases liquide et gazeuse[22]. En effet, selon la pression (notamment liée à la profondeur) et la qualité du charbon, la proportion d'hydrocarbure en phase gazeuse ou liquide varie ; un forage profond va libérer non pas un gaz mais un mélange gaz-condensats de gaz naturel désorbé à partir du charbon (plus ou moins naturellement ou artificiellement fragmenté (si cette fragmentation résulte d'une exploitation antérieure et que la désorption est spontanée, on parlera alors plutÎt de « grisou »).
La condensation diffĂ©rentielle du mĂ©lange doit ĂȘtre estimĂ©e par l'exploitant. Ceci se fait par un processus physique mathĂ©matiquement dĂ©crit par une Ă©quation diffĂ©rentielle, qui permet d'estimer (par calcul) la teneur en condensat d'un gaz de couche, et le coefficient de productivitĂ© en condensat en rĂ©gime gazeux[22]. Cette mĂ©thode de calcul notamment a Ă©tĂ© Ă©tablie sur la base d'expĂ©riences faites Ă la fin des annĂ©es 1980 en surface sur des « Ă©prouvettes » de charbon[22].
Controverses
L'utilisation de ce gaz et/ou ses techniques d'extraction font l'objet de controverses, principalement du fait de l'amalgame avec le gaz de schiste concernant les techniques d'exploitation ; d'abord aux Ătats-Unis et au Canada, et de la part d'ONG impliquĂ©es dans la protection de la nature ou de lâeau[29] - [30], et depuis fin 2010 en Europe, puis en en Australie oĂč le Premier ministre de la Nouvelle-Galles du Sud (B. OâFarell) a annoncĂ© vouloir interdire deux exploitations de gaz de houille, Ă la suite du fait que Ross Sunn, porte parole de lâAssociation des exploitants et producteurs de pĂ©trole australien a reconnu que « le forage, Ă diffĂ©rents degrĂ©s, a un impact sur les aquifĂšres adjacents », aprĂšs avoir durant plusieurs annĂ©es affirmĂ© le contraire selon B. OâFarell[31], et alors qu'une sĂ©rie de rĂ©gions administratives demandaient un moratoire sur les exploitations existantes[32].
Les reproches qui lui sont faits portent principalement sur les impacts environnementaux et sanitaires, directs et indirects. En thĂ©orie, dans la plupart des pays, ces impacts environnementaux auraient dĂ» ĂȘtre dĂ©crits par les Ă©tudes initiales dâimpacts puis limitĂ©s ou compensĂ©s par des mesures conservatoires ou compensatoires adaptĂ©es, sous le contrĂŽle des gouvernements et de certaines de leurs agences et ministĂšres, Ă lâoccasion des procĂ©dures d'autorisation dâexploration et d'exploitation, qui offrent gĂ©nĂ©ralement une occasion de consultation publique et d'enquĂȘte publique.
Les exploitants sont Ă©galement tenus d'obtenir des permis ou autorisations pour la construction pour les routes, de pipelines et de lâinfrastructure technique Ă©ventuelle, ainsi que pour les rĂ©injections ou rejets dâeaux usĂ©es. Ils devraient Ă©galement, thĂ©oriquement, rĂ©parer certains impacts environnementaux quand la loi le demande.
Cependant, ces techniques Ă©taient nouvelles, peu connues du public et des agences environnementales et leurs experts Ă©taient au sein des entreprises dâexploration ou dâextraction. De plus, les additifs chimiques utilisĂ©s nâĂ©taient pas mĂȘme connus de lâEPA (jusque fin 2010), les industriels arguant quâils relĂšvent du secret commercial ou de fabrication.
On reproche notamment au gaz de houille :
- Jusquâen 2010 au moins, les industriels gaziers semblent ne pas avoir fait preuve de transparence, mĂȘme envers les administrations qui auraient lĂ©gitimement du ĂȘtre informĂ©es. Ils ont notamment refusĂ© de divulguer au public, aux sĂ©nateurs amĂ©ricains, Ă lâĂtat de New-York et Ă divers ONG environnementales la liste des produits chimiques quâils injectaient dans les fluides de forage et de fracturation.
- Aux Ătats-Unis et au Canada oĂč des dizaines de milliers de puits ont Ă©tĂ© creusĂ©s en moins dâune dĂ©cennie, les forages et leur exploitation semblent avoir gĂ©nĂ©rĂ©, outre dâimportants impacts paysagers, des effets nĂ©gatifs imprĂ©vus (fuites de mĂ©thane ou de produits toxiques vers la surface ou les eaux potables) et dans certaines cas avec des effets graves pour lâenvironnement et la santĂ©, notamment dĂ©noncĂ©s par le film Gasland. Au Colorado la sociĂ©tĂ© EnCana a eu une amende de 371,000 dollars, la plus forte amende donnĂ©e Ă une sociĂ©tĂ© gaziĂšre pour un accident de 2004 qui a eu lieu Ă Divide Creek (importante fuite de mĂ©thane)[33].
- Un autre problĂšme est lâincertitude sur le comportement Ă moyen et long terme des couches explorĂ©es (ou enrichies en CO2 dans le cas dâune utilisation secondaire des pores du charbon comme sĂ©questrateur de carbone), dont en cas de tremblement de terre et/ou de remontĂ©e rapide dâaquifĂšres circulants (Ă la suite d'arrĂȘts de pompages industriels ou d'exhaure par exemple[34]). La porositĂ© du charbon, mais aussi la permĂ©abilitĂ© verticale et horizontale des couches qui entourent la veine de charbon (grĂšs, schistes, plus ou moins impermĂ©ables ou faillĂ©s) sont en gĂ©nĂ©ral Ă©valuĂ©es par modĂ©lisation. Or, ces paramĂštres sont importants et devraient ĂȘtre connus pour Ă©viter un drainage minier acide, notamment en prĂ©sence de systĂšmes artĂ©siens circulants[35].
- Au fil du temps, alors que les rendements baissent, les puits peuvent ĂȘtre de moins en moins espacĂ©s pour extraire le mĂ©thane restant.
- L'eau remontée peut contenir des taux importants ou excessifs de substances dissoutes toxiques ou indésirables (métaux lourds, radionucléides), en proportion variable selon le type de charbon et son degré de fracturation.
- Les prĂ©lĂšvements d'eau ou les forages traversant les aquifĂšres peuvent affecter la ressource gĂ©nĂ©rale en eau, de mĂȘme que les rejets dâeaux de mauvaise qualitĂ© en riviĂšre[36]. Ă titre dâexemple, selon le Wyoming State Geological Survey, lâextraction de gaz de couche a nĂ©cessitĂ© le pompage de 6 millions de barils dâeau souterraine (191 millions de gallons) rien que pour les couches de houille du « Powder River Basin » situĂ©e dans le sous sol sud du Montana et du Wyoming et la plupart de ces eaux a Ă©tĂ© rejetĂ©e dans des bassins dâĂ©vaporation ou rejetĂ©e en surface sans usages spĂ©cifiques[37], gaspillage dâeau jugĂ© en 2010 inconstitutionnel par un tribunal du Montana[37].
- Localement l'eau extraite des couches profondes est Ă©vaporĂ©e dans les grands bassins, produisant des eaux trĂšs salines et enrichies en mĂ©taux ou substances indĂ©sirables. Les oiseaux ou d'autres animaux (Ex. : Chinchilla) peuvent sây intoxiquer, et autour de certains de ces Ă©tangs la teneur en sel peut dĂ©grader la vĂ©gĂ©tation. RĂ©cemment, certaines entreprises gaziĂšres ont offert leur eau pour le refroidissement Ă des centrales Ă©lectriques (aprĂšs Ă©puration par osmose inverse) ou la rejettent dans des cours d'eau.
En France, l'INERIS et le BRGM ont en 2013 commandĂ© conjointement un rapport d'« analyse simplifiĂ©e des risques et impacts environnementaux appliquĂ©e au dĂ©ploiement de la filiĂšre », rĂ©alisĂ© sur la base d'une synthĂšse bibliographique centrĂ©e sur les retours d'expĂ©rience de la filiĂšre « gaz de houille » dans les pays oĂč elle a Ă©tĂ© mise en Ćuvre[14].
Enjeux, avantages espérés et inconvénients
Ce gaz prĂ©sente lâavantage de contenir plutĂŽt moins d'azote et bien moins de sulfure d'hydrogĂšne (acide, corrosif et toxique) que d'autres gaz naturels tels que le gaz de Lacq (trĂšs acide). Il peut ĂȘtre intĂ©grĂ© dans le rĂ©seau mondial de distribution sous forme de gaz naturel comprimĂ© et de gaz naturel liquĂ©fiĂ© (GNL), deux filiĂšres qui se sont dĂ©veloppĂ©es en Australie, en Chine et en IndonĂ©sie au dĂ©but des annĂ©es 2000.
Certains promoteurs de l'extraction du gaz de couche estiment que combinĂ©e au principe des « puits-couplĂ©s », il serait en outre possible de sĂ©questrer du CO2 Ă la place du CH4 en faisant prendre la place du second par le premier ; le CO2 injectĂ© par un puits dâinjection servant Ă pousser le mĂ©thane vers le puits dâextraction. Si toutes les mines de charbon connues Ă©taient utilisables et utilisĂ©es pour y stocker de la sorte du CO2 associĂ© dans le cadre dâune exploitation de type ECBM, le potentiel de stockage serait dâenviron 150 Gt de CO2[8], mais selon les analyses Ă©conomiques disponibles, seuls 5 Ă 15 Gt de dioxyde de carbone pourraient ainsi ĂȘtre Ă©ventuellement sĂ©questrĂ©s avec un bĂ©nĂ©fice net, 60 Gt de capacitĂ© supplĂ©mentaire de piĂ©geage peuvent ĂȘtre disponibles Ă un coĂ»t modĂ©rĂ© (de moins de 50 $ / t CO2 (aux conditions Ă©conomiques des annĂ©es 1990)[8], c'est-Ă -dire quasiment sans Ă©tudes dâimpacts ni compensations environnementales).
Des expĂ©rimentations sont en cours, mais les couches de charbon sont souvent hĂ©tĂ©rogĂšnes et/ou mises en contact avec de lâeau lors de leur fracturation, ou naturellement fracturĂ©es, ou fracturĂ©es par une exploitation ancienne comme dans les bassins miniers exploitĂ©s au XIXe et XXe siĂšcle. Le CO2 ainsi piĂ©gĂ© ne peut donc l'ĂȘtre de façon fiable et durable (John Gale et Paul Freund promoteurs de cette technique disent que ce CO2 sera « sĂ©questrĂ© pendant de nombreuses annĂ©es »[8], sans sâengager sur la durĂ©e de sĂ©questration) et considĂšrent quâil y a « des amĂ©liorations sont encore nĂ©cessaires » aux techniques dâorigine pĂ©troliĂšres utilisĂ©es, sans garantir que le CO2 ne puisse pas peu Ă peu remonter vers la surface ou poser problĂšme en changeant l'« hydrochimie et l'hydrogĂ©ohimie des couches profondes »[38] (le CO2 produit de l'acide carbonique dans l'eau, facteur dâacidification, qui favorise en outre la circulation de l'eau et des mĂ©taux toxiques dissous). Les teneurs en ions, la gĂ©ochimie minĂ©rale, mais aussi organique, les rĂ©actions d'oxydorĂ©duction et les Ă©quilibres adsorption/dĂ©sorption, etc. pourraient en effet ĂȘtre affectĂ©es[39], avec de consĂ©quences qui ne peuvent pas encore ĂȘtre apprĂ©ciĂ©es et qui vont varier selon la tempĂ©rature et la pression, les matĂ©riaux en place, la prĂ©sence Ă©ventuelle de failles, la nature de l'eau et des additifs injectĂ©s et selon que le milieu reste ou non saturĂ© en eau, sursaturĂ© au moment de la fracturation hydraulique puis Ă©ventuellement dĂ©saturĂ© lors de l'exploitation avec mise en dĂ©pression. De plus, le pompage d'eau profonde peut en remontant une eau sursalĂ©e modifier les grands Ă©quilibres chimiques (chlorures, sulfates, carbonates.. tels que dĂ©finis par le gĂ©ochimiste australien Chebotarev (1955) et ioniques et Ă©cologiques en surface[40].
Tendances mondiales
L'extraction du grisou de mines de charbon (c'Ă©tait d'abord une mesure de sĂ©curitĂ©) a conduit Ă le rĂ©cupĂ©rer (annĂ©es 1950) puis Ă tenter de le valoriser (annĂ©es 1970), avec des mĂ©thodes industrielles bien Ă©prouvĂ©es dans les annĂ©es 1990. ParallĂšlement le dĂ©veloppement du fracking et du forage dirigĂ© a permis d'amĂ©liorer les techniques d'exploitation de gaz de couche, dans les annĂ©es 2000 aux Ătats- Unis, ainsi qu'en Australie et au Canada.
Cependant, prospectivement parlant, l'avenir économique et industriel de ce gaz est discuté. Plusieurs facteurs influeront sur la rentabilité de son extraction et commerce :
- le développement du marché du gaz naturel ; selon l'industrie gaziÚre, la tendance est à une augmentation de plus de 50 % de la demande par rapport à la production de 2010, pour atteindre plus de 25 % de la demande mondiale d'énergie d'ici 2035[41].
- le prix de vente du gaz naturel et ses fluctuations. Une chute (par exemple constatĂ©e aux Ătats-Unis) peut rend l'extraction moins rentable.
- l'accessibilité des ressources. L'épuisement des ressources les plus riches, propres et faciles à atteindre pourrait ensuite dégrader la rentabilité de l'extraction.
- la législation : Dans le cadre des suites du protocole de Kyoto, l'évolution réglementaires devraient continuer à décourager l'utilisation des ressources fossiles au profit de ressources renouvelables et moins polluantes ;
- d'Ă©ventuelles ruptures technologiques ; de telles ruptures (ou des Ă©volutions systĂ©miques telles que promues par le concept de troisiĂšme rĂ©volution industrielle feraient perdre au gaz de touche tout intĂ©rĂȘt (hormis pour le cas particulier du dĂ©gazage (grisou) spontanĂ© des anciennes galeries de mine, qu'il vaut mieux rĂ©cupĂ©rer (et valoriser) pour des raisons de sĂ©curitĂ©.
En Amérique du Nord
C'est lĂ que ce gaz a commencĂ© Ă ĂȘtre exploitĂ© industriellement, aux Ătats-Unis qui disposant de plus d'une dizaine de bassins gĂ©ologiques adĂ©quat. PrĂšs de 10 % de la production gaziĂšre amĂ©ricaine proviendrait du gaz de couche, rentabilisĂ©e par l'exploitation conjointe du pĂ©trole et des hydrocarbures des condensats de gaz naturels. Mais comme au Canada, le dĂ©veloppement et la production de gaz de houille ont Ă©tĂ© ralentis par la rĂ©cession mondiale (crise de 2008)[41].
Le Canada a commencé à produire du gaz de couche (à partir de gisements bitumineux du crétacé). Il disposerait aussi de ressources potentielles dans certaines couches de charbons bitumineux et sub-bitumineux du Jurassique et du tertiaire dans les bassins sédimentaires de l'ouest du pays[41].
Les BRICs
Les grands pays émergents (BRICS, c'est-à -dire le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud ainsi que l'Indonésie qui dispose de potentialités couches de charbon tertiaire semianthracite à sub-bitumineux dans deux bassins sur Sumatra et trois dans l'ßle de Kalimantan[41]) ont une économie et/ou une démographie en forte croissance, qui nécessite de nouvelles ressources énergétiques. Certains d'entre eux disposent d'importantes ressources en charbon et gaz de couche et sont un peu moins contraints que les pays riches par les conventions internationales sur la lutte contre le réchauffement climatique (protocole de Kyoto et ses suites notamment). La Chine et l'Inde avaient commencé à explorer leurs ressources en gaz de houille dÚs les années 1900, mais les techniques de fracturation n'ont pas permis de test à grande échelle avant les années 2000[41] ; l'Indonésie et la Russie ont commencé à explorer leurs ressources en gaz de houille dans les années 2000[41] avec une premiÚre production aprÚs 2010[41] pour diminuer leur dépendance énergétique. Durant la période de récession entamée en 2008, les BRICs semblent avoir continué l'exploration.
Dans les annĂ©es 2010-2013, la Chine produit du gaz de couche et de mine Ă partir de charbons et anthracite du CarbonifĂšre et du permien dans le bassin de Qinshui et dispose de ressources potentielles (de mĂȘme Ăąge) dans le bassin de l'Ordos[41].
Dans les années 2010-2013, l'Inde produit du gaz de houille (à partir de couches de charbon/anthracite) dans 4 bassins datés du Permien, mais dispose de ressources potentielles dans 12-14 autres bassins et potentiellement dans 6 bassins de charbons sub-bitumineux qui se sont formés au tertiaires[41].
La Colombie et les Philippines seraient également intéressés par cette ressource[41].
Au Japon
Des gĂ©ologues japonais ont estimĂ© que les veines de charbon prĂ©sentes sous l'archipel du Japon et ses fonds marins pourraient potentiellement abriter 2,5 trillions de mĂštres cubes de CH4 (sous forme de gaz de couche notamment)[9] et potentiellement absorber environ 10 GT de CO2[9]. Cependant, le risque sismique est dans cette rĂ©gion du monde un risque majeur (associĂ© Ă celui de tsunami), qui met en question la fiabilitĂ© des matĂ©riels, puits, stockages dans la durĂ©eâŠ
En Australie
L'Australie produit du gaz de couche et de mine dans des gisements anciens (datant du Permien) de charbon et anthracite dans le bassin de Sydney, et Ă partir de charbon bitumineux dans les bassins de Bowen, Gunnedah et de Gloucester[41]. Une autre production provient de couches de charbons bitumineux (du Jurassique) dans les bassins de Surat et de Clarence-Moreton[41]. Presque tous les terminaux GNL (Gaz Naturel liquĂ©fiĂ©) d'Australie sont au moins en partie alimentĂ©s par du gaz de couche. Dans la rĂ©gion du Queensland, oĂč se trouve la grande barriĂšre de corail, plus de 90 % des besoins en gaz sont fournis par du gaz de couche exploitĂ©s dans la rĂ©gion.
L'Australie présuppose que la conversion du gaz de houille en GNL pourra permettre l'expansion des marchés gaziers d'Asie.
En Europe
Un projet europĂ©en « RECOPOL » (projet Ă©quivalent du projet amĂ©ricain Coal-seq lancĂ© pour trois ans en aux Ătats-Unis, par le dĂ©partement Ă l'Ă©nergie, DOE, avec AMOCO et BP (qui teste cette technique depuis les annĂ©es 1980), initiĂ© en , pour 3 ans, dont 18 mois d'expĂ©rience de terrain en Pologne, de 3,5 M⏠financĂ© Ă 50 % par le 5e PCRD (programme cadre pour la recherche) de rĂ©cupĂ©ration de mĂ©thane de couche dit « ECBM » (Enhanced Coal Bed Methane) et stockage souterrain de CO2 dans les veines de charbon par injection de CO2[42].
En France
La sociĂ©tĂ© Française de l'Ănergie fore, dĂ©but 2017, le sous-sol Ă Lachambre, prĂšs de Saint-Avold en Moselle, Ă la recherche du gaz de houille emprisonnĂ© entre 1.000 et 1 500 mĂštres de profondeur, dans des veines de charbon n'ayant jamais Ă©tĂ© exploitĂ©es. Elle n'utilise pas de fracturation hydraulique, interdite en France, ni d'eau ou de produits chimiques injectĂ©s, comme pour l'exploitation des gaz de schiste. Le gaz est extrait par diffĂ©rentiel de pression, en utilisant les fissures naturelles du charbon. Le sous-sol du bassin houiller mosellan reprĂ©sente l'Ă©quivalent de six ans de consommation de gaz en France. L'entreprise espĂšre mettre en service dans les prochaines annĂ©es plusieurs puits, gĂ©nĂ©rant une production de plus de 700 millions de mĂštres cubes sur douze ans[43].
Notes et références
- L'expression « gaz de houille » est utilisé par le ministre français Arnaud Montebourg (Montebourg plaide pour le gaz de houille "made in France" (Le Monde).
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- Française de l'Energie extrait le gaz de houille avec un procĂ©dĂ© inĂ©dit, Les Ăchos, 7 fĂ©vrier 2017.
Voir aussi
Articles connexes
- Fracturation hydraulique
- Fluide de fracturation
- Gaz naturel
- gaz de roche-mĂšre
- Gaz de schiste
- Gaz Ă effet de serre
- Ănergies fossiles
- Industrie pétroliÚre
- Houille, PĂ©trole, gaz naturel
- Stratigraphie
- Grisou/Gaz de mine
- Radon
- Micro-séismes induits
- Affaissements miniers
- Percolation
- point de rosée
- Condensat de gaz naturel
Filmographie
- Gasland, film documentaire américain de Josh Fox (2010)
Liens externes
- (fr)
Bibliographie
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