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Caroubier

arbre fruitier méditerranéen de la famille des Légumineuses
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Ceratonia siliqua

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Le caroubier[2],[3],[4](Ceratonia siliqua L.) est un arbre fruitier méditerranéen de la famille des Légumineuses (ou Fabacées).

Il est utilisé depuis l'Antiquité pour ses fruits (les caroubes), pour l'homme et le bétail. Capable de produire sur des terrains pauvres en marge des cultures ou sur des coteaux difficiles à cultiver, le caroubier a apporté une ressource vitale à de nombreux peuples de Méditerranée[5]. Arbre dioïque, ses individus sont mâles ou femelles, et portent rarement des fleurs hermaphrodites. Il est naturellement présent dans la végétation forestière ou pré-forestière thermophile de Méditerranée où il est souvent associé à Pistacia lentiscus[6]. Il trouve dans le bassin ouest méditerranéen son plus grand gradient écologique, allant de l'Anti-Atlas au Maroc à la Côte d'Azur en France.

Étymologie

Caroubier.
Tronc de caroubier - Muséum de Toulouse.

Le mot « caroubier » vient du berbère Akharruv (ⴰⵅⴰⵕⵓⵠ ) via l'arabe (الخروب /xarūb/)[7]. Son nom générique Ceratonia vient du grec ancien κεράτια signifiant « petite corne » (en référence à ses caroubes, gousses en forme de cornes à maturité). Le nom d'espèce, siliqua, désigne en latin une silique, ou gousse. Il est aussi appelé carouge, pain de saint Jean-Baptiste, figuier d'Égypte, fève de Pythagore.

Description

Fleurs de caroubier.
Gousses de caroubier.
Caroubes en vente.
Fruits mûrs de caroubier (Ceratonia siliqua) pendants sur l'arbre.

Le caroubier est un arbre mesurant de cinq à sept mètres de hauteur et pouvant atteindre exceptionnellement quinze mètres. Le tronc est gros et tordu, l'écorce brune et rugueuse. La frondaison abondamment fournie forme un houppier large. Il peut atteindre des âges important, certainement de plusieurs siècles comme l'atteste les individus remarquables par la circonférence impressionnante de leur tronc près de Ragusa en Sicile. Les feuilles, grandes de douze à trente centimètres, alternes, persistantes, sont composées paripennées et comptent de trois à cinq paires de folioles. De forme ovale, celles-ci sont coriaces, vert sombre luisant au-dessus, tirant sur le rouge sur leur face inférieure.

Les fleurs, très petites, mâles ou femelles, rarement hermaphrodites, constituées d'un calice pourpre sans corolle, sont réunies en grappes axillaires cylindriques. Elles apparaissent d'août à octobre. Les fruits, appelés « caroubes », sont des gousses pendantes de dix à trente centimètres de long sur un et demi à trois centimètres de largeur. Initialement vertes, elles deviennent brun foncé au stade de maturité, ce qui se produit au mois de juillet de l'année suivante. Elles sont courbées, coriaces, épaisses et indéhiscentes. Les graines de caroube sont brunes, de forme ovoïde aplatie, biconvexes et très dures. Elles sont séparées les unes des autres par des cloisons pulpeuses. On en compte de quinze à vingt par gousse. La pulpe jaune pâle contenue dans les gousses est farineuse et sucrée à maturité. Comestible, au goût chocolaté, elle est parfois consommée. Les graines ont servi d'unité de mesure dans l'antiquité. Une légende ancienne voulait que leur masse soit régulière, ce qui a été infirmé par une étude[8]. Leur nom est à l'origine du carat (emprunté à l'arabe "qirât"), qui représentait la masse d'une graine de caroube, dans le commerce des pierres précieuses. Actuellement l'appellation du carat est toujours utilisée comme unité de masse : 1 carat de diamant représente le diamètre et la masse correspondant d'une pierre taillée dans les bonnes proportions pour un diamant taille brillant rond 57 facettes de diamètre 6,4 mm. De même, siliqua, nom latin de la caroube, fut chez les Romains le nom d'une unité valant 1/6 de scrupule. En Allemagne, les graines de caroube torréfiées sont utilisées en substitution du café. On peut aussi sucer les graines comme des bonbons.

Origine et histoire

Le genre Ceratonia ne comporte que deux espèces, l'espèce sœur de C. siliqua étant Ceratonia oreothauma[9] arbre du sud de la Péninsule arabique (Oman, Yémen) et de d'Afrique de l'Est (Somalie). Le genre Ceratonia s'insère à la base de la phylogénie des Caesalpinioideae avec Acrocarpus comme genre frère[10]. Le caroubier a fait l'objet d'un vaste projet de recherche international portant sur son écologie, ses symbiotes racinaires et son histoire évolutive. La phylogéographie du caroubier, appuyée par la caractérisation de sa diversité génétique, la modélisation de ses niches climatiques et des données de paléobotanique ont permis de proposer une nouvelle hypothèse sur l'origine et l'évolution du caroubier [11]. Il apparaît notamment que le caroubier, différencié de son espèce sœur au Pliocène, a eu une grande distribution avant le Pléistocène, puis s'est raréfié lors des phases climatiques froides (glaciaires) et arides (interglaciaire)[11]. Les zones du Maroc et du sud de l'Espagne, protégées des fortes phases de continentalité hydrique par la proximité de l'océan, ont constitué des refuges où les populations du caroubier ont persisté lors des ères interglaciaires[11]. A l'est, le caroubier a trouvé refuge au niveau de zones montagneuses proches de la mer, par exemple en Crète ou au Mont Liban. La structure de diversité génétique observée supporte l'hypothèse d'une domestication du caroubier à partir de populations naturelles locales à l'ouest et à l'est de la Méditerranée, et non pas d'une domestication orientale unique[11]. L'ensemble de ces travaux publié dans la revue scientifique Journal of Biogeography a fait l'objet d'une synthèse dans La Garance Voyageuse: "Du nouveau sur l'histoire du caroubier"[12].

Culture

Le caroubier résiste mal au froid (il ne supporte pas les températures inférieures à - 5 °). Le caroubier femelle doit être pollinisé par un arbre mâle car c'est une espèce dioïque. Il donne vers l'âge de quinze ans des fruits comestibles et sucrés (en septembre/octobre) : les caroubes. Un arbre en pleine production peut fournir entre 300 et 800 kg de caroubes par an. Il est sensible à l'alternance bisannuelle[13].

Multiplication

Caroubes.
Ceratonia siliqua et leurs graines - Muséum d'histoire naturelle de Toulouse.

Les graines fraîches de caroubier germent normalement bien sans traitement préalable mais une fois qu'elles ont séché, elles deviennent très dures et n'absorbent plus l'eau empêchant ainsi la graine de germer.

Il faut alors tremper les graines dans l'acide sulfurique dilué (H2SO4) pendant une heure puis dans l'eau pendant vingt-quatre heures ou, en absence d'acide, les tremper dans de l'eau bouillante pendant quinze minutes en remuant puis laisser mariner pendant vingt-quatre heures. Le traitement à l'acide sulfurique remplace la relation entre la plante et l'animal qui habituellement mange la graine, la laisse "mariner" dans son tube digestif et ses sucs gastriques quelques heures puis la rejette.

La germination peut aussi être obtenue simplement par l'abrasion mécanique d'une portion limitée de la cuticule dure des graines de caroubier, avant trempage dans l'eau.

Composition de la caroube

Chaque caroube pèse une quinzaine de grammes et contient de la pulpe charnue constituée de 40 % de sucres (glucose et du saccharose), 35 % d'amidon, 7 % de protéines, et, dans des proportions plus faibles, des graisses, des tannins et des sels minéraux. La caroube est riche en calcium, phosphore, magnésium, silice, fer et pectine. Les propriétés épaississantes sont dues à la présence d'un sucre, le galactomannane.

Utilisation

Farine de caroube
Valeur nutritionnelle moyenne
pour 100 g
Apport énergétique
Joules 920 kJ
(Calories) (220 kcal)
Principaux composants
Glucides 90 g
Amidon ? g
Sucres ? g
Fibres alimentaires 40 g
Protéines 4,6 g
Lipides 0,6 g
Eau 3,6 g
Minéraux et oligo-éléments
Calcium 350 mg
Magnésium 55 mg
Phosphore 80 mg
Potassium 830 mg
Vitamines
Provitamine A 8 mg
Acides aminés
Acides gras

Source : aucune source

L'arbre

Le caroubier est cultivé dans les pays méditerranéens, notamment au Portugal, Espagne et en Sicile , en Crète où la production et la commercialisation des produits dérivés a repris depuis quelques années[14], et à Chypre où il est qualifié d' "or noir". En France, à Villefranche-sur-Mer on cultivait le caroubier au XIXe siècle ; la belle couleur rouge du bois était appréciée en marqueterie. La chanson traditionnelle et les dictons populaires en portent encore témoignage[15].

Cet arbre au beau feuillage procure une ombre appréciée dans les pays ensoleillés.

Le fruit

Au Maroc, quatrième pays producteur mondial de caroubes (2012), les Berbères zayanes l'utilisent pour ses vertus médicinales car, grâce à sa teneur élevée en fibres, elle exerce un effet régulateur sur la fonction intestinale et est utilisée dans les cas de diarrhée ou de constipation chez les enfants. Elle est alors administrée sous forme de préparation instantanée, comme un chocolat chaud.

Caroubier monumental près de Raguse en Sicile.

À Chypre, on transforme la caroube en une sorte de confiserie, appréciée comme sucrerie locale. La fabrication commence par le broyage des graines, une extraction à l'eau puis une concentration à chaud pendant plusieurs jours ; le sirop concentré est travaillé au crochet. Le résultat final se rapproche de la texture du sucre d'orge mais avec une couleur bien plus foncée.

On tire du caroubier deux produits très différents utilisés abondamment par l'industrie alimentaire : la farine de caroube et la gomme de caroube.

  • La gomme de caroube provient de l'endosperme blanc et translucide des graines, après élimination de la mince enveloppe brune qui le recouvre. Elle agit comme épaississant. Elle est surtout utilisée dans l'industrie alimentaire, mais aussi dans d'autres applications industrielles (industrie du papier, textile, pharmacie, cosmétiqueetc.).
  • La farine de caroube est obtenue à partir de la pulpe des gousses.

Alimentation humaine : si la consommation directe de caroubes n'a plus qu'une valeur anecdotique, la farine de caroube est utilisée de nos jours dans l'industrie agroalimentaire comme additif (code E410, épaississant ou gélifiant) pour les glaces, les pâtisseries, les aliments diététiques (pas de gluten dans la caroube), notamment comme succédané de cacao. La caroube, contrairement à son homologue le cacao, ne contient ni théobromine, ni caféine, deux alcaloïdes à l'action excitante sur l'organisme. Signalons toutefois que Guy Martin, le chef du Grand Véfour à Paris, n'hésite pas à employer des caroubes sèches entières dans ses recettes comme la soupe au chocolat (Recettes gourmandes, Éditions du Chêne, 1996).

  • En Tunisie, elle est utilisée comme base des boissons gazeuses appelées boga et cidre El-Meddeb.
  • Au Liban, le fruit est bouilli et son concentré donne une mélasse naturelle douce et onctueuse (debs kharoube). Mélangé à de la crème de sésame (tahini), il se mange avec du pain libanais. On lui prête une qualité de déconstipant.
  • Alimentation infantile : la farine de caroube est utilisée dans le lait en poudre pour bébé comme épaississant en remplacement de la traditionnelle farine de blé. Ce genre d'épaississant est recommandé pour lutter contre le reflux gastro-œsophagien infantile. Cette farine de caroube est censée être moins allergène que la farine de céréales.

Alimentation animale : les caroubes constituent un excellent aliment énergétique pour le bétail. On les incorpore parfois dans les aliments composés. Les lapins en raffolent.

Dans la culture
  • Poésie : on trouve de nombreuses références à ce fruit dans la littérature arabe et persane traditionnelle : Rouba'i-iatu Al-Khayyam (poèmes du Persan Omar Khayyam) ; poème d’Ahmad Rami dédié à la caroube.
  • Bible : les caroubes, carouges ou gousses, selon les traductions, sont mentionnées dans l’Évangile selon Luc dans la parabole du Fils prodigue (chapitre 15, verset 16). Ayant dilapidé toute la fortune donnée par son père, celui-ci « aurait bien voulu se remplir le ventre des caroubes que mangeaient les porcs, mais personne ne lui en donnait. »

Production

Production en tonnes (données FAOSTAT de la FAO)
Pays 2003 2004
Espagne 67 403 36,9 % 67 000 33,1 %
Maroc 24 000 13,1 % 40 000 19,7 %
Italie 18 600 10,2 % 24 000 11,8 %
Portugal 20 000 11,0 % 20 000 9,9 %
Grèce 20 000 11,0 % 19 000 9,4 %
Turquie 14 000 7,7 % 14 000 6,9 %
Chypre 7 000 3,8 % 7 000 3,5 %
Algérie 4 600 2,5 % 4 600 2,3 %
Liban 3 200 1,8 % 3 200 1,6 %
Tunisie 1 000 0,5 % 1 000 0,5 %
Autres pays 840 0,5 % 840 0,4 %
Total 182 680 100 % 202 644 100 %

En 1856, 8 000 caroubiers ont été exportés d'Espagne vers le Texas, l'Arizona, la Californie et la Floride. L'espèce s'est répandue largement en Californie où elle est même considérée comme espèce invasive car l'arbre recèpe quand on le coupe et ses graines sont trop largement disséminées par les coyotes.

Notes et références

  1. IPNI. International Plant Names Index. Published on the Internet http://www.ipni.org, The Royal Botanic Gardens, Kew, Harvard University Herbaria & Libraries and Australian National Botanic Gardens., consulté le 13 juillet 2020
  2. « Caroubier », dans le Dictionnaire de l'Académie française, sur Centre national de ressources textuelles et lexicales (consulté le 22 mai 2016).
  3. Définitions lexicographiques et étymologiques de « caroubier » dans le Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales (consulté le 22 mai 2016).
  4. Entrée « caroubier » [html], sur Dictionnaires de français (en ligne), Larousse (consulté le ).
  5. Baumel A, Médail F, Viruel J, Sanguin H., « Le caroubier. Un arbre ancien et précieux sur le pourtour méditerranéen. », La Garance Voyageuse n°118,‎ , p. 118:25-29
  6. (en) Alex Baumel, Pascal Mirleau, Juan Viruel et Magda Bou Dagher Kharrat, « Assessment of plant species diversity associated with the carob tree (Ceratonia siliqua, Fabaceae) at the Mediterranean scale », Plant Ecology and Evolution, vol. 151,‎ , p. 185–193 (ISSN 2032-3921, DOI 10.5091/plecevo.2018.1423, lire en ligne, consulté le )
  7. (en) L. Ramón-Laca et D. J. Mabberley, « The ecological status of the carob-tree (Ceratonia siliqua, Leguminosae) in the Mediterranean », Botanical Journal of the Linnean Society, vol. 144, no 4,‎ , p. 431–436 (ISSN 0024-4074, DOI 10.1111/j.1095-8339.2003.00254.x, lire en ligne, consulté le )
  8. Lindsay A Turnbull, Luis Santamaria, Toni Martorell et Joan Rallo, « Seed size variability: from carob to carats », Biology Letters, vol. 2, no 3,‎ , p. 397–400 (ISSN 1744-9561, PMID 17148413, PMCID 1686184, DOI 10.1098/rsbl.2006.0476, lire en ligne, consulté le )
  9. D. Hillcoat, G. Lewis et B. Verdcourt, « A New Species of Ceratonia (Leguminosae-Caesalpinioideae) from Arabia and the Somali Republic », Kew Bulletin, vol. 35, no 2,‎ , p. 261 (DOI 10.2307/4114570, lire en ligne, consulté le )
  10. (en) Nasim Azani, Marielle Babineau, C. Donovan Bailey et Hannah Banks, « A new subfamily classification of the Leguminosae based on a taxonomically comprehensive phylogeny: The Legume Phylogeny Working Group (LPWG) », TAXON, vol. 66, no 1,‎ , p. 44–77 (ISSN 1996-8175, DOI 10.12705/661.3, lire en ligne, consulté le )
  11. (en) Juan Viruel, Nicolas Le Galliot, Samuel Pironon et Gonzalo Nieto Feliner, « A strong east–west Mediterranean divergence supports a new phylogeographic history of the carob tree (Ceratonia siliqua, Leguminosae) and multiple domestications from native populations », Journal of Biogeography, vol. 47, no 2,‎ , p. 460–471 (ISSN 1365-2699, DOI 10.1111/jbi.13726, lire en ligne, consulté le )
  12. Baumel A., « Du nouveau sur l'histoire du caroubier », La Garance voyageuse n°129,‎ , p. 26-28
  13. (en) Joan Tous and Louise Ferguson, « Mediterranean Fruits », Progress in new crops. ASHS Pres,‎ , p. 416 à 430 (lire en ligne)
  14. Reportage Arte 2017 :Le caroubier, l'or noir de la Crète
  15. Jean-Gabriel Maurandi, Calant de Vilafranca, note 1. Page créée le 19 avril 2001, consultée le 10 janvier 2016.

Voir aussi

Liens externes

Genre Ceratonia

Espèce Ceratonia siliqua