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Base sous-marine de Lorient

La base de sous-marins de Keroman est un complexe de bunkers de la Seconde Guerre mondiale, situé à Lorient (Bretagne, France). Elle occupe l'extrémité de la presqu'île de Keroman, dans la rade de Lorient et donne sur le golfe de Gascogne. Elle prend le nom de base de sous-marins ingénieur général Stosskopf en 1946.

Base de sous-marins de Lorient
Image illustrative de l’article Base sous-marine de Lorient
La base de sous-marins de Lorient en 2014.

Lieu Lorient (Bretagne, France)
Type d’ouvrage Base de sous-marins
Construction 1941
Architecte Organisation Todt
Matériaux utilisés Béton armé, béton, granit
Hauteur 25 m
Utilisation Base de sous-marins
Stockage
RĂ©paration
Appartient Ă  Ville de Lorient
Contrôlé par Drapeau de la France France
Guerres et batailles Seconde Guerre mondiale
Protection Logo monument historique Patrimoine XXe s. (2000)[1] - [2]
CoordonnĂ©es 47° 43′ 45″ nord, 3° 22′ 13″ ouest
GĂ©olocalisation sur la carte : France
(Voir situation sur carte : France)
Base de sous-marins de Lorient
GĂ©olocalisation sur la carte : Bretagne
(Voir situation sur carte : Bretagne)
Base de sous-marins de Lorient
GĂ©olocalisation sur la carte : Lorient
(Voir situation sur carte : Lorient)
Base de sous-marins de Lorient

Construite entre 1941 et 1944 par l'Allemagne nazie pendant l'Occupation, elle est alors destinée à abriter les 2e et 10e flottilles d'U-Boote de la Kriegsmarine, tout en s'inscrivant dans le dispositif du mur de l'Atlantique. Sa présence et sa grande résistance sont les causes de la destruction de la ville de Lorient par les aviations britannique et américaine en et , ainsi que de la reddition tardive de la poche de Lorient le .

La base est récupérée par la Marine nationale après le conflit et sera utilisée jusqu'en 1997 pour le compte des forces sous-marines françaises. Géré par la Marine dans le cadre du développement du programme de SNLE français, et pour la création de constructions navales à base de matériaux composites, le site est consacré depuis lors à des activités civiles dont le pôle d'activité est centré sur le domaine maritime.

Depuis la fin des années 1990, le site est reconverti en un pôle nautique spécialisé dans la plaisance et la course au large. Il accueille par ailleurs un centre d'affaires tourné vers le monde maritime, un musée aménagé dans le sous-marin Flore, ainsi que la Cité de la voile Éric Tabarly.

Le complexe est composĂ© de trois bunkers, Keroman I, II et III, de deux Dom-Bunkers (bunkers cathĂ©drales) situĂ©s dans l'espace du port de pĂŞche de Keroman, ainsi que d'un bunker situĂ© Ă  Lanester, sur les rives du Scorff. Le tout a nĂ©cessitĂ© le travail de 15 000 personnes et le coulage de près d'un million de mètres cubes de bĂ©ton. Les trois bunkers de Keroman comptent entre cinq et sept alvĂ©oles destinĂ©s Ă  accueillir des U-Boote, couverts par des toits de 3,5 m d'Ă©paisseur pour le K1 et le K2, et 7,5 m pour le K3.

Histoire

La situation de Lorient avant la Seconde Guerre mondiale

Keroman en construction en 1920, avec le bâtiment de la glacière visible.

La ville de Lorient se développe avec l'implantation de la Compagnie française des Indes orientales en 1666, et ses ports connaissent plusieurs modernisations successives. L'arsenal est équipé d'une cale couverte et d'une forme de radoub en 1825, cette dernière étant agrandie et accompagnée d'une seconde forme de radoub en 1862. À la même époque sort des chantiers la première frégate intégralement cuirassée, La Couronne[3]. Dans les années 1920, l'ingénieur Henri Verrière développe l'actuel port de pêche de Keroman et le dote d'un équipement moderne[4]. Le slipway est ainsi inauguré en 1927[5]. Henri Verrière prévoit de prolonger ce port vers la presqu'île de Keroman en y construisant de nouveaux quais, ainsi que des usines de transformation du poisson[4].

La ville recouvre son statut de prĂ©fecture maritime par un dĂ©cret du , et dispose avant le dĂ©but de la guerre d'une garnison de près de 5 600 marins et d'un arsenal militaire employant quelque 5 000 ouvriers, pour une population de l'agglomĂ©ration de 60 000 habitants[3]. La ville de Lorient sert de base de repli face Ă  l'avancĂ©e allemande en . L'or des banques nationales belges et polonaises est Ă©vacuĂ© par son port les et . Le mĂŞme jour, l'amiral François Darlan, alors repliĂ© Ă  Bordeaux, ordonne aux forces locales de rĂ©sister Ă  l'avancĂ©e allemande[6]. Le vice-amiral Penfentenyo, qui est responsable de la ville, applique la politique de la terre brĂ»lĂ©e : les cuves de mazout des ports de la ville sont incendiĂ©es, les munitions sont noyĂ©es dans la rade et les portes des bassins de radoub de l'arsenal sont dynamitĂ©es. Le , les troupes allemandes, qui se sont regroupĂ©es Ă  QuimperlĂ©, attaquent Guidel. La ville de Lorient tombe le mĂŞme jour[7].

Le choix de Keroman

Le U-123 à quai devant les anciens locaux de la Compagnie française des Indes orientales.

Au début du mois de , le konteradmiral Karl Dönitz, alors commandant supérieur des sous-marins de la Kriegsmarine, envoie des officiers de son état-major inspecter les ports de la côte française pouvant servir de bases pour ses sous-marins. L'armistice est signé le [8] et il se rend à Lorient le [7]. Il décide d'établir son quartier général ainsi que la 2e flottille de U-Boote dans la ville de Lorient le [9] : cette dernière est dotée d'installations modernes, est reliée par voie ferrée et est moins exposée aux frappes britanniques que Brest[10]. Dönitz s'installe le dans une villa du quartier de Kernével à Larmor-Plage, face à la presqu'île de Keroman[11] et le commandant en chef de la Kriegsmarine, l'amiral Erich Raeder, visite la ville le [12].

Des ouvriers allemands quittent la base de Wilhelmshaven dès la fin juin pour rejoindre Lorient et effectuent des rĂ©parations sur place Ă  partir du . La rade est inspectĂ©e pour contrer le risque de mines magnĂ©tiques et le port est dĂ©clarĂ© ouvert le [10]. Un premier U-Boot, le U-30, se prĂ©sente au ravitaillement le lendemain [9]. Des travaux de remise en Ă©tat des infrastructures portuaires sont entrepris et certaines, comme le slipway du port de pĂŞche, sont renforcĂ©es pour permettre leur utilisation par des sous-marins. En septembre, 17 sous-marins viennent ravitailler dans la ville, puis 40 le mois suivant[11]. Ă€ partir de , le bassin no 2, rĂ©parĂ©, est utilisĂ© pour le carĂ©nage de ceux-ci[12].

Une première attaque de 12 bombardiers britanniques atteint Lorient les 22 et [13]. Les bombardements touchent rĂ©gulièrement la rĂ©gion jusqu'en . Plusieurs mesures de dĂ©fense passive sont alors prises par l'occupant et Dönitz rencontre Hitler le dans les environs de Paris pour lui demander la construction de trois bases Ă  Lorient, Brest et Saint-Nazaire[14]. Le , Hitler ordonne la construction de bunkers de protection pour sous-marins sur la cĂ´te Atlantique et une première rĂ©union sur ce sujet a lieu Ă  Lorient en prĂ©sence de Fritz Todt les 15 et 16 du mĂŞme mois[15]. Finalement, Hitler approuve le plan de construction le [16].

Construction de la base

Implantations dans la rade de Lorient
Dom-Bunker du slipway
Bunkers de Keroman
Bunker du Scorff

Le site de la presqu'île de Keroman est choisi pour accueillir la future base. La construction est confiée à l'ingénieur en chef Triebel qui a déjà travaillé sur la base de Heligoland. Triebel prévoit dans un premier temps de creuser la presqu'île pour créer un canal qui relierait les alvéoles des bunkers, ceux-ci fonctionnant comme des bassins à flot. Mais les sondages du sous-sol sont volontairement faussés par des Lorientais de manière à faire croire que ce projet nécessiterait des travaux de percement important. Un second projet est alors conçu, structuré autour d'un slipway, les sous-marins étant mis au sec dans les alvéoles. Il est retenu par Hitler et les travaux débutent en [17].

Les premiers travaux sont lancés à Lorient en , et dès , deux Dom-Bunkers[n 1] sont inaugurés autour du slipway du port de pêche[18]. La construction de la base de Keroman I est commencée en et celle de Keroman II trois mois plus tard, en mai. Keroman I est inauguré le , et Keroman II en décembre de la même année[19]. À Lanester, un bunker pouvant accueillir deux U-boote est construit à partir de [20] et inauguré le [21].

Moyens matériels et humains

La construction de la base nĂ©cessite le travail de près de 15 000 personnes ; jusqu'Ă  10 000 de plus travaillent dans la rĂ©gion pour l'Ă©dification d'autres structures du mur de l'Atlantique. L'historien Sönke Neitzel recense ainsi en : 5 780 Français employĂ©s comme ouvriers sur le chantier[22], 3 178 Allemands[16], 1 467 NĂ©erlandais, 1 296 Belges, 501 Espagnols, 89 Italiens, ainsi que 90 Ă©trangers venant d'autres pays. Ă€ ceux-ci s'ajoutent les ouvriers employĂ©s par les entreprises sous-traitantes[22].

Dans un premier temps, les ouvriers sont attirĂ©s par des salaires Ă©levĂ©s, supĂ©rieurs de plus de 50 % Ă  ceux proposĂ©s aux manĹ“uvres agricoles dans le Morbihan. NĂ©anmoins, leur nombre restant insuffisant, les Allemands doivent demander Ă  l'administration française de procĂ©der Ă  des rĂ©quisitions[23] dès . Celles-ci restent sans effet, le nombre de prisonniers de guerre Ă©tant assez Ă©levĂ© (environ 20 % des agriculteurs de la rĂ©gion) et le recrutement devant s'effectuer loin de la rĂ©gion[24]. La loi instaurant le service du travail obligatoire le fournit Ă  l'Organisation Todt de Lorient jusqu'Ă  22 285 travailleurs, dont les deux tiers travaillent sur le site de KĂ©roman[25].

Des hĂ©bergements sont mis en place dès , et prennent la forme de baraquements en bois dissĂ©minĂ©s dans un rayon de 15 km autour du site de construction. Les camps de prisonniers du Morbihan sont vidĂ©s et reconvertis Ă  partir du mois de [23]. L'Organisation Todt prend aussi en charge les loisirs de ceux-ci en ouvrant un cinĂ©ma-salle de spectacle ou en gĂ©rant des maisons closes[24].

Près d'un million de mètres cubes de bĂ©ton sont utilisĂ©s pour construire la forteresse, ce qui reprĂ©sente près du quart du bĂ©ton travaillĂ© en France pour l'effort militaire allemand. 60 000 wagons de matĂ©riel sont acheminĂ©s sur le site, ainsi que 40 000 m3 de bois de coffrage. Plusieurs lignes de chemin de fer doivent ĂŞtre construites pour acheminer le sable nĂ©cessaire au coulage du bĂ©ton : jusqu'Ă  l'embouchure de la LaĂŻta Ă  l'ouest, et jusqu'Ă  la rivière d'Étel Ă  l'est[26]. Une gare supplĂ©mentaire est ouverte Ă  une dizaine de kilomètres du site, près d'Auray, pour stocker le matĂ©riel[25]. Le gravier provient, lui, de la Penthièvre, extrait dans la presqu'Ă®le de Quiberon[26].

Bombardement du chantier et RĂ©sistance
La base en construction en 1942.

Le chantier est touchĂ© par plusieurs bombardements alliĂ©s. Ceux-ci sont cependant d'ampleur limitĂ©e, les AlliĂ©s visant en prioritĂ© Brest, oĂą mouillent le croiseur lourd Admiral Hipper, Ă  partir de fin , et les croiseurs Scharnhorst et Gneisenau, Ă  partir de fin . En , Lorient est la cible de trois raids de cinq bombardiers chacun. Quatre raids suivent entre les et , totalisant plus de 110 bombardiers. En mai, deux raids d'un total de 10 appareils touchent la ville, suivis en juillet d'une attaque totalisant 47 appareils et d'une autre dans la nuit du au totalisant 53 appareils. Ă€ cette date, le bunker du Scorff ainsi que ceux de Keroman I et II sont entrĂ©s en service. Ă€ ces raids s'ajoutent ceux d'appareils dĂ©tournĂ©s de leurs cibles initiales : 20 bombardiers attaquent la ville en , dĂ©tournĂ©s de Brest, et quatre autres en dĂ©tournĂ©s du Havre[13]. Les dĂ©gâts sont avant tout humains : 80 ouvriers meurent lors d'un bombardement britannique dans la nuit du au , 48 autres lors du bombardement amĂ©ricain du [16] et 10 de plus lors du bombardement du [25].

La Résistance se développe aussi sur le chantier et autour de celui-ci. Des relevés géologiques sont truqués pour ralentir les travaux dès [17]. Les plans de la base sont communiqués à Londres dès par un ingénieur de l'arsenal, Alphonse Tanguy[13]. Le directeur adjoint de l'arsenal, Jacques Stosskopf, communique aux Alliés les mouvements des U-boote[27]. Dans l'enceinte de l'arsenal, 18 actions sont officiellement recensées de à . Dans la ville et ses environs, les sabotages se multiplient à partir de , de même que des actes de résistance passive comme des manifestations[27]. Le bordel de l'Organisation Todt est attaqué à l'explosif le [25].

Extension de la base

La taille insuffisante des deux premiers bunkers de Keroman ne permet pas d'accueillir certains U-Boote comme les type IX D et type X B, trop longs pour ces installations, ni les type XXI trop hauts pour celles-ci[19]. La dĂ©cision est donc prise de construire un troisième bunker, Keroman III, lors de la visite de Fritz Todt Ă  Lorient le . Les travaux commencent en et le bâtiment est opĂ©rationnel en [28]. La base est agrandie au cours de l'annĂ©e 1943 par l'ajout d'un espace d'entrepĂ´t Ă  sa partie gauche[29] et dans sa partie arrière, par l'ajout d'un espace de 14 m de large sur 163 m de long. Trois bunkers de dĂ©fense rapprochĂ©e s'ajoutent Ă  la mĂŞme date au rez-de-chaussĂ©e, ainsi que trois abris de flak sur son toit. Deux navires, le croiseur Strasbourg et le Crapaud, sont coulĂ©s en 1944 face Ă  ses entrĂ©es pour gĂŞner le passage des torpilles aĂ©riennes[30].

Rommel en visite des installations du mur de l'Atlantique Ă  Lorient en .

La construction du mur de l'Atlantique dĂ©bute Ă  partir de 1942. L'OpĂ©ration Chariot menĂ©e par les AlliĂ©s sur la base sous-marine de Saint-Nazaire le dĂ©montre alors que ce type d'installation reste exposĂ© aux offensives terrestres[31] : la dĂ©fense de la rĂ©gion de Lorient est revue. Le pĂ©rimètre de dĂ©fense s'Ă©tend sur une bande de 24 km Ă  l'intĂ©rieur des terres et intègre par ailleurs la base d'aĂ©ronautique navale de Lann-BihouĂ©[32]. Près de 400 blockhaus, nids de mitrailleuses, ou encore tours de guet sont construits entre l'embouchure de la LaĂŻta et celle de la rivière d'Étel[33].

La mise en service des U-Boote type XXI nécessite la création de nouveaux bunkers en raison de leur grande hauteur. La base de Lorient est la seule sur la façade Atlantique à les accueillir ; la construction de nouvelles installations, Keroman IVa et Keroman IVb, est lancée durant l'été 1943 pour accueillir 24 de ces U-Boote. Ces nouveaux bunkers se situeraient dans le prolongement de Keroman I et II et permettre le stockage à sec des submersibles ; Keroman IVa étant de plus doté d'une alvéole en eau et d'un espace de protection du slipway[34]. La construction de Keroman IVa est toutefois ralentie par le manque de matériaux et de main-d'œuvre et doit même être stoppée le [35] ; seuls les murs de deux alvéoles et celui faisant l'interface avec Keroman I sont achevés[34]. La construction de Keroman IVb ne va pas au-delà de travaux de creusement des fondations et de début de coffrage de quelques murs d'alvéoles[35].

La base après-guerre

Implantation de Keroman I, II, et III, du projet Keroman IV ainsi que des dom-bunkers dans la rade de Lorient.
Plaque commémorative apposée en 1946 en l'honneur de Jacques Stosskopf.

La poche de Lorient se rend le au terme d'un siège de neuf mois et les forces françaises récupèrent la base dans un parfait état de fonctionnement[36]. Le gouvernement provisoire y établit le un « centre de sous-marins » et une note prescrit à la base d'être prête à ouvrir deux chantiers de réparation de sous-marins à partir du [37]. L'état-major de la marine nationale visite la base à la mi-octobre de la même année et, le , est créée la base militaire de Kéroman, constituée définitivement le . Le , la base prend le nom d'« ingénieur général Stosskopf »[31].

En , cinq U-Boote sont attachés à la base de Lorient et servent, à la fin de la même année, à la création de la « deuxième escadrille de sous-marins[38] ». Celle-ci est cependant dissoute à la fin de l'année 1948 et les sous-marins sont réaffectés à Toulon[39]. En 1953, la base retrouve son affectation première et, le , la deuxième escadrille de sous-marins est reconstituée[40]. Les marins sont hébergés dans un premier temps dans la caserne protégée de Keroman II, avant que, de 1957 à 1973, soient ouverts le long des rives du Ter plusieurs casernements ainsi que d'autres infrastructures de vie[41].

Au début des années 1970, l'état-major français décide de remplacer progressivement ses sous-marins d'attaque classiques par des sous-marins nucléaires d'attaque, jusqu'au début du XXIe siècle. La base de Lorient ne disposant pas de site de traitement des combustibles nucléaires, la fermeture de celle-ci est alors prévue pour le début des années 2000[42].

L'annonce de la dissolution de la deuxième escadrille intervient le et prévoit la fermeture de la base de Keroman dans un délai de deux ans[43]. Les quatre classe Agosta de Lorient sont réaffectés à Brest et quittent définitivement leur ancien port d'attache le [44]. La Sirène est le dernier sous-marin à passer dans les chantiers et quitte le site le pour Toulon[45].

La base aujourd'hui

Le désengagement de la Marine intervient dans un contexte économique difficile pour la région de Lorient, à un moment où le port de pêche connaît une baisse importante de ses tonnages à partir de la fin des années 1980, et où la Direction des constructions navales (DCN) réduit ses activités[46]. C'est dans ce contexte que l'agglomération de Lorient aborde la reconversion des 25 ha du site, dont six occupés par les bunkers[4]. Plusieurs études sont lancées à partir de 1992, dont les résultats sont rendus publics en 1997. En 1999, un projet final est adopté[47].

Les bunkers sont conservĂ©s en raison de leur valeur patrimoniale et du coĂ»t trop Ă©levĂ© de leur destruction, alors estimĂ© Ă  31 millions d'euros[48]. Il est dĂ©cidĂ© de constituer un centre sur « l'homme et la mer au XXIe siècle » organisĂ© en cinq pĂ´les : course au large, stratĂ©gies navales, prĂ©vention des risques en mer, archĂ©ologie sous-marine, et pĂŞche et aquaculture[47]. Des travaux sont rĂ©alisĂ©s Ă  partir de 2001 avec une première enveloppe de 45 millions d'euros[49].

Utilisation

Kriegsmarine

La 2e flottille de U-Boote est Ă©tablie Ă  partir du [9]. Elle est rejointe par la 10e flottille de U-Boote Ă  partir de [50]. Ă€ ces navires, il faut ajouter les nombreux sous-marins ayant fait une escale Ă  Lorient au cours de leurs missions. C'est notamment le cas du U-333, commandĂ© par Ali Cremer, le [51]. La base est utilisĂ©e jusqu'au , date de dĂ©part du dernier U-Boot, le U-155, pour la Norvège[52]. Au total, 168 U-boote ont Ă©tĂ© affectĂ©s Ă  Keroman pendant la guerre[53], dont les sept U-Boote ayant le plus fort tableau de chasse[54]. Sur ces 168 engins submersibles allemands, 135 ont Ă©tĂ© coulĂ©s pendant le conflit, soit 80 % des flottilles[53], certains Ă©tant coulĂ©s lors de leur première mission opĂ©rationnelle[n 2].

Face à la base de Keroman, à Larmor-Plage, l'état-major de la direction des opérations de la force sous-marine allemande s'établit à partir du dans les villas de « Kerlilon », de « Margaret » et de « Kerozen ». Le poste de commandement sert à faire la liaison entre les U-Boote, de manière à donner la localisation d'un convoi allié et à organiser une attaque « en meute » contre celui-ci[55].

Les U-Boote sont engagés dans la Bataille de l'Atlantique menée contre les Alliés. Keroman sert par ailleurs de point de départ d'opérations spéciales, comme l'Opération Paukenschlag, menée au large de New York en [56], ou dans les opérations d'attaque de bateaux alliés pendant la bataille de Normandie[57]. Plusieurs U-Boote sont par ailleurs déployés sans succès pour porter secours au Bismarck lorsque celui-ci est pris en chasse par la marine britannique en 1941. Le U-74 parvient à sauver trois marins allemands après le naufrage de ce navire et ils sont débarqués à Lorient par la suite[58].

La base est aussi utilisĂ©e pour les opĂ©rations de rĂ©paration et d'entretien des U-Boote. Sur les 1 149 grands carĂ©nages effectuĂ©s par la Kriegsmarine dans les ports français de l'Atlantique, 500 sont rĂ©alisĂ©s Ă  Lorient[59].

Marine impériale japonaise

Équipage du I-29, en 1943.

La base de Keroman sert également à trois reprises de port d'escale pour les sous-marins de la Marine impériale japonaise, alors alliée de l'Allemagne nazie, entre [60] et 1944 : le I-30, le I-8, et le I-29[61].

Ils servent à apporter des matériaux stratégiques comme du tungstène ou du caoutchouc, ainsi que des médicaments comme de la quinine, ou même des plans d'armement. Les équipages sont utilisés à des fins de propagande, sont reçus par Hitler ou bien vont se distraire à Paris. Ils rapportent au Japon des plans d'armement et des ingénieurs allemands, ainsi que des machines Enigma[62].

Sur les trois sous-marins ayant rallié Keroman, seul le I-8 parvient à rentrer sain et sauf au Japon en [61].

Destruction de la ville

Les pertes Ă©levĂ©es causĂ©es aux convois alliĂ©s par les « loups gris » de Dönitz lors de la bataille de l'Atlantique leur imposent de rĂ©agir. Un raid amĂ©ricain est lancĂ© sur la base le pour Ă©valuer la rĂ©sistance des bunkers : les dĂ©gâts infligĂ©s restent minimes. Churchill ordonne alors le de dĂ©truire les villes entourant ces bases, de manière Ă  tarir leur approvisionnement[63]. Lorient est dĂ©signĂ©e comme la cible prioritaire ; la ville est rasĂ©e par plus de 4 000 tonnes de bombes entre le et le . Seules la base sous-marine de Keroman demeure intacte[64]. Dans la ville oĂą a Ă©tĂ© donnĂ© l'ordre d'Ă©vacuation le , 3 500 immeubles sont dĂ©truits ; on dĂ©nombre 230 morts[65].

La durĂ©e moyenne d'immobilisation des sous-marins entre deux missions Ă  Keroman augmente de 30 % entre et [66]. Le tonnage dĂ©truit par ceux-ci dans l'Atlantique baisse de 17 100 tonnes par U-Boot en Ă  8 500 tonnes en [67].

DĂ©tail des bombardements de janvier-[68]
Date Nationalité Nombre d'appareils tonnes de bombes nombre de bombes incendiaires
Royal Air Force 99 73,6 83 548
Royal Air Force 132 140,4 87 163
US Air Force 36
Royal Air Force 47
Royal Air Force 136 80 56 687
Royal Air Force 130 50,7
Royal Air Force 120 90,6 63 376
Royal Air Force 296 254,1
Royal Air Force 422 524,3 26 168
Royal Air Force 360 461,9 230 916
Poche de Lorient
Soldats allemands capturés au nord de Lorient fin août 1944

La Bretagne commence Ă  ĂŞtre libĂ©rĂ©e par les AlliĂ©s dès et la ville de Brest se rend mi-septembre. Le coĂ»t humain pour les AlliĂ©s s'Ă©lève Ă  plus de 10 000 soldats blessĂ©s ou tuĂ©s. Les villes de Lorient et de Saint-Nazaire n'ont plus la mĂŞme prioritĂ© stratĂ©gique et l'US Army n'y dĂ©nombre que 32 morts jusqu'Ă  la fin du conflit[36].

Les premiers G.I.s arrivent au nord des dĂ©fenses de la ville le . La veille, la RAF a tentĂ© sans succès de dĂ©truire un toit d'un des bunkers de Keroman en y lâchant une bombe de six tonnes[69]. Dans la poche, quelque 25 000 soldats organisent leur dĂ©fense. Les bunkers de Keroman sont rĂ©amĂ©nagĂ©s en hĂ©bergements et la base d'aĂ©ronautique navale de Lann-BihouĂ© continue d'assurer la liaison avec l'Allemagne jusqu'au [70]. La poche de Lorient rĂ©siste pendant neuf mois aux attaques[36] et la reddition n'est obtenue que le [71].

Marine nationale

La marine nationale française utilise le site de 1945 Ă  1995. Un maximum de 10 sous-marins et de 2 000 marins y est affectĂ© pendant cette pĂ©riode[72]. La base est utilisĂ©e dans un premier temps pour des missions de formation et des missions anti-sous-marines, dans le cadre de l'appartenance de la France Ă  l'OTAN[38]. Au dĂ©but des annĂ©es 1960, le dĂ©veloppement de la propulsion nuclĂ©aire et celui des sous-marin nuclĂ©aire lanceur d'engins (SNLE) dans la Marine nationale redĂ©finit l'importance des sous-marins. La base de Keroman se voit affecter, Ă  partir de 1968 et pour trois ans, le prototype Gymnote qui a la charge de l'expĂ©rimentation du lancement de missiles Ă  tĂŞtes nuclĂ©aires[73]. Elle sert Ă  la formation des futurs Ă©quipages de SNLE[42], de sous-mariniers Ă©trangers, mais aussi pour l'entraĂ®nement de commando et de nageurs de combat, ou pour des opĂ©rations de renseignements[74].

Les premiers sous-marins français sont affectés à la base en et sont constitués de prises de guerre : le Roland Morillot, le Blaison, le Bouan, le Millé et le Laubie, tous d'anciens U-boote[38]. Suivent les décennies suivantes les classe Narval qui sont affectés à Keroman à partir de [75] et les classe Daphné à partir de 1964[76]. Quatre classe Agosta sont affectés à la base à partir de 1984[42] pour remplacer les classe Narval, en fin de vie[77]. La base dispose alors, à la fin des années 1980, de quatre classe Narval et de trois classe Daphné[78].

La Marine nationale développe les constructions de la base à partir des années 1950. Des hébergements pour les marins sont construits sur le site, de même que des bâtiments pour l'état-major et pour des services généraux[78]. Les bunkers sont aussi réaménagés. Keroman I accueille des services de santé à partir de l'été 1955 et est ainsi équipé d'un caisson hyperbare ; il dispose aussi d'un « centre d'entraînement à la guerre sous-marine », comprenant une salle simulant un central d'opération. Keroman II accueille lui le centre des opérations et de transmission, ainsi que des bureaux militaires et administratifs[41]. La marine utilise enfin plusieurs plus petits bunkers appelés « Jaguar » pour le stockage de ses torpilles ; ceux-ci sont détruits au début des années 1990[79].

Direction des constructions navales

La direction des constructions navales occupe le site de 1945 Ă  1997 pour des opĂ©rations de maintenance ou de modernisation de la flotte de sous-marins. Un maximum de 900 personnes y est employĂ© au plus fort de l'activitĂ© et un total de 95 navires est traitĂ© dans le cadre de grands carĂ©nages ou de refontes[80].

Le bunker de Keroman I sert pour les installations électriques du site ainsi que pour le stockage d'eau et de carburant, et le slipway continue à être utilisé pour son usage initial[81]. Dans le milieu des années 1970, les alvéoles 1 à 3 sont aménagés pour recevoir un atelier spécialisé dans les matériaux composites, et une dizaine de chasseurs de mines y est construite, de même que des équipements pour d'autres navires[82]. Keroman II est lui réaménagé complètement pour y recevoir des ateliers, chaque alvéole accueillant un atelier spécialisé différent[83]. Keroman III concentre les deux chaînes de carénage, l'alvéole « F » étant réutilisé dès la fin de la guerre et l'alvéole « G » étant remis en fonction en 1958[83]. La DCN construit par ailleurs plusieurs bâtiments sur le site pour accueillir le travail ou la restauration de ses équipes[79].

Reconversions civiles

La Cité de la voile Éric Tabarly alors en construction.

Un pĂ´le nautique est constituĂ© Ă  partir de 1997 avec l'installation dans le bunker de Keroman II de la sociĂ©tĂ© Plastimo, spĂ©cialisĂ©e dans l'accastillage[84]. Ă€ partir de 2001, des travaux supplĂ©mentaires sont entrepris afin de permettre le rĂ©amĂ©nagement de Keroman I et d'y Ă©difier des hangars destinĂ©s Ă  la prĂ©paration de multicoques de compĂ©tition[49]. La CitĂ© de la voile Éric Tabarly est Ă©rigĂ©e en 2005 Ă  partir d'un budget de 18 millions d'euros[85].

Le site est utilisé pour plusieurs courses nautiques ou pour la préparation de celles-ci. Le défi français de la Coupe de l'America (2001) se prépare ainsi à Lorient[84]. Lorient est par ailleurs désignée pour accueillir des étapes de la Volvo Ocean Race de 2012[86].

RĂ©alisĂ© avec un budget de 10 millions d'euros, le centre d'affaires « Celtic Submarine », tournĂ© vers la mer et composĂ© de deux bâtiments, ouvre en ; la première tranche reprĂ©sente 9 000 m2 de bureaux[87] pour environ 400 emplois[88]. La construction d'un troisième bâtiment est lancĂ©e Ă  la fin des travaux de cette première tranche[89].

Le patrimoine laissé est exploité à partir de 1999 par l'ouverture dans la tour Davis d'un musée[90]. Le , il est agrandi pour permettre de visiter l'un des anciens sous-marins de la base, le Flore[91].

En plus de la société Plastimo et du sous-marin Flore, le bunker Keroman II abrite depuis une scène de musiques actuelles, Hydrophone[92].

Architecture

Dom-Bunker

Les deux Dom-Bunker (en français bunkers cathĂ©drales) sont construits autour du slipway du port de pĂŞche Ă  partir de par la sociĂ©tĂ© Carl Brand de DĂĽren et, Ă  l'Ă©poque, le projet prĂ©voit la construction d'un total de six bunkers de ce type, disposĂ©s en Ă©toile. Ils sont rĂ©alisĂ©s en six tronçons et mesurent 81 m de long pour 16 m de large et 25 m de haut. Les murs ont une Ă©paisseur de 1,5 m et leurs toitures ont un profil en ogive, de manière Ă  rĂ©duire l'effet des bombes[15].

Conçus à l'origine pour accueillir les U-Boote lors de leurs réparations après leur montée sur le slipway, ils s'avèrent peu pratiques à l'usage et sont reconvertis en ateliers, puis en entrepôts[15].

  • Premier Dom-Bunker vu du sol.
    Premier Dom-Bunker vu du sol.
  • Second Dom-Bunker, avec porte blindĂ©e et emplacement pour la DCA.
    Second Dom-Bunker, avec porte blindée et emplacement pour la DCA.
  • Les deux Dom-Bunker de chaque cĂ´tĂ© du slipway du port de pĂŞche de Keroman.
    Les deux Dom-Bunker de chaque côté du slipway du port de pêche de Keroman.
  • Les Dom-Bunker vus du toit de Keroman III, avec Keroman I et les murs de Keroman IV.
    Les Dom-Bunker vus du toit de Keroman III, avec Keroman I et les murs de Keroman IV.

Bunker du Scorff

Le bunker du Scorff est le premier construit. Après des hĂ©sitations, il est dĂ©cidĂ© de l'implanter Ă  Lanester, Ă  cĂ´tĂ© de l'arsenal, de manière Ă  disposer des moyens techniques de celui-ci[15]. En raison de l'envasement du lieu d'implantation, une technique de construction sur pilotis est adoptĂ©e, utilisant 2 557 pieux d'acier de 20 m de long[93].

Il est inauguré en , après avoir été équipé le mois précédent d'un poste de DCA. Son emplacement dans une portion de la rivière qui sédimente en permanence réduit assez rapidement son utilisation par l'Occupant. Sa construction sur pilotis rend aussi impossible le renforcement de son toit, la structure ne pouvant supporter aucun supplément de poids[93].

  • Vue du bunker du Scorff depuis l'enclos du port Ă  Lorient.
    Vue du bunker du Scorff depuis l'enclos du port Ă  Lorient.
  • Vue du bunker du Scorff depuis le sommet de l'Église Notre-Dame-de-Victoire de Lorient.
    Vue du bunker du Scorff depuis le sommet de l'Église Notre-Dame-de-Victoire de Lorient.

Keroman I

Le bunker Keroman I, qui mesure 120 m de long pour 85 m de large, compte cinq alvĂ©oles et un slipway (plan inclinĂ©) couvert. Il est achevĂ© en après sept mois de travaux[94]. Sa toiture est constituĂ©e initialement d'une structure de bĂ©ton armĂ© de 3,50 m, composĂ©e d'un assemblage de poutrelles fabriquĂ©es en Allemagne par la firme Dortmunder-Union. Un ferraillage de 49 kg de fer par mètre cube est ajoutĂ© au moment du coulage du bĂ©ton. Trois emplacements de DCA y sont par ailleurs adjoints[19] et des blocs de granite sont ajoutĂ©s pour le protĂ©ger des bombardements[94]. Il est agrandi en 1942 par l'ajout sur sa partie arrière d'une section technique de 81,7 m de long pour 23 m de large destinĂ©e Ă  accueillir des gĂ©nĂ©rateurs Ă©lectriques[95] et par l'adjonction d'une tour d'entraĂ®nement Ă©quipĂ©e d'une cuve de m permettant aux sous-mariniers de simuler des manĹ“uvres d'Ă©vacuation[96].

Il est utilisĂ© dès l'origine pour abriter jusqu'Ă  cinq U-Boote dans ses alvĂ©oles (places numĂ©rotĂ©es de K1 Ă  K5), ainsi que le chariot servant Ă  transporter ces submersibles d'un alvĂ©ole Ă  l'autre[94]. Chaque alvĂ©ole est Ă©quipĂ© d'au moins un pont roulant mobile muni de grues d'une Ă  trois tonnes[97]. Le bunker est Ă©quipĂ© d'un système de slipway prĂ©sentant une pente de 10 %[98], dont le chariot pouvait effectuer une opĂ©ration de mise Ă  sec ou de mise en eau en 46 Ă  60 minutes vers ou depuis les alvĂ©oles de Keroman I ou II. Au total, le slipway comportait 12 chariots mĂ©caniques et un pont translateur (ou pont transporteur) se dĂ©plaçant sur huit rails disposĂ©s transversalement sur l'esplanade reliant Keroman I et II[99].

  • Keroman I : entrĂ©e du slipway (plan inclinĂ© couvert), surmontĂ© d'un emplacement pour la DCA.
    Keroman I : entrée du slipway (plan incliné couvert), surmonté d'un emplacement pour la DCA.
  • Porte blindĂ©e fermant la sortie du slipway.
    Porte blindée fermant la sortie du slipway.
  • Bunker de protection rapprochĂ©e, situĂ© sur la longueur exposĂ©e Ă  la rade de Lorient.
    Bunker de protection rapprochée, situé sur la longueur exposée à la rade de Lorient.
  • Tour Davis construite pour l'entraĂ®nement des sous-mariniers pour des Ă©vacuations sous l'eau.
    Tour Davis construite pour l'entraînement des sous-mariniers pour des évacuations sous l'eau.
  • Keroman I Ă  droite, avec le mur de Keroman IV Ă  gauche.
    Keroman I Ă  droite, avec le mur de Keroman IV Ă  gauche.
  • DĂ©tail du bĂ©ton armĂ©, avec traces horizontales laissĂ©es par des coffrages en bois.
    Détail du béton armé, avec traces horizontales laissées par des coffrages en bois.
  • Sol cimentĂ© recouvrant les installations Ă©lectriques entre le gĂ©nĂ©rateur de Keroman I et les installations de Keroman III.
    Sol cimenté recouvrant les installations électriques entre le générateur de Keroman I et les installations de Keroman III.
  • Plan des bunkers de Keroman I et II.
    Plan des bunkers de Keroman I et II.

Keroman II

Keroman II mesure 120 m de long pour 138 m de large et compte sept alvĂ©oles. Il est achevĂ© en [94]. Sa toiture prĂ©sente les mĂŞmes caractĂ©ristiques que celle de Keroman I[19], Ă  l'exception des emplacements de DCA. Il est agrandi en 1942 par l'ajout, sur sa partie arrière, d'une partie technique de 57,42 m de long pour 24 m de large destinĂ©e Ă  accueillir des transformateurs Ă©lectriques[95].

Ce bunker abrite jusqu'à sept U-Boote (places numérotées de K6 à K12), ainsi que le chariot de transfert des submersibles d'un bunker à l'autre[94]. Ses alvéoles disposent du même équipement que ceux de Keroman I, mais il est équipé d'une grue d'une tonne placée à l'extérieur pour l'entretien des périscopes[97].

  • Terre-plein entre Keroman I et Keroman II avec chariot de manutention (1942).
    Terre-plein entre Keroman I et Keroman II avec chariot de manutention (1942).
  • Sous-marin U-67, rentrant dans une alvĂ©ole de Keroman II (1942).
    Sous-marin U-67, rentrant dans une alvéole de Keroman II (1942).
  • Toit simple de 3 m.
    Toit simple de m.
  • Porte latĂ©rale permettant l'accès des Ă©quipements dans les alvĂ©oles.
    Porte latérale permettant l'accès des équipements dans les alvéoles.

Keroman III

Keroman III mesure 138 m de long pour 170 m de large et compte sept alvĂ©oles[94] : deux d'une longueur de 95 m, trois d'une longueur de 98,5 m, et deux d'une longueur de 84 m[100]. CommencĂ© en , le nouveau bunker est achevĂ© en [94]. Son toit a initialement une Ă©paisseur de 3,80 m avant d'ĂŞtre Ă©paissi de m en [28]. Il est le seul des trois bunkers Ă  avoir un toit Ă©quipĂ© d'une structure de type « Fangrost » destinĂ©e Ă  faire exploser les bombes avant qu'elles n'atteignent la dalle de couverture[94], portant l'Ă©paisseur totale Ă  près de 9,4 m[28]. Le bunker est agrandi Ă  partir de la mi-1943 par la construction, sur sa partie gauche, d'un espace de stockage de 20,73 m de large pour 153 m de long[29] et sur sa partie arrière par un espace de 14 m de large pour 163 m de long. Trois bunkers de dĂ©fense sont ajoutĂ©s au rez-de-chaussĂ©e, ainsi que trois emplacements servant Ă  accueillir des pièces de DCA sur son toit[30]. En 1944, pour lutter contre les attaques aĂ©riennes et le lancement de torpilles, le croiseur Strasbourg (anciennement SMS Regensburg) et le chaland Crapaud, sont positionnĂ©s devant les entrĂ©es des alvĂ©oles. Ils sont alors Ă©quipĂ© de mâts soutenant des filets ainsi que de ballons de barrage. Ils sont sabordĂ©s Ă  ce mĂŞme emplacement par la Kriegsmarine peu avant la libĂ©ration de la ville en 1945.

Keroman III, qui abrite jusqu'Ă  13 U-Boote (places numĂ©rotĂ©es de K13 Ă  K24), est le seul des trois bunkers Ă  bĂ©nĂ©ficier de bassins Ă  flot[94]. Toutes les places sont initialement Ă©quipĂ©es de grues de t pour les opĂ©rations d'entretien ; les places K23 et K24 sont de plus pourvues de grues de 30 t pour les opĂ©rations de dĂ©montage des moteurs Diesel[101].

  • EntrĂ©es des alvĂ©oles de Keroman III, vues depuis la rade.
    Entrées des alvéoles de Keroman III, vues depuis la rade.
  • IntĂ©rieur des alvĂ©oles de Keroman III.
    Intérieur des alvéoles de Keroman III.
  • Porte d'accès blindĂ©e.
    Porte d'accès blindée.
  • Traces laissĂ©es sur le bĂ©ton par des coffrages en aciers.
    Traces laissées sur le béton par des coffrages en aciers.
  • Emplacement de DCA.
    Emplacement de DCA.
  • Chambres d'Ă©clatement de type « Fangrost », sur le toit.
    Chambres d'éclatement de type « Fangrost », sur le toit.
  • Bossages des poutres en bĂ©ton armĂ© surmontant les chambres d'Ă©clatement.
    Bossages des poutres en béton armé surmontant les chambres d'éclatement.
  • Toit, au-dessus des chambres d'Ă©clatement "Fangrost".
    Toit, au-dessus des chambres d'Ă©clatement "Fangrost".
  • Plan de Keroman III.
    Plan de Keroman III.
  • Le Strasbourg et le Crapaud devant Keroman III.
    Le Strasbourg et le Crapaud devant Keroman III.

Keroman IV

Un autre grand bunker, Keroman IV, divisé en Keroman IVa et Keroman IVb, planifié dès 1943, situé au nord-est de Keroman I, devait être accessible depuis le port de pêche par une plate-forme élévatrice et fournir de l'espace pour 24 sous-marins modernes de type XXI. Il n'a été que commencé (Keroman IV a), un bâtiment supplémentaire (IV b) n'étant prévu que partiellement. Il devait également servir de caserne protégée et de gare pour les trains de marchandises. Tous les travaux ont été arrêtés en en raison des bombardements répétés et du manque de main d'oeuvre, la priorité de l'Organisation Todt étant le renforcement des défenses du mur de l'Atlantique.

Selon le projet, Keroman IVa aurait eu quatre alvéoles à sec (chaque alvéole pouvant accueillir trois U-Boote de type XXI), une alvéole en eau et un espace de protection pour un slipway. Les dimensions prévues étaient 160 mètres de long et 130 mètres de large. Les alvéoles auraient eu 23 mètres de large. Un toit équipé de chambres d'éclatement de type « Fangrost » de sept mètres d'épaisseur aurait recouvert l'ensemble.
Keroman IVb aurait eu comme dimensions 95 mètres de long et 150 mètres de large et trois alvéoles pouvant accueillir trois Type XXI.

De plus, six bunkers de 40 Ă— 23 m destinĂ©s au stockage des torpilles ont Ă©tĂ© construits autour des bunkers des sous-marins.

  • Le mur de Keroman IV sĂ©parant de KĂ©roman I.
    Le mur de Keroman IV séparant de Kéroman I.
  • Le mur de Keroman IV.
    Le mur de Keroman IV.
  • Le mur de Keroman IV.
    Le mur de Keroman IV.
  • Le mur de Keroman IV.
    Le mur de Keroman IV.

Sources

Notes

  1. Le nom de « Dom-Bunkers » vient de la forme de ceux-ci, ressemblant à une nef de cathédrale. L'appellation de « Bunker Cathédrale » est aussi utilisée par certains auteurs pour les désigner.
  2. L'U-865 du commandant Stellmacher, affecté à 10e flottille de sous-marins, a ainsi sombré lors de sa 1re mission opérationnelle, en septembre 1944, sans même avoir ni coulé, ni endommagé de navires alliés.

Références

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  10. Luc Braeuer 2008, p. 5
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  12. CĂ©rino et Lukas 2003, p. 17
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  14. Luc Braeuer 2008, p. 9
  15. CĂ©rino et Lukas 2003, p. 24
  16. Luc Braeuer 2008, p. 10
  17. CĂ©rino et Lukas 2003, p. 27
  18. Luc Braeuer 2008, p. 16
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  20. Luc Braeuer 2008, p. 17
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  31. Bourget-Maurice et Grand Colas 1997, p. 91
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  39. Bourget-Maurice et Grand Colas 1997, p. 94
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Bibliographie

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  • (de) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de l’article de WikipĂ©dia en allemand intitulĂ© « U-Boot-Bunker in Lorient » (voir la liste des auteurs).

Documentaires télévisés

  • Les abris sous-marins : 3e Ă©pisode de la sĂ©rie Nazi MĂ©gastructures, sur National Geographic.

Annexes

Articles connexes

Liens externes

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