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Opération Cobra

L’opération Cobra est le nom de code de l'offensive américaine menée fin dans le Cotentin pendant la bataille de Normandie afin de s'ouvrir la route de la Bretagne, et d'enfoncer les lignes de défense allemandes.

Opération Cobra
Description de cette image, également commentée ci-après
Fantassins américains et chars Sherman M4 de la 4th US Armored Division traversant la ville de Coutances (Normandie) lors de l'opération Cobra ().
Informations générales
Date -
Issue Victoire alliée
Pertes
1 800 tuĂ©s ou blessĂ©s3 200 tuĂ©s et
12 800 prisonniers de guerre

Seconde Guerre mondiale

Batailles

Bataille de Normandie

Opérations de débarquement (Neptune)

Secteur anglo-canadien

Secteur américain

Fin de la bataille de Normandie et libération de l'Ouest

Mémoire et commémorations

CoordonnĂ©es 49° 06′ 55″ nord, 1° 05′ 25″ ouest

La réussite de cette opération, suivie de la percée d'Avranches, puis le contournement des lignes allemandes, en fait le tournant majeur de l'offensive alliée en Normandie.

Contexte

Près d’un mois et demi après le débarquement du 6 juin, les Américains ont peine à avancer dans le bocage normand avec des pertes importantes pour un minimum de gains. Des centaines de milliers d'hommes commencent à saturer l'espace de la tête de pont. Il leur est impossible de lancer leurs chars à travers des champs barrés par de hautes haies et les chemins creux qui masquent des canons antichars allemands.

Le terrain est favorable aux actions défensives basées sur l'embuscade et le coup de main, dont les Allemands savent habilement tirer parti. Ils utilisent de façon judicieuse les haies, les chemins creux, les zones marécageuses : ils disposent aussi d'un armement adapté au combat rapproché ; plusieurs lignes de défense prennent appui sur les épaisses haies et brisent invariablement les attaques successives des forces américaines. Quelques haies prises à l'ennemi constituent une progression spectaculaire pour une journée de combat. Les pertes du côté des Américains sont très lourdes.

La progression amĂ©ricaine, entre La Haye-du-Puits et Lessay, leur coĂ»te 1 000 morts au km et la seule capture du mont Castre, 5 000 hommes. Sur la commune de Montgardon, près de La Haye-du-Puits, trois mètres conquis coĂ»tent un homme Ă  la 79e division d'infanterie amĂ©ricaine. Les soldats sont Ă©puisĂ©s, d'autant que pendant cette fin du mois de juillet des pluies continuelles finissent par user les troupes et retardent toute offensive.

Monter une attaque massive pour permettre à l'armée américaine de faire irruption plus au sud s'impose. Dans une région ouverte, elle serait à même d'exploiter pleinement sa grande mobilité et sa supériorité numérique.

Les forces allemandes

Le dispositif tactique de la 7e armĂ©e allemande entre PĂ©riers et Caumont. La division blindĂ©e Lehr (symbolisĂ©e par le rectangle PZ LEHR surmontĂ© de deux XX) est positionnĂ©e au sud de la route PĂ©riers-Saint-LĂ´ Ă  10 km Ă  l'ouest de Saint-LĂ´.

Ce sont des unitĂ©s usĂ©es par des semaines de combat. Les renforts arrivent au compte-goutte. Un total de 8 000 hommes et d'une cinquantaine de chars devront s'opposer Ă  la percĂ©e amĂ©ricaine. La Panzer Lehr, prĂ©sente sur le front, a beaucoup souffert des derniers combats. La 2e Panzerdivision SS (Das Reich), la 17e Panzergrenadier SS, la 5e Fallschirmjäger-Division, bien qu'amoindries, constituent encore une menace sĂ©rieuse.

Les forces américaines

C'est au VIIe corps, commandé par le général Lawton Collins, qu'est dévolue la mission de percer le front allemand. Six divisions dont deux blindées sont massées sur un front de huit kilomètres.
La 9e division d'infanterie et la 30e division d'infanterie doivent s'engager dans la brèche créée par un bombardement intense, suivies par la 1re division d'infanterie. Les deux divisions blindées doivent s'y engouffrer pour se ruer sur les arrières des Allemands.

Patton et ses rhinocéros

George Patton est arrivé avec la IIIe armée américaine dans le Cotentin (pour l'anecdote, il connaît la région d'Avranches car son voyage de noces l'avait conduit au Mont-Saint-Michel). Pour s'affranchir des obstacles formés par les haies, ses chars sont désormais équipés du dispositif « hedgecutter » que vient d'imaginer le sergent Curtis G. Culin : les blindés défoncent et traversent les haies avec une facilité qui en fait des obstacles dérisoires. Les chars ainsi équipés sont surnommés « rhinocéros ».

La percée

Le général Omar Bradley, commandant de la 1re armée, la conçoit ainsi : un bombardement aérien de saturation (tactique du « tapis de bombes ») sur un périmètre restreint doit annihiler toute défense et créer la brèche dans laquelle devraient s'engouffrer ses unités. Son choix s'est porté sur un quadrilatère entre les villages de La Chapelle-Enjuger et Hébécrevon (réunies depuis le dans la commune nouvelle de Thèreval), à quelques kilomètres au sud de la grande route joignant Saint-Lô à Périers.

DĂ©but juillet 1944, les Britanniques lancèrent l'opĂ©ration Goodwood, une opĂ©ration blindĂ©e Ă  l'est du front, visant Ă  dĂ©gager la ville de Caen. Les meilleures troupes allemandes restent devant les Anglo-Canadiens. La rĂ©partition des forces allemandes sur le front est dĂ©sĂ©quilibrĂ©e : 600 chars devant les Anglo-Canadiens contre 110 devant les AmĂ©ricains.

DĂ©cidĂ© initialement pour le 20 juillet, le bombardement est repoussĂ© de quelques jours pour cause de mauvais temps. Une première tentative, le lundi 24 juillet, tourne au dĂ©sastre Ă  cause d'une tragique erreur dans les communications. De nombreux avions alliĂ©s bombardent une partie des premières lignes amĂ©ricaines, tuant 25 soldats amĂ©ricains et blessant 131 hommes. « Certaines unitĂ©s amĂ©ricaines, folles de rage, ouvrirent le feu sur leur propre aviation »[1].

Le mardi 25 juillet

Le lendemain, 25 juillet, Ă  partir de 9 h 40 et durant une heure, 1 500 B-17 et B-24 labourent leurs cibles, appuyĂ©s de 1 000 autres bombardiers moyens et chasseurs-bombardiers : le plus grand bombardement en tapis de bombe de la Seconde Guerre mondiale est en cours, 4 000 tonnes de bombes sont larguĂ©es ce jour-lĂ , 60 000 bombes pour 12 km2 de bocage, soit 5 000 bombes incendiaires au km2. Le pilonnage de la zone se poursuit au moyen de 1 100 pièces d'artillerie, transformant le bocage en paysage lunaire. La commune de La Chapelle-Enjuger est rayĂ©e de la carte. Le front amĂ©ricain a Ă©tĂ© secrètement reculĂ© de plusieurs kilomètres afin de ne pas risquer de faire des victimes une seconde fois. Malheureusement, la prĂ©caution est insuffisante, il y a 111 tuĂ©s dans les rangs amĂ©ricains dont le Lieutenant gĂ©nĂ©ral Lesley McNair — le plus haut gradĂ© amĂ©ricain mort au combat sur le théâtre des opĂ©rations europĂ©en — et 490 blessĂ©s. Des hommes sont dĂ©chiquetĂ©s, des chars projetĂ©s en l'air comme des jouets, des soldats perdent la raison. Après ce dĂ©sastre le gĂ©nĂ©ral Bradley se souvient qu'Eisenhower, complètement abattu, dĂ©cida de ne plus appuyer les offensives au sol par des bombardements lourds[2] - [3].

La percĂ©e rĂ©alisĂ©e Ă  travers les positions allemandes — anĂ©anties par le bombardement effectuĂ© par une armada de 2 500 bombardiers lourds et moyens — par les trois divisions blindĂ©es du VIIe corps du 25 au 27 juillet.

En revanche, la Panzer Lehr Division du lieutenant-gĂ©nĂ©ral Fritz Bayerlein est pulvĂ©risĂ©e. Des chars Panther de 45 tonnes sont dĂ©truits par le souffle des dĂ©flagrations, des fantassins sont enterrĂ©s vivants dans leurs abris. En quelques heures, 1 500 hommes sont hors de combat, tuĂ©s, blessĂ©s, et la plupart des chars dĂ©truits. En tant qu'unitĂ© opĂ©rationnelle, la Panzer Lehr n'existe plus. L'après-midi, les 9e et 30e divisions amĂ©ricaines attaquent la zone et se heurtent, malgrĂ© tout, Ă  des petits Ă®lots de rĂ©sistance. Des groupes de combat, un canon et quelques fantassins constituent les principaux noyaux allemands de rĂ©sistance.

L'exploitation de la percée par les quatre corps de la 1re Armée US.

Le mercredi 26 juillet

Dès le lendemain, les troupes américaines occupent les objectifs désignés et le général Collins lance trois colonnes de blindés dans un étroit goulot au travers du front allemand : première colonne vers Coutances, deuxième et troisième colonnes dans une mission de flanc-garde ou protection.

Entre Marigny et Saint-Gilles, les Américains s'engouffrent dans la brèche et foncent vers le sud.

Le 26 juillet, le VIIe corps américain du général Collins progresse d'une dizaine de kilomètres, enlevant Saint-Gilles puis Canisy après avoir franchi la route allant de Coutances à Saint-Lô. Devant la menace d'encerclement qui se précise, les Allemands décrochent dans la nuit du 27 au . Vingt mille hommes du 84e corps échappent à l'encerclement.

Le vendredi 28 juillet

Les divisions blindées américaines déferlent irrémédiablement vers le sud et l'ouest. Lessay et Périers sont enlevées dans la journée. Coutances est libérée le 28 par la 4e division blindée américaine du général Wood. Cette avance foudroyante a encerclé des éléments en retraite du 84e corps allemand autour de la localité de Roncey. Des éléments de diverses unités, malgré une tentative de percée des lignes américaines, sont capturés, désarmés et le plus souvent laissés sur place, faute de temps pour les conduire vers un camp. Ces unités laisseront derrière elle d'énormes quantités de matériels : pièces d'artillerie, canons automoteurs, camions, etc. Von Choltitz, commandant du 84e corps allemand, tente vainement de reconstituer de nouvelles lignes de défense, devenues caduques avant même d'avoir pu être édifiées. Rien désormais ne peut stopper les Américains.

Le dimanche 30 juillet

Le 30 juillet, la 6e division blindée américaine du général Grow traverse Bréhal et Granville sans s'arrêter. Le soir même, Wood, fonçant toujours en pointe, s'empare d'Avranches. Dès le lendemain, il réussit à prendre intact le pont de Pontaubault, sur la Sélune, voie de passage du plus haut intérêt stratégique vers la Bretagne qu'envahit le VIIIe corps d'armée américain du général Troy Middleton.

À Servon, dans la rue principale (18, D107), on peut encore voir en 2022 sur la porte d'une grange l'inscription tracée au pinceau « This town off, limits for all troops[4] ».

La suite se déroule très vite vers la Bretagne.

Vers l'est, c'est plus difficile et le QG de la 1re division d'infanterie restera fixé à Brécey jusqu'au 13 à cause de la bataille de Mortain et de la contre-offensive allemande (opération Lüttig). Celle-ci se transforme en piège pour les Allemands lorsque se referme la poche de Falaise.

L'offensive dĂ©truit l'effectif de huit divisions allemandes : 28 000 hommes sont faits prisonniers en dont 20 000 au cours des six premiers jours de l’opĂ©ration Cobra, 12 000 hommes sont tuĂ©s. Cependant, de 15 000 Ă  20 000 hommes rĂ©ussissent Ă  se replier au sud-est de la Sienne. En moins d'une semaine, les troupes de Bradley ont rĂ©alisĂ© une percĂ©e de 60 kilomètres.

Du lundi 31 juillet au lundi 14 août

  • Le tempo. L'exploitation dans la foulĂ©e de la percĂ©e d'Avranches.
  • La conquĂŞte de la Bretagne par la 3e armĂ©e de Patton. Brest est atteinte le dimanche 7 aoĂ»t
    La conquête de la Bretagne par la 3e armée de Patton. Brest est atteinte le dimanche
  • Patton se tourne vers l'Est et entame l'encerclement des deux armĂ©es allemandes dans la poche de Mortain. Le 25 aoĂ»t, ce sera Paris.
    Patton se tourne vers l'Est et entame l'encerclement des deux armées allemandes dans la poche de Mortain. Le , ce sera Paris.

En six jours, la bataille vient brutalement de changer de visage. La rupture est faite et la guerre d'usure cède alors la place à une guerre de mouvement.

  • Le champ de bataille et le matĂ©riel (niveau technique)
  • Paysage typique de bocage de la rĂ©gion normande.
    Paysage typique de bocage de la région normande.
  • Un Sherman Rhino, Ă©quipĂ© Ă  l'avant d'une lame d'acier lui permettant d'Ă©ventrer les haies du bocage normand.
    Un Sherman Rhino, équipé à l'avant d'une lame d'acier lui permettant d'éventrer les haies du bocage normand.
  • TrouĂ©e dans une haie du bocage faite par un Sherman Rhino. Le niveau technique de la guerre.
    Trouée dans une haie du bocage faite par un Sherman Rhino. Le niveau technique de la guerre.
  • Ruines Ă  Coutances.
    Ruines Ă  Coutances.

Notes et références

  1. Paul Fussell, A la guerre. Psychologie et comportements pendant la Seconde Guerre mondiale, Paris, Seuil, collection Points, 2003, p. 27
  2. Paul Fussell À la guerre…, op. cit., p. 28.
  3. Omar N. Bradley et Clay Blair, A General's Life, New York, 1983, p. 280.
  4. « Google Maps », sur Google Maps (consulté le ).

Articles connexes

Lien externe

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