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La Marque jaune

La Marque jaune est la troisième aventure et le sixième album de la série de bande dessinée Blake et Mortimer, scenarisée et dessinée par Edgar P. Jacobs. Elle est publiée en planches hebdomadaires dans Le Journal Tintin du [1] au . Elle est ensuite éditée en album en aux Éditions du Lombard, puis rééditée en aux Éditions Blake et Mortimer. L'histoire a été traduite dans près d'une dizaine de langues. Elle a été adaptée en feuilleton radiophonique, en dessin animé et en jeu vidéo, et a fait l'objet de plusieurs projets de films.

La Marque jaune
6e album de la série Blake et Mortimer
Fresque murale du parcours BD de Bruxelles reproduisant la couverture de l'album,réalisée en 2005 par Art Mural
Fresque murale du parcours BD de Bruxelles reproduisant la couverture de l'album,
réalisée en 2005 par Art Mural

Auteur Edgar P. Jacobs
Genre(s) Aventure
Policier
Science-fiction

Personnages principaux Francis Blake
Philip Mortimer
Lieu de l’action Drapeau du Royaume-Uni Royaume-Uni (Londres)
Époque de l’action Années 1950

Pays Drapeau de la Belgique Belgique
Langue originale Français
Éditeur Les Éditions du Lombard
Première publication Du au dans Le Journal de Tintin
Nb. de pages 66 planches

Adaptations La Marque jaune (feuilleton radio, années 1950)
La Marque jaune
(jeu vidéo, 1988)
La Marque jaune
(dessin animé, 1997)
Albums de la série

Edgar P. Jacobs s'inspire notamment du cinéma expressionniste allemand des années 1920, avec un travail sur le monochrome et les jeux d'ombres lors des séquences de nuit et la présence d'un personnage de savant fou et de sa créature. L'album, considéré comme le plus abouti et le plus emblématique de Jacobs, est devenu une référence dans le monde de la bande dessinée franco-belge.

La bande dessinée raconte l'enquête du capitaine Francis Blake de l'« Intelligence Service » et de son ami le professeur Philip Mortimer sur la « Marque jaune », un mystérieux criminel ayant commis une série de cambriolages spectaculaires à Londres. La nécessité de retrouver l'individu se fait plus pressante lorsqu'il enlève quatre notables londoniens au nez et à la barbe de la police.

L'histoire

Résumé

Sur une face aveugle de l'immeuble des Éditions du Lombard à Bruxelles, une toile peinte due à Johan De Moor et aujourd'hui démontée représentait la plupart des héros de la BD franco-belge surmontés du personnage d'Olrik, « La Marque Jaune ».

À Londres, un soir de décembre, un homme parvient à dérober la Couronne impériale malgré la surveillance étroite des gardiens de la Tour de Londresplanches_1-3_2-0">[a 1]. Ce vol intervient à la suite d'une série de méfaits commis par un mystérieux criminel qui signe ses actes de la lettre μ tracée à la craie jauneplanches_1-3_2-1">[a 1] - [alpha 1].

Nul ne semble pouvoir arrêter ce personnage insaisissable surnommé la « Marque jaune ». Le capitaine Francis Blake, du MI5, est alors chargé par le Home Office d'assister l'inspecteur-chef Glenn Kendall de Scotland Yard dans son enquêteplanche_5_4-0">[a 2]. Il fait appel à son ami le professeur Philip Mortimer et tous deux passent la soirée au Centaur Club en compagnie de Leslie Macomber, rédacteur en chef du Daily Mail, de Sir Hugh Calvin, juge, du professeur Raymond Vernay, médecin, et du docteur Jonathan Septimus, psychiatreplanche_6_5-0">[a 3]. Ces quatre hommes sont enlevés successivementplanches_7-19_6-0">[a 4].

Pendant que Blake et Kendall suivent plusieurs pistes, Mortimer mène l'enquête de son côté et découvre un lien entre les quatre victimes : une affaire remontant à 1922 concernant la publication d'un livre intitulé The Mega Wave (L'Onde Méga), écrit par un mystérieux Dr Wade. Il déniche un exemplaire du livre et devine la véritable identité de ce dernier, qui n'est autre que Septimusplanches_20,_31_7-0">[a 5]. Il se rend aussitôt en taxi à Limehouse Dock où la Marque jaune, qui a donné rendez-vous à Blake dans un entrepôt abandonné, tente d'assassiner le capitaine avant de prendre la fuiteplanches_34-35_8-0">[a 6]. Arrivé sur place, Mortimer poursuit le criminel jusqu'à son repaire. Il découvre avec stupeur que sous la Marque jaune se cache son grand ennemi Olrik, manipulé par le Dr Septimus lui-mêmeplanches_42-47_9-0">[a 7].

Capturé, Mortimer se voit révéler toute l'histoire par Septimus : ce dernier est bien l'auteur du livre publié sous le pseudonyme du Dr Wade et dans lequel il expliquait que le corps humain était dirigé par une onde du cerveau qu'il était possible de contrôler à distance, une théorie qui lui valut d'être raillé par la communauté scientifique et la presse, Vernay et Macomber en tête. L'éditeur du livre intenta un procès en diffamation contre ces derniers, qui le remportèrent toutefois grâce au juge Calvin, profondément opposé aux thèses exposées dans ce livreplanches_49-52_10-0">[a 8]. En exil au Soudan pour tenter d'oublier cette affaire, Septimus avait rencontré Olrik errant dans le désert, réduit à un état d'amnésie par le cheik Razek[2] - planches_49-52_10-1">[a 8], dont il décida de faire son cobaye, son « Guinea Pig », et l'instrument de sa vengeance. Après avoir mis au point le « télécéphaloscope » lui permettant de contrôler le cerveau d'Olrik depuis un abri anti-aérien établi sous sa maison, Septimus le guida pour commettre les différents méfaits, jusqu'à l'enlèvement de ses rivauxplanches_49-52_10-2">[a 8].

Pendant ce temps, Blake et Kendall finissent par retrouver la trace de Mortimer grâce au conducteur du taxi qui l'avait conduit à Limehouse Dockplanches_60-61_12-0">[a 9]. La police envahit la maison de Septimus et s'attaque à la porte blindée dans la cave pendant qu'Olrik, libéré de l'influence de Septimus par une formule prononcée par Mortimer, se retourne contre son maître pour l'anéantir avec sa propre machineplanches_63-65_13-0">[a 10]. Au moment où Olrik se retourne contre Mortimer, les hommes du Yard font céder la porte, le mettant ainsi en fuite. Les prisonniers sont libérés et la Couronne impériale est finalement retrouvée au moment où débute le jour de Noëlplanches_65-66_14-0">[a 11].

Personnages

La Marque jaune met en scène les trois personnages principaux de la série : les deux héros, le capitaine Francis Blake et le professeur Philip Mortimer, et le principal antagoniste, le colonel Olrik. D'autres personnages récurrents de la série font partie de l'histoire dans des rôles très secondaires : Ahmed Nasir, qui fait sa dernière apparition sous la plume de Jacobs et joue ici le rôle d'un simple domestique[h 1], et Mrs Benson qui fait sa première apparition.

Lieux

Tour de Londres où se déroule la première séquence de la bande dessinée.

La majeure partie de l'action se déroule à Londres, au Royaume-Uni, notamment dans Central London. Cependant, l'épisode de l'accident du train, lui, se déroule dans le comté d'Essex, quelque part entre Chelmsford et Colchester, à environ deux miles de la gare de Withamplanche_20,_case_2_16-0">[a 12]. De plus, une partie du récit de Septimus se situe dans l'actuel Soudan : il explique s'être établi à Fanaka, petite localité de la province du Nil Bleu, puis avoir été sollicité par le commissaire du district installé à Wisko, poste en plein désertplanche_50_17-0">[a 13].


De nombreuses rues de la capitale britannique sont citées : Piccadilly Circus, Shaftesbury Avenueplanche_7,_case_1_21-0">[a 17], New Oxford Streetplanche_7,_case_11_22-0">[a 18], Coptic Streetplanche_7,_case_11_22-1">[a 18], Great Russell Street, Green Park, Narrow Street (en), Commercial Road (en), Cable Street (en), Holborn Circus (en), Endsleigh Street, Woburn Place (en) et Harley Street[alpha 2]. Ainsi que les quartiers de : Paddington, Kennington et Hoxton.

Création de l'œuvre

Contexte d'écriture

Au moment de commencer l'écriture de La Marque jaune, Edgar P. Jacobs, avec ses aventures de Blake et Mortimer, est un des piliers du magazine Le Journal de Tintin, l'un des principaux hebdomadaires pour la jeunesse, édité en Belgique et en France[3]. Le premier volet de la série, Le Secret de l'Espadon, dont la publication commence en [b 1], rencontre un succès immédiat, et devient le premier album de bande dessinée édité par Le Lombard en 1950[b 2] - [4].

À cette époque, le rythme de parution hebdomadaire des bandes dessinées tient en haleine les lecteurs et fait naître une attente considérable d'une semaine à l'autre, au point que certains lecteurs finissent par connaître par cœur les dernières péripéties de leur héros, avant de découvrir la suite du récit[5]. La deuxième histoire de Blake et Mortimer, Le Mystère de la Grande Pyramide, paraît de à [b 3] et connaît le même succès[6].

Décors extérieurs

Photographie en noir et blanc montrant une vue d'ensemble du bâtiment, pris de l'autre côté de la rivière qu'on voit au premier plan.
Le siège de Scotland Yard.

Pour composer les décors de son nouveau récit, Edgar P. Jacobs tient à s'imprégner de l'ambiance londonienne[7]. Il y séjourne pendant trois jours à la fin du mois d'août 1952, avec sa nouvelle compagne Jeanne Quittelier[h 2] - [b 4], un périple qui a tout d'une expédition exotique pour lui qui ne parle pas un mot d'anglais et qui n'a pas l'habitude de voyager[7]. Ce séjour est d'abord une déception : alors que l'auteur veut éprouver le brouillard et la pluie londonienne pour s'imprégner au mieux du mystère qui entourait la ville dans ses lectures de jeunesse, il découvre Londres au milieu d'un été caniculaire[7]. Pour autant, les rues de Londres évoquent encore l'Angleterre traditionnelle que l'on retrouve dans Blake et Mortimer, et le dessinateur se plait à voir dans les rues « des parapluies roulés et des chapeaux melons encore nombreux », ainsi que de « superbes Indiens enturbannés » qui rappellent « Kipling et les fastes de l'Empire[b 4] ».

Jacobs en profite pour mener un vaste travail de repérage et de documentation et passe ses journées à arpenter les rues de la capitale britannique[b 4]. L'aspect très réaliste des décors du récit est dû au fait qu'à son retour à Bruxelles, le dessinateur travaille à partir de croquis et de photographies qu'il a lui même pris sur le terrain[8].

Il prend de nombreux clichés de monuments emblématiques de la ville, comme la Tour de Londres, Law Courts, la fontaine du Shaftesbury Memorial au centre de Piccadilly Circus, le 10 Downing Street, résidence officielle du Premier ministre, ou encore le siège de Scotland Yard sur Victoria Embankment[7]. Il repère également Fleet Street, véritable centre de la presse britannique où il situe les bureaux du Daily Mail, et reproduit dans l'album la célèbre horloge du Daily Telegraph Building et l'agitation de cette rue alors que se dessine la coupole de la cathédrale Saint-Paul à l'arrière-plan[7].

Jacobs s'inspire également de bâtiments réels pour représenter des lieux fictifs. Ainsi, il reproduit une maison à l'architecture victorienne de Kensington Gate pour représenter l'entrée du Centaur Club où se retrouvent chaque soir Blake et Mortimer[7]. Mais alors qu'il avait prévu de situer la maison du Dr Septimus près de Gordon Square, dans le quartier de Bloomsbury où se situe le Royal Hotel où il séjourne avec sa compagne, il s'aperçoit que lieu ne convient pas à ses volontés, et finit par trouver, un peu plus loin, un immeuble à la façade de briques rouges et de stuc sur Tavistock Square[b 4] - [7].

La courte durée de son séjour ne permet pas au dessinateur de se rendre sur tous les lieux de l'intrigue. Par conséquent, Jacobs rapporte un exemplaire du Picture Book of London, dans lequel il puise de nombreux éléments pour réaliser les décors extérieurs de son aventure[7]. Il s'inspire également de son environnement immédiat. Ainsi, le dessin de la ruelle observée par Mortimer à travers une lucarne du Centaur Club, dans la cinquième planche, ressemble à la vue par la fenêtre d'une taverne située près de la Grand-Place de Bruxelles[5]. De même, une partie des décors de Limehouse Dock est réalisée à partir de photographies des docks du port de Bruxelles[7], ce qui n'empêche pas le dessinateur de représenter brillamment l'état d'abandon de ces quais, conséquence de la crise qui résulte de l'accession de l'Inde à l'indépendance[h 3].

Le souci de crédibilité et de réalisme du récit pousse également Jacobs à représenter fidèlement des véhicules réels : les voitures de police, dont celle volée par Olrik, sont des Wolseley 4/50, tandis que le taxi que prend Mortimer est un authentique modèle de Low Loader de la marque Austin datant de 1934. Blake conduit pour sa part un autre véhicule de cette marque, une Austin A40 Devon[9].

Décors intérieurs

Pour les besoins de son récit, Edgar P. Jacobs établit le domicile de Blake et Mortimer au no 99 bis Park Lane, un immeuble fictif dans une rue bien réelle, à proximité de Hyde Park. En réalité, l'immeuble qui inspire Jacobs fait l'angle de cette rue et de Upper Grosvenor Street, dont seul la porte de service donne dans Park Lane et porte le no 94[10]. Le dessinateur fait évoluer ses héros dans un salon typiquement britannique, orné de nombreux objets d'arts et de souvenirs rapportés par les deux amis. Pour les besoins de L'Affaire Francis Blake en 1996, le dessinateur Ted Benoit réalise un plan très précis de l'appartement des héros, en s'appuyant sur la seule représentation qu'en fait Jacobs dans La Marque jaune et où il recense trente-quatre objets de toutes tailles[10].

Ainsi, la cheminée est dominée par un imposant masque égyptien du pharaon Akhenaton, probablement rapporté du plateau de Gizeh au terme de l'aventure du Mystère de la Grande Pyramide. Une petite statuette figurant le scribe Thot est posée sur le rebord de cette cheminée, tandis que deux autres statuettes sont disposées sur des socles qui l'encadrent, l'une représentant le dieu Teotihuacan, l'autre d'origine zapotèque. Un tapis navajo est accroché sur le mur à droite de la cheminée, devant lequel figure une statue précolombienne. Une grande vitrine, à côté de laquelle figure un panneau d'art japonais, renferme de nombreux autres objets. Des objets de plus grandes dimensions sont également disposés dans ce salon, à l'image d'un grand sarcophage de granit auquel se heurte la Marque jaune, ou encore une grande statue d'Anubis[10].

Recherches scientifiques

Edgar P. Jacobs étudie les travaux de nombreux scientifiques, comme le neurochirurgien britannique Wylie McKissock (en), spécialiste de la lobotomie et dont les théories sont à l'époque vertement critiquées par la communauté scientifique[b 5], ou bien encore les recherches sur la visibilité des ondes cérébrales menées par Arnold Taylor et Georges de la Warr (en)[11]. L'auteur extrapole également les propriétés de l'onde Méga à partir des études du professeur Garbedian sur le surhomme[h 4].

Jacobs s'appuie sur des revues de vulgarisation pour mieux comprendre et documenter ces théories. Un numéro de Science pour tous lui permet d'élaborer les générateurs et l'éclateur qui réduit Septimus en fumée, tandis que le no 429 de du magazine Science et Vie, consacré à l'exploration électrique des mécanismes du cerveau, lui fournit une abondante documentation pour dessiner le télécéphaloscope qui permet au savant de contrôler le cerveau d'autrui[b 5] - [11] - [12].

Par ailleurs, Edgar P. Jacobs est encouragé dans sa démarche par les déclarations de plusieurs médecins, comme les docteurs Tow et Hugh Cairns (en) qui affirmaient que la question de la modification de la personnalité avait largement dépassé le stade de l'hypothèse dans les camps des États totalitaires[b 5].

La littérature

L'élaboration du scénario de La Marque jaune doit beaucoup aux discussions de l'auteur avec son ami de toujours, Jacques Van Melkebeke, dont la connaissance des mythes de la littérature anglo-saxonne est approfondie. Les deux hommes travaillent dans l'appartement de Jacobs, situé Avenue du Couronnement, à Bruxelles[b 6]. Edgar P. Jacobs imagine successivement plusieurs titres pour ce nouvel album : L'Homme aux lunettes jaunes, Un cas étrange, L'Onde Méga, L'Onde de Prométhée, ou encore Le Fluide maléfique. Ces titres évoquent ceux de chefs-d'œuvre britanniques incontournables, tels que L'Étrange Cas du docteur Jekyll et de M. Hyde, de Robert Louis Stevenson, ou Frankenstein ou le Prométhée moderne, de Mary Shelley[b 6], deux créatures qui terrorisent les habitants tout autant qu'un autre grand mythe littéraire, le Golem[13]. Plus largement, ce récit comme les autres conçus par Jacobs, est nourri des romans de merveilleux scientifique, un genre très en vogue au début du XXe siècle et dont l'auteur découvre quelques exemples dans les magazines qu'il affectionne dans sa jeunesse comme Je sais tout et Lectures pour tous[11]. Cette littérature d'imagination scientifique regorge de personnages de savants fous aux inventions prodigieuses, comme peut l'être le Dr Septimus et son télécéphaloscope[11].

Mais l'auteur puise également dans des lectures plus récentes. Jacques Van Melkebeke lui conseille la lecture d'un roman de Curt Siodmak, un écrivain berlinois exilé à New York, Le Cerveau du nabab (en), dont la traduction française paraît en 1949 et qui développe le thème de la manipulation des cerveaux. Plusieurs scènes du roman se retrouvent dans le récit didactique que propose le Dr Septimus à Mortimer à la fin de l'album[b 6]. De même, par sa structure et son suspense, le rituel de La Marque jaune rappelle celui des Dix Petits Nègres, le roman policier d'Agatha Christie[b 7].

Sur un autre plan, en situant le lieu de rendez-vous entre le capitaine Blake et la Marque jaune dans le quartier de Limehouse, Edgar P. Jacobs s'inscrit dans une tradition littéraire qui fait de ce quartier de l'East End londonien « le lieu du crime exotique et ingénieux », à commencer par les romans de l'écrivain britannique Sax Rohmer mettant en scène le docteur Fu Manchu, ou bien les œuvres du romancier belge Jean Ray consacrées aux aventures de l'inspecteur Harry Dickson[14].

Le cinéma

Les références cinématographiques sont nombreuses dans l'album, en particulier celles tirées du cinéma expressionniste allemand des années 1920, que Jacobs et Van Melkebeke appréciaient beaucoup et dont l'esthétique et l'atmosphère fantastique a inspiré plusieurs générations d'artistes[b 6] - [15]. En premier lieu, Le Cabinet du docteur Caligari, un film de Robert Wiene datant de 1920 est une importante source d'inspiration pour La Marque jaune, tant pour son atmosphère onirique et cauchemardesque que pour la relation de maître à esclave qui se noue entre les protagonistes de l'histoire[15]. Dans cette œuvre, le docteur Caligari use de l'hypnose sur le personnage de Cesare pour que ce dernier commette des crimes à sa place, ce qui permet au docteur d'assouvir son désir de vengeance envers la société, à l'instar de Septimus dans La Marque jaune[b 6]. Dans un premier temps, Olrik apparaît comme une sorte de somnambule, manipulé et privé de toute volonté, avant de se retourner contre son maître[15].

Ce conflit opposant le maître à sa créature évoque le cas de Victor Frankenstein, tel qu'il apparaît dans les deux films du réalisateur anglais James Whale, Frankenstein (en 1931) et surtout La Fiancée de Frankenstein (en 1935)[b 6]. Dans ce dernier film, le savant est secondé par un être maléfique, le Dr Septimus Pretorius, interprété par l'acteur Ernest Thesiger, et qui inspire ainsi le nom du personnage de Jacobs[b 6] - [12]. L'hypnose pratiquée par le docteur au moyen d'un disque tournant évoque quant à elle une scène du film La Femme en vert, réalisé par Roy William Neill en 1945[16]. Elle rappelle également le personnage du docteur Mabuse, créé par l'écrivain luxembourgeois Norbert Jacques et mis en scène par Fritz Lang dans le film Docteur Mabuse le joueur en 1922. De même que Mabuse, Septimus menace l'ordre moral et politique de son pays[15].

Photographie en noir et blanc d'un homme en costume tenant une cigarette allumée dans sa main droite.
Conrad Veidt (en 1941) inspire les traits du Dr Septimus.

Les inspirations physiques du Dr Septimus sont multiples : Edgar P. Jacobs reprend les traits de l'oncle de sa compagne, Arthur Vasselio[h 5], mais s'inspire également de l'acteur Conrad Veidt dans le film Le Crime du docteur Warren de Friedrich Wilhelm Murnau, sorti en 1920[h 5]. Sa personnalité recouvre elle aussi de multiples inspirations : outre le docteur Caligari et le docteur Mabuse déjà cités, Septimus reprend également le côté savant fou, mégalomane et meurtrier du Dr Gogol, incarné par Peter Lorre dans Les Mains d'Orlac de Karl Freund en 1935[h 5] - [15].

L'apparence de ce personnage, vêtu d'un chapeau, d'une cape et de lunettes noires, sert également de modèle à Jacobs pour habiller Olrik, quand celui-ci s'infiltre de nuit dans l'appartement de Blake et Mortimer. Son visage masqué par ces imposantes lunettes évoque également l'apparence de l'acteur Claude Rains dans L'Homme invisible de James Whale en 1933, un film adapté du roman éponyme de H. G. Wells, l'écrivain fétiche d'Edgar P. Jacobs[15]. Olrik emprunte également la force dévastatrice et le rire sardonique de ce personnage[h 5]. Sa longue cape rappelle également celle du Fantômas de Jean Sacha, sorti en 1947[h 5], ou celle de Judex, le héros créé par le réalisateur Louis Feuillade en 1916[15].

Dans un article publié dans la revue Positif en 1986, Sylvain Bouyer croit déceler une ressemblance entre la silhouette du personnage principal du film L'Homme au masque de cire, réalisé par André de Toth en 1953, et celle de la Marque jaune[17], ce que contredit Charles Dierick en s'appuyant sur un argument chronologique : le film est projeté dans les cinémas bruxellois à partir du , alors que Jacobs est déjà en pleine préparation de son album, et ce depuis un an au moins[18]. Par ailleurs, les deux images rapprochées par Bouyer présentent un certain nombre de différences, en particulier les points de vue adoptés par le réalisateur et le dessinateur[18].

Photographie en noir et blanc montrant une peinture accrochée au mur, où figure un homme au regard halluciné avec la lettre M dans son dos.
Une peinture murale dans un café-dansant de Bavière évoque Peter Lorre dans M le maudit.

Le M tracé à la craie jaune à voir plutôt comme la capitale de la lettre grecque « µ » (mu) que comme la lettre latine « M » [15] avec lequel Olrik signe ses forfaits, est une référence explicite au film M le maudit de Fritz Lang, sorti en 1931. Dans ce film, un assassin d'enfants est marqué d'un M à la craie par la pègre qui le traque. Une case de l'album où l'on voit la marque sur le dos du pardessus de Blake est directement reprise d'un plan du film[19] - [20]. Edgar P. Jacobs transpose également le regard halluciné de l'acteur Peter Lorre dans les traits d'Olrik[21].

D'autres séquences de l'album reprennent des scènes de films célèbres. Ainsi, la traque de la Marque jaune dans les docks désaffectés de Londres évoque les scènes de course-poursuite dans un décor industriel du film L'Assassin sans visage de Richard Fleischer, sorti en 1949, tandis que la poursuite de la Marque jaune par Mortimer dans les égouts rappelle la cavale du personnage joué par Orson Welles dans le film de Carol Reed Le Troisième Homme, sorti la même année[b 8] - [15].

Clins d'œil historiques

Photographie en couleurs montrant un groupe de personnes sur le balcon du palais.
Apparition de la reine sur le balcon du palais de Buckingham après le couronnement.

Avec l'épisode du vol de la Couronne impériale, placé en ouverture de La Marque jaune, Edgar P. Jacobs adresse un clin d'œil à l'histoire contemporaine. La publication de son nouveau récit commence le , soit deux mois après le couronnement de la reine Élisabeth II. La cérémonie est mondialement diffusée en direct à la télévision, constituant une première historique[h 2]. Pour représenter la couronne, le dessinateur n'a à sa disposition qu'une vieille photo en noir et blanc datant de 1911, seul document fiable qu'il ait trouvé[h 6].

Lettre écrite à l'encre rouge sur papier.
Fac-similé du recto de la lettre « Dear Boss » reçu par la Central News de Londres et signée Jack l'Éventreur.

Par ailleurs, le chef du gouvernement britannique dessiné par Edgar P. Jacobs dans La Marque jaune, cigare à la main, évoque Winston Churchill, Premier ministre de 1940 à 1945 puis de 1951 à 1955[22].

L'historienne Christèle Dedebant relève de nombreuses similitudes entre l'intrigue de La Marque jaune et l'affaire Jack l'Éventreur, du nom du tueur en série ayant sévi dans le district de Whitechapel en 1888, dont la figure du monstre insaisissable semant la panique sur son passage imprègne l'album[21]. En outre, de même que l'assassin envoyait des courriers à l'agence Central News, le professeur Septimus apparaît comme un expert en communication, qui annonce ses forfaits en s'adressant au Daily Mail[21].

Publications

En français

Comme les précédentes aventures de la série, La Marque jaune paraît dans le magazine belge Tintin au rythme d'une planche par semaine, du (no 31/53) au (no 45/54)[23]. La première publication en album, aux éditions du Lombard, a lieu en pour la Belgique et le mois suivant en France[23].

Les éditions Dargaud rééditent le titre dans la « Collection du Lombard » en [23]. Cette même année, à la demande du directeur commercial du Lombard, Jacobs doit recomposer son album pour le ramener de 66 à 62 planches, ce qui contraint le dessinateur à reprendre entièrement certaines pages de la fin du récit. Finalement, ce nouveau projet de découpage est abandonné et l'album conserve sa pagination initiale[24]. Par la suite, l'album est réédité et réimprimé plus d'une dizaine de fois entre 1959 à 1987 aux Éditions du Lombard en Belgique et aux éditions Dargaud en France[25]. Créées en 1982, les Éditions Blake et Mortimer proposent une version avec une nouvelle colorisation et un nouveau lettrage en [23].

En 1977, l'éditeur Phigi publie l'album en noir et blanc dans un tirage limité à 800 exemplaires[25].

En 1985, l'éditeur Blue Circle publie l'album en quadrichromie avec un dos toilé dans un tirage limité à 5 000 exemplaires[26].

En 1987, l'éditeur Dargaud publie l'album sous emboitage toilé, accompagnée d'un disque microsillon du feuilleton radiophonique "La Marque Jaune" des années 1950. Edité à 1 250 exemplaires dont 100 hors commerce[27].

En , l'éditeur publie La Marque jaune telle que publiée dans Le Journal de Tintin dans un tirage limité à 5 000 exemplaires. L'album possède la couverture refusée par Hergé, et est accompagné d'un cahier de 28 pages comprenant des croquis, dessins, études et storyboards de la main d'Edgar P. Jacobs[28].

En 1987, France Loisirs édite l'album[29].

En novembre 2017, Dargaud fait paraître l'intégrale des tomes 1 à 6 de Blake et Mortimer dans la Collection Niffle en noir et blanc[30].

Traductions

L'aventure a été traduite dans plusieurs langues :

Censure

Comme d'autres aventures de la série, La Marque jaune est victime de censure à plusieurs reprises, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur du Journal de Tintin[b 9] - [38].

Directeur artistique du magazine, Hergé refuse sans en avertir Jacobs son projet de couverture pour le lancement de La Marque jaune[h 7]. Dans cette première version, Jacobs dessine une silhouette sombre et monstrueuse surgissant du Palais de Westminster et menaçant Londres, tandis qu'au premier plan, Blake et Mortimer, de face, la regardent du coin de l’œil, tenant chacun une arme à feu dans la main. L'étrange silhouette, enveloppant le ciel, évoque autant une illustration de Gino Starace pour la promotion du roman Fantômas que le Nosferatu le vampire de Friedrich Wilhelm Murnau ou bien encore une scène du film Faust, une légende allemande de ce même réalisateur, montrant le Diable enveloppant de sa cape les toits d'une cité médiévale[b 9]. Cette couverture est jugée trop effrayante par Hergé comme par l'ensemble du comité de rédaction, qui recommande à Jacobs de remplacer l'énorme personnage central par un ciel gris et menaçant, tout en supprimant le revolver tenu par Blake[b 9]. Pour Jacques Langlois, ce dernier choix étonne dans la mesure où il semble moins réaliste que ce soit un civil qui porte une arme et non un militaire, tout en soulignant que l'effacement du revolver de Blake est « maladroitement réalisé »[h 7].

Edgar P. Jacobs garde durablement un souvenir amer de cette censure interne et refuse pendant près de cinq ans de livrer une nouvelle couverture pour le magazine[b 9]. Le , à l'occasion des sept ans du Journal de Tintin, il réalise un dessin dédicacé à son directeur Raymond Leblanc, fondateur du journal, dans lequel il se représente à sa table de travail avec le fantôme menaçant de Tintin au-dessus de lui, une allusion non déguisée et directe à cet épisode[39].

Par ailleurs, Edgar P. Jacobs, montre le Dr Septimus en train de consulter un numéro du magazine Illustrated peu avant sa disparition dans le train[40]. Il reproduit ainsi la couverture du numéro du , qui montre la danseuse Violetta Elvin (en) en tutu, assise sur une malleplanche_18_77-0">[a 19] - [41]. Le détail, pourtant insignifiant dans l'espace de la case, est inacceptable pour le comité de censure français, qui juge ce contenu érotique et en demande la modification[42] - [b 10].

La séquence d'autocritique forcée de Vernay, Calvin et Macomber, à la fin du récitplanche_59_81-0">[a 20], scandalise Georges Dargaud, l'éditeur français du magazine Tintin, qui craint qu'une telle scène n'alerte la censure. Du propre aveu de Jacobs, la réalisation des dernières planches de l'aventure se fait ainsi dans une « atmosphère de désapprobation »[b 10].

Analyse

Le chef-d'œuvre de Jacobs ?

Le sémiologue Pierre Fresnault-Deruelle soutient que La Marque jaune est le chef-d'œuvre du dessinateur et considère que « cette histoire […] fait partie des quelques BD cultes de l'âge d'or de l'École dite de Bruxelles »[13]. Il la rapproche du courant esthétique dit du « merveilleux noir », qu'il décrit comme « un rejeton du romantisme anglo-saxon, où le plaisir de la peur constitue le ressort majeur de la narration »[13]. Pour Claude Le Gallo, « La Marque jaune est le cœur de l'œuvre jacobsienne, le carrefour de son monde »[8], tout comme pour le journaliste Julien Bisson qui affirme qu'« il n'est pas d'album plus abouti ni plus emblématique du style Jacobs que La Marque jaune », dans la mesure où ce récit « concentre à lui seul tous les éléments qui ont fait le succès du duo londonien : suspense, virilité et anticipation scientifique »[43].

Pour Benoît Mouchart et François Rivière, biographes d'Edgar P. Jacobs, La Marque jaune est « un chef-d'œuvre de suspense fondé sur la rythmique des coups de théâtre », dans lequel l'auteur « renoue avec un goût du mélodrame qu'il porte en lui depuis longtemps »[b 7]. Ils affirment que Jacobs livre « un thriller mi-policier, mi-fantastique »[b 11], qui « s'impose comme une subtile réappropriation de matrices antérieures issues de la mythologie populaire »[b 11]. Au contraire de Hergé, dont les Aventures de Tintin s'appuient le plus souvent sur des évènements réels, l'œuvre d'Edgar P. Jacobs se nourrit des nombreuses références littéraires, graphiques et cinématographiques que l'auteur accumule depuis l'enfance et qu'il reconstruit pour créer son univers personnel. En ce sens, Benoît Mouchart et François Rivière qualifient Jacobs d'auteur « postmoderne avant l'heure », et considèrent que La Marque jaune est l'exemple le plus expressif de ce style[b 8]. François Rivière met en avant la noirceur et la sophistication du récit, poussées plus loin encore que dans les deux premiers épisodes de la série[5].

Cette aventure suscite l'admiration des propres collègues d'Edgar P. Jacobs, comme l'explique le dessinateur Albert Weinberg : « Ce qui nous frappait tous dans cette histoire, c'est qu'elle n'avait rien à voir avec ce qui paraissait alors dans la presse pour enfants. C'était très éloigné des histoires d'Hergé, qui restent bien innocentes en comparaison de ce récit angoissant »[b 12]. Dès sa parution dans le magazine Tintin, La Marque jaune rencontre un succès considérable, au point que de jeunes lecteurs s'amusent alors à dessiner à reproduire le symbole sur les murs de leur ville[5].

Place de l'album dans la série

La séquence de l'intrusion de la Marque jaune dans l'appartement de Blake et Mortimerplanche_23_85-0">[a 21] est décrite comme l'une des plus réussies de l'album[b 13], au point que le sémiologue Pierre Fresnault-Deruelle y consacre une étude dans la revue Communication et langages en 2003[13]. L'intrusion d'Olrik renvoie implicitement à un épisode de l'aventure précédente, Le Mystère de la Grande Pyramide, quand les héros et leur rival s'enfonçaient dans les souterrains de la pyramide de Khéops à la recherche de la chambre d'Horus. L'ambiance des deux scènes est à ce point comparable que Jacobs utilise les mêmes tons de couleur, éclairant l'appartement d'une lumière orangée rappelant l'ambiance de la chambre souterraine, ce qui contribue à faire perdre son sang-froid à l'intrus[13] - [44]. Ainsi, selon Pierre Fresnault-Deruelle, « cette séquence possède la rarissime particularité de jouer sur la mémoire des couleurs, celle que retrouve le Méchant (Olrik, alias La Marque jaune) mais aussi ― et ceci sans qu'il soit explicitement prévenu ― le lecteur. Comme s'il s'était agi, pour Jacobs, de mettre ce dernier dans des circonstances psychiquement analogues à celles déjà vécues, mais non verbalisées, par le maléfique personnage »[13]. Par ailleurs, les révélations apportées par le Dr Septimus à Mortimer à la fin de l'album permettent à l'intrigue de La Marque jaune de s'imbriquer définitivement dans celle de l'aventure précédente, car elle permet d'expliquer ce qu'il advient d'Olrik, errant dans le désert après l'effacement de sa mémoire par le cheikh Abdel-Razek au terme du Mystère de la Grande Pyramide[45].

De fait, La Marque jaune s'inscrit dans la continuité des précédents récits. Mais plus encore, l'album sert de « mètre étalon » aux suivants. Le critique de bande dessinée Nicolas Tellop constate que, depuis la reprise de la série en 1996 avec L'Affaire Francis Blake, première aventure éditée depuis la mort de Jacobs, La Marque jaune est le canevas à partir duquel les autres auteurs peuvent continuer à faire vivre Blake et Mortimer, en dépit de la pluralité des thèmes abordés[45].

Troisième aventure écrite par Edgar P. Jacobs, La Marque jaune est en effet celle où l'auteur introduit de nombreux éléments narratifs et graphiques qui seront repris dans les albums suivants, y compris par les nouveaux auteurs de la série[45]. Au début du récit, Blake et Mortimer se retrouvent au Centaur Club, un de « ces lieux de code et d'une initiation propre à un groupe », dont « l'aura feutrée irradie d'un fantasme typiquement britannique » et qui devient le lieu de rendez-vous habituel des deux amis lorsqu'ils séjournent à Londres[45]. C'est aussi dans La Marque jaune que le code vestimentaire des deux héros se fige : cravate et uniforme militaire pour Blake, veste en tweed beige ou vert et nœud papillon pour Mortimer[45]. Par ailleurs, l'intrigue est résolue en partie par les révélations de Septimus sur son passé, à la manière d'un flashback utilisé régulièrement dans les autres albums de la série, de même qu'un certain nombre d'ingrédients narratifs : ainsi, la course-poursuite de La Marque jaune est reprise dans L'Affaire Francis Blake, l'usage du masque porté par le méchant, qui s'inscrit dans la tradition du roman-feuilleton, est repris dans Le Serment des cinq Lords, le laboratoire secret de Septimus évoque ceux du professeur Miloch dans SOS Météores et Le Piège diabolique ou celui du Dr Zong dans L'Étrange Rendez-vous, et la descente de Mortimer dans les égouts inspire celle de Blake dans ceux de Moscou dans La Machination Voronov[45].

Réalisme expressif

L'écrivain Jean-Paul Dubois, qui a consacré un ouvrage à l'album, salue la précision du détail exercée par le dessinateur et considère qu'elle est au service de l'univers fantastique qu'il souhaite mettre en place dans la mesure où elle renforce la ligne de rupture entre le réel et l'étrange : « Les vues ressemblent à la réalité, nous permettent d'identifier les lieux. Mais elles fonctionnent avant tout comme des images-signes, chargées d'un sens extraordinairement puissant. Le Londres quotidien a disparu, pour faire place à l'univers imaginaire jacobsien. C'est ce qui rend d’ailleurs à proprement parler fantastique un récit comme La Marque jaune : la normalité et les éléments science-fictionnels s'y interpénètrent intimement[46]. » Jean-Paul Dubois souligne également « l'expressivité exacerbée » des personnages mis en scène par Jacobs, influencée directement par le passé de comédien du dessinateur, duquel il retient « l'importance du geste et de l'expression du visage, qu'il devait rendre suffisamment clairs pour qu'ils soient perceptibles même par le spectateur du dernier rang ». Pour Jean-Paul Dubois, « il en résulte une certaine emphase dans les positions des personnages, et une utilisation percutante de certains gros plans[47] », à l'image de la vignette plaçant le lecteur sous l'effet hypnotique du regard du Dr Septimus[48].

Benoît Mouchart et François Rivière soulignent eux aussi le réalisme des compositions du dessinateur, et précisent qu'en s'éloignant des simplifications graphiques de la ligne claire qu'il avait adoptées dans sa réalisation du Mystère de la Grande Pyramide, Edgar P. Jacobs « retrouve la possibilité de signifier le mystère au moyen d'effets de plume nettement plus subtils »[b 14]. François Rivière insiste sur la qualité graphique des planches originales en noir et blanc, dont le graphisme repose sur un travail de fines hachures tracées à la plume[5]. Quant à la structure des planches, Jacobs s'éloigne de la rigoureuse symétrie verticale qui marquait ses premiers albums pour une composition qui repose sur l'alternance des plans d'ensemble et des gros plans[9].

Traitement de la couleur

Dans ce récit enfermé dans la pénombre et la nuit, Edgar P. Jacobs transcrit le célèbre brouillard londonien par de fines hachures qui atténuent les couleurs[49]. Frédéric Soumois relève l'utilisation constante du rouge pour exprimer la menace et l'angoisse. Ainsi, dans la scène d'ouverture, le rouge est utilisé comme une lueur de la nuit, de même que dans la cabine du conducteur de l'express qui emmène Blake et le Dr Septimus loin de Londres, ou à travers les braises rougeoyantes qui éclairent le salon de l'appartement de Blake et Mortimer. De la même manière, le laboratoire souterrain de Septimus est représenté avec des murs rougeâtres[49].

Dans La Marque jaune, Jacobs dessine pour la première fois des images totalement monochromes une innovation dans la bande dessinée à l'époque[49]. Il utilise la règle du contraste pour ses récitatifs de couleur : là où les séquences de nuit sont majoritairement bleues, les récitatifs sont bordeaux[19].

Pour Mouchart et Rivière, le fait que la ville de Londres soit presque toujours représentée de nuit dans l'album témoigne de la volonté du dessinateur de mettre en place une ambiance morbide : « dans des ambiances savamment colorées, prenantes, et toujours propices à l'apparition du mystère, Jacobs réussit à révéler la part d'inquiétude qui suinte des décors policés de son Londres de carte postale »[b 13]. Dès les premières planches, une atmosphère étouffante se met en place et, dans la nuit londonienne, l'étrange fait irruption au sein du réel. Pour Mouchart et Rivière, cette scène introductive n'est pas seulement un « hommage sarcastique » au proche Couronnement d'Élisabeth II, mais aussi au « génie du clair-obscur d'Arthur Rackham »[b 14]. Le critique de bande dessinée Nicolas Tellop considère que ces trois premières planches contiennent « toute la magie de Jacobs » : « la scène se déroule à l'époque contemporaine, et pourtant l'architecture moyenâgeuse du décor la renvoie à une intemporalité gothique, qui brasse dans un même geste l'imaginaire historique des romans de Walter Scott et les récits à énigmes d'Edgar Wallace[9] ». Cette ambiance nocturne permet au dessinateur de faire montre de toute sa maîtrise des jeux de lumière, en s'inspirant largement des éclairages du cinéma expressionniste. La poursuite de la Marque jaune dans les docks londoniens donne lieu à une profusion de rais de lumière qui rappellent ceux éclairant Mortimer au sommet de la pyramide dans le premier tome du Secret de l'Espadon[9].

Composition, organisation de l'espace et disposition des personnages

Sylvie Freyermuth, qui propose une lecture sémiolinguistique de l'espace dans les aventures de Blake et Mortimer, constate que « des régularités d'organisation spatiale qui passent par un parallélisme entre les vignettes, une identité ou une symétrie des positions des personnages » se dégagent de l'œuvre du dessinateur[50]. D'après son analyse, Jacobs use d'une « stratification de l'espace plus ou moins sophistiquée selon les aventures » qui repose « sur une forme contrastive binaire repérable dans la même vignette, d'une vignette à l'autre, dans l'organisation de la planche et la totalité de l'album »[50]. D'une manière générale, toutes les représentations des personnages en position haute témoignent de leur supériorité, et inversement. Ainsi la Marque jaune est constamment représentée en position dominante par rapport aux policiers qui la traquent, un effet parfois accentué par un cadrage du dessin en contre-plongée. Une position haute dans l'image signifie alors tout autant le pouvoir que le danger. Dès son apparition dans les premières planches de l'album, la créature maléfique apparaît en position de surplomb des gardiens de la Tour de Londres désemparés réduits à une situation d'infériorité[50]. À son tour, Olrik est représenté à plusieurs reprises à genoux sous le fouet du Dr Septimus, mais quand il se rebelle et se libère de son asservissement, la position s'inverse[50].

Le récit de l'humiliation subie par Septimus au moment du scandale du livre The Mega Wave offre un autre exemple de cette stratification de l'espace : le juge Calvin, qui condamne les théories de Septimus, est représenté dans la partie supérieure de la vignette, surplombant la salle d'audience du tribunal, le doigt pointé vers le ciel, sentencieux[50]. Dans la vignette qui suit, Septimus embarque pour le Soudan et gravit la passerelle du paquebot dans un mouvement ascendant qui marque la première étape de sa vengeance et « représente bien la conquête du pouvoir que nourrit sa rancœur imprescriptible »[50].

Séquence emblématique, l'intrusion d'Olrik dans l'appartement de Blake et Mortimer témoigne de la maîtrise du dessinateur dans le symbolisme qui se dégage de ses composition. La planche repose sur une construction descendante où la lecture coïncide avec la lente progression du personnage dans l'appartement. Pour Pierre Fresnault-Deruelle, son exploration s'apparente à une quête dans le mesure où il se dirige « vers une sorte de Saint des saints, à savoir le salon-musée où sont exposés les objets religieux rapportés par Mortimer des pays où ses missions l'ont conduit ». De fait, les cases de la planche deviennent pour le lecteur « les étapes d'un long creusement et les strips autant de corridors menant au lieu enfoui de quelque révélation »[13]. La sixième case, située au centre de la planche, montre Olrik dans l'escalier et joue un rôle essentiel dans cette construction. D'une part, l'escalier « métaphorise à lui seul le cheminement du personnage » et la case marque une limite « tant physique que dramatique » entre l'intrusion du malfaiteur et ce qui lui arrive ensuite, quand il n'a plus de prise sur son environnement. D'autre part, l'escalier confère au personnage une allure théâtrale[13].

Dans l'avant-dernière case de cette planche, la Marque jaune lâche une courte exclamation en s'arrêtant sous l'effigie d'un pharaon. Pierre Fresnault-Deruelle insiste sur l'effet « saisissant » qui se dégage de cette illustration, comme si le personnage et la statue échangeaient leur rôle, une impression renforcée par le sourire porté par le masque du pharaon. Dans la dernière vignette, seul le masque est représenté de profil et entouré d'une mystérieuse aura. Cette conclusion augmente encore la tension de la planche tout en stimulant l'attente du lecteur, pressé de connaître la suite des évènements[13].

Une œuvre « musicale »

Comme de nombreux spécialistes de l'œuvre d'Edgar P. Jacobs, François Rivière évoque l'influence de l'opéra, dont le dessinateur était un grand amateur, dans la construction de ses récits : « Comme dans la musique, [Jacobs] travaille toujours à partir d'une introduction pour ensuite donner forme à plusieurs mouvements. Or, dans ses albums, le premier mouvement est toujours très beau, et celui de La Marque jaune est éblouissant. Quand on dit qu'il a été marqué par l'opéra, ce n'est vraiment pas une légende[5] ».

La journaliste Antoinette de Lornière décrit le scénario de La Marque jaune comme « un opéra en trois actes »[23].Le premier s'ouvre par le vol spectaculaire de la couronne impériale à la Tour de Londres une nuit de décembre et se poursuit jusqu'aux enlèvements successifs du rédacteur en chef du Daily Mail, Macomber, du juge Calvin, du médecin Vernay et du Dr Septimus. Dans ce premier acte, qui présente les faits et les différents protagonistes de l'aventure, la Marque jaune est invisible et la police comme Blake et Mortimer ne peuvent qu'assister impuissants à ses méfaits retentissants[23]. Tout au long de cette ouverture, la sonnerie de Big Ben rythme l'aventure, annonçant par ses coups le danger à venir et l'enlèvement des différents personnages[50]. Dans le second acte, l'aventure suit deux lignes parallèles, Blake enquêtant sur le terrain tandis que Mortimer entame des recherches de son côté. Ces deux lignes se rejoignent lorsque Mortimer, qui vient de découvrir la véritable identité du Dr Wade se précipite à Limehouse Dock où la Marque Jaune a donné rendez-vous à Blake, un véritable guet-apens à l'issue duquel le criminel parvient à prendre la fuite. La capture de Mortimer inaugure le troisième et dernier acte, celui des résolutions, qui s'achève positivement par la libération des différentes victimes et la découverte de la couronne volée, cependant qu'Olrik parvient à s'échapper[23]. Le linguiste François Jacquesson salue la construction de la deuxième partie de l'aventure, dans laquelle les deux héros sont dissociés[51]. Tandis que Blake se rend au rendez-vous fixé par la Marque jaune à Limehouse Dock, le professeur Mortimer reçoit la visite de l'archiviste du Daily Mail qui lui apporte le livre du Dr Wade contenant la clé de l'énigme dans sa dédicace. Dès lors, le lecteur suit en alternance les deux héros, jusqu'à ce que Blake découvre Mortimer dans le laboratoire souterrain du Dr Septimus par le biais d'un écran. François Jacquesson y voit une trouvaille sur le plan narratif : « Avant cette page, je ne crois pas qu’il y ait d’exemple (dans l’histoire de la fiction) où des héros séparés sur des fils distincts de l’action, se retrouvent d’abord au moyen d’un écran »[51].

Structure narrative et tension du récit

À la manière des romans de H. G. Wells, le récit de La Marque jaune s'ouvre in medias res : la créature a déjà perpétré plusieurs forfaits sensationnels qui sont évoqués par la presse au lendemain du vol à la Tour de Londres. Ces crimes ne sont pas montrés au lecteur et l'auteur lui laisse le soin de les imaginer. Jacobs use abondamment de l'ellipse dans cette aventure, de sorte qu'il « affirme par l'exemple combien la bande dessinée porte en elle-même une imagination beaucoup plus puissante que les seules images qu'elle déroule », selon l'analyse de Benoît Mouchart et François Rivière[b 15]. À tout moment, Jacobs offre au lecteur la possibilité de combler par sa propre imagination ce qui n'est ni raconté, ni montré, mais seulement suggéré[b 15].

Contrairement aux deux premiers albums, qui s'étalent sur plus d'une centaine de planches, La Marque jaune adopte une pagination plus conventionnelle qui impose à l'auteur un rythme plus soutenu, sans aucun temps mort, et d'une densité incomparable[5]. François Rivière ne reconnaît qu'un seul « écueil » dans cette aventure, le dénouement précipité de la dernière planche, faisant que « le récit se termine en queue de poisson »[5]. Ce dernier épisode vaut à Jacobs de nombreuses critiques qui regrettent une intrigue trop rapidement close, mais l'auteur l'explique par la contrainte d'une pagination fixe imposée par l'éditeur[24]. Jacques Van Melkebeke, qui conseille Jacobs tout au long de la rédaction, considère que cette fin précipitée est due au trop nombreuses digressions que l'auteur n'a su éviter dans les séquences précédentes, comme il le lui reproche dans une lettre : « J'espère du moins que tu admets que c'est à la même charmante faculté que nous devons de devoir comprimer à ce point les dernières planches, puisque tu t'es obstiné à délayer certains épisodes secondaires »[24]. Selon Pierre Fresnault-Deruelle, la tension permanente culmine dans la séquence de l'intrusion de la Marque jaune dans l'appartement de Blake et Mortimer, qu'il rapproche, par son intensité, de celle du rêve de la momie Inca dans Les Sept Boules de cristal de Hergé[13].

Pour Benoît Mouchart et François Rivière, « La Marque jaune s'inscrit dans une mythologie d'autant plus trouble qu'elle reste toujours suggérée plutôt que montrée au lecteur »[b 16]. La créature qui terrorise la ville de Londres reste longtemps insaisissable, et la seule preuve de son existence réside dans la fameuse Marque jaune tracée à la craie, ce « génial symbole graphique » qui retarde sans cesse l'apparition du monstre tout en stimulant l'imagination du lecteur[b 16]. De même, « les avertissements répétés, à travers les insolentes missives envoyées aux héros ou à la presse, appuient ce sentiment d'attente que renforce l'incidence médiatique des forfaits de la Marque jaune : journaux, radio et télévision relaient tous en effet l'affaire avec un goût du sensationnalisme qui amplifie encore […] l'attention du lecteur »[b 16]. Quand la créature se manifeste enfin et s'introduit dans l'appartement de Blake et Mortimer, son apparente invincibilité est immédiatement remise en cause par l'inspecteur Kendall, un personnage cartésien : le fait qu'il suspecte que les deux héros ont pu être abusés par l'obscurité et leur imagination fertile « ne fait que réaffirmer la part interprétative laissée au lecteur »[b 17]. De ce fait, le symbole de la Marque jaune agit à la manière d'un MacGuffin dans cette aventure, dans le sens où il sert de prétexte au scénario sans que la raison pour laquelle le criminel signe ses méfaits par ce symbole ne soit dévoilée au cours du récit[24].

Le livre, l'écrit

Le livre du Dr Wade, The Mega Wave, occupe une place centrale dans l'intrigue car c'est à partir de la dédicace inscrite sur sa première page que Mortimer et Blake découvrent tour à tour l'identité du manipulateur de la Marque jaune : Benoît Mouchart et François Rivière estiment que cette mise en abyme trouve son origine dans les premières pages de L'Île du docteur Moreau, le roman de H.G. Wells, au moment où le narrateur se remémore la couverture d'un livre écrit par le docteur Moreau, bientôt contraint à l'exil en raison de ses opinions et de la brutal franchise avec laquelle il les exprime[b 18].

Comme à son habitude, Edgar P. Jacobs intègre de nombreux récitatifs dans ses planches. D'une part, ces textes informent le lecteur sur les circonstances de l'action en cours, et d'autre part leur utilisation permet de créer une soudure essentielle entre deux images dont l'enchaînement pourrait s'avérer incompréhensible. Pour Benoît Mouchart et François Rivière, leur lecture empêche aussi le regard de sauter trop rapidement d'une case à l'autre : les récitatifs apparaissent donc comme « une invitation lancée au lecteur afin qu'il puisse mieux détailler et savourer la composition complexe de chaque dessin »[b 19]. Par ailleurs, Jacobs insèrent de fausses coupures de presse dans ses vignettes, un procédé fréquemment utilisé par Hergé dans Les Aventures de Tintin et qui permet une certaine économie de la narration en apportant des éclaircissements ou en faisant le bilan de l'action tout en évitant de longues scènes d'exposition[45].

Didier Barrière, qui consacre une étude à la place de l'écriture et du livre en tant qu'objet dans les aventures dessinées par Edgar P. Jacobs, considère La Marque jaune comme l'album apportant le plus de matière dans ce domaine[52]. Tout d'abord, le premier enjeu du récit consiste à trouver le sens de la mystérieuse lettre grecque μ, tracée à la craie jaune dans les rues de Londres et signature des méfaits d'un insaisissable criminel. Le monde de la presse est omniprésent dans l'album, d'abord par les nombreux commentaires que les journaux consacrent à l'affaire et que lit notamment un soldat de la Tour de Londres dès la première planche, puis par les coupures de presse que Jacobs dispose le plus souvent en travers de l'image, « comme autant de pièces versées au dossier »[52] et qui représentent une économie de la narration en exposant les faits[45]. Jacobs fait ensuite entrer le lecteur au cœur-même de la presse britannique, à Fleet Street, où sont regroupés les principaux quotidien. Le dessinateur représente la salle de rédaction du Daily Mail, le bureau de son rédacteur en chef, et surtout l'imprimerie où les dernières nouvelles arrivent par un tube pneumatique. Comme le souligne Didier Barrière, Jacobs, dans le soin porté au réalisme qui le caractérise, montre l'univers bourdonnant de cette salle, des clavistes s'affairant sur les linotypes aux ouvriers chargeants les paquets de journaux dans les camions[52].

Dans un second temps, c'est « le livre véritable » qui succède aux journaux et aux magazines pour se retrouver au cœur de la narration[52]. Les scènes d'intérieur laissent entrevoir des bibliothèques privées, comme celle, imposante, du Dr Septimus, puis celle des héros. Tandis que Blake participe activement à la traque de la Marque jaune, Mortimer « s'arrach[e] à la tyrannie de l'événement ». Il entame ses propres recherches au sein des volumes reliés des archives du Daily Mail et parvient, avec l'aide d'un archiviste dévoué, à trouver le lien qui unit les quatre personnalités enlevées par le malfaiteur : le scandale causé, en 1922, par la parution d'un livre scientifique, The Mega Wave. Dès lors, convaincu que cet objet contient la clé de l'énigme, la priorité de Mortimer est de retrouver le livre mystérieusement retiré de la circulation après la mort de l'éditeur, ce qui l'amène jusqu'à la salle de lecture du British Museum où le livre vient d'être dérobé. Le livre semble aussi insaisissable que La Marque jaune mais c'est bien sa lecture qui permet à Mortimer de résoudre l'affaire, une lecture dont est privé le lecteur de la bande dessinée mais que Jacobs lui révèle par les explications fournis par Septimus à Mortimer après sa capture[52]. Dans cet épisode, l'écriture apparaît surchargée, « la tête du savant fou paraît noyée dans le texte qui sort de sa bouche, submergé par sa propre parole » selon l'expression de Didier Barrière qui y voit « un remarquable contrepoint calligraphique soulignant le dessin »[52].

Pour ce dernier, il n'est d'ailleurs pas anodin que le poste de commande du laboratoire secret du Dr Septimus soit dissimulée derrière sa bibliothèque, ce qui renforce d'autant plus le rôle essentiel de l'écrit dans cette aventure[52].

Un album miroir d'une amitié

Benoît Mouchart considère La Marque jaune comme un album « révélateur de l'amitié » entre Jacobs et Jacques Van Melkebeke, dans la mesure où les deux hommes puisent de nombreux éléments de l'intrigue de leurs lectures et des films découverts pendant leur jeunesse, en particulier le cinéma expressionniste allemand. Par conséquent, le récit peut-être vu comme « le catalogue de toutes les passions qu'ils ont partagé ensemble jusque-là »[53]. Pour Benoît Mouchart, qui rappelle que les deux hommes « ont eu une jeunesse de gothiques avant l'heure », la modernité scientifique à l'œuvre dans ce récit s'y intègre par un prisme magique, les savants reproduisant les mêmes archétypes que ceux de la sorcellerie : « Avec La Marque jaune, ils charrient tout un ésotérisme du signe qui veut dire autre chose que ce qu'il est censé signifier : une menace effroyable alors que ce n'est, à la base, qu'un graffiti »[53].

Par ailleurs, Mouchart dresse un parallèle entre Jacques Van Melkebeke et le personnage du Dr Septimus : tout comme le savant signe son livre The Mega Wave sous un pseudonyme, Van Melkebeke, un temps inquiété pour ses travaux sous l'occupation allemande, est mis à l'index après la guerre et réduit à un travail de l'ombre, influençant bon nombre de dessinateurs sans que sa participation soit révélée au grand jour. Cette dédicace, dans laquelle Mortimer reconnaît l'écriture de Septimus et parvient à résoudre l'intrigue, apparaît comme « un miroir tendu à la relation entre Jacobs et Van Melkebeke, où ce dernier avance masqué, tout comme le savant fou dans le récit »[53].

Thèmes abordés

Edgar P. Jacobs définit lui-même son album comme « une sorte de réaction instinctive contre la tendance anti-individualiste et la mise en condition systématique de la personne »[b 20]. La Marque jaune aborde ainsi le thème de la manipulation des cerveaux, de même que les conséquences engendrées quand l'Homme tombe sous le contrôle et la domination d'un autre et ne répond plus qu'à ses pulsions. Pour Benoît Mouchart et François Rivière, ces deux thèmes « fascinent tant par leur résonance avec le lavage de cerveau entrepris sous le Troisième Reich que par leurs implications dans la société de consommation qui commence à se développer au lendemain de la Seconde Guerre mondiale »[b 20]. Ils soulignent d'ailleurs que ces thèmes narratifs sont repris quelques années plus tard, et de façon humoristique, par Greg et Franquin dans Z comme Zorglub et L'Ombre du Z, deux albums de la série Spirou et Fantasio[b 20].

Les deux biographes du dessinateur voient également dans la figure de la Marque jaune, qui élève ses crimes au rang d'un art, une variation moderne des légendes urbaines qui terrorisent les foules depuis la médiatisation des crimes de Jack l'Éventreur à la fin du XIXe siècle, à la manière de Fantômas, Judex ou Belphégor[b 21].

Le professeur Pierre Masson constate que dans La Marque jaune, Edgar P. Jacobs utilise le thème narratif de la malédiction et de l'élimination successive. Ce thème, mis en avant par la romancière Agatha Christie dans Dix Petits Nègres, est également repris par Hergé dans le diptyque formé par Les Sept Boules de cristal et Le Temple du Soleil, dans lequel sept savants européens sont tour à tour frappés d'une mystérieuse léthargie après avoir violé une sépulture inca, et par Jacques Martin dans La Griffe noire, où cinq généraux romains sont l'objet d'une vengeance[54].

Erreur de chronologie

La Marque Jaune présente une logique temporelle hasardeuse[55]. L'histoire est censée se dérouler après Le Mystère de la Grande Pyramide, comme le rappelle le résumé de la vie d'Olrik proposé par le Dr Septimus à Mortimer et comme l'indique le comportement du malfaiteur dans l'appartement des deux héros. Le Mystère de la Grande Pyramide est censé lui-même se dérouler après Le Secret de l'Espadon, un récit qui met en scène une troisième Guerre mondiale, ainsi que cela est rappelé dans la première page de l'album lors de la conversation entre Mortimer et Nasir dans l'avion qui les amène au Caire. Or, Septimus raconte à Mortimer avoir recueilli Olrik amnésique et errant dans le désert, à la suite des évènements de la Grande Pyramide, puis être rentré à Londres avec lui alors que la guerre éclatait. Une note placée sous la vignette indique qu'il s'agit de la troisième guerre mondiale, ce qui semble totalement incohérent dans la mesure où Olrik, dans Le Secret de l'Espadon, y joue un rôle essentiel en tant que colonel dans l'armée du tyran Basam Damdu[55].

La confusion née de cette erreur de chronologie pousse les éditions Blake et Mortimer à intégrer dans la version de l'album éditée en une note précisant que le conflit évoqué par Septimus est bien la Troisième Guerre mondiale de L'Espadon, ce qui ne suffit pas à rétablir l'ordre chronologique selon Gérard Lenne puisque la référence à la Luftwaffe présente en début de l'album n'est pas supprimée et que, de fait, Septimus n'aurait pas eu le temps de faire construire un abri anti-aérien sous sa maison pendant la Troisième Guerre mondiale, une guerre-éclair qui voit la destruction de Londres et son occupation immédiate[56] - [57].

Incohérences graphiques

L'histoire se déroule au mois de , s'achevant le jour de noël. L'enlèvement de Leslie Macomber se déroule le dans la première édition de l'histoire, comme l'attestent le calendrier présent dans son bureau du Daily Mail, ainsi que la date mentionnée dans la lettre qu'il reçoit. Dans la version actuelle, Jacobs décide de changer cette date en , modifiant en conséquence la date mentionnée dans la lettre. Mais il oublie de changer celle affichée sur le calendrier, toujours le .

Se documentant beaucoup grâce à Science et Vie, le dessinateur reproduit par exemple une photo parue dans un numéro[58], représentant une voiture radio de la police française, avec un policier communiquant au micro, à côté de son chauffeur. Il l'a si fidèlement reproduite sur une vignette de la planche 34, qu'il a placé le volant à gauche, alors que l'histoire se déroule en Angleterre, où les volants des voitures sont positionnés à droite (à cause de la différence de sens de circulation sur la route)[59].

Une œuvre visionnaire sur le plan scientifique

Par la suite, le milieu scientifique a évolué dans ce domaine, la réalité rejoignant parfois la fiction, comme il est toujours spécifié dans les mémoires. Science et Vie annonça en 1956 qu'un ingénieur électronicien du nom de Schafer exposa à la Conférence nationale électronique de Chicago l'éventualité de transformer l'homme en un robot, par le biais d'électrodes judicieusement placées dans le cerveau. Des scientifiques soviétiques mirent au point en 1958 une main bioélectrique mue par les influx du cerveau. Le magazine Match mentionna en 1965 l'usage aux États-Unis de l'électricité organique pour la commande de membres artificiels, tels qu'un bras autodirigé reproduisant tous les mouvements d'un vrai bras. Enfin, les savants Guillemin et Schelly, qui travaillaient sur les hormones hypothalamiques, révélèrent en 1978 l'existence de neurohormones, ce qui fit dire à un membre du comité Nobel « qu'ils avaient établi un lien entre l'âme et le corps »[40].

Afin de s'assurer de la crédibilité de son histoire sur ce sujet, Jacobs s'est adressé à un jeune spécialiste en neuropsychologie. Mais celui-ci ne semblait pas apprécier sa théorie sur l'onde Mega, ce qui poussa l'auteur à prendre congé de lui. Malgré tout, Jacobs reçut la reconnaissance scientifique de neuropsychiatres de l'université de Liège. En 1977, la doctoresse Levnen et le docteur Bataille lui expliquèrent que le Dr Septimus était l'exemple type du paranoïaque, la page n° 17 de l'album[alpha 3] étant pour eux « un extraordinaire raccourci des symptômes de la maladie, constituant un véritable diagnostic cliniquement conforme à la réalité ». Ils ajoutèrent que les fous de son confrère Hergé ne le sont pas autant que les siens car, moins conformes aux normes psychiatriques. Enfin, les scientifiques le convièrent à une conférence d'enseignement post-universitaire pour les neurochirurgiens et neurologues, intitulée : Essai d'analyse sémiotique du concept folie dans la bande dessinée d'Hergé et de Jacobs[alpha 4] - [40].

Accueil et postérité

De manière inattendue, la précision du détail qui anime Jacobs et son sens du réalisme ont probablement permis de sauver la vie d'un touriste canadien en voyage à Londres. En 1973, ce dernier adresse une lettre au dessinateur dans laquelle il explique qu'après s'être empoisonné en consommant du jambon avarié, il a pu composer par téléphone le 999, le numéro d'urgence britannique, dont il s'est rappelé à la suite de la lecture de La Marque jaune[24]. En effet, ce numéro est composé par un employé du Daily Mail dans une des cases de l'album pour prévenir la police[40]. Pour Jacobs, ce témoignage « démontre avec force l'importance du détail dans une bande dessinée et les conséquences imprévisibles qui peuvent en dépendre »[24].

Critique

En 2012, il a été classé à la 4e place du classement des 50 BD essentielles établi par la revue Lire[43] - [60].

Sur SensCritique, La Marque jaune est notée 7,7/10 sur une base d'environ 4 100 votes d'internautes[61]. Sur Babelio, l'album obtient une note moyenne de 4/5 basée sur 383 notes[62].

Suite

En 2013, Jean Dufaux, Antoine Aubin et Étienne Schréder sortent L'Onde Septimus, un album qui est une suite de La Marque jaune[h 8]. Ils reprennent l'action quelques mois après la fin de La Marque jaune et font revenir plusieurs personnages déjà présents dans l'album de Jacobs. En 2020, Le Cri du Moloch est la suite directe de ce tome.

En 2012, Yves Sente et André Juillard publient Le Serment des Cinq Lords censée se dérouler un an après les événements de la Marque Jaune, en 1954, et à la fin de laquelle Mortimer devient membre du Centaur Club.

En , les éditions Blake et Mortimer font paraître La Fiancée du Dr Septimus, un album illustré écrit par François Rivière et illustré par Jean Harambat qui figure parmi les hors-série. Cette aventure est non seulement un hommage direct à Edgar P. Jacobs et à La Marque jaune, mais également aux les films du réalisateur britannique James Whale comme La Fiancée de Frankenstein, sorti en 1935[63]. Dans ce récit, ce dernier revient à Londres dans les années 1950 dans le but d'adapter au cinéma l'affaire de La Marque jaune. Le professeur Mortimer, qui a participé à la résolution de l'affaire, doit apporter son expertise pour le tournage[63]. Une série d'évènements mystérieux conduit les deux hommes, accompagnés de Richard Murray, le neveu de Francis Blake, à se rendre au cottage abandonné du docteur Septimus[64].

Hommages et parodies

Cet album a inspiré de nombreuses parodies et fait aussi l'objet d'un grand nombre d'hommages ou de clins d'œil de la part d'autres auteurs par la présence de références qui y sont puisées.

En 1974, Dupa dessine une double page parodique intitulée Cubitus et la Marque jaune pour un numéro spécial du magazine Tintin dédié à la bande dessinée d'Edgar P. Jacobs Le Rayon U[65]. En 1977, François Rivière et Floc'h insèrent le livre The Mega Wave (L'Onde Méga) du Dr Septimus dans Le Rendez-vous de Sevenoaks[66]. En 1980, Filip Denis dessine Hommage à Jacobs dans le no 2 d'Aïe où il raconte comment il se prenait pour la Marque jaune dans sa jeunesse[67]. En 1996, Gilles Chaillet reprend la séquence de la Tour de Londres au début de La Marque jaune dans son album Vasco : 14 - Sortilèges[68]. En 2000, Eddy Mitchell reprend les éléments de la couverture de La Marque jaune pour l'affiche de sa tournée à travers la France[69]. La couverture de l'album est choisie pour rendre hommage à la série Blake et Mortimer dans le cadre du parcours BD de Bruxelles. Cette fresque connaît cependant une histoire mouvementée : en 1997, elle est peinte à l'angle de la rue d'Anderlecht et de la rue du Petit Rempart, puis déplacée en 2005 sur le pignon de la biscuiterie de la Maison Dandoy, rue du Houblon, une réalisation des artistes Georges Oreopoulos et David Vandegeerde du studio Art Mural[70]. En 2019, une construction nouvelle occulte la fresque qui est une nouvelle fois déplacée. Elle est recrée en par l'atelier 30 dans la rue du Temple[71] - [72]. En 2013, Georges Oreopoulos et David Vandegeerde reproduisent le même décor sur un mur de la cour intérieure de la nouvelle librairie Bulle au Mans, spécialisée dans la bande dessinée. À cette occasion, la libraire adopte un nouveau logo inspiré de La Marque jaune[73] - [74] - [75].

En 2007, Philippe Geluck parodie la couverture de l'album pour celle de son 14e album La Marque du Chat[76].

La couverture de La Marque jaune est également reprise dans deux albums de la bande dessinée flamande De Kiekeboes, ou sur la couverture de Paniek in Stripland de Tom Bouden, ainsi que dans des caricatures politiques et sociales réalisées par Johan De Moor[77].

Au début des années 1980, Yann et Didier Conrad publient des histoires courtes et parodiques dans le magazine Spirou, notamment Talk et Baltimore, un pastiche des personnages de Blake et Mortimer[78]. En 2005, les éditions Dargaud lancent à leur tour une parodie, intitulée Les Aventures de Philip et Francis, réalisée par Pierre Veys et Nicolas Barral. Dans cette série, qui se veut un hommage humoristique à l'œuvre de Jacobs, les femmes britanniques remettent en cause l'autorité masculine et les deux héros sont chargés de les ramener à la raison. Le célèbre M de La Marque jaune signifie alors « Macho », tandis que les noms des principaux protagonistes ont été conservés, y compris Olrik[79].

L'album a également été utilisé comme référence pour diverses campagnes publicitaires et promotionnelles. En 1987, Pascal Fournier et Pascal Dubuck réalisent Les Aventures d'Alexandre de la Mareneuve et d'Évry Cédex : 1 - La Marque bleue, un album promotionnel pour le Groupe Accor[80]. Cette même année, la mairie de Montreuil réalise un dépliant, Mystère à Montreuil : Une enquête de Blake et Mortimer, dans lequel Bob de Moor met en scène les deux héros enquêtant sur une mystérieuse marque « M », ce qui les conduit à découvrir le fonctionnement du service propreté de la ville[81].

Adaptations

Radio, télévision et jeu vidéo

Dans les années 1950, La Marque jaune est adaptée en feuilleton radiophonique repris par la suite en vinyle, en cassette audio et en CD. Le vinyle de La Marque jaune est le premier titre de la collection « Le Disque d'aventure »[9]. Jean Topart et Yves Brainville donnent leur voix à Blake et Mortimer, tandis que Maurice Jacquemont joue le Dr Septimus et Pierre Marteville l'inspecteur-chef Kendall. Cet enregistrement, réalisé par Jean Maurel avec le soutien de Maurice Chevit, est récompensé du Grand prix de l'Académie Charles-Cros[82] - [83] - [84].

En 1988, l'histoire est adaptée en jeu vidéo d'action-aventure sur ordinateur (Thomson TO8, Amstrad CPC et Atari ST) par le développeur et éditeur français Cobrasoft. Le jeu est composé de cinq niveaux[85] - [86].

En 1997, l'aventure est adaptée en dessin animé par Éric Rondeaux comme épisode de la série d'animation Blake et Mortimer. L'épisode est diffusé le avec Michel Papineschi doublant le professeur Mortimer, Robert Guilmard le capitaine Blake et Mario Santini le colonel Olrik[87].

Adaptation sous forme d'un disque d'aventure

En 1956, La Marque jaune est adaptée sous la forme d'un disque 33 tours pour les éditions Festival. Jean Maurel est le narrateur de l'aventure, tandis que Jean Topart interprète Francis Blake et Yves Brainville prête sa voix à Philip Mortimer. Cette adaptation reçoit la même année le Grand-Prix du Disque de l'Académie Charles Cros[h 9].

Projets de films

Plusieurs projets d'adaptation cinématographique du récit ont été envisagés sans qu'aucun ne voit finalement le jour. À la fin des années 1970, le publicitaire Michel Marin contacte Edgar P. Jacobs pour tenter de le convaincre d'adapter La Marque jaune à l'écran. L'auteur, conscient qu'un tel projet lui permettrait d'accroître la popularité de son œuvre, lui accorde une option sur les droits de l'album en [88]. Au début des années 1980, Michel Marin convainc la productrice Irène Silberman de s'associer au projet, ce qui aboutit en au tournage d'un pilote scénarisé par Jean Van Hamme et qui met en scène Yves Brainville dans le rôle de Mortimer, Pierre Vernier dans celui de Blake, tandis que Michel Vitold interprète le docteur Septimus et Patrick Laval le colonel Olrik[b 22]. Jacobs apprécie la démarche de porter ses personnages à l'écran et se dit impressionné par la réalisation, mais il souhaite que l'atmosphère de ce film se rapproche de celle de la série Chapeau melon et bottes de cuir. Irène Silberman finit par écarter Michel Marin et annonce en , lors du Festival de Cannes, avoir confié la réalisation du long métrage au réalisateur franco-vietnamien Lam Lê, assisté d'Olivier Assayas pour le scénario. Le projet, qui emporte l'adhésion de Jacobs, est finalement abandonné[b 22].

Dans les années 1990, le producteur français Charles Gassot, qui a récupéré les droits de La Marque jaune, travaille sur un nouveau projet d'adaptation avec Alain Corneau, qui finit par abandonner le projet. Au début de l'année 2000, Charles Gassot contacte alors le réalisateur James Huth pour le lui confier[89]. Ce dernier s'associe à Sonja Shillito pour la rédaction du scénario et le storyboard. Après avoir envisagé de confier le rôle de Mortimer à Philip Seymour Hoffman et celui de Blake à Hugh Jackman, la production prévoit que les deux héros soient joués respectivement par Hugh Bonneville et Rufus Sewell[90]. James Huth, qui veut mettre en scène une femme aux côtés des deux héros, confie un rôle de scientifique à l'actrice chinoise Gong Li[90] - [89]. Le réalisateur effectue de nombreux repérages, notamment au cœur de la Tour de Londres, et obtient l'autorisation de filmer plusieurs scènes dans la centrale électrique de Battersea[89]. Le tournage, au budget de 35 millions d'euros, doit débuter en pour une sortie en salles en [91]. Faute de trouver un studio suffisamment grand, le projet prend du retard et le producteur Charles Gassot se consacre finalement au tournage d'une autre adaptation cinématographique de bande dessinée, Immortel, ad vitam de Enki Bilal[89]. L'adaptation de La Marque jaune est définitivement abandonnée quand James Huth prend les commandes de la réalisation de Brice de Nice en 2004[92].

En , un troisième projet d'adaptation voit le jour avec l'espagnol Álex de la Iglesia à la réalisation, et Kenneth Branagh, David Thewlis et John Malkovich respectivement dans les rôles de Blake, Mortimer et Olrik[93]. Un an plus tard, en 2009, c'est au tour de Kiefer Sutherland et Hugh Laurie d'être annoncés dans les deux rôles principaux[94]. Mais le réalisateur peine à rassembler les fonds nécessaires et en 2013 le projet est définitivement abandonné[95] - [96].

Notes et références

Notes

  1. Vol qui fut précédé, comme l'annonce le numéro du Daily Mail visible planche 4, de plusieurs autres méfaits : raid contre la Banque d'Angleterre ; vol d'une peinture de Thomas Gainsborough dans la National Gallery ; enlèvement de la dague d'Aménopolis III, de la collection Stockmann ; dépôt d'une fausse bombe dans le Cabinet Room du 10 Downing Street ; disparition du traité secret anglo-iranien du coffre du Foreign and Commonwealth Office. Voir La Marque jaune, planche 4.
  2. Connue depuis le XIXe siècle pour être la rue des médecins. Septimus y enlève sept d'entre eux pour les faire assister à son triomphe.
  3. Peut-être la planche 15
  4. Agrémentée d'une projection de diapositives tirées de leurs albums. Suscitant un vif intérêt, son texte fut publié dans Les Feuillets psychiatriques (vol.XI, fasc. 3, 1978).

Références

  • Renvois à l'album :
  1. planches_1-3-2" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planches 1-3.
  2. planche_5-4" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 5.
  3. planche_6-5" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 6.
  4. planches_7-19-6" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planches 7-19.
  5. planches_20,_31-7" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planches 20, 31.
  6. planches_34-35-8" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planches 34-35.
  7. planches_42-47-9" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planches 42-47.
  8. planches_49-52-10" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planches 49-52.
  9. planches_60-61-12" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planches 60-61.
  10. planches_63-65-13" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planches 63-65.
  11. planches_65-66-14" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planches 65-66.
  12. planche_20,_case_2-16" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 20, case 2.
  13. planche_50-17" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 50.
  14. planche_4,_case_1-18" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 4, case 1.
  15. planche_4,_case_5-19" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 4, case 5.
  16. planche_8,_case_12-20" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 8, case 12.
  17. planche_7,_case_1-21" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 7, case 1.
  18. planche_7,_case_11-22" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 7, case 11.
  19. planche_18-77" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 18.
  20. planche_59-81" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 59.
  21. planche_23-85" class="mw-reference-text">La Marque jaune, planche 23.
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  • Autres références :
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Voir aussi

Version de l'album, ouvrages et articles consacrés

Ouvrages généraux

  • Vincent Bernière (rédacteur en chef) et al., Blake et Mortimer face aux grands mystères de l'humanité : Histoire, mythes, civilisations…, Beaux Arts Magazine, , 144 p. (ISBN 9791020401854).
  • Collectif, Les personnages de Blake et Mortimer dans l'histoire : Les événements qui ont inspiré l'œuvre d'Edgar P. Jacobs, Historia, Le Point, , 112 p. (ISBN 979-10-90956-25-4).
  • Collectif, Blake et Mortimer : Deux aventuriers dans l'histoire, Geo, , 128 p. (ISBN 978-2-8104-2948-6).
  • Collectif, Les voyages de Blake et Mortimer : Deux aventuriers à travers le monde, Prisma, coll. « Geo », , 144 p. (ISBN 978-2-8104-3733-7).
  • Geert De Weyer, La Belgique dessinée, Anvers, Ballon Media, coll. « Dragonetti », , 352 p. (ISBN 9789462102200).
  • Benoît Mouchart et François Rivière, Edgar P. Jacobs : Un pacte avec Blake et Mortimer, Les Impressions nouvelles, , 384 p. (ISBN 978-2-87449-890-9).

Article connexe

Liens externes

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