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Fais (Micronésie)

Fais est un atoll surĂ©levĂ© situĂ© approximativement Ă  87 kilomĂštres Ă  l'est d'Ulithi et 251 km au nord-est de Yap, dans les Ăźles Carolines dans l'ocĂ©an Pacifique. Il appartient aux Ăźles extĂ©rieures de Yap. Du point de vue administratif, c'est une municipalitĂ© de l'État de Yap, dans les États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie.

Fais
Image aérienne de Fais.
Image aérienne de Fais.
GĂ©ographie
Pays Drapeau des États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie
Archipel Îles Carolines
Localisation Océan Pacifique
CoordonnĂ©es 9° 45â€Č 37″ N, 140° 31â€Č 15″ E
Superficie 2,8 km2
Point culminant 20 m
Géologie Atoll surélevé
Administration
État Yap
District Îles extĂ©rieures de Yap
DĂ©mographie
Population 294 hab. (2010)
DensitĂ© 105 hab./km2
Autres informations
Fuseau horaire UTC+10
Géolocalisation sur la carte : Micronésie
(Voir situation sur carte : Micronésie)
Fais
Fais
Îles dans les États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie

De forme oblongue, Fais a une superficie de 2,8 km2 et une altitude maximale de 20 m. Le climat y est de type Ă©quatorial, chaud, modĂ©rĂ©ment humide et pluvieux tout au long de l'annĂ©e. Des pĂ©riodes de sĂ©cheresse peuvent toutefois s'Ă©tendre sur plusieurs mois. Elle est rĂ©guliĂšrement affectĂ©e par des cyclones. L'Ăźle possĂšde une flore et une faune diversifiĂ©es, notamment des insectes et des oiseaux ; les seuls mammifĂšres que sont les rats, les chiens et les cochons, ont Ă©tĂ© introduits par l'Homme.

Les premiers humains abordent Fais au cours des IIe – IVe siĂšcles d'aprĂšs des sondages archĂ©ologiques. Les objets dĂ©couverts illustrent des Ă©changes avec les Ăźles Yap, lesquelles ont pu servir d'intermĂ©diaires dans la transmission de cĂ©ramiques et de parures en provenance des Palaos, des Ăźles Salomon et des Ăźles Marshall. Les EuropĂ©ens Ă©tablissent les premiers contacts avec les insulaires dans la premiĂšre moitiĂ© du XVIe siĂšcle. Fais et le reste des Ăźles Carolines passent sous domination espagnole jusqu'en 1885, puis sont intĂ©grĂ©es Ă  la Nouvelle-GuinĂ©e allemande. En 1914, l'empire du Japon prend possession de la rĂ©gion, occupation rĂ©gularisĂ©e dans le cadre du mandat des Ăźles du Pacifique crĂ©Ă© en 1919. Entre 1937 et 1944, les Japonais exploitent du phosphate au centre de l'Ăźle. Les forces armĂ©es amĂ©ricaines investissent l'Ăźle le et Ă  partir de 1947, les États-Unis administrent la rĂ©gion de MicronĂ©sie en tant que territoire sous tutelle des Ăźles du Pacifique. Les États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie accĂšdent Ă  l'indĂ©pendance en 1986.

La population actuelle parle l'ulithi. La religion pratiquĂ©e est le christianisme mais une croyance aux esprits des ancĂȘtres perdure. La population dispose d'une Ă©cole primaire, d'un dispensaire et de quelques biens Ă©lectroniques. L'alimentation est fondĂ©e sur la pĂȘche (poissons de lagon et de rĂ©cifs, requin, tortue) et une agriculture traditionnelle de subsistance (patate douce, manioc, aracĂ©es, fruits de l'arbre Ă  pain, figue bossue, nono, etc.), trĂšs peu de nourriture importĂ©e Ă©tant consommĂ©e. La qualitĂ© du tabac produit Ă  Fais est reconnue par la population voisine d'Ulithi. Le territoire de l'Ăźle est traditionnellement organisĂ© en un complexe systĂšme de parcelles rĂ©parties entre les diffĂ©rentes familles. Les zones de pĂȘche sont quant Ă  elles diffĂ©renciĂ©es par deux systĂšmes gĂ©ographiques non Ă©crits. L'eau potable est prĂ©fĂ©rentiellement fournie par les noix de coco, l'eau de pluie servant pour l'agriculture. Les puits qui ont Ă©tĂ© creusĂ©s ne sont pas utilisĂ©s.

Le tissage du machi, un tissu de fibres vĂ©gĂ©tales teintĂ©es aux motifs recherchĂ©s, un aspect important de l'identitĂ© fĂ©minine, a Ă©tĂ© relancĂ© au dĂ©but des annĂ©es 2000 avec la crĂ©ation d'une Ă©cole spĂ©cifique. Ce tissu possĂ©dait et possĂšde encore un rĂŽle symbolique trĂšs important : il permettait entre autres d'ĂȘtre pardonnĂ© d'avoir provoquĂ© une mort accidentelle, jouait un rĂŽle important lors de la cĂ©rĂ©monie d'investiture d'un nouveau chef et constituait un cadeau de choix dans le cadre du Sawei, un systĂšme de relations hiĂ©rarchiques entre les Ăźles Yap et les Ăźles extĂ©rieures de Yap.

Les familles sont agnatiques et patrilocales et l'adoption d'enfants est couramment pratiquée pour des raisons sociales, politiques et économiques. Les habitants de Fais sont connus avec ceux de l'atoll d'Ulithi pour offrir un des meilleurs systÚmes de soins palliatifs traditionnels au monde.

GĂ©ographie

Localisation

Dessin figurant en bleu l'océan, en brun clair les terres et par des traits verts, bleus, verts et violets les limites et le mouvement des plaques.
Plaque tectonique des Carolines et plaques voisines.

Fais est la terre la plus proche (Ă  environ 290 km) de Challenger Deep, le point le plus profond mesurĂ© dans les ocĂ©ans. Elle se situe Ă  60 km au sud-est des Ăźles de la Tortue, Ă  87 km Ă  l'est d'Ulithi et Ă  251 km Ă  l'est-nord-est des Ăźles Yap[1].

L'Ăźle est positionnĂ©e Ă  l'extrĂ©mitĂ© ouest de la plaque des Carolines, de mouvement ouest-nord-ouest, et qui se dirige vers la plaque philippine au bord oriental de laquelle sont situĂ©es les Ăźles Yap. Fais est apparue Ă  la suite de la rencontre entre ces plaques au CĂ©nozoĂŻque ancien, peut-ĂȘtre plus prĂ©cisĂ©ment durant le MiocĂšne, il y a environ 24 millions d'annĂ©es. Les scientifiques ne savent pas si les deux plaques sont toujours en collision ou si la plaque des Carolines a commencĂ© Ă  passer au-dessous de celle des Philippines. L'Ăźle est localisĂ©e sur la partie nord de la dorsale des Carolines, sĂ©parĂ©e de la partie sud par la fosse ocĂ©anique de Sorol[MC 1].

GĂ©ologie et topographie

Dessin en couleur vives figurant les principaux caractĂšres de l'Ăźle.
Plan de Fais.
  • rĂ©cifs
  • plage
  • falaises
  • forĂȘt
  • vĂ©gĂ©tation rase
  • piste d'atterrissage
  • zones d'habitat

De forme oblongue, Fais est un atoll surĂ©levĂ©, une plate-forme de carbonates poreuse d'une superficie de 2,8 km2 et d'une altitude maximale de 20 m, qui a peut-ĂȘtre Ă©mergĂ© il y a 20 millions d'annĂ©es[2] - [MC 2] - [PR 1]. Un rĂ©cif frangeant fait le tour d'environ les deux tiers de l'Ăźle et dĂ©limite un Ă©troit lagon n'offrant donc qu'une faible faune marine. Ce rĂ©cif est absent au nord-est et au sud-ouest, zones oĂč la cĂŽte, ordinairement sous forme de plages de sable, s'Ă©lĂšve en falaises[R 1] - [PR 1]. Celles-ci sont percĂ©es de grottes formĂ©es par des Ă©coulements anciens d'eau douce, et d'oĂč la nappe phrĂ©atique s'Ă©panche encore[Z 1].

Climat

Le climat sur Fais est Ă©quatorial, chaud (27 °C en moyenne), modĂ©rĂ©ment humide et pluvieux tout au long de l'annĂ©e. La tempĂ©rature est relativement uniforme tout au long de l'annĂ©e : elle s'Ă©tablit entre 30 et 34 °C Ă  midi et tombe Ă  22 Ă  25 °C la nuit. La pression atmosphĂ©rique normale s'Ă©tablit entre 1 000 et 1 013 hPa. L'Ăźle se trouve dans une rĂ©gion soumise Ă  des vents constants avec une pluviomĂ©trie moyenne annuelle Ă©levĂ©e (environ 3 000 mm), sous forme d'intenses pluies de courtes durĂ©es. De dĂ©but dĂ©cembre Ă  avril ou mai, les vents viennent du nord-est, et de fin juillet Ă  fin septembre du sud-ouest. Ils sont alors plus chargĂ©s d'humiditĂ©. Les intersaisons comportent des jours plus calmes. La quantitĂ© d'eau de pluie peut baisser d'au moins 23 % les annĂ©es de sĂ©cheresse liĂ©es au phĂ©nomĂšne El Niño. Une absence presque totale de prĂ©cipitations peut s'Ă©tendre sur quatre mois. L'Ăźle est affectĂ©e par des tempĂȘtes tropicales qui peuvent se transforner en cyclones entre avril et novembre[KR 1] - [MC 3] - [3] - [I 1].

Cyclones et tempĂȘtes tropicales

Photo satellite montrant une spirale de nuages blancs sur l'océan bleu.
Le cyclone Lupit au-dessus des Ăźles Carolines le .

Des cyclones tropicaux majeurs, également appelés typhons, touchent l'ßle tous les 10 à 12 ans depuis au moins le milieu du XIXe siÚcle et occasionnent des destructions[KR 2] - [MC 4]. Ils provoquent la chute des noix de coco et endommagent les systÚmes de récupération d'eau de pluie, tous deux utilisés pour la consommation humaine[MC 4]. Le premier cyclone tropical renseigné par les sources écrites et ayant atteint l'ßle est daté du [KR 1].

Le , le cyclone tropical Lupit passe Ă  50 km au nord-est de Fais avec des rafales atteignant environ 185 km/h Ă  200 km/h et environ 10 cm de pluie. Des vagues de 4,2 Ă  5,5 m ont frappĂ© les cĂŽtes de Fais et provoquĂ© une grave Ă©rosion des plages et les embruns ont contaminĂ© les rĂ©servoirs d'eau. Le cyclone a Ă©galement endommagĂ© ou dĂ©truit la plupart des toits et certains rĂ©servoirs ne rendant possible la collecte de l'eau de pluie qu'avec des moyens de fortune. Il a dĂ©pouillĂ© les cocotiers de leurs fruits et dĂ©truit les cultures de subsistance, ne laissant que quelques jours de rĂ©serve[MC 4] - [4].

Le , le typhon Sudal passe Ă  65 km au sud-sud-est de Fais avec une vitesse maximale des vents de 177 km/h. Il a provoquĂ© d'importants dĂ©gĂąts similaires Ă  ceux du passage de Lupit[5]. Il s'y est ajoutĂ© une crise Ă©conomique pendant quatre mois du fait de la panne du cargo transportant des biens de secours, les magasins ayant souffert de pĂ©nuries de stocks. Le prix du riz a ainsi triplĂ© et les habitants ont dĂ» leur subsistance Ă  la nourriture traditionnelle (tubercules, poissons du lagon, jus d'agrumes, extraits d'agrumes, etc.)[N 1]. En 2010, une enquĂȘte rĂ©vĂšle que les modifications environnementales liĂ©es aux changements climatiques sont une prĂ©occupation pour les habitants mĂȘme si elle est moindre que sur d'autres Ăźles moins Ă©levĂ©es[N 2]. Quelques jours aprĂšs le passage du typhon, un petit avion civil a Ă©tĂ© envoyĂ© sur Fais par l'Agence fĂ©dĂ©rale des situations d'urgence des États-Unis pour apporter quelques secours[6].

Le cyclone Nanmadol passe le Ă  89 km Ă  l'ouest-nord-ouest de Fais et dĂ©shabille la plupart des arbres de leurs fruits[7]. Les dĂ©gĂąts sont identiques pour une tempĂȘte tropicale ayant touchĂ© l'Ăźle le [8].

Carte montrant avec des points de couleur allant du bleu au rouge l'intensité variable des vents.
Parcours et intensité du typhon Maysak selon l'échelle de Saffir-Simpson.

Le , le typhon Maysak passe Ă  89 km au nord-ouest de Fais. Le phĂ©nomĂšne mĂ©tĂ©orologique est alors Ă  son maximum d'intensitĂ© et a atteint la catĂ©gorie 5 de l'Ă©chelle de Saffir-Simpson (super-typhon). À Fais, alors que des rafales Ă  plus de 280 km/h Ă©taient prĂ©vues, la vitesse du vent a finalement atteint jusqu'Ă  environ 260 km/h[9] - [10] - [Z 2] - [11] soufflant tout de mĂȘme des maisons[Z 3] et provoquant une Ă©lĂ©vation du niveau de la mer[Z 4]. La population a cherchĂ© refuge dans des bĂątiments en bĂ©ton comme l'Ă©glise et l'Ă©cole[Z 3]. L'Ă©tat d'urgence est dĂ©clarĂ© dans l'État de Yap par le gouverneur Tony Ganngiyan le [W 1]. Quelques jours aprĂšs le passage du typhon, le Bureau de l'environnement et de la gestion d'urgence des États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie dĂ©clare avoir besoin de rations alimentaires pour les trois Ă  six prochains mois pour Fais en raison de la destruction des cultures. Les rĂ©servoirs d'eau ont Ă©tĂ© endommagĂ©s par la tempĂȘte ou contaminĂ©s par de l'eau salĂ©e, l'eau potable est donc dans un premier temps fournie par une pompe alimentĂ©e par la Pacific Aviation Mission[Z 3] - [Z 5] - [Z 6] - [W 2]. Quelques jours plus tard, un puits fonctionnant avec un panneau solaire offre une eau nĂ©cessitant d'ĂȘtre bouillie pour la consommation[Z 2]. Un second typhon moins puissant (Noul), ne provoquant que des dommages mineurs Ă  Fais — il n'est alors qu'une tempĂȘte tropicale — ainsi que dans l'ensemble du pays, au soulagement des officiels du gouvernement fĂ©dĂ©ral, passe dĂ©but mai Ă  proximitĂ© de l'Ăźle[Z 7] - [Z 8] - [8]. Durant les deux annĂ©es suivantes, l'Agence des États-Unis pour le dĂ©veloppement international finance la reconstruction de maisons[Z 9] et fournit une aide financiĂšre pour aider Ă  l'alimentation et Ă  la reconstruction[Z 10]. Des dons privĂ©s sont Ă©galement recueillis par l'association FUNSO (Fais Ulithi Ngulu Sorol Organization) crĂ©Ă©e pour l'occasion afin d'en assurer la redistribution en partenariat avec l'association amĂ©ricaine Habele[Z 11] - [Z 2] - [12]. En , dans le cadre de son opĂ©ration annuelle Christmas Drop l'armĂ©e amĂ©ricaine parachute des boĂźtes contenant des livres, de la nourriture en conserve et des articles comme des filets de pĂȘche pour « aider les insulaires Ă  maintenir leur mode de vie en grande partie basĂ© sur l'Ă©conomie de subsistance[note 1] ».

Environnement

Dans le cadre d'un plan de gestion environnemental gĂ©rĂ© par le gouvernement des États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie, diffĂ©rents services gouvernementaux des États-Unis et le Programme des Nations unies pour le dĂ©veloppement, l'atoll est intĂ©grĂ© ainsi que les Ăźles Yap, et les atolls d'Ulithi, Fais et Faraulep, Ă  l'Ă©corĂ©gion de la forĂȘt tropicale sĂšche de Yap. Le programme a pour objectif la conservation et l'amĂ©lioration des systĂšmes Ă©cologiques marins, terrestres et d'eau douce et de leur diversitĂ© tout en rĂ©pondant aux besoins humains[W 3].

Flore terrestre

Au dĂ©but du XIXe siĂšcle, Fais est dĂ©crite par le naturaliste Adelbert von Chamisso comme celle ayant le sol le plus riche et la flore la plus luxuriante de toutes les Carolines[Z 13]. Cependant, une grande partie de la forĂȘt d'origine ainsi que le plateau central ont Ă©tĂ© dĂ©vastĂ©s par l'exploitation miniĂšre extensive menĂ©e dans les derniĂšres annĂ©es de l'administration japonaise, entre 1937 et 1944[B 1] - [Z 14]. Environ 45 % de l'Ăźle ont Ă©tĂ© affectĂ©s[MC 5]. La forĂȘt a depuis Ă©tĂ© supplantĂ©e par le maquis, des forĂȘts secondaires, des prairies et des terres agricoles[B 1]. Les fragments de forĂȘt conservĂ©s se situent le long du bord des falaises circonfĂ©rentielles de calcaire corallien de l'Ăźle. Ils forment une ceinture de forĂȘt basse et dense largement dominĂ©e par Barringtonia asiatica[FE 1] - [B 1]. Ce dernier se mĂ©lange du cĂŽtĂ© intĂ©rieur des terres avec des arbres et arbustes, principalement Premna serratifolia — appelĂ© localement iar[CF 1] —, Hibiscus tiliaceus, Pipturus argenteus, Melochia compacta, Ficus tinctoria et Morinda citrifolia. Du cĂŽtĂ© de la mer, il cohabite avec des bouquets de Pandanus tectorius insĂ©rĂ©s dans un Ă©troit cordon d’Heliotropium foertherianum et de Scaevola taccada. En bord de falaise, il y a une prĂ©sence massive de Pandanus dubius. Des touffes d'herbacĂ©s de type Fimbristylis cymosa et Hedyotis albidopunctata s'accrochent aux irrĂ©gularitĂ©s des falaises[FE 1].

  • Fleur Ă  pĂ©tales blancs, Ă  filet blanc puis rose et Ă  anthĂšre jaune.
    Fleurs de Barringtonia asiatica.
  •  Fleurs Ă  pĂ©tales jaunes tirant vers l'orangĂ© s'organisant en une spirale.
    Fleurs de l’Hibiscus tiliaceus.
  • Petit arbre en forme de corolle, Ă  feuille vertes.
    Heliotropium foertherianum.
  • Fruit cylindrique d'un jaune trĂšs clair avec une surface ressemblant Ă  celle d'un ananas.
    Nono à maturité.
  • Fleurs Ă  cinq pĂ©tales blancs Ă©talĂ©s en un demi-cercle, au milieu de longues feuilles lancĂ©olĂ©es vertes.
    Fleurs de Scaevola taccada.

Certains tronçons de la cĂŽte en face de la forĂȘt, zones de terrasses soumises aux embruns et Ă©rodĂ©es, comportent une vĂ©gĂ©tation herbacĂ©e clairsemĂ©e et de faible hauteur composĂ©e d’Heliotropium anomalum, d’Hedyotis albidopunctata, de Fimbristylis cymosa, de Melanthera biflora et de Paspalum distichum[FE 2]. Les zones les plus avancĂ©es sont parfois nues mais gĂ©nĂ©ralement couvertes de Sporobolus farinosus[FE 3]. L'intĂ©rieur du plateau, les bancs de sable Ă  la base des falaises et les pentes arriĂšre des plages sont utilisĂ©es pour l'agriculture, la plupart du temps des plantations de cocotier et d'arbre Ă  pain auxquelles se mĂȘlent Hibiscus tiliaceus, Morinda citrifolia, Calophyllum inophyllum, Premna serratifolia, Ochrosia oppositifolia, Aidia cochinchinensis, Syzygium aqueum et Syzygium samarangense. Le bananier, le papayer et Tacca leontopetaloides sont communĂ©ment cultivĂ©s de mĂȘme que, dans certaines zones du plateau non boisĂ©es, la patate douce, le manioc, le tabac et le taro gĂ©ant des marais[FE 1] - [Z 15]. Les sommets des plages en deçà des cocotiers prĂ©sentent un tapis dense de Vigna marina et de Triumfetta procumbens[FE 3]. Trois espĂšces d’Araliaceae (Polyscias guilfoylei, Polyscias scutellaria et Polyscias fruticosa) sont utilisĂ©es pour former des haies[FE 4]. La prĂ©sence de plants de bambou importĂ©s des Ăźles Yap est documentĂ©e par Adelbert von Chamisso en 1815-1817[Z 13], mais il n'en reste plus de trace.

  • Sol de couleur ocre brun sur lequel se trouve un fragment de plante rampante verte Ă  multiples petites fleurs blanches.
    Heliotropium anomalum variété argenteum.
  • Fleurs Ă  pĂ©tales ovales allongĂ©s jaunes et feuilles vertes en forme d’Ɠuf.
    Fleurs de Melanthera biflora.
  • Feuilles ovales vertes brillantes
    Polyscias scutellaria.
  • Zone remplie d'eau avec des paniers tressĂ©s retenant de la terre et du taro Ă  longues et larges feuilles vertes.
    Taro géant des marais.

Faune

Un total de cinquante-six espÚces d'insectes sont identifiées. Ce sont une sauterelle (Phisis willemsei[M 1]), six coléoptÚres (Caccodes marquesanus, Prionocerus caeruleipennis[M 2], Laius palauensis[M 3], Bradymerus faraulepensis[M 4]), dont une chrysomÚle (Brontispa mariana[M 5]) et une coccinelle (Telsimia nitida[M 6]), deux cicadelles (Cicadulina bipunctella[M 7], Orosius argentatus[M 8] - [M 7]), un cercope (Lallemandana phalerata[M 9]), dix-sept diptÚres (Chrysosoma molestum[M 10], Dacus frauenfeldi[M 11], Dasyrhicnoessa phyllodes[M 12], Homoneura prisca, Homoneura acrostichalis[M 13], Limnophora piliseta, Dichaetomyia vicaria, Musca domestica[M 14], Lophoteles plumula[M 15], Melanagromyza phaseoli, Ophiomyia cornuta, Pseudonapomyza spicata[M 16], Parasarcophaga knabi[M 17], Telostylinus gressitti, Mimegralla albimana[M 18]) dont deux nématocÚres (Thrypticomyia arachnophila, Trentepohlia poliocephala[M 19]), deux psoques (Valenzuela kraussi, Lobocaecilius fennecus[M 20]), cinq punaises (Cyrtopeltis nicotianae, Creontiades pacificus[M 21], Nysius caledoniae, Nysius pulchellus, Pachybrachius pacificus[M 22]), deux cochenilles (Icerya aegyptiaca, Dysmicoccus boninsis[M 23]), six fulgores (Romabenna praetor, Myndus indéterminé, Ugyops kinbergi palauana, Sogatella kolophon, Kamendaka lar, Swezeyia polyxo[M 24]). L'ßle compte également huit libellules (Anaciaeschna jaspidea, Anax guttatus, Diplacodes bipunctata, Neurothemis terminata, Pantala flavescens, Rhyothemis phyllis, Tholymis tillarga, Tramea transmarina) vivant principalement prÚs des cuves en béton utilisées pour la culture des aracées[Z 15], et cinq papillons (Euchrysops cnejus, Lampides boeticus, Zizula hylax, Euploea eunice, Hypolimnas bolina)[Z 16].

  • DiptĂšres orangĂ©s copulant sur une feuile
    Mimegralla albimana.
  • Libellule rouge avec deux paires d'Ă©lytres de mĂȘme couleur
    Neurothemis terminata.
  • Libellule orangĂ©e avec deux paires d'Ă©lytres transparentes
    Tramea transmarina.
  • Papillon au corps gris et aux ailes brunes
    Lampides boeticus.
  • Papillon gris-bleutĂ© aux ailes de mĂȘme couleur
    Zizula hylax.

Une espĂšce de scorpion est identifiĂ©e (Liocheles australasiae[M 25]). Les reptiles sont reprĂ©sentĂ©s par onze espĂšces : six scinques (Emoia caeruleocauda, Emoia jakati, Eugongylus albofasciolatus, Lamprolepis smaragdina, Lipinia noctua, une espĂšce d’Eutropis), quatre geckos (Gehyra mutilata, Gehyra oceanica, Lepidodactylus moestus, une espĂšce peut-ĂȘtre inĂ©dite de Lepidodactylus) et un varan (Varanus indicus)[B 2]. Celui-ci aurait Ă©tĂ© introduit par les Japonais au dĂ©but du XXe siĂšcle[B 3]. Des tortues se rencontrent dans les eaux avoisinantes et viennent de temps en temps Ă  terre[B 3].

  • LĂ©zard au corps brun et Ă  queue bleu vif
    Emoia caeruleocauda.
  • LĂ©zard vert trapu
    Lamprolepis smaragdina.
  • Aquarelle figurant un lĂ©zard brun
    Lipinia noctua.
  • LĂ©zard de couelur rose violacĂ©
    Gehyra mutilata.
  • TĂȘte d'un varan vert
    Varanus indicus.

L'ßle abrite plusieurs oiseaux de mer (Phaéton à bec jaune, Frégate du Pacifique, Frégate ariel, Noddi brun, Gygis blanche), des oiseaux cÎtiers migrateurs (Pluvier bronzé, Pluvier de Leschenault, Chevalier arlequin, Chevalier de Sibérie, Courlis corlieu), un oiseau terrestre (Stourne de Micronésie) et le coq (Gallus gallus), introduit entre et apr. J.-C.[SI 1] - [IS 1].

  • Oiseau Ă  plumage noir et Ă  gorge rouge gonflĂ©e sur un nid
    Frégate du Pacifique.
  • Oiseaux Ă  plumage noir et au-dessus de la tĂȘte blanc sur un nid
    Noddi brun.
  • Oiseau blanc Ă  bec noir sur une branche
    Gygis blanche.
  • Oiseau Ă  longues et fines pattes, au dos brun et au ventre et Ă  la gorge blanc sur une plage
    Pluvier de Leschenault.
  • Oiseau noir perchĂ© sur une branche
    Stourne de Micronésie.

L'Ăźle ne comporte pas de mammifĂšres durant le PlĂ©istocĂšne si ce n'est des rats et des chauves-souris[IS 2]. Une espĂšce de chauve-souris du genre Pteropus est encore rencontrĂ©e sur l'Ăźle, mais son identification spĂ©cifique reste Ă  ĂȘtre prĂ©cisĂ©e[Z 17]. Des cochons et des chiens ont Ă©tĂ© introduits par l'homme depuis environ apr. J.-C., voire peut-ĂȘtre apr. J.-C., depuis les Philippines, l'IndonĂ©sie ou la MĂ©lanĂ©sie du Nord, ou peut-ĂȘtre, pour les chiens, des Ăźles Caroline orientales. Ces populations Ă©taient abattues jeunes, peut-ĂȘtre, dans le cas des cochons, par manque de nourriture suffisante pour les Ă©lever jusqu'Ă  l'Ă©tat adulte. Elles paraissent avoir Ă©tĂ© consommĂ©es de temps Ă  autre, peut-ĂȘtre lors de certains Ă©vĂšnements[IS 3]. Lors de sa visite de l'Ăźle en 1909, l'allemand KrĂ€mer compte de nombreux rats, aucun chien, mais trois cochons et des poules pour l'alimentation[KR 3].

Histoire

Une origine mythique

D'aprĂšs un mythe connu Ă  Fais, variation d'un mythe polynĂ©sien, Motikitik, fils d'une femme nommĂ©e Lorop, dĂ©couvre un jour que sa mĂšre utilise une formule magique pour descendre secrĂštement en un lieu, sous et au-delĂ  de la mer, y chercher de la nourriture pour ses deux frĂšres et lui-mĂȘme. Il la suit un jour par-delĂ  les profondeurs, en utilisant cette mĂȘme formule, et s'y transforme en oiseau, ce dont elle s'aperçoit. Elle lui dĂ©clare alors qu'Ă  la suite de son acte elle va maintenant mourir et lui donne des instructions pour son enterrement. Les deux autres frĂšres ne la prennent pas au sĂ©rieux. Mais un jour que ces derniers partent pĂȘcher, Lorop meurt et Motikitik l'enterre en ce lieu, sous la mer, comme convenu. Plus tard, il part pĂȘcher avec ses frĂšres et, alors que son hameçon s'est coincĂ©, Ă  l'endroit oĂč repose le corps de sa mĂšre, en tirant il rĂ©ussit Ă  Ă©lever une Ăźle du fond de l'ocĂ©an, Fais. Ses frĂšres contestent son droit Ă  la terre ainsi pĂȘchĂ©e mais l'esprit de leur mĂšre donne raison Ă  Motikitik, le seul Ă  avoir dĂ©montrĂ© sa piĂ©tĂ© filiale en l'enterrant[Z 18] - [KR 4].

Par la suite, selon les habitants de Fais, Motikitik perd son hameçon en partant de Fais pour rejoindre l'atoll d'Ulithi. Un habitant de Falalop, proche de cet atoll, le retrouve et le ramĂšne aux Ăźles Yap, sachant son pouvoir merveilleux, mais le perd Ă©galement. DĂ©couvert par la femme d'un chef de ces Ăźles, elle le ramĂšne au village de Gatschapar (Gachpar dans la municipalitĂ© de Gagil) et elle l'y confie Ă  un prĂȘtre. Selon la tradition, connue sur plusieurs Ăźles, si cet hameçon est perdu ou dĂ©truit, Fais est engloutie au fond de l'ocĂ©an pour revenir d'oĂč elle vient. Pour cette raison, il est dit que les gens de Fais vivent dans la peur de Yap et qu'ils souffrent de rester sous son emprise[Z 18].

Les hypothĂšses scientifiques

Carte en couleur figurant l'Australie, le sud-est de l'Asie et l'Océan Pacifique ouest.
Carte de localisation actuelle des langues océaniennes : en rose, les langues micronésiennes auxquelles appartient celle parlée à Fais ; en orange, les langues des ßles Yap et des ßles de l'Amirauté.

L'archĂ©ologue Michiko Intoh propose Ă  la fin des annĂ©es 1990 deux hypothĂšses. La premiĂšre, qui a la faveur de la scientifique, est un dĂ©placement depuis les Ăźles Yap, Ă  la lueur des vestiges archĂ©ologiques, d'un petit groupe humain qui adopte dans un second temps un langage venant de l'est, d'une nature totalement diffĂ©rente de celui de Yap. Une deuxiĂšme hypothĂšse, basĂ©e sur l'Ă©tude linguistique, propose une provenance depuis l'est du Pacifique des premiĂšres populations qui s'intĂšgrent Ă  des rĂ©seaux d'Ă©changes avec les Ăźles Yap[Z 19]. La premiĂšre hypothĂšse ne convainc pas Paul Rainbird qui, en 2004, remarque que Fais est occupĂ©e bien aprĂšs les Ăźles voisines situĂ©es Ă  l'ouest. Il pense que l'arrivĂ©e prĂ©coce des hommes Ă  Fais tient Ă  ce que la trĂšs grande majoritĂ© des atolls plus Ă  l'est, qui ne sont occupĂ©s que quelques centaines d'annĂ©es plus tard, n'Ă©taient pas encore suffisamment Ă©mergĂ©s pour accueillir une population humaine[PR 2]. Quelques annĂ©es plus tard, en 2011, Michiko Intoh ne propose plus qu'un mouvement humain en provenance de l'est conformĂ©ment Ă  l'approche linguistique, le mobilier archĂ©ologique tĂ©moignant des Ă©changes avec l'ouest[Z 20]. Une Ă©tude des dermatoglyphes parue en 1972 n'a pas permis de distinguer des autres populations d'OcĂ©anie les populations d'Ulithi et de Fais, associĂ©es dans un mĂȘme groupe par les chercheurs car partageant la mĂȘme langue[Z 21].

L'occupation préhistorique d'aprÚs les fouilles archéologiques

Des sondages archĂ©ologiques rĂ©alisĂ©s en 1991, en 1994 et en 2005, prĂšs du village de Faliyow, ont permis la dĂ©couverte de plusieurs niveaux de sols attestant d'une prĂ©sence humaine comprise depuis les IIe – IVe siĂšcles[Z 20] - [I 2].

Photo d'un coquillage aux valves aux bords ondulés entrouverts.
Coquilles de Tridacna gigas.

L'Ăźle ne possĂšde pas de gisements d'argile et les cĂ©ramiques nĂ©cessaires aux activitĂ©s culinaires ont donc Ă©tĂ© importĂ©es. Les fouilles ont fourni, dĂšs les niveaux les plus anciens, de nombreux tessons de cĂ©ramique fabriquĂ©e aux Ăźles Yap et quelques tessons de cĂ©ramique des Palaos rĂ©sultant peut-ĂȘtre d'Ă©changes avec Yap. L'Ă©volution dans le temps des types de cĂ©ramique produits aux Ăźles Yap est identique Ă  celle observĂ©e Ă  Fais, dĂ©montrant des contacts trĂšs rapprochĂ©s[Z 22] - [Z 23] - [Z 24] - [I 3]. Les fouilles ont Ă©galement mis au jour des pierres en schiste vert en provenance des Ăźles Yap. Elles Ă©taient probablement utilisĂ©es, aprĂšs chauffe, pour faire bouillir l'eau[Z 23]. Des herminettes obtenues avec une coquille du genre Tridacna sont attestĂ©es depuis l'origine de l'occupation humaine. Celles en coquille du genre Cassis sont connues Ă  partir de 800[I 2]. Des tiges de leurre de pĂȘche Ă  la traĂźne et des hameçons en os ou en carapace de tortue ont pour certains Ă©tĂ© fabriquĂ©s sur place. D'autres datĂ©s entre 450 et 750 et entre 1050 et 1400 proviennent des Ăźles Salomon ou des Ăźles Marshall[I 4]. Des ornements — un bracelet et un pendentif — en coquillage majoritairement du genre Tridacna, mais aussi des genres Cassis et Spondylus ont Ă©tĂ© retrouvĂ©s, de mĂȘme que des fragments de carapace de tortue travaillĂ©s, des dents de requin percĂ©es, des ossements d'oiseaux consommĂ©s, etc., et, dans un niveau datĂ© entre 1000 et 1200, de la gomme d'un arbre courant aux Philippines[Z 23] - [I 2].

Des plates-formes de dĂ©bris de corail, lĂ©gĂšrement surĂ©levĂ©es, pour permettre un bon drainage, et correspondant Ă  l'emplacement d'anciennes habitations sont observables Ă  Fais. Elles appartiennent Ă  un modĂšle qui pourrait ĂȘtre originaire des Ăźles Yap. Elles sont entourĂ©es, comme les maisons actuelles de Fais, de pavĂ©s de corail blanc usĂ©s par l'eau. Des fosses de cuisson avec des grappes de corail brĂ»lĂ©es ont Ă©tĂ© identifiĂ©es[Z 25] - [I 5].

Nombre de vestiges archĂ©ologiques attestent, depuis les dĂ©buts de l'occupation humaine Ă  Fais, d'intenses courants commerciaux entre cette Ăźle et Yap. Mais, ce constat est valable entre les Carolines centrales et Yap[Z 26] - [IS 4]. Étrangement, aucun objet n'illustre des contacts avec les Ăźles Truk et Pohnpei[Z 23].

Quatorze corps correspondant Ă  huit adultes dont six femmes, Ă  un juvĂ©nile et Ă  cinq enfants sont datĂ©s entre 1300 et 1600. Les squelettes portent les marques d'un mode de vie plutĂŽt actif et physique et d'une santĂ© mĂ©diocre. Deux individus portent les traces d'une maladie trĂ©ponĂ©mique, probablement le pian, et l'Ă©mail des dents de la plupart des sujets est rĂ©vĂ©lateur d'une mauvaise nutrition ou d'une maladie ainsi que d'une mauvaise hygiĂšne buccale[Z 27]. Les dĂ©funts ont Ă©tĂ© enterrĂ©s avec divers objets : ce sont de petites perles en coquille, des perles en verre d'origine chinoise ou vĂ©nitienne et ayant peut-ĂȘtre transitĂ© par les Philippines, des bracelets en coquille de Tridacna et de Trochus, un hameçon en coquille[I 6].

Plusieurs des sols fouillĂ©s prĂ©sentent un faciĂšs gĂ©ologique correspondant au rĂ©sultat de l'Ă©rosion de sols communĂ©ment associĂ©e Ă  de l'agriculture[SI 2]. Celle-ci fut particuliĂšrement intense dĂšs l'origine[I 2]. Des os de rats originaires d'Asie de l'est (Rattus tanezumi), dĂšs les niveaux les plus anciens, attestent de l'introduction d'animaux domestiques depuis l'ouest[SI 2] - [Z 23]. Peut-ĂȘtre est-ce l'origine des ancĂȘtres des cochons (Sus scrofa domesticus) et des chiens dont des ossements ont Ă©tĂ© retrouvĂ©s et pour lesquels l'analyse de dents par mesure des ratios d'isotope du strontium indique qu'ils ont grandi sur Fais et ont Ă©tĂ© pour certains nourris avec du poisson[Z 19] - [Z 28]. Les ossements d'oiseaux correspondent Ă  quatorze espĂšces d'oiseaux de mer, cinq espĂšces d'oiseaux cĂŽtiers migrateurs, quatre espĂšces d'oiseaux terrestres et une espĂšce de volaille introduite (Gallus gallus). Neuf espĂšces d'oiseaux de mer et trois d'oiseaux terrestres ont depuis disparu de l'Ăźle[SI 1]. Le coq, originaire du sud-est de l'Asie, est consommĂ© dĂšs l'origine sur l'Ăźle mais sa prĂ©sence est plus importante par la suite[SI 3]. D'aprĂšs des analyses d'ADN, une nouvelle population de coq arrive entre 1340 et 1470. Elle pourrait ĂȘtre liĂ©e Ă  des changements culturels Ă  l'Ɠuvre sur les Ăźles Yap et ayant influencĂ© la population de Fais. Ils se traduiraient par exemple par l'utilisation de grattoirs confectionnĂ©s dans des mollusques du genre cassis et un nouveau de type de cĂ©ramique yapaise. Une autre hypothĂšse est l'introduction de ces animaux depuis la PolynĂ©sie[Z 29]. L'origine est-asiatique du cochon, du rat et de la premiĂšre population de coq, la prĂ©sence du chien beaucoup plus courante Ă  l'ouest qu'Ă  l'est de Fais, peut-ĂȘtre pour des raisons culturelles, et la raretĂ© de l'attestation de ces quatre animaux pour des pĂ©riodes anciennes en un mĂȘme lieu, pourrait ĂȘtre rĂ©vĂ©latrice de l'importance de Fais dans les relations entre l'ouest et le centre-est de la MicronĂ©sie[Z 30].

L'Ă©tude des restes de poisson, couplĂ©e Ă  d'autres sources d'informations, amĂšnent Rintaro Ono et Michiko Intoh Ă  proposer une pĂȘche rĂ©guliĂšre mais peu soutenue des espĂšces cĂŽtiĂšres, du fait de l'environnement rĂ©cifal limitĂ©, et donc une exploitation intensive des espĂšces en pleine mer, notamment le requin, les Serranidae (dont le mĂ©rou) et entre 400 et 800 le thon. Ces trois espĂšces sont les poissons les plus pĂ©chĂ©s Ă  Fais depuis les dĂ©buts de l'occupation humaine. AprĂšs 800, la proportion de thon diminue sans doute pour des raisons climatiques. La pĂȘche du requin et du mĂ©rou est beaucoup plus importante que partout ailleurs en MicronĂ©sie mais aussi en PolynĂ©sie et celle du thon est comparable Ă  celle pratiquĂ©e en PolynĂ©sie. La taille des poissons indique une prĂ©dominance du requin et du thon comme source de protĂ©ine[Z 20]. Dans des niveaux datĂ©s entre 1300 et 1800, les coquilles consommĂ©es ou collectĂ©es dans des inhumations indiquent un ramassage autour des rĂ©cifs de corail[Z 31].

Des premiers contacts avec les Espagnols jusqu'Ă  l'indĂ©pendance des États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie

Carte en couleur figurant de nombreuses ßles de la région de Micronésie.
Carte des Nouvelles Philippines datée de 1705. Fais y est dénommée Paiz.
Carte en teintes bistre et gris figurant Fais, les Ăźles Yap et Ulithi.
Détail de la Carta general de las islas Palaos, Marianas y Carolinas. Fais, orthographiée Feis, y apparaßt aussi sous le nom de Matalotes.

Le , une expĂ©dition espagnole dirigĂ©e par Álvaro de Saavedra s'arrĂȘte sur un groupe d'Ăźles qu'il nomme las Islas de los Reyes (les « Ăźles des Rois Mages » en français). Cet ensemble correspondrait aux Ăźles Yap et Ă  Fais[H 1] - [Z 32]. Cette identification n'est pas partagĂ©e par Paul Rainbird qui attribue la premiĂšre visite de Fais, quatorze ans plus tard, le 22 ou , Ă  l'espagnol Ruy LĂłpez de Villalobos qui y est accueilli en espagnol par des insulaires : la population locale s'approche des navires dans des canots et salue les marins avec des « Buenos dĂ­as matelotes[Z 33] - [PR 3] ! » Cela pourrait ĂȘtre la rĂ©sultante de la visite antĂ©rieure d'Álvaro de Saavedra ou de contacts avec des navires espagnols en provenance des Philippines[H 2] - [Z 34] - [PR 3]. En 1808 ou 1809, le commerçant espagnol Jose Maria Fernandez qui souhaite atteindre les Palaos pour s'y fournir en holothuries arrive Ă  Fais par erreur[Z 35]. Par la suite, l'expĂ©dition de l'explorateur Otto von Kotzebue, en 1815-1817, avec Ă  son bord Adelbert von Chamisso y dĂ©barque[Z 13], alors que Jules Dumont d'Urville qui arrive en vue de cette terre le ne fait que passer Ă  proximitĂ©. Il la nomme Astrolabe avant de lui attribuer le nom de Feis, renseignĂ© par le capitaine LĂŒtcke que les insulaires l'appellent ainsi[Z 36]. En de la mĂȘme annĂ©e, Louis Legoarant de Tromelin l'observe[KR 5] - [Z 37].

Les Ăźles Carolines sont sous domination espagnole du XVIe siĂšcle jusqu'Ă  la fin du XIXe siĂšcle, mais la plupart des communautĂ©s des Ăźles de l'actuel État de Yap n'ont que peu de contacts avec les EuropĂ©ens et vivent en toute indĂ©pendance. En 1885, Ă  la suite d'un conflit entre l'Espagne et l'Allemagne, l'arbitrage de LĂ©on XIII en confirme la possession Ă  l'Espagne contre des avantages commerciaux pour l'Allemagne[Z 38]. Celle-ci acquiert ces Ăźles en 1899 et les intĂšgrent Ă  la Nouvelle-GuinĂ©e allemande[Z 39] - [Z 40]. Au dĂ©but de la premiĂšre guerre mondiale, en 1914, l'Empire du Japon occupe la zone[Z 41]. Cette occupation est lĂ©galisĂ©e dans le cadre du Mandat des Ăźles du Pacifique crĂ©Ă© en 1919 par la SociĂ©tĂ© des Nations[Z 42]. Le phosphate de l'Ăźle est exploitĂ© par les japonais entre 1937 et 1944[Z 14].

Photo en noir et blanc montrant des bùtiments peu élevés au bord de la mer.
Les installations japonaises sur Fais photographiées depuis le périscope du sous-marin américain USS Wahoo le .

L'histoire de l'Ăźle durant la Seconde Guerre mondiale et le ressenti de la population — interloquĂ©e et effrayĂ©e — sont connus par un chant composĂ© aprĂšs la guerre. Durant cette pĂ©riode, Fais est dĂ©fendue par des forces navales japonaises stationnĂ©es sur l'Ăźle et un champ de mine est installĂ© sur le plateau. De jeunes hommes sont envoyĂ©s sur les Ăźles Yap afin d'y travailler aux dĂ©fenses contre les bombardements amĂ©ricains[Z 43]. Un sous-marin amĂ©ricain, le USS Drum tire sur les installations japonaises de l'Ăźle le [13]. Un contact avec un navire de reconnaissance amĂ©ricain a lieu le . Par la suite, l'Ăźle est bombardĂ©e par les navires amĂ©ricains et la population ne peut se rĂ©fugier que dans des abris de fortune. Des forces armĂ©es investissent l'Ăźle avec des vĂ©hicules amphibies le [Z 43]. Un dĂ©tachement de huit Japonais tombe Ă  la suite d'un bref et inutile affrontement. Ce sont les derniers Ă  ĂȘtre tuĂ©s Ă  terre dans l'OcĂ©an Pacifique[14]. Le , les insulaires sont rassemblĂ©s devant la maison du chef suprĂȘme de l'Ăźle pour y assister Ă  la levĂ©e du drapeau amĂ©ricain[Z 43].

Fais ainsi que l'ensemble des Ăźles Carolines passent sous le contrĂŽle des États-Unis qui, en 1947, les administrent en tant que Territoire sous tutelle des Ăźles du Pacifique dans le cadre d'un mandat de l'ONU. Le , un Boeing B-29 Superfortress amĂ©ricain en dĂ©tresse amerrit prĂšs de Fais. Les dix membres d'Ă©quipage sont accueillis par les insulaires, aprĂšs le don de cadeaux au chef Mahol. Ils l'informent Ă©galement de la capitulation du Japon. Les aviateurs sont rĂ©cupĂ©rĂ©s le lendemain par une opĂ©ration de secours[15] - [16]. En 2002, des tĂŽles de mĂ©tal issues de cet avion sont encore utilisĂ©es dans des maisons, pour y dĂ©couper des couteaux, des cuillĂšres ou d'autres outils, pour constituer un four pour y faire sĂ©cher le coprah destinĂ© Ă  l'exportation, un pneu protĂšge une plante, du tissu provenant de l'intĂ©rieur de la coque de l'avion est rĂ©utilisĂ© pour les lignes de pĂȘche et des ampoules en verre sont employĂ©es comme bols pour le service de la table[16].

Les États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie accĂšdent Ă  l'indĂ©pendance en 1986[Z 44].

Une ßle anciennement intégrée aux échanges économiques

Chaque ßle ou atoll est relié à un ou deux atolls ou ßles dans une progression d'est en ouest.
Schéma figurant les relations entre les ßles micronésiennes dans le cadre du sawei.

La documentation archéologique illustre la présence de nombreux échanges avec les ßles Yap depuis les débuts de l'occupation humaine. Au début du XXe siÚcle, Augustin Kraemer témoigne également des nombreux échanges[KR 6]. Fais a été intégrée au sawei, systÚme de relations hiérarchiques entre les ßles Yap et les ßles extérieures de Yap, qui a fonctionné pendant cinq siÚcles avant que les colons allemands puis japonais n'interdisent les voyages inter-ßles. Bien que les yapais n'aient eu qu'une hégémonie réelle trÚs limitée sur ces ßles, ce systÚme fournissait des avantages appréciables pour l'ensemble des parties[Z 45] - [RL 1]. Du fait de leur proximité avec les ßles Yap, Ulithi et Fais bénéficiaient d'un statut spécial. Beaucoup d'ßles entretenaient des relations avec une ßle, à l'ouest, qui lui était supérieure et une ou plusieurs autres, à l'est, qui lui étaient inférieures. Tous les deux ou trois ans, des échanges de biens tels que des tissus ou des produits alimentaires marquaient la reconnaissance de ces relations[Z 45] - [RL 2]. La valeur accordée aux tissus était corrélée à leur complexité : un bateau ne partait donc jamais vers les ßles Yap sans machi, un tissu de fibres végétales aux motifs recherchés[RL 2] - [Z 46]. Au début du XXe siÚcle, l'atoll d'Ulithi prélevait une taxe annuelle sur les bateaux de Fais[KR 6].

Les contes narrĂ©s dans l'atoll d'Ulithi mentionnent Ă  plusieurs reprises Fais, indice d'Ă©changes frĂ©quents avec l'Ăźle[L 1]. D'autres Ă©changes ont Ă©galement eu lieu avec d'autres Ăźles. Ainsi en 1697, 29 MicronĂ©siens ayant quittĂ© Fais pour Lamotrek arrivent Ă  Samar aux Philippines, poussĂ©s par une tempĂȘte[H 3]. En 1963, six hommes d'Ulithi partant pour Fais sont pris dans un typhon et finissent Ă©galement par dĂ©barquer Ă  Samar[Z 47]. Dans ces deux cas, les marins ont pris la dĂ©cision de cesser de rechercher Ă  gagner leur destination pour se replier en un lieu sĂ»r dont ils connaissent la localisation[LU 1]. Les marins utilisent des moyens mnĂ©motechniques, basĂ©s sur l'imaginaire, et font intervenir des rĂ©cifs, des Ăźles et des Ă©toiles. Ces rĂ©cits sont adaptĂ©s par les hommes, en fonction notamment de la localisation de leur lieu de vie[Z 48].

Un point de départ pour l'émigration

Une circulation des hommes a Ă©galement existĂ© Ă  partir de Fais. D'aprĂšs un mythe des habitants de l'Ăźle d'Hatohobei Ă  Palaos, 1 230 km au sud-ouest de Fais, leur Ăźle aurait Ă©tĂ© peuplĂ©e par des insulaires de Fais, qui dans cette histoire prend le nom de Mog Mog. Des Ă©tudes ethnographiques indiquent une parentĂ© culturelle et de langue entre les habitants de ces deux Ăźles. Des histoires de voyages entre ces deux terres sont encore racontĂ©es par des anciens au dĂ©but des annĂ©es 2000. L'Ă©poque de ce peuplement pourrait ĂȘtre datĂ©e vers 1700[W 4] - [17] - [Z 49].

D'aprĂšs un autre conte, des insulaires de Fais Ă©migrent sur Mogmog dans l'atoll d'Ulithi, probablement au dĂ©but du XIXe siĂšcle, et y donnent naissance au clan d'ascendance matrilinĂ©aire Hamakrang. En 1949, la plupart des 25 personnes s'en rĂ©clamant descendent d'une femme nommĂ©e Thalalmar[L 2].

Toponymie

Dessin en couleur figurant l'Ăźle, ovale, avec ses toponymes.
Toponymes de Fais d'aprÚs A. KrÀmer (1937) : en blanc, points marquants du trait de cÎte ; en noir, les plages et zones de falaises ; cercles noirs, villages avec entre parenthÚses les noms actuels.

Fais a Ă©tĂ© dĂ©nommĂ©e Feis ou Feys, dĂšs 1721, ou Pais ou Paiz, dĂšs 1697[Z 50] - [Z 36] - [KR 7]. Elle apparaĂźt sous la dĂ©nomination Ăźle de Fais dans un atlas en langue française publiĂ© en 1826[Z 51]. En 1828, elle reçoit de Jules Dumont d'Urville les noms successifs d'Ăźle Astrolabe d'aprĂšs le nom de son navire puis de Feis, renseignĂ© qu'il s'agit du nom employĂ© par les insulaires[Z 36]. Le passage Ă  proximitĂ© de Louis Legoarant de Tromelin, la mĂȘme annĂ©e, lui vaut d'ĂȘtre parfois renseignĂ©e sous le nom de Tromelin ou Tromlin island[KR 5]. Elle est encore dĂ©nommĂ©e Fuhaesu ou Huhaesu durant l'occupation japonaise[C 1] - [Z 52]. Dans les Ăźles Yap, l'Ăźle est nommĂ©e VoeĂȘi[KR 7].

Le toponyme Fais vient du terme ulithi Fai signifiant pierre, à cause de son aspect rocheux. Il se prononce comme le mot allemand Eis (glace en français), précédé de la lettre « F »[KR 7]. L'ßle est appelée Faiss en woléaïen[Z 53].

La toponymie interne Ă  Fais, selon une source datĂ©e de 1937, concerne essentiellement les zones cĂŽtiĂšres, l'intĂ©rieur de l'Ăźle Ă©tant dĂ©nommĂ© LĆ«el. Les plages et zones de falaises sont diffĂ©rencĂ©es par des rochers et autres points marquants du trait de cĂŽte[KR 8]. La population s'organise en trois villages contiguĂ«s le long des 600 m de la rive mĂ©ridionale[R 1] : Yiludow, Lecucuy et Faliyow[MC 6].

Administration

Fais est une municipalitĂ© de l'État de Yap, dans les États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie. Elle est dirigĂ©e par trois chefs, un par village, dont l'un est le chef suprĂȘme de l'Ăźle[KR 9] - [16] - [RL 3]. En 1937, le chef principal est celui du village de Lecucuy, car c'est le plus peuplĂ©[KR 9].

Dans le cadre des Ă©lections lĂ©gislatives internes Ă  l'État de Yap, la municipalitĂ© constitue avec celles de Ngulu, d'Ulithi et la municipalitĂ© inhabitĂ©e de Sorol le troisiĂšme district Ă©lectoral. Ce district Ă©lit pour quatre ans un sĂ©nateur au scrutin uninominal majoritaire Ă  un tour[X 1] - [X 2]. Au niveau national, l'ensemble de l'État de Yap Ă©lit un sĂ©nateur au mandat de deux ans et un sĂ©nateur au mandat de quatre ans pour le CongrĂšs des États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie[Z 54].

Population et société

DĂ©mographie

Les villages Yiludow, Lecucuy et Faliyow sont, en 2007, respectivement habitĂ©s par 67, 116 et 128 habitants[MC 7]. Le dernier recensement en 2010 dĂ©nombre 294 habitants[X 3]. En 2007, une centaine de personnes originaires de Fais vivent dans les Ăźles Yap[RL 4].

Évolution dĂ©mographique
1925 1930 1935 1958 1967 1973
472368310234213212
1977 1980 1987 1994 2000 2010
195207253301215294
Le recensement de 1920 rassemble sous la dénomination Fais la population de plusieurs ßles et atolls. Le chiffre exact de la population est donc inconnu[Z 46].
(Sources : Étude dĂ©mographique[Z 46] et recensements officiels des populations de l'État de Yap jusqu'en 2000[X 4] et en 2010[X 3])
Évolution dĂ©mographique de la municipalitĂ© de Fais depuis 1920

Langue

La langue parlée à Fais est l'ulithi, une langue océanienne du sous-groupe des langues micronésiennes de la sous-famille chuukique[18]. Quelques termes diffÚrent toutefois de la langue parlée dans l'atoll d'Ulithi[Z 55] à tel point que William Armand Lessa la considÚre comme un dialecte[L 3].

Croyances et religions

Les insulaires vouaient anciennement un culte Ă  des dieux[Z 43] et aux esprits des ancĂȘtres[RL 3]. Ces derniers n'Ă©taient pas forcĂ©ment bienveillants : un conte du dĂ©but du XIXe siĂšcle narre l'histoire d'un esprit — iĂ€lus en ulithi — qui profite du dĂ©part d'un homme, parti danser dans la maison des hommes, pour s'attaquer Ă  sa femme et Ă  ses trois enfants et leur ĂŽter les yeux. À son retour, le mari fait fuir l'esprit en soufflant dans un triton avant de le faire s'envoler par un trou du toit[L 4]. D'aprĂšs l'ethnologue Augustin KrĂ€mer, le dieu Ëlulap a eu deux fils, RĂłngola, qui a pour femme Lagasilang et LemarĂ«leng, et Lugeileng. Ce dernier, avec JĂłural, a Ă©galement eu deux fils, Saulal et JĂ©lefath. Olefat est le fils de JĂ©lefath[KR 10]. Wolofad — variante de transcription de JĂ©lefath — est la figure centrale du panthĂ©on divin local. AssociĂ© aux changements culturels, il a transmis le feu, le tissage et les arts. Il est Ă©galement un hĂ©ros porteur de troubles et de calamitĂ©s[Z 43]. Le charpentier de Lugeileng, SĂ«lang, a montrĂ© aux habitants de Ngulu et de Satowan comment construire un bateau, une maison et le bol Ă  couvercle. Les insulaires de Ngulu ont ensuite montrĂ© ce savoir aux habitants des Ăźles Yap qui l'ont transmis Ă  ceux d'Ulithi qui l'ont appris Ă  la population de Fais qui l'a communiquĂ© Ă  ceux de Woleai. Depuis Satowan, le savoir a Ă©tĂ© transmis progressivement vers l'est[KR 11]. Certains dieux sont communs aux Ăźles Yap et Ă  Ulithi[KR 10] - [L 5]. Il existait des pratiques de divination au moyen de nƓuds, par exemple, pour savoir si la pĂȘche allait ĂȘtre abondante[KR 12].

Les habitants de Fais se convertissent au christianisme aprĂšs la Seconde Guerre mondiale[RL 3]. En 1948, toutefois, l'ethnologue William Armand Lessa observe encore un sanctuaire bien entretenu dĂ©diĂ© aux esprits des ancĂȘtres, un fangeliĂ€lus[L 6] et un chant composĂ© aprĂšs la Seconde Guerre mondiale comporte de nombreuses rĂ©fĂ©rences Ă  des esprits d'ancĂȘtres — les esprits portent des noms diffĂ©rents de ceux des anciens de leur vivant — et Ă  des dieux[Z 43].

Sous l'influence chrĂ©tienne, la croyance aux esprits dĂ©cline fortement Ă  partir des annĂ©es 1970. Cependant Ă  cette date D. Rubinstein constate l'existence d'« appelants des esprits » officiels, et est tĂ©moin du comportement d'une femme, ayant des problĂšmes familiaux, se disant possĂ©dĂ©e par son dĂ©funt mari[Z 56]. Cette croyance est encore actuelle au dĂ©but du XXIe siĂšcle puisqu'en 2003, la recette d'un colorant rouge pour la teinture des fibres d'hibiscus a pu ĂȘtre retrouvĂ©e par l'apparition en rĂȘve, Ă  un homme de 44 ans, de sa mĂšre morte douze ans plus tĂŽt et la lui rĂ©vĂ©lant[RL 5].

Éducation

L'Ăźle dispose d'une Ă©cole Ă©lĂ©mentaire, portant le nom d'un ancien chef du nom de Mahol, comportant, en 2001, 87 Ă©lĂšves dont 38 filles pour 7 professeurs dont une femme. L'Ă©ventuelle poursuite du parcours scolaire nĂ©cessite de se dĂ©placer dans les atolls de Woleai et d'Ulithi ou Ă  Yap[Z 57] - [16].

Santé

Plante Ă  longues feuilles vertes et Ă  fleur blanche en forme de spaghetti.
Crinium asiaticum.

Fais dispose d'un dispensaire trĂšs bien organisĂ© et bien gĂ©rĂ©. Une Ă©tude mĂ©dicale note, en 2007, l'organisation de rĂ©unions par un assistant de santĂ© masculin chaque dimanche aprĂšs l'Ă©glise. Le besoin d'une infirmiĂšre est alors notĂ©, des femmes ont une certaine difficultĂ© Ă  lui faire part de leurs problĂšmes spĂ©cifiquement fĂ©minins[Z 58]. Bien que la mĂ©decine moderne soit acceptĂ©e, la mĂ©decine pratiquĂ©e est essentiellement traditionnelle. Il y est utilisĂ© par exemple le Premna serratifolia, trĂšs courant sur l'Ăźle, le Barringtonia asiatica — localement gol[CF 2] —, le Crateva religiosa, le Crinum asiaticum, un cultivar de Curcuma, le Syzygium aqueum, l'Ochrosia oppositifolia — appelĂ©e localement mo — agent carminatif et Ă  fortes doses abortif[CF 3], les feuilles de Vigna marina, une prĂ©paration Ă  mĂącher Ă  base de feuille de bĂ©tel et de noix d'arec[FE 5].

La consommation d'alcool Ă©tant prohibĂ©e par les chefs, celle-ci s'effectue de façon discrĂšte. En 2007, une Ă©tude mĂ©dicale de la population enregistre une prĂ©dominance de l'hypertension, de la goutte liĂ©e Ă  la consommation de tortue, du diabĂšte, de la schizophrĂ©nie — quatre cas sous traitement dont un fĂ©minin —, de la lĂšpre — six patients en cours de traitement, quatre autres l'ayant achevĂ© —, des douleurs abdominales, des maux de dos et de diverses infections cutanĂ©es — prĂ©sence presque gĂ©nĂ©ralisĂ©e de la dermatophytose de la peau glabre. Une moitiĂ© des individus testĂ©s est porteur de filarioses. Aucun traitement pour cette derniĂšre atteinte n'est alors disponible sur l'Ăźle[Z 58]. Les habitants de Fais ont subi une Ă©pidĂ©mie de dengue Ă  la fin de l'annĂ©e 2011. Elle a commencĂ© le , s'est propagĂ©e dans la premiĂšre semaine du mois de dĂ©cembre en atteignant un pic de 72 cas simultanĂ©s, et s'est terminĂ©e fin . 157 des 294 rĂ©sidents ont Ă©tĂ© infectĂ©s[Z 59]. Deux ans plus tard, un cas suspect de Chikungunya a Ă©tĂ© rapportĂ©[Z 60].

MĂ©dias et Ă©quipement en biens Ă©lectroniques

Moins de 20 % de la population bĂ©nĂ©ficie de l'Ă©lectricitĂ©, obtenue par panneaux solaires, en 2008[16]. En 2013, l'Union EuropĂ©enne prĂ©voit de faire installer des panneaux solaires pour une production maximale de 65 kilowatt/heure[W 5]. Au dĂ©but des annĂ©es 2010, trĂšs peu d'habitants (environ 1 %) se procurent des journaux papiers ou profitent des services postaux. L'Ăźle ne comporte aucun rĂ©seau tĂ©lĂ©phonique et internet. Un peu moins de 15 % des habitants possĂšdent une radio et 5 % d'entre eux ont une tĂ©lĂ©vision ou un lecteur DVD. L'accĂšs aux informations extĂ©rieures est un faible sujet de prĂ©occupation pour les habitants. Neuf ordinateurs rassemblĂ©s dans un mĂȘme bĂątiment sont prĂ©sents sur l'Ăźle en 2002[16] - [K 1].

Économie

Fais a fourni les Ăźles Yap en ornements de coquillages, au moins depuis l'arrivĂ©e des EuropĂ©ens dans cette zone de l'OcĂ©an Pacifique[Z 61]. Au dĂ©but du XXIe siĂšcle, l'agriculture et la pĂȘche constituent les moyens de subsistance des insulaires. Deux petits magasins de dĂ©tail familiaux assurent la distribution de quelques autres produits de consommation[MC 5].

Ressources en eau

Quatre enfants sont assis sur un sol gris sous des cocotiers au tronc gris-brun et aux palmes vertes.
Enfants assis sur le sol sous des cocotiers Ă  Fais.

L'eau potable est préférentiellement fournie par les noix de coco, mais l'eau de pluie tombant sur les toits des bùtiments est également récupérée à cet effet et stockée dans des réservoirs[MC 8]. Une noix de coco a une contenance d'environ 300 ml d'eau chargée d'électrolytes et un habitant en consomme trois à cinq par jour. Il peut compléter cet apport en eau et en nutriments en mangeant des papayes, des citrons ou autres productions d'arbres fruitiers[MC 9]. Outre pour la consommation humaine, l'eau de pluie est également employée pour la cuisine, la vaisselle, la lessive et le rinçage aprÚs les bains de mer. Le bord de mer sert pour le lavage du corps et l'élimination des déchets humains, il n'y a donc pas de douche ou de toilettes[MC 10]. L'eau de pluie stockée dans les réservoirs est trÚs peu utilisée pour l'agriculture et seulement pour l'alimentation des porcs[MC 3].

Les ressources en eau de coco et en eau de pluie sont parfois largement amputĂ©es par les dĂ©gĂąts occasionnĂ©s par certains cyclones. Les sĂ©cheresses qui suivent les phĂ©nomĂšnes El Niño, tous les huit Ă  quinze ans, peuvent laisser l'Ăźle dĂ©pourvue d'eau de pluie pendant des mois et rĂ©duisent la quantitĂ© et la qualitĂ© des noix de coco. Les rĂ©serves d'eau sont alors consommĂ©es en moins de deux mois[MC 11]. Une aide extĂ©rieure a parfois Ă©tĂ© nĂ©cessaire lors de longues sĂ©cheresses[MC 12]. La nappe phrĂ©atique est actuellement accessible par deux puits sur la cĂŽte ouest, l'un en forme de cĂŽne renversĂ© creusĂ© anciennement Ă  la main et l'autre bĂ©tonnĂ© et Ă©tabli sous l'administration japonaise pendant la Seconde Guerre mondiale[Z 15] - [MC 13]. Le puits ancien est creusĂ© dans des sables holocĂšnes peu permĂ©ables et qui retiennent donc l'eau. Les parois de sable ont Ă©tĂ© terrassĂ©es et stabilisĂ©es par des murs de pierre pour empĂȘcher l'affaissement de la structure[Z 1]. Ces deux puits ne sont utilisĂ©s qu'en cas d'urgence du fait de leur Ă©loignement des zones d'habitation. Quatre autres puits ont Ă©tĂ© installĂ©s prĂšs des villages entre 1996 et 1999 mais aucun d'eux n'est plus en service et un seul peut ĂȘtre remis en Ă©tat en cas de nĂ©cessitĂ©[MC 4]. En cas de manque d'eau dans un rĂ©servoir familial, les voisins ont l'habitude de s'entraider mĂȘme si en parler est relativement tabou[MC 6].

Des analyses réalisées en 2005 ont révélé que l'eau d'un des puits présente des concentrations de sodium et de chlorure trÚs élevées, indication de l'intrusion d'eau salée. Des coliformes fécaux y ont été également repérés ainsi que dans un réservoir d'eau de pluie[W 6]. Du fait de la géologie de l'ßle, la qualité de l'eau de la nappe phréatique est trÚs variable[Z 1].

Exploitation du phosphate

Attroupement d'hommes sur une voie de chemin de fer au milieu de la végétation.
Voie de chemin de fer japonaise pour le transport du phosphate (photographie des années 1930).

Un riche dĂ©pĂŽt de phosphate est dĂ©couvert par une expĂ©dition allemande en 1903[Z 14]. Dix ans plus tard, la Deutsche Sudsee Phosphat Aktiengesellschaft acquiert les droits d'exploitation[C 2] mais nuls travaux ne sont cependant menĂ©s Ă  cause des difficultĂ©s d'accĂšs et des rĂ©serves jugĂ©es insuffisantes[Z 14]. En 1914, le gouvernement japonais achĂšte les droits Ă  la sociĂ©tĂ© allemande et revendique la possession de la presque totalitĂ© de l'Ăźle, expropriant de fait ses habitants[Z 14] - [C 3]. La compagnie japonaise Nanyo Takushoku est chargĂ©e de rĂ©aliser l'exploitation en 1937. Elle transporte de Palaos Ă  Fais tout l'Ă©quipement minier nĂ©cessaire et construit des chemins de fer, un quai, un entrepĂŽt, de grandes chambres de sĂ©chage pour le phosphate, un magasin, une station de radio, un dortoir pour les travailleurs, etc. La qualitĂ© du phosphate Ă©tait infĂ©rieure Ă  celle d'Angaur Ă  Palaos. Le premier chargement de phosphate est expĂ©diĂ© en et le dernier en 1944, lorsque la mine est arrĂȘtĂ©e Ă  cause de la Seconde Guerre mondiale et des offensives amĂ©ricaines. Une moyenne de 30 000 tonnes a Ă©tĂ© expĂ©diĂ©e chaque annĂ©e[Z 14]. Des jeunes hommes d'Ifalik ont Ă©tĂ© forcĂ©s au travail dans les carriĂšres[LU 2]. L'exploitation, intensive, a ruinĂ© une grande partie des sols, les rendant impropres Ă  l'agriculture[B 1] - [N 2]. Il reste de cette pĂ©riode divers vestiges abandonnĂ©s : un village japonais, une usine et les zones d'expĂ©ditions[N 2].

Agriculture

Amas de plantes venant d'ĂȘtre coupĂ©es.
PĂ©tioles et rhizomes de Colocasia esculenta.
Tubercules roses foncé posés au sol.
Tubercules de patate douce fraßchement récoltés.

L'agriculture pratiquĂ©e sur Fais est une agriculture traditionnelle de subsistance alliant petits espaces cultivĂ©s en contact avec l'habitat et zones de culture mixtes, c'est-Ă -dire qu'une mĂȘme parcelle accueille Ă  la fois des arbres fruitiers et des plantes potagĂšres[Z 62]. Les habitants consomment trĂšs peu de nourriture « moderne » (riz, nouilles instantanĂ©es, pain, conserves, etc.) et donc importĂ©e[K 2].

Le territoire est traditionnellement organisĂ© en 320 parcelles de terrain nommĂ©es[R 2], elles-mĂȘmes subdivisĂ©es en parcelles sans nom appartenant Ă  diffĂ©rentes familles. Mais, l'exploitation du phosphate par les Japonais entre 1937 et 1944 a rendu une grande partie des sols incultes[R 3] - [Z 14]. Des arbres, des chemins ou des alignements de pierres de corail sont utilisĂ©s pour dĂ©limiter le terrain. Les petites parcelles, les parcelles nommĂ©es mais Ă©galement les diffĂ©rentes composantes des familles sont dĂ©signĂ©es par le terme bogota[R 3]. L'exploitation miniĂšre ayant dĂ©vastĂ© les terres intĂ©rieures, le plateau central ne comporte plus que quelques terrains agricoles[B 1]. On y cultive la patate douce, introduite par les Japonais vers 1850[KR 13], le manioc, le tabac[FE 1], diffĂ©rentes aracĂ©es (Alocasia macrorrhizos, Colocasia esculenta, Xanthosoma sagittifolium)[FE 6]. Depuis la fin du XXe siĂšcle, le taro gĂ©ant des marais est cultivĂ© dans des cuves en ciment. Les plus larges atteignent 10 Ă— 15 m. Les parois s'Ă©lĂšvent en gĂ©nĂ©ral sur moins d'un mĂštre de haut et retiennent des quantitĂ©s variables d'eau de pluie chargĂ©e d'algues[Z 15]. Le , la communautĂ© de Fais reçoit une subvention de 75 417 $ offerte par l'ambassade du Japon pour la construction de 35 cuves Ă  taro pour amĂ©liorer la sĂ©curitĂ© alimentaire de la population mise en pĂ©ril par les typhons et les tempĂȘtes qui frappent l'Ăźle chaque annĂ©e. Il est prĂ©vu que ces structures assurent une production de 11 091 kg de taro[Z 63]. L'intĂ©rieur du plateau, les bancs de sable Ă  la base des falaises et les pentes arriĂšre des plages sont utilisĂ©es pour des plantations de cocotier[FE 1]. Les cocoteraies abritent de l'arbre Ă  pain, de la figue bossue, du nono — appelĂ© localement iol[CF 4] — dont les fruits sont mangĂ©s avec de l'eau et du sucre[FE 7]. Les fruits du Muntingia calabura et du papayer ainsi qu'un igname, le Dioscorea esculenta, sont Ă©galement consommĂ©s[FE 8].

La qualitĂ© du tabac produit Ă  Fais est reconnue par la population d'Ulithi car il pousse mieux[Z 64]. Au dĂ©but du XXe siĂšcle, les insulaires d'Ulithi Ă©changeaient avec ceux de Fais du sirop de noix de coco contre du tabac[Z 65]. Les plantations sont Ă©voquĂ©es dans une danse pratiquĂ©e par les hommes de l'atoll d'Ulithi. Elle raconte comment un homme fou d'Ulithi devenu magicien, proposa Ă  deux frĂšres un voyage vers les plantations de tabac de Fais et les tua avec lui durant le voyage en invoquant une tornade[Z 64]. Un conte rĂ©citĂ© aux enfants sur Ulithi narre l'histoire d'un homme de Mogmog, une des Ăźles de l'atoll d'Ulithi, qui tue un requin mangeur d'hommes qui empĂȘchait les gens de son Ăźle de venir Ă  Fais. Il en offre la chair aux insulaires de Fais, ce qui expliquerait pourquoi ils sont parmi les seuls Ă  en manger en MicronĂ©sie, et reçoit du tabac en Ă©change[L 1].

Quelque 24 porcs sont Ă©levĂ©s sur l'Ăźle Ă  la fin des annĂ©es 2000[N 2], autour des habitats, sur la cĂŽte ou prĂšs des zones agricoles, gĂ©nĂ©ralement une patte antĂ©rieure attachĂ©e Ă  un pieu. Ils sont nourris de coprah et de dĂ©chets de lĂ©gumes[Z 28]. Les poulets restent dans les zones d'habitat et mangent du coprah. Les chiens, laissĂ©s entiĂšrement libres, se nourrissent de restes de nourriture dont des os de poisson. Des rats vivent dans la vĂ©gĂ©tation et pourraient aussi servir de nourriture[Z 28].

PĂȘche

Homme sur la plage tenant quatre thons par la queue.
PĂȘcheur portant des thons Ă  une maison des hommes.

Les eaux cĂŽtiĂšres de Fais, Ă  cause de l'absence de lagon, sont moins riches en poisson que la plupart des autres Ăźles de l'État. La population est donc moins autosuffisante du produit de sa pĂȘche[W 7]. Les hommes de Fais pĂȘchent quotidiennement, de jour mais aussi de nuit, le long de l'estran, dans la zone de descente du rĂ©cit et plus loin en mer avec des bateaux Ă  essence en fibre de verre — mais le coĂ»t de l'essence rend leur utilisation rare — ou des canoĂ«s. Ils attrapent entre autres des poissons perroquets, des poissons-chirurgiens, des mĂ©rous, des vivaneaux. ÉquipĂ©s d'un masque et de palmes, d'une ligne Ă  main et d'un crochet, les jeunes hommes pĂȘchent des poissons en eaux plus profondes sur le bord extĂ©rieur du rĂ©cif tels des petits thons, des carangues, des mĂ©rous et d'autres poissons de pleine mer. Sur commande des hĂŽteliers et restaurateurs des Ăźles Yap, la nuit, la ligne de pĂȘche et le crochet sont remplacĂ©s par une lampe sous-marine et ils attrapent des homards. S'ils sont dĂ©rangĂ©s par des requins, ils laissent tomber une pierre, qu'ils ont pris la prĂ©caution de prendre, laquelle attire les requins qui la poursuivent. Les bateaux s'Ă©loignent jusqu'Ă  un mille du large pour pĂȘcher de plus grands poissons pĂ©lagiques : thon, mahi-mahi et marlin. Le poisson pĂȘchĂ© et destinĂ© Ă  la consommation est partagĂ© avec ceux vivant Ă  proximitĂ© du domicile. Le partage des aliments sert Ă  lier la communautĂ© et induit des relations d'Ă©changes rĂ©ciproques. La pĂȘche Ă  la tortue et la rĂ©colte des Ɠufs, Ă©galement partagĂ©s avec les voisins, est autorisĂ©e mais rĂ©glementĂ©e par le chef de l'Ăźle qui l'interdit pendant la saison de nidification. Une spĂ©cialitĂ© locale est l'Ă©laboration de beignets constituĂ©s de viande de tortue entourĂ©e d'une boule de pĂąte et frits[Z 66].

Poisson au corps parsemé de bandes de couleur interrompues ou continues.
Vivaneau Ă  damier (Lutjanus decussatus).

La pĂȘche du requin est destinĂ©e Ă  la consommation des insulaires qui sont parmi les seuls aux États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie Ă  en consommer[W 8]. Au dĂ©but des annĂ©es 2010, la pĂȘche s'effectue en pleine mer avec une Ă©paisse ligne en monofilament terminĂ©e par un grand hameçon alourdit par une pierre pour tomber droit[Z 66]. Quelque temps auparavant, il Ă©tait Ă©galement pratiquĂ© la pĂȘche au collet[Z 20]. Le requin est lavĂ© prĂšs du rivage puis dĂ©coupĂ© dans un endroit propre prĂšs de l'abri Ă  bateaux. Les ailerons ne sont pas consommĂ©s. La viande est Ă©galement partagĂ©e[Z 66].

Deux systĂšmes gĂ©ographiques permettent aux pĂȘcheurs de diffĂ©rencier les secteurs de pĂȘche. Un premier systĂšme est fondĂ© sur un dĂ©coupage en treize rangs concentriques depuis le littoral jusqu'Ă  la pleine mer en passant par les diffĂ©rentes lignes de rĂ©cif. Des lignes radiales dĂ©limitĂ©es par des Ă©lĂ©vations du corail oĂč des points de pĂȘche connus recoupent ces zones et dĂ©limitent les secteurs. Le deuxiĂšme systĂšme est basĂ© sur la position de blocs de coraux submergĂ©s et sur la direction et la distance du bateau par rapport Ă  ces points[R 4].

Artisanat textile

L'habilité au tissage est un aspect de l'identité féminine dans toutes les ßles extérieures de Yap. Les jeunes filles commencent à apprendre à tisser les fibres de bananier et d'hibiscus sur des métiers à partir de quatre ou cinq ans et sont, au moment de la puberté, pratiquement toutes des tisserandes compétentes[RL 1]. L'apprentissage se fait à Fais sous l'autorité de leur mÚre ou d'une tante[RL 6].

Types de tissu

Figures géométriques complexes sur un fond violet et avec une bande centrale horizontale rouge.
Dessin d'un détail de machi.

Six types de tissage sont réalisés dans les ßles extérieures de Yap. Le plus simple, le marub, est un tissu simple et non teinté en fibre d'hibiscus. Le hulifuy (littéralement hibiscus) et le huluch (littéralement peau de banane) comportent respectivement des bandes de trame en fibre d'hibiscus et en fibre de bananier alternativement non teintés et teintés en bleu. Le peig (littéralement cÎté) est un tissu de fibres de bananier avec une large section rayée au centre et plusieurs bandes de motifs supplémentaires en fibres teintées de chaque cÎté. Une variante, le flak (de l'anglais flag), est apparu aprÚs la Seconde Guerre mondiale du fait des possibilités de conception offertes par les fils de coton et les fils de polyester multicolores. Il consiste en une large bande de trame centrale à laquelle s'ajoute, de chaque cÎté de celle-ci, trois ou quatre bandes multicolores plus étroites. La variété de tissage la plus élaborée est le machi, au début des années 2000 devenue spécifique à Fais mais autrefois également pratiquée dans l'atoll d'Ulithi. Ce tissu est décoré de multiples rangées de motifs supplémentaires, dont des figurations humaines trÚs stylisées, de part et d'autre de la bande de trame[RL 7] - [RL 8]. Une variété de ce dernier, le mmul, comporte une bande de motifs centrale clairement distincte des autres[RL 3]. Certains des motifs visibles sur les tissus n'ont pas changé depuis au moins deux siÚcles[Z 67]. Le machi est un tissu trÚs important du point de vue symbolique dans la société de Fais.

Préparation des fils

Arbre bas à troncs multiples avec un couvert végétal à son sommet trÚs touffu.
Tronc d’Hibiscus tiliaceus.

Une variĂ©tĂ© particuliĂšre de bananier, appelĂ©e malug, est prĂ©fĂ©rĂ©e pour sa fibre fraĂźche et blanche. Dans le machi, elle sert pour les fils de trame et de chaĂźne de base, alors que la fibre d'hibiscus, qui se colore plus facilement, est employĂ©e pour les fils de trame supplĂ©mentaires crĂ©ant les dĂ©cors. La prĂ©paration de la fibre de banane nĂ©cessite d'abord, pour le tisserand, d'extraire des couches concentriques externes du bananier, prĂ©fĂ©rĂ©es pour la meilleure qualitĂ© de la fibre foliaire, des rubans de trois Ă  quatre centimĂštres de large. Ils sont grattĂ©s dĂ©licatement au moyen du bord poli d'une coquille de palourde ou d'un petit couteau afin d'en enlever la pulpe. Les rubans de deux mĂštres de long obtenus sont mis Ă  sĂ©cher au soleil puis divisĂ©s chacun en filaments minces d'environ un Ă  deux millimĂštres de largeur. Concernant la fibre d'hibiscus, le tisserand Ă©pluche l'Ă©corce fibreuse des branches puis met Ă  tremper l'Ă©corce pendant plusieurs jours, lestĂ©e de pierres, dans un trou rempli d'eau de mer sur la partie plate du rĂ©cif de l'Ăźle, ou plus rĂ©cemment, dans des bassins en bĂ©ton, jusqu'Ă  ce que la fibre puisse ĂȘtre sĂ©parĂ©e de l'Ă©corce. Pour les fibres de bananier comme pour les fibres d'hibiscus, les brins individuels sont nouĂ©s ensemble de bout en bout pour former des fils[RL 2].

Teinture des fils

Les fils de trame supplémentaires en fibres d'hibiscus sont colorés avant le tissage, soit en rouge, soit en bleu. Le colorant bleu était à l'origine dérivé des surgeons de bananier et le rouge des racines du nono (Morinda citrifolia), mais durant l'administration coloniale japonaise, probablement à la fin des années 1930, les ßliens ont remplacé ces colorants par ceux tirés d'autres plantes locales ou de matiÚres minérales. Au début des années 1970, les femmes de l'ßle utilisaient du papier de miméographe bleu et des cartouches de colorant rouge synthétique japonais[RL 9]. Par la suite, le colorant rouge devenant difficile d'accÚs, du coton rouge importé a été utilisé et le procédé de teinture oublié. En 2003, dans le cadre d'un projet de relance du tissage du machi, la teinture par colorant naturel a été redécouverte[RL 2].

Tissage

Dessin figurant une femme à demi allongée appuyée sur un poteau avec un métier à tisser.
Femme tissant sur un métier à tisser horizontal.

Les fils de chaßne de fibres de bananier obtenus sont gauchés au moyen d'un banc bas, en bois, dans lequel sont insérées quatre chevilles verticales autour desquelles le fil est enroulé. Les chevilles sont ensuite remplacées par différentes piÚces du métier à tisser, puis le tout est transféré sur le métier. Le tissage s'effectue sur des métiers à tisser horizontal à piÚces en bois d'hibiscus cousues avec des cordelettes de fibres séchées ou d'herbe. La tisserande tisse assise sur le sol, jambes étendues et pieds appuyés contre le cadre du métier à tisser, une sangle fixée au métier passée autour de ses reins. Le fil de chaßne de fibres de bananier, disposé sur une longue navette polie, est fabriqué avec du bois d'oranger. Le fil de trame supplémentaire d'hibiscus teinté est passé à travers les fils de chaßne au moyen d'une aiguille fabriquée à partir d'un dard de raie ou d'un rostre d'espadon[RL 2].

Relance du tissage du machi

Au dĂ©but des annĂ©es 2000, moins de 25 femmes de Fais, surtout des femmes de 40 ans et plus, savent encore tisser le machi. Aucune femme de moins de 30 ans ne sait le rĂ©aliser et n'en comprend la signification culturelle. Les causes de cette perte de savoir-faire sont pour D. Rubinstein et S. Limol les influences modernisatrices, en particulier la scolarisation occidentale, l'Ă©conomie salariale et la migration urbaine. Pour les femmes de Fais encore dĂ©tentrices de ce savoir, elles seraient le manque de discipline perçu chez les jeunes femmes, leur manque d'intĂ©rĂȘt pour la tradition et l'abandon par la communautĂ© de Fais de la coutume d'avoir des femmes dans les grandes maisons menstruelles pendant leurs pĂ©riodes et aprĂšs l'accouchement[RL 6]. Un projet de relance et de sauvegarde de cet artisanat a Ă©tĂ© initiĂ© en 2001 Ă  l'instigation notamment de S. Limol, originaire de Fais, dirigeant d'entreprise et avec l'appui financier du Workforce lnvestment Act (WIA) Ă  Yap financĂ© par les États-Unis. Il a pu ĂȘtre menĂ© Ă  bien aprĂšs accord des femmes de Fais, des chefs traditionnels du Conseil de Tamol et malgrĂ© la rĂ©sistance de certains hommes pour des raisons de traditionalisme idiosyncratique, d'opposition Ă  la mĂ©thode d'enseignement hors du cadre familial, Ă  la transmission de ce savoir-faire jugĂ© comme appartenant Ă  Fais Ă  des femmes d'autres communautĂ©s et Ă  la monĂ©tarisation de ce patrimoine trĂšs chargĂ© symboliquement. Le chef suprĂȘme de Fais a fourni en 2003 un terrain bordant l'Ă©cole Ă©lĂ©mentaire de l'Ăźle pour la construction d'un bĂątiment traditionnel en chaume, Ă©rigĂ© par les habitants de l'Ăźle, pour loger l'Ă©cole de machi. Les premiĂšres Ă©tudiantes ont Ă©tĂ© diplĂŽmĂ©es en 2004[RL 10].

Transports

Tronc d'arbre marron à l'écorce tourmentée.
Tronc d’Heliotropium foertherianum (anciennement Tournefortia argentea).

Les pĂȘcheurs utilisent des canoĂ«s en bois Ă  stabilisateur appelĂ©s proa[Z 66]. Ceux-ci sont fabriquĂ©s avec du Barringtonia asiatica — localement gol[CF 2] — ou de l'Heliotropium foertherianum[FE 9] — localement chel[CF 5].

Une piste d’atterrissage construite au dĂ©but des annĂ©es 1990 permet l'accueil de petits avions[MC 14]. L'un d'eux, exploitĂ© par une mission protestante locale, la Pacific Missionary Air Service, rĂ©alise la liaison entre Ulithi, Fais et les Îles Yap, deux fois par semaine avec deux Beechcraft Queen Air. Ces vols ont pour principale fonction d'assurer le transport vers l'hĂŽpital de Yap de personnes ayant besoin de soins mĂ©dicaux urgents mais les passagers, jusqu'Ă  huit, et le fret sont possibles. Les tarifs sont cependant trop Ă©levĂ©s pour la plupart des familles[K 3] - [RL 4] - [Z 66]. À partir du et toutes les deux semaines, un avion de la Caroline Islands Air assure le trajet Îles Yap-Ulithi-Fais-Îles Yap[Z 68]. Un navire gouvernemental effectue Ă©galement des voyages mensuels irrĂ©guliers permettant l'approvisionnement et quelques exportations[RL 4] - [Z 66].

Culture

Famille et statut social

Homme ĂągĂ© vĂȘtu d'un pagne bleu, portant des clefs fixĂ©es Ă  un lacet autour de son cou.
Villageois.

L'Ăźle compte en 1909 un total de 34 familles, chiffre identique en 2007[MC 3] - [R 3]. Chacun des trois villages compte dix familles ou plus comprenant de 3 Ă  15 membres[MC 3]. Les familles, agnatiques et patrilocales[R 3], possĂšdent gĂ©nĂ©ralement de trois Ă  cinq bĂątiments[MC 3]. Cet ensemble de constructions est dĂ©signĂ© par le terme bogota Ă©galement employĂ© pour nommer la famille et les parcelles de terrain de premier niveau[R 3]. La famille rassemble plusieurs frĂšres ou agnats, leurs femmes — qui conservent leurs droits sur l'hĂ©ritage de leurs parents — et les enfants non mariĂ©s[R 3] - [RL 11], auxquels peut s'ajouter un parent veuf[Z 69]. Le statut de chaque personne dĂ©pend des biens patrilocaux. Avant la colonisation, les familles possĂ©daient des connaissances spĂ©cialisĂ©es dans un domaine comme les rituels magiques associĂ©s Ă  certaines techniques de pĂȘche ou d'agriculture, la construction de canoĂ«, la direction des danses, le tissage du machi. Les familles occupant un rang principal, c'est-Ă -dire la moitiĂ© d'entre elles, devaient chaque annĂ©e fournir une variĂ©tĂ© spĂ©ciale de machi, le mmul au chef unique de l'Ăźle. Celui-ci le dĂ©posait sur une Ă©tagĂšre aux esprits pendant quatre jours en offrande aux ancĂȘtres avant de le ranger soigneusement[RL 3].

Au sein de la famille, les adultes sont chargĂ©s de la prĂ©paration et de la distribution de la nourriture aux enfants. Le partage des aliments fonde la structure familiale et il est donc enseignĂ© aux enfants Ă  ne manger qu'avec des parents proches, car dans le cas contraire les consĂ©quences pourraient en ĂȘtre « dĂ©sastreuses ». Manquer le repas familial, c'est courir le risque d'ĂȘtre raillĂ© et de ne rien trouver Ă  manger[Z 70].

L'exogamie est peu pratiquée et ce depuis au moins la fin du XIXe siÚcle. Elle était plus courante à une époque ancienne lors de laquelle la circulation des bateaux était plus importante[KR 14].

Une Ă©tude menĂ©e en montre que la dĂ©population n'est pas un grand sujet d'inquiĂ©tude pour les habitants malgrĂ© leur faible nombre. Ils se sentent plus concernĂ©s par les changements climatiques et ses consĂ©quences sur la pĂȘche, l'agriculture et les infrastructures. L'augmentation des prix et l'Ă©volution de la structure sociale traditionnelle les inquiĂšte encore plus[K 4].

Lorsqu'un Ă©tranger arrive Ă  Fais, il est attendu de lui qu'il se vĂȘte selon la coutume locale pour s'intĂ©grer[LU 3].

L'adoption

Portrait en buste d'un enfant torse-nu.
Jeune garçon.

L'adoption d'enfants est une pratique traditionnelle trĂšs rĂ©pandue sur Fais. Elle s'effectue majoritairement entre membres de la mĂȘme communautĂ© pour des raisons sociales, politiques et Ă©conomiques. Les familles proposant des enfants Ă  l'adoption n'ont gĂ©nĂ©ralement pas les moyens de tous les nourrir convenablement. Les adoptants sont des couples sans enfants, n'ayant que des garçons ou que des filles et souhaitant varier les sexes puisqu'Ă  chaque sexe sont dĂ©volues des tĂąches dans les activitĂ©s de subsistance. Les chefs de village adoptent aussi volontiers car ils ont beaucoup de terrain agricole et ils cherchent des bras. Ces adoptions visent Ă©galement Ă  dĂ©tacher l'enfant d'une identification exclusive Ă  sa famille naturelle Ă  laquelle il peut toujours rendre visite du fait de la proximitĂ© des habitats. En 1977, D. Rubinstein constate que 92 % des enfants de l'Ăźle ont fait l'objet d'une adoption mais que seuls 20 % d'entre eux vivent effectivement dans la bogota de leurs parents adoptifs. Ce chiffre s'Ă©lĂšve lorsque le couple n'a pas d'enfants au moment de l'adoption. Ces adoptions traditionnelles n'ont le plus souvent pas d'existence lĂ©gale. AprĂšs son mariage, toutefois, l'Ă©poux accompagnĂ© de sa famille emmĂ©nage dans un tiers des cas seulement dans la maison de ses parents adoptifs[Z 71] - [Z 72].

Place du machi dans la société

Photo d'un homme assis en tailleur, avec un short vert, le torse nu, sous un abri.
Le chef Louis Mangtau en 2015.

Le machi Ă©tait un tissu trĂšs important dans les Ă©changes d'hommages avec les Ăźles Yap avant la colonisation allemande et valait l'Ă©quivalent d'une vie humaine. Si une personne en tuait une autre par accident, le don d'un machi Ă  la famille du dĂ©funt Ă©tait un geste d'excuse et de rĂ©conciliation suffisant[RL 12]. Avant l'introduction du christianisme, ce tissu Ă©tait un emblĂšme de l'entrĂ©e dans l'Ăąge adulte : Ă  la pubertĂ©, au cours d'une pĂ©riode d'isolement de quatre jours, les jeunes garçons Ă©taient dĂ©corĂ©s de fleurs comme pour les danses et revĂȘtaient un pagne en machi. Les quatre jours ayant passĂ©, le nouvel adulte prĂ©sentait le pagne Ă  un parrain rituel, gĂ©nĂ©ralement un parent ĂągĂ©[RL 13]. Jusque durant le XXe siĂšcle, lors de l'apparition de leur rĂšgle, les jeunes filles vivaient trois mois recluses dans la maison menstruelle et y tissaient leur premier machi[RL 6].

Ce tissu Ă©tait aussi une marque de prestige intimement associĂ© Ă  la pratique du pouvoir et le chef de l'Ăźle en recevait chaque annĂ©e un exemplaire de chacune des principales familles. Il appartenait Ă  une classe d'objets dĂ©signĂ©e sous le terme de tamol bwalungal (en français, « avantages du chef ») comprenant des objets tels que les bouteilles en verre, les bouĂ©es flottant autour de l'Ăźle, plusieurs espĂšces d'animaux marins considĂ©rĂ©s comme tabous comme les baleines, les dauphins et les tortues marines et qui devaient lui ĂȘtre systĂ©matiquement amenĂ©s[RL 3].

Avant la christianisation, le machi avait un rĂŽle important lors de la cĂ©rĂ©monie d'investiture d'un nouveau chef, qui se dĂ©roulait Ă  cĂŽtĂ© de la maison des hommes du village de celui-ci. Un chef subalterne tenait un machi au-dessus de la tĂȘte du futur chef, agenouillĂ© sur un sol sacrĂ©, rĂ©citait un chant appelant les grandes divinitĂ©s de l'Ăźle Ă  le protĂ©ger et l'exhortant Ă  gouverner avec une humilitĂ© appropriĂ©e, puis posait le tissu sur les Ă©paules du nouveau chef Ă  la maniĂšre d'un manteau. Ce tissu liait symboliquement le chef entrant avec ses prĂ©dĂ©cesseurs et les esprits ancestraux[RL 3].

Encore actuellement, ce tissu n'est jamais utilisĂ© dans le quotidien et comporte toujours une forte valeur symbolique. Il peut ĂȘtre donnĂ© Ă  un ami quittant l'Ăźle, comme un souvenir ou un Ă©lĂ©ment de richesse. Il est employĂ© lors des cĂ©rĂ©monies d'excuses lorsqu'une famille a fait du tort Ă  une autre ou offensĂ© un chef[RL 4]. Le machi est toujours l'expression tangible de l'amour d'une femme, d'une sƓur ou d'une fille Ă  la mort d'un homme. Il est le cadeau le plus apprĂ©ciĂ© dans ces circonstances et accompagne avec d'autres objets le corps lors des funĂ©railles[RL 13]. Le machi est aussi exposĂ© en tant qu'objet dĂ©coratif et peut ĂȘtre perçu comme un symbole national des États fĂ©dĂ©rĂ©s de MicronĂ©sie. Sa marchandisation a Ă©tĂ© interdite par le conseil de Tamol, conseil des chefs traditionnels des Ăźles extĂ©rieures de l'État de Yap, car il est toujours perçu comme un tamol bwalungal[RL 4].

  • Le chef de Fais et sa famille devant leur maison en 1945
  • Photo en noir et blanc figurant une famille assise devant sa maison en bois.
    De gauche à droite, son fils aßné, le chef, sa femme, son fils cadet.
  • Photo en noir et blanc figurant des hommes assis en tailleur dans une maison en bois.
    De gauche à droite, son fils aßné et le chef.

Costume

Au dĂ©but du XIXe siĂšcle, les hommes et femmes portent des pagnes en fibres de coco pendues Ă  un fil. Les femmes portent en bijou des bagues, pendentifs et bracelets gĂ©nĂ©ralement en coquillage[KR 15]. Au dĂ©but des annĂ©es 2000, pour une femme pubĂšre de Fais, une tenue appropriĂ©e consiste en le port d'une jupe tissĂ©e enveloppante sans vĂȘtement supĂ©rieur. Pour l'homme, elle correspond au port d'un pagne tissĂ©[RL 1]. Le machi ne se porte pas en tant que vĂȘtement[RL 14]. Des photographies prises en illustrent l'utilisation frĂ©quente de shorts et tee-shirts[Z 73].

Tatouage

Dessin en noir et blanc figurant des tatouages à figures géométriques sur la presque totalité du corps d'un homme.
Tatouages temporaires sur le corps d'un homme, 1910.

La pratique du tatouage temporaire a Ă©tĂ© observĂ©e par Augustin Kraemer au dĂ©but du XXe siĂšcle, lequel pense qu'elle est originaire de Mogmog dans l'atoll d'Utithi. Le tatouage est alors considĂ©rĂ© comme un bijou et peut ĂȘtre conservĂ© sur la peau entre un et trois mois selon la pratique. L'unique couleur utilisĂ©e, noire, est obtenue Ă  partir de noix de Takamaka rĂ©duites Ă  l'Ă©tat de suie, laquelle est mĂ©langĂ©e avec de l'argile en provenance des Ăźles Yap, le tout broyĂ© avec de l'eau[KR 16].

Habitat et bĂątiments communautaires

La plupart des maisons sont en bois et nombre d'entre elles ont Ă©tĂ© soufflĂ©es par le typhon Maysak fin [Z 3]. DĂ©but 2017 est achevĂ©, sur Ulithi et Fais, un programme, financĂ© par l'Agence des États-Unis pour le dĂ©veloppement international, de reconstruction de maisons en bois Ă  fondations de pilotis en bĂ©ton prĂ©vues pour rĂ©sister aux vents violents et aux ondes de tempĂȘte. Elles sont Ă©quipĂ©es de rĂ©servoirs d'une contenance 3 785 litres[Z 9].

Fais comporte des maisons des hommes et des maisons menstruelles bĂąties le long du rivage. Elles sont des lieux de rĂ©union pour les hommes ou les femmes, servent d'espace de rĂ©union ou de travail, d'espace d'apprentissage pour cultiver des compĂ©tences professionnelles traditionnelles, de lieu pour accueillir les rites relatifs Ă  la pubertĂ©. Les seules femmes autorisĂ©es Ă  entrer dans les maisons des hommes sont des servantes ou des concubines[Z 74] - [RL 6]. Les vagues provoquĂ©es par le passage d'un violent typhon en 1987 ont dĂ©truit les maisons menstruelles, situĂ©es prĂšs de la plage. Plusieurs facteurs ont provoquĂ© le report puis l'abandon de la reconstruction. Le premier est le manque de main d'Ɠuvre du fait de l'Ă©loignement de nombre de jeunes hommes poursuivant des Ă©tudes ou Ă©tant employĂ©s hors de Fais. Le second est que les insulaires se reposent alors de plus en plus sur les programmes fĂ©dĂ©raux amĂ©ricains d'aide en cas de catastrophe pour la reconstruction, mais ces programmes n'ont gĂ©nĂ©ralement pas concernĂ© les structures communautaires. Enfin, l'Ă©ducation occidentale, l'influence des missions catholiques et l'Ă©conomie salariale ont minĂ© les raisons culturelles qui conduisaient Ă  ce que les femmes s'isolent pendant leurs menstruations et Ă  attĂ©nuer l'autoritĂ© suprafamiliale et les Ă©changes sociaux de nourriture et de travail vitaux au fonctionnement de la maison menstruelle mais aussi de la maison des hommes[RL 15].

  • Dessin figurant cinq types de construction en bois.
    Différents types de construction (Habitats en haut, entrepÎt au centre, abris en bas), 1910.
  • Dessin figurant de l'intĂ©rieur le rĂ©seau de poutres et la couverture d'une maison ainsi que le foyer amĂ©nagĂ©.
    Intérieur d'une maison, 1910.
  • Dessin figurant de l'intĂ©rieur le rĂ©seau de poutres et la couverture d'une maison ainsi que le foyer amĂ©nagĂ©.
    Intérieur d'une maison, 1910.

Danses et fĂȘtes

Fleur aux pétales dentelés d'un rose vif et à bords jaunes.
Fleurs de Caesalpinia pulcherrima.

Les habitants de Fais entretiennent de fortes relations avec ceux de l'atoll d'Ulithi. Ils sont invitĂ©s Ă  participer chaque annĂ©e au Cultural day organisĂ© sur l'atoll[Z 64]. La danse Langelpiy rĂ©alisĂ©e par les hommes d'Ulithi est aussi connue Ă  Fais[Z 64]. Des contes enregistrĂ©s Ă  Ulithi en 1960 mettent en Ă©vidence l'importance des danses dans la culture des insulaires de Fais : dans l'un d'eux, des femmes accueillent des ulithiens par des danses, dans un autre, un mari de Fais quitte sa maison et sa famille, ce dont profite un mauvais esprit, pour aller danser jusqu'au petit matin dans la maison des hommes[L 7]. Des danses rĂ©alisĂ©es par des femmes puis d'autres par des hommes ont Ă©tĂ© donnĂ©es en l'honneur d'un des membres de l'Ă©quipage du Boeing B-29 Superfortress amĂ©ricain qui avait amerri prĂšs de l'Ăźle en 1945. Celui-ci, revenu sur l'Ăźle en 2002, est nommĂ© par le chef suprĂȘme Carlos Haruei, citoyen honoraire, consul et chef de l'Ăźle[16].

Les guirlandes de fleurs et les « maremar » sont confectionnĂ©s avec des fleurs de Caesalpinia pulcherrima, d'un cultivar de Curcuma, de Guettarda speciosa, de l’Hymenocallis littoralis, du Mirabilis jalapa, du papayer et du Plumeria rubra[FE 10].

Soins palliatifs

Les habitants de Fais sont connus avec ceux de l'atoll d'Ulithi pour offrir un des meilleurs systĂšmes de soins palliatifs traditionnels au monde, les soins hachou qui s'effectuent Ă  domicile. Ils impliquent la famille immĂ©diate, des parents plus Ă©loignĂ©s, et dans de nombreux cas, l'ensemble de la communautĂ©. La famille proche est dĂ©chargĂ©e des tĂąches mĂ©nagĂšres pour permettre son implication auprĂšs du mourant. Les changements d'attribution s'effectuent durant la nuit. Ce processus est nommĂ© yach metmat lobong. Les personnes prĂ©sentes se doivent d'ĂȘtre calmes, soumises et gaies. L'ensemble des parents et la communautĂ© viennent visiter le mourant et lui apporter des aliments spĂ©ciaux et des guirlandes de fleurs. Tant qu'il est en Ă©tat de participer Ă  la discussion, des efforts sont faits pour rĂ©soudre les disputes familiales et les questions de succession. Les familles chrĂ©tiennes font des priĂšres au chevet du lit et chantent des hymnes. Les familles gardent toujours l'espoir d'une guĂ©rison et continuent d'administrer des mĂ©dicaments traditionnels. ConsĂ©quence de considĂ©rations Ă©thiques et morales complexes, la douleur est parfois souhaitĂ©e par le mourant. Un questionnaire mĂ©dical et des pratiques divinatoires peuvent ĂȘtre utilisĂ©es pour dĂ©terminer si un malade peut guĂ©rir[Z 75].

Soins aux défunts

Dessin en noir et blanc figurant dans une maison des femmes entourant un défunt allongé.
Femmes veillant un défunt, 1910.

AprĂšs la mort, le corps n'est jamais autopsiĂ©. Le dĂ©funt est accompagnĂ© d'une multitude de cadeaux en tissu achetĂ©s par les membres de sa famille : des tapis tressĂ©s, des tissus fabriquĂ©s sur des mĂ©tiers Ă  tisser, des couvertures ou draps achetĂ©s en magasin. Ils accompagnent le corps comme objets funĂ©raires ou pour envelopper le corps, ou sont remis Ă  la famille. Le machi, marque de l'amour portĂ©e par une femme, une sƓur ou une fille, est le plus apprĂ©ciĂ© des tissus funĂ©raires et peut ĂȘtre rĂ©alisĂ© par anticipation pour des parents ĂągĂ©s afin d'ĂȘtre disponible Ă  temps[KR 17] - [Z 75] - [RL 3]. Au dĂ©but du XXe siĂšcle, le corps Ă©tait partiellement peint avec du curcuma[KR 17]. Lors de l'enterrement, la filiation gĂ©nĂ©alogique des personnes prĂ©sentes est Ă©numĂ©rĂ©e. La tombe peut ĂȘtre gardĂ©e pendant trois jours pour vĂ©rifier que l'esprit du mort est bien sur place et communiquer avec lui. Les biens du dĂ©funt qui n'ont pas Ă©tĂ© dĂ©truits ou rĂ©cupĂ©rĂ©s avant la mort sont brĂ»lĂ©s pour Ă©viter que l'esprit reste prĂšs de sa maison. La famille reste quatre jours sans sortir de la maison endeuillĂ©e. La culture de quelques champs de taro du dĂ©funt peut ĂȘtre suspendue durant six mois en signe de respect. Le nom du dĂ©funt n'est plus prononcĂ© jusqu'Ă  ce qu'il soit donnĂ© Ă  un nouveau-nĂ© de la famille en qui il est espĂ©rĂ© retrouver le caractĂšre de son homonyme[RL 13].

Notes et références

Note

  1. « The boxes include books, canned food and items like fishing nets that will help islanders maintain their largely subsistence lifestyle[Z 12]. »

Livres et articles

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Lien externe

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