Accueil🇫🇷Chercher

Mirabilis jalapa

La Belle-de-nuit (Mirabilis jalapa L.), aussi connue sous le nom de Merveille du Pérou, est une plante herbacée vivace, de la famille des Nyctaginacées, poussant aussi bien dans les jardins que dans les milieux incultes. Originaire d'Amérique subtropicale, elle fut introduite en Europe à la fin du XVIe siècle. Elle tient son nom de sa principale caractéristique, ses fleurs s'ouvrent pleinement la nuit et se referment au petit matin. La plante très facile de culture fournit de juillet à novembre une profusion ininterrompue de graines noires et on la trouve souvent se replantant d'elle-même à l'état sauvage. Ses couleurs qui sont le rose, le rouge, le jaune, le blanc et le mauve peuvent être mélangées au sein d'une même fleur.

Le 16 vendémiaire du calendrier républicain ou révolutionnaire français est officiellement dénommé jour de la belle de nuit, généralement chaque 7 octobre du calendrier grégorien.

Étymologie et histoire

Le nom de Mirabilis jalapa donné par Linné[1] en 1753 est formé du latin scientifique Mirabilis signifiant « admirable » par allusion aux remarquables couleurs de ses fleurs et du nom spécifique jalapa qui renverrait à son origine dans le Jalapa au Guatemala[2]. Mais l'épithète de jalapa pourrait aussi renvoyer à la ville de Xalapa (Jalapa) au Mexique[3] d'où provenait une ancienne drogue purgative, nommée jalap, tirée des tubercules du jalap tubéreux[4] (Ipomoea purga (Wender) Hayne) mais qu'on attribuait à tort à l'époque au Mirabilis jalapa.

Linné réfère à toutes les espèces de jalapa (« Jalapae species omnes Tournef. infl. 130. ») décrites par Tournefort qui en 1694, écrivait[5] « Le Jalap, ou la Belle de nuit est un genre de plante, dont la fleur est un tuyau évasé en entonnoir à pavillon crénelé... Le P. Plumier m'a assuré que le Jalap, dont on nous apporte la racine d'Amérique, était une véritable espèce de Belle de nuit. Nous en avons aussi reçu la semence, qui a produit dans le Jardin royal de Paris une plante assez semblable à la Belle de nuit commune ; mais cette semence est plus ridée, et les feuilles de la plante sont moins lisses ».

Synonymie

D'après Tela Botanica[6] :

  • Jalapa congesta Moench
  • Jalapa officinalis Crantz
  • Mirabilis dichotoma Gaterau
  • Mirabilis pubescens Zipp. ex Span.
  • Mirabilis xalapa Noronha
  • Nyctago versicolor Salisb.

Description

Fleurs de Mirabilis jalapa

La Belle-de-nuit est une plante herbacĂ©e vivace de 30 Ă  80 cm de haut, souvent cultivĂ©e en annuelle. En France mĂ©tropolitaine, elle disparaĂ®t en hiver mais sous les tropiques, elle est pĂ©renne et fleurit toute l'annĂ©e[7]. Elle possède de grosses racines tubĂ©risĂ©es noirâtres qui ont dans plusieurs rĂ©gions du monde des usages mĂ©dicinaux traditionnels.

Les tiges dichotomiques sont pleines, quadrangulaires, charnues, de couleur verte à rougeâtre, épaissie au niveau des nœuds[8]. La belle-de-nuit est d'un port buissonnant, très ramifié.

Les feuilles opposĂ©es sont ovales, Ă  base arrondie ou lĂ©gèrement cordĂ©e, Ă  sommet aigu, de 4 Ă  12 cm de long sur 3 Ă  cm de large[8]. Le pĂ©tiole mesure 1 Ă  cm de long[9].

fleur en bouton et fruit

L'inflorescence Ă  l'extrĂ©mitĂ© des rameaux est une cyme bipare contractĂ©e en une fleur, Ă  5 bractĂ©es donnant l'impression d'un involucre sĂ©paloĂŻde, de couleur vert pâle, long de 7 Ă  12 mm, comportant 5 lobes triangulaires soudĂ©s Ă  la base, refermĂ©s sur le tube de la corolle. La corolle colorĂ©e est formĂ©e d'un long tube Ă©troit de 2 Ă  cm, s'Ă©vasant largement Ă  l'extrĂ©mitĂ© en entonnoir de 4-cm de diamètre. Sa couleur peut ĂŞtre jaune, Ă©carlate, pourpre, rose, blanche ou bicolore. Elle enferme 6 Ă©tamines de taille inĂ©gale, Ă©mergeant largement du tube de la corolle et un carpelle possĂ©dant un ovule renversĂ© (anatrope). Les fleurs ne s'ouvrent qu'au crĂ©puscule ou par temps couvert et exhalent un parfum rappelant la fleur de tabac. Elles fanent le matin et sont remplacĂ©es par d'autres fleurs sur le mĂŞme pied, le soir mĂŞme. L'anthèse dure de 16 Ă  20 heures et reste donc visible une partie du jour[10].
Il a été montré qu'au Brésil (État de Paraná), le mode principal de fécondation était l'autopollinisation[11]. En Amérique centrale, deux papillons de nuit, le sphinx ello (Erinnyis ello) et le sphinx orangé (Hyles lineata) sont aussi des visiteurs assurant la pollinisation.

La floraison s'étale de juin[12] ou juillet à octobre en France métropolitaine et toute l'année aux Antilles[7].

Le fruit, de couleur noire, apparaît à la base de la fleur une fois que celle-ci est tombée. C'est un akène, sec, subglobuleux, noir, de 6 à mm de long qui reste entouré par le pseudocalice accrescent.

Cette fleur aux pigments fluorescents déploie ses pétales afin d'exposer des figures de fluorescence sur la corolle qui attirent les papillons de nuit afin d'assurer sa reproduction[13].

Écologie

Mirabilis jalapa est originaire des régions tropicales sèches d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud : Guatemala, Mexique, Chili, Pérou[2].

Elle est actuellement naturalisée dans de nombreux pays en Asie, Afrique, États-Unis, Moyen-Orient, Europe dont la France et tout autour du bassin méditerranéen[12].

Ă€ La RĂ©union[2], Mirabilis jalapa espèce initialement ornementale, s'est naturalisĂ©e sur la cĂ´te ouest, entre 400 et 700 m d'altitude et la cĂ´te sud entre 0 et 700 m. C'est une rudĂ©rale des zones de dĂ©combres et une adventice, relativement commune des champs de canne Ă  sucre sur les cĂ´tes ouest et sud. Sa forte production de graines et sa croissance rapide lui permettent de recouvrir jusqu'Ă  30 Ă  50 % dans les parcelles cannières.

Confusions

Ne pas confondre avec Epiphyllum oxypetalum dont un des noms vernaculaires est similaire.

Utilisations

Bien avant la conquête espagnole du Mexique, Mirabilis jalapa était cultivée par les Aztèques pour ses fleurs chatoyantes et parfumées et pour ses propriétés médicinales[11].

Culture ornementale

Fleurs aux couleurs variées, sur le même pied, en fin d'après-midi.

La Belle-de-nuit est une plante facile à cultiver à condition de lui donner une exposition ensoleillée ou à la mi-ombre. Dans ces conditions, elle croît très rapidement.

Elle pousse de préférence dans les sols légers, riches en humus et bien drainant, elle est neutre côté acidité (pH).

La culture en pot est toujours possible avec un mélange 80 % terreau 20 % terre de jardin et un container bien profond.

On sème gĂ©nĂ©ralement de mi-fĂ©vrier Ă  mai. Les graines germent vite Ă  une tempĂ©rature de 18 °C. On peut tout simplement planter les tubercules au printemps Ă  une profondeur de 10 cm.

La Belle-de-nuit fleurit 90 jours après le semis. C'est une plante sensible aux excès d'arrosage. Dans les régions froides, elle doit être conservée hors-sol comme les cannas ou les dahlias.

La Belle-de-nuit est, avec la Rose trémière, très cultivée le long des murs sur le littoral des Charentes (Ile de Ré, Talmont…). Elle fleurit à profusion tout l'été.

Composés actifs

Un certain nombre de composés actifs ont été extraits des tissus de M. jalapa, comme

Usage médicinal traditionnel

La partie la plus utilisée est sa grosse racine pivotante, en forme de navet. En Guadeloupe, on en constitue des emplâtres pour soigner les entorses et au Congo, on y a recours, de la même façon, en cas d’œdèmes quels qu'ils soient[18]. Cette racine dégageant une légère odeur nauséabonde, doit à un alcaloïde, la trigonelline, ses propriétés vermifuges, en sus de son pouvoir vomitif.

Au Brésil, les indiens Kayapos reniflent la poudre des fleurs séchées pour soigner les maux de tête et utilisent des décoctions de la racine pour laver les plaies et traiter les affections dermatologiques comme la lèpre[19]. Au Pérou, le jus extrait des fleurs est utilisé pour les lésions herpétiques et le mal d'oreilles. Le jus extrait de la racine sert au traitement du mal d'oreilles, de la diarrhée, de la dysenterie, de la syphilis et des infections hépatiques. Au Mexique, des décoctions de la plante entière servent pour la dysenterie, les blessures infectées et les piqûres d'abeilles et de scorpions.

En France, elle était bien connue des médecins et apothicaires du XVIIe siècle qui recommandaient la racine de jalap aux « hydropiques et goûteux » car « elle purge fort bien les eaux » (Lémery, Cours de chymie[20], éditions de 1675 à 1757) .

« Le 14 janvier 1709, on disait que le prince de Conti était beaucoup plus mal, et que les médecins l'avaient mis dans l'usage du jalap. »

— Comte de Cosnac & Edouard Pontal, Mémoires du marquis de Sourches sur le règne de Louis XIV[21].

Organisme modèle

Mirabilis jalapa (Belle-de-nuit) Ă  Saint-Aignan-sur-Cher.

Mirabilis jalapa est un organisme modèle pour l'étude de l'héritage cytoplasmique, de l'expansion rapide des pétales suivis de leur sénescence, ou de la production des odeurs[10].

Peu de temps après la découverte des lois de Mendel en 1900, Correns observa en 1909 chez Mirabilis jalapa une hérédité non-Mendélienne. Lors de croisements entre plantes ayant des feuilles de couleur jaune ou verte, le caractère « couleur des feuilles » est hérité seulement du parent maternel[22]. Le parent qui donne le pollen n'a pas d'influence sur la couleur des feuilles de sa descendance. Les chloroplastes qui portent les traits associés à la couleur des feuilles sont hérités du parent qui fournit l'ovule.

Les couleurs variĂ©es de la Belle-de-nuit sont dues Ă  des pigments colorĂ©s de la famille des bĂ©talaĂŻnes (bĂ©tacyanines et bĂ©taxanthines), caractĂ©ristiques de l'ordre des Caryophyllales. On les trouve aussi dans les fleurs de Bougainvillea, Celosia ou de Portulaca ou dans la betterave. Cinq bĂ©taxanthines ont Ă©tĂ© dĂ©tectĂ©es dans la belle-de-nuit et leur fluorescence bien caractĂ©risĂ©e[23]. Ainsi une bĂ©taxanthine dĂ©rivĂ©e de la tyramine (ou miraxanthine III) Ă©met spontanĂ©ment de la lumière Ă  la longueur d'onde maximum de 506 nm Ă  la suite d'une excitation situĂ©e Ă  464 nm. Il a Ă©tĂ© aussi montrĂ© que la fluorescence Ă©mise par une bĂ©taxanthine jaune Ă©tait absorbĂ©e par une bĂ©tacyanine violette et ainsi crĂ©Ă© une figure de fluorescence contrastĂ©e sur la corolle.

L'odeur des fleurs de Mirabilis jalapa est fortement dominée par le (E)-β-ocimène, avec aussi des quantités détectables de β-myrcène, (Z)-3-hexenyl acétate, (Z)-ocimène, (E)-epoxy-ocimène, et de benzoate de benzyle[10]. Les lobes de la corolle sont le site principal d'émission du (E)-β-ocimène. Sa libération passe par un pic entre 17 h et 20 h, en début d'anthèse, au moment où sont actifs les sphinx pollinisateurs. Les stomates et les trichomes ne sont pas directement impliqués dans l'émission. Et comme aucune indication ne permet de penser que les osmophores seraient concernés, on suppose que la libération se fait par diffusion.

Voir aussi

La belle de nuit vit son nom attribué au 16e jour du mois de vendémiaire du calendrier républicain ou révolutionnaire français[24], généralement chaque 7 octobre du calendrier grégorien.

Notes

    Références

    1. botanicus
    2. naturejardin
    3. flora of australia
    4. Bruneton, J., Pharmacognosie - Phytochimie, plantes médicinales, 4e éd., revue et augmentée, Paris, Tec & Doc - Éditions médicales internationales, , 1288 p. (ISBN 978-2-7430-1188-8)
    5. Éléments de botanique, cf. Bot
    6. Basionyme : Mirabilis jalapa-Synonymes
    7. Jacques Fournet, Flore illustrée des phanérogames de Guadeloupe et de Martinique, Gondwana éditions, Cirad,
      Tome 1 (ISBN 2-87614-489-1) ; Tome 2 (ISBN 2-87614-492-1).
    8. CIRAD
    9. (en) Référence EFloras : Mirabilis jalapa
    10. Uta Effmert, « Volatile composition, emission pattern, and localization of floral scent emission in Mirabilis jalapa (Nyctaginaceae) », American journal of botany, vol. 92, no 1,‎ , p. 2-12 (ISSN 0002-9122, DOI 10.3732/ajb.92.1.2)
    11. Ausileide Alves Leal, Yoko Terada+ and Maria de Fátima Pires da Silva Machado, « Floral biology of a population of Mirabilis jalapa L. (Nyctaginaceae) from Southern Brazil », Maringa, vol. 23, no 2,‎ (lire en ligne)
    12. David Burnie, Fleurs de Méditerranée : 500 espèces, Éditions Larousse, , 320 p. (ISBN 2-03-560422-2), p. 45
    13. Fernando Gandía-Herrero, « Botany: Floral fluorescence effect », Nature, vol. 437, no 7057,‎ , p. 334-334 (ISSN 0028-0836, DOI 10.1038/437334a, lire en ligne, consulté le )
    14. Wang Yi-Fen, « New Rotenoids from Roots of Mirabilis jalapa », Helvetica Chimica Acta, vol. 85, no 8,‎ , p. 2342–2348 (ISSN 1522-2675, DOI 10.1002/1522-2675(200208)85:8<2342::AID-HLCA2342>3.0.CO;2-S, <2342::AID-HLCA2342>3.0.CO;2-S/abstract lire en ligne, consulté le )
    15. Shu-Wei Yang, « Three New Phenolic Compounds from a Manipulated Plant Cell Culture, Mirabilis jalapa », Journal of Natural Products, vol. 64, no 3,‎ , p. 313-317 (ISSN 0163-3864, DOI 10.1021/np0004092, lire en ligne, consulté le )
    16. (en) M F De Bolle, « Antimicrobial peptides from Mirabilis jalapa and Amaranthus caudatus: expression, processing, localization and biological activity in transgenic tobacco », Plant molecular biology, vol. 31, no 5,‎ , p. 993-1008 (ISSN 0167-4412)
    17. Jorge M. Vivanco, « Antiviral and Antiviroid Activity of MAP-Containing Extracts from Mirabilis jalapa Roots », Plant Disease, vol. 83, no 12,‎ , p. 1116-1121 (ISSN 0191-2917, DOI 10.1094/PDIS.1999.83.12.1116, lire en ligne, consulté le )
    18. Bernard Boullard, Plantes médicinales du monde : croyances et réalités, De Boeck Secundair, (ISBN 9782843711176)
    19. (en) Oladunmoye M. K., « Antioxidant, free radical scavenging capacity and antimicrobial activities of Mirabilis jalapa », Journal of Medicinal Plants Research, vol. 6, no 15,‎ (ISSN 1996-0875, DOI 10.5897/JMPR09.281, lire en ligne, consulté le )
    20. Nicolas Lemery, Cours de chymie contenant la manière de faire les opérations qui sont en usage dans la médecine, L.-C. d’Houry, , 827 p. (lire en ligne)
    21. « Mémoires du marquis de Sourches sur le règne de Louis XIV - janvier 1708-juin 1709 », tome onzième 1891, p. 250.
    22. Nicolas Gobron, Caractérisation génétique et moléculaire d'une incompatibilité nucleo-cytoplasmique chez Arabidopsis thaliana, Université Paris-Sud, Orsay, (lire en ligne)
    23. F. Gandía-Herrero, « Fluorescent pigments: New perspectives in betalain research and applications », Food Research International, vol. 38, nos 8–9,‎ , p. 879-884 (ISSN 0963-9969, DOI 10.1016/j.foodres.2005.01.012, lire en ligne, consulté le )
    24. Ph. Fr. Na. Fabre d'Églantine, Rapport fait à la Convention nationale dans la séance du 3 du second mois de la seconde année de la République Française, p. 19.

    Liens externes

    Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.