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Lois de Mendel

Les lois de Mendel sont trois lois concernant les principes de l'hérédité biologique, énoncées par le moine et botaniste de nationalité austro-hongroise Gregor Mendel (1822-1884).

La redécouverte des lois de Mendel en 1900[1], puis leur combinaison avec la découverte des chromosomes, considérés comme le support physique de l'hérédité, est à l'origine de la fondation de la génétique formelle au début du XXe siècle[2]. À la suite de la démonstration du rôle du hasard et de l'environnement dans les phénomènes biologiques, ces lois sont aujourd'hui remises en cause par le biologiste français Jean-Jacques Kupiec[3].

Histoire

Vers 1850, au monastère de Brno, comme à Londres, à Paris ou à Vienne, on en était réduit aux hypothèses les plus vagues au sujet de l'hérédité. De multiples expériences consistant à croiser des plantes et des animaux divers avaient permis d'obtenir des résultats heureux. Mais comment ? Selon quels mécanismes précis ? Personne ne pouvait répondre à cette question. Personne n'aurait pu reprendre telle ou telle expérience avec l'assurance d'obtenir les mêmes résultats.

Vers 1850, la théorie la plus accréditée était celle du mélange des « sangs » dans des proportions que le cousin de Darwin, Francis Galton venait de préciser : 1/2 pour le sang du mâle ou de la femelle à la première génération, 1/4 à la seconde, etc. Au moment où Mendel commença ses expériences, la génétique était donc beaucoup moins avancée que la physique ne l'était avant Newton.

Les trois lois dites de Mendel

Mendel tire de ses observations deux principes fondamentaux, auxquels on ajoutera plus tard un troisième en découlant. Ce sont, dans son cas, des expériences menées sur les pois qui permirent à Mendel de formuler les principes intervenant dans l'hérédité.

Mendel découvre que :

  • un caractère peut prĂ©senter deux formes diffĂ©rentes (aujourd'hui appelĂ©es allèles) ;
  • un organisme hĂ©rite de deux facteurs pour chaque caractère (les facteurs hĂ©rĂ©ditaires de Mendel sont aujourd'hui appelĂ©s « allèles ») ;
  • le facteur dominant masque le facteur rĂ©cessif. Mendel a notĂ© le facteur dominant Ă  l’aide d’une majuscule et l’autre, le rĂ©cessif, Ă  l’aide de la mĂŞme lettre mais en minuscule
  • les deux facteurs se sĂ©parent durant la formation des gamètes (Loi de sĂ©grĂ©gation qui correspond Ă  la sĂ©paration des paires de chromosomes homologues durant la mĂ©iose) ;
  • les paires de facteurs se sĂ©parent de façon indĂ©pendante les unes des autres (Loi de sĂ©grĂ©gation indĂ©pendante qui correspond Ă  l’assortiment indĂ©pendant des paires de chromosomes homologues Ă  la mĂ©taphase 1 de la première division mĂ©iotique).

Loi d'uniformité des hybrides de première génération

Si l'on croise deux individus d'une même espèce homozygotes relativement à un caractère, tous les descendants de la première génération, qui sont appelés hybrides F1, sont identiques relativement à ce caractère, c'est-à-dire tous hétérozygotes. (Dans le schéma ci-contre, il conviendrait plutôt, pour être cohérent avec le schéma de la troisième loi, et puisque le caractère « couleur de la fleur » ne présente que deux allèles, de les noter R pour rouge, et r pour non-rouge, c'est-à-dire blanche, puisque la couleur rouge est dominante, et de noter les deux individus homozygotes RR et rr. Les deux gènes de tous les hybrides F1 présentent l'un l'allèle R l'autre le r, et sont alors notés Rr.)

La première génération (hybride F1) est alors uniforme tant pour le phénotype que le génotype et tous les descendants de la première génération sont hétérozygotes.

Exemple : Tous les individus dits de génération F1 issus du croisement entre un plant à graines rondes et un plant à graines ridées (tous deux homozygotes pour ce caractère) sont identiques, ils ne présentent que la version ronde de la forme. Le phénotype rond est dominant et le phénotype ridé est récessif.

Loi de disjonction des allèles

Lorsqu’on croise entre eux, deux des individus de générations F1, on obtient une génération F2 dans laquelle on trouve les deux versions de la couleur des fleurs dans des proportions bien définies : trois descendants à fleurs rouges (1 RR homozygote + 2 Rr hétérozygotes) et un descendant à fleurs blanches (rr homozygote).

Cette loi est dite « de ségrégation des caractères dans la génération F2 ».

Loi d'indépendance de la transmission des caractères

Cette règle ne s'applique que si les gènes responsables des caractéristiques se situent sur différents chromosomes ou s'ils sont éloignés sur le même chromosome. C'est le partage d'allèles dans des gamètes différents. En faisant abstraction du second caractère, on retrouve pour le premier caractère la distribution de la troisième génération dans le schéma ci-dessous.

  • Première et deuxième lois :1 - Croisement de pois Ă  fleurs rouges avec des pois Ă  fleurs blanches (tous deux homozygotes pour ce trait, WW et RR).2 - GĂ©nĂ©ration F1 : tous les individus sont rouges car l'allèle rouge est dominant et le blanc est rĂ©cessif). Alors que les parents Ă©taient tous deux homozygotes (respectivement WW et RR), toute la F1 est hĂ©tĂ©rozygote (RW).3 - GĂ©nĂ©ration F2 : les formes rouges et blanches montrent un rapport de 3:1.
    Première et deuxième lois :
    1 - Croisement de pois Ă  fleurs rouges avec des pois Ă  fleurs blanches (tous deux homozygotes pour ce trait, WW et RR).
    2 - Génération F1 : tous les individus sont rouges car l'allèle rouge est dominant et le blanc est récessif). Alors que les parents étaient tous deux homozygotes (respectivement WW et RR), toute la F1 est hétérozygote (RW).
    3 - Génération F2 : les formes rouges et blanches montrent un rapport de 3:1.
  • Troisième loi :L'Ă©chiquier de Punnett des deux caractĂ©ristiques (poils blancs/bruns, queue courte/longue, oĂą "brun" et "court" devraient ĂŞtre dominants) donne en gĂ©nĂ©ration F2 des phĂ©notypes variĂ©s dans le rapport de 9:3:3:1. (S = court (short), s = long, B = brun, b = blanc).
    Troisième loi :
    L'échiquier de Punnett des deux caractéristiques (poils blancs/bruns, queue courte/longue, où "brun" et "court" devraient être dominants) donne en génération F2 des phénotypes variés dans le rapport de 9:3:3:1. (S = court (short), s = long, B = brun, b = blanc).

Les connaissances antérieures

Les travaux, avant Mendel, pour tenter de comprendre les mécanismes de l’hérédité furent un échec. La raison en est que les hybrideurs travaillaient comme ils avaient toujours travaillé c’est-à-dire par essais et erreurs. Ils croisaient des individus présentant des caractères différents et choisissaient dans la descendance ceux qui correspondaient le mieux aux desiderata. Or ces procédures, très efficaces par ailleurs en sélection depuis l’origine préhistorique de l’élevage et de l’agriculture, ne permettaient pas une prédictivité des résultats et donc l’énoncé de lois.

L'ensemble de la communauté scientifique de l'époque soutenait le modèle de l'hérédité par mélange où les caractères possédés par un individu étaient intermédiaires entre ceux de ces deux parents (le croisement d'un parent blanc et d'un parent noir donnant par exemple un individu gris ou blanc et noir). Mendel considère lui que les parents transmettent des unités héréditaires distinctes qui restent distinctes chez les descendants (comme des billes que l'on retire de deux seaux et que l'on place dans un troisième seau).

Les méthodes

Les caractères étudiés par Mendel

Mendel va choisir les géniteurs de façon différente. Tout d’abord il adopte comme modèle expérimental les petits pois (Pisum sativum), plantes à fleurs dont la reproduction naturelle se fait par autofécondation, permettant de contrôler l’hybridation et de produire rapidement un grand nombre de descendants.

  • Il choisit d’étudier l’hĂ©rĂ©ditĂ© de pois comestibles prĂ©sentant sept caractères dont chacun peut se retrouver sous deux formes alternatives, aisĂ©ment identifiables :
    • forme et couleur de la graine, couleur de l’enveloppe, forme et couleur de la gousse, position des fleurs et longueur de la tige ;
    • la première expĂ©rience qu’il dĂ©crira dans son article consiste Ă  Ă©tudier les rĂ©sultats d’hybridation obtenus pour l’une des paires de caractères seulement. On parle de croisements monohybrides (deux souches pures diffĂ©rentes d'un caractère). Par exemple, la « forme du pois » (caractère phĂ©notypique rĂ©gie par un seul gène) qui existe selon deux variantes : graine lisse ou graine ridĂ©e (expression phĂ©notypique de chacun des deux allèles du gène que Mendel nomme facteur).
  • Les pois se reproduisant naturellement par autofĂ©condation, il arrive donc Ă  sĂ©lectionner des lignĂ©es pures dont tous les individus possèdent toujours la mĂŞme forme alternative, soit une lignĂ©e parentale Ă  graines lisses (que l'on appellera P1, pour la suite du raisonnement) et l'autre Ă  graines ridĂ©es (que l'on appellera P2). Il s'agit donc d'individus homozygotes pour le gène considĂ©rĂ©, ils ne possèdent qu'un seul type d'allèle.
  • Le croisement se fait en dĂ©posant du pollen d'une fleur de la lignĂ©e P1 sur le pistil d'une fleur de la lignĂ©e P2 (Ă  laquelle il avait enlevĂ© les Ă©tamines pour Ă©viter tout risque d'autofĂ©condation). Il prend le soin de rĂ©aliser des fĂ©condations rĂ©ciproques (pollen de P2 sur pistil de P1) pour voir si les rĂ©sultats sont identiques.
  • Les individus obtenus par croisement de P1 et de P2 sont donc des hybrides (que l'on note habituellement F1). Une deuxième gĂ©nĂ©ration appelĂ©e F2 est produite par reproduction naturelle (autofĂ©condation) des F1.
  • Il Ă©tudie successivement des lignĂ©es pures diffĂ©rant par un seul caractère (monohybridisme) puis deux (dihybridisme) et enfin trois (trihybridisme).

Les résultats

Schéma d'hybridation
  • Pour la totalitĂ© des caractères Ă©tudiĂ©s, 80 % des hybrides obtenus sont identiques. Par exemple, le croisement d'un pois Ă  graines lisses (P1) et d'un pois Ă  graines ridĂ©es (P2) donne toujours une gĂ©nĂ©ration F1 oĂą tous les individus sont des pois Ă  graines lisses. Le facteur « graines ridĂ©es » est donc rĂ©cessif par rapport au facteur « graines lisses » (qui est qualifiĂ© de dominant). C'est la première loi de Mendel dite d'uniformitĂ© des hybrides de première gĂ©nĂ©ration.
  • En F2 (gĂ©nĂ©ration obtenue par autofĂ©condation de F1), on peut dĂ©montrer par des expĂ©riences de croisement-test, l'existence de trois gĂ©notypes diffĂ©rents :
    • 50 % d'hĂ©tĂ©rozygotes (un allèle dominant associĂ© Ă  un allèle rĂ©cessif) identiques aux parents (F1 = hybride) ;
    • 25 % d'homozygotes dominants, de phĂ©notype identique Ă  celui des F1 ;
    • 25 % d'homozygotes rĂ©cessifs de phĂ©notype diffĂ©rent de celui des F1.

C'est la deuxième loi de Mendel ou loi de disjonction des allèles qui est le résultat de la méiose.

  • En dihybridisme, la distribution composite des 2 caractères (quatre phĂ©notypes) est la combinaison de deux distributions monohybridiques indĂ©pendantes 3/4 [A] et 1/4 [a]

soit 9/16 [AB] 3/16 [Ab] 3/16 [aB] 1/16 [ab].

C’est la troisième loi de Mendel dite d'indépendance des caractères qui n'est pas applicable aux gènes liés.

Les résultats de trihybridismes (8 phénotypes) se prédisent aisément : 27 [ABC] 9 [ABc] 9 [AbC] 3 [Abc] 9 [aBC] 3 [aBc] 3 [abC] 1 [abc].

En conclusion, Mendel propose que les caractéristiques héréditaires des vivants sont gouvernées chacune par une double commande (une paire d'allèles) et que seule une sur deux est transmise au descendant par chaque parent. C’est le fondement de la génétique qui va démarrer au début du XXe siècle. Du même coup, avec les premiers pas d’une biologie quantitative se développeront les statistiques. Il publie ses travaux en 1866 dans Versuche über Pflanzen-Hybriden.

Dominance incomplète

Les caractères ne sont pas tous exclusivement dominants ou récessifs. Dans certains cas, aucun des allèles qui déterminent un caractère n'est dominant. Lorsque c'est le cas, un mélange des deux caractères peut se produire: on parle de dominance incomplète. Le mélange apparent des caractères en une expression intermédiaire peut survenir chez les individus hétérozygotes. On trouve des exemples de dominance incomplète chez de nombreuses espèces de plantes, dont le muflier ou le maïs. Heureusement pour Mendel, les caractères qu'il a étudiés chez les plants de pois n’étaient pas sujets à la dominance incomplète. Si cela avait été le cas, il n'aurait probablement jamais été en mesure d'établir les fondements de la génétique[4].

Notes et références

  1. « Mendel, du jardin potager aux lois de l’hérédité », sur www.la-croix.com, (consulté le )
  2. (fr) « les trois lois de Mendel », sur florimont.info (consulté le )
  3. Jean-Jacques Kupiec, « Il faut renoncer aux lois de Mendel », Pour la science,‎ n°509, mars 2020, p. 56-61 (lire en ligne Inscription nécessaire)
  4. Au-delĂ  des lois de Mendel.

Voir aussi

Bibliographie

  • Neil A. Campbell et Jane B. Reece, Biologie, E.R.P.I., , 2e Ă©d., 1364 p. (ISBN 2-7613-1379-8), chap. 14, p. 264-277

Liens externes

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