Acide
Un acide est un composé chimique minéral ou organique accepteur, au sens large, de doublets électroniques. Il est généralement défini par des réactions-types dans différents solvants, en particulier en libérant l'ion hydronium dans l'eau[1].
Les acides rĂ©agissent souvent en dĂ©gageant de l'Ă©nergie avec d'autres composĂ©s chimiques appelĂ©s bases (les alcalis des Anciens), qui, elles, donnent des doublets Ă©lectroniques et ont le pouvoir de gĂ©nĂ©rer, en tout ou partie, l'ion hydroxyle dans l'eau. Les acides forts, dans un milieu solvant donnĂ©, initient des rĂ©actions complĂštes et rapides, transformant le solvant en sa forme la plus acide ; les acides faibles contribuent Ă des rĂ©actions Ă©quilibrĂ©es[2]. L'existence de plusieurs fonctionnalitĂ©s acides au sein d'un mĂȘme composĂ© chimique caractĂ©rise les polyacides.
Dans le cadre de la théorie de BrÞnsted-Lewis, le pH d'une solution obtenue en dissolvant un acide dans l'eau est inférieur à sept[3].
Les acides sont connus depuis l'Antiquité pour leur pouvoir de dissolution des métaux, ainsi que, de maniÚre plus floue avant Lavoisier, le pouvoir de neutraliser les solutions alcalines. Le chimiste britannique Boyle les identifiait au XVIIe siÚcle par leur capacité à rougir la teinture de tournesol, mais aussi par leur surprenant pouvoir de précipiter le soufre de ses solutions alcalines.
Histoire de la notion d'acide
La premiĂšre dĂ©finition d'acide est apparemment d'origine organoleptique, comme en tĂ©moigne le monde grĂ©co-romain avec l'adjectif latin ÄcÇdus, signifiant « aigre, piquant, et donc acide » et dĂ©jĂ au sens figurĂ©, « acide, dĂ©sagrĂ©able »[4].
Antiquité
L'AntiquitĂ© utilise la notion d'acide, en particulier chez les Romains qui utilisent le mot acetum pour parler du vin acide ou aceti vinum (analogue au vinaigre), d'oĂč le terme acĂ©tique. Les alchimistes indiens connaissaient aussi cette notion qui est prĂ©sente dĂšs le XIIe siĂšcle av. J.-C. dans un traitĂ© d'alchimie, le RasÄráčava[5], ou TraitĂ© des prĂ©parations mĂ©talliques[6]. Chez les Grecs, l'aciditĂ© est attribuĂ©e Ă des atomes pointus. Ce point de vue perdurera jusqu'au XVIIIe siĂšcle.
Moyen Ăge
Les alchimistes de l'Ă©poque mĂ©diĂ©vale ont aussi contribuĂ© Ă comprendre cette notion, en particulier, en produisant des acides. L'alchimiste perse (ou arabe selon les sources) Jabir Ibn Hayyan savait synthĂ©tiser l'acide sulfurique et l'utiliser pour prĂ©parer de l'acide chlorhydrique. De nombreux traitĂ©s d'alchimie expliquent comment distiller l'acide acĂ©tique Ă partir du vinaigre ou l'acide nitrique Ă partir du salpĂȘtre. Voir par exemple, le traitĂ© De secretis Naturae[7] attribuĂ© au philosophe et alchimiste catalan Raymond Lulle, ou en catalan Ramon Llull[8].
Ăpoque moderne
L'époque moderne qui, du point de vue de la chimie, s'achÚve avec Lavoisier, a aussi connu de nombreux progrÚs sur la notion d'acidité. Les synthÚses de plusieurs acides minéraux sont mises au point ou améliorées. Dans le traité Letztes Testament attribué à Basile Valentin, les synthÚses de l'acide sulfurique et de l'acide chlorhydrique sont décrites. Le chimiste Johann Rudolf Glauber (1604-1670), précurseur de la chimie contemporaine a amélioré la synthÚse de nombreux acides donc celle de l'acide chlorhydrique[9]. Du point de vue théorique, Nicolas Lémery (1645-1715) explique toujours l'acidité des corps par le fait qu'ils contiennent des particules pointues qui piquent la langue[10]. Le physicien et chimiste Robert Boyle donne en 1675 quelques propriétés générales des acides et des bases, telles que le goût aigre aux aliments, leur action comme solvants, et de nombreuses propriétés chimiques[11]. à la fin de cette période, le chimiste anglais Joseph Black découvre les propriétés acides du dioxyde de carbone, (l'acide aérien) et sa réaction avec de nombreuses bases comme la magnésie MgO.
Ăpoque contemporaine
La premiÚre théorie de l'acidité est due à Lavoisier qui définit un acide comme un composé contenant de l'oxygÚne.
« On a vu que lâair de l'atmosphĂšre Ă©tait principalement composĂ© de deux fluides aĂ©riformes ou gaz, l'un respirable, susceptible d'entretenir la vie des animaux, dans lequel les mĂ©taux se calcinent et les corps combustibles peuvent brĂ»ler ; l'autre, qui a des propriĂ©tĂ©s absolument opposĂ©es, que les animaux ne peuvent respirer, qui ne peut entretenir la combustion, etc. Nous avons donnĂ© Ă la base de la portion respirable de l'air le nom d'oxygĂšne, en le dĂ©rivant de deux mots grecs ÏΟÏÏ, acide, ÎłÎ”ÎŻÎœÎżÎŒÎ±Îč, j'engendre, parce qu'en effet une des propriĂ©tĂ©s les plus gĂ©nĂ©rales de cette base est de former des acides en se combinant avec la plupart des substances. »
â Lavoisier, TraitĂ© Ă©lĂ©mentaire de chimie, 1864 (1789).
Ce qu'écrit Lavoisier est correct tant que « la plupart des substances » sont des non-métaux comme N et P qui donnent par combustion les acides nitrique, phosphorique, etc., mais s'est rapidement révélé incorrect avec les éléments comme le calcium et le magnésium, puisqu'ils donnent la chaux (CaO), la magnésie (MgO), qui sont des bases.
Carl Wilhelm Scheele découvre de nouveaux acides, ou de nouvelles préparations d'acides déjà connus : la baryte (BaO), l'acide fluorhydrique (à partir de CaF2 et de l'acide sulfurique), l'acide phosphorique (à partir d'os), les acides arsénique, molybdique, etc.
Humphry Davy prolongea la théorie de Lavoisier en précisant qu'une base est la combinaison d'un métal et de l'oxygÚne.
Peu aprÚs, Jöns Jacob Berzelius, considéré avec Lavoisier comme le fondateur de la chimie moderne, unifie les travaux sur les acides et les bases en proposant une théorie électrochimique qui définit un sel comme le résultat de l'action d'un acide et d'une base[12].
En 1838, Justus von Liebig reprend la thĂ©orie de Davy et de Dulong sur l'importance de l'hydrogĂšne dans les acides. Pour Leibig, un acide est un corps qui peut remplacer un mĂ©tal par un hydrogĂšne H. Par exemple, AH est un acide s'il permet la rĂ©action de dĂ©placement de Na+CH3COONa + AH â CH3COOH + NaA
Acidité d'Arrhenius
LâaciditĂ© fut ensuite dĂ©finie par Svante August Arrhenius Ă la fin du XIXe siĂšcle : un acide est un composĂ© chimique pouvant cĂ©der des protons (ions H+) en solution aqueuse et une base un composĂ© chimique pouvant libĂ©rer des ions hydroxyde (HOâ) en solution aqueuse. Mais cette dĂ©finition nâĂ©tait pas assez gĂ©nĂ©rale et nâexpliquait pas la basicitĂ© de certains composĂ©s chimiques ne libĂ©rant pas de HOâ en solution aqueuse.
On peut aisĂ©ment reconnaitre expĂ©rimentalement un acide au sens d'Arrhenius grĂące Ă des tests de pH. Une solution acide a un pH infĂ©rieur Ă 7, Ă 25 °C. Plus le pH est bas, plus lâaciditĂ© est forte. Pour mesurer le pH, on peut effectuer diffĂ©rents tests : papiers pH, indicateurs colorĂ©s, utilisation dâun pH-mĂštre, feuilles de chou rouge, etc.
Acide de BrĂžnsted
Joannes BrÞnsted est le premier à avoir théorisé l'acidité avec la possibilité de faire un traitement quantitatif avec tous les acides. Selon la théorie de BrÞnsted-Lowry, énoncée en 1923, un acide est une espÚce qui peut libérer un proton[13], et une base toute espÚce qui peut capter un proton.
Remarques :
- la notion de diacide ne fait pas partie de la théorie de BrÞnsted (mais de celle d'Arrhenius), en effet, un acide de BrÞnsted est associé à un couple acide-base comme cela est expliqué ci-dessous, et dans un couple, un seul ion H+ est échangé ;
- les protons ne pouvant exister à l'état libre en solution, ils sont toujours associés soit à la forme acide d'un acide de BrÞnsted, soit au solvant ;
- il est pertinent de distinguer « acide » et « forme acide ». L'acide est l'entité qui réagit avec une base, alors que la forme acide est l'entité associée à la forme basique dans un couple ;
- le test de pH permettant de reconnaĂźtre un acide d'Arrhenius permet Ă©galement de reconnaĂźtre un acide de BrĂžnsted.
La dĂ©finition de l'acide dans la thĂ©orie de BrĂžnsted implique qu'il peut cĂ©der un proton pour donner sa forme basique et, rĂ©ciproquement, qui peut ĂȘtre formĂ© lorsque sa forme basique fixe un proton. La notion de couple acide-base[14] est donc intimement liĂ©e Ă la dĂ©finition de BrĂžnsted.
RĂ©action acide-base :
Ăquilibre de BrĂžnsted :
Les réactions qui ont lieu entre un acide et une base sont nommées « réactions acido-basiques », ou « réactions acide-base ».
Dans cette thĂ©orie, l'autoprotolyse de l'eau s'interprĂšte comme la rĂ©action de l'acide eau (c'est-Ă -dire de la forme basique du couple H3O+/H2O) avec la base eau (c'est-Ă -dire la forme acide du couple H2O/HOâ). L'eau est donc un ampholyte.
L'avantage de cette théorie sur la théorie d'Arrhenius est double :
- la théorie justifie que certains produits comme l'ammoniac soient considérés comme des bases ;
- la théorie ne spécifie pas que le solvant est l'eau et peut donc traiter de réaction acido-basique en solvant non aqueux (voir ci-dessous).
Acide de Lewis
La dĂ©finition de Lewis (1923) est plus gĂ©nĂ©rale que celle de BrĂžnsted. Par cette dĂ©finition, un acide est un composĂ© chimique qui peut, au cours dâune rĂ©action, accepter une paire dâĂ©lectrons (un doublet) :
- un acide de Lewis est accepteur de doublet, ayant donc une orbitale vide ;
- une base de Lewis est un donneur de doublet, ayant un doublet libre (doublet non liant).
Notes :
- La reconnaissance d'un acide de Lewis n'est pas effectuée avec le test de pH décrit ci-dessous pour les acides d'Arrhenius. Pour autant, l'introduction d'un acide de Lewis (par exemple AlCl3) dans l'eau pure conduit presque toujours à une diminution de son pH.
- Le produit résultant de l'association d'un acide et d'une base de Lewis est un complexe.
- Il est essentiel de considérer que ce sont des doublets électroniques qui sont mis en jeu et non des électrons. En effet, un corps capable de donner un électron n'est pas une base de Lewis mais un réducteur.
- La notion d'électrophilie est proche de celle d'acide de Lewis. La différence est une question de point de vue : l'acide de Lewis est un point de vue thermodynamique alors que l'électrophile est un point de vue cinétique. Ainsi, les acides de Lewis se comparent avec des constantes d'équilibre alors que les électrophiles se comparent avec des constantes de vitesse de réaction.
- Les acides de Lewis possĂšdent une lacune Ă©lectronique dans leur structure.
- La plupart des cations métalliques sont des acides de Lewis.
- Les acides de BrÞnsted sont souvent des acides de Lewis, la réciproque n'est pas vraie.
Acide hors solution
Les acides peuvent se présenter sous forme[15] :
- solide : acide citrique, acide tartrique ;
- liquide : acide sulfurique, acide nitrique, acide acétique ;
- gazeuse : les halogĂ©nures d'hydrogĂšne qui, dissous dans lâeau, donnent des solutions dâacides halogĂ©nohydriques.
Acide dans l'eau
Les rĂ©actions dans lâeau sont souvent traitĂ©es avec la thĂ©orie de BrĂžnsted. Un acide peut ĂȘtre reprĂ©sentĂ© par la formule gĂ©nĂ©rique AH (ou AH+).
Acides faibles, acides forts
On Ă©tablit une distinction entre les acides faibles et les acides forts. Ces derniers sont caractĂ©risĂ©s par le fait que lorsquâils sont introduits dans lâeau, lâentitĂ© AH nâexiste pas en solution car la rĂ©action avec l'eau est totale et produit lâion du solvant H3O+.
Parmi les acides forts, on retrouve les hydracides (tels les acides halohydriques HCl, HBr, HI) et les oxoacides (molĂ©cules acides possĂ©dant un atome central avec un haut degrĂ© dâoxydation entourĂ© dâatomes dâoxygĂšne, par exemple : acide nitrique, acide sulfurique, acide perchlorique, acide permanganique).
Il est Ă©quivalent de parler dâacide/base « fort(e)s », et dâacide ou base « totalement dissociĂ©(e) ». Plus la rĂ©action entre AH et H2O ci-dessous est dĂ©placĂ©e vers la droite, plus l'acide est fort (et moins il est faible). Certains acides comme l'acide chlorhydrique dĂ©placent la rĂ©action complĂštement vers la droite. De tels acides n'existent donc pas dans l'eau.
Constante d'acidité
On classe les acides faibles (acide formique, acide acĂ©tique) en fonction de leur constante d'aciditĂ©. Celle-ci est dĂ©finie comme la constante de l'Ă©quilibre de BrĂžnsted dont les rĂ©actifs sont l'acide HA et le solvant (par exemple l'eau H2O), et les produits : la base conjuguĂ©e Aâ et la forme acide du solvant (par exemple H3O+).
AH + H2O = Aâ + H3O+
Ăchelle de pH
Dans lâeau, lâaciditĂ© est mesurĂ©e Ă lâaide de lâĂ©chelle des pH. Cette Ă©chelle est communĂ©ment considĂ©rĂ©e entre 0 et 14, de trĂšs acide Ă trĂšs basique. Ces valeurs ne sont pas arbitraires, elles correspondent au pH d'une solution dans laquelle l'activitĂ© (pour faire simple : la concentration) de l'acide du solvant H3O+ et de la base du solvant HOâ valent 1 mol·L-1. Lâeau est Ă la fois un acide faible et une base faible (on dit que l'eau est un ampholyte ou bien un amphotĂšre).
On compare habituellement la « force » des acides :
- théoriquement, à partir de leur pKA ;
- expĂ©rimentalement, en comparant le pH de solutions de ces acides Ă la mĂȘme concentration.
Nivellement des acides et des bases
Tout acide fort dans l'eau réagit pour donner - de façon totale - l'ion H3O+. La force de ces acides n'est donc pas comparable. Ce phénomÚne est appelé nivellement des acides par le solvant.
Pour comparer les « forces » des acides/bases totalement dissociés, il est nécessaire de se placer dans un autre solvant que l'eau (ex. : éthanol) moins réactif, c'est-à -dire moins basique, l'acide éthanoïque (pur) plus acide que l'eau, etc.
Dans lâeau, lâacide le plus fort est H3O+ (H+aqueux) et la base la plus forte est HOâ. Il convient de garder en mĂ©moire que ces notations (H3O+ et HOâ) ne constituent quâune simplification schĂ©matique du systĂšme. Dans la rĂ©alitĂ©, H+ et HOâ sont tous deux entourĂ©s par une sphĂšre de solvatation (plusieurs molĂ©cules dâeau, polaires, Ă©tablissant des liaisons de type Ă©lectrostatique avec les ions). Une notation plus rigoureuse devrait donc ĂȘtre H(H2O)n+ et HO(H2O)nâ. Cependant, cette notation plus rigoureuse nâapporte rien Ă la comprĂ©hension des phĂ©nomĂšnes acido-basiques.
Acides dans d'autres solvants
La théorie de BrÞnsted se généralise à d'autres solvants.
Solvants protiques
Les solvants protiques sont capables de cĂ©der et capter un ion H+ (hydron), appelĂ© communĂ©ment proton (d'oĂč le terme « solvant protique »). Les solvants protiques sont caractĂ©risĂ©s par leur Ă©quilibre d'autoprotolyse, et par la constante d'Ă©quilibre de cet Ă©quilibre.
Par exemple :
- le solvant NH3 s'autoprotolyse en ion NH2â et ion NH4+ ;
- le solvant HF pur s'autoprotolyse en H2F+ et Fâ ;
- le solvant CH3COOH pur s'autoprotolyse en CH3COOH2+ et CH3COOâ ;
- l'acide sulfurique H2SO4 s'autoprotolyse en H3SO4+ et HSO4â.
Dans ces solvants, la notion de couple acide-base est dĂ©finie de la mĂȘme façon. Les Ă©changes de protons se font toujours entre les formes acide ou basique du couple et le solvant (ou ses ions issus de l'Ă©quilibre d'autoprotolyse). Certains couples existent dans l'eau et dans d'autres solvants, mais d'autres peuvent exister dans l'eau et pas dans un autre solvant ou rĂ©ciproquement. Par exemple :
- le couple HCl/Cl- existe dans le solvant acide Ă©thanoĂŻque (pur) car HCl y est un acide faible, alors que ce couple n'existe pas dans l'eau car l'acide y est fort ;
- le couple NH4+/NH3 existe dans l'eau ou dans le solvant Ă©thanol, mais pas dans le solvant acide sulfurique (pur) oĂč l'ammoniac y est totalement protonĂ©, car l'acide sulfurique est un acide fort.
Solvants n'Ă©changeant pas de particule
De nombreux solvants ne peuvent Ă©changer ni proton ni aucune autre particule. C'est le cas des hydrocarbures par exemple. Dans ce cas, les acides et les bases ne peuvent pas ĂȘtre nivelĂ©s. Ces solvants ne solvatant pratiquement pas les ions, les Ă©quilibres (par exemple HCl/Clâ) sont peu dĂ©placĂ©s dans le sens de formation de Clâ.
Solvants Ă©changeant des particules autres que H+
Certains solvants peuvent Ă©changer des particules autres que des protons. Ils sortent du cadre de la thĂ©orie de BrĂžnsted, et doivent ĂȘtre traitĂ©s dans le cadre de la thĂ©orie du systĂšme du solvant. Par exemple, dans un solvant comme BrCl3, l'Ă©quilibre correspondant Ă l'autoprotolyse s'Ă©crit :2BrCl3 = BrCl2+ + BrCl4â
Une espĂšce ajoutĂ©e dans ce solvant est un acide si elle contribue Ă augmenter la concentration en ions BrCl2+. C'est une base si elle contribue Ă augmenter la concentration en ions BrCl4â. Par exemple :
- NaCl est une base car en se dissolvant, il se forme Na+ et Clâ et cet ion chlorure se fixant sur le solvant BrCl3 donne la forme BrCl4â ;
- AlCl3 est en revanche un acide puisqu'il peut arracher un ion Clâ Ă BrCl3 et donner AlCl4â et BrCl2+.
D'autre particules peuvent ĂȘtre Ă©changĂ©es, comme l'ion oxyde. Ainsi, avec NO2, on a la rĂ©action 2 NO2 â NO3â + NO+ qui peut ĂȘtre vue comme le transfert dâun ion O2â câest la dĂ©finition des acides de Lux-Flood. On peut alors dĂ©finir une base comme un donneur dâion O2â(riche en Ă©lectron) et un acide comme un accepteur dâion O2â. Dans dâautres cas câest un transfert dâion Fâ. Ce type de conception des rĂ©actions en solution joue un rĂŽle important en mĂ©tallurgie et dans lâĂ©tude des roches (voir ci-dessous).
Acides en géologie, en chimie des sels fondus, en préparation verriÚre
Un acide de Flood est un accepteur d'ion oxyde O2â. En pĂ©trologie, on dit quâune roche est acide si elle renferme plus de 65 % de silice. Ceci est une rĂšgle qui traduit la dĂ©finition des acides de Lux-Flood : le minĂ©ral silice SiO2, bon accepteur dâion oxyde O2â, est susceptible d'engendrer l'ion silicate tĂ©traĂ©drique SiO44â, la silice est acide.
Une application parfois facile est la formation de l'acide silicique[16].
SiO2solide à site de surface attaquable, verre mal stabilisé + H2Oliquide eau pure et agressive = H2SiO3soluble et solvaté
Si les roches riches en silice sont acides, à l'instar de la rhyolite ou des granites, les roches pauvres en silice et riches en chaux CaO ou en magnésie MgO sont par contre basiques.
Cela a une importance pour comprendre le comportement des magmas (notamment dans les volcans), et lorsque lâon veut dissoudre une roche pour lâanalyser, par exemple dissolution dans un acide pour analyse par ICP ou bien dissolution dans un verre pour analyse par spectromĂ©trie de fluorescence X (technique dite de la « perle fondue »).
Pour cette derniĂšre application, on estime souvent lâaciditĂ© par lâindice dâaciditĂ©, qui est le nombre dâatomes dâoxygĂšne divisĂ© par le nombre dâautres atomes ; par exemple, le SiO2 a un indice dâaciditĂ© de 2, le CaCO3 a un indice dâaciditĂ© de 1,5.
Goût
Le goĂ»t acide est reconnu grĂące Ă des rĂ©cepteurs particuliers PKD2L1, qui sont probablement sensibles Ă la prĂ©sence des ions H+, ou Ă certains nuclĂ©otides cycliques. MalgrĂ© certaines Ă©tudes on sait Ă prĂ©sent que sa reconnaissance est indĂ©pendante de la reconnaissance du goĂ»t salĂ©. Ces rĂ©cepteurs jouent aussi un rĂŽle physiologique important dans le reste de lâorganisme et sont exprimĂ©s Ă la surface de certaines cellules pour contrĂŽler la quantitĂ© de CO2 dans le sang ou la quantitĂ© de liquide cĂ©rĂ©brospinal.
Dissolution acide
Une des principales propriĂ©tĂ©s des solutions acides est de pouvoir dissoudre un grand nombre de matĂ©riaux. Le pouvoir de dissolution dĂ©pend de la concentration de lâacide et de la nature chimique du matĂ©riau et de lâacide.
Les mĂ©taux, quand le potentiel redox du couple cation/mĂ©tal dĂ©rivant de ce mĂ©tal est infĂ©rieur Ă 0, ne sont pas stables dans les solutions acides, ils sont donc oxydĂ©s (câest-Ă -dire ionisĂ©s par perte dâun ou plusieurs Ă©lectrons) ; lâion mĂ©tallique peut alors rester sous forme dissoute (solvatĂ©e), ou se combiner avec un ou plusieurs ions oxygĂšne et former un oxyde. LâaciditĂ© est un des paramĂštres importants de la corrosion aqueuse. La dissolution des mĂ©taux est utilisĂ©e en gravure dâart, câest la technique de lâeau-forte ; elle est aussi utilisĂ©e en mĂ©tallographie pour rĂ©vĂ©ler des dĂ©fauts (par exemple joints de grain).
Le calcaire se dissout aisément avec des acides faibles ; on nettoie les robinetteries avec du jus de citron (acide citrique) ou du vinaigre (acide acétique).
Les verres peuvent ĂȘtre dissous par de lâacide fluorhydrique, mais la manipulation de cet acide est extrĂȘmement dangereuse, du fait de la prĂ©sence dâions fluorure.
Les acides concentrés peuvent provoquer des brûlures sur la peau et les muqueuses (yeux, nez, bouche). En cas de brûlure par acide, il faut :
- protĂ©ger : en se protĂ©geant (gantsâŠ), fermer le rĂ©cipient et Ă©viter que lâacide ne se rĂ©pande (utilisation de papier absorbant), ouvrir les fenĂȘtres pour Ă©viter les dĂ©gagements de vapeurs ;
- retirer les vĂȘtements imbibĂ©s (en faisant attention Ă ne pas contaminer dâautres personnes ou des parties saines de la victime) ;
- faire ruisseler de lâeau pour laver la partie atteinte, en Ă©vitant de contaminer les parties saines ;
- prĂ©venir les secours (« 112 » dans lâUnion europĂ©enne, « 15 » en France) en mentionnant le produit en cause.
Lâutilisation dâacides concentrĂ©s doit toujours se faire par des personnes formĂ©es et Ă©quipĂ©es (blouse, gants, lunette), sous hotte.
Exemples
Voici quelques-uns des principaux acides :
- l'acide acétique, de formule CH3COOH, acide principal du vinaigre ;
- l'acide acétylsalicylique, de formule HC9H7O4, plus connu sous le nom d'aspirine ;
- l'acide ascorbique, de formule H2C6H6O6, plus connu sous le nom de vitamine C ;
- l'acide citrique, de formule H3C6H5O7, un acide présent dans les agrumes ;
- l'acide chlorhydrique, de formule HCl, en solution aqueuse : H3O+ + Clâ(aq), couramment utilisĂ© dans l'industrie.
- l'acide sulfurique, de formule H2SO4
- l'acide nitrique, de formule HNO3
- l'acide formique
- l'acide désoxyribonucléique ou ADN
- l'acide lactique
- les acides gras
- les acides aminés
Notes et références
- La notion d'acide de Lewis englobe les autres notions d'acide décrites ci-dessous.
- La remarque est similaire pour les bases. Comme les notions de base et d'acide peuvent ĂȘtre conjuguĂ©es, il s'ensuit l'existence des couples acide-base impliquĂ©s au niveau Ă©lĂ©mentaire dans les rĂ©actions acido-basiques.
- « Acide », sur actu-environnement.com.
- Le terme est classique, avec le verbe ÇcÇdÄre signifiant « devenir aigre ou acide », l'adjectif ÇcÇdÇlus,a,um « aigrelet » Ă l'origine du mot français oseille via acidula, l'adverbe ÄcÇdÄ Â« de façon amĂšre, pĂ©nible, dĂ©sagrĂ©able », voire le substantif fĂ©minin ÇcÇdÇtÄs citĂ© au IVe siĂšcle par le mĂ©decin Marcellus Empiricus avec le sens en premier lieu mĂ©dicinal, mais aussi gĂ©nĂ©ral d'« aigreur ».
- Partington J. R. (1989), A short History of Chemistry, Ed. Dover, p. 31
- « Rasarnava / alchemical treatise », sur Encyclopedia Britannica (consulté le ).
- (en) « Coelvm philosophorvm, sev, De secretis naturae liber : Ulstadius, Philippus : Free Download, Borrow, and Streaming : Internet Archive », sur Internet Archive (consulté le ).
- Partington J.R. (1989), A short history of Chemistry, Ed. Dover, p. 39
- Partington J.R. (1989), A short history of Chemistry, Ed. Dover, p. 63
- Partington J.R. (1989), A short history of Chemistry, Ed. Dover, p. 60
- Partington J.R. (1989), A short history of Chemistry, Ed. Dover, p. 76
- Partington J.R. (1989), A short history of Chemistry, Ed. Dover, p. 196
- (en) « BrÞnsted acid », IUPAC, Compendium of Chemical Terminology [« Gold Book »], Oxford, Blackwell Scientific Publications, 1997, version corrigée en ligne : (2019-), 2e éd. (ISBN 0-9678550-9-8)
- « Untitled Document », sur iupac.org (consulté le ).
- Andrew Hunt, « La chimie de A à Z, 1200 définitions », Dunod, 2006
- Cette derniÚre entité est parfois décrite sous une forme hydroxylée complÚte, Si(OH)4 ou son mésomÚre H2SiO3.H2O
Voir aussi
Bibliographie
- F. Claisse, Physics and chemistry of borate fusion
- James Huheey, Ellen A Keiter, Richard L Keiter, André Pousse (trad. de l'anglais par) et Jean Fischer (trad. de l'anglais par), Chimie inorganique, Paris Bruxelles, De Boeck, , 964 p. (ISBN 978-2-804-12112-9, BNF 37670940). En particulier, chap. 9, « La chimie des bases et des acides », p. 318-358.
Articles connexes
Liens externes
- Ressource relative à la santé :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :