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SĂ©rie B

Une série B est à l'origine un long métrage tourné avec un petit budget de production, distribué sans campagne publicitaire, et projeté en première partie d'un double programme (deux films par séance au prix d'un seul) : ce type de films était très courant durant l'âge d'or d'Hollywood. Depuis le déclin puis l'abandon des séries B, à la fin des années 1950, le terme est utilisé dans un sens plus large, désignant tous les films à faible budget, exception faite des essais et des films pornographiques.

Le terme de sĂ©rie B ne dĂ©signe pas un genre cinĂ©matographique Ă  proprement parler : les westerns sont frĂ©quents Ă  l'âge d'or des sĂ©ries B, ainsi que les films de science-fiction et d'horreur Ă  petits budgets, qui ont gagnĂ© en popularitĂ© vers la fin des annĂ©es 1950. Ă€ l'origine, les sĂ©ries B sont souvent des sĂ©ries, plus courtes qu'un film, d'une durĂ©e moyenne de 70 minutes, pour lesquelles les cĂ©lĂ©britĂ©s jouent Ă  plusieurs reprises le mĂŞme personnage. Les dernières sĂ©ries B ont inspirĂ© quelques suites, mais les sĂ©ries B sont moins courantes. De la mĂŞme manière que les films, la durĂ©e moyenne des sĂ©ries B a augmentĂ© au fil du temps.

Retenant moins l'attention des critiques que les grosses productions, les séries B ont souvent été délaissées, bien qu'elles puissent faire l'objet parfois d'une grande ingéniosité artistique et de certaines prouesses scénaristiques. Aujourd'hui, le terme de série B peut désigner de manière péjorative un film de genre sans ambition artistique, ou un film vif et énergique, délesté des contraintes imposées par une production de grande envergure. Le terme est également utilisé pour quelques films très coûteux, qui empruntent aux codes traditionnels des séries B.

Depuis qu'elles existent, les séries B fournissent des opportunités de tournage tant aux cinéastes débutants qu'aux réalisateurs dont la carrière décline. Des cinéastes célèbres comme Anthony Mann, Jonathan Demme, Quentin Tarantino ou encore Robert Rodriguez ont appris leur métier en partie grâce aux séries B. Elles ont permis à certains acteurs d'obtenir une grande notoriété, comme John Wayne ou Jack Nicholson, ou de lancer ou relancer des carrières comme celles par exemple de Vincent Price, Randolph Scott, Karen Black ou Klaus Kinski.

Histoire

Les origines de la série B : les années 1920

TournĂ© avec 20 000 $, That Certain Thing fut produit par la Columbia qui deviendra l'une des principales sociĂ©tĂ©s de Hollywood[1]

Il n'est pas certain que le terme de sĂ©rie B soit utilisĂ© avant le dĂ©but des annĂ©es 1930 ; en termes de production, cependant, un concept semblable est dĂ©jĂ  Ă©tabli. En 1916, Universal est le premier studio hollywoodien Ă  Ă©tablir diffĂ©rents types de longs mĂ©trages en fonction du coĂ»t de production. La durĂ©e moyenne des films se situe alors entre cinquante-cinq minutes et une heure. En 1919, sur la mĂŞme idĂ©e, la Paramount crĂ©Ă© sa propre filiale au propos des petits budgets[2]. Indiquant l'importance accordĂ©e au budget, en 1921, quand le coĂ»t moyen d'un film hollywoodien est autour de 60 000 $[3], Universal dĂ©pense approximativement 34 000 $ sur The Way Back et près de 1 000 000 $ sur Folies de femmes, l'une des plus grosses productions de l'annĂ©e.

Entre 1927 et 1928, Ă  la fin de l'ère du cinĂ©ma muet, le coĂ»t de production moyen pour un film sorti des studios d'une major d'Hollywood est compris entre 190 000 $ pour la Fox et 275 000 $ pour la MGM. Cette moyenne reflète les « specials » qui peuvent aussi bien coĂ»ter près de 1 000 000 $ alors que les films tournĂ©s rapidement coĂ»tent seulement 50 000 $. Ces films « bon marchĂ© » permettent aux studios, entre le tournage de deux productions plus importantes, de rentabiliser au maximum l'Ă©quipement dans lequel ils ont investi et de mettre Ă  l'Ĺ“uvre le personnel rĂ©cemment embauchĂ©[3] - [4]. Les studios de moindre envergure, tels que la Columbia Pictures ou le Film Booking Offices of America, se sont spĂ©cialisĂ©s dans ce genre de productions ; leurs films, qui ont une faible durĂ©e de vie cinĂ©matographique, ont pour cible les cinĂ©mas qui doivent faire des Ă©conomies sur la location et les frais d'exploitation et en particulier ceux situĂ©s dans les petites villes et les « salles de quartier », ou « nabes »[5] des grandes villes. Encore plus petit, les producteurs de « Poverty Row », nom donnĂ© aux petits studios amĂ©ricains, tournent des films avec un coĂ»t de production infĂ©rieur Ă  3 000 $, cherchant ainsi Ă  faire des bĂ©nĂ©fices par le biais de quelques rĂ©servations, en profitant des brèches laissĂ©es par les plus gros studios[6].

En 1929, avec l'arrivée massive du cinéma sonore dans les salles américaines, beaucoup d'exploitants commencent à laisser tomber le modèle de présentation dominant, celui qui impliquait une large variété de courts métrages avant le long métrage attendu. Un nouveau genre de programmation est établi et devient pratique courante : les actualités filmées, les serials ou les dessins animés précédant la projection de deux films. Pour le diffuseur, le coût de revient à la minute du deuxième film, qui est en fait vu avant le film principal, est inférieur à la durée équivalente des courts métrages. Les majors instaurent des règles qui favorisent les cinémas qui leur sont affiliés en empêchant les diffuseurs indépendants d'avoir accès aux grosses productions ; à défaut de qualité le deuxième film permet de favoriser la quantité[4] - [7] - [8]. La différence de style entre les deux films de la programmation permet un certain équilibre chez les spectateurs qui ont la possibilité de voir un spectacle intéressant sans que ça soit spécifié sur l'affiche. Les films à bas budget des années 1920 ont pu ressortir comme série B de l'âge d'or hollywoodien.

Les années 1930

Ladies Crave Excitement (1935), acclamé par la critique, fut monté par Joseph H. Lewis, l'un des réalisateurs les plus prolifiques du western B

Au début, les grands studios ne s'adonnent pas à la réalisation de films de série B mais finissent par s'adapter à la demande. Les majors développent chacune une section propre à ces productions afin de pouvoir alimenter le marché en pleine extension de la série B. Jesse L. Lasky, cofondateur de la Paramount avec Adolph Zukor, met au point une méthode pour que tous leurs films soient exploitables dans un maximum de salles : les propriétaires de cinéma qui désirent projeter un film de la compagnie doivent s'engager à diffuser toutes les autres productions du label pendant une année entière[9]. Cette méthode est appelée le « Block booking » et tend à se généraliser. Les séries B louées à prix net (à l'inverse des séries A, pour lesquelles un pourcentage est prélevé en fonction du box-office), le profit en est garanti. Avec des films déjà sûrs d'être exploités avant leur finalisation, cette pratique libère les majors de l'inquiétude liée à l'éventuelle moyenne qualité de leurs productions. Les cinq studios dominant (MGM, Paramount,Fox, Warner Bros. et RKO (anciennement FBO)), ainsi que les compagnies propriétaires d'importantes chaînes de cinémas, sécurisent donc leurs bénéfices. Les Poverty Row, comme Mascot Pictures ou Sono Art–World Wide qui ont des budgets très bas, font essentiellement des séries B, serials ou autres courts métrages ; ils distribuent également leurs productions indépendamment et importent d'autres films. Sans position sur le marché, ils cèdent la plupart du temps la distribution régionale à des entreprises du « states rights », qui, eux-mêmes, proposent des lots de films aux diffuseurs (généralement au moins six films avec la même vedette)[10] - [11]. Deux studios émergents, Universal et la florissante Columbia, ont un mode de fonctionnement identique, quoiqu'amélioré, que les plus « importants » Poverty Row. Ils ont peu ou pas du tout de salles de cinémas, mais ont un réseau de distribution du niveau des majors[12].

Les meilleurs productions de l'Ă‚ge d'or (les sĂ©ries A) sont prĂ©sentĂ©es en avant-première Ă  l'« Ă©lite » des grandes villes, oĂą les double programmes ne sont pas exploitĂ©s. Comme le dĂ©crit l'historien Edward Jay Epstein, « lors des premières projections, les films ont obtenu de la bonne publicitĂ© grâce aux critiques, mais surtout par le bouche-Ă -oreille »[7] - [13] - [14]. Puis les salles de moindre importance projettent ces dernières, oĂą le double feature prĂ©vaut. Dans les salles contrĂ´lĂ©es par les grands studios, les films sont changĂ©s toutes les semaines. Dans les milliers de salles indĂ©pendantes, qui sont plus petites, la programmation est changĂ©e entre deux et trois fois par semaine. Pour faire face Ă  la demande pour de nouvelles sĂ©rie B, les Poverty Row se lancent avec frĂ©nĂ©sie dans la production de films Ă  « micro-budget » qui n'excèdent pas les 60 minutes. Ces films, connus sous le nom de quickies, sont fabriquĂ©s dans un timing très serrĂ© (parfois bouclĂ© en quatre jours)[15]. Comme le dĂ©crit Brian Taves, « beaucoup des plus pauvres cinĂ©mas, comme les grindhouses des grandes villes, projettent continuellement, sans planning de programmation, des films purement d'action. Parfois, ils vendent mĂŞmes des passeports pour voir six films d'un trait, projetĂ©s durant toute une nuit »[10]. Beaucoup de petites salles n'ont jamais eu l'occasion de projeter des films de sĂ©rie A, obtenant leurs films par droit amĂ©ricain, qui concerne presque exclusivement les productions des Poverty Row. Les sĂ©ries B ne bĂ©nĂ©ficient pas de la mĂŞme publicitĂ© que les sĂ©ries A. Ces dernières ont leurs titres qui figurent sur les enseignes lumineuses et sont listĂ©es dans les journaux locaux, ce qui attire des millions d'amĂ©ricains vers leurs cinĂ©mas de quartier[16]. Les sĂ©ries B obtiennent leurs seules publicitĂ©s par le biais des bandes-annonces qui prĂ©cèdent la projection de ces sĂ©ries A[16].

En 1930, avec l'Ă©mergence du son, les coĂ»ts de production augmentent et atteignent, en moyenne, 375 000 $[3]. La majoritĂ© des films produits sont des sĂ©ries B. Les leaders du marchĂ© font Ă©galement des programmers, des films dont la qualitĂ© se situe entre celle des sĂ©ries A et sĂ©ries B) et selon le prestige du cinĂ©ma, ces films « intermĂ©diaires » peuvent ĂŞtre soit en tĂŞte d'affiche, soit des films secondaires de double programmes[17]. Beaucoup de sĂ©ries B des Poverty Row sont faites avec des budgets pouvant descendre jusqu'Ă  5 000 $[15], ce qui est insignifiant par rapport aux budgets allouĂ©s par les majors pour leurs sĂ©ries A. Au milieu des annĂ©es 1930, le double programme est le mode d'exploitation le plus rĂ©pandu. Les majors rĂ©pliquent au Poverty Row en augmentant leur taux de production de sĂ©ries B, comme la Warner qui, sous l'impulsion de Bryan Foy (appelĂ© le « Gardien des sĂ©ries B »)[18], voit ses fabrications de sĂ©rie B passer de 12 Ă  50 % du total des productions rĂ©alisĂ©es. Chez la Fox, qui s'est Ă©galement orientĂ©e vers la sĂ©rie B, Sol M. Wurtzel est responsable de la production de plus de vingt films par an Ă  la fin des annĂ©es 1930.

John Wayne, Ray Corrigan et Max Terhune, les « three mesquiteers », dans Pals of the Saddle de la Republic Pictures (1938), d'une durĂ©e de 55 minutes

Un certain nombre des Poverty Row se renforce. Au début de la décennie, Sono Art–World Wide s'associe à une autre compagnie pour donner naissance à la Monogram Pictures. En 1935, Monogram fusionne avec la Mascot Pictures et plusieurs petits studios pour devenir la Republic Pictures. Mais peu de temps après, les dirigeants de la Monogram décident de se retirer pour reformer leur société. Dans les années 1950, la plupart des productions des sociétés Republic et Monogram sont de qualité équivalente à celle des majors. Peu inquiété, les Poverty Row, qui ont un penchant pour les noms grandiloquents comme « Empire » ou « Imperial », continuent de produire en série leurs films bon marché[19]. Joel Finler a analysé la durée moyenne des films sortis en 1938, mettant en valeur la relative importance des productions de séries B.

Durée moyenne des séries B sorties en 1938 par studios[20] :
Catégorie Studio Durée moyenne
« Big Five »MGM87,9 minutes
Paramount76,4 minutes
Fox75,3 minutes
Warner75 minutes
RKO74,1 minutes
« Little Three »United Artists87,6 minutes[21]
Columbia66,4 min
Universal66,4 min
« Poverty Row »Grand National63,6 min
Republic63,1 min
Monogram60 min

La moitiĂ© des films produits par les huit principaux studios sont des sĂ©ries B. Au cours de la dĂ©cennie, avec près de 300 films faits annuellement, les sociĂ©tĂ©s de la Poverty Row ont fourni environ 75 % des films hollywoodiens, ce qui reprĂ©sente plus de 4 000 sĂ©ries B[22].

Le Western est, de loin, le genre prédominant de la série B au cours des années 1930 et, à moindre mesure, des années 1940[23]. Les films d'Universal (avec Tom Mix, Ken Maynard et Buck Jones), de la Columbia (avec Buck Jones et Tim McCoy), de la série de films de la RKO avec George O'Brien, les westerns de la Republic avec John Wayne ou les « Three Musquiteers », etc. parviennent à monter des histoires avec tout le savoir-faire américain[24]. Nombre de ces films sortent dont ceux qui ont pour vedette Harry Carey. Des séries font même leur apparition comme The Range Rider ou American Rough Rider. The Terror of Tiny Town (1938) devient l'un des westerns à petit budget les plus connus grâce à sa distribution composée de nains. Le procédé est jugé provocant mais le film obtient un tel succès sur le marché indépendant que la Columbia achète les droits pour le distribuer[25].

Des séries en tout genres avec pour vedettes les mêmes personnages ou les mêmes acteurs sortent sans arrêt et ont un grand succès. Dans cet élan beaucoup de séries B de la Fox ont pour vedettes les Frères Ritz et la jeune Jane Withers en tant qu'interprètes principaux de comédie et plusieurs films avec Charlie Chan comme personnage principal sont fabriqués[26]. Comme pour les serials, beaucoup de ces séries B sont à l'attention d'un jeune public ce qui entraîne dans certains cinémas des double programmes dont l'après-midi leur est consacré, tandis que la séance du soir cible un public plus mature. D'après un rapport sur l'industrie du cinéma, les spectateurs de l'après-midi sont largement composés de femmes au foyer et d'enfants qui souhaitent voir autant de choses que leur porte-monnaie permet. Ceux du soir, quant à eux, sont plus portés sur la qualité du programme[27].

Les années 1940

Un nouveau style d'exploitation de la Monogram pour Wife Wanted (1946).

En 1940, le coĂ»t de production moyen d'un long mĂ©trage amĂ©ricain est de 400 000 $, une augmentation nĂ©gligeable comparĂ©e aux dix dernières annĂ©es[3]. Un certain nombre de petites sociĂ©tĂ©s Hollywoodienne viennent pourtant de s'Ă©teindre, incluant l'ambitieuse Grand National ; mais une nouvelle firme, la Producers Releasing Corporation, apparaĂ®t comme la troisième plus importante sociĂ©tĂ© de production derrière la Republic et la Monogram. Par ailleurs, les doubles programmes sont toujours le modèle d'exploitation dominant : en 1941, 50 % des salles sont facturĂ©es exclusivement selon la politique en vigueur[28]. Au dĂ©but des annĂ©es 1940, une loi poussent les studios Ă  remplacer le block booking par des lots qui se limitent gĂ©nĂ©ralement Ă  cinq films. Les majors de cinĂ©ma ne peuvent plus proposer Ă  la distribution des offres pour des films qui ne sont pas encore tournĂ©s[29]. Ces mesures sont l'un des facteurs cruciaux qui ont poussĂ© progressivement les cinq plus grands studios d'Hollywood vers la production de sĂ©ries A, rendant ainsi les petits studios producteurs de sĂ©ries B plus importants. Les films de genre Ă  faible budget sont toujours la marque de fabrique des Poverty Row, ainsi les budgets allouĂ©s par la Republic et la Monogram s'Ă©lèvent rarement au-dessus des 200 000 $. Les Poverty Row suivent les traces des huit majors amĂ©ricaines, avec leurs sociĂ©tĂ©s de distribution, et dominent dĂ©sormais environ 95 % des recettes sur la location nationale (États-Unis et Canada)[7]. En 1946, le producteur indĂ©pendant, David O. Selznick, produit son film Duel au soleil avec un budget Ă©levĂ© afin de bĂ©nĂ©ficier d'une large campagne publicitaire et d'une sortie nationale importante. Cette stratĂ©gie de distribution est un succès, malgrĂ© la mauvaise qualitĂ© du film[30]. Ă€ la fin des annĂ©es 1950, ce principe de distribution deviendra la mĂ©thode principale pour les sĂ©ries B qui seront, cependant, en perte de notoriĂ©tĂ©.

En dehors de la diffĂ©rence de coĂ»t, la frontière entre les sĂ©ries A et B est mince. Les sĂ©ries B sont occasionnellement commercialisĂ©es de la mĂŞme manière que les sĂ©ries A et obtiennent le mĂŞme succès, comme Hitler's Children, un thriller produit par la RKO pour seulement 200 000 $, qui est l'un des films qui attire le plus de monde en 1943. Le film engrange plus de 3 000 000 $[31] - [32]. Dans le cinĂ©ma noir, les sĂ©ries A rappellent visuellement ce qui se fait pour les films bon marchĂ©. Les programmers, qui sont exposĂ©s diffĂ©remment selon le double programme, mènent Ă  une confusion historique. Ronald Reagan, frĂ©quemment identifiĂ© comme une vedette des sĂ©ries B, joue Ă©galement dans de mauvaises sĂ©ries A dont la qualitĂ© est Ă©quivalente aux B. En 1948, le double programme est un moyen de projection populaire, utilisĂ© dans 25 % des salles et occasionnellement dans 36 % des autres salles[33]. Les studios de la Poverty Row commencent Ă  Ă©largir leurs champ d'action : en 1957, la Monogram crĂ©Ă© une filiale, la Allied Artists, afin de dĂ©velopper et distribuer des films plus coĂ»teux, proposĂ©s la plupart du temps par des producteurs indĂ©pendants. Pendant ce temps, la Republic Pictures en fait de mĂŞme[34]. En 1947, la PRC est achetĂ©e par la Eagle-Lion Films, une compagnie britannique impliquĂ©e sur le marchĂ© amĂ©ricain. Bryan Foy, ancien responsable des sĂ©ries B de la Warner Bros., est promu directeur de production[35] - [36] - [37].

Dans les annĂ©es 1940, la RKO se dĂ©tache des Big Five, ou Cinq Grands studios amĂ©ricains, pour se focaliser sur les sĂ©ries B. La filiale de la RKO, dirigĂ©e par Val Lewton, se focalise sur les films d'horreur comme La FĂ©line (1942), I Walked with a Zombie (1943), ou The Body Snatcher (1945), rĂ©alisĂ©s par des rĂ©alisateurs tels que Jacques Tourneur ou Robert Wise. Stranger on the Third Floor (1940), une sĂ©rie B de 64 minutes considĂ©rĂ©e comme le premier classique du film noir, toujours produit par la RKO, est pris pour modèle par d'autres studios qui fabriquent Ă©galement un nombre considĂ©rable d'Ĺ“uvres noir. Les films noirs qui semblent ĂŞtre des sĂ©ries A et qui ont le plus de notoriĂ©tĂ©, sont en fait des sĂ©ries B qui ont bĂ©nĂ©ficiĂ© de moyens proches des A. Les dĂ©cennies suivantes, ces films bon marchĂ© sont dĂ©sormais parmi ceux les plus prisĂ©s de l'Ă‚ge d'or Hollywoodien[39].

Durant l'année 1947, la RKO produit, en plus des divers programmers et séries A, deux séries B noires : Desperate et The Devil Thumbs a Ride. Dix pures séries B noires sont produites par les trois plus grosses Poverty Row que sont la Republic, la Monogram et la PRC/Eagle-Lion Films, et une par la « petite » Screen Guild. Quant à elles, les trois majors et la RKO, en produisent cinq. Avec ces quinze films noirs, une douzaine de programmers est produite par diverses sociétés non hollywoodienne[40]. Cependant, la plupart des productions à faible budget provenant des majors restent largement ignorées tant par les spectateurs que par la critique. Parmi les productions de la RKO, on retrouve des séries de comédie, Lupe Vélez et Lum and Abner, des thrillers avec le Saint et le Faucon, ainsi que des westerns avec Tim Holt et des Tarzan avec Johnny Weissmuller. Jean Hersholt joue le Docteur Christian dans six films entre 1939 et 1941. The Courageous Dr. Christian (1940) est une référence du genre : durant près d'une heure que dure le film, le médecin réussit à guérir une épidémie de méningite spinale, à démontrer la bienveillance des droits civiques, à démontrer l'entêtement des adolescents et à calmer les ardeurs amoureuses d'une vieille fille[41].

Malgré les petits budgets alloués par les Poverty Row, aucune baisse des billets d'entrées n'est établie. La Republic Pictures est respectée des majors grâce à la production de plusieurs westerns à petit budget mais n'est pas considérée comme producteur de films d'exploitation, comme peut l'être la Monogram avec des films tels que Where Are Your Children? (1943) ou Women in Bondage (1943)[42]. La PRC a ses cinéastes attitrés, ainsi le réalisateur Edgar George Ulmer est reconnu comme « le Capra de PRC »[43]. Ulmer tourne beaucoup de films pour le studio, dont Girls in Chains en , et Women in Bondage sorti six mois avant ; à la fin de l'année, Ulmer a également tourné un film musical basé sur le thème de l'adolescence, Jive Junction, et Isle of Forgotten Sins, un film d'aventure autour d'un bordel. En 1947, le studio produit The Devil on Wheels et réconcilie les adolescents avec le cinéma en mêlant le hot rod et les meurtres.

La série B à la télévision

Ma and Pa Kettle (1957), produit par Universal, est la dernière série B lancée par une major

En 1948, la Cour suprĂŞme des États-Unis, dans le procès fĂ©dĂ©ral « antitrust » contre les majors de cinĂ©ma, proscrit le block booking et supprime l'intĂ©gralitĂ© des chaĂ®nes de cinĂ©ma des Big Five. Avec l'augmentation des tĂ©lĂ©spectateurs et la rĂ©duction des listes de production des studios, le double programmes disparait dans la plupart des salles amĂ©ricaines. Les majors prĂ©fèrent alors les bĂ©nĂ©fices du recyclage, l'offre des anciens films Ă  gros budgets Ă  la place des traditionnelles sĂ©ries B[44]. Par ailleurs, avec la transmission, Ă  la tĂ©lĂ©vision, des classiques du Western et de sĂ©ries du mĂŞme genre, le marchĂ© cinĂ©matographique, en particulier des sĂ©ries B, diminue fortement. Après avoir faiblement augmentĂ© durant les annĂ©es 1930, la moyenne amĂ©ricaine du coĂ»t de production de longs mĂ©trages double pendant les annĂ©es 1940, atteignant 1 000 000 $ — une hausse de 93 % après s'ĂŞtre ajustĂ© pour l'inflation[3].

La première victime de l'Ă©volution du marchĂ© est l'Eagle-Lion, qui sort ses derniers films en 1951. En 1953, la vieille sociĂ©tĂ© Monogram disparait, la compagnie ayant adoptĂ© l'identitĂ© de sa plus grande filiale, Allied Artists. L'annĂ©e suivante, cette dernière sort le dernier western hollywoodien de sĂ©rie B. La production d'autres westerns continue pendant quelques annĂ©es, mais la Republic Pictures, longtemps associĂ©e aux sagas, n'a plus tournĂ© aucun film dès la fin de la dĂ©cennie. Dans d'autres genres, Universal garde sa sĂ©rie de comĂ©dies, Ma and Pa Kettle, en 1957, alors que l'Allied Artists reste fidèle aux Bowery Boys jusqu'en 1958[45]. La RKO, affaiblie Ă  la suite d'erreur de gestion, met fin Ă  son industrie en 1957[46]. Les sĂ©ries A deviennent Ă©galement plus longues — les dix premières sĂ©ries A du box-office, en 1940, durent en moyenne 112,5 minutes ; la durĂ©e moyenne du top 10 est de 123,4 minutes[47]. Avec leur modeste moyen, les sĂ©ries B suivent la mĂŞme voie. La durĂ©e moyenne de 60 minutes pour un long mĂ©trage est dĂ©jĂ  vieille ; 70 minutes est dĂ©sormais fixĂ© comme un strict minimum. Par ailleurs, bien que l'âge d'or des double programmes touche Ă  sa fin, le terme sĂ©rie B dĂ©signe encore un quelconque film de genre, produit avec un budget relativement faible, et mettant en vedette des acteurs mĂ©connus ou inattendus, Ă©galement appelĂ©s « B-Acteurs ». Cependant, le terme dĂ©note Ă©galement les films dont le synopsis est peu original, avec des personnages types, et dont l'action est simpliste. Parallèlement, le domaine de la sĂ©rie B devient de plus en plus fertile en tant que territoire d'expĂ©rimentation, Ă  la fois sĂ©rieux et Ă©trange.

Ida Lupino, surtout connue comme comĂ©dienne, est Ă©tablie comme la seule rĂ©alisatrice hollywoodienne de l'ère de la sĂ©rie B. Ă€ travers ses films tournĂ©s avec de petits budgets pour sa sociĂ©tĂ©, la The Filmakers, Lupino a explorĂ© des sujets tabous tels que le viol dans Outrage (1950), ou l'auto-explication dans The Bigamist (1953). Sa plus cĂ©lèbre rĂ©alisation, The Hitch-Hiker (1953), un film de la RKO, est souvent dĂ©signĂ© comme le seul classique du film noir tournĂ© par une femme[48]. Cette mĂŞme annĂ©e, la RKO sort un nouveau film Ă  faible budget, qui a marquĂ© les esprits lors de sa sortie : MĂŞme les assassins tremblent (Split Second) qui parle d'essais nuclĂ©aires, ce film est ainsi appelĂ© premier « film noir atomique ». Le plus cĂ©lèbre de ces films, une production indĂ©pendante, est En quatrième vitesse (Kiss me Deadly) (1955), qui illustre typiquement l'ambiguĂŻtĂ© entre les sĂ©ries A et B : un « programmer capable d'occuper plus de la moitiĂ© des salles de quartiers Ă  double facture, dont le budget Ă©tait d'approximativement 400 000 $. Son distributeur, United Artists, a sorti 25 programmers dont le budget se situait entre 100 000 $ et 400 000 $ »[49]. De plus, la durĂ©e du film, de 106 minutes, correspond Ă  la durĂ©e moyenne des sĂ©ries A, mais son acteur principal, Ralph Meeker, n'Ă©tait apparu qu'une seule fois dans un film produit par une major. Sa source est l'un des romans de Mike Hammer, tirĂ© des Mickey Spillane, mais la rĂ©alisation de Robert Aldrich est consciemment esthĂ©tisĂ©e. Le rĂ©sultat est un film de genre brutal qui Ă©voque Ă©galement l'anxiĂ©tĂ© contemporaine sur ce qui est souvent appelĂ© « Bombe ».

Rockership X-M (mai 1950), produit et distribué par Lippert Pictures, est cité comme possible « premier film sur l'apocalypse post-nucléaire »[50].

La crainte d'une guerre nucléaire avec l'Union soviétique, avec moins de scrupules sur la retombée des propres tests radioactifs américains, a engendré beaucoup de films de genre à l'époque. Science-fiction, horreur, et divers hybrides de ces deux genres, sont maintenant d'une importance économique majeure pour la fin du marché des films à bas budget. La plupart des films du bas du marché — comme plusieurs de ceux produits par William Alland pour l'Universal (e.g., L'Étrange Créature du lac noir (Creature from the Black Lagoon), 1954), et par Sam Katzman pour la Columbia (e.g., It Came from Beneath the Sea, 1955) — fournissent plus qu'une simple diversion. Mais ils sont d'un genre dont la nature fantastique peut aussi être utilisée comme couverture d'observations culturelles souvent complexes à mettre en scène. L'Invasion des profanateurs de sépultures (Invasion of the Body Snatchers, 1956), du réalisateur Don Siegel, distribué par l'Allied Artists, traite des pressions conformistes et de l'horreur de la banalité en hantant, une mode allégorique[51]. The Amazing Colossal Man (1957), tourné par Bert I. Gordon, est en grande partie un film sur les monstres qui dépeint les effets horribles de l'exposition aux radiations, et « un féroce conte sur la guerre froide qui tournoie la Corée, le secret oppressif de l'armée et sur la montée de l'Après-guerre américaine dans un monde fantastique »[52].

The Amazing Colossal Man a été produit par une nouvelle compagnie dont le nom est plus imposant que les budgets qu'elle attribue. L'American International Pictures (ou AIP), fondé en 1956 par James H. Nicholson et Samuel Z. Arkoff pour réorganiser leur American Releasing Corporation, qui devient vite le studio américain majeur qui se dévoue entièrement à la production de séries B. L'American International a aidé à conserver la sortie originale des double factures avec leur « lot de deux (films) » : ces films étaient à bas budget, mais à la place d'une grande vente, ils sont loués avec un pourcentage de base, comme les séries A. I Was a Teenage Werewolf (1957) est peut-être le film de l'AIP le plus connu de l'ère. Comme son titre le suggère, le studio compte sur des personnages propres au genre fantastique, et plus récemment à l'univers infantile. Si Hot Rod Gang (1958) a marché, pourquoi n'y aurait-il pas des hot rod d'horreur ? Résultat : Ghost of Dragstrip Hollow (1959). L'AIP est crédité en ayant « mené le film... par une exploitation démographique, ciblé l'audience, et en ayant saturé les réservations ; tout ceci deviendra la procédure standard pour la sortie des blockbusters produits par les majors, à la fin des années 1970 ». En termes de contenu, les majors sont déjà présentes, avec des films « J.D. » comme Untamed Youth (1957) de la Warner Bros., ou High School Confidential (1958) de la MGM (les deux ayant pour rôle principal Mamie Van Doren).

En 1954, un jeune cinĂ©aste nommĂ© Roger Corman est pour la première fois crĂ©ditĂ© Ă  l'Ă©cran comme scĂ©nariste et producteur associĂ© pour Highway Dragnet de l'Allied Artists. Corman produit peu de temps après son premier film indĂ©pendant : The Monster from the Ocean Floor, avec un budget de 12 000 $. Le tournage dura six jours seulement. Sur les six films sur lesquels il a travaillĂ©, en 1955, Corman a produit et rĂ©alisĂ© le premier film officiel de l'American Releasing Corporation, Apache Woman et Day the World Ended, le premier film Ă  double facture d'Arkoff et Nicholson. Corman continua Ă  tourner plus de cinquante films jusqu'en 1990. En 2007, il revient comme producteur, il est crĂ©ditĂ© sur plus de 350 films. Souvent surnommĂ© « Roi de la sĂ©rie B », Corman a pourtant dĂ©clarĂ© : « je pense ne jamais avoir tournĂ© de sĂ©rie B de ma vie », puisque ce genre disparaissait peu Ă  peu quand il est entrĂ© dans le monde du cinĂ©ma ; il prĂ©fère dĂ©crire son mĂ©tier comme exploitant de films Ă  bas budget. Quelques annĂ©es plus tard, Roger Corman, la plupart du temps en collaboration avec l'AIP ou comme directeur de son propre studio, a par exemple lancĂ© la carrière de Francis Ford Coppola, Jonathan Demme, Robert Towne ou Robert De Niro.

Ă€ la fin des annĂ©es 1990, William Castle devient cĂ©lèbre comme le grand innovateur d'astuces publicitaires des sĂ©ries B. Les spectateurs aux projections de Macabre (1958), une production de 86 000 $ distribuĂ© par l'Allied Artists, sont invitĂ©s Ă  prendre une police assurance pour couvrir une potentielle mort de peur. The Tingler (1959) est le film qu'a accompagnĂ© la plus cĂ©lèbre des astuces de William Castle : Ă  l'apogĂ©e du film, des sonnettes attachĂ©es Ă  plusieurs fauteuils des salles produisent un bruit inattendu lors de la projection, un cri perçant ou autre rire plus appropriĂ©. Avec ces films, Castle a « combinĂ© la saturation des campagnes publicitaires de Columbia et Universal, avec leur lot de Sam Katzman et William Alland, avec des coups publicitaires standardisĂ©s et centralisĂ©s et des astuces qui ont Ă©tĂ© la portĂ©e de projectionnistes locaux ».

Le boom des salles d'après-guerre, les Drive-in, est vital pour l'expansion de l'industrie des sĂ©ries B indĂ©pendantes. En , il y a 96 Drive-in aux États-Unis ; une dĂ©cennie plus tard, il y en a plus de 3 700. Des films sans prĂ©tentions, avec de simples et familiales histoires, et des effets spĂ©ciaux basiques sont idĂ©alement projetĂ©s dans ces cinĂ©mas en plein air. Le phĂ©nomène des films de Drive-in est devenu l'un des symboles qui dĂ©finit l'identitĂ© culturelle populaire amĂ©ricaine des annĂ©es 1950. Pendant ce temps, plusieurs stations de tĂ©lĂ©vision locales programment des sĂ©ries B pour les fins de soirĂ©e, popularisant ainsi la notion du film de minuit.

De plus en plus, les films de genre amĂ©ricains sont rejoints par d'autres films Ă©trangers acquis Ă  petits prix, et nĂ©cessairement, doublĂ© pour le marchĂ© amĂ©ricain. En 1956, le distributeur Joseph E. Levine finance le tournage d'un nouveau film, avec l'acteur amĂ©ricain Raymond Burr, qui est montĂ© dans le film de science-fiction japonais, Godzilla. La sociĂ©tĂ© britannique Hammer Film Productions produit les cĂ©lèbres Frankenstein s'est Ă©chappĂ© (The Curse of Frankenstein) (1957) et Dracula, qui auront une influence majeure sur les films d'horreur. En 1959, l'Embassy Pictures, de Joseph Levine, achète les droits internationaux d'Hercules, une sĂ©rie A italienne avec l'acteur amĂ©ricain Steve Reeves. DĂ©butant avec seulement 125 000 $, Levine dĂ©pense ensuite plus de 1 500 000 $ pour la publicitĂ©, une somme sans prĂ©cĂ©dent. The New York Times n'est pas d'accord, il dĂ©clare que le film a Ă©tĂ© dessinĂ© « lĂ©gèrement plus que quelques bâillements dans le marchĂ© du film … lancĂ© dans tout le pays avec un barrage publicitaire assourdissant ». Levine compte sur le box-office du premier week-end pour les recettes, rĂ©servant le film « dans autant de cinĂ©ma qu'il a pu pour la première semaine, le retirant ensuite avant que la critique le fasse pour lui ». Hercules est sorti dans 500 salles, et la stratĂ©gie est un succès : le film a gagnĂ© près de 4 700 000 $ seulement aux États-Unis ; le rĂ©sultat est encore plus rĂ©ussi en Europe. Plusieurs dĂ©cennies après, les deux films dominent Hollywood, et se remarque une philosophie d'exploitation identique Ă  celle de Levine.

Les années 1960

MalgrĂ© toutes les transformations dans l'industrie, en 1961, le coĂ»t moyen de production d'un long mĂ©trage amĂ©ricain est de seulement 2 000 000 $ — après un ajustement pour l'inflation, il est de seulement de 10 % en plus que celui de 1950. Les traditionnelles sĂ©rie B, annonçant les sĂ©ries A (double programme), ont largement disparu des salles amĂ©ricaines. Le style de l'AIP, avec le lot de deux films, est le nouveau modèle. En , la dernière importation de Joseph E. Levine, Hercules Unchained, sort dans les salles de quartier new-yorkaises. Un film Ă  suspense, Terror is a Man, sort comme « co-feature » avec une astuce d'exploitation dĂ©sormais familiale : « le dĂ©nouement inclut un son ou une musique alarmante permettant aux spectateurs sensibles de fermer leurs yeux ». Cette mĂŞme annĂ©e, Roger Corman donne un certain renouveau Ă  l'AIP : « quand ils m'ont demandĂ© de tourner deux films d'horreur en noir et blanc en dix jours chacun, pour un double programme, je les ai convaincu de me financer Ă  la place un seul film d'horreur, mais en couleur ». House of Usher a remis en avant l'ambiguĂŻtĂ© de la classification des sĂ©ries B. Il est clairement une sĂ©rie A de par son rĂ©alisateur et le studio qui l'a produit, avec la plus longue durĂ©e de tournage et le plus gros budget que Corman n'ait jamais accordĂ©. Mais il est gĂ©nĂ©ralement perçu comme une sĂ©rie B : le tournage a durĂ© simplement cinquante jours, un budget de seulement 200 000 $ (un dixième de la moyenne dans l'industrie), et une durĂ©e de 85 minutes, qui ne convient pourtant pas avec l'ancienne dĂ©finition standard donnĂ©e aux sĂ©ries B : « tout film durant moins de 80 minutes ».

She Shoulda Said No! (1949) est un film d'exploitation tourné par Sherman Scott. Initialement sans distributeur, Kroger Babb rachètera les droits et lui permettra de sortir en salle

Avec la fin de la censure dans l'industrie, les années 1960 ont donné naissance à une expansion majeure dans la viabilité commerciale d'une variété de sous-genres des séries B, désormais connue sous le nom de « film d'exploitation ». La combinaison d'une intensive et astucieuse publicité avec un film au sujet vulgaire, et souvent pourvu d'images outrageuses, date de la décennie précédente — le terme définissait originellement une production de faible budget, tournée par les plus petites Poverty Row, ou en dehors du système hollywoodien. Plusieurs dépeignent graphiquement les suites d'un pêché par un choix de vie prudent, comme l'« hygiène sexuelle ». Les spectateurs peuvent voir des prises explicites d'un accouchement à une circoncision rituelle[53]. De tels films ne sont généralement pas réservés pour les listes des cinémas, mais présentés comme des évènements spéciaux par des promoteurs de spectacle (ils peuvent également apparaître comme « grindhouse », qui typiquement n'ont pas de listes régulières). Le plus célèbre de ces promoteurs, Kroger Babb, est un avant-gardiste de la commercialisation des films à petit budget, sensationnels, dont la fameuse campagne publicitaire de saturation, en inondant les spectateurs par des annonces dans tous les médias imaginables[54]. Durant l'ère des double programmes, personne n'aurait appelé ces films des séries B. Avec les majors qui abandonnent la production traditionnelle de série B et le style promotionnel d'exploitation qui devient la pratique standard quelques années plus tard, le terme de film d'exploitation devient un moyen pour se référer à ces films de genre à bas budget. Les années 1960 voient des thèmes et images de style d'exploitation devenir de plus en plus important dans le royaume de la série B.

Des films d'exploitation, dans leur sens originel, continuent de sortir : en 1961, sort par exemple Damaged Goods un film aux allures de conte moralisateur sur une jeune femme victime d'une infection sexuellement transmissible, qui se conclut par des gros plans sur les effets physiques de ces maladies[55]. Durant ce temps, le concept d'exploitation en marge se mĂŞle avec les films de nu — Ă©galement appelĂ©s « nudies » — montrant des camps de nudistes ou des stripteases de cĂ©lĂ©britĂ©s, telles Bettie Page, qui fut souvent Ă  l'affiche des films pornographiques de la dĂ©cennie prĂ©cĂ©dente. Dès 1933, This Nude World est promu comme le « film le plus Ă©ducationnel jamais produit »[56]. Dans la fin des annĂ©es 1950, comme les plus vieilles salles de grindhouse se consacrent elles-mĂŞmes spĂ©cifiquement aux productions pour « adultes », quelques cinĂ©astes se sont mis Ă  tourner des nudies avec la plus grande attention sur l'histoire. Le plus connu d'entre eux est Russ Meyer, qui a sorti son premier nudie narratif Ă  succès, The Immoral Mr. Teas en 1959. Cinq ans plus tard, avec un budget de 100 000 $, Meyer sort Lorna, « un film qui combine sexe et rĂ©alisme avec violence »[56]. Comme rĂ©alisateur talentueux, Meyer gagne sa renommĂ©e de par ses sexploitations telles que Faster, Pussycat! Kill! Kill! (1965) ou Vixen (1968). Ces films sont en grande partie relĂ©guĂ©s aux salles rĂ©servĂ©es aux adultes, tandis que les films destinĂ©s Ă  un public adolescent de l'AIP comme Beach Blanket Bingo (1965) et How to Stuff a Wild Bikini (1966), avec Annette Funicello et Frankie Avalon, sont projetĂ©s dans les Drive-in ou dans d'autres lieux honorables. Le film The Trip (1967 de Roger Corman, tournĂ© pour l'AIP et Ă©crit par Jack Nicholson, ne montre jamais de poitrine entièrement nue, mais flirte pourtant, dans toutes ses images, avec la nuditĂ©.

Motorpsycho (1965) n'était pas difficile à commercialiser. Il avait la réputation érotique de Russ Meyer et tournait autour du thème de la moto et de la psychologie

L'un des films les plus influents de l'ère est Psychose de la Paramount Pictures. Ses 8 500 000 $ de revenus alors que sa production n'avait demandĂ© que 800 000 $ en a fait le film le plus rentable de l'annĂ©e 1960[57]. De plus, sa distribution composĂ©e de cĂ©lĂ©britĂ© ainsi que le respect du code Hays ont aidĂ© Ă  affaiblir la censure amĂ©ricaine. Et, d'après les notes de William Paul, ce mouvement dans le genre du film d'horreur inspirĂ© par Alfred Hitchcock fut rĂ©alisĂ© « significativement, avec le budget le plus bas de sa carrière amĂ©ricaine et des cĂ©lĂ©britĂ©s fascinantes. [Son] impact initial le plus grand … est portĂ© sur les films d'Ă©pouvantes (notamment ceux du rĂ©alisateur William Castle), dont chacun essaye d'ĂŞtre plus effrayant que Psycho »[58]. Le premier film de Castle dans la mĂŞme lignĂ©e que Psycho est Homicidal (1961), une première Ă©tape dans le dĂ©veloppement du sous-genre slasher qui naĂ®t rĂ©ellement Ă  la fin des annĂ©es 1970. Orgie sanglante Blood Feast (1963), un film sur un homme dĂ©membrĂ© et sur la prĂ©paration culinaire rĂ©alisĂ© pour 24 000 $ par le rĂ©alisateur de film nu Herschell Gordon Lewis, a Ă©tabli un nouveau sous-genre, rapidement le plus fructueux, le cinĂ©ma gore. L'associĂ© de Lewis, David F. Friedman, fait leur publicitĂ© en distribuant des sacs de vomissement aux amateurs de cinĂ©ma — le genre d'astuces de Castle Ă©tait terminĂ© — et s'arrange pour une injonction contre le film Ă  Sarasota (Floride) — le genre de problème des films d'exploitation s'y Ă©tait longtemps heurtĂ©, mis Ă  part que Friedman l'avait planifiĂ©[59]. Ce nouveau genre de film « Ă©cĹ“urants » caractĂ©rise le nouveau sens Ă©mergeant d'« exploitation » — l'adoption progressive d'exploitation traditionnelle et des scènes nues dans des films d'horreur, dans d'autres genres classiques de la sĂ©rie B et dans l'industrie cinĂ©matographique des films Ă  petits budgets. Les importations de films d'horreur et de Giallos de la Hammer film deviennent de plus en plus frĂ©quentes, des images mĂ©langeant sexploitation et ultraviolence, alimentent cette tendance des sĂ©ries B.

Le Code de Production est officiellement arrĂŞtĂ© en 1968, pour ĂŞtre remplacĂ© par la première version du système de classification. Cette annĂ©e, deux films d'horreur sortent, avec des consĂ©quences majeures pour les sĂ©ries B. L'un Ă©tait une grosse production, tournĂ© par Roman Polanski. Produit par le vĂ©tĂ©ran des sĂ©ries B d'horreur, William Castle, Rosemary's baby « a choisi le genre haut de gamme pour la première fois depuis les annĂ©es 1930 »[60]. C'est un succès critique, et le septième plus grand succès cinĂ©matographique de l'annĂ©e. Le second est le dĂ©sormais classique La Nuit des morts-vivants de George Romero, produit en quelques semaines Ă  Pittsburgh pour 114 000 $. Construit en se basant sur les prĂ©cĂ©dentes sĂ©ries B, comme L'Invasion des profanateurs de sĂ©pultures (Invasion of the Body Snatchers) dans son exploration sous-textuelle des questions sociales et politiques, il est doublĂ© comme un thriller et comme une allĂ©gorie incisive de la Guerre du ViĂŞt Nam et des conflits raciaux. Sa plus grande influence, cependant, est tirĂ©e de son intelligente subversion des clichĂ©s du genre et du lien entre son style d'exploitation, son coĂ»t de production bon marchĂ©, sa production indĂ©pendante et sa grande rentabilitĂ©[61]. Avec la fin du Code et l'Ă©tablissement du classement X, les sĂ©ries A des majors, comme Midnight Cowboy, peuvent enfin montrer des images « adultes », tandis que le marchĂ© des films pornographiques est en pleine expansion. Dans ce contexte de transformation commerciale, des personnes comme Russ Meyer gagnent une nouvelle lĂ©gitimitĂ©. En 1969, pour la première fois, un film de Meyer, Finders Keepers, Lovers Weepers!, est revu dans le journal The New York Times[62]. Peu de temps après, Corman sort des sexploitations avec plusieurs scènes de nu comme Private Duty Nurses (1971) ou Women in Cages (1971).

En , le plus important film d'exploitation est projetĂ© au Festival de Cannes. Ceci est en grande partie dĂ» au fait qu'il a Ă©tĂ© produit par un studio majeur, avec un budget modeste. Le projet est d'abord pris en charge par l'un de ses cocrĂ©ateurs, Peter Fonda, de l'American International Pictures. Fonda est devenu l'une des principales cĂ©lĂ©britĂ©s de l'AIP dans The Wild Angels (1966) de Corman, un film de moto, et dans The Trip, oĂą il essaye du LSD. Fonda voulait combiner ces deux thèmes. L'AIP, intriguĂ©e, a fortement hĂ©sitĂ© Ă  donner Ă  son collaborateur, Dennis Hopper, la libre direction du projet. Finalement, ils arrangent le financement et la distribution avec la Columbia, alors que deux personnes de la Corman/AIP rejoignent le projet : Jack Nicholson, et le directeur de la photographie, LászlĂł Kovács. Le film (qui incorpore un autre thème d'exploitation, la menace redneck, ainsi que la nuditĂ©) est produit pour 501 000 $. Easy Rider a remportĂ© plus de 19 100 000 $ et est devenu « le film sĂ©minal qui a permis un pont entre toutes les tendances rĂ©primĂ©es reprĂ©sentaient par schlock/kitsch/hack depuis l'aube d'Hollywood et du cinĂ©ma populaire des annĂ©es 1970 »[63].

Les années 1970

« Le roi des séries B », Roger Corman, a produit et réalisé Le Corbeau (1963) pour l'AIP

Ă€ la fin des annĂ©es 1960 et au dĂ©but des annĂ©es 1970, une nouvelle gĂ©nĂ©ration de studios de films Ă  petit budget apparait, tous les styles d'exploitation sont utilisĂ©s, de la science-fiction aux teen movies. La New World Communications de Roger Corman ou encore la New Line Cinema sortent en salle des films d'exploitations du courant dominant dans tous les États-Unis. Les productions des majors continuent Ă  devenir de plus en plus longues — les dix plus gros films durent en moyenne 140,1 minutes[64]. Les sĂ©ries B gardent, elles, leur allure : en 1955, Corman est prĂ©sent comme coproducteur sur cinq films, dont la durĂ©e moyenne est de 74,8 minutes. Il joue un rĂ´le similaire sur cinq films sortis en 1970 : deux pour l'AIP et pour sa New World : la durĂ©e moyenne est alors de 89,8 minutes[65]. Ces films ont dĂ©gagĂ© un bĂ©nĂ©fice timide. La première production de la New World, Angels Die Hard, a coĂ»tĂ© 117 000 $ pour environ 2 000 000 $ au box-office[66].

Le plus grand studio producteur de films à petit budget est resté leader dans la croissance de l'exploitation. En 1973, l'American International permet au jeune réalisateur Brian De Palma de tourner son film. En écrivant sa critique de Sœurs de sang, Pauline Kael observe que sa « technique molle ne semble pas accrocher aux spectateurs qui veulent voir du sang gratuit … [Il] ne réussit pas à obtenir un entretien entre deux personnes pour faire un simple point descriptif sans son, comme le plus terne film de la Republic, en 1938 »[67]. Beaucoup d'exemples de prétendues blaxploitations, représentant des histoires stéréotypées et tournant autour de la drogue, d'actes de violence ou de prostitution, sont produits par l'AIP. L'une des plus grandes célébrités de ce type d'exploitation est Pam Grier, qui a commencé sa carrière en jouant dans un film de Russ Meyer, La Vallée des Plaisirs / Orgissimo (1970). Plusieurs films de la New World suivirent, comme The Big Doll House (1971) ou The Big Bird Cage (1972), réalisés par Jack Hill. Il a également tourné ses deux plus grandes performances comme réalisateur pour l'AIP, deux blaxploitations : Coffy (1973) et Foxy Brown (1974). Pam Grier se distingue de toutes les autres actrices par son rôle dans le premier film exposant une scène de castration.

La blaxploitation est le premier genre d'exploitation dans lequel les majors prennent part. En effet, la United Artists produit Cotton Comes to Harlem (1970), réalisé par Ossie Davis, qui est considéré comme le premier vrai film du genre. Mais le film qui a vraiment marqué le phénomène de la blaxploitation est entièrement indépendant : Sweet Sweetback's Baadasssss Song (1971) qui est également, peut-être, le plus outrageux exemple du genre : expérimental, pornographique et essentiellement un manifeste pour la révolution des noirs américains. Melvin Van Peebles l'a écrit, coproduit, réalisé, y joue un rôle, l'a monté et en a composé la musique, qui a été complétée par Bill Cosby[68]. Son distributeur est la petite Cinemation Industries, alors connue pour avoir sorti des versions doublées des « shockumentaries » de l'italien Mondo cane ou du film pornographique suédois, Fanny Hill ; mais également pour ses propres productions, comme The Man from O.R.G.Y. (1970). Ces films sont projetés dans les grindhouses du jour — beaucoup d'entre eux ne sont jamais sortis dans des cinémas de pornographie. Les projections de six « quickies » pour un nickel étaient terminées, mais une continuité demeura.

La Monstrueuse Parade, de Tod Browning (1932), est un film d'horreur obscur montré à la télévision des années 1950 jusqu'aux années 1980. Il était souvent projeté comme film de minuit aux États-Unis[69].

En 1970, un film dramatique Ă  petit budget, tournĂ© en 16 mm par Barbara Loden gagne le prix international de la critique au Mostra de Venise. Wanda est un Ă©vĂ©nement dans le mouvement du film indĂ©pendant et du film classique de sĂ©rie B. L'histoire basĂ©e sur un crime et un contenu souvent miteux auraient convenu Ă  un simple film d'exploitation ou Ă  un vieux film noir de sĂ©rie B. La production de 200 000 $, pour laquelle Loden a passĂ© six ans Ă  rĂ©unir l'argent, reçu un Ă©loge de Vincent Canby pour « l'absolue justesse de ses effets, la dĂ©cence de ses points de vue et … la puretĂ© de la technique »[70]. Comme Romero et Van Peebles, d'autres rĂ©alisateurs de l'ère tournèrent des films qui combinent horreur et critique sociale. Les trois premiers longs mĂ©trages de Larry Cohen, Bone (1972), Black Caesar (1973) et Hell Up in Harlem (1973), sont tous des blaxploitations, mais Cohen les utilise comme vĂ©hicule d'un message satirique des relations inter-raciales. Le film gore, Deathdream (1974), tournĂ© par Bob Clark, est Ă©galement une protestation contre la guerre du ViĂŞt Nam.

Les années 1980

La plupart des maisons de production de série B datant de l'« ère de l'exploitation » ont fait faillite ou ont été rachetées par de plus grandes compagnies. Malgré une bonne image du genre, la fabrication de ces films est condamnée au profit des plus grosses productions qui deviennent de plus en plus chères. La tendance est évidente depuis des films comme Airport (1970) et les films catastrophe tel que L'Aventure du Poséidon (1972), Tremblement de terre (1974) ou La Tour infernale (1974). L'intrigue et les dialogues de ces films sont ce qui se fait de mieux en série B mais du point de vue de l'industrie cela devient trop « cliché ». C'est avec un film comme L'Exorciste, rempli d'effets spéciaux, qu'est démontré le potentiel des productions à gros budgets. Mais cette nouvelle direction prise par les majors est démontrée par le succès de trois films : Les Dents de la mer de Steven Spielberg (1975), Un nouvel espoir de George Lucas, qui devient le plus gros succès de l'histoire du cinéma (1977) et Superman de Richard Donner (1978). Ce dernier prouve qu'un studio peut financer un film adapté d'un comics à hauteur de 55 millions de dollars et en obtenir un excellent retour sur investissement (Superman terminant en tête du box-office en 1979[71]). Ces succès entrainent également des remakes de l'Âge d'or du cinéma.

En quinze ans, de 1961 à 1976, le coût de production d'un film hollywoodien double, de 2 millions à 4 millions de dollars. Quatre ans plus tard, en 1980, le budget moyen atteint 8,5 millions de dollars. Même avec la stabilisation de l'inflation aux États-Unis, les dépenses moyennes pour faire un film augmentent toujours[3] - [72]. Avec la saturation des réservations dans plus de mille salles de cinéma, il est de plus en plus difficile pour les petites salles d'imposer leur conditions pour distribuer les films de majors. Désormais les double features sont de l'histoire ancienne et il est impossible d'en trouver ailleurs que dans des « revival house ». Le studio Allied Artists est l'un des premiers touché par ce changement de régime économique et fait banqueroute en avril 1979[73]. À la fin des années 1970, l'American International Pictures se met à produire des films relativement chers comme Amityville, la maison du diable ou Meteor (tous les deux sortis en 1979). Après cela, le studio est racheté et dissous dans les années 1980[74].

En dépit des problèmes financiers, les obstacles à la distribution et le risque global, beaucoup de films de petits studios fait par des réalisateurs indépendant réussissent à se retrouver sur les écrans. Les films d'horreur sont les plus répandus dans la catégories des faibles budgets et plus particulièrement les slashers. En 1983, Roger Corman vend sa Société New World et fonde New Horizons. L'année suivante, la société distribue Suburbia, un film avec toile de fond le mouvement punk écrit et réalisé par Penelope Spheeris. Le New York Times le désigne comme un bon film de genre[75].

Larry Cohen, comme d'autres cinĂ©aste, continu dans l'ancienne voie et ne suit pas les conventions nouvellement mises en place avec son film Épouvante sur New York. C'est le genre de film qui est indispensable au marchĂ© avec son image populaire et imaginative qui exploite son potentiel de film Ă  bas budget[76]. En 1981, New Line sort Polyester de John Waters avec, comme astuce pour attirer les spectateurs, l'Odorama. En octobre de la mĂŞme annĂ©e, un film d'horreur avec un budget infĂ©rieur Ă  400 000 $ dĂ©bute Ă  DĂ©troit[77]. L'auteur-rĂ©alisateur-producteur de The Book of the Dead, Sam Raimi, est sur le point de fĂŞter son 22e anniversaire tandis que la vedette du film, Bruce Campbell, a 23 ans. La New Line sent la bonne affaire et dĂ©cide de le distribuer après avoir changĂ© le titre en Evil Dead. Ce film est aujourd'hui culte.

L'une des sociétés de production de série B les plus populaires des années 1980 est une rescapé de la période de gloire de l'exploitation, la Troma Entertainment, fondée en 1974. La particularité de Troma est de faire dans l'absurde comme Class of Nuke 'Em High et Redneck Zombies (1986) ou Surf Nazis Must Die (1987). The Toxic Avenger (1985) est le film le plus connu de Troma et en est devenu le symbole ainsi qu'une icône des séries B des années 1980. Empire International Pictures, une autre société nouvellement créée, excelle dans la série B et arrive à faire diffuser Ghoulies en 1985. Le marché de la location de vidéo la filière privilégier des producteurs de séries B, comme Empire, qui fait des bénéfices par ce biais[78]. Cela devient la norme pour ces films qui ont une vie très brève au cinéma. L'émergence de la télévision par câble et de sa diffusion 24h/24 permet aux films de série B de trouver leur place dans les foyers.

Les années 1990

En 1990, le coût moyen d'un film américain passe la barre des 25 millions de dollars[79]. Sur les neuf films qui dépassent les 100 millions de dollars au box-office cette année-là, deux auraient été considérés comme des séries B s'ils étaient sortis avant la fin des années 1970 (Les Tortues ninja et Dick Tracy). Trois autres sont également plus proche de l'« esprit » série B que celui de série A (Total Recall, 58 minutes pour vivre et Maman, j'ai raté l'avion)[80]. La popularité grandissante de la vidéo et de la diffusion de films à la télévision et sur le câble ou le satellite compromettent la viabilité des petites salles de cinéma. Cela entraîne rapidement la disparition des cinémas en plein air aux États-Unis.

L'opération de survie des films de série B est établie de différentes manières. Dans sa première décennie, New Line Cinema distribue presque exclusivement des films indépendants à bas budget ou des films de genre étranger. En 1994, New Line est vendu à Turner Broadcasting System et devient, au côté de Warner Bros. Pictures, un studio de taille moyenne avec un large catalogue de films au sein du conglomérat Time Warner. L'année suivante, Showtime lance le Roger Corman Presents, une série de treize films directement diffusée sur le câble produit par Concorde–New Horizons.

Pendant que les lieux de diffusion de Série B disparaissent, le cinéma indépendant éclos. Le réalisateur Abel Ferrara qui a bâti sa réputation avec de violents films d'exploitation comme Driller Killer en 1979 ou L'Ange de la vengeance en 1981, se lance dans la réalisation de deux films produits par des sociétés indépendantes et à faible budget (The King of New York en 1990 et Bad Lieutenant en 1992 qui a coûté 1.8 million de dollars)[81]. Le budget de 10 millions de dollars de Crash de David Cronenberg était à peine suffisant pour un film de Série B. Financé comme The King of New York par un consortium de petites compagnies, la distribution fut assurée par Fine Line Features.

La série B dans l'ère du numérique

Dans ce nouveau millénaire, le coût moyen de production d'un film américain dépasse désormais les 50 millions de dollars[79]. En 2005, les dix plus gros succès américain incluent trois adaptations de contes fantastiques pour enfants, un dessin animé, l'adaptation d'une bande dessinée, un épisode d'une saga de science-fiction, un remake d'un film de science-fiction et le remake de King Kong[82]. C'est une petite année pour Roger Corman avec un seul film produit et qui n'est même pas distribué aux États-Unis. Comme les films à faible coût sont remplacés par ceux à gros budget hollywoodiens, l'avenir de la série B est compromis.

D'autre part, la nouvelle tendance de l'industrie cinématographique annonce le retour d'une séparation entre séries A et B par les majors, sans les programmer pour faire le lien avec les deux. Le budget moyen d'un film hollywoodien approche actuellement les 60 millions de dollars et atteint les 100 millions quand le coût de commercialisation domestique est inclus[83]. Cependant, nous sommes déjà les témoins d'une polarisation des budgets en deux catégories : les grosses productions (entre 120 et 150 millions de dollars) et les « films de niche » (niche features) (entre 5 et 20 millions de dollars)[83]. En 2006, la Fox lance une nouvelle filiale, Fox Atomic, qui sont plutôt orientés vers le film d'horreur. Ces films sont délibérément à petits budgets. Fox Atomic limite ses budgets à 10 millions de dollars maximum par film et encourage les réalisateurs à utiliser le numérique et se passer d'acteurs vedettes[84]. Cette filiale représente l'équivalent des anciens studios producteurs de séries B des années 1950.

Les progrès technologiques facilitent la réalisation de films à petit budget. Il y a cependant eu des moyens de limiter les dépenses par rapport aux productions de standing supérieur, comme l'utilisation du Super 8 ou du format 16 mm. La banalisation des caméras numérique ainsi que la postproduction réalisée sur ordinateur permettent aux réalisateurs de petits films de bénéficier d'une bonne image et de pouvoir travailler les effets plus facilement. Pour les producteurs indépendants, le montant de l'équipement numérique équivaut à 1/10 du budget du film, ce qui diminue de manière significative le budget pour la production même[83]. Cet investissement est payant avec une qualité numérique qui connaît une amélioration spectaculaire depuis 2 ou 3 ans[83].

Les réalisateurs indépendants de ce genre de films éprouvent toujours des difficultés à trouver des distributeurs, bien que les méthodes de distribution numérique offrent de nouvelles perspectives. C'est ainsi que des sites internet comme YouTube ont ouvert une nouvelle brèche permettant aux films à bas budget d'être exposés à la vue du public.

Autour de la série B

SĂ©rie C

Films industriels, Ă©ducatifs, corporatifs et amateurs[85].

SĂ©rie Z

Un film peut être qualifié de série Z lorsqu'il s'agit d'une œuvre, généralement à faible budget et de piètre qualité.

Notes et références

  1. (en) The Warner Bros. Story de Clive Hirschhorn, pages 9-10 et 17.
  2. (en) Eames (1985), page 13.
  3. (en) The Hollywood Story de Joel Waldo Finler, page 36.
  4. (en) Grand Design de Tino Balio, page 29.
  5. (en) Voir la définition de Nabe sur Merrian-webster.com : Cinéma de voisinage, de quartier. Page consultée le 2 septembre 2008.
  6. (en) Grand Design de Tino Balio, page 320.
  7. (en) Boom and Bust de Thomas Schatz, page 16.
  8. (en) Boom and Bust de Thomas Schatz, page 324.
  9. (en) Jesse Lasky Biography sur Encyclopedia of World Biography.
  10. (en) Grand Design de Tino Balio, page 326.
  11. (en) Grand Design de Tino Balio, page 327.
  12. (en) Grand Design de Tino Balio, pages 103 et 104.
  13. (en) The Big Picture de Edward Jay Epstein, page 6.
  14. (en) Boom and Bust de Thomas Schatz, page 17.
  15. (en) Grand Design de Tino Balio, page 325.
  16. (en) The Big Picture de Edward Jay Epstein, page 4.
  17. (en) Grand Design de Tino Balio, page 317.
  18. (en) Grand Design de Tino Balio, page 102.
  19. (en) Grand Design de Tino Balio, pages 321 Ă  329.
  20. (en) The Hollywood Story de Joel Waldo Finler, pages 21 et 22.
  21. United Artists se concentre essentiellement à la distribution de prestigieux films indépendant, ce qui explique la durée moyenne de ses films plus élevée que les autres studios du « Little Three ».
  22. (en) Grand Design de Tino Balio, page 313.
  23. (en) Focus on the Western de John G. Nachbar et Jack Nachbar, page 2.
  24. (en) Focus on the Western de John G. Nachbar et Jack Nachbar, page 37.
  25. (en) Grand Design de Tino Balio, page 316.
  26. (en) Grand Design de Tino Balio, page 318.
  27. (en) Boom and Bust de Thomas Schatz, page 75.
  28. (en) Boom and Bust de Thomas Schatz, page 73.
  29. (en) Boom and Bust de Thomas Schatz, pages 19 Ă  21, 45, 72, et 160 Ă  163.
  30. (en) Boom and Bust de Thomas Schatz, page 11.
  31. (en) The RKO Story de Richard B. Jewell et Vernon Harbin, page 181.
  32. (en) RKO de Betty Lasky, pages 184 et 185.
  33. (en) Boom and Bust de Thomas Schatz, page 78.
  34. (en) Boom and Bust de Thomas Schatz, pages 340 et 341.
  35. (en) Boom and Bust de Thomas Schatz, page 295.
  36. (en) More than Night de James Naremore, page 142.
  37. (en) PRC (Producers Releasing Corporation), essai de Mike Haberfelner, août 2005, partie du site internet (Re)search my Trash (consultée le 12 juin 2006).
  38. (en) A Reference Guide to the American Film Noir, 1940-1958 de Robert Ottoson, page 145.
  39. Voir par exemple, David Kehr, Critic's Choice: New DVD's, New York Times, 22 août 2006 ; David Kehr, Critic's Choice: New DVD's, New York Times, 7 juin 2005 ; Robert Sklar, Film Noir Lite: When Actions Have No Consequences, New York Times, Week in Review, 2 juin 2002.
  40. Pour une considération détaillée de la série B noire classique, voir Arthur Lyons, Death on the Cheap: The Lost B Movies of Film Noir (New York : Da Capo, 2000).
  41. (en) The RKO Story de Richard B. Jewell et Vernon Harbin, page 147.
  42. (en) Boom and Bust de Thomas Schatz, page 175.
  43. (en) More than Night de James Naremore, page 144.
  44. (en) Kings of the Bs de Todd McCarthy et Charles Flynn, page 257.
  45. (en) Transforming the Screen: 1950–1959 de Peter Lev, page 205.
  46. (en) RKO: The Biggest Little Major of Them All de Betty Lasky, page 229.
  47. (en) Voir Finler (1988), pages 276 et 277, pour les meilleurs films. Finler liste The Country Girl en 1955, quand il a récolté le plus de bénéfice, mais pourtant, la première projection du film date de . The Seven Year Itch le remplace dans son analyse (les deux films semblent avoir la même durée).
  48. (en) Voir, e.g., Eddie Muller, Dark City: The Lost World of Film Noir (New York: St Martin's, 1998), page 176.
  49. (en) The Problem of Interpretation...: Authorial and Institutional Intentions In and Around Kiss Me Deadly de Richard Maltby.
  50. (en) Atomic Bomb Cinema: The Apocalyptic Imagination on Film de Jerome F. Shapiro, page 96.
    Voir également Atomic Films : The CONELRAD 100, partie du site internet CONELRAD, consulté le 29 septembre 2008.
  51. (en) Transforming the Screen: 1950–1959 de Peter Lev, pages 184 et 186. Interview de Don Siegel dans Focus on the Science Fiction Film de Guy Braucort, page 75.
  52. (en) The Amazing Colossal Man (tiré de Time Out Film Guide) de Chris Auty, page 24. Voir également Atomic Bomb Cinema: The Apocalyptic Imagination on Film de Jerome F. Shapiro, pages 120 à 124.
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  63. (en) Cité dans Cagin et Dray (1984), page 53. Histoire générale : Cagin et Gray (1984), pages 61 à 66. Côté financier : par l'associé de production William L. Hayward, cité dans Biskind (1998), page 74.
  64. (en) Voir Finler (1988), page 277, pour les plus gros films. Finler liste Heloo, Dolly! en 1970, lorsqu'il a réalisé le plus de bénéfice, mais sa sortie remonte à décembre 1969. The Owl and the Pussycat, plus court de 51 minutes, le remplace dans son analyse.
  65. En 1955 : Apache Woman, The Beast with a Million Eyes, Day the World Ended, The Fast and the Furious, et Five Guns West. En 1970 : Angels Die Hard, Bloody Mama, The Dunwich Horror, Ivanna (aussi appelé Scream of the Demon Lover lors de sa sortie aux États-Unis en 1971), et The Student Nurses.
    Pour la prise de Ivanna : Di Franco (1979), page 164.
  66. (en) Di Franco (1979), page 160.
  67. (en) Kael (1976), page 269.
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  70. Cité dans Reynaud (2006). Voir également Reynaud pour les efforts de Loden à obtenir ses fonds. Pour le coût de production : Schckel (2005), page 432. (en) Voir également "For Wanda", essai de Bérénice Reynaud, 2002 (1995), du site internet Sense of Cinema, consulté le 29 décembre 2006.
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Sources

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  • (en) John Morrow et Jack Kirby, Collected Jack Kirby Collector Volume 2, TwoMorrows Publishing, , 160 p. (ISBN 1-893905-01-2)
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Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

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