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Exploitation cinématographique

L'exploitation cinématographique est le secteur économique qui assure la projection des films auprès du public, dans les salles de cinéma. Il s'agit de l’une des branches finales de la filière cinématographique avec la distribution.

Quelle que soit l’importance des établissements, les salles de cinéma accomplissent bien, sous le vocable d'exploitation, une fonction commerciale. Certains professionnels, notamment dans le secteur de l'art et essai, privilégient une expression originale : montreur de films[1] qu’ils associent à leur conception du cinéma qui se veut « non commerciale ».

Histoire

Premiers films, premières projections

Fonctionnement du Théâtre optique en 1892 (gravure de Louis Poyet).
  • Les premières projections animĂ©es apparaissent en France le 28 octobre 1892, sur les Grands boulevards parisiens, au sous-sol du MusĂ©e GrĂ©vin. C’est Émile Reynaud qui prĂ©sente ses pantomimes lumineuses, les premiers dessin animĂ©s de l’histoire, dont Pauvre Pierrot, grâce Ă  son Théâtre optique. « Tous les appareils de Reynaud reposent sur le mĂŞme principe : la compensation optique par miroirs prismatiques. Grâce Ă  ce système, Reynaud va ĂŞtre Ă  l'avant-garde de l'animation et des projections lumineuses[2]. ». Reynaud, ancien professeur de sciences et inventeur, dessine et peint directement sur une pellicule de 70 mm de large de son invention, composĂ©e de carrĂ©s de gĂ©latine protĂ©gĂ©s par de la gomme-laque et assemblĂ©s entre eux pour former une bande continue grâce Ă  des cadres cartonnĂ©s (identiques aux cadres de diapositives)[3]. Ce dispositif peut ĂŞtre rapprochĂ© des procĂ©dĂ©s qu’on appelle aujourd’hui l’animation sans camĂ©ra. Le Théâtre optique permet de projeter ses dessins de personnages en mouvement Ă  un public payant rassemblĂ© devant un Ă©cran. La projection est effectuĂ©e par l’arrière (rĂ©troprojection) et le public ne voit pas l’appareil de projection. La salle est petite mais Reynaud y accueillera, de 1892 Ă  1900, plus d’un demi-million de spectateurs. Antoine Lumière, le père des frères Lumière, assiste au printemps 1894 Ă  l’une de ces sĂ©ances après avoir vu en dĂ©monstration sur les mĂŞmes grands boulevards, un kinĂ©toscope Edison.
Un Kinestoscope Parlor Ă  San Francisco (1894).
  • Dès 1893, aux États-Unis, se multiplient les Kinetoscope Parlors, les ancĂŞtres des salles de cinĂ©ma amĂ©ricaines (qui s’ouvrent Ă©galement en Europe). Les films sont enregistrĂ©s sur une pellicule de 35 mm de large, munie de 4 perforations de chaque cĂ´tĂ© des photogrammes, enduite sur une face de produit photosensible. « Edison fit accomplir au cinĂ©ma une Ă©tape dĂ©cisive, en crĂ©ant le film moderne de 3 mm, Ă  quatre paires de perforations par image[4]. » C’est en effet l’inventeur du phonographe, Thomas Edison qui a eu l’idĂ©e d’exploiter en salle la projection individuelle sur petit Ă©cran des films qu’il a produits et qu’a signĂ©s le premier rĂ©alisateur du cinĂ©ma, le Britannique William Kennedy Laurie Dickson. « Cent quarante-huit films sont tournĂ©s entre 1890 et septembre 1895 par Dickson et William Heise Ă  l'intĂ©rieur d'un studio construit Ă  West Orange, le "Black Maria", une structure montĂ©e sur rail, orientable selon le soleil[5]. » Auparavant, Edison a imaginĂ© un appareil de prise de vues animĂ©es, la camĂ©ra argentique kinĂ©tographe, avec laquelle Dickson a tournĂ© les premiers films du cinĂ©ma (c’est Edison qui a adoptĂ© ce mot anglais, qui signifie « fine couche », « pellicule », pour dĂ©signer les bobineaux enregistrĂ©s). « Les bandes tournĂ©es par Dickson sont Ă  proprement parler les premiers films[6]. »

Ces films où la vie semble avoir été capturée, vont enflammer la recherche mondiale dans l’espoir de trouver des mécanismes plus performants encore et notamment de leur appliquer une projection sur grand écran, ce à quoi Edison se refuse obstinément, bien que son assistant Dickson ne voit aucune difficulté à mettre au point un tel appareil. Edison va être rattrapé par Louis Lumière, avec l’invention de la caméra Cinématographe qui est dite « réversible » car elle est à la fois appareil de prise de vues et appareil de projection.

  • La première sĂ©ance publique du cinĂ©matographe Lumière est organisĂ©e Ă  Paris[7] le 28 dĂ©cembre 1895, dans le salon indien (au sous-sol) du Grand CafĂ©, rue des Capucines[8].

Premières projections numériques

  • La première sĂ©ance publique de cinĂ©ma numĂ©rique d'Europe est rĂ©alisĂ©e Ă  Paris[11], le 2 fĂ©vrier 2000, par Philippe Binant[12] - [13] - [14].

Fréquentation des salles en France

L'organisme qui représente les exploitants en France est la Fédération Nationale des Cinémas Français (FNCF).

L’Association française des cinémas d'art et d'essai (AFCAE), reconnue par le Ministère de la Culture depuis 1959, regroupe environ 1000 établissements classés art et essai[15].

Il est difficile, pour ne pas dire impossible, d’obtenir les chiffres fiables de la fréquentation des salles de cinéma hors de France. Certains résultats partiels sont cependant disponibles et intéressants. Ainsi, on peut comparer dans les principaux pays de l’Europe, le nombre d’écrans, le nombre d’entrées en millions, et le pourcentage de films originaires du pays concerné, projetés dans ces salles. Ces résultats sont ceux de l’année 2019[16]. Compte tenu des problèmes sanitaires liés à la maladie à coronavirus 2019, l’année en cours (2020) devrait être en dehors de toute comparaison.

PaysNombre d’écransDensité (écrans pour 100000 hbts)Millions d’entrées % films nationaux
France61149,421334,8 %
Gde Bretagne43406,5176,113 %
Allemagne49616,0118,621,5 %
Italie52058,6104,721,6 %
Espagne37007,9103,614,9 %
Total24320Moyenne 7,68716─

En termes de recettes également, la France est en tête des principaux pays européens. C’est le premier marché européen du film. Il faut cependant noter que les films français ont baissé en nombre au sein de ces statistiques européennes : de 78 en 2018 à 73 en 2019 (- 6,6%), alors que la proportion de films américains a bondi de 88 en 2018 à 116 en 2019 (+ 32,3%).

Consommation des films

Si autrefois les films (et le cinéma en général) étaient identifiés en tant que produits de consommation culturelle indéfectiblement liés aux salles de cinéma, il n’en est plus de même aujourd’hui. Les spectateurs consomment beaucoup plus de films à la télévision (dont les chaînes sont devenues les acteurs majeurs de l’économie de la grande majorité des films), que dans les salles. En France, nous disposons de données financières précises, établies dans les bilans annuels du C.N.C. (Centre national du cinéma et de l'image animée) qui montrent que cette consommation individuelle ou familiale de films est pratiquement 5 fois plus importante que le visionnement en salle. Ce tableau compare les dépenses des ménages en ce qui concerne le spectacle cinématographique (visionnement de films) :

AnnéeDépenses salles en Millions €Dépenses télévision & vidéo en Millions €Rapport dépenses salle / dépenses télévision & vidéo
2014133368445,13
2015133166845,02
2016138765294,71
2017138065424,74
2018133767275,03
2019144769334,79
Total sur 6 ans8.215402594,90

Principaux exploitants en France

Les principaux groupes d'exploitation français sont :

Les trois plus importants totalisent ainsi quelque 2384 Ă©crans, soit plus du tiers des 6 114 Ă©crans en France.

RĂ©partition des recettes

Sur un ticket vendu, l'exploitant reverse deux taxes : la TVA (5,5 %) et la TSA (10,72 %), collectée par le CNC. La recette restante, qui représente 83,98 % du prix de chaque billet, est appelée la Base Film[18].

Cette Base Film sert d'assiette à la rémunération du distributeur du film, selon un taux de location qui est généralement de 50 %. Toutefois, ce taux diminue fréquemment au fur et à mesure de l'exploitation des films, selon des négociations menées chaque semaine. Le cinéma verse également une contribution de 1,515 % de la Base Film à la SACEM, dont 1,21 % pour le compte du distributeur.

Cartes illimitées

Au printemps de l’annĂ©e 2000, le groupe UGC a mis en place une carte illimitĂ©e permettant aux bĂ©nĂ©ficiaires de celle-ci, de se rendre autant de fois qu’ils le souhaitent au cinĂ©ma, moyennant le paiement d’une somme annuelle (environ 179 â‚¬). Le rĂ©gime de cette carte est encadrĂ© par la Loi du 15 juillet 2001 ; plus prĂ©cisĂ©ment, l’article 97 de cette mĂŞme loi soumet les exploitants Ă  une autorisation prĂ©alable du CNC. Ă€ la suite de la crĂ©ation de cette carte, des exploitants indĂ©pendants ainsi que des professionnels ont saisi le Conseil de la Concurrence afin de dĂ©noncer l’effet anticoncurrentiel de cette carte. En effet, ils considèrent que les prix de la carte sont abusivement bas violant ainsi l’article L 420-5 du Code de Commerce, et qu’ils entraĂ®nent une Ă©viction des principaux concurrents sur le marchĂ©. Ils ont Ă©tĂ© dĂ©boutĂ©s de leur demande, et ce pour plusieurs raisons. Tout d’abord, la crĂ©ation de cette carte par UGC n’empĂŞche pas ses concurrents de l’adopter Ă©galement ; ainsi, dès le mois d’aoĂ»t de l’annĂ©e 2000, GAUMONT a proposĂ© aussi la carte illimitĂ©e. Aussi, UGC avait pris le soin de respecter les règles qui seront plus tard Ă©noncĂ©es dans la Loi de 2001. De plus, d’après une Ă©tude, les adhĂ©rents de la carte illimitĂ©e vont en moyenne 46 fois par an au cinĂ©ma. Ainsi, le prix de la place de cinĂ©ma s’élève Ă  4,95 â‚¬ ; d’après le Conseil de la Concurrence, tant que ce prix dĂ©passe les 3,05 â‚¬ (coĂ»ts variables), on ne peut pas considĂ©rer que le prix est abusivement bas. Enfin, et contrairement aux idĂ©es reçues, la carte illimitĂ©e ne menace pas le mĂ©tier d’exploitant des salles de cinĂ©ma. En effet, depuis l’institution de cette carte, le nombre d’entrĂ©es vendues a augmentĂ©, ce qui ne peut qu’être positif pour les exploitants.

Réseaux français de cinémas indépendants

Ă€ l'Ă©tranger

Si l'organisation de la filière cinématographique est relativement semblable parmi les grands pays occidentaux, l'importance de l'exploitation varie considérablement. C'est aux États-Unis que le taux d'équipement en salles de cinéma et la fréquentation cinématographique sont les plus élevés, la France se situant également à un haut niveau, dont voici les données pour l’année 2012[19] :

États-UnisFranceAllemagneRoyaume-UniItalieEspagneJaponAustralie
Population (en millions)[20]320648363614712723
Salles de cinĂ©ma39 9185 5024 6173 8173 8144 0003 2901 995
Salles/1 million d'habitants12586566163852687
Fréquentation1360204135172919115586
Entrées/an/habitant4,33,21,62,71,51,91,23,7
Recettes guichet (millions €)8 4381 3061 0331 3526095951 950900
Prix moyen de la place (€)6,206,427,657,886,696,5412,5810,47

Notes et références

Notes

    Références

    1. « GNCR », sur www.gncr.fr (consulté le ).
    2. Laurent Mannoni et Donata Pesenti Campagnoni, Lanterne magique et film peint : 400 ans de Cinéma, Paris, La Martinière/La Cinémathèque française, , 333 p. (ISBN 978-2-7324-3993-8), p. 252.
    3. Laurent Mannoni, La Machine cinéma, Paris, Lienart & La Cinémathèque française, , 307 p. (ISBN 9782359061765), p. 36.
    4. Georges Sadoul, Histoire du cinéma mondial, des origines à nos jours, Paris, Flammarion, , 719 p., p. 11.
    5. Mannoni 2016, p. 38.
    6. Sadoul 1968, p. 16.
    7. Pierre-André Hélène, Une légende au cœur de Paris, Hôtel Scribe Paris, p. 33-45.
    8. Marie-France Briselance et Jean-Claude Morin, Grammaire du cinéma, Paris, Nouveau Monde, , 588 p. (ISBN 978-2-84736-458-3), p. 35.
    9. Charles S. Swartz (editor), Understanding digital cinema, 2005, p. 159..
    10. Philippe Loranchet, Le cinéma numérique : la technique derrière la magie, Éditions Dujarric, Paris, 2000, p. 215..
    11. Voir Philippe Binant, « Au cœur de la projection numérique », Actions, 29, 12-13, Kodak, Paris, 2007.
    12. Cahiers du cinéma, n° hors-série, avril 2000, p. 32..
    13. Claude Forest, « De la pellicule aux pixels : l'anomie des exploitants de salles de cinéma », in Laurent Creton, Kira Kitsopanidou (sous la direction de), Les salles de cinéma : enjeux, défis et perspectives, Armand Colin, Paris, 2013.
    14. Déploiement du cinéma numérique
    15. « AFCAE - Association Française des Cinémas d'Art et d'Essai », sur art-et-essai.org (consulté le ).
    16. https://www.cnc.fr/professionnels/etudes-et-rapports/bilans/bilan-2019-du-cnc_1197070, consulté le 12/06/2020.
    17. https://www.linkedin.com/company/les-cinemas-pathe-gaumont, consulté le 12/06/2020.
    18. « Encaissement moyen du distributeur sur une entrée en salle de... », sur cnc.fr (consulté le ).
    19. http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=98&ref_id=CMPTEF13326
    20. http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=98&ref_id=CMPTEF01105

    Annexes

    Articles connexes

    Liens externes

    Bibliographie

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