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Jean-Baptiste Jourdan

Jean-Baptiste Jourdan, né le à Limoges dans la Haute-Vienne et mort le à Paris, est un militaire français ayant accédé à la dignité de maréchal d'Empire. Fils de chirurgien, il est éduqué par son oncle à la mort de ses parents et décide de s'engager dans l'armée royale. Après une courte participation à la guerre d'indépendance des États-Unis, il retourne à la vie civile et s'installe à Limoges à la tête d'un petit commerce. Au moment où éclate la Révolution française, il adhère aux idées républicaines, ce qui lui permet d'obtenir le commandement d'un bataillon de volontaires.

Favorisé par son républicanisme affiché, Jourdan devient un brillant général de la Révolution : il est vainqueur à Wattignies et surtout à la bataille de Fleurus, le , événement qui sauve la France d'une invasion et qui lui vaut une popularité immédiate. La même année, il remporte encore les batailles de Sprimont et d'Aldenhoven qui permettent le rattachement de la rive gauche du Rhin jusqu’en 1814. Par la suite, ses campagnes de 1796 et de 1799 en Allemagne se révèlent moins heureuses face à l'archiduc Charles et il est battu plusieurs fois, notamment à Amberg, Ostrach et Stockach. Parallèlement à ses activités militaires, il se montre actif en politique et fait voter en 1798 la loi Jourdan-Delbrel qui met en place la conscription. Rallié à Napoléon Bonaparte, il est élevé à la dignité de maréchal d'Empire en 1804.

Toutefois, ses opinions politiques le desservent auprès de l'Empereur et les relations entre les deux hommes restent tendues. Tenu à l'écart des titres, pensions ou dotations, le vainqueur de Fleurus est employé sur des théâtres d'opérations éloignés. D'abord chef d'état-major du roi Joseph à Naples, Jourdan est nommé major général de l'armée d'Espagne en 1808 mais son autorité se révèle rapidement contestée. Présent à la bataille de Talavera en 1809, puis à celle de Vitoria en 1813, il est rendu responsable de cette défaite par Napoléon et tombe en disgrâce. Après la chute de l'Empire, il mène une belle carrière au service des Bourbons et devient gouverneur des Invalides jusqu'à sa mort, en 1833.

Soldat sans génie militaire particulier, Jourdan se révèle en revanche un organisateur talentueux. Sous la Révolution, sa capacité à mettre rapidement sur le pied de guerre des armées dénuées de tout explique en grande partie ses succès. Conscient de ses lacunes, il n'en accepte pas moins à plusieurs reprises des postes à hautes responsabilités, et ce malgré un contexte défavorable qui le conduit souvent à l'échec. À Sainte-Hélène, l'Empereur rend hommage à son ancien subordonné : « en voilà un que j'ai fort maltraité assurément. Rien de plus naturel sans doute que de penser qu'il eût dû m'en vouloir beaucoup. Eh bien, j'ai appris avec un vrai plaisir, qu'après ma chute, il est demeuré constamment bien. Il a montré là cette élévation d'âme qui honore et classe les gens. Du reste, c'est un vrai patriote ; c'est une réponse à bien des choses. »

Biographie

La maison natale de Jourdan, Ă  Limoges.

Carrière militaire

Fils de M. Roch Jourdan, maître-chirurgien à Meyrargues et Limoges, il est d'abord commis en soieries chez un de ses oncles à Lyon[1] ; puis il s'engage en 1778 comme simple soldat et rejoint l'île de Ré où, après un entraînement de huit mois, il incorpore le régiment d'Auxerrois qui combattait dans la guerre d'indépendance des États-Unis d'Amérique[2]. Après avoir participé aux opérations de cette campagne et notamment au siège de Savannah (1779), il est réformé en 1784 et revient à Limoges où il se marie et s'établit comme mercier en 1788[3].

Ayant adhéré avec enthousiasme aux idées révolutionnaires et du fait de son expérience militaire, il devient capitaine d'une compagnie de chasseurs de la Garde nationale en 1790[4]. En 1791, il est chargé de l'organisation des volontaires de la Haute-Vienne et est élu lieutenant-colonel du 2e bataillon qu'il conduit à l'armée du Nord[5].

Combats au sein de l'armée du Nord

Jean-Baptiste Jourdan, lieutenant-colonel au 2e bataillon de la Haute-Vienne en 1792. Peinture commencée par Julie Volpelière et achevée par Horace Vernet, 1834, château de Versailles.

Il fait la campagne de Belgique sous Dumouriez. Avec l'armée du Nord, il participe aux batailles de Jemmapes () et de Neerwinden ()[6].

Il se distingue notamment aux environs de Namur, lors de la retraite de l'armée. Le , il est élevé au grade de général de brigade, et à celui de général de division le 30 juillet suivant. Il commande à la bataille d'Hondschoote, où il est blessé en enlevant les retranchements ennemis à la tête de ses troupes. Le 26 septembre, il remplace Houchard au commandement de l'armée. Il est bientôt commandant de l’armée des Ardennes, puis de l'armée du Nord et bat le prince de Cobourg à Wattignies (15-), disputée avec acharnement dans un combat de 48 heures, et le força à lever le blocus de Maubeuge.

Destitué de ses fonctions

Voulant prendre l'offensive, le Comité de salut public appelle Jourdan à Paris. Celui-ci fait valoir que l'armée n'est composée que de nouvelles recrues, la plupart sans armes ni habits, et qu'il vaut mieux passer l'hiver sur la défensive, pour être en état d'attaquer au printemps. Ses plans sont adoptés, mais sa réticence n'est pas oubliée, et dès que les troupes sont en état d'agir, il est remplacé par Jean-Charles Pichegru.

Le Comité de salut public prend même un arrêté par lequel il ordonne la destitution et l'arrestation du général Jourdan, mais des représentants du peuple près de l'armée prennent sa défense, et le Comité se borne de proposer à Barère de le mettre à la retraite. Destitué en , il reprend son commerce à Limoges.

Retour à l'armée

Lors de la bataille de Fleurus, Jourdan remporte une victoire Ă©clatante sur les Autrichiens.

Cependant, il est employĂ© de nouveau et obtient le commandement de l'armĂ©e de la Moselle. Il ouvre la campagne de 1794 par le combat d'Arlon, oĂą les Autrichiens, forts de 16 000 hommes, sont complètement battus. Il reçoit ensuite l'ordre de traverser les Ardennes et de rĂ©unir 40 000 hommes devant Charleroi et l'aile droite de l'ArmĂ©e du Nord, ce qu'il exĂ©cute avec habiletĂ©. Ses troupes reçoivent le nom d'ArmĂ©e de Sambre-et-Meuse.

Jourdan passe la Sambre et remporte la victoire dĂ©cisive de Fleurus (), permettant Ă  la France rĂ©volutionnaire d'annexer la Belgique. Pour la première fois sur un champ de bataille, un ballon captif informe Jourdan des mouvements et des attaques de l'armĂ©e autrichienne, ce dernier pouvant alors concentrer ses canons sur le point menacĂ©[7]. Le « vainqueur de Fleurus », dont les effectifs se montent Ă  prĂ©sent Ă  plus de 100 000 hommes, livre la bataille de Sprimont le , oĂą une attaque conjuguĂ©e sur les deux ailes autrichiennes forcent le gĂ©nĂ©ral Clerfayt Ă  abandonner ses positions sur la Meuse. Quelques semaines plus tard, le , un nouvel affrontement oppose Clerfayt, retranchĂ© derrière la Roer, Ă  Jourdan dont les troupes se rendent rapidement maĂ®tres du plateau d'Aldenhoven, coupant quasiment en deux le dispositif autrichien. Sur l'aile droite française, SchĂ©rer livre un combat difficile pour la possession du village de DĂĽren jusqu'Ă  ce que la colonne du gĂ©nĂ©ral Hacquin, Ă©garĂ©e dans sa marche, ne dĂ©bouche sur le champ de bataille, ce qui prĂ©cipite la retraite autrichienne[8].

Il bat l'ennemi dans plusieurs combats, reprend les places de Landrecies, Le Quesnoy, Valenciennes et Condé, fait la conquête de celles de Charleroi, Namur, Juliers et Maestricht, rejoint Pichegru à Bruxelles et plante ses drapeaux sur le Rhin depuis Clèves jusqu'à Coblentz.

En septembre 1795, il lance conjointement avec Pichegru la première campagne d’Allemagne et franchit le Rhin au niveau de Düsseldorf grâce à son subordonné Kléber. L’échec et le retour sur la rive gauche sont actés dès novembre. La trahison de Pichegru est un élément d’explication décisif.

Lors de la deuxième campagne d’Allemagne qui débute fin mai 1796, il est sévèrement battu par l'archiduc Charles à Amberg le 24 août puis à Wurtzbourg le . Le même mois, Jourdan quitte son armée de Sambre-et-Meuse où il est remplacé par Beurnonville puis le général Hoche[9]. Son manque de coordination avec l’armée de Rhin et Moselle dirigée par Moreau plus au sud explique largement son échec, plus grave que le précédent de 1795.

Carrière politique

Jean-Baptiste Jourdan (gravure tirée de l'« Album du Centenaire »).

Jourdan ayant quitté le commandement de l'armée est nommé en , par le département de la Haute-Vienne, au conseil des Cinq-Cents[9]. Le 23 septembre, il est élu président, et le secrétaire. Réélu président le 24 septembre, il donne sa démission en octobre, annonçant que le Directoire le destine au commandement des armées.

Dans l'exercice de ses fonctions législatives, il fait adopter la loi sur la conscription du , qui rend le service militaire obligatoire pour les hommes de vingt à vingt-cinq ans. Ces derniers sont répartis selon leur âge en cinq classes appelées successivement à la guerre. Cette loi, rédigé par Jourdan conjointement avec le député Pierre Delbrel, prend le nom de loi Jourdan-Delbrel.

Passage à l'armée du Danube

Général de l'armée autrichienne, l'archiduc Charles bat Jourdan à Ostrach et Stockach, forçant l'armée française à repasser le Rhin (peinture de Johann Seele, 1800).

En 1795, il reprend le commandement de l'armĂ©e de Sambre et Meuse. Il prend possession de la forteresse de Luxembourg qui capitule. En septembre, il passe le Rhin de vive force, en prĂ©sence d'un corps de 20 000 Autrichiens et s'empare de DĂĽsseldorf. L'armĂ©e de Clerfayt rĂ©unie sur la Lahn n'ose pas courir le risque d'une bataille et se replie au-delĂ  du Main. Jourdan la poursuit, prend position entre Mayence et Höchst, oĂą passe la ligne de neutralitĂ© convenue avec la Prusse.

Pichegru, qui a traversĂ© le Rhin Ă  Mannheim, et aurait dĂ» s'avancer avec la majeure partie de ses forces sur le Main pour couper la retraite Ă  Clerfayt et opĂ©rer sa jonction avec l'ArmĂ©e de Sambre-et-Meuse, se borne Ă  porter sur Heidelberg un corps de 10 000 hommes, qui est complètement battu en quelques jours. Clerfayt, rassurĂ© par l'inaction de Pichegru, tire des renforts de l'armĂ©e autrichienne du Haut-Rhin, franchit la ligne de neutralitĂ© au-dessus de Francfort, et manĹ“uvre pour envelopper l'ArmĂ©e de Sambre-et-Meuse entre la Lahn, le Main et le Rhin.

Ces circonstances contraignent Jourdan à la retraite. Peu après, ayant forcé les lignes de Mayence, Jourdan marche au secours de l'Armée de Rhin-et-Moselle. Après une courte mais brillante campagne dans le Hunsrück, il convint d'un armistice, et la guerre ne reprend qu'au printemps suivant.

Lors de la deuxième campagne d’Allemagne de 1796, il passe alors de nouveau le Rhin fin mai, force le gĂ©nĂ©ral Wartensleben Ă  battre en retraite, s'empare de Francfort et de Wurtzbourg et se porte vers Ratisbonne. AttaquĂ© par l'archiduc Charles Louis d'Autriche qui recule devant Moreau et vient au secours de Wartensleben avec 40 000 hommes, il se replie sur le Rhin Ă  la suite de la dĂ©faite de Amberg en aoĂ»t. Sa retraite est surtout causĂ©e par les mauvaises consignes donnĂ©e aux armĂ©es par le gouvernement, et par le parti-pris de Moreau qui prĂ©fère une victoire facile sur le Lech au lieu de poursuivre l'archiduc Charles.

Face Ă  l'archiduc Charles

Par ses prĂ©tentions exagĂ©rĂ©es Ă  Rastadt, et ses entreprises en Italie et en Suisse, le Directoire, qui arme toute l'Europe contre lui, nĂ©glige nĂ©anmoins de lever des armĂ©es capables de tenir tĂŞte Ă  l'orage, et ouvre les hostilitĂ©s avant d'avoir rĂ©uni tous les moyens dont il dispose. Lorsque l'ArmĂ©e du Danube, commandĂ©e par Jourdan qui franchit Ă  Kehl le Rhin le pour la cinquième fois (après les prĂ©cĂ©dents de octobre 1792, septembre 1795, mai-juin 1796 et avril 1797) entre en Souabe, elle ne compte que 38 000 hommes et ne tarde pas Ă  se trouver en prĂ©sence de l'archiduc Charles qui rĂ©unit, lui, plus de 65 000 hommes sous ses ordres. Il est battu Ă  Ostrach le et Stockach le [note 1] au nord du lac de Constance. L'avantage remportĂ© n'est pas aussi considĂ©rable que l'espĂ©rait Jourdan, il continue sa retraite et se porte vers les dĂ©bouchĂ©s de la ForĂŞt-Noire. Le gĂ©nĂ©ral Jourdan doit alors effectuer une retraite puis est disgraciĂ© pour la troisième fois. Le 9 avril, il est remplacĂ© par AndrĂ© MassĂ©na. Il quitte dĂ©finitivement ce vaste front du nord-est de la France oĂą il servait depuis 1792 (Belgique, RhĂ©nanie et Allemagne).

Le , pour l'anniversaire de la prise de la Bastille, le général Jourdan porte un toast « à la résurrection des piques »[10]. La même année, il achète le château du Coudray (dans l'actuel département de l'Essonne)[11].

Le Consulat

Réélu au Conseil des Cinq-Cents en , il tente en vain de s'opposer au coup d'État du 18 brumaire an VIII (). Parce qu'il ne marche pas sous la bannière du général Bonaparte, il est exclu du corps législatif, et momentanément condamné à être détenu dans la Charente-Inférieure. Le général Lefebvre s'interpose et plaide la cause de Jourdan devant Napoléon[9]. Ce dernier le nomme alors le inspecteur général de l'infanterie et de la cavalerie[9] - [12], puis ambassadeur en république cisalpine[9] - [13], administrateur général du Piémont[14], conseiller d'État (1802)[15]. En janvier 1804, élu candidat au Sénat conservateur par le collège électoral de la Haute-Vienne, il est appelé au commandement en chef de l'armée d'Italie en remplacement de Joachim Murat[16].

Jourdan en Italie

Portrait en pied du maréchal Jean-Baptiste Jourdan, par Eugène-Louis Charpentier. Jourdan pose ici près d'une borne indiquant la route de Fleurus, rappelant sa victoire de 1794.

Le , il est toujours en Italie lorsqu'il apprend son élévation à la dignité de maréchal d'Empire (quatrième dans l'ordre des préséances)[17] et escorte à ce titre le carrosse de l'Empereur lors de la cérémonie du Sacre[18]. Cette dignité tient plus du désir de l'Empereur de rallier autour de lui les officiers jacobins que des talents militaires qu'il reconnaît à Jourdan[9].

Il était parmi les maréchaux francs-maçons[19].

Il est fait grand aigle de la LĂ©gion d'honneur le [18]. En juin 1805, il reçoit l'ordre de Saint-Hubert de Bavière, et le nouveau gouverneur de Lombardie commande les manĹ“uvres du camp de Castiglione, lors du couronnement de NapolĂ©on, comme roi d'Italie[20]. RemplacĂ© Ă  l'armĂ©e par MassĂ©na au moment oĂą la guerre Ă©clate, il se plaint amèrement Ă  l'Empereur, et en 1806 est envoyĂ© Ă  Naples en qualitĂ© de gouverneur de cette ville, oĂą il se lie d'amitiĂ© avec le roi Joseph. L'invasion de la Sicile sous les ordres du marĂ©chal est envisagĂ©e mais l'idĂ©e est finalement abandonnĂ©e[21]. Le souverain, apprenant qu'il devenait roi d'Espagne, dĂ©core Jourdan de l'ordre des Deux-Siciles auquel s'ajoutent 300 000 ducats[22].

Major-général de l'armée d'Espagne

Le maréchal Jourdan.

En 1808, il passe en Espagne en qualité de major général sous le roi Joseph qu'il suit constamment à titre de conseiller militaire. Ses ordres se heurtent toutefois à l'hostilité des autres maréchaux qui entendent n'obéir qu'aux ordres de l'Empereur[23] - [24]. Joseph, de son côté, peu au fait de la stratégie, n'en prend pas moins à plusieurs reprises le commandement en chef, ce qui aboutit à des conséquences néfastes[23]. C'est dans ces conditions difficiles que Jourdan s'attelle à sa tâche : sa première préoccupation est alors l'armée anglo-espagnole des généraux Wellesley et la Cuesta, qui viennent de repousser Soult au Portugal[25]. Jourdan parvient à convaincre le roi de laisser s'avancer les soldats adverses vers Madrid, pour les encercler avec l'aide des troupes de Soult arrivant du nord[26]. Le jour de la bataille de Talavera, les directives du major général sont cependant bafouées par l'impatience du maréchal Victor qui obtient de Joseph l'autorisation d'attaquer les Anglais retranchés sur une colline[27]. Après avoir résisté pendant trois jours aux assauts français, Wellesley se retire, échappant à la destruction[28].

Dégoûté d'avoir l'apparence du commandement sans la réalité, Jourdan sollicite son rappel qu'il obtient en , et se retire dans sa terre du Coudray (Seine-et-Oise). Il vit au sein de sa famille lorsque l'Empereur, déterminé à faire la guerre à la Russie, lui ordonne en 1811 de retourner en Espagne avec sa première qualité, répondant ainsi à la requête de son frère dont la mésentente avec Soult est flagrante[29]. C'est pendant cette seconde période qu'a lieu la retraite de Madrid où il était gouverneur depuis le et qu'est donnée la bataille de Vitoria. Joseph, qui désire affronter l'ennemi, ignore Jourdan qui lui conseille d'attendre des renforts et d'envoyer le convoi transportant sa cour et son trésor vers la France[30]. Le maréchal, malade, ne peut assurer aucun commandement lors du combat[30], qui s'achève sur une défaite décisive des troupes françaises. Jourdan perd son bâton de maréchal lorsque la voiture du roi est attaquée par les Anglais[31]. À Napoléon qui fait peser sur lui l'entière responsabilité de la défaite, il demande sa mise à la retraite[32].

On a longtemps imputé au maréchal Jourdan le mauvais succès de cette journée, mais il n'y commande ni de droit ni de fait, et ses conseils éprouvent de nombreuses contradictions.

Chute de l'Empire et Restauration

Après la bataille de Vitoria, il rentre en France et reste sans activité jusqu'à l'année suivante, où il est néanmoins nommé à la tête de la 19e division militaire, commandement qui est confirmé à la Restauration[23].

Le , il envoie de Rocou son adhésion à tous les actes du gouvernement provisoire, est créé chevalier de Saint-Louis le 2 juin, et se retire à la campagne après le . Napoléon l'appelle à la Chambre des pairs au mois de juin[33] et l'envoie à Besançon en qualité de gouverneur de cette place et de la 6e division militaire[23] - [34]. Sous la seconde Restauration, il se rallie à nouveau à la monarchie. Il préside le conseil de guerre qui doit juger le maréchal Ney, et qui se déclare incompétent. Il refuse par la suite la présidence du nouveau tribunal qui doit juger et condamner son ancien frère d'armes. En 1817, il est nommé gouverneur de la 7e division militaire, et le le roi l'appelle à la Chambre des pairs après l'avoir créé comte (majorat non constitué). À la chambre haute, il se montre le défenseur des libertés octroyées par la Charte de 1814 et vote avec le parti constitutionnel.

Il est fait commandeur de l'ordre du Saint-Esprit le [35].

Monarchie de Juillet

Après la révolution de juillet 1830, il est brièvement ministre des Affaires Étrangères[6] au cours du ministère provisoire formé le 1er août.

Le , il est nommé gouverneur des Invalides[6].

Il meurt à Paris le . Ses obsèques ont lieu à l'église de l'Hôtel des Invalides dans les caveaux duquel ses restes sont déposés.

Les papiers personnels de Jean-Baptiste Jourdan sont conservés aux Archives nationales sous la cote 194AP[36].

Considérations

« Le général Jourdan était très brave un jour de combat, en face de l'ennemi et au milieu du feu ; mais il n'avait pas le courage de tête au milieu du calme de la nuit, à deux heures du matin. Il ne manquait pas de pénétration, de facultés intellectuelles, mais il était sans résolution et imbu des plus faux principes de la guerre[23]. »

— Napoléon Ier à Sainte-Hélène.

Statue du maréchal Jourdan à Limoges.

Seul général de la Révolution, avec André Masséna, à avoir été honoré du qualificatif de « sauveur de la patrie » pour sa victoire de Fleurus[37], Jourdan n'a cependant jamais bénéficié d'une formation militaire adéquate, ce qui explique en partie le manque de confiance en soi qu'il manifeste dans ses premières batailles. À Wattignies, il apparaît ainsi dépassé par ses responsabilités et seule la présence de Carnot à ses côtés lui permet d'enlever la décision[38]. S'il remporte dans un premier temps des succès face à des généraux plus expérimentés que lui mais issus de la « vieille école », dans le cadre d'affrontements comparables aux chocs frontaux du Moyen Âge, ses talents sont insuffisants pour battre des capitaines plus habiles comme l'archiduc Charles ou Wellington[39]. Son biographe René Valentin écrit :

« Du génie, il n'en a point, il serait fou de lui en attribuer. Tout ce qu'il sait, il l'a appris par l'expérience des champs de bataille et peut-être aussi dans quelques ouvrages techniques. C'est fort peu de choses. En étudiant ses campagnes, plus encore en parcourant le récit qu'il en fit, on sent en lui un primaire de l'art militaire, qui récite une leçon bien apprise. Mais il n'y a aucune étincelle, aucun trait, aucun acte vraiment original ou personnel[40]. »

La bataille de Fleurus doit en revanche beaucoup à son action personnelle et en particulier à l'utilisation judicieuse de ses réserves qui lui permet d'intervenir aux endroits les plus critiques du champ de bataille[41]. Pour Richard Dunn-Pattison, « la victoire fut obtenue grâce au courage moral avec lequel il [Jourdan] jeta sa dernière réserve dans la mêlée »[42]. Le même spécialiste le cite un peu plus loin comme « l'un des plus brillants généraux de la France républicaine »[43]. L'historien militaire américain John R. Elting le décrit comme « brave, énergique, sûr de lui, doté de capacités d'organisateur et d'un caractère obstiné », sachant mettre à profit sa supériorité numérique pour l'emporter en dépit d'un style de commandement plutôt décousu[44]. Ayant la faculté de s'entourer de généraux de talent comme Kléber, Marceau ou Lefebvre[45], il se montre aussi très attentif aux conditions de vie de ses soldats, une caractéristique assez rare chez les généraux d'alors[46]. Sous la Révolution, il parvient, avec l'aide de son chef d'état-major Ernouf, à mettre sur le pied de guerre des armées souvent démoralisées et mal équipées[47] - [48], ce qui lui vaut d'être respecté par ses troupes[46].

Son passage en Espagne, entre 1808 et 1813, se solde en revanche par un Ă©chec, sanctionnĂ© par la dĂ©faite de Vitoria qui met fin Ă  la domination française en Espagne[49]. Cela s'explique notamment par son incapacitĂ© Ă  s'imposer auprès des autres marĂ©chaux qui ne reconnaissent le plus souvent ni son autoritĂ© ni celle du roi Joseph, s'en remettant aux ordres de l'Empereur. De fait, ses avis ne sont gĂ©nĂ©ralement pas Ă©coutĂ©s, comme Ă  Talavera oĂą il ne parvient pas Ă  convaincre le roi Joseph d'attendre l'arrivĂ©e du corps de Soult[50]. Jean Sarramon remarque Ă  ce sujet que Jourdan « avait des vues justes et du bon sens, mais pas assez d'Ă©nergie pour communiquer Ă  Joseph la volontĂ© de surmonter ses hĂ©sitations »[51]. Le marĂ©chal rĂ©vèle pourtant des qualitĂ©s de stratège par la conception de plans qui, en 1809 et en 1812, conduisent l'armĂ©e britannique au bord du dĂ©sastre[52]. L'historien britannique Charles Oman Ă©crit ainsi que « le plan de campagne de Jourdan [pour l'annĂ©e 1812] Ă©tait sensĂ© et rĂ©alisable ; son adoption aurait permis d'attĂ©nuer les effets de la stratĂ©gie de Wellington et contribuĂ© Ă  limiter ses succès. Ce fut Soult qui compromit le plan tout entier par une dĂ©sobĂ©issance caractĂ©risĂ©e allant Ă  l'encontre de la discipline militaire aussi bien que du simple bon sens »[53].

D'autres spécialistes émettent cependant un jugement plus sévère. Richard Humble, auteur d'un ouvrage consacré aux maréchaux français dans la péninsule Ibérique, considère que « l'un des plus graves péchés par omission commis par Napoléon dans sa gestion désinvolte des affaires de la péninsule fut d'employer Jourdan sur ce théâtre d'opérations ». Selon lui, Jourdan ne s'est pas montré à la hauteur de sa tâche, particulièrement aux heures cruciales de la campagne de Vitoria, où il se révèle comme « l'antithèse absolue de ce que devrait être un bon chef d'état-major : il n'était plus qu'un homme souffreteux, négligent et inerte ». Dans le classement établi par Humble pour évaluer les mérites respectifs des maréchaux ayant servi dans la péninsule pour une longue durée, Jourdan figure à la dernière place, juste derrière Victor[54].

Titres

Toute sa vie, Jourdan aura espéré, en vain, le titre de « duc de Fleurus », mais Napoléon se méfiait de ce général républicain auréolé de sa victoire de Fleurus. L’Empereur fait remarquer à Lannes au sujet de ce titre convoité par Jourdan :

« qu’il [Jourdan] aurait un titre plus beau que le mien car je n’ai jamais remporté une victoire ayant sauvé la France[57] »

.

DĂ©corations

Hommage, honneurs et mentions…

Autres fonctions

Famille

Jean-Baptiste Jourdan Ă©pouse, le Ă  Limoges, Jeanne Nicolas (morte le Ă  Limoges) dont il a cinq filles[6] :

  • AngĂ©lique Catherine (1791- Ă  Naples)
  • Camille (morte en 1842)
  • Jeanne Madeleine Delphine (1797-1839)
  • Sophie Catherine (morte en 1820)
  • Nina (1800-1833)

Camille se marie en 1808 avec Paul FĂ©lix Ferri-Pisani, comte de Saint-Anastace et de l'Empire[59] - [note 2].

Jeanne épouse en 1815 Jean-Joseph Pougeard du Limbert (1786-1848), général de brigade et député de la Charente[60].

Il compte parmi sa descendance le Général de division Jacques Navelet[61]

Armoiries

Jean-Baptiste Jourdan ne semble pas avoir reçu de blason, toutefois, le maréchal utilisait un blason directement construit autour de son monogramme[55].

Image Noms et blasonnement
Sous le Premier Empire :

D'azur, aux lettres JBJ enlacées d'or ; à la bordure d'argent, besantée de sable[55] - [56].

Sous la Restauration française, membre de la Chambre des pairs, chevalier de l'Ordre du Saint-Esprit,

Publications

  • PrĂ©cis des opĂ©rations de l'armĂ©e du Danube sous les ordres du gĂ©nĂ©ral Jourdan, Paris, 1799.
  • MĂ©moires pour servir Ă  l'histoire de la campagne de 1796, contenant les opĂ©rations de l'armĂ©e de Sambre-et-Meuse sous les ordres du gĂ©nĂ©ral en chef Jourdan, Paris, 1818.
  • MĂ©moires militaires Ă©crits par lui-mĂŞme, publiĂ©s d'après le manuscrit original par le vicomte de Grouchy, Paris, 1899[62].

Notes

  1. Les hostilitĂ©s commencèrent le 20 mars. Le lendemain, trois divisions françaises soutinrent Ă  Ostrach, contre toute l'armĂ©e autrichienne, le combat le plus opiniâtre, et n'abandonnèrent leur position qu'après avoir fait Ă©prouver une perte considĂ©rable aux ennemis. Jourdan, convaincu qu'en persistant Ă  lutter contre des forces aussi supĂ©rieures, il compromettrait son armĂ©e, prit la dĂ©termination de se rapprocher du Rhin, dans l'espĂ©rance d'y recevoir les secours dont il avait besoin pour reprendre l'offensive. Il fit sa retraite en bon ordre et fut suivi mollement par l'archiduc. S'Ă©tant aperçu le 24 que ce prince avait mal disposĂ© ses troupes aux environs de Stokach, il espĂ©ra que cette circonstance balancerait la disproportion de ses forces avec celles de ses adversaires ; il attaqua donc l'archiduc le lendemain Ă  Liebtingen, lui fit 4 000 prisonniers, prit 2 pièces de canon, coucha sur le champ de bataille et y sĂ©journa le jour suivant.
  2. L'aîné de ses petits-enfants fut autorisé à prendre le nom de Ferri-Pisani-Jourdan par ordonnance du .

Références

  1. Hulot 2010, p. 29.
  2. Hulot 2010, p. 34.
  3. Hulot 2010, p. 38 et 41.
  4. Hulot 2010, p. 47.
  5. Hulot 2010, p. 50 et 54.
  6. Capelle et Demory 2008, p. 21
  7. Pascal Guy, « Ballons : la République met un œil dans le ciel », Guerres & Histoire, no 5,‎ , p. 81 (ISSN 2115-967X).
  8. Hulot 2013, p. 486 et 487 ; 616.
  9. Capelle et Demory 2008, p. 22
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  19. Les Francs-maçons de la Grande armée sur le site Histoire pour tous
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Annexes

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

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