Accueil🇫🇷Chercher

Beutepanzer

Beutepanzer (Ă©tym. « blindĂ© de prise Â») est le nom gĂ©nĂ©rique donnĂ© par les Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale aux vĂ©hicules blindĂ©s, principalement des chars d'assaut, capturĂ©s Ă  l'ennemi, afin de les Ă©tudier ou de les remettre en service au sein de leurs propres forces armĂ©es.

Char de combat français Hotchkiss H-39 de la Wehrmacht en Yougoslavie en 1941.

Étymologie

Ce terme est formé des mots allemands Beute (proie ou butin en allemand, même racine que le mot français butin) et Panzer (blindé).

Première Guerre mondiale

Un Mark IV femelle avec le marquage des Forces armées de l'Empire allemand en 1918.
Atelier de réparation de chars allemands avec une douzaine de Mark IV à Charleroi en Belgique, en 1918. C'est un des éléments du parc automobile de l’armée bavaroise no 20 chargés de l'entretien des chars et camions à chenilles allemands et pour la restauration des chars ennemis capturés sur le front de l'Ouest.
Char britannique Mark IV capturé par l'Allemagne et utilisé par la République de Weimar pour combattre la révolte spartakiste de Berlin de 1919. Le texte allemand dit « combats de rue à Berlin durant la grève générale ».

Le char de combat a été conçu par les Alliés français et britanniques durant la Première Guerre mondiale pour percer les lignes allemandes. Le secret de cette nouvelle arme a été préservé le plus longtemps possible. Ainsi, les Britanniques les désignaient tanks (réservoirs) afin de dissimuler aux espions allemands à quoi allaient réellement servir les milliers de plaques d’acier utilisées pour leur fabrication. Lorsque ces engins sont apparus sur le front en 1916, ce fut une complète surprise pour les Allemands qui n’avaient rien d’équivalent à leur opposer. Seuls des tirs directs d’artillerie parvenaient à les détruire. Cependant ces engins encore primitifs souffraient de nombreuses pannes, et un grand nombre de tanks britanniques (le plus souvent des Mark IV) tombèrent intacts aux mains des Allemands. Ceux-ci lancèrent leur propre programme de fabrication de char d'assaut (les A7V[1]). Dans l’immédiat, les blindés capturés furent repeints aux couleurs allemandes (camouflage et marques de nationalité « croix de fer » noire) et ceux réutilisés au front rassemblés en escadrons nommés divisions de chars lourd au sein du Schwere Kampfwagen-Abteilung (de)[2]. Fin , ces unités rassemblaient 35 blindés déclarés prêts au combat dans sept escadrons sur 170 en état de marche, soit plus que les blindés de production nationale : seulement 20 ou 21 A7V avaient été construits[3] dont 15 étaient dans trois escadrons au front.

Parmi les chars alliés capturés par les Allemands, au moins quinze sont des Mark A Whippet, dont deux en état de marche[4]. Ils ont été conservés exclusivement pour des tests et à des fins d’entraînement pendant la guerre, mais l’un d’entre eux a été utilisé par la suite par le corps franc au cours de la révolution allemande de 1918-1919. Les Allemands leur ont donné le nom de Beutepanzer A[5].

Seconde Guerre mondiale

C'est durant la Seconde Guerre mondiale que ce terme a eu la plus large utilisation. On distingue trois types de Beutepanzer.

Véhicules simplement étudiés

Ils livrent des renseignements importants sur les avancées technologiques de l’ennemi, et l’étude de leur blindage permet de mettre au point des armes plus efficaces capables de le percer.

En octobre 1940, l’État-major de l'armée de terre ordonnait à toutes les unités terrestres, pour chaque type de blindé ou autre véhicule capturé, d’en expédier deux exemplaires à Berlin pour étude par les services techniques Heereswaffenamt (HWA).

VĂ©hicules remis en service dans la Wehrmacht

À partir de 1942, les Allemands commencèrent à combattre en infériorité numérique face aux Alliés sur tous les fronts. Les matériels arrivaient d'Allemagne en quantité toujours insuffisante. Les troupes allemandes utilisèrent donc tous les véhicules ennemis qu'elles capturaient en état de marche, ou réparables sur place. Ceci concernait aussi bien les véhicules non blindés (automobiles, camions, semi-chenillés) que les blindés. Afin d'éviter les tirs fratricides, des marques de nationalité allemandes (la croix noire dite croix grecque ou Balkenkreuz) y étaient peintes. Elles étaient souvent de plus grandes dimensions et à davantage d'emplacements que sur les véhicules de fabrication allemande. En effet la silhouette des engins ennemis, notamment les chars d’assaut, était bien connue des unités antichars allemandes, qui tiraient à vue.
Plus rarement, lorsqu’on avait le temps et les moyens (peinture), l'engin recevait un camouflage allemand réglementaire.
Des documentations techniques en allemand furent rédigées pour que les troupes allemandes puissent effectuer l’entretien de ces matériels. Lorsque ces engins se révélaient assez efficaces sur un plan militaire, et qu’un ravitaillement régulier en carburant adapté à leurs moteurs, en munitions du bon calibre et en pièces de rechange pouvait être assuré, les engins ex-ennemis devenaient une partie intégrante de la Wehrmacht.
Leur rôle dépassa largement celui d’un simple appoint. Le Deutsches Afrikakorps (D.A.K.) du maréchal Erwin Rommel, qui combattait en Afrique du Nord avec un ravitaillement toujours insuffisant parvenant d’Europe, a compté jusqu’à 85 % de véhicules pris à l’ennemi dans son parc automobile.

Véhicules modifiés

La machine de guerre nazie ne pouvait entretenir son énorme effort de guerre qu'en consommant les ressources des pays et régions dont elle s'était emparée successivement.
À plusieurs reprises, les engins capturés dans les usines et les dépôts de matériel de l’ennemi, parfois intacts et en grand nombre, furent renvoyés en usine pour être modifiés et adaptés au besoin de la Wehrmacht, par l’adjonction de blindage supplémentaire ou le remplacement de l’armement d’origine par un armement allemand, afin de simplifier le ravitaillement. En effet, la plupart du temps les calibres allemands et français ou britanniques n’étaient pas les mêmes.

Ainsi, Ă  l’issue de la campagne de France de mai-juin 1940, les Allemands rĂ©cupĂ©rèrent 691 blindĂ©s britanniques, dont environ 350 Ă©taient susceptibles d’être rĂ©utilisĂ©s. Cependant un ravitaillement suffisant en munitions ne pouvait ĂŞtre assurĂ© pour les plus grands vĂ©hicules. Pour pouvoir les rĂ©utiliser, certains châssis furent transformĂ©s en transports de munitions ou blindĂ©s d'observation. D'autres reçurent un nouvel armement allemand, et devinrent ainsi des automoteurs d’artillerie ou des chasseurs de chars. Les vĂ©hicules trop endommagĂ©s pour ĂŞtre rĂ©parĂ©s furent « cannibalisĂ©s » pour fournir des pièces de rechange aux autres.

La transformation de véhicules français capturés était la spécialité du Baukommando Becker.

Fabrication poursuivie sous le contrĂ´le allemand

Dans de plus rares cas, les usines de blindés sont tombées intactes aux mains des Allemands. Cela leur a permis de poursuivre la production pour leur propre compte.

  • C’est le cas de l’Autriche lors de l’Anschluss en 1938, mais surtout de la TchĂ©coslovaquie en 1939, dont l’industrie d'armement Ă©tait très rĂ©putĂ©e pour la qualitĂ© de ses fabrications.
  • Ce fut aussi le cas des usines situĂ©es dans le nord de l’Italie en 1943.
  • Sur le front de l’Est, au printemps 1943 une unitĂ© blindĂ©e de la Waffen-SS occupait une usine de tracteurs situĂ©e Ă  Kharkov, en Ukraine, et convertie en usine de chars T-34. Les SS continuèrent la production de ces chars, qui Ă©quipèrent par exemple le dĂ©tachement no 2 de chasseurs de chars de la 2e division SS Das Reich.

DĂ©signation officielle

Les services techniques attribuaient à chaque modèle utilisé en grand nombre une désignation officielle. Celle-ci était composée d’un numéro de véhicule Sonderkraftfahrzeug non attribué à un engin allemand, suivi d’une lettre entre parenthèses qui indiquait le pays d'origine :

Parfois la désignation de l'engin était fort complexe, lorsque des transformations avaient été apportées : par exemple, un canon tchèque monté sur un châssis français, un canon soviétique sur un châssis tchèque, etc. Chacun des éléments conservait la lettre de son pays d’origine.

Liste des principaux Beutepanzer utilisés par la Wehrmacht entre 1939 et 1945

Char de combat Skoda LT vz 35

DĂ©signation allemande : Panzerkampfwagen 35(t). Ces chars participèrent Ă  l’invasion de la Pologne en septembre 1939, puis de la France en mai 1940, et de l'Union soviĂ©tique en juin 1941. L'hiver 1941-1942, le plus froid depuis vingt ans, leur fut fatal. En effet, leurs servocommandes Ă  air comprimĂ© (freins, transmission et mĂ©canisme de direction) avaient tendance Ă  geler. Ce char dĂ©sormais dĂ©passĂ© fut donc retirĂ© du service, et les châssis utilisĂ©s comme tracteurs d'artillerie lourde (mortiers de 210 mm) et pour le ravitaillement des unitĂ©s blindĂ©es[6].

Char de combat ÄŚKD LT vz 38

DĂ©signation allemande : Panzerkampfwagen 38(t). Entre 1939 et 1942, plus de 1 400 exemplaires de cet excellent blindĂ© furent produits sous contrĂ´le allemand. La force de chars qui envahit la France en mai 1940 comptait 25 % de chars Panzerkampfwagen 38(t) ce qui est considĂ©rable[7]. Avec leur canon de 38 mm, ils Ă©taient mieux armĂ©s que les Panzer I (2 mitrailleuses de 7,92 mm) et Panzer II (1 canon de 20 mm) de fabrication allemande. Ils atteignirent leurs limites lors de l'invasion de l'Union soviĂ©tique en juin 1941 : leur blindage et leur armement ne faisaient plus le poids face aux chars soviĂ©tiques comme l'excellent T34. Ils disparurent donc du rĂ´le de char de combat de première ligne, au profit de chars allemands plus lourds, Panzer III et Panzer IV. Cependant leur châssis d'une grande fiabilitĂ© mĂ©canique servit de base Ă  de nombreux vĂ©hicules blindĂ©s Ă  usage spĂ©cial : chasseur de chars, artillerie lourde ou antiaĂ©rienne.

Autres véhicules blindés dérivés du Panzerkampfwagen 38(t)

  • Panzerjäger 38 (t) 76,2 mm PaK 36 (r) Marder III (SdKfz 139). DĂ©rivĂ© du prĂ©cĂ©dent, c'est un chasseur de chars armĂ© d'un tube soviĂ©tique KF 296 de 76,2 mm, rechambrĂ© pour pouvoir tirer les munitions allemandes[8]. On en construisit 344[9].

Une version ultĂ©rieure (Ausf. M) Ă©tait armĂ©e d'un canon allemand PaK 40 de 75 mm, avec une casemate situĂ© Ă  l'arrière qui apportait une protection un peu meilleure Ă  l'Ă©quipage, notamment sur les cĂ´tĂ©s, quoiqu'elle demeure dĂ©pourvue de toit. ExtĂ©rieurement, il ressemblait beaucoup au 75 mm PaK L/48 auf Gw. Lorraine Schlepper, ou Marder I (SdKfz 135), autre chasseur de chars mais cette fois sur un châssis français (voir ci-dessous).

  • Schweres InfanteriegeschĂĽtze 33/1 Auf.Gw.3 Bison. C'est un canon de 150 mm automoteur sur châssis de Panzerkampfwagen 38(t).
  • Flakpanzer 38(t). Toujours sur châssis de Panzerkampfwagen 38(t), c'est un char anti-aĂ©rien avec un tube de 20 mm 2-cm Flak 30 L/55. Le canon Ă©tait montĂ© Ă  l'arrière du vĂ©hicule, dans une casemate Ă  ciel ouvert trop faiblement blindĂ©e qui offrait une mĂ©diocre protection aux servants[10].
  • Jagdpanzer 38(t). Ultime dĂ©veloppement sur châssis de Panzerkampfwagen 38(t), c'est un chasseur de chars Ă  casemate entièrement fermĂ©e et blindage inclinĂ©, comme le Jagdpanzer IV et le Jagdpanther. Il est plus communĂ©ment connu sous le nom de Hetzer. Il est armĂ© du canon PaK 39 L/48 de 75 mm du Panzer IV, dĂ©muni de frein de bouche pour augmenter la vitesse initiale de l'obus et protĂ©gĂ© par le masque Saukopf (groin de cochon) conçu pour le SturmgeschĂĽtz III. Pour supporter l'accroissement de poids, la suspension est modifiĂ©e, l'empattement Ă©largi, et la puissance du moteur (un Praga 6 cylindres en ligne) est portĂ©e Ă  158 CV. Il fut conçu en 1943 et Ă  partir de dĂ©cembre 1943 sa production supplanta toutes les autres versions sur châssis de Panzerkampfwagen 38(t). En moins de 12 mois il sera produit Ă  2 387 exemplaires et restera dans les mĂ©moires comme un chasseur de chars particulièrement efficace grâce Ă  sa silhouette Ă©tudiĂ©e pour le combat d'embuscade que les Allemands pratiquaient systĂ©matiquement dans les derniers mois de la guerre[11].

Autres modèles

  • Char lĂ©ger ÄŚKD-Praga LT-H (de), dĂ©signation allemande : Panzerkampfwagen 39(t).
  • Chenillette Praga T-33 (de), employĂ© comme transporteur blindĂ© et tracteur.

Chars Renault

  • Char d’accompagnement d’infanterie Renault FT, dĂ©signation allemande : SdKfz 730 (f).

Ce minuscule char, vĂ©tĂ©ran de la Première Guerre mondiale, ne fut jamais envoyĂ© en combat en première ligne par la Wehrmacht. Celle-ci l'employa dans les pays occupĂ©s, par exemple Ă  la garde des bases aĂ©riennes de la Luftwaffe ou la lutte contre les partisans. Il fut souvent rĂ©armĂ© avec une mitrailleuse allemande Maxim 08/15 de 7,92 mm, elle aussi vĂ©tĂ©ran de la Grande Guerre[12]. Souvent, le patin arrière Ă©tait conservĂ©, alors qu’il n’avait plus aucune utilitĂ© depuis l’Armistice du 11 novembre 1918. En effet, il servait autrefois d’appui au char pour grimper hors des tranchĂ©es dans lesquelles il pouvait tomber[13].

  • Char d’accompagnement d’infanterie Renault R35, dĂ©signation allemande : PanzerKampfwagen 35R (f), le R servant Ă  les distinguer des Somua S-35.

Les 300 exemplaires saisis par les Allemands furent remis en service. Comme pour le Somua S-35, le tourelleau bombĂ© du chef de char Ă©tait remplacĂ© par un tourelleau plat Ă  deux trappes. Parfois mĂŞme le patin de queue (hĂ©ritage de son prĂ©dĂ©cesseur Renault FT) Ă©tait conservĂ©. Ces chars trop petits et armĂ©s seulement d’un canon de 37 mm ne pouvaient ĂŞtre envoyĂ©s en première ligne. Ils servirent Ă  la surveillance des pays occupĂ©s, principalement dans les Balkans, en Grèce et en Yougoslavie contre les partisans communistes de Josip Tito.

  • Panzerjäger auf PzKpfw 35R (f).

Ce chasseur de chars, basĂ© sur le châssis du Renault R35, Ă©tait armĂ© d'un canon tchèque de 47 mm L/43, dĂ©signĂ© PaK 36(t) par les Allemands[14], comme le Panzerjäger I, chasseur de chars lĂ©ger sur châssis de Panzer I. Une soixantaine de ces engins furent envoyĂ©s au combat lors de la bataille de Normandie en juin 1944. Cependant, leur blindage et leur armement ne faisaient pas le poids face aux blindĂ©s alliĂ©s, et leur silhouette haute les rendait facilement repĂ©rables. En l’espace de quelques jours, tous furent dĂ©truits sans obtenir de rĂ©sultats probants.

Chars Hotchkiss

Comme les Renault R35, ces chars seront remis en service massivement dans la Wehrmacht sans avoir subi de grosses modifications. Ils seront utilisés contre les partisans.

  • Obusier 105 mm leicht Feldhaubitze (FH) 18/40 sur châssis de Hotchkiss H-39.

48 exemplaires fabriqués. L’obusier possède un débattement vertical de -5° à +22°. L’engin emporte 30 coups. Les servants sont à l’abri des éclats d’obus ou des balles dans une casemate fermée des quatre côtés, mais à ciel ouvert comme la plupart des canons automoteurs de l’époque. Ces engins serviront au sein de la 21e Panzerdivision, qui sera la première division blindée engagée dans la bataille de Normandie, en juin 1944. Son matériel, à l’exemple de ses canons automoteurs, est très hétéroclite et ne résistera pas longtemps à la poussée des Alliés[15]. Il semble que, trop lourdement chargé pour son petit châssis, le H-39 était moins apprécié que la Lorraineschlepper.

Chars Somua

  • Char de combat Somua S-35, dĂ©signation allemande : PanzerKampfwagen 35S (f), le S servant Ă  les distinguer des Renault R35.
Défilé de chars Somua-S-35 et Hotchkiss-H-35 modifié 39 de la Wehrmacht sur les Champs-Élysées à Paris en 1941.

Lors de son entrĂ©e en service, le Somua modèle 1935 Ă©tait le char le plus rapide du monde. Le , la première rencontre avec les Somua apprend aux Allemands que son canon de 47 mm perce tous les chars allemands Ă  plus de 800 mètres, alors que seul un Panzer IV armĂ© d’un canon de 75 mm, ou un Panzer III Ă  courte distance, peuvent le dĂ©truire. Cependant, comme tous les chars français, il Ă©tait handicapĂ© par sa tourelle monoplace, dans laquelle le chef de char est Ă  la fois chargeur, pointeur et tireur, alors que les Panzer III et Panzer IV possèdent une tourelle Ă  trois hommes. En une vingtaine de jours de combats dĂ©sespĂ©rĂ©s, 300 Somua sur 400 sont dĂ©truits.

En juin 1940, les Allemands ont récupéré nombre de Somua endommagés ou sabotés. Plus de 200 chars retournent en usine pour y être réparés, repeints en gris fer et frappés de la croix noire. Le tourelleau bombé du chef de char était remplacé par un tourelleau plat à deux trappes[16].

Les Allemands envisagent un moment d’intégrer les Somua dans les Panzerdivisionnen, car la production des Panzer III était inférieure aux prévisions, mais les équipages refusèrent à cause de la tourelle monoplace. Les Somua furent donc affectés à des unités de police, et dispersés dans tous les pays occupés, à l’est comme à l’ouest : en Serbie (1er Abteilung du PanzerRegiment 202), dans les Balkans (Panzer Abteilung 202 et Z.b. V 12), en Crimée (Pz.Abt. 223), en Norvège (Pz.Abt. 211 et 214), en Crète (Pz.Abt. 212), dans les îles Anglo-Normandes occupées (Pz.Abt. 213).

En 1943, paradoxalement, les Somua reprennent du service en France en raison de la pénurie de chars de fabrication allemande. Deux unités sont formées en novembre 1943 pour lutter contre les résistants : les Pz. Abt. 205 et 206. Au moment du débarquement de Normandie, une trentaine de Somua sont encore en service au sein du Panzer Regiment 100 de la 21. Panzerdivision/neu formée en juillet 1943, pour remplacer la fameuse division de la Deutsches Afrikakorps, détruite en mai 1943 en Tunisie. Enfin, le , une unité dotée de Somua, le Pz. Ers. u. Abt. 100, se trouve dans le Cotentin. Toutes ces unités seront jetées dans la bataille de Normandie, sauf le Pz. Abt. 205 qui ne se battra qu’en août 1944, pour la défense de Paris.

Char de rupture B1

Certains des chars B1 furent rĂ©employĂ©s sans modification. 24 autres virent leur canon de 75 mm de caisse remplacĂ© par un lance-flammes. Quelques-uns furent dotĂ©s d’un obusier de 105 mm en 1942[17], mais ne semblent pas avoir eu de grand succès. Les autres, privĂ©s de leur tourelle, furent utilisĂ©s dans les Ă©coles de pilotage pour Ă©conomiser le potentiel des blindĂ©s allemands[18].

Automitrailleuse AMD-178

Un certain nombre de Panhard AMD-178 ont été capturés en 1940 par les Allemands après la chute de la France et employés dans la Wehrmacht sous le nom de Panzerspähwagen p. 204 (f)[19] pendant quelques mois après l'armistice de juin; la production s'est poursuivie pour le bénéfice de l'Allemagne.

Chenillette Lorraine

SdKfz 135/1, canon automoteur sur chenillette Lorraine, abandonné par les Allemands près d'El-Alamein en 1942.
  • 150 mm Schweres Feldhaubitze (sFH) 13 auf Gw. Lorraine Schlepper.

Cet automoteur d’artillerie fut rĂ©alisĂ© par les Allemands en 1941 Ă  partir du châssis de la Lorraine 37L, un tracteur blindĂ© de transport de munitions et de personnel dont un grand nombre fut saisi en 1940. Sa surface plane de chargement se prĂŞtait admirablement Ă  la transformation en affĂ»t de canon. Il Ă©tait armĂ© d’un obusier allemand Krupp de 150 mm datant de la Première Guerre mondiale (1917)[20]. L’affĂ»t de cette pièce très pesante surchargeait un peu la suspension, avec un poids de 8,3 tonnes, mais les rĂ©sultats dĂ©passèrent toute attente. Cependant, le recul Ă©tait si fort qu’il fallait un soc fichĂ© en terre pour l’absorber. Ces engins furent envoyĂ©s en Afrique du Nord avec le Deutsches Afrika Korps en 1942. Ils donnèrent de si bons rĂ©sultats que la dĂ©cision fut prise de rĂ©aliser de nouveaux automoteurs de conception identique, mais cette fois Ă  partir de châssis de chars allemands : le Wespe sur châssis de Panzer II et le Hummel sur châssis de Panzer III et Panzer IV.

  • 75 mm PaK L/48 auf Gw. Lorraine Schlepper, ou Marder I (SdKfz 135).

DĂ©rivĂ© du prĂ©cĂ©dent, c’est un chasseur de chars sur châssis de Lorraine 37L rĂ©alisĂ© par le Baukommando Becker Ă  184 exemplaires en 1942-1943, conservant les superstructures de l’obusier automoteur, avec un blindage de 10 mm d’épaisseur. Son armement Ă©tait le canon PaK 40 de 75 mm, qu'on retrouve sur les Marder II et Marder III Ausf. M, autres types de chasseurs de chars sur châssis respectivement de Panzer II allemand et de Panzerkampfwagen 38(t) tchèque. Après le dĂ©barquement de Normandie en juin 1944, deux unitĂ©s Ă©quipĂ©es de Marder I seront engagĂ©es. Leur faible blindage ne leur permettra pas de tenir longtemps contre les chars alliĂ©s[21].

Royaume-Uni

Italie

  • Auto-mitrailleuse SPA AB-41, dĂ©signation allemande : Panzerspähwagen AB41 SdKfz 201(i)d. 200 vĂ©hicules capturĂ©s par les Allemands fin 1943[23].

Lorsque l’Italie signa un armistice séparé avec les Alliés en septembre 1943, quelques-uns de ces chars furent encore utilisés par les Allemands (notamment en Grèce) et par les unités blindées de la République sociale italienne de Benito Mussolini[24].

Un char Fiat L6/40 avec marques de nationalité allemandes croise une colonne de fantassins allemands en Albanie occupée, .

Après l’armistice de septembre 1943, ces chars servirent encore dans des unités blindées de la République sociale italienne et dans des unités blindées allemandes lors d’opérations contre les partisans en Italie du Nord en 1944-1945[25].

La production des automoteurs 75/18 et 75/34 continua au profit de la Wehrmacht mĂŞme après l’armistice de septembre 1943 et se poursuivit pendant toute l’annĂ©e 1944, au nombre de respectivement 55 et 80 exemplaires. Ils ne diffĂ©raient de leurs prĂ©dĂ©cesseurs de l’armĂ©e italienne que par le camouflage allemand[26].

Deux bataillons de chars P avaient été créés dans les forces italiennes juste avant l’armistice du 8 septembre 1943, mais à cette date un seul exemplaire avait été livré. L’évolution du conflit eut pour conséquence qu'aucun ne combattit sous les couleurs italiennes. Tous les chars produits (101 exemplaires) furent réquisitionnés par les Allemands et utilisés sur la Ligne gothique, y compris une quarantaine de carcasses encore sans moteur qui servirent de fortins après avoir été enterrées.

  • Automoteur Ansaldo 105/25 M.43 (it)

Sur les 454 exemplaires commandĂ©s par l’armĂ©e italienne, seul un petit nombre put ĂŞtre livrĂ© aux unitĂ©s avant l’armistice de septembre 1943. Sur les 12 groupes prĂ©vus, seul le 600e Gruppo de la division Ariete II rĂ©ussit Ă  ĂŞtre opĂ©rationnel. Il fut engagĂ© au combat dans les environs de Rome contre les ex-alliĂ©s Allemands. Ces derniers s’emparèrent de tout le stock produit (31 exemplaires, moins les quelques-uns mis hors de combat par leurs propres canons antichars près de Rome) et de tous les exemplaires achevĂ©s après le 9 septembre chez Ansaldo : 24 en 1943 et 67 en 1944. Ils s’en servirent contre les AlliĂ©s en particulier autour de Monte Cassino et sur la Ligne gothique durant l’hiver 1944-1945. Un seul exemplaire demeura en service au sein du groupement blindĂ© « Leoncello » de la RĂ©publique sociale italienne.

Certains châssis inachevĂ©s furent convertis en chasseur de chars par les Allemands par montage d’un canon de 75/46 dans une casemate modifiĂ©e. En raison de la pĂ©nurie de tubes de 75/46, d’autres châssis furent armĂ©s de canons de 75/34, initialement destinĂ©s au char P40 et Ă  l’automoteur M42. Ces engins avaient des plaques de blindage supplĂ©mentaires ajoutĂ©es sur les flancs, Ă  l’image des « jupes » des automoteurs allemands SturmgeschĂĽtz III. Ils servirent Ă©galement Ă  contenir l’avance alliĂ©e sur la Ligne gothique. En fonction de son armement (canon de 75 mm ou de 105 mm), l’automoteur M43 reçut diverses dĂ©signations allemandes :

  • SturmgeschĂĽtz M43 mit 75/34 ou SdKfz 851(i)
  • SturmgeschĂĽtz M43 mit 75/46 ou SdKfz 851(i)
  • SturmgeschĂĽtz M43 mit 105/25 ou SdKfz 851(i)

Il était donc considéré comme l’équivalent du Sturmgeschütz III, automoteur d’artillerie à casemate entièrement blindée, basé sur le châssis du char Panzer III.

URSS

Himmler inspectant un T-34 capturé et réutilisé par la 2e division SS Das Reich sur le front russe en avril 1943.
  • Char lĂ©ger T-50
  • Char lĂ©ger T-60
  • Char lĂ©ger T-35, dĂ©signation allemande : Panzerkampfwagen 751 (r).
  • Char de combat T-34, dĂ©signation allemande : Panzerkampfwagen 747(r).

Plusieurs centaines de T-34 furent capturĂ©s intacts par les forces allemandes durant les grandes batailles d’encerclements des premiers mois de l’opĂ©ration Barbarossa. Le T-34, sans modification, fut utilisĂ© comme char de combat ou d’entraĂ®nement. D’autres châssis furent modifiĂ©s en tracteur, en char de dĂ©pannage (Bergepanzer), en char anti-aĂ©rien avec un Flakvierling quadruple de 20 mm, et un char sans tourelle fut mĂŞme converti en char sanitaire. Les unitĂ©s les plus prestigieuses utilisèrent en opĂ©rations et avec des succès notoires les chars "bolchevik".

Le KV-2 est une dĂ©clinaison du KV-1 Ă©quipĂ©e d’un obusier de 152 mm qui fait de lui une casemate ambulante dont le rĂ´le relève plus du soutien d’infanterie que du char de combat. Construit dans les usines de Leningrad, sa production sera arrĂŞtĂ©e en 1941. C’est dans le secteur du Groupe d'armĂ©es Nord Ă  proximitĂ© des usines de fabrication que les Allemands devront livrer combat contre ce monstre. TombĂ© en nombre important entre les mains des Allemands, il est tout d’abord prĂ©sentĂ© dans les dĂ©filĂ©s puis intĂ©grĂ© dans les unitĂ©s de la Wehrmacht. Conservant ses caractĂ©ristiques propres, la modification la plus visible sera l’adjonction en tourelle d’une coupole d’observation de Panzer III Ă  l’usage du chef de char. Sur certains modèles, un panier sera installĂ© Ă  l’arrière de la caisse en vue d’un emport complĂ©mentaire en munitions. Il sera utilisĂ© dans des missions d’instruction, de maintien de l’ordre et de combat en soutien d’infanterie.

  • Canon d’assaut Su-85
  • Char lourd Joseph Staline JS-2, capturĂ© dĂ©but mars 1945 pendant l’opĂ©ration Sonnenwende.
  • BlindĂ© de reconnaissance BA-10, dĂ©signation allemande : Panzerspähwagen Ba 10 PzKfw 203 (r). Il sera employĂ© pour la lutte contre les partisans dans les Balkans et en Union SoviĂ©tique.
  • Tracteur d'artillerie Komintern, dĂ©signation allemande : Artillerie-Schlepper SdKfz 604(r).

États-Unis

  • Half-track M3. DĂ©signation allemande : Spähpanzer, ou "voiture d'observation blindĂ©e". Nombreux exemplaires capturĂ©s en Afrique du nord en 1942, puis en Italie Ă  partir de 1943 et sur le front occidental en 1944-1945.
  • Char de combat M4 Sherman, dĂ©signation allemande : Panzerkampfwagen M4 SdKfz 748 (a).

Durant la bataille des Ardennes (opération Wacht am Rhein) en janvier 1945, les Allemands détruisirent énormément de Sherman, et parvinrent à plusieurs reprises à en capturer intacts. Ils les réutilisèrent immédiatement contre les Américains, comme ils avaient fait avec les chars britanniques en Afrique du Nord. Les Sherman capturés ne subirent aucune modification de leurs caractéristiques, mais furent couverts de croix noires de grandes dimensions (sur la tourelle, les flancs, et même l’avant de la caisse, ce qui ne se faisait pas sur les chars allemands) pour éviter les méprises de l’artillerie et des unités anti-chars allemandes.

Notes et références

  1. Connaissance de l'Histoire, hors-série no 3 - Blindés des origines à 1940 – profils et histoire, éditions Hachette. Sturmpanzerwagen A7V, page 48, (dépôt légal : 2e trimestre 1980)
  2. Connaissance de l'histoire hors-série no 3 (dépôt légal : 2e trimestre 1980) - Blindés des origines à 1940 – profils et histoire, éditions Hachette. Mark A Whippet, page 47
  3. (de) Wolfgang Fleischer, Gepanzerte Feuerkraft, Podzun-Pallas Verlag, , 160 p., p. 3-7909-0779-0.
  4. Maxwell Hundleby et Rainer Strasheim, The German A7V Tank and the Captured British Mark IV Tanks of World War I, Haynes Pubns, , 240 p. (ISBN 978-0-85429-788-7)
  5. Ellis, Chris; Chamberlain, Peter. Medium Tanks Marks A to D. Great Bookham: Profile Publications. 1972, p. 8
  6. Connaissance de l'Histoire, hors-série no 3 (dépôt légal : 2e trimestre 1980) - Blindés des origines à 1940 – profils et histoire, éditions Hachette, Skofa LT-35, page 88
  7. Connaissance de l'Histoire, mensuel no 17 - octobre 1979 - Chars de combat allemands 39-45, Ă©ditions Hachette, page 14
  8. Les chars allemands, Association des amis du musée des blindés de Saumur, page 23
  9. Connaissance de l'Histoire, mensuel no 45, juin 1982, Kharkov 1943 page 54, Ă©ditions Hachette
  10. Connaissance de l'Histoire, mensuel no 56 - mai 1983 - Véhicules blindés allemands de la bataille de Normandie 1944, éditions Hachette
  11. Les chars allemands, Association des amis du musée des blindés de Saumur, page 42
  12. Connaissance de l'Histoire, hors-série no 3 (dépôt légal : 2e trimestre 1980) - Blindés des origines à 1940 – profils et histoire, éditions Hachette, page 42 "Renault FT.17"
  13. Connaissance de l'Histoire, hors-série no 3 (dépôt légal : 2e trimestre 1980) - Blindés des origines à 1940 – profils et histoire, éditions Hachette, page 39 "Renault FT.17"
  14. Connaissance de l'Histoire, mensuel no 5 - août-septembre 1978 - Véhicules blindés allemands 39-45, éditions Hachette, page 49
  15. Les chars allemands, Association des amis du musée des blindés de Saumur, page 19
  16. Connaissance de l'Histoire, hors-série no 3 (dépôt légal : 2e trimestre 1980) - Blindés des origines à 1940 – profils et histoire, éditions Hachette, page 123 "Somua S.35"
  17. Connaissance de l'Histoire, mensuel no 5 - août-septembre 1978 - Véhicules blindés allemands 39-45, éditions Hachette, page 57.
  18. Connaissance de l'Histoire, hors-série no 3 (dépôt légal : 2e trimestre 1980) - Blindés des origines à 1940 – profils et histoire, éditions Hachette. Chars B1-B1 bis, pages 77-78
  19. White, p. 94
  20. Connaissance de l'Histoire, mensuel no 5 - août-septembre 1978 - Véhicules blindés allemands 39-45, éditions Hachette, page 55
  21. Les chars allemands, Association des amis du musée des blindés de Saumur, page 21
  22. Connaissance de l'Histoire, hors-série no 4 (dépôt légal : 4e trimestre 1980) - Blindés 1940-1943 – profils et histoire, éditions Hachette, pages 11 et 15 "Tank "Matilda" Mark I/mark II
  23. Connaissance de l'Histoire, hors-série no 4 (dépôt légal : 4e trimestre 1980) - Blindés 1940-1943 – profils et histoire, éditions Hachette, pages 95 et 99 "Les automitrailleuses du désert"
  24. Connaissance de l'Histoire, hors-série no 3 (dépôt légal : 2e trimestre 1980) - Blindés des origines à 1940 – profils et histoire, éditions Hachette, pages 107-107 Ansaldo-Fiat L6/40
  25. Connaissance de l'histoire, hors-série no 3 (dépôt légal : 2e trimestre 1980) - Blindés des origines à 1940 – profils et histoire, éditions Hachette, pages 127-128 "Ansaldo-Fiat M13/40"
  26. Connaissance de l'Histoire, hors-série no 4 (dépôt légal : 4e trimestre 1980) - Blindés 1940-1943 – profils et histoire, éditions Hachette, pages 5 et 9 "automoteur Ansaldo-Fiat 75/18"

Bibliographie

  • Les chars allemands, Association des amis du MusĂ©e des BlindĂ©s de Saumur.
  • Connaissance de l'Histoire, mensuel no 5 - aoĂ»t-septembre 1978 - VĂ©hicules blindĂ©s allemands 39-45, Ă©ditions Hachette.
  • ibid. no 17 - octobre 1979 - Chars de combat allemands 39-45, Ă©ditions Hachette.
  • ibid. no 56 - mai 1983 - VĂ©hicules blindĂ©s allemands de la bataille de Normandie 1944, Ă©ditions Hachette.
  • ibid. hors-sĂ©rie no 3 (dĂ©pĂ´t lĂ©gal : 2e trimestre 1980) - BlindĂ©s des origines Ă  1940 – profils et histoire, Ă©ditions Hachette.
  • ibid. hors-sĂ©rie no 4 (dĂ©pĂ´t lĂ©gal : 4e trimestre 1980) - BlindĂ©s 1940-1943 – profils et histoire, Ă©ditions Hachette.
  • ibid. hors-sĂ©rie no 6 (dĂ©pĂ´t lĂ©gal : 4e trimestre 1981) - BlindĂ©s 1944-1945 – profils et histoire, Ă©ditions Hachette.
  • Militaria magazine, hors-sĂ©rie no 5 – OpĂ©ration Barbarossa (dĂ©pĂ´t lĂ©gal : 2e trimestre 1992) ISSN 0753-1877
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.