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Transport de l'eau dans les plantes

Le transport de l'eau dans les plantes est un processus au cours duquel les plantes absorbent l'eau et les minéraux par leurs racines, les transmettent à travers les vaisseaux conducteurs du xylÚme et libÚrent l'eau sous forme de vapeur par transpiration au travers des stomates sous les feuilles.

Histoire de la recherche

Aucun sujet en physiologie vĂ©gĂ©tale n'a une histoire plus longue ou une littĂ©rature plus volumineuse que la montĂ©e antigravitationnelle de l'eau dans les plantes supĂ©rieures. La thĂ©orie la plus rĂ©cente postule que l'eau est tirĂ©e Ă  travers le xylĂšme par des gradients de tension produits par la perte d'eau par transpiration. Cette hypothĂšse est appelĂ©e « thĂ©orie de la cohĂ©sion » et a Ă©tĂ© introduite par Henry Horatio Dixon et John Joly (1894, 1895) et Eugen Askenasy (de) (1895). La thĂ©orie de la cohĂ©sion est aujourd'hui remise en question par certains physiologistes : la pierre d’achoppement concerne les pressions nĂ©gatives importantes dans le xylĂšme et les phĂ©nomĂšnes de cavitation de l'eau induits, que la thĂ©orie de la cohĂ©sion implique[1].

A priori historique

L'arbre fut d'abord envisagĂ© sous le rapport de l'Ă©conomie. L'idĂ©e ancienne voulait que la sĂšve redescende dans les racines le temps de l'hiver. La sĂšve « naturellement riche en matiĂšres putrescibles » avait la rĂ©putation de corrompre le bois aprĂšs coupe: le bois coupĂ© « en sĂšve », donc en pĂ©riode estivale, n'Ă©tait donc pas rĂ©putĂ© aussi bon pour ĂȘtre mis en Ɠuvre. Aussi, la coupe « hors sĂšve » Ă©tait-elle recommandĂ©e ; le bois devait ĂȘtre aussitĂŽt sĂ©chĂ© ; la coupe « hors sĂšve » avait aussi la rĂ©putation de faciliter la formation des rejets de souche, pour la formation des taillis[2]. Cette idĂ©e ancienne se retrouve dans le Recueil des Ă©dits et ordonnances concernant les eaux et forĂȘts[3] de 1610 de Saint-Yon, maĂźtre des requĂȘtes, qui Ă©tablit que le rejet « profitait bien mieux lorsqu'on coupait dans le premier quartier de la lune et hors le temps de sĂšve, parce que les racines concentraient en elles-mĂȘmes, par l'effet de l'humiditĂ© de l'hiver, toute la substance qui se distribuait auparavant dans tout le corps de l'arbre, ce qui faisait que ces racines poussaient bien plus vite et avec bien plus de force au printemps » [2]. L’abattage hors sĂšve, qu'il soit ou non efficace pour contrer la pourriture ou obtenir des bois de construction durs, est ancrĂ© dans les usages, et mĂȘme transposĂ© dans la loi (Un rĂšglement de la Table de marbre du dĂ©fend aux adjudicataires des ventes « et autres personnes quelconques de couper aucun bois dans les forĂȘts en temps de sĂšve, savoir depuis la mi-mai jusqu'Ă  la mi-septembre sous peine de confiscation»). Ainsi depuis le ou depuis le 1er mai, jusqu'au « dernier septembre » les forĂȘts Ă©tait fermĂ©es, mĂȘme aux propriĂ©taires[4].

L'idĂ©e que l'on se fait de la sĂšve demeure fort vague. Encore en 1763, pour Duhamel du Monceau la sĂšve: « est l’humeur qui se trouve dans le corps des plantes »[5]: les pleurs de la vigne, la sĂšve qui sort de l'Ă©rable pour produire le sirop d'Ă©rable, l'eau de bouleau, celle du noyer ou du charme sont qualifiĂ©s de « lymphe », la rĂ©sine que l'on tire d'autres arbres est qualifiĂ©e de « suc propre »). Au XVIIIe siĂšcle, tous les physiciens d'autre-part sont divisĂ©s sur la question de l'origine de la rosĂ©e[6] que l'on confond alors avec la guttation. Pieter van Musschenbroek distingue trois espĂšces de rosĂ©e, la premiĂšre qui tombe du ciel, la seconde qui Ă©mane de la terre et la troisiĂšme qui est suĂ©e par les vĂ©gĂ©taux. « La rosĂ©e des plantes est proprement comme leur sueur et par consĂ©quent comme une humeur qui leur appartient et qui sort de leurs vaisseaux excrĂ©toires. De lĂ  vient que les gouttes de cette rosĂ©e diffĂ©rent entre elles en grandeur et en quantitĂ© et occupent diffĂ©rentes places suivant la structure le diamĂštre la quantitĂ© et la situation de ces vaisseaux excrĂ©teurs. ». Musschenbroek dans ses Essais de physique ajoute que la rosĂ©e[7]:

« quelques fois est faine pour les Animaux & les Plantes, mais elle est aussi quelquefois nuisible aux uns & aux autres, selon qu'elle est composĂ©e de parties rondes ou tranchantes, & aigues, de parties douces ou Ăąpres, salines ou acides, spiritueuses ou olĂ©agineuses, corrosives ou terrestres. C'est pour cela que les MĂ©decins attribuent Ă  la RosĂ©e diverses maladies, comme des Fievres chaudes, le Flux de sang , etc. On a mĂȘme observĂ© que ceux qui se promĂšnent souvent sous les Arbres oĂč il y a beaucoup de RosĂ©e devenoient galeux. »

— Pieter van Musschenbroek, Essais de physique, 1739

L'hypothĂšse dominante Ă  partir du XVIIe siĂšcle, est calquĂ©e sur les travaux de William Harvey (1578-1657), qui a Ă©tabli et fait la dĂ©monstration de la circulation sanguine gĂ©nĂ©rale (de Motu Cordis, 1628). Les botanistes dĂ©duisent des travaux de Harvey qu’il existe chez les plantes une circulation de la sĂšve analogue Ă  la circulation du sang chez les animaux: la sĂšve irait ascendante Ă  l'intĂ©rieur du tronc ou de la tige, et descendante Ă  la pĂ©riphĂ©rie du tronc[8]. Dans les annĂ©es 1660 Johann Daniel Major (en) (1634-1693) suggĂšre l'analogie, Timothy Clarke (en) (- 1672) Ă©crit sur la circulation du liquide dans les plantes sensibles et recherche au microscope les Ă©quivalents structuraux des valves cardiaques, et Nicaise Le Febvre (1610-1662) compare les fonctions de la sĂšve et du sang. Dans les annĂ©es 1670 et 1680, Nehemiah Grew (1641-1712) et Marcello Malpighi (1628-1694) ont impressionnĂ© le monde botanique avec leurs Ă©tudes systĂ©matiques de l'anatomie et de la physiologie des plantes. Mais ce sont Edme Mariotte (1620-1684) et Claude Perrault (1613-1688) qui poussent l'analogie entre le sang et la sĂšve Ă  ses limites, dĂ©bat parrainĂ© par l'AcadĂ©mie des sciences, et qui marque le premier effort systĂ©matique d'application de la thĂ©orie circulatoire aux plantes[9]. L'incapacitĂ© Ă  trouver des organes Ă©quivalents a Ă©videmment sĂ©rieusement affaibli l'analogie, un circuit de sĂšve est toutefois Ă©tabli. Perrault, Mariotte, et Duclos qui s'est joint au dĂ©bat, publient leurs points de vue sur la thĂ©orie, Mariotte dans son Premier essai : De la vĂ©gĂ©tation des plantes en 1679[10]. En l'absence d'une alternative convaincante, les botanistes trouvent une analogie partielle meilleure que si elle n'avait pas existĂ©. Ceci jusqu'Ă  la Statique des vĂ©gĂ©taux de Stephen Hales. L'hypothĂšse de la circulation de la sĂšve a tout du moins le mĂ©rite d'attirer l'attention sur un problĂšme central de la botanique, Ă  savoir le transport de la sĂšve[9].

Les connaissances les plus récentes démontrent que les tubes du xylÚme qui transportent l'eau (trachéide essentiellement), contiennent une colonne d'eau continue, réfutant l'idée de valves intermédiaires. De plus les cellules du xylÚmes sont des cellules mortes.

AprĂšs que le physicien italien Evangelista Torricelli (1608-1647) ait dĂ©montrĂ© vers 1644 que l'air a un poids (que la nature n'a pas horreur du vide, et, par lĂ , dĂ©montrĂ© la hauteur de pompage limite Ă  10,33 mĂštres de n'importe quelle pompe aspirante), certains ont suggĂ©rĂ© que l'eau Ă©tait entraĂźnĂ©e Ă  travers les plantes par la pression atmosphĂ©rique sur les racines. Mais il a Ă©tĂ© tout de suite Ă©vident que de nombreuses atmosphĂšres de pression auraient Ă©tĂ© nĂ©cessaires pour conduire l'eau des profondeurs de la terre au sommet des grands arbres[11].

Pour le botaniste allemand Georg Andreas Agricola (de) dans son Neu- und nie erhörter doch in der Natur und Vernunfft wohlgegrĂŒndeter Versuch der Universal-Vermehrung aller BĂ€ume, Stauden, und Blumen de 1716-1717, la circulation de la sĂšve est une variante du modĂšle circulatoire empruntĂ© Ă  ses prĂ©dĂ©cesseurs oĂč l'Ă©ther — thĂšme ancien que vient de rafraichir Newton pour expliquer la gravitation — et la pression atmosphĂ©rique ont un rĂŽle Ă  jouer, dans un mouvement perpĂ©tuel[12]:

« Enfin, l'on peut conclure de tout ce qui a Ă©tĂ© dit que l'Æther se trouve dans toutes les liqueurs & choses aqueuses par oĂč l'air peut pĂ©nĂ©trer dans les parties spongieuses & poreuses, & s'y comprimer fort facilement, & qu'il a aussi la vertu de se dilater. SupposĂ© qu'il y eut un arbre beaucoup plus grand que la Tour de la Maison de ville de Ratisbonne, & qu'il fĂ»t pourvĂ» de ses petits tuĂŻaux & conduits, vĂ©sicules & valvules, comme cette Tour l'est de son escalier, & comme on l'a prouvĂ© par ce qui a Ă©tĂ© dit ci dessus, il attireroit Ă  soi par une espĂ©ce de dĂ©troit, vĂ» la quantitĂ© de ses racines spongieuses, le suc nutritif de la terre, comme aussi l'Æther qui est pareillement sous terre: A laquelle operation la pression de l'AthmosphĂšre doit beaucoup contribuer, car c'est un chose connue que les filets de racine vont en grossissant plus on remonte vers le tronc, comme ceux de la tige vont en retrecissant. Par lĂ  l'air comprimĂ© entre dans un plus grand espace: C'est pourquoi il s'efforce de se dilater; mais les corps rĂ©sistent Ă  l'air, qui Ă  son tour leur fait rĂ©sistance, & de cette action & rĂ©action rĂ©sulte le mouvement intĂ©rieur: Et comme la tige n'est aussi autre chose qu'un canal & des tuĂŻaux, les sucs sont rechassĂ©s par ces mouvemens du large vers la hauteur, & mis Ă  l'Ă©troit par la pression extĂ©rieure de l'AthmosphĂšre. Or afin que le suc poussĂ© en haut ne puisse retomber vers le bas, il y a pour cet effet dans les tuĂŻaux qui remontent, plusieurs valvules qui l'empĂ©chent de s'en retourner. Lorsqu'il a atteint sa hauteur par ses canaux ou tuĂŻaux, il retourne de l'Ă©troit dans le large, & rebrousse chemin par ces tuĂŻaux. Et vĂ©ritablement un mouvement perpĂ©tuel qui surpasse tous les autres. Si j avois envie de chercher Ă  present le mouvement perpĂ©tuel, je tirerois de lĂ  mon principe, parce qu'il est fondĂ© sur la nature mais ce n'est pas lĂ  mon Ă©tude. Cependant on aura par lĂ  prouvĂ© en quelque façon comment les humeurs aqueuses peuvent monter & descendre dans les arbres. Or comme leur vie consiste dans le mouvement, & que c'est la fixation des humeurs qui cause leurs maladies & leur mort, je traiterai dans le Chapitre suivant de la maladie & de la mort des arbres »

— Georg Andreas Agricola, L'Agriculture parfaite. 1720

L'exploitation hivernale des arbres désormais se fonderait d'autre-part sur l'axiome corrigé: « Pendant l'hiver, alors que la végétation est engourdie les arbres contiennent moins de sÚve qu'à toute autre saison. »[13].

Stephen Hales

Stephen Hales

Stephen Hales (1677-1761), un disciple d'Isaac Newton[8], étudie expérimentalement le mouvement de l'eau dans la plante (Vegetable Staticks, 1727, la Statique des végétaux traduit en français par Buffon en 1753, en allemand : Statick der GewÀchse, 1748). Il se rend compte que ce n'est pas principalement - comme on le supposait précédemment - la pression racinaire qui entraßne la sÚve, mais la transpiration des feuilles[14] .

Tiré de Vegetable Staticks, en face de la page 262

Hales estima la surface des feuilles de la plante ainsi que la longueur et la surface des racines. Cela lui permit de comparer l'afflux d'eau calculĂ© dans la plante avec la quantitĂ© d'eau quittant la plante par transpiration Ă  travers les feuilles. Il mesura Ă©galement — the force of the sap — la force de la sĂšve ou la poussĂ©e radiculaire[15]. Hales fit remarquer — « plants very probably draw through their leaves some part of their nourishment from the air » —que les plantes tirent trĂšs probablement Ă  travers leurs feuilles une partie de leur nourriture depuis l'air. Dans Vegetable Staticks, Hales prĂ©figurait la thĂ©orie de la cohĂ©sion du mouvement de l'eau dans les plantes, bien que ses idĂ©es n'aient pas Ă©tĂ© comprises Ă  l'Ă©poque ; il n'a donc pas influencĂ© le dĂ©bat sur le transport de l'eau dans les plantes au XIXe siĂšcle[16]. Il Ă©mit Ă©galement l'hypothĂšse que les plantes pourraient utiliser la lumiĂšre comme source d'Ă©nergie pour la croissance (la photosynthĂšse), sur la base de la suggestion d'Isaac Newton selon laquelle — « gross bodies and light » — les corps grossiers et la lumiĂšre pourraient ĂȘtre interconvertibles[17] - [18].

Dans Vegetable Staticks, Hales Ă©galement dĂ©crivit des expĂ©riences qui montrĂšrent que — « 
 air freely enters plants, not only with the principal fund of nourishment by the roots, but also thro' the surface of their trunks and leaves » — l'air pĂ©nĂštre librement dans les plantes, non seulement avec le principal fond de nourriture par les racines, mais aussi Ă  travers la surface de leurs troncs et les feuilles. Les travaux de Hales sur la chimie de l'air semblent primitifs selon les normes modernes, leur importance cependant fut reconnue par Antoine Lavoisier, le dĂ©couvreur de l'oxygĂšne[15]. L'invention de Hales de la cuve pneumatique pour collecter les gaz sur l'eau est Ă©galement considĂ©rĂ©e comme une avancĂ©e technique majeure. Des formes modifiĂ©es de la cuve pneumatique ont ensuite Ă©tĂ© utilisĂ©es dans leurs recherches par William Brownrigg, Henry Cavendish et Joseph Priestley.

Dans la thĂ©orie de la cohĂ©sion-tension proposĂ©e au XXe siĂšcle par Henry Horatio Dixon une tension d'aspiration est crĂ©Ă©e par la transpiration. Quand l'eau s'Ă©vapore hors des pores de la paroi cellulaire des feuilles, une Ă©norme pression de −15 atmosphĂšres se crĂ©e pour un arbre moyen (Dans les liquides il est possible de crĂ©er des pressions nĂ©gatives qu'il n'est pas possible de crĂ©er dans les gaz. Pour un solide, cela Ă©quivaudrait Ă  crĂ©er une tension mĂ©canique dans le matĂ©riau par traction.). À l'interface du pore, une pression de 1 atmosphĂšre est assurĂ©e par l'atmosphĂšre terrestre et 15 atmosphĂšres nĂ©gatives de l'autre cĂŽtĂ©. Le mĂ©nisque du pore, la forme incurvĂ©e Ă  l'intĂ©rieur d'un tube capillaire qui se forme Ă  l'interface entre l'eau et l'air ne se brise pas sauvĂ© par la petitesse du diamĂštre des trachĂ©ides, de l'ordre de deux Ă  cinq nanomĂštres de diamĂštre. Un gradient de pression s'Ă©tablit vers le bas; Ă  hauteur des racine la pression est de une atmosphĂšre. Se pose Ă©ventuellement la question de la mise en cavitation de la sĂšve qui est empĂȘchĂ© par la continuitĂ© liquide de la colonne d'eau[19].

Duhamel du Monceau (1700-1782) dans La Physique des arbres de 1763, se place en vulgarisateur de Hales[8]. Il mĂšne aussi diffĂ©rentes expĂ©riences sur la qualitĂ© des bois relativement Ă  leur pĂ©riode d'abattage et Ă©corne au passage les traditions en vigueur. Il trouve qu'il y a du moins autant de sĂšve dans les arbres en hiver qu'en Ă©tĂ©[20]. Rumford lui-mĂȘme arrive par ses propres expĂ©riences Ă  la conclusion que la sĂšve est en quantitĂ© moins importante en Ă©tĂ© (et il la trouve si Ă©trange, cette observation heurte tellement les opinions reçues, qu'il n'en tient pas compte et prĂ©fĂšre l'« attribuer Ă  quelque circonstance fortuite et exceptionnelle »[13]). Pour justifier l'exploitation des arbres en hiver nous dit en 1863, Antoine-Auguste Mathieu, inspecteur des forĂȘt,« il ne convient donc pas d'invoquer une moindre teneur en sĂšve, puisque c'est l'inverse qui a lieu, il faut s'appuyer sur la qualitĂ© diffĂ©rente de cette substance »[13].

Ce qui se passe rĂ©ellement dans la plante, jusqu'Ă  la fin du XIXe siĂšcle, n'est qu'en grande partie l'objet de spĂ©culations, qui se manifestent encore dans l’opposition entre vitalistes et physiciens. Jamin (1860) et Godlewsky (1884) expliquent le phĂ©nomĂšne de la montĂ© de la sĂšve, en supposant que les cellules des plantes ont des propriĂ©tĂ©s particuliĂšres[8].

Recherche moderne

La façon dont les racines absorbent l'eau et les nutriments minéraux n'est devenue disponible à l'étude que dans la seconde moitié du XIXe siÚcle lorsque Julius Sachs (1832-1897) introduit l'hydroculture. Il détermine quels éléments chimiques sont nécessaires à la croissance des plantes et sont absorbés par les racines. Il découvre que les poils racinaire (rhizodermes) fins des racines absorbent l'eau et les nutriments[21].

En 1891, Eduard Strasburger montre que la montĂ©e de la sĂšve dans le xylĂšme s'explique purement physiquement et ne nĂ©cessite aucune cellule vivante. Dans les annĂ©es suivantes, beaucoup de scientifiques allemands s’attellent Ă  la question[8]; l'ancien assistant de Strasburger, Henry Horatio Dixon[22] et d'autres, dĂ©veloppent la thĂ©orie de la cohĂ©sion-tension pour expliquer la montĂ©e de la sĂšve, selon laquelle une tension d'aspiration, causĂ©e par la transpiration, entraĂźne la sĂšve. Cependant, cette thĂ©orie demeure longtemps controversĂ©e car de nombreux botanistes rejettent une explication purement physique, et ils peuvent se rĂ©fugier dans des phĂ©nomĂšnes tels que la guttation, qui ne peuvent ĂȘtre expliquĂ©s de cette maniĂšre.

La théorie de la cohésion-tension proposé en 1894 par John Joly et Henry Horatio Dixon [23] - [24], est une théorie de l'attraction intermoléculaire qui explique le processus d'écoulement de l'eau vers le haut (contre la force de gravité) à travers le xylÚme des plantes[25].

L'eau est une molécule polaire. Lorsque deux molécules d'eau se rapprochent, l'atome d'oxygÚne légÚrement chargé négativement de l'une forme une liaison hydrogÚne avec un atome d'hydrogÚne légÚrement chargé positivement dans l'autre. Cette force d'attraction, avec d'autres forces intermoléculaires, est l'un des principaux facteurs responsables de l'apparition de tension superficielle dans l'eau liquide. Il permet également aux plantes de puiser de l'eau de la racine à travers le xylÚme jusqu'à la feuille.

L'eau est constamment perdue par la transpiration de la feuille. Lorsqu'une molécule d'eau est perdue, une autre est entraßnée par les processus de cohésion et de tension. La traction de transpiration, utilisant l'action capillaire et la tension superficielle inhérente de l'eau, est le principal mécanisme du mouvement de l'eau dans les plantes[26]. Cependant, ce n'est pas le seul mécanisme impliqué. Toute utilisation d'eau dans les feuilles oblige l'eau à y pénétrer.

La transpiration dans les feuilles crée une tension (pression différentielle) dans les parois cellulaires des cellules mésophylles. En raison de cette tension, l'eau est tirée des racines vers les feuilles, aidée par la cohésion (la traction entre les molécules d'eau individuelles, due aux liaisons hydrogÚne) et l'adhérence (le caractÚre collant entre les molécules d'eau et les parois cellulaires hydrophiles des plantes). Ce mécanisme d'écoulement de l'eau fonctionne en raison du potentiel de l'eau (l'eau s'écoule d'un potentiel élevé vers un potentiel faible) et des rÚgles de diffusion simple[27].

La thĂ©orie de la cohĂ©sion-tension proposĂ©e, basĂ©e sur la recherche classique de Dixon-Joly (1894), Eugen Askenasy (1845-1903) (1895)[28] - [29], et Dixon (1914, 1924), est malgrĂ© de nombreuses objections[30] - [31], la thĂ©orie la plus largement acceptĂ©e pour le transport de l'eau Ă  travers le systĂšme vasculaire d'une plante. La thĂ©orie de Dixon est cependant oubliĂ©e pendant un demi-siĂšcle avant de faire Ă  nouveau l’objet des travaux de J. A. Milburn, M. H. Zimmermann et Melvin T. Tyree Ă  partir des annĂ©es 1970-1980[8].

Avec la découverte du transport actif des ions à travers les membranes cellulaires vers 1930, un autre mécanisme sera ajouté, qui peut provoquer un léger flux de sÚve, sans transpiration[32].

Au cours du XXe siÚcle, de nombreuses recherches furent menées sur le mécanisme du transport de la sÚve du xylÚme; aujourd'hui, la plupart des phytotechniciens continuent à s'accorder sur le fait que la théorie de la cohésion-tension explique le mieux ce processus. Mais des théories multiforce qui émettent l'hypothÚse de plusieurs mécanismes alternatifs ont été suggérées, notamment des gradients de pression osmotique longitudinaux cellulaires et du xylÚme, des gradients de potentiel axial dans les vaisseaux et des gradients interfaciaux supportés par des bulles de gaz [33] - [34] - [35].

Transport d'eau dans les plantes

L'assimilation du CO2 dans les plantes par les chloroplastes via les stomates, est accompagnĂ©e inĂ©vitablement d'une perte d'eau par transpiration[36]. Entre le sol et la surface d'Ă©vaporation situĂ©e dans les feuilles, l'eau doit traverser un premier massif cellulaire dans les racines, un systĂšme conducteur qui transporte l'eau de la racine vers les feuilles (le xylĂšme, constituĂ© de cellules vides de 100 Ă  500 micromĂštres de diamĂštre, et de quelques centaines de ÎŒm Ă  quelques millimĂštres de longueur), et enfin un massif cellulaire dans les feuilles[37].

L'eau traverse les cellules au travers de barriĂšres membranaires, ou elle contourne la cellule en circulant dans la paroi cellulosique[37]. À travers la racine, la circulation radiale de l'eau peut se faire par voie apoplastique (parois pectocellulosiques et espaces vides entre cellules), par voie symplastique (par l’intermĂ©diaire des plasmodesmes) ou par voie vacuolaire (l'eau est obligĂ©e de passer deux fois Ă  travers le cytoplasme et ses membranes)[38]. Ces barriĂšres cellulaires (membrane hĂ©mipermĂ©able) sont essentielles pour entretenir le phĂ©nomĂšne d'osmose.

La circulation de l'eau dans la plante est corrĂ©lĂ©e Ă  l’existence d'un gradient de potentiel hydrique : l'eau circule dans le sens des potentiels hydriques dĂ©croissants[38]. Un certain nombre de phĂ©nomĂšnes physico-chimiques : interaction osmotique, capillaire, action de pression ou de tension externes au systĂšme, modifient le potentiel hydrique, en forment les composantes. Les potentiels hydriques en sĂ©rie dĂ©croissante induisent une force motrice responsable du dĂ©placement de l'eau dans la plante[37].

Absorption d'eau dans la racine

Racine avec poils racinaires

Des trois organes de base — feuille, tige et racine — la racine est spĂ©cialisĂ©e dans l'absorption de l'eau et des ions du sol, et est donc normalement souterraine. Cette tĂąche est effectuĂ©e en particulier dans la zone du rhizoderme par les poils racinaires, qui offrent une grande surface d'Ă©change de substances dans cette zone. En plus de l'absorption d'eau, l'absorption des ions est Ă©galement une fonction centrale. Ceux-ci sont trĂšs diluĂ©s (10 -4 mol/l) et, de plus, ne sont pas dans le rapport exigĂ© par la plante. La concentration des ions (sels nutritifs dissous) est un processus Ă©nergivore[39].

Il existe différentes formes d'eau dans le sol. L'eau souterraine est inaccessible à de nombreuses plantes, car leurs racines ne s'enfoncent pas assez profondément. Dans les couches supérieures du sol, l'eau est présente sous forme d'eau de rétention (adsorbée par les particules du sol, également connue sous le nom d'eau de gonflement (de), voir aussi le retrait-gonflement des argiles), sous forme d'eau capillaire[40] (liée par forces capillaires) et d'humidité (vapeur d'eau issue de l'air). Le potentiel capillaire de l'eau de rétention est généralement si négatif qu'il est inaccessible à la plante. Les plantes utilisent l'eau capillaire pour répondre à leurs besoins[41].

Le sol et ses pores sont en équilibre d'humidité avec l'environnement. Au niveau des eaux souterraines, l'humidité est de 100%; dans l'espace aérien au-dessus de la surface de la terre elle est fonction de l'humidité de l'air (par exemple 40%). Entre les deux existe un gradient d'humidité, en raison duquel une diffusion capillaire[42] - [note 1] ou une aspiration capillaire peut avoir lieu (C'est l'une des raisons du processus de chromatographie sur couche mince en chimie). La compensation (Ausgleich) est basée sur la dépendance en température de la pression de vapeur de saturation en vapeur d'eau[43]. Les principaux mécanismes de transport de l'humidité sont la gravitation, la diffusion de vapeur d'eau et le transport de liquide par les forces capillaires, et, dans une moindre mesure, les effets des champs électriques et des gradients de concentration ionique.

L'absorption d'eau par la racine est possible si le potentiel hydrique Κ de la racine est plus faible (c'est-à-dire plus négatif) que celui du sol environnant, car l'eau se déplace des endroits à fort potentiel hydrique vers des endroits à faible potentiel hydrique.

Le potentiel hydrique du sol n'est pas dĂ©terminĂ© Ă  partir du potentiel osmotique, car les ions sont gĂ©nĂ©ralement trop diluĂ©s, mais principalement Ă  partir du potentiel capillaire (potentiel capillaire = Travail requis pour extraire une unitĂ© de masse d'eau fixĂ©e par les forces capillaires — constante de tension superficielle ou force de succion — d'une unitĂ© de masse du sol, s'exprimant en hauteur d'eau nĂ©gative[44]). Plus le sol est sec, plus le potentiel hydrique baisse, c'est-Ă -dire que l'absorption d'eau par la racine devient plus difficile. Le potentiel hydrique du sol est typiquement compris entre Κ = −0.01 MPa et Κ = −1,5 MPa. Κ = −1,5 MPa est appelĂ© point de flĂ©trissement permanent car la plupart des plantes ne peuvent plus extraire l'eau du sol Ă  cette valeur [45] . Dans les sols salins, il peut ĂȘtre infĂ©rieur Ă  −0,2 MPa, dans les sols secs Ă  -2 MPa, et dans les dĂ©serts et les steppes salines il peut ĂȘtre beaucoup plus faible. En revanche, il peut Ă©galement se situer autour de 0 aprĂšs les prĂ©cipitations ou Ă  proximitĂ© des nappes phrĂ©atiques[46] - [41]:239. Le potentiel hydrique des racine peut varier considĂ©rablement selon les espĂšces en raison de substances osmotiquement actives[46]. Cela permet aux plantes de s'adapter Ă  leur environnement afin de continuer Ă  absorber l'eau. (si l'eau du sol est plus salĂ©e que la sĂšve, le sol absorbe l'eau de plante qui se dĂ©sĂšche). Le potentiel osmotique est basĂ© d'une part sur les ions absorbĂ©s par le sol, en particulier les ions potassium, et d'autre part sur les composĂ©s organiques en solution dans la cellule. Le potentiel hydrique d'une racine normale est entre Κ = −0,2 MPa et Κ = −0,5 MPa, pour les halophytes infĂ©rieurs Ă  -2 MPa et mĂȘme en dessous de −10 MPa pour les plantes du dĂ©sert[41]. Le potentiel hydrique de la sĂšve brute est gĂ©nĂ©ralement compris entre −0,5 et −1,5 MPa, dans les feuilles entre −0,5 et −2,5 MPa. L'eau passe des feuilles dans l'air, car il s'y trouve un potentiel hydrique de -94 MPa Ă  une humiditĂ© de 50%, par exemple[39]:313.

L'eau peut pĂ©nĂ©trer dans la racine de trois façons: par l'apoplasme, par le symplasme et de maniĂšre transcellulaire (c'est-Ă -dire Ă  la fois par l'apoplasme et par le symplasme)[39]. Tout d'abord, l'eau de l'apoplasme est transfĂ©rĂ©e vers le symplasme. Cela entraĂźne une baisse du potentiel hydrique de l'apoplasme, et l'eau peut s'Ă©couler du sol directement adjacent. Cela rĂ©duit Ă©galement son potentiel hydrique; et l'eau peut s'Ă©couler Ă©galement des environs. Cependant, en raison de la conductivitĂ© limitĂ©e de l'eau du sol, ce processus est limitĂ© au maximum Ă  quelques cm. DĂšs que l'approvisionnement en eau Ă  un moment donnĂ© est Ă©puisĂ©, la racine suit l'eau en retrait, par la croissance, vers d'autres rĂ©gions qu'elle exploite - il en va de mĂȘme pour les ions. À basses tempĂ©ratures (cela inclut des tempĂ©ratures juste au-dessus du point de congĂ©lation dans de nombreuses espĂšces), la rĂ©sistance au transport de l'eau dans le sol augmente, la permĂ©abilitĂ© Ă  l'eau de la membrane plasmique diminue et la croissance des racines diminue. À des tempĂ©ratures infĂ©rieures Ă  zĂ©ro, l'eau de rĂ©tention mĂȘme gĂšle. Le manque d'eau qui en rĂ©sulte, connu sous le nom de dessication par le gel (Frosttrocknis (de)), est souvent interprĂ©tĂ© Ă  tort comme un gel[46].

Lorsque le potentiel hydrique diminue vers le cylindre central, l'eau diffuse dans cette direction. Cependant, la voie apoplasique est bloquĂ©e par la barriĂšre de Caspary dans l'endoderme, et l'eau est forcĂ©e dans les symplastes[41]. S'il y a beaucoup d'eau et qu'aucune eau n'est Ă©liminĂ©e par transpiration, une pression hydrostatique positive peut s'accumuler dans le cylindre central, la pression racinaire. Comme un sceau, la bande Caspary empĂȘche la pression de s'Ă©galiser par l'eau qui retourne dans le parenchyme de l'Ă©corce. Alors l'eau monte. La façon exacte dont la pression racinaire est Ă©tablie n'a pas encore Ă©tĂ© clarifiĂ©e ; il faut, en tout cas, de l'Ă©nergie pour la gĂ©nĂ©rer. Elle est probablement causĂ©e par l'incorporation active secondaire d'ions inorganiques dans les vaisseaux de guidage du xylĂšme du parenchyme xylĂšme. La poussĂ©e radiculaire est normalement de 0,1 MPa[41]:239, pour certaines espĂšces, comme la tomate, mais elles peut aussi atteindre plus de 0,6 MPa. En cas de dĂ©faut de l'approvisionnement en eau, ou de forte transpiration, il existe cependant une pression hydrostatique nĂ©gative dans la zone racinaire, qui dĂ©termine principalement un potentiel hydrique nĂ©gatif, et non plus osmotique[46]. Normalement, la poussĂ©e radiculaire prĂ©domine la nuit, mais la transpiration aspire rapidement aprĂšs le lever du soleil.

Mycélium de pleurote, élevés sur le marc de café

Les racines des plantes peuvent Ă©galement absorber l'eau et les nutriments via des mycorhize des champignons symbiotiques .

Transport et livraison d'eau

Alors que la racine absorbe l'eau, le reste de la plante perd de l'eau dans son environnement par la transpiration. Cette transpiration est inévitable si la plante a un potentiel hydrique plus élevé que son environnement. La transpiration n'a pas lieu uniquement si la plante et le milieu extérieur sont en équilibre l'un avec l'autre, c'est-à-dire qu'ils ont un potentiel hydrique identique. Cela se produit à 20 °C uniquement à partir d'une humidité relative de 99 à 97,5%. Une telle humidité relative élevée est rarement atteinte, par exemple en raison d'un refroidissement nocturne, peu de temps avant d'atteindre le point de rosée. L'humidité relative est généralement de 40 à 60% pendant la journée. Si la plante n'est pas en équilibre avec son air ambiant, elle perdra définitivement de l'eau. Elle perd cela dans une faible mesure (jusqu'à 10%) via la cuticule et surtout les stomates. La perte d'eau à travers les stomates, est liée à l'absorption nécessaire de CO2 via celui-ci. Puisqu'il n'y a que quelques traces de dioxyde de carbone dans l'air (0,037%), la plante perd plusieurs centaines de molécules d'eau pour chaque molécule de CO2 qu'elle absorbe[41].

L'eau que l'Ă©piderme perd dans l'environnement est aspirĂ© des parties internes de la plante. Cette aspiration se poursuit Ă  travers les conduits du xylĂšme, jusqu'Ă  la racine, et elle se rĂ©alise ainsi de la racine jusqu'aux extrĂ©mitĂ©s des feuilles. Cet effet est appelĂ© aspiration de la transpiration (Transpirationssog), selon la thĂ©orie de la cohĂ©sion[41]. L'aspiration de la transpiration n'est pas seule responsable du dĂ©bit d'eau dans les plantes, mais elle serait suffisante en termes de force. Pour Ă©lever une colonne d'eau de dix mĂštres contre la gravitĂ©, une pression nĂ©gative de 0,1 MPa doit ĂȘtre atteinte et 0,2 MPa supplĂ©mentaire sont nĂ©cessaires pour surmonter les forces de friction de l'eau dans le xylĂšme.

La perte d'eau par transpiration conduit donc Ă  une aspiration de la sĂšve brute et, de lĂ , Ă  un Ă©coulement d'eau de la racine Ă  la cime, le flux de transpiration[47]. La transpiration profite Ă  la plante de plusieurs maniĂšres: d'une part, les feuilles sont refroidies par le froid Ă©vaporatif, d'autre part, les ions (sels nutritifs dissous) sont transportĂ©s dans le xylĂšme[41]. Cependant, les plantes n'ont montrĂ© aucun problĂšme de croissance dans les expĂ©riences, mĂȘme avec une transpiration rĂ©duite de 15 fois. MĂȘme sans transpiration, il existe un dĂ©bit d'eau interne qui est tout Ă  fait suffisant pour le transport des ions. Ceci causĂ© par la pression racinaire, l'eau de croissance (Wachstumswasser) et le cycle interne de l'eau dans le phloĂšme et le xylĂšme, ainsi que la guttation dans certains cas particuliers. L'eau de croissance (Wachstumswasser) est de l'eau qui sert Ă  augmenter le volume de la plante. Cela peut ĂȘtre le cas des plantes herbacĂ©es, surtout dans les phases de croissance, reprĂ©sentant une proportion importante (par exemple 10-20%) des eaux de transpiration. Le cycle interne de l'eau dans le phloĂšme et le xylĂšme est gĂ©nĂ©rĂ© par l'eau dans le xylĂšme s'Ă©coulant vers le haut, et dans le phloĂšme pour le transport de la sĂšve Ă©laborĂ©e dans la direction opposĂ©e, les deux systĂšmes Ă©tant inter-connectĂ©s. La transpiration n'est donc pas principalement utilisĂ©e pour le transport, mais est tout simplement inĂ©vitable, notamment en raison de l'absorption inĂ©vitable du dioxyde de carbone[46].

Cavitation de l'eau

SĂ©quoia Ă  feuilles d'if Sequoia sempervirens aux États - Unis

Induits par la transpiration, la thĂ©orie de la cohĂ©sion considĂšre que l'eau est tirĂ©e exclusivement par des gradients de pression nĂ©gative de plusieurs mĂ©gapascals Ă  travers des colonnes d'eau continues depuis les racines jusqu'au feuillage. L'eau sous de telles pressions nĂ©gatives est extrĂȘmement instable, en particulier compte tenu de l'hydrophobicitĂ© des parois internes du xylĂšme et de la composition de la sĂšve (lipides, protĂ©ines, mucopolysaccharides, etc.) qui empĂȘche le dĂ©veloppement de pressions nĂ©gatives stables supĂ©rieures Ă  environ -1 MPa[1].

Pour les plus grands arbres du monde, qui ont plus de 110 mĂštres (Sequoia sempervirens en Californie), 3 MPa doivent ĂȘtre appliquĂ©s en pression nĂ©gative pour assurer l'Ă©coulement de l'eau vers les cimes. Le problĂšme crucial ici est la rĂ©sistance Ă  la traction de l'eau.

Si la pression négative est plus forte que le pouvoir cohésif de l'eau, l'eau se retrouve dans un état métastable et peut caviter, avec l'apparition brutale de bulles[48]. L'eau en ébullition ne s'oppose pas seulement aux forces de cohésion entre les molécules individuelles, mais également aux forces d'adhérence à la paroi du vaisseau conducteur[39].

Dans les expĂ©riences dans un tube de verre, l'eau sans gaz a rĂ©sistĂ© Ă  des pressions allant jusqu'Ă  −30 MPa avant de se dĂ©chirer. Dans le tissu dominant des plantes, les pressions tombent rarement en dessous de −4 MPa, mais une embolie se produit toujours en raison de la formation de bulles de gaz, parce que l'eau transportĂ©e est contaminĂ©e par des gaz et des ions dissous. Ces embolies sont un problĂšme grave pour la plante car elles bloquent le transport de l'eau [41]:248.

La thĂ©orie de la cohĂ©sion Ă©rigĂ©e comme la vĂ©ritĂ© absolue et universelle est remise en question par certains physiologistes: la pierre d’achoppement concerne les pressions nĂ©gatives importantes dans le xylĂšme et les phĂ©nomĂšnes de cavitation de l'eau induits, que la thĂ©orie de la cohĂ©sion implique. Il existe de nombreuses preuves que l'approvisionnement en eau du feuillage supĂ©rieur des grands arbres est rĂ©alisĂ© par une interaction finement rĂ©glĂ©e de diverses forces agissant dans le xylĂšme, dans les multiples phases du tissu et aux interfaces liquide/gaz. DiffĂ©rentes stratĂ©gies supplĂ©mentaire seraient prises par les grands arbres pour maintenir les diffĂ©rentes forces (y compris la tension) Ă  des valeurs modĂ©rĂ©es (prouvĂ©es par le modĂšle)[1].

Voir aussi

  • Bilan hydrique des plantes (de)

Liens externes

Notes

  1. diffusion capillaire = mouvement d'eau à travers les interstices d'un milieu non saturé, sous l'effet exclusif ou prépondérant d'un gradient de potentiel capillaire; le potentiel capillaire = potentiel qui rÚgle l'attraction du sol pour l'eau qu'il contient

Références

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Bibliographie

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