Reflux gastro-Ćsophagien
Le reflux gastro-Ćsophagien (RGO) dĂ©signe la remontĂ©e dans l'Ćsophage d'une partie du contenu gastrique, acide. C'est un phĂ©nomĂšne normalement intermittent et silencieux, qui se produit chez tous les sujets aprĂšs les repas. Chez certains, le reflux gastro-Ćsophagien peut ĂȘtre pathologique s'il est excessivement frĂ©quent ou prolongĂ©. Les symptĂŽmes possibles incluent les brĂ»lures rĂ©trosternales et les rĂ©gurgitations acides. Ceux-ci peuvent apparaĂźtre sous certaines conditions, comme la consommation d'alcool[1]. C'est un motif frĂ©quent de consultations mĂ©dicales et une source importante de consommation mĂ©dicamenteuse, notamment lorsque le reflux se complique par une Ćsophagite, un Ćsophage de Barrett ou un adĂ©nocarcinome de l'oesophage. C'est une pathologie de plus en plus frĂ©quente.
Prévalence
La prĂ©valence du RGO (ainsi que de l'Ćsophagite) tend Ă augmenter, au moins depuis le milieu des annĂ©es 1980, mais avec des variations selon les continents ou pays[2].
Physiopathologie
Fonctionnement de la jonction Ćso-gastrique
Dans les conditions normales l'Ă©tanchĂ©itĂ© de la jonction Ćso-gastrique est assurĂ©e par :
- le tonus permanent du sphincter infĂ©rieur de l'Ćsophage, muscle lisse dont la relaxation se produit automatiquement Ă chaque dĂ©glutition et est particuliĂšrement marquĂ©e au cours de la prise alimentaire et de la pĂ©riode postprandiale ;
- la position intraabdominale stricte du cardia, portion supérieure de l'estomac, qui assure mécaniquement la fermeture du sphincter (fermeture de l'angle de His), du fait d'une différence de pression entre la région thoracique (hyper) et la région abdominale (hypo).
Chez la plupart des gens en bonne santĂ©, un reflux gastro-Ćsophagien symptomatique se produit naturellement dans les 10 minutes suivant la fin d'un repas ; la poche acide ainsi formĂ©e perdure ensuite jusqu'Ă 47 ± 8 minutes chez une personne immobile ; cette petite « poche d'acide postprandiale » se forme plus tardivement chez une personne en mouvement ; la nuit, en position couchĂ©e, cette poche se forme prĂšs du cardia et le liquide diffuse dans lâĆsophage, mais il est moins acide Ă distance et devient moins acide au cours de la nuit[3].
Un groupe de consensus médical (dit Consensus de Lyon)[4] a considéré en 2017 ce reflux comme pathologique aux conditions suivantes :
- Ćsophagite de grade C ou D[5] ;
- sténose peptique[5] ;
- histologie prouvée la muqueuse de Barrett > 1 cm[5] ;
- exposition Ă l'acide Ćsophagien avec un « temps d'exposition Ă l'acide » supĂ©rieur Ă 6 % (lors d'un test de pH)[5].
Si aucun de ces critÚres n'est rempli, des tests supplémentaires sont à envisager[5].
Remarques :
- il y a souvent une insuffisance sphinctĂ©rienne (cas le plus frĂ©quent). Si elle se traduit par des relaxations spontanĂ©es du sphincter infĂ©rieur de l'Ćsophage, hors des moments de dĂ©glutition ; elles ont alors une cause en partie gĂ©nĂ©tique, selon une Ă©tude menĂ©e chez des vrais jumeaux[6] ;
- en cas d'anomalie anatomique (plus rarement) : la protrusion du cardia dans le thorax Ă travers le hiatus Ćsophagien du muscle diaphragmatique, appelĂ©e hernie hiatale, participe Ă la dĂ©faillance du sphincter infĂ©rieur de l'Ćsophage.
- un test de reflux doit ĂȘtre effectuĂ© aprĂšs l'arrĂȘt du traitement suppresseur d'acide chez les patients prĂ©sentant un faible risque de RGO[5].
Conséquences du reflux
Une situation chronique de reflux frĂ©quent ou trop prolongĂ© a un effet corrosif sur la muqueuse Ćsophagienne (qui est moins bien protĂ©gĂ©e contre l'aciditĂ© que celle de l'estomac).
Par ordre dĂ©croissant de frĂ©quence, une agression rĂ©pĂ©tĂ©e de la muqueuse Ćsophagienne est responsable ou co-responsable des complications suivantes :
- fréquemment : d'une simple irritation de la muqueuse responsable du symptÎme le plus fréquent (pyrosis, c'est-à -dire sensation de brûlure) ;
- parfois d'une inflammation de la muqueuse Ćsophagienne (Ćsophagite), responsable de douleurs, ou parfois asymptomatique, parfois compliquĂ©e d'hĂ©morragie digestive (hĂ©matĂ©mĂšse) ou de rĂ©trĂ©cissement du diamĂštre Ćsophagien (stĂ©nose peptique) ;
- parfois de troubles de la sphĂšre ORL[7], et notamment asthme[8] - [9] - [10] - [11] - [12] - [13], laryngite[14] - [15], toux[16] ou Ă©rosion dentaire[17] - [18] - [19] ;
- exceptionnellement d'altĂ©rations profondes de la structure cellulaire de la muqueuse pouvant aboutir Ă une mĂ©taplasie : on parle d'endobrachyĆsophage (ou « Ćsophage de Barrett ») pouvant Ă©voluer vers une dysplasie et une cancĂ©risation.
Remarque : une prévalence accrue de reflux est notée chez les patients souffrant de ronflement et /ou d'apnée obstructive du sommeil[20] - [21] - [22] - [23] - [24] - [25] - [26], mais sans lien causal compris ou démontré (notamment la gravité du reflux ne semble pas corrélée à la gravité de l'apnée du sommeil)[27].
ĂpidĂ©miologie
Plus de 100 Ă©tudes ont Ă©tĂ© jugĂ©es pertinentes par une mĂ©tanalyse de 2005 sur ce sujet, mais seuls 16 essais cliniques avaient examinĂ© l'impact sur le RGO (par modification des symptĂŽmes, des variables du pH de l'Ćsophage ou de la baisse de la pression du sphincter Ćsophagien) les effets du changement de mode de vie du patient[28].
Des statistiques prĂ©cises Ă large Ă©chelle n'existent pas, car le seuil au-delĂ duquel un Reflux gastro-Ćsophagien est perçu comme pathologique varie selon les individus, les mĂ©decins, les pays et les Ă©poques et la dĂ©finition de la maladie a rĂ©cemment Ă©voluĂ© (2006) ; de plus, prĂšs du tiers des patients prĂ©sentant une Ćsophagite lors d'une fibroscopie ou d'une autopsie ne s'Ă©taient jamais plaints de pyrosis. Une sous-dĂ©claration est donc probable, notamment dans les pays en dĂ©veloppement.
Dans les pays riches le RGO est la cause de consultation la plus fréquente concernant la sphÚre digestive[29] ; il affecterait 10 % à 20 % de la population et 0,4 % développeront une nouvelle maladie[30].
Ainsi 3,4 Ă 6,8 millions de Canadiens seraient atteints de RGO. Aux Ătats-Unis, 44 % en souffrent au moins une fois par mois, 14 % Ă 20% au moins une fois par semaine, et jusqu'Ă 7 % chaque jour[31] - [32] - [30].
Le taux de prévalence du RGO augmente dans les pays riches, en partie parce qu'il est étroitement lié à d'autres facteurs tels que l'obésité[33], l'alcoolisme ou encore l'ùge (les adultes de 60 à 70 ans sont les plus touchés[34]).
Une étude chinoise (2004) a conclu que « par rapport aux sujets sans reflux, la prévalence des symptÎmes évocateurs de Dyspepsie fonctionnelle, syndrome de l'intestin irritable, pneumonie, asthme, bronchite, laryngite, pharyngite, toux chronique, respiration sifflante, sensation de globus, ulcÚre buccal et ronflement était significativement augmentée chez les sujets avec reflux »[35].
Tendances
Une Ă©tude de tendances en termes de prĂ©valence (publiĂ©e en 2007) a conclu Ă une augmentation significative de la prĂ©valence des symptĂŽmes de reflux dans la population gĂ©nĂ©rale ; avec certitude de 1985 Ă 2005, notamment en AmĂ©rique du Nord et en Europe[2]. La prĂ©valence du RGO mais aussi de l'Ćsophagite augmente dans la majoritĂ© des Ă©tudes longitudinales[2].
Cette tendance prĂ©occupe, car si elle se maintient, elle augure dâune augmentation rapide de complications plus graves (adĂ©nocarcinome de l'Ćsophage) aux coĂ»ts socioĂ©conomiques importants (notamment pour les systĂšmes de santĂ©)[2].
La sensation de brûlure au niveau de la poitrine (pyrosis) est un signe plus rare chez les Asiatiques[36].
Helicobacter pylori, germe responsable de nombre d'ulcĂšres gastriques, n'augmente pas le risque de reflux et semble mĂȘme parfois protecteur.
Le tabagisme[37] - [38] - [39], l'alcoolisme[40], un régime salé et/ou pauvre en fibres, la sédentarité/obésité semblent favoriser le reflux. La prise de caféine ne semble pas influencer la prévalence des symptÎmes ; elle ne serait donc pas le composant du café en cause[41].
SymptĂŽmes
La maladie a Ă©tĂ© redĂ©finie lors d'une confĂ©rence de consensus (2006) qui a portĂ© sur 50 points[1] comme une affection qui se dĂ©veloppe lorsque le reflux du contenu de l'estomac provoque des symptĂŽmes et/ou des complications gĂȘnantes. Elle a Ă©tĂ© sous-classĂ©e en syndromes Ćsophagiens et extraĆsophagiens. Et cette nouvelle dĂ©finition a inclus une approche centrĂ©e sur le patient (indĂ©pendante des rĂ©sultats endoscopiques), une sous-classification de la maladie en syndromes discrets ; de plus la laryngite, la toux, l'asthme et des Ă©rosions dentaires sont ajoutĂ©s comme signes syndromiques possibles[1].
Forme typique de l'adulte
Chez l'adulte, le symptĂŽme le plus frĂ©quent est le pyrosis, une sensation de brĂ»lure ascendante derriĂšre le sternum. Il survient volontiers lorsque le sujet est allongĂ© ou se penche en avant. L'association Ă des rĂ©gurgitations acides est typique du reflux gastro-Ćsophagien et suffit Ă poser le diagnostic. Une douleur Ă©pigastrique sans pyrosis et une mauvaise haleine (halitose) sont frĂ©quentes.
Formes atypiques de l'adulte
Parfois les symptĂŽmes sont indirects et des examens complĂ©mentaires peuvent ĂȘtre nĂ©cessaire pour poser le diagnostic :
- douleurs thoraciques pouvant en imposer pour une angine de poitrine ;
- manifestations pulmonaires : toux irritative chronique, dyspnée asthmatiforme (selon une étude (1990) beaucoup d'asthmatiques ont des reflux, qu'ils soient ou non traités par un bronchodilatateur[43]) ;
- manifestations ORL : enrouement[44] ; manifestations stomatologiques : carie dentaire, gingivite ;
- troubles du sommeil[45].
Chez un patient ne se plaignant de rien (asymptomatique), le reflux peut ĂȘtre dĂ©couvert Ă l'occasion d'une complication (prĂšs du tiers des Ćsophagites sont asymptomatiques[46].
Chez le nourrisson et l'enfant
Les manifestations sont plus atypiques : cassure de la courbe staturo-pondérale, rhino-pharyngo-bronchite récidivante, asthme et bronchiolite, anémie.
Le reflux du nourrisson est frĂ©quent ; souvent dĂ» au fait que, jusquâalors nourri directement via le cordon ombilical et sa circulation sanguine, l'enfant a trĂšs peu fait usage de son tube digestif, et encore moins de son estomac. Les premiers mois, le bĂ©bĂ© avale de l'air en tĂ©tant ou il produit des gaz ensuite Ă©vacuĂ©s (rot) avec un reflux. L'allaitement maternel ou un biberon limitant l'ingestion d'air (biberon Brown's, par exemple) diminuent ce phĂ©nomĂšne. Ces reflux surviennent souvent en fin dâaprĂšs-midi, aprĂšs un repas. L'enfant est agitĂ©, il replie les jambes contre son ventre, pleure jusquâĂ ce quâil Ă©mette enfin un rot.
Ăvolutions et complications
Le reflux pathologique est souvent une maladie chronique.
Les complications sont plutÎt rares (vu la fréquence du pyrosis) et ne sont pas corrélées avec la sévérité des symptÎmes :
- l'Ćsophagite peptique comporte un risque de saignements (anĂ©mie occulte ferriprive) et de rĂ©trĂ©cissement de l'Ćsophage, particuliĂšrement chez l'enfant ;
- l'endobrachyĆsophage correspond Ă une mĂ©taplasie intestinale de l'Ćsophage (aussi appelĂ© Ćsophage de Barrett), survenant surtout chez le patient ĂągĂ©, diagnostiquĂ©e sur l'analyse microscopique d'un prĂ©lĂšvement rĂ©alisĂ© au cours d'une fibroscopie, pouvant Ă©voluer dans un second temps en cancer de l'Ćsophage (de type adĂ©nome, diffĂ©rent en cela du cancer du haut Ćsophage, de type Ă©pidermoĂŻde) ;
- le cancer de l'Ćsophage est une complication rare et tardive.
Il faut se mĂ©fier de la survenue de l'une de ces complications s'il existe une dysphagie (sensation de gĂȘne ou de blocage lors de la dĂ©glutition), une hĂ©matĂ©mĂšse (vomissement de sang) ou un melĂŠna (diarrhĂ©e noirĂątre correspondant Ă du sang digĂ©rĂ©).
Diagnostic
Au moindre doute, un avis cardiologique doit ĂȘtre demandĂ© afin de ne pas passer Ă cĂŽtĂ© d'une angine de poitrine ou d'un infarctus du myocarde dont les signes peuvent ressembler fortement Ă ceux d'un reflux atypique. Si les symptĂŽmes sont typiques et peu graves, aucune autre investigation n'est nĂ©cessaire[44].
Des méthodes plus nouvelles existent comme l'utilisation de la distance ph-métrique.
La fibroscopie
L'endoscopie digestive haute ne pose pas le diagnostic de reflux mais permet de dĂ©terminer l'existence ou non d'une lĂ©sion Ćsophagienne secondaire Ă celui-ci, tels qu'une Ćsophagite ou une stĂ©nose (rĂ©trĂ©cissement) par exemple. Cet examen peut ĂȘtre totalement normal, mĂȘme en cas de reflux avĂ©rĂ©.
La fibroscopie permet de classer la maladie suivant la classification de Los Angeles[47].
- Grade 0 : anamnĂšse typique de reflux sans lĂ©sions muqueuses dĂ©tectables Ă lâendoscopie.
- Grade A : une ou plusieurs lésions muqueuses, inférieures ou égales à 5 mm
- Grade B : au moins une lésion muqueuse de plus de 5 mm mais sans aucune confluence entre les sommets des 2 plis.
- Grade C : au moins une érosion continue entre les sommets de 2 plis ou plus, mais non circonférentielle.
- Grade D : lésion muqueuse circonférentielle.
La pH-mĂ©trie Ćsophagienne
Elle mesure l'aciditĂ© de l'Ćsophage par une petite sonde dont l'extrĂ©mitĂ© est positionnĂ©e Ă quelques centimĂštres au-dessus du sphincter infĂ©rieur de l'Ćsophage. Cette sonde, reliĂ©e Ă un boĂźtier enregistreur, est introduite par le nez. C'est le seul examen qui confirme de façon certaine un reflux gastro-Ćsophagien, en dĂ©terminant son aciditĂ© (pH infĂ©rieur Ă 4), sa frĂ©quence (reste normal si le reflux occupe moins de 5 % des 24 h), son horaire, etc. L'examen est cependant dĂ©sagrĂ©able et reste rĂ©servĂ© aux cas incertains.
Une capsule enregistreuse sans fil a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©e[48] : elle est fixĂ©e au bas Ćsophage au cours d'une fibroscopie et communique Ă l'extĂ©rieur par ondes Ă©lectromagnĂ©tiques. Elle se dĂ©tache spontanĂ©ment de la paroi au bout de 24 Ă 48 h et est ensuite Ă©jectĂ©e par les voies naturelles. C'est une technique coĂ»teuse, encore au stade de l'Ă©valuation en 2003.
La pH-mĂ©trie doit ĂȘtre faite aprĂšs arrĂȘt de tout traitement anti-secrĂ©toire. Elle montre (ou non) une corrĂ©lation entre les symptĂŽmes et les Ă©pisodes de reflux[49]. Un reflux peut toutefois ĂȘtre non acide (et donc non dĂ©tectĂ© par la pH-mĂ©trie) et symptomatique. L'examen peut ĂȘtre alors couplĂ© avec une bio-impĂ©dance Ćsophagienne qui dĂ©tecte les reflux non acides[50]. Le nombre d'Ă©pisodes de reflux et l'impĂ©dance de base sont des mesures exploratoires qui peuvent complĂ©ter l'Ă©valuation du temps d'exposition Ă l'acide[5]. « Chez les patients prĂ©sentant une probabilitĂ© Ă©levĂ©e de RGO (Ćsophagite de grade C et D, muqueuse de Barrett prouvĂ©e par l'histologie > 1 cm, stĂ©nose peptique, contrĂŽle antĂ©rieur du pH positif) et des symptĂŽmes persistants, une surveillance de l'impĂ©dance du pH doit ĂȘtre effectuĂ©e pendant le traitement »[5].
Une autre dimension importante est le « temps d'exposition à l'acide » (ou AET, pour Acid exposure time)[51] - [5].
Autres examens
La manomĂ©trie Ćsophagienne explore la cause du reflux. Elle consiste Ă mesurer la pression dans diffĂ©rentes zones de l'Ćsophage au moyen d'un tube souple et creux, que le patient avale et qui est reliĂ© Ă un capteur de pression. On recherchera une baisse du tonus du sphincter infĂ©rieur de l'Ćsophage, ou un trouble moteur associĂ©. Les donnĂ©es le retrouvĂ©es lors d'un reflux banal sont peu spĂ©cifiques et ne permettent guĂšre d'en Ă©tayer le diagnostic[44]. Elles permettent parfois d'en dĂ©terminer le mĂ©canisme dans des cas rares, comme lors d'une achalasie de l'Ćsophage, correspondant Ă une absence totale de contraction de cet organe. Elle peut aider au positionnement correct de la sonde de pH-mĂ©trie[52].
La scintigraphie permet de rechercher une radioactivitĂ© rĂ©siduelle inhalĂ©e Ă la suite d'un reflux au niveau des poumons. Cet examen se fait en milieu hospitalier et peut ĂȘtre intĂ©ressant chez le nourrisson ou le petit enfant.
Le test de Bernstein est un test psychophysiologique, obsolĂšte depuis la pH-mĂ©trie Ćsophagienne, qui Ă©tait indiquĂ© dans les douleurs thoraciques d'origine Ćsophagienne ; il nĂ©cessitait la pleine coopĂ©ration du malade[53].
Le transit Ćsophagien consiste Ă faire avaler au patient une pĂąte radio-opaque et de suivre sa progression dans le tube digestif. Cet examen permet de visualiser certaines complications (rĂ©trĂ©cissements) ou certains terrains favorisants (hernie hiatale).
Une Ă©chographie abdominale peut ĂȘtre effectuĂ©e Ă la recherche d'une hypertrophie du pylore.
Traitement
Le traitement peut ĂȘtre mĂ©dical ou chirurgical. Les mĂ©dicaments (sels d'aluminium, antihistaminiques anti-H2, inhibiteurs de la pompe Ă protons) sont trĂšs efficaces, souvent bien tolĂ©rĂ©s et surtout permettent de passer outre ou, en tous cas, d'allĂ©ger des rĂ©gimes pĂ©nibles et antisociaux.
Une autre forme de traitement fort simple consiste Ă pratiquer plusieurs Ă©ructations. Une Ă©tude japonaise a montrĂ© que l'estomac peut contenir jusqu'Ă quatre litres d'air. L'air coincĂ© peut ainsi transformer l'estomac en bombe aĂ©rosol repoussant les acides gastriques et les aliments vers l'Ćsophage. Les Ă©ructations peuvent donc rĂ©duire la prĂ©sence d'air et ainsi la pression des aliments vers l'Ćsophage[54].
Plusieurs recommandations ont été publiées sur la prise en charge du reflux, notamment en 2008 par l'American College of Gastroenterology (en)[55].
Prévention : éviter les facteurs aggravants
Il existe des « preuves physiologiques »[28] que certains aliments favorisent le reflux gastro-Ćsophagien : Le rĂ©gime mĂ©diterranĂ©en semble protĂ©ger contre le reflux[56], alors que la prise frĂ©quente de cafĂ©[35], d'alcool[40], de tabac et aliments riches en graisse et/ou sucrĂ©s[35] (chocolat y compris)[28] ou de menthe poivrĂ©e[28] favorisent le reflux, parfois en inhibant le sphincter infĂ©rieur de l'Ćsophage ; ils doivent donc ĂȘtre diminuĂ©s ou proscrits en cas de reflux, les boissons alcoolisĂ©es notamment car « quels que soient le type et la dose de boisson impliquĂ©e, l'alcool facilite le dĂ©veloppement du reflux gastro-Ćsophagien en rĂ©duisant la pression du sphincter Ćsophagien infĂ©rieur et la motilitĂ© Ćsophagienne. Les boissons alcoolisĂ©es fermentĂ©es et non distillĂ©es augmentent les taux de gastrine et la sĂ©crĂ©tion d'acide. L'acide succinique et l'acide malĂ©ique prĂ©sents dans certaines boissons alcoolisĂ©es stimule aussi la sĂ©crĂ©tion d'acide »[40].
De faibles doses d'alcool accĂ©lĂšrent la vidange gastrique, alors que des doses Ă©levĂ©es causent un retard de la vidange en freinant la motilitĂ© intestinale. Boire de l'alcool favorise la gastrite superficielle et la gastrite atrophique chronique, mais son pouvoir d'induction de l'ulcĂšre gastro-duodĂ©nal est discutĂ© dans le cas du vin rouge, car en tant que boisson alcoolisĂ©e il est bactĂ©ricide contre Helicobacter pylori et d'autres bactĂ©ries survivant dans l'estomac et Ă©ventuellement entĂ©ropathogĂšnes, mais d'autre part (chez la personne en bonne santĂ©, par rapport Ă de l'eau comme boisson, et mĂȘme en quantitĂ© modĂ©rĂ©e) le vin rouge, s'il n'augmente pas le pH gastrique (comme n'importe quelle autre boisson), il augmente la motilitĂ© Ćsophagienne et la durĂ©e de la pĂ©riode postprandiale ce qui expose Ă des remontĂ©es acides[57]. Enfin, de maniĂšre gĂ©nĂ©rale tous les alcools altĂšrent aussi le foie, et l'intestin, en favorisant les diarrhĂ©es et la malabsorption source de carences en anti-oxydants[40].
La vitamine C augmentent la sĂ©crĂ©tion acide de l'estomac et doit ĂȘtre consommĂ©e avec prĂ©caution. L'efficacitĂ© rĂ©elle de ces mesures n'a cependant pas Ă©tĂ© dĂ©montrĂ©e[44]. Le choix des aliments recommandĂ©s pour Ă©viter les reflux gastro-Ćsophagiens ne devrait pas reposer sur l'aciditĂ© de l'aliment comme le veut la croyance populaire mais plutĂŽt sur sa rĂ©action lorsqu'il subit la prĂ©sence de l'aciditĂ© de l'estomac. Les tomates, oignons et agrumes (malgrĂ© la vitamine C) devraient donc en effet ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des aliments qui peuvent aider Ă combattre les reflux gastro-Ćsophagiens. Ces aliments courants provoquent de fortes « rĂ©actions alcalines » et sont recommandĂ©s en remplacement ou ajout aux diverses recommandations mĂ©dicales : abricot, avocat, canneberge, carotte, concombre, datte, Ă©pinard, graine de soja, fĂšve de Lima, soja vert germĂ©, jus de lĂ©gumes frais et/ou de fruits frais, haricot, navet, olive noire, raisin, tangerine, taro.
Remarque : un cas particulier est le jus d'orange qui, plus ou moins selon le type d'orange, peut dĂ©clencher une rĂ©action de brĂ»lure acide de l'Ćsophage chez des patients sujets ou non sujets au reflux, mais le changement de la pression du sphincter Ćsophagien infĂ©rieur (PSOI), ce qui laisse penser qu'« un reflux gastro-Ćsophagien est peu susceptible d'ĂȘtre le mĂ©canisme des brĂ»lures d'estomac induites par le jus d'orange »[58].
Les aliments gras ne sont pas conseillés, mais le gras animal (beurre, saindoux...), la margarine et les huiles végétales ne sont pas des aliments aggravant le niveau d'acidité durant la digestion s'ils sont consommés tels quels (ex. : huile d'olive en vinaigrette).
Remarque : l'ingestion accidentelle d'une pile bouton, outre un empoisonnement par les mĂ©taux peut brĂ»ler/Ă©roder la paroi de l'Ćsophage[59]. Une Ă©tude rĂ©cente (2020) a montrĂ© (chez le porc), que l'acide libĂ©rĂ© par une pile bouton mise en contact avec des segments d'Ćsophage induit une Ă©rosion sĂ©vĂšre de la surface de l'Ćsophage, mais qui peut ĂȘtre trĂšs attĂ©nuĂ©e si le tissu a prĂ©alablement Ă©tĂ© enduit d'huile vĂ©gĂ©tale comestible[60].
L'utilisation du vinaigre de cidre est recommandée bien qu'acide car contenant des enzymes neutralisant les reflux acides ; c'est un remÚde peu connu mais efficace et utilisé depuis des générations. Il est aussi peu coûteux.
Des Ă©tudes ont montrĂ© que « l'Ă©lĂ©vation de la tĂȘte de lit et la position de dĂ©cubitus latĂ©ral gauche ont amĂ©liorĂ© le temps global pendant lequel le pH Ćsophagien Ă©tait infĂ©rieur Ă 4,0 »[28], mais cette mesure concerne les symptĂŽmes essentiellement nocturnes (certains reflux Ă©tant strictement diurnes)[44]. En cas de symptĂŽmes lĂ©gers, prĂ©fĂ©rer dormir sur le cĂŽtĂ© gauche (estomac en bas), plutĂŽt que sur le cĂŽtĂ© droit (estomac en haut) : cela s'explique simplement par gravitĂ©.
Une frĂ©quence lĂ©gĂšrement accrue est remarquĂ©e chez les personnes rĂ©guliĂšrement amenĂ©es Ă se pencher en avant, le dos courbĂ©, durant un travail, une activitĂ© physique rĂ©guliĂšre ou une posture constante (ĂȘtre assis sur une chaise peut suffire si la posture n'est pas saine et si cela est prolongĂ© durant de nombreuses annĂ©es).
Le stress est un facteur aggravant, voire déclencheur. Les boissons gazeuses peuvent augmenter la fréquence des reflux.
Une bonne hygiÚne de vie est recommandée, au moins durant la période de rétablissement :
- fractionner les prises alimentaires ; manger en petite quantité mais plus fréquemment ;
- prendre le temps de manger et bien mastiquer, ce qui favorise la salivation et l'imprégnation du bol alimentaire de salive (dont les enzymes contribuent à la digestion).
Chez le sujet sain, le dĂ©bit sanguin alimentant les glandes salivaires augmente aprĂšs stimulation (par ex par le dĂ©pĂŽt sur la langue d'1 ml de jus de citron). Plus ce dĂ©bit augmente, plus grande est la quantitĂ© de salive produite. Il a Ă©tĂ© constatĂ© qu'Ă taille Ă©gale de glande salivais sous-maxillaire, les patients atteints de reflux produisent significativement moins de salive que les patients sains, ce qui laisse penser qu'« une diminution de la fonction sĂ©crĂ©toire salivaire est impliquĂ©e dans la pathologie du reflux gastro-Ćsophagien »[61] ; - Ă©viter de boire de l'eau lors du repas ; mieux vaut en boire un peu avant ou aprĂšs[62] ;
- ne pas s'allonger ni prendre la position du décubitus dans les 3 heures suivant un repas ;
- chez la personne obÚse ou en surpoids, perdre du poids est une mesure souvent efficace[33] (une corrélation importante entre les symptÎmes et le poids est démontrée, chez la femme notamment)[63]. Ceci peut diminuer, voire supprimer les symptÎmes[64].
Selon une mĂ©ta-analyse[33] de 2005, basĂ©e sur 9 Ă©tudes antĂ©rieures sur l'association de l'indice de masse corporelle (IMC) avec les symptĂŽmes du RGO : 6 de ces Ă©tudes concluaient Ă un lien significatif[33]. 6 Ă©tudes sur 7 ont concluaient Ă un lien entre l'IMC et lâĆsophagite Ă©rosive, et 6 sur 7 avec l'adĂ©nocarcinome de l'Ćsophage (et 4 Ă©tudes sur 6 trouvaient un lien avec l'adĂ©nocarcinome du cardia[33]. 8 Ă©tudes montraient une relation entre le degrĂ© d'IMC et le risque d'adĂ©nocarcinome de l'Ćsophage[33].
Traitement médicamenteux
Seuls (c'est-Ă -dire sans modifications du mode de vie qui sont le traitement de premiĂšre intention), ils sont souvent non curatifs, car ne traitant pas la cause[28]. L'arrĂȘt de ces mĂ©dicaments se traduit assez souvent par une rĂ©cidive des symptĂŽmes. Parfois la guĂ©rison est spontanĂ©e.
- La prise d'antiacides avant les repas ou symptomatiquement aprÚs l'apparition des symptÎmes peut réduire l'acidité gastrique (en augmentant le pH).
- La prise d'antihistaminiques H2 gastriques tels la ranitidine ou la famotidine peut réduire la sécrétion de suc gastrique acide.
- Les inhibiteurs de la pompe à protons, tels l'oméprazole, sont en général plus efficaces en matiÚre de réduction de la sécrétion d'acide gastrique. La prescription de ces derniers peuvent constituer un test diagnostique avec une bonne sensibilité[65]. Tous les médicaments de cette classe se valent quant à l'efficacité sur les symptÎmes[66].
- Les agents prokinétiques comportent la dompéridone, le métoclopramide, le cisapride. Un membre de cette classe a été retiré du marché dans certains pays (risque de bloc de branche et de torsades de pointe), dans d'autres, par exemple la Belgique, il fait l'objet d'une rÚglementation et d'une surveillance accrue. La dompéridone ou le métoclopramide n'ont pas d'efficacité démontrée[67].
- Les surnageants, composés d'alginate de sodium et de bicarbonate de sodium diminuent les symptÎmes en tamponnant en partie l'acidité gastrique par les bicarbonates, et en isolant mécaniquement la zone inflammatoire par l'alginate de sodium : les alginates « surnagent » en milieu acide.
- Un protecteur de la muqueuse Ćsophagienne sous forme d'une combinaison liquide d'acide hyaluronique, de sulfate de chondroĂŻtine et de poloxamĂšre 407 [68], qui forme Ă tempĂ©rature corporelle un hydrogel bioadhĂ©sif qui se rĂ©partit sur la paroi Ćsophagienne[69], la protĂ©geant ainsi des dommages causĂ©s par les acides gastriques et la pepsine[68]. L'acide hyaluronique et le sulfate de chondroĂŻtine soulagent des symptĂŽmes du reflux[68] - [70] - [71] et contribuent Ă la rĂ©gĂ©nĂ©ration et Ă la cicatrisation de la muqueuse endommagĂ©e [72] - [73] - [74].
En cas d'Ćsophagite, les inhibiteurs de la pompe Ă protons sont sensiblement plus efficaces que les antihistaminiques H2[75].
La maladie Ă©tant chronique, le traitement doit ĂȘtre poursuivi sur une trĂšs longue durĂ©e.
Traitement chirurgical
La fundoplicature reste thĂ©oriquement rĂ©servĂ©e aux cas graves et rebelles aux traitements par mĂ©dicaments, ou rĂ©cidivant Ă l'arrĂȘt de ceux-ci. Il consiste Ă replier l'estomac de maniĂšre Ă renforcer la jonction entre ce dernier et l'Ćsophage. Elle a Ă©tĂ© testĂ©e pour la premiĂšre fois au dĂ©but des annĂ©es 1950[76]. Cette chirurgie peut ĂȘtre faite par laparotomie ou par cĆlioscopie. Ce type de traitement amĂ©liore parfois mieux les symptĂŽmes que le traitement mĂ©dicamenteux seul[77], parfois non[78].
Perspectives thérapeutiques
Des traitements par voie fibroscopique ont été proposés mais restent à évaluer. Ils sont réservés à des cas particuliers :
- application d'une radiofrĂ©quence dans le bas Ćsophage provoquant une mini brĂ»lure de ce dernier, entraĂźnant l'amĂ©lioration des symptĂŽmes, la diminution du risque de survenue d'une oesophagite et permettant un diminution du traitement mĂ©dicamenteux[79].
- injection dans le sphincter musculaire d'un produit agissant probablement de maniÚre mécanique en épaississant ce dernier ;
- suture partielle du bas-Ćsophage par voie endoscopique[80], pour y restreindre le passage, technique semblant plus efficace sur les symptĂŽmes que les inhibiteurs de la pompe Ă protons[81]. L'effet Ă long terme reste discutĂ©, avec des rĂ©sultats contradictoires[82] - [83] ;
Il peut ĂȘtre Ă©galement mis en place, par voie chirurgicale, d'un dispositif magnĂ©tique au niveau du sphincter, avec de bons rĂ©sultats Ă court terme[84], comparable Ă ceux de la fundoplication[85]
Complications
Le reflux gastro-Ćsophagien est essentiellement bĂ©nin mais deux complications sont possibles, toutes deux secondaires Ă une Ćsophagite :
- la stĂ©nose Ćsophagienne peptique, secondaire Ă une cicatrisation fibreuse et qui peut se traduire par une dysphagie (difficultĂ© Ă avaler), pouvant nĂ©cessiter un traitement par introduction d'une bougie de dilatation[86] ;
- l'endobrachyĆsophage, mĂ©taplasie du bas Ćsophage pouvant conduire Ă une cancĂ©risation.
Voir aussi
Liens externes
Notes et références
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