Ennatosaurus
Ennatosaurus tecton
Ennatosaurus est un genre de synapsides Caseidae ayant vĂ©cu au milieu du Permien moyen (Roadien supĂ©rieur - Wordien infĂ©rieur) dans le nord de la Russie dâEurope[1]. Le genre nâest reprĂ©sentĂ© que par son espĂšce type, Ennatosaurus tecton, qui fut nommĂ©e en 1956 par Ivan Antonovich Efremov[2]. LâespĂšce est connue par au moins six crĂąnes associĂ©s Ă leurs mandibules (deux dâentre eux ayant conservĂ©s lâappareil hyoĂŻde), ainsi que par des ossements postcrĂąniens de plusieurs individus juvĂ©niles[3] - [4] - [5]. Ennatosaurus possĂšde le crĂąne caractĂ©ristique des casĂ©idĂ©s avec un museau court inclinĂ© vers lâavant et pourvu de trĂšs grandes narines externes. Il se distingue toutefois des autres casĂ©idĂ©s dĂ©rivĂ©s par un squelette postcrĂąnien aux proportions plus rĂ©duites comparĂ©es Ă la taille du crĂąne[3] - [5]. Comme chez les autres casĂ©idĂ©s Ă©voluĂ©s, les dents dâEnnatosaurus Ă©taient bien adaptĂ©es pour trancher et couper la vĂ©gĂ©tation[3]. La prĂ©sence dâun appareil hyoĂŻde trĂšs dĂ©veloppĂ© indique la prĂ©sence dâune langue massive et mobile, laquelle devait travailler en collaboration avec les dents palatines lors de la dĂ©glutition[3] - [6]. Avec un Ăąge Roadien supĂ©rieur-Wordien, Ennatosaurus fut lâun des derniers Caseidae connu[1] (avec le genre Lalieudorhynchus du sud de la France).
Ătymologie
Ennatosaurus tecton signifie âneuviĂšme lĂ©zard charpentierâ. LâĂ©trangetĂ© du nom de ce synapside va de pair avec son origine trĂšs inhabituelle puisque les noms de genre et dâespĂšce correspondent Ă la traduction en Grec de la signification des noms Russes des dĂ©couvreurs des premiers fossiles de cet animal. Le nom de genre est dĂ©diĂ© Ă Tatyana A. Devyataya (la forme fĂ©minine de Devyatyi dont le nom signifie âneuviĂšmeâ = "ennatos" en Grec) et de saurus signifiant lĂ©zard. LâespĂšce honore Mikhail Alekseevich Plotnikov (dâaprĂšs le Russe plotnik, signifiant âcharpentierâ = "tecton" en Grec)[7].
Description
Ennatosaurus est connu par plusieurs crĂąnes adultes (PIN 1580/14, 17 (lâholotype), 122, 4543/1), ainsi que par un crĂąne juvĂ©nile (PIN 1580/24) associĂ© Ă de nombreux Ă©lĂ©ments postcrĂąniens provenant de plusieurs individus[3] - [4]. Tous ces Ă©lĂ©ments ont permis la reconstitution dâun squelette composite. Contrairement Ă tous les autres casĂ©idĂ©s dĂ©rivĂ©s qui possĂšdent un crĂąne minuscule par rapport Ă la taille du corps, Ennatosaurus se distingue par la petite taille du squelette postcrĂąnien comparĂ© Ă celle du crĂąne. Cependant, la quasi-totalitĂ© du matĂ©riel postcrĂąnien dâEnnatosaurus appartient Ă des individus juvĂ©niles et les proportions inhabituelles de ce squelette composite pourraient sâexpliquer par le montage dâun crĂąne adulte sur un squelette juvĂ©nile. Toutefois, lâexistence de quelques os dâindividus subadultes et adultes suggĂšre que Ennatosaurus avait effectivement un corps proportionnellement plus rĂ©duit que celui des autres casĂ©idĂ©s dĂ©rivĂ©s[3] - [5]. Le plus grand crĂąne adulte dâEnnatosaurus (lâholotype PIN 1580/17) mesure environ 17 cm de long, une taille similaire au crĂąne de Cotylorhynchus romeri, alors que les quelques os adultes dâEnnatosaurus sont moitiĂ© moins grands que les Ă©lĂ©ments adultes correspondant chez C. romeri[3].
Comme chez les autres Caseidae, Ennatosaurus possĂšde un crĂąne trĂšs court au museau fortement inclinĂ© vers lâavant et de trĂšs grandes narines externes. Ennatosaurus se distingue toutefois par sa rĂ©gion faciale proportionnellement plus allongĂ©e que chez Casea et Euromycter. Le rameau dorsal de chaque prĂ©maxillaire contribue Ă une barre intranariale Ă©troite, plus Ă©troite que celle dâEuromycter, mais de largeur similaire Ă celle de Cotylorhynchus romeri. Le toit crĂąnien se singularise par la trĂšs grande contribution du frontal Ă la marge dorsale de lâorbite. Il occupe environ 50% de la longueur de cette derniĂšre alors que chez Euromycter et Cotylorhynchus romeri le frontal reprĂ©sente moins de 10% de la marge de lâorbite. Le jugal est trĂšs caractĂ©ristique en possĂ©dant un rameau antĂ©rieur Ă©pais et trĂšs allongĂ© crĂ©ant une surface de contact Ă©tendu avec le lacrymal. Chez dâautres Caseidae, le rameau antĂ©rieur est trĂšs mince et se termine par un contact vertical Ă©troit avec le lacrymal. Ennatosaurus diffĂšre Ă©galement de tous les autres Caseidae par ses fenĂȘtres temporales nettement plus grandes que les narines et les orbites, son palais pourvu dâun parasphĂ©noĂŻde plus Ă©troit, et sa denture supĂ©rieure plus rĂ©duite en nombre. Chez Ennatosaurus, chaque prĂ©maxillaire et maxillaire ne porte respectivement que deux et huit dents contre respectivement 4 et 11 dents chez Euromycter et 3 et 15 ou 16 dents chez Cotylorhynchus romeri[3] - [4]. Les dents prĂ©maxillaires sont de forme conique, les dents suivantes sont spatulĂ©es avec cinq Ă sept cuspides disposĂ©es longitudinalement[4].
Le squelette postcrĂąnien montre Ă©galement de nombreux caractĂšres originaux. Les centra vertĂ©braux de toutes les rĂ©gions du corps sont caractĂ©risĂ©es par la prĂ©sence de deux fosses ventrolatĂ©rales bien dĂ©veloppĂ©es, profondes, et allongĂ©es antĂ©ropostĂ©rieurement. Les Ă©pines neurales des vertĂšbres montrent une section en losange sur toute sa longueur, une condition similaire Ă celle observĂ©e chez Ruthenosaurus. Les vertĂšbres de la «rĂ©gion lombaire» sont caractĂ©risĂ©es par lâabsence de cĂŽtes fusionnĂ©es ou co-ossifiĂ©es (une caractĂ©ristique Ă prendre avec prudence compte tenu du stade juvĂ©nile des spĂ©cimens). LâhumĂ©rus possĂšde un ectĂ©picondyle robuste et un foramen ectĂ©picondylien pas complĂštement fermĂ©. Une fosse profonde et bien marquĂ©e est prĂ©sente immĂ©diatement en arriĂšre du contrefort acĂ©tabulaire de l'ilium. Le fĂ©mur est trĂšs caractĂ©ristique, sa surface articulaire proximale est beaucoup plus large dorsoventralement qu'antĂ©ropostĂ©rieurement et une crĂȘte osseuse Ă©levĂ©e et robuste sâĂ©tend de la partie la plus Ă©troite de la diaphyse jusquâau dessus du condyle postĂ©rieur avec lequel elle fusionne pour former une seule structure de support. La fosse intertrochantĂ©rienne est beaucoup plus dĂ©veloppĂ©e mĂ©diolatĂ©ralement qu'antĂ©ropostĂ©rieurement en lien avec la conformation de la surface articulaire proximale. Le tibia se distingue par sa diaphyse aplatie Ă section transversale subelliptique et non circulaire comme câest le cas chez la plupart des casĂ©idĂ©s nâayant pas subie de dĂ©formation diagĂ©nĂ©tique. La main nâest pas connue en totalitĂ© et les Ă©lĂ©ments prĂ©servĂ©s indique une formule phalangienne 2-2-3-?-2. Elle Ă©tait probablement similaire Ă celle du pied, plus complet, dont la formule est 2-2-3-3-2. Les orteils sont courts et terminĂ©s par de petites phalanges unguĂ©ales semblables Ă des griffes Ă©moussĂ©es[3] - [5].
Répartition géographique et stratigraphique
Tous les fossiles dâEnnatosaurus tecton proviennent de lâoblast dâArkhangelsk dans le nord de la Russie dâEurope. Lâholotype ainsi que la majoritĂ© des spĂ©cimens rĂ©fĂ©rĂ©s furent dĂ©couverts en 1955 dans la Formation de Nijneoustinskaia (Membre de Karpogorskaia), sur les rives de la riviĂšre Pinega, et proviennent de la localitĂ© de Moroznitsa prĂšs de la ville de Karpoga (Karpogory) dans le district de Pinezhsky[3] - [8] - [4]. Un crĂąne presque complet avec la mĂąchoire infĂ©rieure, un fragment de joue d'un deuxiĂšme crĂąne, et un dentaire incomplet, furent Ă©galement dĂ©couvert dans la Formation de Krasnoshelskaia, prĂšs du village de Nisogora (district de Leshukonskii), sur les berges du fleuve Mezen Ă plus dâune centaine de kilomĂštres Ă lâest du premier site[8] - [4]. Ennatosaurus est connu depuis longtemps comme Ă©tant lâun des derniers Caseidae avec un Ăąge Permien moyen. Mais un Ăąge plus prĂ©cis fut difficile Ă Ă©valuer car Ennatosaurus est lâunique vertĂ©brĂ© connu du site de Moroznitsa[9] - [3]. Un Ăąge Capitanien fut parfois Ă©voquĂ©[4]. Toutefois, le gisement de Nisogora, dâoĂč proviennent Ă©galement des restes dâEnnatosaurus, a livrĂ© une faune plus variĂ©e contenant les parareptiles Nyctiphruretus acudens, Macroleter poezicus et Lanthaniscus efremovi, le Varanopidae Mesenosaurus romeri, et le thĂ©rapside juvĂ©nile dâaffinitĂ© incertaine Niaftasuchus zekkeli[10]. Toutes ces espĂšces (sauf Ennatosaurus) sont Ă©galement connues dans au moins huit autres gisements de lâoblast dâArkhangelsk qui ont livrĂ© en plus les parareptiles Lanthanolania ivachnenkoi, Bashkyroleter mesensis et Nycteroleter ineptus, le Varanopidae Pyozia mesensis, et plusieurs thĂ©rapsides basaux : les Nikkasauridae Nikkasaurus tatarinovi, Reiszia gubini et R. tippula, le biarmosuchien Alrausuchus tagax[10], et un Anteosauridae basal encore non dĂ©crit[11] - [12]. Cette faune constitue lâassemblage de Mezen lequel est plus ou moins contemporain de lâassemblage dâOtchior (ou Ocher). Des donnĂ©es magnĂ©tostratigraphiques suggĂšrent que ces deux assemblages fauniques seraient dâĂąge Roadien supĂ©rieur-Wordien infĂ©rieur[13] - [1]. ComparĂ© Ă lâassemblage dâOtchior largement dominĂ© par les thĂ©rapsides (Biarmosuchus, Estemmenosuchus, lâantĂ©osaure Archaeosyodon et lâanomodonte Otsheria), lâassemblage de Mezen, caractĂ©risĂ© par la prĂ©sence de pĂ©lycosaures, la grande diversitĂ© de petits parareptiles terrestres, et des thĂ©rapsides plus primitifs, semble plus archaĂŻque. Ces deux assemblages Ă©taient gĂ©ographiquement sĂ©parĂ©s par une Ă©tendue marine. Il est possible que lâassemblage de Mezen soit une faune relique qui vivait dans les rĂ©gions de plaines marĂ©cageuses Ă lâouest de la Mer Kazanienne, tandis que la faune dâOtchior vivait Ă lâest de cette mer, le long des monts PalĂ©o-Oural[1] - [10].
En 2016, Eudald Mujal et des collĂšgues ont attribuĂ© Ă cf. Ennatosaurus tecton, une vertĂšbre dorsale postĂ©rieure incomplĂšte (incluant la moitiĂ© dorsale du centrum et la base de lâarc neural) trouvĂ©e dans des dĂ©pĂŽts datant possiblement du Permien moyen de La Vansa i FĂłrnols dans le Nord de lâEspagne (province de LĂ©rida)[14]. Cette attribution provisoire Ă©tait basĂ©e sur la prĂ©sence dâune petite fosse sur la surface latĂ©rale du centrum. Cependant, Romano et des collĂšgues ont montrĂ© que la trĂšs petite taille et lâemplacement de la fosse de la vertĂšbre espagnole ne correspondent pas aux grandes fosses allongĂ©es, bien visibles en vues latĂ©rale et ventrale sur toutes les vertĂšbres dâEnnatosaurus tecton[5] (comme Olson lâavait dĂ©jĂ figurĂ© en 1968[3]). La petite fosse de la vertĂšbre espagnole reprĂ©sente probablement une perforation pour les vaisseaux sanguins, et son propriĂ©taire reste pour lâinstant non identifiĂ©[5].
Phylogénie
Dans la premiĂšre analyse phylogĂ©nĂ©tique des Caseidae publiĂ©e en 2008, Ennatosaurus fut identifiĂ© comme le groupe frĂšre dâun clade contenant Cotylorhynchus romeri et Angelosaurus dolani. LâĂąge Wordien dâEnnatosaurus par rapport aux deux espĂšces AmĂ©ricaines datĂ©es du Permien infĂ©rieur indique que lâespĂšce Russe est le produit dâune lignĂ©e fantĂŽme de plusieurs millions dâannĂ©es[4].
Ci-dessous le premier cladogramme des Caseidae publié par Maddin et al. en 2008[4].
Caseasauria |
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En 2015, Romano et Nicosia ont publiĂ© la premiĂšre Ă©tude cladistique incluant presque tous les Caseidae (Ă lâexception dâAlierasaurus ronchii de Sardaigne, jugĂ© trop fragmentaire). Dans leur analyse la plus parcimonieuse, Ennatosaurus est plus Ă©troitement apparentĂ© au genre Angelosaurus. Toutefois, la relation Ă©troite entre Angelosaurus dolani et Ennatosaurus tecton est peut ĂȘtre faussĂ©e par l'extrĂȘme incomplĂ©tude du matĂ©riel de lâespĂšce nord-AmĂ©ricaine[15].
Ci-dessous, le cladogramme des Caseidae utilisant le principe de parsimonie publié par Romano et Nicosia en 2015[15].
Deux autres cladogammes publiĂ© en 2020 par Berman et des collĂšgues rĂ©cupĂšrent Ennatosaurus comme le groupe frĂšre dâun clade contenant les taxons Angelosaurus romeri, Alierasaurus ronchii, et les trois espĂšces de Cotylorhynchus[16].
Ci-dessous, les deux cladogrammes des Caseidae publié par Berman et des collÚgues en 2020[16].
Dans le cladogramme publié par Werneburg et des collÚgues en 2022, Ennatosaurus occupe une position similaire entre Euromycter et tous les caséidés plus dérivés[17].
Ci-dessous, le cladogramme publié par Werneburg et des collÚgues en 2022[18].
Liens externes
- Ressources relatives au vivant :
Notes et références
Notes
Références
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