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Codéine

La codéine, ou 3-méthylmorphine, est l'un des alcaloïdes contenus dans le pavot somnifère (Papaver somniferum). Elle est utilisée comme analgésique et comme antitussif narcotique. Elle a été isolée pour la première fois en 1832 par le chimiste français Pierre Jean Robiquet. Son nom provient du nom en grec de la tête de pavot : κώδεια, kốdeia.

Codéine
Image illustrative de l’article Codéine
Image illustrative de l’article Codéine
Structure 2D de la codéine et modèle boules-bâtonnets
Identification
Nom UICPA (5R,6S)-7,8-didehydro-4,5-époxy-3-méthoxy-N-méthylmorphinan-6-ol
No CAS 76-57-3
No ECHA 100.000.882
No CE 200-969-1
Code ATC R05DA04 N02AA59
DrugBank DB00318
PubChem 5284371
SMILES
InChI
Apparence Poudre blanche • Solution limpide
Propriétés chimiques
Formule C18H21NO3 [Isomères]
Masse molaire[1] 299,364 2 ± 0,017 g/mol
C 72,22 %, H 7,07 %, N 4,68 %, O 16,03 %,
pKa 8.21[2]
Propriétés physiques
T° fusion 157,5 °C[3] - [4]
Solubilité 7,9 g·L-1 dans l'eau à 25 °C[5]


Soluble dans l'éthoxyéthane et le benzène[3]

Précautions
Directive 67/548/EEC
Nocif
Xn


Données pharmacocinétiques
Biodisponibilité ~ 90 % (orale)
Liaison protéique importante
MĂ©tabolisme HĂ©patique (CYP2D6)
Demi-vie d’élim. 2-4h[6]
Excrétion

Urinaire

Considérations thérapeutiques
Classe thérapeutique Analgésique opiacé • Antitussif opiacé
Voie d’administration Orale, intrarectale, SC, IM
Conduite automobile Déconseillée
Antidote naloxone
Caractère psychotrope
Catégorie Hypnotique analgésique • narcotique
Mode de consommation

Ingestion

Risque de dépendance Élevé (physique et psychique) si usage non thérapeutique ou à doses élevées/sur le long terme
Composés apparentés
Autres composés

codéthyline (éthylmorphine)


Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire.
Molécule de codéine.

Morphinique mineur, la codéine est utilisée seule mais aussi en association avec du paracétamol ou de l'ibuprofène pour en potentialiser l'effet analgésique, souvent dans des préparations classées au palier 2 de l'échelle des antalgiques de l'OMS[7].

Chimie

La codéine est un alcaloïde morphinique, présent sous forme de base dans l'opium.

Néanmoins, elle est utilisée en thérapeutique majoritairement sous forme de sels (phosphate notamment).

Elle est extrêmement proche de la morphine, dont elle ne diffère que par un groupement méthyle en position 3. On peut d'ailleurs effectuer la synthèse de la morphine à partir de codéine par déméthylation[8]. Des laboratoires clandestins réalisent d'ailleurs cette synthèse pour en tirer la morphine, utilisée comme précurseur de l'héroïne[9] et d'autres synthétisent la désomorphine à partir de la codéine.

Pharmacologie

Pharmacocinétique

Lors d'une prise par voie orale, la codéine est absorbée dans l'estomac et l'intestin, et subit un important effet de premier passage hépatique. Elle est transformée par déméthylation en morphine à hauteur de 10 %[10].

L'élément responsable de cette transformation est une enzyme, le cytochrome CYP2D6.

Toutefois tous les individus ne présentent pas la même fonction enzymatique, et le CYP2D6 présente un fort polymorphisme génétique. Certains individus métaboliseront vite, et d'autres très lentement, avec d'un côté un risque de surdose, et de l'autre un risque d'inefficacité du traitement.

La demi-vie d'Ă©limination de la codĂ©ine est de 2 Ă  4 heures.

Pharmacodynamie

L'effet analgĂ©sique de la codĂ©ine est rĂ©putĂ© plus long que celui de la morphine, Ă  cause de cette transformation et de la variĂ©tĂ© de mĂ©tabolites d'activitĂ© mineure qui lui sont corrĂ©lĂ©s. Toutefois, l'analgĂ©sie procurĂ©e n'est pas aussi efficace que celle de la morphine et certains effets recherchĂ©s ou secondaires de la codĂ©ine sont antagonistes ou très partiels par rapport Ă  ceux de la sĂ©dation morphinique, attĂ©nuant de fait fortement le risque d'overdose. En effet la morphine libĂ©rĂ©e par les molĂ©cules de codĂ©ine ne se concentre pas de la mĂŞme manière sur les rĂ©cepteurs endogènes que la morphine utilisĂ©e telle quelle. Son activitĂ© centrale est moins profonde, se montrant jusqu'Ă  30 fois moins puissante Ă  dose Ă©gale, c'est-Ă -dire 3 Ă  5 fois moins efficace Ă  dose comparable ou Ă©quivalente que la morphine dans une recherche d'analgĂ©sie ou de sĂ©dation importante (30 mg de codĂ©ine pour seulement 1 Ă  2 mg de morphine). Ceci limite d'autant sa capacitĂ© Ă  engendrer une dĂ©pendance physique intense. Les changements des concentrations plasmatiques de la codĂ©ine sont Ă©galement moins rapides, ce qui la rend lĂ  encore moins toxicomanogène que la morphine (l'effet de manque s'il apparaĂ®t arrive moins brusquement et avec moins d'intensitĂ©). De plus la codĂ©ine elle-mĂŞme inhibe le cytochrome CYP2D6, ce qui rĂ©duit sa transformation en morphine dès qu'elle se concentre. Ceci plafonne et retarde finalement son intolĂ©rance en cas d'utilisation prolongĂ©e, sans pour autant en changer son efficacitĂ© globale. Il est rare qu'une augmentation des doses soit nĂ©cessaire contrairement Ă  l'utilisation de morphine ou de morphinique majeur, mĂŞme Ă  dose modĂ©rĂ©e. En Ă©tude toxicologique, le codĂ©inomane s'avère augmenter lui aussi moins rapidement ses doses que le morphinomane.

La codéine s'utilise essentiellement par voie orale[11] - [12], son administration par voie intraveineuse exposant le sujet à de gros risques d'œdème pulmonaire par réaction histaminique ; la voie intraveineuse est surtout utilisée pour l'injection de petites doses morphiniques quand il n'est pas possible de l'administrer autrement. L'injection IV de codéine a pu permettre d'évaluer les quantités de morphine à administrer en cas d'accoutumance aux opiacés difficile à estimer chez un patient et suivant la réponse aux effets secondaires de la codéine par cette voie (les effets secondaires n'apparaissent pas par voie intraveineuse en dessous de la dose de dépendance relative à l'usager, mais ils deviennent puissants quand la dose est dépassée).

Indications thérapeutiques

Douleurs et toux sèche

La codéine est essentiellement utilisée dans le cadre du traitement de la douleur d'origine centrale (SNC, système nerveux central), soit en mono-thérapie dans les pays qui l'autorisent, soit associée au paracétamol ou à l'aspirine. Il existe une forme pédiatrique qui était délivrée uniquement sur ordonnance du fait de son dosage délicat chez l'enfant, mais l'Agence européenne du médicament recommande l'interdiction de son utilisation en 2015[13]. Les sels employés dans un cadre antalgique sont ceux de la codéine phosphate[14] (anhydride, CAS : 52-28-8, ou hémihydrate, CAS : 41444-62-6). Sur ordonnance, sa prescription peut atteindre 180 mg de codéine phosphate par jour, soit 135 mg de codéine base, mais peut monter jusqu'à 300 mg de codéine phosphate par jour pour certaines préparations et sous surveillance médicale accrue notamment en raison du seuil de toxicité du paracétamol qui lui est associé. En automédication, les préparations n'ont pas vocation à dépasser 150 mg de codéine phosphate par jour, cependant une forme prévoit de monter jusqu'à 250 mg si nécessaire et de manière temporaire. La codéine n'est pas employée dans un cadre analgésique mais antalgique. Si les doses de morphinique doivent être élevées, la morphine, délivrée sur ordonnance sécurisée, lui est préférée car elle ne présente pas à forte dose les effets secondaires désagréables de la codéine et qu'elle se montre aussi plus efficace. Si le paracétamol présent en association avec la codéine ne convient pas à l'usager (allergie, contre-indication), la dihydrocodéine, peut être prescrite par un médecin sur une ordonnance simple mais dans des mesures très strictes de délivrance.

Elle entre Ă©galement dans la pharmacopĂ©e des traitements antitussifs quand la toux est sèche (non grasse, non productive) ou d'irritation. Les formes en sirop des sels de codĂ©ine permettent une action rapide. La toux grasse ou d'expectoration ne doit pas ĂŞtre traitĂ©e par opiacĂ© Ă  moins de se montrer irritante ou Ă©puisante et de se faire sous surveillance mĂ©dicale. La codĂ©thyline (ou Ă©thylmorphine) aurait les mĂŞmes propriĂ©tĂ©s Ă  dose identique bien que son dosage soit le plus souvent moins important. Les formes de codĂ©ine employĂ©es comme antitussif sont plus variĂ©es que celles utilisĂ©es dans la douleur. On emploie la codĂ©ine base (absorption plus lente) ou diffĂ©rents sels (phosphate et camsilate). Le poids des sels peut engendrer une confusion quant Ă  la quantitĂ© rĂ©elle de codĂ©ine qu'ils contiennent. Ainsi, 25 mg de codĂ©ine camsilate correspondent Ă  près de 19,5 mg de codĂ©ine phosphate et 15 mg de codĂ©ine base. 10 mg de chlorhydrate de codĂ©thyline correspondent Ă  un peu plus de 8,4 mg de codĂ©thyline base. Les doses classiques chez l'adulte sont de 10 Ă  30 mg de codĂ©ine exprimĂ©e en base par unitĂ© de prise Ă  rĂ©pĂ©ter 2 Ă  4 fois par jour, de prĂ©fĂ©rence quand survient la toux et en respectant un espacement minimum de 4 Ă  6 heures entre chaque prise (soit 30 Ă  120 mg maximum de codĂ©ine base par jour, typiquement 15 mg deux Ă  quatre fois par jour). Un traitement antitussif est de courte durĂ©e et rĂ©servĂ© Ă  l'apparition des symptĂ´mes. Suivant les associations contenues dans les mĂ©dicaments, les doses prĂ©conisĂ©es et les modalitĂ©s de dĂ©livrance sont strictement Ă©noncĂ©es dans la notice et sur la boite. Les prĂ©parations fortes contenant de la codĂ©ine associĂ©e Ă  un expectorant mucolytique comme le sulfogaĂŻacol ne peuvent faire l'objet d'une dĂ©livrance en officine de plus d'une boite Ă  la fois en l'absence d'ordonnance mĂ©dicale. Ces prĂ©parations peuvent en effet entraĂ®ner une accumulation et une surinfection des mucus favorisĂ©s par le mucolytique qui ne sont plus naturellement expulsĂ©s, notamment au cours du sommeil, Ă  cause de l'inhibition du rĂ©flexe de la toux.

Codéine
Informations générales
Princeps
Classe Opiacé
Sels
  • CodĂ©ine phosphate,
  • CodĂ©ine phosphate hĂ©mihydrate,
  • CodĂ©ine camsilate
Identification
No CAS 76-57-3
No ECHA 100.000.882
Code ATC R05DA04
DrugBank 00318

Un usage prolongé ou abusif entraîne respectivement une tolérance, une accoutumance, une assuétude, puis une pharmacodépendance caractérisée (psychique et physique). Il est donc préférable de s'en passer pour un simple rhume en ayant recours à d'autres solutions (infusions de menthe/thym, miel) plus proportionnées.

Formes galéniques

On peut regrouper ces spĂ©cialitĂ©s dans deux catĂ©gories : les antitussifs, sous forme de comprimĂ©s ou de sirops, ils contiennent gĂ©nĂ©ralement moins de 20 mg de codĂ©ine, puis ceux destinĂ©s Ă  soulager les douleurs modĂ©rĂ©es Ă  sĂ©vères. Dans ce cas, la codĂ©ine est alors souvent associĂ©e avec du paracĂ©tamol ou de l'ibuprofène.

En France, jusqu'en , seules les spécialités faiblement dosées en codéine pouvaient être vendues sans ordonnance[15].

Le , le Ministère de la Santé annonce que tous les médicaments à base de codéine (ainsi que de dextrométhorphane, éthylmorphine et noscapine) seront désormais vendus sur ordonnance. Cette décision fait suite à l'augmentation des détournements récréatifs, certains ayant entrainé des décès[16].

Le cas de la psychiatrie

Avant l'interdiction de la consommation de l'opium et autres opiacés aux États-Unis (1906), la communauté médicale utilisait ces derniers afin de traiter certains troubles anxieux. De nos jours, la gamme de produits permettant de lutter contre ces troubles étant plus étoffée, il est d'usage de ne pas recourir à la morphine et à la codéine pour soigner ces pathologies psychologiques parfois invalidantes (à prédominance névrotique et psychosomatique). Les propriétés anxiolytiques et sédatives des opiacés sont cependant prises en compte lors du traitement de la douleur des personnes alitées dans le cadre de la maîtrise d'une situation inconfortable ou anxiogène pour le patient.

L'automédication, dont le cadre n'est parfois plus légal suivant les usages qui sont faits des produits codéinés, et la substitution quand elle est engagée, ne favorisent parfois plus que la molécule opiacée en lieu des traitements psychiatriques n'apportant pas de meilleure réponse sur les symptômes. Il n'est pas rare que la personne sous substitution ne demande ni ne nécessite plus certains de ses médicaments psychotropes ni ne décompense dans divers troubles qu'il pouvait être difficile de maîtriser, d'évaluer et de prévenir. Certaines formes diagnostiquées de maniaco-dépression comportant des épisodes d'angoisse ont montré des réponses sous substitution (Subutex) permettant l'arrêt total ou partiel des traitements psychiatriques initiaux (psycholeptiques, thymorégulateurs, avec cependant une difficulté à l'arrêt des benzodiazépines quand l'usage a été prolongé) sans réapparition de l'état pathologique au cours du traitement prolongé en opiacés. De même, la réponse au traitement par opiacés est positive dans les troubles de l'hyperactivité, ceci est dû à son profil dopaminergique caractéristique des dopants et de certains stupéfiants.

C'est souvent un usage détourné de la codéine (utilisation d'anti-douleurs hors de leur contexte) ou d'autres opiacés qui permet au patient de constater des effets positifs sur sa pathologie psychiatrique ou neurologique et d'induire par lui-même, mais à son risque, sans légalité et sans avis médical, ses premiers traitements psychotropes en automédication détournée, puis en traitement de substitution quand la prise des opiacés cherche à être maîtrisée, régulière et avouée (méthadone et buprénorphine, les médecins peuvent avoir recours à d'autres substances, dont l'opium et la morphine, dans le cadre d'une substitution et d'une stabilisation). La frontière entre un soulagement de troubles psychiques ou psychosomatiques tenaces et une toxicomanie par codéine que l'on pense récréative n'est pas caractéristique. Ce qui peut sembler être un acte de toxicomanie n'est parfois qu'un remède ultime à des symptômes douloureux lourds, sourds et handicapants qui trouvent alors un soulagement que les autres médicaments n'apportent pas (ceux-ci présentent parfois de très importants effets secondaires ou sur les fonctions vitales mais ce n'est pas cela que soulage la codéine ou la méthadone dans ses vertus psychotropes). On ne peut donc estimer une toxicomanie morphinique sans en connaitre la profondeur des maux psychiques et somatiques. Auquel cas, la substitution peut tenir lieu de remède adjuvant spécifique et opportun, parfois principal, dans le soulagement global de la manifestation psychiatrique et de ses troubles associés qui justifiaient l'usage de codéine détournée par le patient.

Il n'existe cependant pas d'étude récente ni de cas de littérature clinique attesté sur l'impact de la codéine et des opiacés sur les troubles psychotiques et, en dehors de l'observation individuelle dans la toxicomanie ou la substitution où l'on constate l'arrêt spontané du besoin de certains traitements, la médecine ne saurait les recommander ni même les proscrire formellement. Il semble cependant, à l'instar du personnage fictif du Dr House ou même de Sherlock Holmes représentatifs de deux types de morphinomanie, que les opiacés peuvent présenter la faculté d'entretenir des manifestations borderlines chez les personnes prédisposées à type de manie, d'exaltation ou encore de désinhibition avec logorrhée ainsi que de conduite addictive caractéristique, comme cela s'observe de manière beaucoup plus spécifique avec la cocaïne et l'ensemble des psychotropes dopants (extasy, amphétamines…). Ainsi, les propriétés positives ou négatives sur les troubles de la personnalité, la névrose ou encore la psychose ne sont pas à sous-estimer dans un traitement fort par codéine ou dans un mésusage suspecté qui peut témoigner d'une pathologie non décelée ou d'une absence d'efficacité relative des traitements en cours.

Effets indésirables

La codĂ©ine peut produire un Ă©tat gĂ©nĂ©ral de somnolence, il est gĂ©nĂ©ralement dĂ©conseillĂ© de prendre un mĂ©dicament contenant de la codĂ©ine avant de conduire une voiture ou tout autre engin mĂ©canique nĂ©cessitant une attention soutenue. En France, une mention de mise en garde figure sur les boĂ®tes de mĂ©dicaments incluant de la codĂ©ine (niveau 1 et niveau 2). L'effet apparaĂ®t le plus souvent comme fonction de la dose et en dĂ©but de traitement. Bien qu'avĂ©rĂ©, il reste rare et Ă©ventuellement peu marquĂ©. Cependant de manière occasionnelle, la simple prise de 15 mg de codĂ©ine peut dĂ©clencher cette sĂ©dation avec une intensitĂ© gĂŞnante. L'Ă©tat potentiel d'une fatigue initiale de l'individu peut s'avĂ©rer prĂ©dĂ©terminant, la codĂ©ine levant certaines barrières de rĂ©sistance Ă  la fatigue en agissant de manière non spĂ©cifique comme un hypnotique. Elle n'en montre cependant pas de qualitĂ© adaptĂ©e ni constante dans un tel usage. En outre elle provoque parfois une difficultĂ© d'endormissement du fait de certaines de ses propriĂ©tĂ©s excitantes, ce qui peut sembler paradoxal par rapport Ă  son effet sĂ©datif. D'autres facteurs sont Ă  prendre en compte tel que le sexe, l'âge, le poids ou encore l'Ă©ventualitĂ© d'un mĂ©taboliseur fort ; on parle de sensibilitĂ© individuelle. Au cours du traitement, ces signes disparaissent gĂ©nĂ©ralement en quelques jours. Ă€ dĂ©faut, il est recommandĂ© de rĂ©viser la posologie.

La codéine peut également induire un état d'euphorie caractéristique des opiacés, mais rarement sur des doses usuelles, même considérées comme modérées à fortes (30 à 60 mg de codéine phosphate par prise). Le soulagement apporté par le médicament en est souvent la manifestation dominante et cela ne doit pas être confondu avec un effet psychotrope présumé. En l'absence de maux, les manifestations symptomatiques sur l'humeur sont généralement absentes aux doses thérapeutiques d'usage.

Des dosages plus Ă©levĂ©s peuvent laisser apparaĂ®tre un dĂ©but d'Ă©tat narcotique et des effets histaminiques importants (Ă  partir de 60 mg par prise, plus typiquement entre 80 et 150 mg) et n'ont de raison qu'en cas de douleur sĂ©vère. De tels dosages ne sont plus en vigueur dans les formes galĂ©niques, bien qu'un mĂ©decin puisse ordonner une prĂ©paration magistrale sans limite de dose maximale, mais des analgĂ©siques majeurs, plus spĂ©cialement la morphine, ou des antalgiques puissants sont prĂ©fĂ©rĂ©s et se sont dĂ©mocratisĂ©s en France depuis 1994 dans le cadre de la campagne nationale pour la prise en charge du traitement de la douleur[17] - [18]. Ă€ ces doses, d'importants effets secondaires de type histaminique puis opiacĂ© apparaissent. Ceci peut se produire d'autant plus en cas de renouvellement trop rapide des prises ou de surdosage rĂ©itĂ©rĂ© (dĂ©mangeaisons et picotements, rash cutanĂ©, bouffissure du visage, irritabilitĂ©, mais aussi nausĂ©es, troubles gastriques, sĂ©dation invalidante…). Dans l'Ă©ventualitĂ© de leur apparition, la posologie doit ĂŞtre rĂ©Ă©valuĂ©e ainsi que la forme galĂ©nique administrĂ©e s'il est besoin de conserver un apport suffisant de paracĂ©tamol ou d'autres produits associĂ©s dans le mĂ©dicament. Les antihistaminiques contenus dans certaines prĂ©parations couvrent une partie des effets secondaires mais inhibent aussi les effets stimulants des opiacĂ©s tout en majorant des effets sĂ©datifs.

La codéine produit en outre un effet sédatif sur les muscles de l'intestin comme la grande majorité des opiacés. Elle ralentit l'activité du tractus gastro-intestinal et favorise l'absorption de l'eau contenue dans le bol alimentaire au cours de sa digestion. Elle est considérée comme un antidiarrhéique au schéma pharmacologique classique. Quand elle est utilisée dans un traitement concomitant, elle potentialise ou suppléante de fait la lopéramide dont l'association est à surveiller. Elle n'est cependant pas indiquée ni prescrite comme antidiarrhéique puisque des médicaments plus spécifiques de première intention en ont la vocation et une sécurité accrue. La prise régulière de codéine peut entraîner une constipation forte à sévère suivant la durée et les doses administrées au patient. L'arrêt de la prise entraine généralement un retour de toutes les fonctions de l'intestin à échéance très brève. Au besoin, l'indication d'un médicament contre la constipation peut accompagner la prise de codéine quand son usage se fait au-delà d'un court terme.

À la suite du décès d'un nourrisson alors que sa mère prenait de la codéine et du paracétamol, la Food and Drug Administration a mis en garde le sur le danger d'un traitement par codéine au cours de l'allaitement[19].

La codéine aurait également un effet spastique parfois extrêmement douloureux (évoquant une crise cardiaque) chez certaines personnes cholécystectomisées (ayant subi une ablation de la vésicule biliaire)[20].

La codéine, comme toutes les molécules opiacées, peut provoquer une dépression respiratoire. Associée à d'autres dépresseurs du système respiratoire (benzodiazépines, alcool, autres opiacés…), un surdosage de codéine peut être fatal. En cas d'ingestion massive, accidentelle ou volontaire, il faut procéder d'urgence à une administration de naloxone.

Le nombre de morts causé par l'abus d'opioïdes médicamenteux comme la codéine chaque année est incertain et sous estimé d'après Nathalie Richard, directrice adjointe du service Médicaments du système nerveux central à l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, car « il y a une sous-notification des cas déclarés à l'Agence du médicament »[21].

Néanmoins, il est estimé que des centaines de décès chaque année sont liés à un opioïde médicamenteux, soit plus que les décès à la suite d'overdoses d’héroïne[22].

Usage détourné et dépendance

La codéine étant présente dans divers médicaments antitussifs ou antidouleurs, elle peut faire l'objet d'un usage détourné par certains patients. Elle n'est pas soumise à la sanction pénale mais est citée dans la Convention unique sur les stupéfiants de 1961 dans la catégorie des « substances présentant un risque d'abus moindre du fait de leur usage médical ».

Mise à jour à la suite de l'arrêté ministériel du paru au JORF le , la codéine est désormais soumise à la prescription médicale en France[23] - [24].

La codéine sert à la synthèse d'un dérivé, la désomorphine ou crocodile. Présente en Russie depuis 2002, elle serait arrivée en Allemagne en 2011, au Canada, et en 2013 aux États-Unis[25] ; c'est une drogue extrêmement dangereuse et potentiellement mortelle dès la première injection, à cause des conditions dans lesquelles elle est synthétisée. De nombreux produits servant à la transformation artisanale de la codéine en désomorphine se retrouvent en effet dans l'injection. « La peau d'abord se nécrose, se transformant en plaques verdâtres ressemblant au cuir du crocodile. Puis la chair et les muscles se décomposent, les organes sont attaqués, les os fragilisés de façon irréversible (…) L'espérance de vie des utilisateurs atteint rarement trois ans[26]. » L'amputation peut se révéler nécessaire dans le meilleur des cas. Des revendeurs de drogues feraient passer le crocodile pour de l'héroïne.

La culture hip-hop est aussi souvent associée à l'usage de purple drank ou du sizzurp (dérivé de syrup), une boisson mixant un sirop contre la toux à base de codéine et d'un anti histaminique avec du soda. Ce mélange ne contient pas d'alcool (mélange potentiellement fatal) ni autre psychotropes, si ce n'est qu'il est combiné à l'usage de cannabis.

Utilisateur célèbre : le milliardaire reclus Howard Hughes utilisait la codéine afin de calmer de fortes douleurs liées à des traumatismes neurologiques et squelettiques causés par de nombreux accidents d'avion.

Le processus de dĂ©pendance Ă  la codĂ©ine est plus discret, moins rapide que celui de la morphine. La codĂ©ine provoque nĂ©anmoins, quand son usage est dĂ©tournĂ© Ă  des fins rĂ©crĂ©atives, ou dans un usage thĂ©rapeutique Ă  long terme, une dĂ©pendance psychique et physique forte. Les symptĂ´mes de sevrage les plus frĂ©quents sont : diarrhĂ©e, sudation, tremblements, douleurs musculaires, anxiĂ©tĂ©, insomnie, dĂ©pression. Les symptĂ´mes physiques de sevrage durent, comme pour les autres opiacĂ©s, en moyenne une semaine Ă  10 jours. L'addiction psychologique, nĂ©anmoins, perdure dans la plupart des cas de dĂ©pendance Ă  la codĂ©ine pendant un Ă  plusieurs mois. La principale prĂ©occupation des soignants du codĂ©inomane sera en premier lieu d'Ă©viter une escalade vers des morphiniques plus puissants. Cependant, dans certains cas, l'utilisation d'un traitement de substitution s'avère indispensable (voir buprĂ©norphine et mĂ©thadone - l'utilisation de la mĂ©thadone dans la substitution Ă  la codĂ©ine est très rarement indiquĂ©e ; on prĂ©fĂ©rera gĂ©nĂ©ralement un sevrage progressif ou brutal en milieu hospitalier).

Pour ces raisons, en France, à la suite d'un arrêté ministériel du [23], la codéine est désormais soumise à la prescription médicale, après la mort d’une adolescente de 16 ans par overdose durant l'été 2017[24].

La codéine dans des œuvres musicales

La codéine influence le monde du rap. Ainsi, le rappeur Lil Wayne est connu pour être utilisateur de codéine[27] ; quelques-unes de ses chansons renvoient d'ailleurs à son drink, puis aussi Future dans son titre Codéine Crazy sortie en 2014, tandis qu'en France, le groupe TTC a écrit une chanson intitulée Codéine sur l'album Bâtards sensibles (2004)[28]. Plus tôt, l'inventeur du Screwed & Chopped, DJ Screw, est mort d'overdose de codéine[29]. D'ailleurs, la musique qu'il produisait était beaucoup influencée par l'effet de ce médicament, en particulier concernant le ralenti du tempo[30]. Macklemore évoque la mort de Chad Butler qui a fait une overdose de codéine dans sa chanson Otherside[31]. La codéine est également présente dans les textes de ASAP Rocky[32], The Weeknd (dont un morceau est repris sous forme de sample par Juicy J[33]). En France, Hayce Lemsi a produit une chanson nommée Codéine, Sneazzy cite cette drogue régulièrement. D'autres artistes hors du rap ont également un titre de chanson intitulé Codéine : The Charlatans, groupe de rock américain des années 1960, le compositeur Jason Edwards, l'auteur-compositeur écossais Donovan. Le rappeur belge Hamza a également dans son répertoire un morceau intitulé "Codéine 19".

La substance peut également se retrouver dans le titre d'un groupe, comme pour Codeine Velvet Club, fondé en 2009 par le chanteur Jon Fratelli avec une amie de sa compagne, Lou Hickey[34].

Trampled By Turtles a composĂ© un morceau nommĂ© Codeine en sur l'album Blue Sky and the Devil (en). Deux nouveaux DJ Ă©lectro français portent le nom de Discodeine, association de « disco » et « codĂ©ine ».

Le chanteur folk Townes Van Zandt, dans son titre Waiting Around to Die la mentionne comme une amie avec laquelle il va mourir. Le rappeur Hayce Lemsi a également réalisé un morceau Codéine, dans son album Électron Libre 2, sorti en .

Divers

Bien que la codĂ©ine fasse partie de la liste modèle des mĂ©dicaments essentiels de l'Organisation mondiale de la santĂ© (liste mise Ă  jour en )[35], l’agence europĂ©enne du mĂ©dicament recommande sa contre-indication en Europe chez l'enfant de moins de 12 ans[36].

Les derniers mots de l'actrice américaine Tallulah Bankhead furent : « Codéine… bourbon… ».

Notes et références

  1. Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  2. (en) David R. Lide, Handbook of chemistry and physics, , 89e éd., chap. 8 (« Dissociation Constants of Organic Acids and Bases »), p. 51.
  3. (en) David R. Lide, Handbook of chemistry and physics : Physical Constants of Organic Compounds, , 89e Ă©d., p. 3-120.
  4. D'après le Handbook à la même page, le phosphate de codéine se sublime en se décomposant à 227 °C.
  5. (en) David R. Lide, Handbook of chemistry and physics, , 89e éd., chap. 8 (« Aqueous Solubility and Henry’s Law Constants of Organic Compounds »), p. 92.
  6. Br J Clin Pharmacol (en) (1991) 31:381-390.
  7. « Les antalgiques », sur Dematice (consulté le ).
  8. (en) K.C. Rice, « A Rapid, High-Yield Conversion of Codeine to Morphine », J. Med. Chem,‎ , p. 20(1), 164.
  9. (en) K. Bedford, « Illicit Preparation of Morphine from Codeine in NZ », Forensic Sci. Int.,‎ , p. 34(3), 197-204.
  10. « Métabolisme de la codéine », sur esculape.com Dictionnaire Français du Médicament.
  11. Compendium suisse des médicaments : spécialités contenant Codéine.
  12. Liste des médicaments contenant la substance fournie par le dictionnaire Vidal.
  13. sur le site de l'EMA et recension sur le site pourquoidocteur.fr.
  14. Codéine : fiche substance proposée par le dictionnaire Vidal.
  15. « Prise en charge douleur », sur Vidal (consulté le ).
  16. « Agnès Buzyn décide d'inscrire la codéine et d'autres dérivés de l'opium à la liste des médicaments disponibles uniquement sur ordonnance », Ministère des Solidarités et de la Santé,‎ (lire en ligne, consulté le ).
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Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

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