Hypnotique
Les hypnotiques sont une classe de mĂ©dicaments analogues aux sĂ©datifs dont l'effet principal est, selon la dose, la sensibilitĂ© du patient et la molĂ©cule elle-mĂȘme, d'induire la somnolence chez un patient. Ils sont populairement qualifiĂ©s de somnifĂšres et sont indiquĂ©s contre les troubles du sommeil tels que difficultĂ©s d'endormissement ou rĂ©veils prĂ©coces. Il s'agit en gĂ©nĂ©ral d'un dernier recours que les mĂ©decins tendent Ă prescrire une fois Ă©puisĂ©es toutes les autres mĂ©thodes capables de favoriser le sommeil (telles que la maĂźtrise de l'environnement et des habitudes entourant le sommeil).
En raison de leur profil pharmacologique similaire, beaucoup d'hypnotiques sont également des sédatifs anesthésiants[2], ou bien des anxiolytiques[3]. Il est donc possible d'user de ces molécules dans plusieurs indications.
Liste des hypnotiques
- Les barbituriques : de moins en moins utilisés à cause de leur toxicité et de la tolérance (accoutumance) qu'ils induisent ;
- les benzodiazépines, également de moins en moins prescrits, notamment :
- l'estazolam,
- le nitrazépam,
- le lormétazépam,
- le loprazolam,
- le témazépam,
- certaines substances retirées du marché comme le flunitrazépam (Rohypnol) et le triazolam (Halcion) ayant un risque d'abus important,
- des médicaments plus modernes apparentés aux benzodiazépines mais de structure chimique différente, dits « non-benzodiazépines », mieux tolérés que les benzodiazépines et dont l'élimination est plus rapide induit souvent moins de dépendance, notamment :
- le zolpidem (en général sous forme d'hémitartrate de zolpidem), de la classe des imidazopyridines, l'hypnotique les plus prescrits en France,
- la zopiclone, de la classe des cyclopyrrolones,
- la zaleplon, de la classe des pyrazolopyrimidines, non commercialisé en France,
- des antihistaminiques H1 de premiÚre génération comme :
- la phéniramine,
- l'alimémazine,
- la prométhazine,
- la doxylamine,
- les racines de la valériane officinale (Valeriana officinalis), utilisée comme sédatif et anxiolytique léger, comme alternative aux produits de synthÚse et aux opiacées, avec une toxicité faible et peu ou pas d'accoutumance induite
- historiquement, des substances opiacées extraites des plantes suivantes dont le risque de dépendance est élevé, principalement pour les alcaloïdes morphiniques :
- les papavéracées (famille des pavots)
- les composants du pavot somnifÚre (Papaver somniferum) ainsi que son latex appelé opium (considéré comme un produit stupéfiant dans la plupart des pays du monde) qui contiennent de la morphine, de la codéine (souvent associée aux antalgiques et analgésiques les plus courants comme l'ibuprofÚne ou le paracétamol) et de la thébaïne
- les composants du pavot d'Orient (Papaver orientale) qui contiennent de la morphine, de la codéine et un taux important de thébaïne
- les parties aériennes du pavot de Californie (Eschscholzia californica) qui contiennent de la californidine, de la protopine et d'autres alcaloïdes[4] - [5] - [6] - [7].
- les parties aĂ©riennes du coquelicot (Papaver rhoeas) qui contiennent divers alcaloĂŻdes dont de la rhĆadine, utilisĂ©e Ă©galement pour traiter la dĂ©pendance aux alcaloĂŻdes morphiniques suivants et leur usage comme stupĂ©fiants
- les papavéracées (famille des pavots)
- les inflorescences femelles des plants de chanvre (Cannabis) (considéré comme un produit stupéfiant dans la plupart des pays du monde) qui contiennent du tétrahydrocannabinol (THC) (Sativa et Dominant Sativa)[8] - [9]
Effets secondaires
La prise d'hypnotiques peut induire de nombreux effets secondaires. Elle altÚre la vigilance et cause des troubles de la mémoire à court terme. Le zolpidem a été dans de rares cas associé à un syndrome de somnambulisme amnésique[10], voire, en cas de prise nocturne de nourriture, à l'obésité[11].
Elle peut ĂȘtre associĂ©e Ă haute dose Ă une rĂ©duction du sommeil paradoxal ainsi qu'Ă une augmentation du ronflement[12] et du risque d'apnĂ©e obstructive du sommeil[13] - [14]. Selon certaines Ă©tudes la prise d'hypnotique est associĂ©e Ă un risque accru de troubles cognitifs[15] - [16] ainsi que (pour certains produits) Ă un risque accru de survenue de cancer[17], dont le cancer de la peau[18]. Elle est Ă©galement associĂ©e Ă un risque accru de mortalitĂ© liĂ©e Ă des problĂšmes de santĂ© prĂ©existants, selon des indices forts, notamment relatifs aux liens entre dĂ©pression et mortalitĂ© accrue[19] - [20] ou selon des conclusions scientifiques respectivement et successivement publiĂ©es en 1979[21], 1998[22], en 2009[23], 2010[24] confirmĂ©e en fĂ©vrier 2012[25] par une nouvelle Ă©tude amĂ©ricaine publiĂ©e ayant portĂ© sur plus de 10 000 patients auxquels on avait prescrit du zolpidem, tĂ©mazĂ©pam, eszopiclone, zaleplon, d'autres benzodiazĂ©pines, les barbituriques et les antihistaminiques sĂ©datifs. Cette Ă©tude a conclu Ă un risque de dĂ©cĂšs quatre fois plus Ă©levĂ© que dans la population gĂ©nĂ©rale, chez ces utilisateurs de somnifĂšres[26].
Avec moins de 18 pilules par an, le risque de mort pour ces patients Ă©tait dĂ©jĂ multipliĂ© par trois[25], puis le risque augmente encore avec la dose, les auteurs prĂ©cisant que le risque de dĂ©cĂšs et de cancer associĂ©s aux mĂ©dicaments hypnotiques ne pouvaient pas ĂȘtre imputables Ă une maladie prĂ©existante[25]. Cette Ă©tude ne concerne cependant pas l'usage mĂ©dical de la mĂ©latonine[27].
Ces théories sont cependant contredites par d'autres études et méta-analyses[28] - [29]. L'influence des BZD et apparentés sur les risques de cancer et de démence n'est pas démontrée universellement; un manque de preuves fortes ainsi que certaines études directement contradictoires ne permettent pas de s'exprimer sur ce sujet avec aplomb. Notamment, le fait que les BZD aient été un constituant majeur de la pharmacopée moderne depuis plusieurs décennies sans pour autant que des preuves sans équivoque de leur influence sur les risques de démence et de cancer n'aient vu le jour est relevé par l'analyse de Brandt J. et Leong C. dans Springer[30]. Davantage de recherche est donc nécessaire sur ces aspects-là .
Chez les sujets ùgés, elle est associée à une augmentation du risque de chute et de fracture du col du fémur[31] - [32] - [16]. et de troubles cardiaques[33]. Chez ces patients le rapport bénéfice-risque des hypnotiques est inférieur avec des effets indésirables accrus, sans grande différence entre hypnotiques et benzodiazépines, pour un gain de sommeil d'une demi-heure en moyenne[16].
D'autres effets secondaires rares peuvent inclure des cĂ©phalĂ©es, cauchemars, et nausĂ©es. Ătant donnĂ© que des rĂ©sidus de ces mĂ©dicaments sont retrouvĂ©s en quantitĂ©s significatives et croissantes dans les stations d'Ă©puration ou Ă leur aval, ou dans certains milieux naturels, la question d'Ă©ventuels effets Ă©coĂ©pidĂ©miologiques et Ă©cologiques pourrait aussi ĂȘtre posĂ©e.
Précaution et dépendance
En raison de l'altération de la vigilance, les patients ne doivent pas prendre de médicaments hypnotiques avant d'avoir des activités dangereuses demandant une attention soutenue[34], et en particulier ne pas conduire[35]. De nombreux hypnotiques sont incompatibles avec d'autres médicaments et avec l'alcool. Des prises conjointes sont des sources fréquentes d'hospitalisation[36].
Les somnifĂšres peuvent entraĂźner une certaine dĂ©pendance : « Il est dĂ©sormais bien connu que les tranquillisants et les somnifĂšres de la classe des benzodiazĂ©pines peuvent causer une pharmacodĂ©pendance, aussi dans des doses dites thĂ©rapeutiques et ce, mĂȘme aprĂšs un traitement de courte durĂ©e. La dĂ©couverte de ce risque est cependant de date relativement rĂ©cente[37]. »
La dépendance aux hypnotiques n'est pas systématique et touche globalement une minorité de patients[38] - [39]. L'usage non quotidien ou à dose modérée de somnifÚres n'induit pas fréquemment de tolérance ou de dépendance, et implique globalement un phénomÚne de rebond limité et court[40] - [41] - [42].
Une situation préoccupante ?
Avec environ 4 millions de personnes exposées, les Français comptent parmi les plus grands consommateurs de somnifÚres en Europe[43].
Les patients ayant tendance Ă augmenter leurs doses avec le temps risquent de devenir, en quelques mois, particuliĂšrement dĂ©pendantes de ces mĂ©dicaments; de plus la qualitĂ© du sommeil devient moins bonne avec lâutilisation Ă forte dose de ces hypnotiques[44].
Cependant ces risques sont rĂ©duits si les doses thĂ©rapeutiques restent les mĂȘmes sans augmentation[45] - [46] - [47]. ConsommĂ©s Ă des doses modĂ©rĂ©es, les composĂ©s Ă la durĂ©e d'action la plus courte prĂ©sentent particuliĂšrement un profil de dĂ©pendance modĂ©rĂ©[48] - [49] - [50].
Effet paradoxal
Des effets secondaires tels que dépression[51], avec ou sans tendances suicidaires[52], états phobiques, agressivité et comportement violent peuvent apparaßtre, dans 5 % des cas selon Malcolm Lader, de l'Institute of Psychiatry à Londres[53]. D'autres travaux débouchent cependant sur des conclusions moins alarmistes, avec une incidence de l'ordre de 1% pour les effets secondaires majeurs liés à l'utilisation de zolpidem[54].
Aux Ătats-Unis, les fabricants considĂšrent devoir faire Ă©tat de ces effets secondaires et signalent spĂ©cifiquement le risque de dĂ©pression. Dans plusieurs autres pays du monde au contraire, les fabricants gardent le silence sur cet effet secondaire, bien que la dĂ©pression puisse avoir un effet Ă long terme bien documentĂ© dans les ouvrages mĂ©dicaux.
Dans la mesure oĂč ces rĂ©actions sont souvent interprĂ©tĂ©es comme symptĂŽmes d'une aggravation de l'Ă©tat initial de l'intĂ©ressĂ©, de nombreux patients deviennent pharmacodĂ©pendants pour la raison mĂȘme qu'ils prĂ©sentent de graves effets secondaires, et, chose tragique, le lien entre ceux-ci et les benzodiazĂ©pines est restĂ© longtemps inconnu aussi du patient que du mĂ©decin prescripteur.
Cas particuliers
Pour les patients concernĂ©s par une certaine dĂ©pendance, il est conseillĂ© de faire une diminution trĂšs progressive des doses, encadrĂ©e par un mĂ©decin. Notamment dĂšs que des troubles (physiologiques ou Ă©volution vers la dĂ©pression), liĂ©s au sevrage (comme pour nâimporte quelle autre dĂ©pendance) apparaissent. De nombreux mĂ©dicaments de cette classe sont aussi incompatibles avec la grossesse.
Alternatives
Le cas de la valériane
Selon certaines Ă©tudes[55] - [56] - [57] - [58] - [59], les racines de valĂ©riane officinale (Valeriana officinalis) seraient une alternative douce aux somnifĂšres. L'utilisation de cette plante semble davantage d'ordre culturel et son effet rĂ©el se distinguerait en rĂ©alitĂ© peu de l'effet placebo. Cette plante est en effet traditionnellement utilisĂ©e en Occident depuis l'AntiquitĂ©. Elle fut dans un premier temps utilisĂ©e comme plante magique, puis comme un remĂšde Ă de multiples pathologies avant d'ĂȘtre prescrite pour faciliter l'endormissement Ă partir du IIe siĂšcle. Son efficacitĂ© rĂ©elle est discutĂ©e depuis cette Ă©poque. De nos jours des Ă©tudes contradictoires existent Ă son sujet, certaines concluent Ă une efficacitĂ© faible, d'autres rĂ©futent son efficacitĂ©.
Autres plantes
D'autres plantes pourraient ĂȘtre utilisĂ©es sous forme dâinfusions, de tilleul, camomille allemande, verveine, houblon, fleur dâorange amĂšre[60]. Plantes qui peuvent ĂȘtre trouvĂ©es dans des pharmacies spĂ©cialisĂ©es en phytothĂ©rapie, ou chez les herboristes qui subsistent. Comme pour la valĂ©riane, leur efficacitĂ© reste nĂ©anmoins contestĂ©e.
Approche technique
Une sociĂ©tĂ© a imaginĂ© un bandeau, appelĂ© Dreem, faisant office de mini-Ă©lectro-encĂ©phalographe, et connectĂ© Ă une application, pour suivre et amĂ©liorer le sommeil des utilisateurs. Ce bandeau a vocation, selon ses crĂ©ateurs, Ă se substituer Ă l'usage de somnifĂšre[61] - [62]. Par contre des spĂ©cialistes du sommeil mettent en garde contre la fiabilitĂ© variable de ce bandeau, la gĂȘne additionnelle provoquĂ©e par le bandeau , le recueil des donnĂ©es cĂ©rĂ©brales par une entreprise privĂ©e et le risque de focaliser trop son attention sur le sommeil, que l'on appelle l'orthosomnie ce qui peut ĂȘtre contreproductif[63].
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