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Affaire Tapie - Crédit lyonnais

L’affaire Tapie - Crédit lyonnais (aussi appelée affaire Adidas ou affaire Lagarde - Tapie) est une affaire opposant, depuis 1992, Bernard Tapie à la Société de Banque Occidentale (SdBO), une filiale du Crédit lyonnais, elle-même banque publique au moment des faits. L’extinction de l’action publique à l’encontre de Bernard Tapie est prononcée après son décès, le 3 octobre 2021. Mais l'affaire, considérée comme emblématique du journalisme d'investigation, n'est pas encore terminée.

Résumé

Fin 1992, Bernard Tapie devenu ministre souhaite vendre Adidas pour Ă©viter tout conflit d'intĂ©rĂŞts comme le rĂ©clame François Mitterrand. De plus, Adidas, en cours de redressement, perd de l'argent. Il confie un mandat de vente Ă  la SociĂ©tĂ© de Banque Occidentale (SdBO), une filiale du CrĂ©dit lyonnais. Le CrĂ©dit lyonnais vend Adidas pour le compte de Bernard Tapie en , au prix fixĂ© par Bernard Tapie de deux milliards et quatre-vingt-cinq millions de francs (472 millions d'euros d'aujourd'hui après actualisation). Bernard Tapie ne conteste pas la vente. Il avait tentĂ© en vain de vendre Ă  ce prix Adidas Ă  la sociĂ©tĂ© Pentland (en) en [1].

Mais Bernard Tapie est mis en faillite par le CrĂ©dit lyonnais un an plus tard, en , le CrĂ©dit lyonnais cassant le mĂ©morandum signĂ© avec Bernard Tapie qui prĂ©voyait la vente progressive de toutes ses autres affaires afin de rembourser sa dette restante. RuinĂ© et ainsi rendu inĂ©ligible, Bernard Tapie s'intĂ©resse de près Ă  la vente d'Adidas rĂ©alisĂ©e pour son compte par le CrĂ©dit lyonnais. Il dĂ©couvre que le CrĂ©dit lyonnais a effectuĂ© un montage opaque par lequel la banque a revendu Adidas Ă  un groupe d'investisseurs dont deux sociĂ©tĂ©s offshore avec une option de revente Ă  Robert Louis-Dreyfus lui permettant d'engranger une plus-value de 2,6 milliards de francs (396 millions d'euros) en cas de redressement d'Adidas.

Bernard Tapie estime que le CrĂ©dit lyonnais l'a bernĂ© en effectuant ce montage opaque, qui a permis Ă  la banque de violer son obligation de loyautĂ© et son obligation de neutralitĂ© lors de la vente, et ainsi d'empocher les près de 400 millions d'euros qui auraient dĂ» lui revenir. Une version rĂ©futĂ©e par Laurent Mauduit, cofondateur et journaliste de Mediapart, qui affirme que Bernard Tapie avait une parfaite connaissance de la valeur d'Adidas avant sa liquidation. Mais Bernard Tapie ne peut pas attaquer le CrĂ©dit lyonnais car du fait de sa mise en liquidation par la banque, il n'est plus le propriĂ©taire de BT Finance, la sociĂ©tĂ© qui possĂ©dait Adidas, qui est la sociĂ©tĂ© lĂ©sĂ©e dans l'opĂ©ration, et dont les titres appartiennent dĂ©sormais en quasi-totalitĂ© au CrĂ©dit lyonnais (qui ne va donc Ă©videmment pas porter plainte contre elle-mĂŞme). Ce n'est donc pas Bernard Tapie mais le mandataire liquidateur de Bernard Tapie Finance (BTF) et ses petits porteurs (les particuliers qui avaient conservĂ© des actions BT Finance achetĂ©es en Bourse des annĂ©es auparavant, financĂ©s par Bernard Tapie[2]) qui vont entamer les procĂ©dures judiciaires qui vont durer quinze ans.

Bernard Tapie obtient de pouvoir se joindre Ă  la plainte, et après plusieurs jugements favorables obtient le , par la dĂ©cision d'un tribunal arbitral, la somme de 403 millions d'euros (243 millions d'euros de dommages, 115 millions d'euros d'intĂ©rĂŞts, et 45 millions d'euros de prĂ©judice moral). Les conditions de recours Ă  cette sentence arbitrale sont très controversĂ©es au niveau politique et font l'objet de plusieurs recours en annulation devant les juridictions administratives. Tous ces recours devant les juridictions administratives sont rejetĂ©s.

Mais, le 4 août 2011, la Cour de justice de la République (CDJ) ouvre une enquête à l'encontre de Christine Lagarde pour établir si elle a privilégié les intérêts de Bernard Tapie lors de l'arbitrage. La presse se procure une « lettre d’allégeance » adressée par Christine Lagarde à Bernard Tapie : « Utilise-moi pendant le temps qui te convient et convient à ton action et à ton casting. (…) Si tu m'utilises, j'ai besoin de toi comme guide et comme soutien : sans guide, je risque d'être inefficace, sans soutien je risque d'être peu crédible. Avec mon immense admiration. Christine L[3]. » Celle-ci est auditionnée pendant vingt-quatre heures les 23 et , et placée sous le statut de témoin assisté le [4]. Elle est mise en examen le pour le seul motif de « négligence »[5]. Le procès de Christine Lagarde devant la Cour de justice de la République débute le [6]. Au terme du procès, le parquet requiert sa relaxe[7]. Le , la Cour la déclare coupable de « négligence », mais la dispense de peine et ne fait pas inscrire cette condamnation à son casier judiciaire[8].

Dans un autre volet pénal non ministériel de cette affaire, Pierre Estoup, l'un des trois juges du tribunal arbitral, est mis en examen pour « escroquerie en bande organisée »[9]. Bernard Tapie et son avocat, Maître Lantourne, sont mis en examen le pour le même chef d'accusation. Des lettres saisies dans le cadre de l'instruction démontrent que Messieurs Estoup et Lantourne avaient partie liée bien avant la décision de nommer un tribunal d'arbitrage[10].

Fin , Pierre Moscovici, ministre de l'Économie et des Finances du gouvernement Ayrault, affirme qu'il envisage la révision de l'arbitrage de 2008. De fait, l'État se constitue partie civile le et le CDR dépose un recours en révision de l'arbitrage le . Le 17 février 2015, la cour d'appel de Paris annule le jugement arbitral de 2008 et, le 3 décembre 2015, elle condamne Bernard Tapie et sa femme à rembourser les 404 millions d'euros perçus en 2008[11].

Parallèlement, en , la cour d'appel de Paris valide les mises en examen pour « escroquerie en bande organisée » de Bernard Tapie, de Pierre Estoup et de Maurice Lantourne. Dans le cadre de l'affaire d'arbitrage du litige concernant la vente d'Adidas, Bernard Tapie est mis en examen le pour «détournements de fonds»[12] - [13]. Sa mise en examen pour « escroquerie en bande organisée » est validée par un arrêt de la cour de cassation du [14].

En , les juges d’instruction dĂ©cident de renvoyer devant le tribunal correctionnel, Bernard Tapie, Maurice Lantourne, Christine Lagarde, StĂ©phane Richard, prĂ©sident-directeur gĂ©nĂ©ral d’Orange, Pierre Estoup, Jean-François Rocchi, ancien directeur du Consortium de rĂ©alisation (CDR), et Bernard Scemama, ancien prĂ©sident de l’Établissement public de financement et de restructuration (EFPR)[15].

Estimant qu'aucun élément ne permet d'affirmer que l'arbitrage fait l'objet d'une fraude, le tribunal correctionnel prononce une relaxe générale le 2019. Le parquet de Paris fait appel de ce premier jugement. En juin 2021, le parquet général requiert une peine de cinq ans de prison avec sursis et 300.000 euros d'amende pour « complicité d'escroquerie » et « détournement de fonds publics »[16]. Affaibli par son cancer, Bernard Tapie n'est pas en mesure de se présenter aux dernières audiences. Son décès, le 3 octobre 2021, met fin à l'action publique le concernant[17].

En , Eric Woerth est mis en examen par la Cour de justice de la République en raison de malversations commises dans l’exercice de sa fonction. Il est en effet soupçonné d’avoir accordé un avantage fiscal à Bernard Tapie en 2009 concernant les indemnités qu'il a perçue lors du jugement d'arbitrage[18].

Le 24 novembre 2021, la Cour d'Appel de Paris invalide le jugement de première instance, et condamne Maurice Lantourne, Pierre Estoup, et Jean-François Rocchi. Les trois hommes, ainsi que Stéphane Richard, décident de former des pourvois en cassation[19].

Le 3 octobre 2022, la Cour de justice de la République prononce un non-lieu pour Éric Woerth[20].

La théorie de la défense de Bernard Tapie

Le rachat

En juillet 1990, le Groupe Bernard Tapie (SNC GBT) se porte acquĂ©reur de la sociĂ©tĂ© Adidas auprès des sĹ“urs Dassler, hĂ©ritières d'Adolf Dassler, le fondateur de la marque. Cet investissement de 1,6 milliard de francs (245 M€) est rendu possible par un financement Ă  100 % par un pool bancaire [21], ayant pour chef de file la SDBO. Cette filiale du CrĂ©dit Lyonnais participe Ă  hauteur de 31,25 %. Ă€ cette occasion, les AGF, l'UAP [22] entrent au capital de la marque de sport.

L'entreprise est rachetée pour une somme jugée peu élevée à l'époque. En effet, elle possède la quatrième marque la plus connue au monde. Mais elle fait face à plusieurs difficultés : elle affiche de lourdes pertes, souffre d'une image vieillissante, et contrairement à ses grands concurrents comme Nike ou Reebok, fabrique encore une part importante de sa production dans des pays à main-d'œuvre onéreuse, comme l'Allemagne, berceau du groupe.

Le groupe Adidas a besoin d'être restructuré pour redevenir profitable, et c'est le but de Bernard Tapie lorsqu'il en prend possession. Il s'agit de la restructuration d'un groupe important nécessitant d'y consacrer des moyens financiers conséquents, et les médias français s'interrogent immédiatement sur la capacité de Bernard Tapie à mener à bien de front ses ambitions politiques, sportives, et ce chantier industriel qui vient en addition de son groupe déjà constitué d'une quarantaine de sociétés. L'intéressé déclare pourtant : « Adidas, c'est l'affaire de ma vie[23]. »

Le redressement d'Adidas

Bernard Tapie engage, de 1990 Ă  1992, les rĂ©formes lourdes et coĂ»teuses qui vont permettre de redresser Adidas : recours gĂ©nĂ©ralisĂ© Ă  la sous-traitance, dĂ©localisation d'une partie de la main d'Ĺ“uvre, redĂ©finition de la politique de distribution, et refonte du marketing par l'engagement du patron du design de Nike, Rob Strasser. Adidas va ainsi pour la première fois de son histoire changer de logo, la fleur de lotus Ă©tant remplacĂ©e par un plus moderne triangle matĂ©rialisĂ© par trois bandes parallèles, logo toujours en place aujourd'hui. Les coĂ»ts de cette restructuration sont Ă©levĂ©s (en 1992, Adidas enregistre une perte de 500 millions de francs français, qui rend nĂ©cessaire une augmentation de capital de mĂŞme montant, partiellement souscrite et entièrement financĂ©e par le CrĂ©dit Lyonnais et les AGF). Ă€ ce moment-lĂ , le bilan comptable rĂ©el de Tapie est nĂ©gatif de 2,1 milliards de francs (1,6 milliard d'emprunt plus 500 millions de pertes). Le nantissement d'Adidas aurait dĂ» ĂŞtre prononcĂ©, mais grâce au soutien de l'ÉlysĂ©e, un privilège lui est accordĂ©. Mais dès 1993, la sociĂ©tĂ© recommence Ă  engranger des profits, pour la première fois depuis plus de dix ans.

Robert Louis-Dreyfus rachète l'affaire en janvier 1993 et poursuit pendant deux ans le business plan de Bernard Tapie. Il déclarera au sujet de la gestion Tapie « Bernard Tapie et ses équipes avaient fait de l'excellent travail. Lorsque j'ai repris l'affaire, elle était à 80 % restructurée, c'est pourquoi j'ai décidé de poursuivre le plan dirigé par Gilberte Beaux [présidente d'Adidas, collaboratrice de Bernard Tapie], nos premières véritables décisions stratégiques n'intervenant qu'à partir de 1995, à commencer par l'introduction en Bourse »[24] - [25].

Une autre version du redressement d'Adidas est présentée par ceux qui la dirigeaient au temps de Robert Louis Dreyfus[1]. Selon eux, le redressement d'Adidas ne s'est pas fait sous la férule de Bernard Tapie. « On a évidemment réorganisé la production », se souvient Christian Tourres, le bras droit de Robert Louis-Dreyfus à l'époque d'Adidas : « Le mouvement avait été engagé avant Tapie. Tapie avait suivi mollement. On est arrivé et on a accéléré. On a redressé la boîte en un an.» L'essentiel de la restructuration est mis en œuvre en 1993 quand le groupe dispose des moyens de mettre en œuvre les mesures nécessaires, moyens financiers dont ne disposait pas Bernard Tapie. Délocalisation de la production, restructuration des filiales, mise en place d'une nouvelle stratégie marketing, modernisation de l'image et du style… Seul point d'accord entre ces deux versions : la plupart des orientations qui seront mises en œuvre par Robert Louis-Dreyfus à partir de 1993 sont esquissées par Gilberte Beaux, présidente éphémère du directoire d'Adidas.

Le virage de Bernard Tapie vers la politique et la décision de revendre

Depuis 1988 et son entrée en politique, Bernard Tapie réalise des performances électorales qui feront dire à François Mitterrand à son sujet qu'il l'« épate »[26]. Aussi, lorsque François Mitterrand décide, en , de remplacer son Premier Ministre, Édith Cresson, dont la cote de popularité est en perdition, par Pierre Bérégovoy, ce dernier soumet au président de la République la candidature de Bernard Tapie au sein du gouvernement. Le président y est favorable, mais à une condition : que Bernard Tapie se retire totalement des affaires, François Mitterrand considérant incompatibles la position de ministre et celle d’homme d’affaires de haut niveau.

Bernard Tapie en cessation de paiement profite de cette opportunité comme prétexte pour revendre l'intégralité de ses affaires.

Il signe pour cela deux contrats avec sa banque, la SdBO, partenaire depuis dix-sept ans, et filiale du Crédit lyonnais :

  • un mandat de vente spĂ©cifique pour Adidas, fleuron du groupe Tapie, et dont il fixe le prix de vente Ă  2,085 milliards de francs. La lettre de mandat est accompagnĂ©e d'une lettre d'engagement dans laquelle il s'engage Ă  vendre Adidas avant le [27].
  • un mĂ©morandum pour l'ensemble de ses autres affaires, qui prĂ©voit la vente une Ă  une de ses autres entreprises, le produit des ventes Ă©tant destinĂ© par prioritĂ© au remboursement de la dette bancaire du groupe, le solde devant servir Ă  constituer avec le CrĂ©dit Lyonnais un fonds de gestion privĂ© destinĂ© Ă  prendre des participations minoritaires dans des entreprises jugĂ©es prometteuses tout en assurant Ă  Bernard Tapie une rente confortable[28]. Cependant, Bernard Tapie ne rĂ©ussissant pas Ă  prendre les mesures nĂ©cessaires Ă  la mise en Ĺ“uvre de ce mĂ©morandum (et notamment le retrait de bourse de BTF), l'accord ne peut ĂŞtre mis en Ĺ“uvre avant la nomination de Jean Peyrelevade Ă  la tĂŞte du CrĂ©dit Lyonnais (novembre 1993).

Le plan du Crédit lyonnais

À la fin de 1992, après une tentative de vente avortée à Pentland Group (en) (propriétaire de la marque Reebok)[29], Bernard Tapie charge le Crédit Lyonnais de vendre Adidas ; la banque se livre à une expertise minutieuse de l'affaire, et réalise que sa valeur est certainement bien supérieure au prix minimum demandé par Bernard Tapie dans son mandat (plus de deux milliards de francs). L'état-major de la banque conçoit donc un plan : se porter acquéreur d'Adidas, au prix minimum demandé par Bernard Tapie, et revendre la société au prix fort et à son seul profit par la suite, via des sociétés offshore pour préserver l’anonymat des opérations.

Ce plan est dévoilé dans une note interne saisie à l'occasion de la perquisition du siège du Crédit lyonnais du juge Eva Joly qui enquête alors sur une autre affaire. Cette note, écrite en par Henri Filho, directeur général de Crédit lyonnais Invest, la filiale financière du Crédit lyonnais, plus de deux mois avant la signature du mémorandum et du mandat de vente d'Adidas par Bernard Tapie, à l'attention du président du Crédit lyonnais, Jean-Yves Haberer, décrit toute l'opération, notamment le portage par « des sociétés offshore n'ayant aucun lien avec le Crédit lyonnais et assurant une parfaite étanchéité avec lui, avec au moins deux échelons de protection »[30] - [31].

Le plan comporte deux fautes répréhensibles par la loi :

  1. La faute au mandat, qui consiste à ne pas être loyal avec son client, en ne l'informant pas de la possibilité de vendre son affaire plus cher ;
  2. L'interdiction pour le mandataire (la banque) de se porter contrepartie, c'est-à-dire d’acquérir elle-même le bien (Adidas) qu'elle est chargée de vendre pour le compte de son client (Bernard Tapie).

Aussi, la banque ne se contente pas d'établir un plan visant à capter à son profit la plus-value devant revenir à Bernard Tapie. Prudente, elle intègre dans son plan un moyen d'éviter tout recours possible par Bernard Tapie dans le futur, s'il venait à découvrir que la vente n'était pas régulière. Elle utilise pour cela le mémorandum qu'elle fait signer à Bernard Tapie en même temps que la vente d'Adidas. En effet, dans ce mémorandum du [32] - [31], elle exige, parmi les conditions d’exécution, deux conditions fondamentales : la sortie de bourse de Bernard Tapie Finance (propriétaire d’Adidas), puis l’acquisition de tous les titres de Bernard Tapie Finance.

En devenant à terme propriétaire unique de BT Finance, la société qui possède Adidas au jour de la signature du mémorandum, la banque pense ainsi se prémunir contre toute plainte ultérieure de Bernard Tapie, puisque seule Bernard Tapie Finance sera habilitée à réclamer les sommes perçues par le Crédit lyonnais à son détriment lors de la vente d'Adidas. Le Crédit lyonnais s'assure donc ainsi que sa future filiale, BT Finance, n'ira pas porter plainte contre elle-même.

Une autre interprétation de cette note du [33] contredit l'idée d'une conspiration contre Bernard Tapie. La note indique les objectifs du Crédit Lyonnais : il s'agit pour la banque de préserver la valeur du gage que représente le seul actif de BTF SA via sa filiale à 78 % Bernard Tapie Finances Gmbh en organisant la cession d'Adidas à un groupe d'investisseurs dont la principale dirigeante du groupe BTF, Gilberte Beaux. Bernard Tapie refuse de conserver une part minoritaire dans Adidas.

La vente

Le , l'entreprise est revendue pour la somme de 2,085 milliards de francs (315,5 millions d'euros) [34], par l'intermĂ©diaire du CrĂ©dit lyonnais, mandatĂ© Ă  cet effet, Ă  un groupe d'investisseurs emmenĂ©s par Robert Louis-Dreyfus. Bernard Tapie, ayant reçu le montant prĂ©vu au mandat, ne conteste pas la vente. Par ailleurs, le mĂ©morandum signĂ© en entre Bernard Tapie et le CrĂ©dit lyonnais suit son cours : il prĂ©voit le changement progressif de l'activitĂ© du groupe Tapie qui doit passer, avec la volontĂ© de Bernard Tapie de ne se consacrer qu'Ă  la politique, d'une activitĂ© de groupe industriel actif Ă  un groupe de placement financiers.

La mise en faillite du groupe Bernard Tapie

La reprise par le Crédit Lyonnais de l'ensemble des titres de BT Finance, met du temps. Il faut, en effet, sortir l'affaire de la Bourse, après avoir racheté tous les titres des minoritaires. Or, il en existe des milliers : Bernard Tapie étant très connu pour ses succès dans les affaires dans les années 1980, de très nombreux particuliers, des « petits porteurs », ont acheté des actions BT Finance à partir de sa cotation en Bourse en 1987. Difficile dans ces conditions pour le Crédit lyonnais de parvenir à racheter tous les titres.

En conséquence, la banque passe à un « plan B » : la mise en faillite de groupe Tapie, car celle-ci permettra à la banque, en tant que premier créancier du groupe, de récupérer de fait tous les actifs du groupe Bernard Tapie, dont les titres de BT Finance, sans avoir à attendre la sortie de la Bourse de la société puis le rachat de tous ses titres. Pour cela, la banque doit commencer par casser le mémorandum qu'elle a signé avec Bernard Tapie. Elle guette donc une faute et celle-ci interviendra le .

Bernard Tapie ayant toujours mis sa caution personnelle sur le remboursement des dettes de son groupe, une expertise de ses biens, notamment ses meubles, est prévue dans un nouvel accord signé le 13 mars 1994 par le Directeur général du Crédit Lyonnais, François Gille, accord qui se substitue au précédent. Cette expertise doit être fournie par Jacques Tajan et Jean-Pierre Dillée dont les noms ont été proposés par Bernard Tapie.

L'accord était un accord de divorce total, qui donnait à Bernard Tapie plusieurs années pour rembourser ce qu'il pouvait de ses dettes, à hauteur seulement des recettes obtenues de la vente de ses actifs et notamment de ses œuvres d'art dont il prétendait qu'elles valaient beaucoup d'argent.

L'accord prévoyait dans une clause à valeur suspensive la confirmation avant le 31 mars 1994, grâce à l'intervention des deux experts précités, de la valeur des œuvres d'art, ce qui était un élément-clef de l'ensemble. À cette date, aucun document n'est remis. Le Crédit Lyonnais attend six semaines sans que rien se passe. La lettre de constatation du non-respect de la clause suspensive et donc de la rupture de l'accord est envoyée à Bernard Tapie le 17 mai 1994. Les experts qu'il avait désignés n'ont même pas été contactés par Bernard Tapie.

Le 18 mai, le Crédit Lyonnais déclenche une saisie conservatoire au domicile de Bernard Tapie pour s'assurer de l'existence des biens. Dans la nuit du 17 au 18, Bernard Tapie essaye de déménager meubles et œuvres d'art.

Bernard Tapie saisit dès le 30 mai la justice, en demande d'exécution forcée, pour lui faire dire que le Crédit Lyonnais n'avait pas le droit de rompre unilatéralement l'accord de mars 1994 et que ce dernier est donc toujours valable. Le Tribunal de Grande Instance de Paris lui donne tort par un jugement du 23 novembre 1994.

À cette date, le Crédit Lyonnais est donc fondé à demander le remboursement de toutes les dettes échues du groupe Tapie, de constater le défaut de paiement et à saisir le Tribunal de Commerce de Paris. Ce dernier prononce la liquidation judiciaire à mi-décembre 1994.

La polémique sur la mise en faillite du groupe Bernard Tapie

Le journaliste Airy Routier, pourtant auteur d'une biographie jugée sans complaisance à l'égard de Bernard Tapie, interroge début 2009 les juges ayant prononcé la faillite du Groupe Tapie en 1994, lors de l’émission Un jour, un destin : Bernard Tapie sur France 2 en . Airy Routier rapporte qu'à la question « comment se fait-il que le groupe Tapie ait été mis en faillite avec une telle précipitation et sans prévoir aucun plan de sauvegarde ou même de continuation, fait tout à fait inhabituel pour des groupes de cette taille », les juges auraient répondu « avoir subi de très fortes pressions de leur hiérarchie pour prononcer la faillite immédiate du groupe Tapie ». Cette précipitation de la justice et ces pressions déclarées comme subies par les juges eux-mêmes constituent des arguments majeurs pour les défenseurs de la théorie de l'« assassinat politique » dans la mise en faillite de Bernard Tapie.

Parmi eux, l'auteur André Bercoff, qui mène une enquête sur cette « exécution » banco-judiciaire, et pour qui le but de la manœuvre était double : assurer à l'État l'impunité dans la vente d'Adidas par la captation des actions BT Finance grâce à la mise en faillite du groupe Tapie ; et débarrasser la classe politique d'un encombrant intrus qui vient de réaliser 12 % des votes lors de l'élection européenne de 1994 : en effet, la loi de la faillite en France frappe d'inéligibilité Bernard Tapie, pour sept ans[35]. La proximité politique des dirigeants du Crédit Lyonnais avec les dirigeants du PS ne pouvant, selon André Bercoff, être une coïncidence dans cette affaire : le président Jean-Yves Haberer a été placé par les socialistes, et son successeur Jean Peyrelevade est un ami proche de Michel Rocard et ennemi politique proclamé de Bernard Tapie. Afin que l'élimination soit complète (un homme populaire pouvant toujours influencer une élection sans se présenter), les dirigeants du Crédit lyonnais auraient été chargés de saper l'image de Bernard Tapie ; ce qui expliquerait, selon les défenseurs de cette thèse, la violence ultérieure des campagnes du Crédit lyonnais, n'hésitant pas à désigner Bernard Tapie comme l'un des principaux responsables des pertes de la banque, pourtant abyssales (trois milliards d’euros environ)[36].

Bernard Tapie ne manquera pas de relever lui aussi, sans que cela ne soit repris par les médias, que le Président du Tribunal de Commerce ayant prononcé sa liquidation judiciaire a été nommé quelques mois plus tard, par l'État à la tête du CDR (l'organisme de défaisance du Crédit Lyonnais, ayant été créé pour récupérer les dossiers à risques du Crédit Lyonnais après la faillite de celui-ci). Il ira jusqu'à dire : « L'État est tellement sûr de son impunité qu'il ne se cache même pas. Car enfin, à qui fera-t-on croire que le Président du Tribunal de Commerce ayant prononcé ma liquidation ne savait pas déjà qu'il serait promu, en remerciement, Président du CDR ? Il n'y a qu'en France qu'on peut voir ça. Vous faire juger par un homme qui sait que quelques mois plus tard il vous aura pour adversaire (NDLR : CDR vs Bernard Tapie sur la revente d'Adidas), même en Centrafrique on n'ose plus faire des choses pareilles. »[37]

Les questionnements de Bernard Tapie

Mis en faillite Bernard Tapie s'intĂ©resse aux conditions de la revente d'Adidas, et dĂ©couvre que Robert Louis-Dreyfus et ses coacquĂ©reurs ont acquis la majoritĂ© des titres d'Adidas dans des conditions très inhabituelles : les 2 milliards de francs versĂ©s au groupe Tapie pour l'achat d'Adidas ont Ă©tĂ© financĂ©s par la SdBO, filiale du CrĂ©dit Lyonnais, celle-lĂ  mĂŞme chargĂ©e de la vente d'Adidas pour le compte de Bernard Tapie. De surcroit, ce financement s'est fait par des prĂŞts Ă  recours limitĂ© et Ă  taux d'intĂ©rĂŞt symbolique. En d'autres termes, c'est le CrĂ©dit lyonnais, via sa filiale la SdBO, qui porte le risque de l'opĂ©ration de deux milliards de francs, et tout cela apparemment pour ne gagner que des intĂ©rĂŞts symboliques. Bernard Tapie omet de prĂ©ciser qu'il a bĂ©nĂ©ficiĂ© lui-mĂŞme de conditions similaires de la part de la SDBO par le passĂ©, puisqu'il a obtenu un financement intĂ©gral de l'achat d'Adidas.

Autre Ă©trangetĂ© selon Bernard Tapie : il existe une option donnĂ©e aux acheteurs pour acquĂ©rir la totalitĂ© des titres d'Adidas dans les 24 mois pour 2,6 milliards de francs supplĂ©mentaires. Or, qui sont les bĂ©nĂ©ficiaires de la plus-value entre les 2 milliards versĂ©s au Groupe Tapie et les 2,6 milliards supplĂ©mentaires en cas de levĂ©e de l'option par les acheteurs ? Des fonds offshores, dont les actions sont dĂ©tenues par des sociĂ©tĂ©s offshores, Citibank et Citistar. L'option est effectivement levĂ©e le par Robert Louis-Dreyfus qui prend le contrĂ´le d'Adidas. NĂ©anmoins, Gilberte Beaux faisant partie du tour de table des investisseurs, l'existence de l'option et donc du prix de vente Ă  terme de deux ans est connue du camp Tapie. Le pari du redressement d'Adidas que joue Robert Louis Dreyfus est Ă©vident dès le mois de quand celui-ci indique qu'il a nĂ©gociĂ© une option d'achat globale la nuit prĂ©cĂ©dant la signature de la vente.

Adidas est ensuite cotĂ©e le Ă  la Bourse de Francfort pour une somme totale de 3,280 milliards de deutsche mark (1,677 milliard d'euros, près de 11 milliards de francs). La sociĂ©tĂ©, vendue en 1993 pour 2,08 milliards de francs par le CrĂ©dit lyonnais pour le compte de Bernard Tapie et « au mieux de ses intĂ©rĂŞts », vaut donc deux ans plus tard près de 11 milliards de francs, soit plus de cinq fois plus. Un montant qui n'a rien d'Ă©tonnant pour une marque mondiale qui rĂ©ussit son redressement.

Bernard Tapie comprend que si le CrĂ©dit lyonnais a assumĂ© le risque financier de l'opĂ©ration pour 2 milliards de francs, ce n'est certainement pas pour toucher les intĂ©rĂŞts symboliques des prĂŞts consentis aux acheteurs, mais bien pour toucher les 2,6 milliards de francs de plus-value lorsque l'option serait levĂ©e par Robert Louis-Dreyfus. Et que la nature offshore des fonds utilisĂ©s sert Ă  prĂ©server l'anonymat du CrĂ©dit Lyonnais.

Le CrĂ©dit Lyonnais a donc rĂ©alisĂ© une plus-value de 2,6 milliards de francs (396 millions d'euros) sur son ancienne affaire et « dans son dos », commettant deux fautes rĂ©prĂ©hensibles en droit : la faute au mandat, qui consiste Ă  ne pas ĂŞtre loyal avec son client, en ne l'informant pas de la possibilitĂ© de vendre son affaire plus cher ; et l'interdiction pour le mandataire (la banque) de se porter contrepartie, c'est-Ă -dire d'acquĂ©rir elle-mĂŞme le bien (Adidas) qu'elle est chargĂ©e de vendre pour le compte de son client et au mieux de ses intĂ©rĂŞts.

Dans un premier temps, Jean Peyrelevade, prĂ©sident du CrĂ©dit lyonnais de 1993 Ă  2003, Ă©taye cette thèse devant la justice en parlant de « portage » effectuĂ© par la banque, avant de reconnaĂ®tre une erreur de formulation. Il reconnaĂ®tra en 1996 dans un entretien au journal le Monde un profit de 1,6 milliard de francs (244 millions d'euros) rĂ©alisĂ© par la banque Ă  la suite de cette opĂ©ration.

Puis le Crédit lyonnais va définitivement contester cette version des faits devant toutes les cours qui jugent l'affaire.

Les décisions des institutions judiciaires de 1995 à 2007

Dès le , au titre de la plus-value rĂ©alisĂ©e, Bernard Tapie rĂ©clame 229 millions d'euros au CrĂ©dit Lyonnais ainsi qu'au Consortium de rĂ©alisation (CDR), structure crĂ©Ă©e par l'État en 1995 pour liquider le passif du CrĂ©dit lyonnais après sa faillite de 1993-1994. Il l'assigne devant le tribunal de commerce de Paris.

Le , le tribunal de commerce de Paris condamne le Consortium de rĂ©alisation Ă  verser Ă  Bernard Tapie une provision de 600 millions de francs (91,5 millions d'euros).

Le , devant le tribunal de commerce de Paris, Bernard Tapie rĂ©clame 6,5 milliards de francs (990 millions d'euros) pour « montage frauduleux ». Le tribunal transfère le dossier Ă  la cour d'appel de Paris et annule la provision de 600 millions de francs.

En jouant sur une spécificité du droit français qui précise que le « pénal tient le civil en l’état », en d’autres termes que tant que Bernard Tapie n’aura pas terminé d’être jugé sur sa faillite, l’affaire Adidas ne pourra pas être jugée ; les avocats du Crédit Lyonnais parviennent à retarder le jugement en appel pendant neuf ans.

Le , la cour d'appel de Paris à travers le médiateur Jean-François Burgelin, ancien procureur général près la Cour de cassation, autorise une médiation entre Bernard Tapie et l'État, seul propriétaire du CDR, pour un accord amiable, mais la médiation échoue[38].

Le , neuf ans après le premier jugement, la cour d'appel condamne le Consortium de rĂ©alisation (CDR) Ă  payer 135 millions d'euros Ă  Bernard Tapie. Elle fixe le prĂ©judice de Bernard Tapie Ă  66 millions d'euros augmentĂ©s de l'inflation et de la hausse du titre Adidas. Après avoir hĂ©sitĂ© Ă  faire une transaction avec Bernard Tapie[39], Thierry Breton, ministre des finances, annonce qu'il autorise le CDR Ă  se pourvoir en cassation[40].

Le , la Cour de cassation, saisie par le CDR à la demande du gouvernement, casse l'arrêt de la cour d'appel, sans se prononcer sur le fond du dossier, mais en jugeant que la cour d'appel « n'avait pas caractérisé les éléments qui auraient permis d’établir, selon la jurisprudence en la matière, que le Crédit lyonnais était obligé par un contrat auquel il n’était pas partie »[41].

En effet, ce n'est pas le Crédit lyonnais qui est signataire du mandat de vente d'Adidas, mais la SdBO. Cette dernière est certes filiale à 100 % du Crédit lyonnais, mais cette subtilité de forme fonde le renvoi des parties devant la cour d'appel.

Cet arrêt n'est jugé satisfaisant par aucune des parties :

  • Pour Bernard Tapie, cela signifie qu'il doit retourner devant la cour d'appel, puis Ă©ventuellement Ă  nouveau devant la Cour de cassation, soit 4 Ă  7 ans de dĂ©lai supplĂ©mentaire, dans une affaire qui dure dĂ©jĂ  depuis treize ans.
  • Pour le CDR, la Cour de cassation ayant confirmĂ© la recevabilitĂ© de la plainte envers le CrĂ©dit lyonnais, un nouveau risque existe : celui de la demande en annulation de la vente d'Adidas par Bernard Tapie, auquel cas le prĂ©judice couramment estimĂ© est la valeur de la sociĂ©tĂ© le jour du jugement. Soit aux alentours de 7 milliards d'euros de risque maximum[42].

C'est pourquoi, le , Bernard Tapie et les représentants du CDR acceptent le passage par un tribunal arbitral.

L'arbitrage de 2008

Les conditions de saisine du tribunal arbitral

Le , Bernard Tapie et les représentants du CDR acceptent le passage par un tribunal arbitral. Cette procédure est fréquemment utilisée pour régler les conflits de droit commercial privé, mais extrêmement rarement dans les conflits entre personnes privées face à l’État, et en l'occurrence la décision est prise par Christine Lagarde, alors ministre de l'Économie de Nicolas Sarkozy, contre l'avis de l'Agence des participations de l'État[43]. Les conditions de l'arbitrage sont strictes et acceptées par les parties directement concernées, sans pour autant être révélées publiquement. Ces conditions comprennent notamment :

  • le fait que le tribunal devra juger « en droit », c'est-Ă -dire en fondant leur argumentation sur des dispositions (textes de loi, règlements) contraignants ;
  • un plafonnement des dommages potentiellement accordĂ©s Ă  Bernard Tapie ;
  • un choix unanime des parties quant aux nominations des juges-arbitres.

Ces derniers sont Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel, Jean-Denis Bredin, avocat de grande expérience, et Pierre Estoup, ancien Premier Président de la Cour d'Appel de Versailles[44]. Chacun reçoit 300 000 €[45].

Tous trois sont acceptés sans réserve - faute de vérification sérieuse - par toutes les parties en tant que juges-arbitres.

L'essentiel de la sentence est rédigée par le magistrat Pierre Estoup. Les liens de proximité de cet arbitre avec l'avocat de Bernard Tapie, Maitre Lantourne conduiront les intéressés à leur mise en examen pour escroquerie en bande organisée[46].

L'accord du CDR est validé par les responsables de l'État français, en la personne de Christine Lagarde, Ministre des Finances[47].

La sentence du tribunal arbitral

Le , le tribunal arbitral condamne le CDR Ă  verser Ă  Bernard Tapie 403 millions d’euros, dont 45 millions d'euros Ă  titre de prĂ©judice moral[42] - [48].

Le tribunal arbitral reprend les jugements passés sur le fond, qui donnent raison à Bernard Tapie sur deux points. Selon les juges-arbitres, deux fautes graves ont bien été commises par la banque : d'une part, un manquement à l'obligation de loyauté incombant au mandataire, en n'informant pas le mandant de sa possibilité de vendre son affaire plus cher ; d'autre part, une violation de l'interdiction, pour la banque mandataire, de se porter contrepartie en achetant, directement ou indirectement, le bien qu'elle est chargée de vendre au mieux des intérêts de son client.

Le , Christine Lagarde décide de ne pas contester cette sentence arbitrale, affirmant que les juristes qu'elle a consultés indiquent, dans leur majorité, des chances de succès très faibles[49].

L'État verse les sommes dues peu après. Mais le Crédit Lyonnais, qui devait contribuer à hauteur de douze millions d'euros, ne l'a jamais fait[50].

Les suites de l'arbitrage

La polémique

Cette sentence créera une forte polémique, aussi bien au sein du public, que des médias et de la classe politique. C'est surtout le montant record des indemnités pour préjudice moral (45 millions d'Euros) qui choque l'opinion, en total décalage avec les indemnités généralement accordées même dans des cas dramatiques (l'erreur judiciaire, ou l'erreur médicale)[51].

Cette décision du tribunal arbitral, et celle de Christine Lagarde de ne pas s'y opposer, sont rapidement contestées par l'opposition de gauche et par une partie du centre, dès . Pour François Bayrou, cette décision est « un renvoi d’ascenseur par Nicolas Sarkozy au soutien de Bernard Tapie lors des élections présidentielles de 2007 »[52]. Pour le PS, Jean-Marc Ayrault estime que « tout dans cette affaire relève du copinage d'État »[53]. Bernard Tapie, de son côté, se défend en évoquant :

  • le fait que toute la procĂ©dure ait Ă©tĂ© acceptĂ©e par toutes les parties sans aucune protestation (notamment par le dĂ©putĂ© Nouveau Centre Charles de Courson devenu un des plus actifs ensuite pour contester le choix du recours Ă  l'arbitrage). La critique n’intervenant qu’une fois que la sentence soit prononcĂ©e favorablement Ă  Bernard Tapie.
  • le fait que ceux qui mettent en doute la neutralitĂ© de l'arbitrage s’abstiennent de tout commentaire Ă  l’égard des juges-arbitres du tribunal. Pourtant, si leur thĂ©orie est exacte, Ă©tant donnĂ© que la dĂ©cision Ă©mane des arbitres, si cette dĂ©cision a vraiment Ă©tĂ© dictĂ©e « de l’ÉlysĂ©e », cela doit signifier que les arbitres sont nĂ©cessairement « aux ordres ». Bernard Tapie affirme que la raison de cette curiositĂ© repose probablement sur le fait que les Juges-Arbitres sont reconnus pour leur indĂ©pendance, Pierre Mazeaud (un des juges-arbitres) s’étant mĂŞme distinguĂ©, dans le cadre de la commission Mazeaud nommĂ©e par Brice Hortefeux pour rĂ©flĂ©chir au cadre juridique de « l’immigration choisie », pour critiquer sĂ©vèrement la politique d’immigration prĂ´nĂ©e par Nicolas Sarkozy et son gouvernement[54].

La polémique rebondit quand la justice vient questionner la partialité d'un des arbitres[55]. Pierre Estoup a omis de mentionner les liens qui le liaient à l'avocat de Bernard Tapie. Au contraire, il a même signé une fausse déclaration d'indépendance où il a affirmé ne pas être lié à un des partis en présence. Mais il apparait qu'entre 1997 et 2006, Pierre Estoup a reçu 42 % de ses honoraires en travaillant pour les avocats de Bernard Tapie. De plus, bien que Bernard Tapie affirme ne l'avoir « jamais connu », il lui a consacré en 1998 une dédicace où il l'assurait de son « immense reconnaissance » dans un de ses livres[56].

L'arbitrage fait l'objet d'un recours en révision pour manœuvre frauduleuse intenté par le CDR.

Les auditions publiques devant la commission d'enquĂŞte parlementaire

Les détails de l’affaire sont exposés le devant la Commission des Finances de l’Assemblée nationale, où Bernard Tapie et les autres protagonistes sont entendus par les députés[31].

EnquĂŞte de la Cour des comptes

De son côté, la Cour des comptes, présidée alors par Didier Migaud, transmet au procureur général de la Cour de discipline budgétaire et financière, un rapport sur la gestion du CDR[57] daté du 27/10/2010 pointant des dysfonctionnements dans la gestion du dossier Adidas/Tapie et mettant en cause Jean-François Rocchi, le président du CDR, ainsi que Christine Lagarde[58]. Jean-François Rocchi est cependant confirmé par Nicolas Sarkozy fin 2011 dans ses fonctions de président de la caisse de retraite complémentaire des fonctionnaires[59].

Les recours administratifs contre la décision de Christine Lagarde et leur rejet

Courant , différents recours sont engagés par les responsables du Modem, du PS, ainsi que par le député Charles de Courson, devant le tribunal administratif[60]. Ces recours portent essentiellement sur trois points :

  1. Le montant du préjudice moral, qui atteint un record ;
  2. La décision de la ministre des Finances, Christine Lagarde, de ne pas s’opposer à la décision du Consortium de réalisation (CDR) de recourir à l'arbitrage ;
  3. La décision de la ministre des Finances de ne pas s’opposer à la décision du CDR de ne pas faire de recours en annulation contre cette sentence arbitrale.

À la suite de ces recours, la Commission des Finances à l'Assemblée nationale entend tous les protagonistes de l'affaire dans une série d'auditions du 3 au [61].

Les recours déposés devant le tribunal administratif sont déboutés, dans un jugement rendu public le [62]. Concernant le montant du préjudice moral, le tribunal administratif estime que « l'indemnisation du préjudice moral n'avait nullement été exclue par la cour d'appel, qui avait, en outre, réservé sa décision quant à la réparation éventuelle du préjudice consécutif à la mise en liquidation judiciaire des entités du groupe Tapie. » et que « le tribunal arbitral détermine le préjudice moral, dont la réparation est destinée en priorité à couvrir l’insuffisance d’actif dans le cadre de la liquidation judiciaire, en faisant état du comportement anormal de la banque à l’égard des époux Tapie, accompagné d’une campagne médiatique particulièrement violente. »

Ainsi, contrairement aux cas les plus fréquents d’indemnisation de préjudice moral pour lesquels il n’existe pas de manque à gagner financier pour la victime du préjudice, le tribunal administratif valide la décision du tribunal arbitral de calculer le montant du préjudice moral de Bernard Tapie en tenant compte des effets financiers directement subis par Bernard Tapie du fait de sa mise en liquidation judiciaire. Bernard Tapie utilisera ce compte-rendu parmi ses arguments pour obtenir la révision de sa mise en liquidation. Par ailleurs, le tribunal administratif note « l'intentionnalité du fautif du préjudice moral, la banque ayant mené « une campagne médiatique particulièrement violente », à la différence des préjudices moraux généralement traités dans lesquels il n'y a pas d'intentionnalité (notamment les erreurs judiciaires ou médicales).

Concernant la décision de la ministre des Finances de ne pas s’opposer à la décision du CDR de recourir à l'arbitrage, le tribunal administratif juge qu'« il ne ressort pas des pièces du dossier que la ministre aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en décidant de ne pas s’opposer à la décision du CDR de recourir à l’arbitrage […], eu égard aux risques sérieux d’une nouvelle condamnation, et même d’aggravation de la première condamnation, compte tenu de la gravité des autres fautes du groupe bancaire retenues par la Cour d’appel et non censurées par la Cour de cassation, et de l’étendue du préjudice restant à déterminer, qui ne pouvait plus être limité au tiers du manque à gagner et qui devait inclure les effets de la liquidation judiciaire… ». Le Tribunal administratif reconnait également que ce litige avec le CDR, contrôlé par l'État, est « pleinement arbitrable », contrairement à ce qu'a pu affirmer Thomas Clay, professeur de droit spécialiste du droit arbitral[63].

Concernant enfin la décision de la ministre des Finances de ne pas s’opposer à la décision du CDR de ne pas faire de recours en annulation contre cette sentence arbitrale, le tribunal administratif juge qu'« il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la ministre aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en décidant de ne pas s’opposer à la décision du CDR de ne pas diligenter un recours en annulation contre la décision du tribunal arbitral, en estimant que le compromis d’arbitrage, notamment la chose jugée, n’avait pas été méconnu et qu’en conséquence un recours en annulation n’aurait pas eu de chance sérieuse de succès, eu égard aux cas limités d’ouverture prévus par l’article précité 1484 du code de procédure civile. »

La révision du jugement de liquidation des sociétés de Bernard Tapie

Les décisions favorables rendues par le tribunal arbitral et le tribunal administratif permettent à Bernard Tapie de solder définitivement ses procédures devant la justice. Le tribunal correctionnel, saisi en 1993 par la juge Eva Joly pour banqueroute, le relaxe en 2010, aucune faute pénale n’étant retenue contre lui[64].

Le tribunal de commerce ordonne, le , la révision des jugements de liquidation judiciaire de son groupe[65]. Il convient de distinguer la révision d'une simple sortie de liquidation : la révision est obtenue ici non du fait du paiement des dettes du Groupe Tapie grâce aux indemnités issues de l’arbitrage, mais du fait que le tribunal de commerce a estimé que le groupe Tapie et Bernard Tapie à titre personnel n’auraient jamais dû être mis en liquidation judiciaire compte tenu des sommes qui lui revenaient dans le cadre de la vente d'Adidas.

Le rejet définitif des recours contentieux administratifs par le Conseil d'État

Le , le Conseil d'État rejette les pourvois de deux contribuables et d'un député qui demandaient l'annulation de décisions relatives au recours à l'arbitrage pour trancher le litige entre Bernard Tapie et le Crédit Lyonnais, et à l'absence de recours contre la sentence rendue[66], confirmant ainsi un arrêt[67] rendu par la cour administrative d'appel de Paris en [68].

L'enquĂŞte de la Cour de Justice de la RĂ©publique visant Christine Lagarde

À la demande de Jean-Louis Nadal, procureur général près la Cour de cassation, la Cour de Justice de la République (CJR), l'entité compétente pour juger les ministres, est saisie en à l'encontre de Christine Lagarde pour « abus d'autorité ». Cette saisie est réalisée par Jean-Louis Nadal sur la demande directe du futur Premier ministre Jean-Marc Ayrault[69] - [70].

Les proches politiques de Christine Lagarde réagissent à l'encontre de la demande de Jean-Louis Nadal, en soulignant d'une part que celui-ci conteste un arbitrage qu'il était le premier à promouvoir (Jean-Louis Nadal, alors qu'il était procureur général près la cour d'appel de Paris, avait écrit une note juridique à l'attention de l'État en 2004 conseillant de recourir à un compromis[71] - [72]), et en mettant en cause sa neutralité politique d'autre part (Jean-Louis Nadal soutient Martine Aubry dans le cadre de la campagne de la primaire présidentielle socialiste de 2011, et prend la parole lors de son meeting de Lille d'[73]. En 2012, il soutient ouvertement le candidat François Hollande[74]).

Le , la CJR, saisie à la suite d'une requête de députés socialistes, recommande l'ouverture d'une enquête à l'encontre de Christine Lagarde pour « complicité de faux » et « complicité de détournement de biens publics » au motif qu'elle se serait personnellement impliquée dans un processus qui comporterait « de nombreuses anomalies et irrégularités »[75] - [76] - [77] - [78] - [79].

La CJR rejette le soupçon d'« abus d'autorité » indiqué par Jean-Louis Nadal, mais demande cependant à entendre Christine Lagarde pour des soupçons sur une éventuelle « complicité de faux et de détournement de fonds publics ». Celle-ci sera auditionnée durant vingt-quatre heures les 23 et par la CJR. Elle ressort de cette audition avec le statut de témoin assisté. Elle est cependant mise en examen le pour le seul motif de « négligence »[5] - [80].

Le procès de Christine Lagarde devant la Cour de justice de la RĂ©publique dĂ©bute le [6]. Elle encourt alors un an de prison ferme et 15 000 euros d'amende[81]. Au terme du procès, le parquet requiert sa relaxe[7]. Le , la Cour la dĂ©clare coupable de « nĂ©gligence », mais la dispense de peine et ne fait pas inscrire cette condamnation Ă  son casier judiciaire[8]. La juge Martine Ract Madoux justifie sa dĂ©cision par « le contexte de crise financière mondiale dans lequel Madame Lagarde s'est retrouvĂ©e » ainsi qu'en raison de « la bonne rĂ©putation de Mme Lagarde et son statut international »[82]. Mme Lagarde a toujours niĂ© tout acte rĂ©prĂ©hensible, elle n'Ă©tait pas prĂ©sente lors du verdict et n'a pas fait appel de la dĂ©cision du tribunal[82] - [83].

Cette décision est considérée « illégale » par des analystes juridiques[84] - [85].

L'enquĂŞte et les mises en examen

Le parquet de Paris ouvre en une information judiciaire pour « usage abusif de pouvoirs sociaux et recel de ce délit ». Dans le cadre de cette procédure, les trois juges d’instruction du pôle financier de Paris chargés de l’affaire, Serge Tournaire, Guillaume Daïeff et Claire Thépaut font procéder à des perquisitions, notamment aux domiciles des trois juges arbitres, de Bernard Tapie, de Christine Lagarde et de son ex-directeur de cabinet, Stéphane Richard, ainsi qu'aux cabinets de Maître Lantourne, l'avocat de Bernard Tapie ; et enfin au domicile de Claude Guéant, secrétaire général de l'Élysée au moment de l'arbitrage[86].

Maître Lantourne est placé en garde à vue les 27 et , puis en , et est mis en examen pour escroquerie en bande organisée[87]. Pour sa part, Pierre Estoup, l'un des trois juges-arbitres de l'arbitrage, est placé pendant la même période en garde à vue médicalisée à l'hôtel-Dieu de Paris. Il en ressort avec une mise en examen pour « escroquerie en bande organisée »[46]. Le PDG d'Orange, Stéphane Richard, est mis en examen le pour le même motif. M. Richard était le directeur du cabinet de la ministre de l'Économie, Christine Lagarde, à l'époque où le gouvernement a accepté de solder le contentieux entre M. Tapie et le Crédit Lyonnais[88]. Par ailleurs, l'ancien président du Consortium de réalisation, Jean-François Rocchi, est mis en examen pour « usage abusif de pouvoirs sociaux »[89].

Pierre Estoup conteste la qualification retenue pour son incrimination. Il estime que son honneur est attaqué et s'étonne, en outre, que les deux autres arbitres, en l'occurrence Pierre Mazeaud, Président du tribunal arbitral, dont la voix était prépondérante et Jean-Denis Bredin, arbitre désigné par le Crédit Lyonnais ne soient pas inquiétés dès lors que la sentence figeant les sommes attribuées à Bernard Tapie a été rendue et signée à l'unanimité du tribunal arbitral[90].

Bernard Tapie est lui placé en garde à vue le [91] puis mis en examen pour « escroquerie en bande organisée » [92] - [93]. Il conteste cette mise en examen estimant que le dossier ne comporte rien qui puisse justifier une telle qualification. Une partie de ses biens est mis sous séquestre et ses comptes bancaires sont bloqués[94]. Fin , Bernard Tapie dépose une requête pour faire annuler sa mise en examen[95]. Une requête en annulation est aussi déposée par Pierre Estoup et l'avocat Maurice Lantourne[96].

En , la cour d'appel de Paris valide les mises en examen pour « escroquerie en bande organisée » de Bernard Tapie, de Pierre Estoup et de Maurice Lantourne, puis la mise en examen de Bernard Tapie pour « escroquerie en bande organisée » est validée par un arrêt de la cour de cassation du [14].

Parallèlement, et dans le cadre de cette affaire d'arbitrage du litige concernant la vente d'Adidas, Bernard Tapie est mis en examen le , pour «détournements de fonds»[12] - [13].

En , les juges d’instruction chargĂ©s du dossier dĂ©cident, suivant des rĂ©quisitions du Parquet de , et au terme d’une instruction de plus de cinq ans, de renvoyer devant le tribunal correctionnel, Bernard Tapie, son avocat, Maurice Lantourne, l’ancien directeur de cabinet de la ministre de l’économie Christine LagardeStĂ©phane Richard, prĂ©sident-directeur gĂ©nĂ©ral d’Orange, Pierre Estoup, l’un des trois juges arbitres de l’affaire, Jean-François Rocchi, ancien directeur du Consortium de rĂ©alisation (CDR), et Bernard Scemama, ancien prĂ©sident de l’Établissement public de financement et de restructuration (EFPR), autre entitĂ© alors chargĂ©e, avec le CDR, de gĂ©rer les dettes du CrĂ©dit lyonnais[15].

Procès et relaxe générale de l'accusation d'escroquerie dans l'arbitrage

Après un procès débuté en [97], le tribunal correctionnel prononce une relaxe générale le estimant qu'« aucun élément du dossier ne permet d'affirmer » que cet arbitrage ait fait l'objet de « manœuvres frauduleuses » ou d'une quelconque « fraude ». Le procureur de la République avait pourtant requis de lourdes peines à l'encontre de cinq des six prévenus (Bernard Tapie, Stéphane Richard, Maurice Lantourne, Pierre Estoup, Jean-François Rocchi et Bernard Scemama)[98]. Le parquet de Paris fait appel de ce premier jugement le suivant[99]. Mais le décès de Bernard Tapie le 3 octobre 2021 met fin à l'action publique en ce qui le concerne[17].

Recours judiciaires civils en vue d'annuler ou réviser l'arbitrage

Au vu des développements de l'affaire pénale, le Consortium de réalisation dépose le deux recours devant la cour d'appel de Paris en vue de réviser l'arbitrage rendu en 2008 qui serait fondé, selon le CDR, sur des attestations qui se seraient révélées par la suite mensongères[100] - [101] - [102], le CDR visant notamment l'attestation de l'arbitre Pierre Estoup déclarant ne pas avoir de lien avec Bernard Tapie.

L'un des recours demande la récusation du juge arbitre mais le compromis arbitral comportant une clause dérogatoire à l'article 1464 du code de procédure civile permettant de récuser les arbitres, si un arbitre est récusé, la procédure arbitrale continue néanmoins[103].

Le deuxième recours est un appel en nullité contre la sentence arbitrale. Les précédents recours administratifs avaient conclu qu'un tel appel avait peu de chance d'aboutir. Cependant, la situation a évolué depuis la mise en examen de Bernard Tapie dans le volet pénal de l'affaire.

Par « précaution », le CDR saisit également, le , le Tribunal arbitral, pourtant contesté, d'une demande en rétractation de ses sentences, ce que l'avocat de Bernard Tapie, Me Jean-Georges Betto, qualifie de « reculade »[104].

Le , l'État français, par l'intermédiaire du CDR et de l'Établissement public de financement et de restructuration (EPFR), dépose devant le Tribunal de Grande Instance de Paris un autre recours pour faute à l'encontre de Bernard Tapie, son avocat, Maître Maurice Lantourne, et le juge-arbitre Pierre Estoup. Les avocats de Bernard Tapie qualifient ce nouveau front judiciaire de « risible » et remarquent que ces trois recours civils ne pourront être statués avant plusieurs années puisqu'ils sont accompagnés d'une demande de sursis à statuer en attente de la solution définitive de la procédure pénale[105].

Le , le principal recours introduit par le CDR contre l'arbitrage (recours en annulation) est déclaré irrecevable par la cour d'appel de Paris[106], car introduit hors délais. Pour être recevable, il aurait dû être introduit dans un délai d'un mois suivant la notification de la sentence.

Le , Le Monde révèle les conclusions du rapport de synthèse des policiers de la brigade financière chargée d'enquêter sur les conditions de la vente d'Adidas par Bernard Tapie : selon leurs conclusions et contrairement à sa version des faits, l'homme d'affaires n'aurait pas été lésé par le Crédit lyonnais lors de cette transaction. Ils écrivent notamment que les « faits ayant pu être établis par les investigations ne permettent pas de donner crédit à la thèse de M. Tapie et aux conclusions des arbitres » et que « M. Tapie et son conseil ont produit des attestations qui s'avèrent inexactes, voire mensongères […]. Le raisonnement des arbitres reposait sur des documents non conformes à la réalité »[107]. Sur France Info, Bernard Tapie dénonce un « cirque » et « l'intox des policiers avec la complicité des journalistes »[108].

Rétractation du jugement arbitral du 17 février 2015, arrêt de la cour d'appel de Paris du 3 décembre 2015, arrêt de la cour de cassation du 30 juin 2016

Le , la cour d'appel de Paris ordonne la rétractation du jugement arbitral du ainsi que des trois sentences du et déclare recevable le recours en révision engagé par « SAS CDR » anciennement « Société de banque occidentale » et « SA CDR Consortium de réalisation » contre la sentence arbitrale qui avait été rendue à l'avantage de M. et Mme Tapie et consorts[109] - [110].

Pour mĂ©moire, la « SAS CDR » anciennement « SociĂ©tĂ© de banque occidentale » et « SA CDR Consortium de rĂ©alisation » ont Ă©tĂ© prĂ©cĂ©demment condamnĂ©es Ă  payer au couple Tapie et consorts la somme de 404 623 082,54 â‚¬ correspondant Ă  :

  • 240 000 000,00 â‚¬ en principal,
  • 8 448 529,59 € pour les dĂ©penses engagĂ©es sur frais de liquidation,
  • 45 000 000,00 â‚¬ pour le prĂ©judice moral des Ă©poux Tapie,
  • auxquels s'ajoutent la moitiĂ© des frais et honoraires des trois arbitres et les intĂ©rĂŞts lĂ©gaux non capitalisĂ©s calculĂ©s sur le principal de 240 000 000 â‚¬, Ă  compter du , ce qui reprĂ©sente un total de 111 174 552,95 â‚¬ [111].

Le Jugement de la cour d'appel de Paris du statue sur l'action introduite par les : S.A.S. CDR anciennement Société de Banque Occidentale et S.A. CDR Consortium de Réalisation et fait suite à l'arrêt rendu le ci-dessus[112].

Devant se prononcer sur le bien-fondé de la décision des arbitres, la cour d'appel de Paris :

  • dĂ©boute de toutes leurs prĂ©tentions[113] - [114]:
  1. Bernard Tapie et Dominique Mialet-Damianos Ă©pouse de Bernard Tapie
  2. la SELAFA MJA en qualité de Mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire du couple Tapie, de la Société Anonyme Alain Colas Tahiti et de la Société en Nom Collectif Bernard Tapie Gestion (S.N.C. BTG),
  3. la SELARL EMJ en qualité de Mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire du couple Tapie, de la SA Alain Colas Tahiti et de la S.N.C. BTG,
  4. la Société en Nom Collectif Groupe Bernard Tapie (S.N.C. GBT) est l'actionnaire majoritaire de la Société en Nom Collectif Bernard Tapie Finance (SNC BTF), (pour information : la SNC BTF est par ailleurs l'actionnaire majoritaire de la Société en nom Collectif Bernard Tapie Finance GmbH (SNC BTF GmbH) qui était détentrice d'Adidas)
  5. la Société Financière Immobilière Bernard Tapie (S.F.I.B.T.),
  6. la Société en Nom Collectif Bernard Tapie Gestion (S.N.C. BTGestion),
  7. la Société Alain Colas Tahiti,
  8. l'Établissement Public de Financement et de Restructuration. (Les trois dernières sociétés n'étant pas représentées).
  • en outre, le couple Tapie et consorts sont solidairement condamnĂ©s Ă  payer aux « SAS CDR » anciennement « SociĂ©tĂ© de banque occidentale » et « SA CDR Consortium de rĂ©alisation » :
  1. la somme de 404 623 082,54 â‚¬ correspondant Ă  la somme accordĂ©e par la sentence arbitrale rĂ©tractĂ©e. On relève que la Cour d'appel ne mentionne aucune rĂ©duction ni dĂ©duction applicables Ă  cette somme, car elle correspond Ă  celle mentionnĂ©e au jugement arbitral initial. C'est bien l'intĂ©gralitĂ© de cette somme qui est rĂ©clamĂ©e Ă  Bernard Tapie et consorts.
  2. les intĂ©rĂŞts calculĂ©s au taux lĂ©gal sur la somme de 404 623 082,54 â‚¬ Ă  compter du jour du paiement par les sociĂ©tĂ©s S.A.S. CDR et S.A. CDR Consortium de RĂ©alisation et ordonne la capitalisation des intĂ©rĂŞts ci-dessus dans les conditions prĂ©vues par l'article 1154 du Code Civil [115] - [116],
  3. le coût de la procédure d'arbitrage y compris les frais et honoraires des arbitres,
  4. les intérêts calculés au taux légal sur le coût de la procédure d'arbitrage y compris les frais et honoraires des arbitres à compter du jour du paiement par les S.A.S. CDR et S.A. CDR Consortium de Réalisation et ordonne la capitalisation des intérêts ci-dessus dans les conditions prévues par l'article 1154 du Code Civil [115] - [116],
  5. la somme de 300 000 â‚¬ en application de l'article 700 du Code de ProcĂ©dure Civile, pour couvrir les frais autres que les dĂ©pens engagĂ©s par S.A.S. CDR anciennement SociĂ©tĂ© de Banque Occidentale et S.A. CDR Consortium de RĂ©alisation,
  6. les dépens conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile [117].

La cour d'appel de Paris rejette toutes les demandes du couple Tapie et consorts à l'exception de sa demande de dommage et intérêts concernant uniquement le préjudice lié à la visite publique organisée de l'hôtel Cavoye le de 9 heures à midi dans le cadre de la vente aux enchères du dit immeuble. À ce titre, et uniquement à ce titre les S.A.S. CDR et S.A. CDR Consortium de Réalisation sont condamnées à payer au couple Bernard Tapie et consorts : € symbolique de dommage-intérêts au titre du préjudice moral visé à l'article 2.22 du compromis.

Le jugement n'étant pas suspensif, la Justice procède dès lors à des saisies conservatoires des biens des époux Tapie afin de recouvrer une partie des 404 millions d'euros exigible dès le jour de la notification du jugement, les Tapie disposant d'un délai de deux mois pour s'acquitter de la totalité du remboursement[118]: après le , cette dette sera majorée de 5 points[119]. Selon maître William Bourdon, avocat des parties civiles, « il y a des indices qui accréditent l'idée qu'une partie des sommes se sont évaporées dans des lieux hospitaliers comme des paradis fiscaux ». L'avocat n'exclut pas que les choses se terminent par de la prison si Bernard Tapie tente d'organiser une insolvabilité présumée[120].

Le , la Cour de cassation rejette les deux principaux pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du . Elle confirme la compétence de la cour d'appel de Paris pour statuer sur un arbitrage dépourvu du caractère international qui l'aurait fait échapper à la compétence de la juridiction française. Elle confirme l'existence d'une fraude civile justifiant l'annulation des sentences arbitrales en raison des liens entre l'un des juges arbitres (Pierre Estoup) et Bernard Tapie[121] - [122].

Un autre pourvoi, contre un arrĂŞt de la cour d'appel de Paris en date du portant sur les 405 millions d'euros que Bernard Tapie doit rembourser[123], reste pendant devant la cour de cassation[124]. En date du , la Chambre commerciale, financière et Ă©conomique de la Cour de cassation rend l'arrĂŞt n°842 qui condamne dĂ©finitivement Bernard Tapie Ă  rembourser la somme de 404 millions d'euros au CDR[125].

Procédure de sauvegarde du 2 décembre 2015

Le , anticipant la décision des juges, Bernard Tapie a introduit une procédure de sauvegarde [126] - [127] auprès de la 2e Chambre du Tribunal de Commerce de Paris [128] aux noms de la société : SNC GBT (RCS Paris 316 655 125 Objet : Gestion de Fonds) . Cette procédure est étendue par le Tribunal de Commerce de Paris à la SCI FIBT (RCS 316 238 906 Objet : Location de terrains et autres biens immobiliers) le [129].

Toutefois, pour que cette procédure de sauvegarde soit recevable, il faut qu'à la date de l'introduction de la procédure de sauvegarde [130], les débiteurs, en l’occurrence les deux sociétés ci-dessus appartenant à Bernard Tapie :

  • ne soient pas en cessation de paiement,
  • puissent justifier de difficultĂ©s qu'elles ne sont pas en mesure de surmonter et qui sont susceptibles de les conduire Ă  la cessation de paiement.

Cette procédure est ouverte pour une période de 6 mois renouvelable jusqu'à 18 mois maximum, elle s'ouvre sur une période d'observation, en outre, elle suspend les poursuites ainsi que le calcul des intérêts et des majorations.

Ce type de procédure ne peut pas être ouverte par anticipation d'hypothétiques difficultés à venir. De ce fait, sa recevabilité par le Tribunal de Commerce le laisse entendre que la situation financière de Bernard Tapie était déjà compromise à cette date.

Pour information, les derniers comptes annuels de la SNC GBT dĂ©posĂ©s au Greffe sont arrĂŞtĂ©s Ă  la date du 30/06/2011 et font Ă©tat d'un dĂ©ficit de 2 586 800 â‚¬ pour un chiffre d'affaires HT de 400 000 â‚¬, la trĂ©sorerie s'Ă©levant Ă  213 358 300 â‚¬ [131] - [132].

Cette société contrevient depuis à l'obligation légale faite aux sociétés commerciales de déposer leurs comptes sociaux au Greffe [133]. La SCI FIBT n'est pas soumise à cette obligation légale du fait de sa forme juridique.

Aucune mesure de sauvegarde ou autre ne semble avoir été prise par l'épouse de Bernard Tapie et les consorts solidairement condamnés.

Suites judiciaires du traitement fiscal des indemnités allouées par l'arbitrage au couple Tapie

Les indemnitĂ©s perçues par le couple Bernard Tapie, son Ă©pouse et les sociĂ©tĂ©s citĂ©es dans le jugement d'arbitrage ci-dessus soit 404 623 082,54 â‚¬ ont fait l'objet d'une imposition fiscale, dĂ©duction faite des 45 000 000,00 â‚¬ d'indemnitĂ© pour prĂ©judice moral, non imposable qui a Ă©tĂ© directement perçue par le couple Tapie.

Les 359 623 082,54 â‚¬ restants ont Ă©tĂ© versĂ©s Ă  la SociĂ©tĂ© en Nom Collectif Groupe Bernard Tapie (SNC GBT), Ă©tablissement qui relève de l'impĂ´t sur les SociĂ©tĂ©s.

De ce fait, l'Administration fiscale estime que cette somme relevait des BĂ©nĂ©fices industriels et commerciaux, et devait Ă  ce titre ĂŞtre soumise Ă  l'impĂ´t sur les SociĂ©tĂ©s (IS) au taux normal de 33,3 % soit 119 754 487 â‚¬ d'impĂ´t.

Quant Ă  lui, le couple Tapie a Ă©mis la demande que cette somme soit imposable au rĂ©gime plus favorable des plus-values de cession de titres de participation dĂ©tenus depuis au moins deux ans. Les plus-values ainsi rĂ©alisĂ©es sont exonĂ©rĂ©es, sous rĂ©serve qu'une quote-part de frais et charges de 5 % de la somme soit soumise Ă  la taxation au taux normal de l’IS, ce qui Ă©quivaut Ă  une imposition d'environ 1,67 % (soit 5 987 724 â‚¬ d'impĂ´ts).

Le cabinet d'Eric Woerth alors ministre du Budget, des Comptes Publics et de la Fonction Publique, tranche dans un courrier daté du pour une taxation mixte considérant les 2/3 de la somme comme relevant du régime des plus-values et 1/3 comme relevant du régime des bénéfices industriels et commerciaux :

  • 4 003 804 â‚¬ correspondant Ă  l'imposition Ă  1,67 % d'une quote-part de frais et charges de 5 % calculĂ©e sur deux tiers de l’indemnitĂ©,
  • 39 918 962 â‚¬ correspondant Ă  l'imposition Ă  33,3 % calculĂ©e sur un tiers de l'indemnitĂ©,

ce qui reprĂ©sente une somme totale de 43 921 966 â‚¬.

In fine, la SociĂ©tĂ© en Nom Collectif Groupe Bernard Tapie (SNC GBT) s'acquitte de 11 000 000 â‚¬[134].

S'interrogeant sur « les conditions très favorables d'imposition », Gilles Johanet Procureur général près la Cour des comptes adresse un courrier à l'Administration fiscale via la Justice. Le , une information judiciaire est ouverte pour « Concussion, complicité et recel » et trois juges d'instructions sont nommés[135]. La Cour de justice de la République ouvre une information judiciaire en 2019[136].

En , Eric Woerth est mis en examen par la Cour de justice de la République pour concussion (malversations commises dans l’exercice d’une fonction publique). Il est soupçonné d’avoir accordé un avantage fiscal à Bernard Tapie en 2009[137] - [18].

Le 24 novembre 2021[138] - [139], la Cour d'Appel de Paris invalide le jugement de première instance, et condamne Maurice Lantourne, Pierre Estoup, et Jean-François Rocchi. Les trois hommes, ainsi que Stéphane Richard, décident de former des pourvois en cassation[19].

Le 3 octobre 2022, la Cour de justice de la République prononce un non-lieu pour Éric Woerth. L'ancien ministre échappe donc à un procès[20].

Notes et références

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  12. La presse française fait référence à une mise en examen pour "détournement de fonds publics par une personne privée", ce qui n'existe pas en droit français. Bernard Tapie n'exerçant pas une fonction publique à l'époque de l'arbitrage, il est donc mis en examen pour détournement de fonds. Il pourrait aussi être mis en examen pour recel si l'escroquerie à l'arbitrage est prouvée.
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  25. extrait bas de la page 18 de l'arrĂŞt du 30/09/2005 rendu par la Cour d'appel de Paris (celui qui avait allouĂ© 135 millions d'euros Ă  Tapie) : "Sans que ses qualitĂ©s de dirigeant opĂ©rationnel d'Adidas soient diminuĂ©es, Monsieur Robert Louis Dreyfus apparait avoir parfaitement perçu que Madame Beaux, nommĂ©e prĂ©sident d'Adidas le 6 novembre 1992, active et dĂ©terminĂ©e, avait remotivĂ© les cadres, procĂ©dĂ© Ă  la restructuration en rĂ©amĂ©nageant le rĂ©seau amĂ©ricain, en enrayant la chute du chiffre d'affaires et en commençant la dĂ©localisation, toutes mesures qui ont contribuĂ© Ă  dĂ©gager un bĂ©nĂ©fice consĂ©quent dès 1993 (7 millions d'euros puis 60 millions € en 1994, 126 millions en 1995), la valeur d'Adidas Ă©tant fondĂ©e pour une très large part sur son nom et sa marque"
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  30. Note confidentielle interne du Crédit lyonnais produite aux députés lors de l’Audition de Bernard Tapie devant la commission des finances de l’Assemblée nationale, le 15 septembre 2008 - visionnable sur Dailymotion
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Voir aussi

Vidéographie

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  • L'intĂ©gralitĂ© de l'audition de Bernard Tapie devant la Commission des finances, de l'Ă©conomie gĂ©nĂ©rale et du plan de l'AssemblĂ©e nationale. Analyse de la sentence arbitral de et des prises de position dest deux instances concernĂ©es : l'EPFR et le CDR. (DiffusĂ© sur LCP, La Tribune TV)

Articles connexes

  • Affaire Executive Life, dans cette affaire, le CrĂ©dit lyonnais a utilisĂ© un système similaire de portage dans des sociĂ©tĂ©s Ă©crans offshore pour contourner la loi amĂ©ricaine. Le Consortium de rĂ©alisation a payĂ© 770 millions de dollars d'amende en 2003 et Jean Peyrelevade, qui a reconnu en 2006 avoir menti aux autoritĂ©s amĂ©ricaines, a Ă©copĂ© de 500 000 $ d'amende.
  • Affaire VA-OM, en 1995 Bernard Tapie a Ă©tĂ© condamnĂ© Ă  deux ans de prison dont huit mois ferme pour une affaire de match truquĂ© alors qu'il Ă©tait prĂ©sident de l'Olympique de Marseille.

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