Sainte Anne, la Vierge, l'Enfant JĂ©sus et saint Jean-Baptiste enfant
Sainte Anne, la Vierge, l’Enfant Jésus et saint Jean-Baptiste enfant ou le Carton de Burlington House est un carton du peintre Léonard de Vinci, qui s'inscrit dans ses études autour du thème de la « Sainte Anne trinitaire ». Cette composition ne semble avoir été ensuite reprise à l'identique par l'artiste florentin dans aucun tableau connu. Elle constitue néanmoins une étape de recherche pour la création de son tableau Sainte Anne, la Vierge et l'Enfant Jésus jouant avec un agneau qui en reprend un certain nombre d'éléments.
JĂ©sus et saint Jean-Baptiste enfant
Artiste | |
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Date | |
Type | |
Technique | |
Dimensions (H Ă— L) |
141,5 Ă— 106,5 cm |
Étude pour | |
Mouvement | |
No d’inventaire |
NG6337 |
Localisation |
National Gallery, Londres |
Réalisé au fusain, à la sanguine, à l'estompe et à la craie ocre, avec des rehauts de blanc, le dessin représente certains des personnages principaux du christianisme. Il s'agit d'un portrait en pied qui représente un groupe formé par Marie assise sur un genou de sa mère, sainte Anne, et tenant dans les bras son fils Jésus de Nazareth qui se retourne vivement vers Jean le Baptiste enfant pour le bénir. Le carton est composé de huit feuilles dont les bords ont été collés ensemble afin d'obtenir une grande surface de papier de plus d'un mètre de large ; près de 200 ans plus tard, le tout est maladroitement collé sur une toile montée sur châssis, ce qui occasionne ensuite des dégâts notables. Conservé à Londres à la National Gallery depuis 1962, le carton est néanmoins en assez bon état de conservation, malgré l'acidité qui l'a rongé jusqu'à sa stabilisation récente, des rapiéçages grossièrement réalisés au XVIIe siècle et les dégâts dus à un tir de chevrotine en 1987.
La date de sa réalisation fait l'objet d'un vif débat entre les chercheurs qui la situent, pour les uns, entre 1499 et début 1501 et, pour les autres, au plus large, entre 1506 et 1513. De même, le destinataire de l'œuvre est inconnu et pourrait être aussi bien le roi de France Louis XII, les moines servites de Florence que la république de Florence, à moins que la composition ne soit issue de la propre initiative du peintre.
Le Carton de Burlington House possède toutes les caractéristiques de l'art de Léonard de Vinci, sfumato et non finito, et montre sa capacité à allier une grande connaissance de l'anatomie à la finesse dans l'expression des sentiments. Néanmoins, sa composition, volontiers classicisante, pourrait expliquer son abandon par le peintre au profit de celle qui apparaît dans le tableau conservé au Louvre.
Si la composition de l'œuvre subit un relatif manque d'intérêt chez les suiveurs du peintre — très peu de mises en peinture sont connues, sauf pour de rares exceptions comme celle de Bernardino Luini, entre 1520 et 1530 — certains de ses motifs connaissent plus de succès avec des reprises des poses de la Vierge et de l'Enfant Jésus, par Francesco Melzi, Fernando de Llanos, Raphaël et Michel-Ange.
L'Ĺ“uvre
Description
Le support de la Sainte Anne, la Vierge, l’Enfant Jésus et saint Jean-Baptiste enfant a pour dimensions 141,5 × 106,5 cm
Sur une légère préparation brune, le dessin a été réalisé au fusain ou à la pierre noire, puis a bénéficié d'un rehaut à la craie blanche
La scène se déroule sur un fond rocheux comportant des montagnes[9]. Des galets (en bas au premier plan) et une plante aquatique (aux pieds de saint Jean-Baptiste) indiquent une présence d'eau : de fait, des cours d'eau esquissés se devinent en arrière-plan à gauche, près de l'épaule de Marie, et une cascade (en bas à droite) se déverse vers la gauche[10]. Le dessin représente un groupe compact de trois personnages assis — deux femmes et un bébé — auquel s'adjoint, debout à leur côté, un jeune enfant, un peu plus âgé que le premierchap.
Certaines parties du dessin présentent un degré élevé de finition, notamment les visages, les bustes et les draperies : cela se traduit notamment par un rendu parfait des volumes par les effets d'ombrage et de sfumato. Les autres parties des corps — les coiffures et les pieds des femmes ainsi que la main pointée de Sainte Anne — sont plus simplement contourés. Enfin, les éléments naturels ne sont qu'à peine esquissés[12] - [9].
Sujet
La Vierge, l'Enfant Jésus avec sainte Anne et saint Jean-Baptiste s'insère au sein du thème iconographique chrétien de la « Sainte Anne trinitaire » dans lequel sont représentés ensemble l'Enfant Jésus accompagné de sa mère Marie et sa grand-mère Anne[16]. Lorsque Léonard de Vinci entreprend la création du Carton de Burlington House — conduisant à celle du tableau Sainte Anne, la Vierge et l'Enfant Jésus jouant avec un agneau —, c'est la première fois qu'il se saisit du thème et tente de le représenter[17]. Ce thème entre dans le cadre du culte marial[18] afin notamment de justifier le dogme de l'Immaculée Conception[18] - [19], selon lequel Marie, recevant par anticipation les fruits de la résurrection de son fils Jésus-Christ, a été conçue exempte du péché originel[N 3]. Or, ce miracle implique que sa mère, Anne, gagne en importance théologique[18]. Dès lors, le culte de sainte Anne se développe jusqu'à ce que la « Sainte Anne trinitaire » constitue une trinité terrestre en référence à la Trinité céleste[19]. Peu de temps avant la période d'activité de Léonard de Vinci, le pape Sixte IV favorise ce culte par la mise en place d'une indulgence qui promet la remise des péchés à quiconque prononce une prière devant l'image de Anna metterza (sainte Anne, la Vierge et l'Enfant)[20]. On voit ainsi quelques exemples de la triade de sainte Anne, la Vierge et l'Enfant aux XIIIe et XIVe siècles ; puis ce thème iconographique prend de l'ampleur à la fin du XVe siècle, principalement sous forme de sculpture et de peinture[16].
Par ailleurs, le thème revêt également une dimension politique : en effet, sainte Anne est la protectrice de Florence depuis le soulèvement de ses habitants contre Gautier VI de Brienne le , jour de la fête de sainte Anne. Il peut ainsi jouer un rôle symbolique de soutien pour la république de Florence, après la chute des Médicis en 1494. Précisément, l'intérêt de Léonard pour ce thème coïncide avec son retour dans la ville au début du XVe siècle[21].
Historiquement, la représentation italienne de la Sainte Anne trinitaire suit la forme picturale byzantine[18] et propose originellement une structure strictement verticale, où les personnages sont situés les uns au-dessus des autres avec sainte Anne en position supérieure[22] - [N 4]. Plus proche encore de l'époque de Léonard de Vinci, cette structure évolue grandement : la représentation devient moins franchement verticale ; ainsi, dans un tableau destiné à un couvent de religieuses de Pise, Benozzo Gozzoli propose une composition diagonale qui juxtapose les visages des trois personnages du thème[23]. Dans le Carton de Burlington House, Léonard de Vinci confirme le passage à une représentation plus horizontale qui autorise une interaction entre l'Enfant Jésus, Marie et Anne, ce qui permet ainsi d'introduire une véritable narration[22].
Un tel affranchissement de la verticalité permet de faciliter la délivrance d'un message symbolique[22] : bien qu'une telle représentation ne fasse l'objet d'aucune référence biblique — d’autant plus qu’Anne est censée être déjà morte à la naissance de son petit-fils[18] —, elle se lit généralement comme l'acceptation par Marie, avec le concours de sa mère, de la Passion à venir de son fils[22]. De fait, dans le carton Sainte Anne, la Vierge, l’Enfant Jésus et saint Jean-Baptiste enfant, la gestuelle d'Anne est signifiante : le destin du Christ est figuré par l'index qui désigne le ciel, c'est-à -dire Dieu[15] - [17], tandis que son sourire en direction de Marie marque qu'elle l'encourage à accepter le sacrifice futur de son fils[15]. La gestuelle de Marie, quant à elle, est marquée par l'ambiguïté car elle est partagée entre une volonté de le retenir[15] - [17] et un consentement, souligné par son sourire[15]. Par ailleurs, si le peintre n'invente pas la représentation à trois personnages du thème de la « Sainte Anne trinitaire » (Sainte Anne, la Vierge et Jésus), il est le premier à adjoindre au groupe un quatrième protagoniste, en l'occurrence, saint Jean-Baptiste, dont la présence induit un nouvel élément de narration en même temps que de dynamique[24] : Jésus effectue un geste de bénédiction vers celui qui se chargera plus tard, selon l'Évangile selon Jean, d'annoncer son ministère par ces paroles, « Voici l'Agneau de Dieu, qui ôte le péché du monde » (Jn 1,29). Par cet acte déterminé et volontaire, Jésus marque ainsi l'acceptation de son propre sacrifice[15].
Historique de l'Ĺ“uvre
Attribution
L'attribution à Léonard de Vinci fait l'objet d'un consensus unanime parmi les chercheurs[25]. De nombreux éléments permettent en effet d'atteindre un haut niveau de certitude. En premier lieu, la parfaite traçabilité du cheminement de l'œuvre après la mort du peintre grâce à l'importance et la qualité de la documentation disponible constitue le principal argument des chercheurs
Titre
Le carton ne fait pas l'objet d'un nom particulier autre qu'un titre descriptif ou d'une appartenance.
Il est le plus couramment nommé dans la littérature scientifique par son contenu mais sans qu'une forme ne se soit imposée : Sainte Anne, La Vierge, l’Enfant Jésus et saint Jean-Baptiste enfant chez Renaud Temperini[25] et chez Vincent Delieuvin[34], La Vierge et l’Enfant accompagnés de sainte Anne et de saint Jean-Baptiste chez Carlo Pedretti[7] ou plus simplement Sainte Anne pour Peter Hohenstatt[35]. En outre, des acceptions différentes se trouvent parfois entre les ouvrages d'un même auteur comme chez Frank Zöllner qui propose Sainte Anne avec Jean-Baptiste enfant et Marie avec l'Enfant Jésus en 2000[9] puis Sainte Anne avec la Vierge, l'Enfant Jésus et saint Jean-Baptiste en 2017
Enfin, cohabitent volontiers les versions anglophone et francophone de la désignation du carton par son appartenance passée (entre 1799 et 1962
Contexte de création : autour de la création d'une Sainte Anne
En 1501 (si l'on suit l'hypothèse d'une création avant avril de cette année)[19], Léonard de Vinci, qui approche de la cinquantaine[36], est alors un artiste peintre reconnu et sa renommée dépasse les limites de la péninsule Italienne[37]. Néanmoins, sa vie est dans une phase importante de transition : en , les Français de Louis XII envahissent Milan et le peintre perd son puissant protecteur Ludovic le More[38]. Il hésite alors sur ses allégeances : doit-il suivre son ancien protecteur ou se tourner vers Louis XII qui rapidement prend langue avec lui[39] ? Néanmoins, les Français se font rapidement détester par la population et Léonard prend la décision de partir. Cet exil, décrit par ses contemporains comme erratique[N 5], le conduit d'abord vers Mantoue — chez la marquise Isabelle d'Este pour qui il crée un carton pour son portrait — puis Venise et enfin Florence, sa ville natale[36].
Les chercheurs s'accordent sur l'idée que le Carton de Burlington House est lié à un projet de création d'une « Sainte Anne trinitaire » qui aboutira à la Sainte Anne du Louvre : il témoigne de la recherche du meilleur schéma de composition pour ce tableau[41]. Outre le carton, il existe trois dessins de composition et treize études de détail conservés à travers le monde[15]. Ce projet d'une « sainte Anne Trinitaire » semble prendre corps vers 1499-1500, un second carton (le carton dit « de Fra Pietro ») est créé au printemps 1501 puis rapidement abandonné
Pour autant, cette période du tournant du siècle est marquée chez le peintre par un certain rejet de son art, malgré ce que ses travaux pour une « Sainte Anne trinitaire » et La Madone aux fuseaux pourraient laisser entendre : un envoyé d'Isabelle d'Este auprès de Léonard de Vinci, Fra Pietro da Novallara, constate même combien « il est excédé par le pinceau car il travaille ardemment à la géométrie »[40]. Dépassant toutefois cette aversion, il montre une réelle motivation pour cette représentation d'une sainte Anne : Florence vers laquelle il se dirige voit en effet se développer le culte rendu à sa sainte protectrice[21], notamment depuis que ses habitants ont chassé les Médicis et qu'elle est devenue une République, en 1494[36] ; le thème constitue par ailleurs un profond sujet d'intérêt personnel du peintre[19].
Datation
La datation du Carton de Burlington House constitue une des questions les plus âprement discutées au sein de la communauté scientifique sur une œuvre de Léonard de Vinci. Pourtant jusqu'en 1950, une datation aux environs des années 1499-1500 faisait l'objet d'un large consensus
L'hypothèse d'une création entre 1499 et 1501
Cette datation est réaffirmée en 1971 en réaction aux écrits de Carlo Pedretti par Jack Wasserman, pour qui Léonard de Vinci crée le carton lorsqu'il se trouve à Milan avant 1500 ou juste après, à Florence, en 1501[47]. En 2000, Frank Zöllner l'estime avec circonspection à « 1499 »[9]. Le musée propriétaire de l'œuvre, la National Gallery, propose sur le cartel de son site la fourchette « vers 1499-1500 »[8]. Vincent Delieuvin et Louis Frank donnent avec constance « vers 1500 » dans tous leurs écrits[4] - [34]. De leur côté, Claudia Echinger-Maurach en 1996 puis Pietro C. Marani en 1999 se rejoignent sur une datation entre 1500 et 1501[48] - [49].
Selon cette hypothèse, le carton lance le processus de création dont le tableau Sainte Anne, la Vierge et l'Enfant Jésus jouant avec un agneau est l'aboutissement[15] : en premier lieu, Léonard de Vinci reçoit commande vers 1499-1500 par un commanditaire indéterminé d'une Sainte Anne
Michel-Ange, Vierge à l'Enfant avec sainte Anne, 1501-1502, Oxford, Ashmolean Museum, no inv. WA1846.37. Léonard de Vinci, Étude pour la Madone au fuseau, v.1500, château de Windsor, Royal Collection). La muse Thalie, une des statues des Muses visibles à l'époque de Léonard dans la villa d'Hadrien de Tivoli (sculpteur anonyme, 130-150 ap. J.-C., Madrid, musée du Prado, no inv. E-38).
Historiquement, la première indication qui a permis cette datation est un courrier de 1696 adressé au biographe Giovanni Pietro Bellori par le père Sebastiano Resta, un collectionneur d'art. Il y évoque un carton inachevé représentant « une Vierge à l'Enfant avec une sainte Anne » que Léonard aurait créé à Milan en 1499 pour Louis XII, roi de France[47]. Dans son argumentaire, Jack Wasserman s'appuie quant à lui principalement sur le dessin d'une Sainte Anne de Michel-Ange conservé à Oxford qu'il date de 1501-1502 (mais qu'Arthur E. Popham et Philip Pouncey datent de 1505) : il apparaît en effet que Michel-Ange se serait inspiré de la composition du Carton de Burlington House pour créer ce dessin[47] - [N 7]. Par ailleurs, il procède à une comparaison avec une étude pour La Madone aux fuseaux, stylistiquement très proche et datée de 1500[27], conclusion que Claudia Echinger-Maurach réaffirme en 1996[48]. De même fait-il appel à la tête de la Vierge pour L'Adoration des mages et à celle pour La Vierge aux rochers, datant de la décennie 1490[52]. De son côté, Pietro C. Marani rapproche le carton des sculptures antiques des Muses alors à la Villa d'Hadrien (en italien : Villa Adriana), à Tivoli près de Rome (et aujourd’hui au musée du Prado), que le peintre aurait pu étudier au printemps 1501
Néanmoins, répondent les tenants de la seconde hypothèse, aucun élément n'indique avec certitude que Léonard de Vinci ait pu étudier les sculptures de Tivoli en 1501
L'hypothèse d'une datation tardive après 1506
La première remise en cause de la datation traditionnelle émane d'Arthur E. Popham et Philip Pouncey sans toutefois franchement s'en séparer. Ainsi proposent-ils de situer l'exécution du Carton de Burlington entre 1501 et 1505[45]. Par la suite, Carlo Pedretti est plus catégorique puisqu'il la repousse « vers 1508-1510 »[7]. De leur côté, en 1981, Martin Kemp et Ernst Gombrich écrivent à son propos : « Le style du Carton de Burlington House montre qu’il ne saurait être antérieur à 1507, malgré les efforts considérables prodigués pour le situer en 1499 » et ils proposent la période 1506-1508[56]. Se rangeant à cette hypothèse, les chercheurs de la National Gallery sont les plus précis en suggérant « l'hiver 1507-1508 »[6] - [N 8]. Alessandro Vezzosi annonce « vers 1507 »[57] quand, dans la lignée de Carlo Pedretti, Sarah Taglialagamba propose la fourchette « entre 1506 et 1513 »[7].
Selon cette hypothèse, la création du tableau Sainte Anne, la Vierge et l'Enfant Jésus jouant avec un agneau demeure un aboutissement mais — proposition tout à fait minoritaire — pourrait tout aussi bien être réalisé en parallèle avec lui pour un autre tableau[58]. Vers 1500, Léonard reçoit commande d'une Sainte Anne par un commanditaire non identifié. Il élabore alors un premier carton d'une sainte Anne avec un agneau (celui aux personnages tournés vers la gauche), très proche du tableau du Louvre, exposé en à Florence et décrit par Fra Pietro da Novellara[58]. Puis, désirant explorer d'autres possibilités, il élabore (en tant que « subtil développement » de celui décrit en 1501[59]) quelque part entre 1501 et 1509 (voire entre 1506 et 1513[7]) un second carton dans lequel il élimine l'agneau en faveur du petit Jean-Baptiste : il s'agit du Carton de Burlington House[56]. Mais, insatisfait, il abandonne la composition de celui-ci au profit de la première idée, mise en peinture à partir de 1508-1510 jusqu'en 1519[6].
Léonard de Vinci, Étude de composition pour la Sainte Anne, v.1500 ou v.1505-1508, Londres, British Museum, n° inv. 1875,0612.17r. Léonard de Vinci, Études de mécanique, croquis pour la Bataille d'Anghiari et pour l'Ange de l’Annonciation, v.1503-1504, château de Windsor, The Royal Collection, Royal Library, no inv. RL 12328. Léonard de Vinci, folio 165r du Codex Arundel, 1480-1518, British Library.
Comme pour la première théorie, les tenants de cette hypothèse s'appuient sur des analyses stylistiques. Ainsi, un des principaux arguments d'Arthur E. Popham et Philip Pouncey porte sur l'Étude de composition pour la Sainte Anne, un dessin préparatoire au carton de Londres, conservé au British Museum sous la référence 1875,0612.17r[60] : ils utilisent les dessins techniques de roues qui y sont portés. Or, retrouvant des dessins techniques similaires sur les Études de mécanique, croquis pour la Bataille d'Anghiari et pour l'Ange de l'Annoniciation (RL 12328) qu'ils datent vers 1505 en raison de la présence de croquis liés à la Bataille d’Anghiari, ils repoussent la création du carton vers cette période. Ils procèdent au même travail d'analogie avec le folio 165r du Codex Arundel conservé au British Museum et qu'ils datent également de cette période[45]. De son côté, Carlo Pedretti, repoussant ce dernier dessin vers 1508-1509, en décale mécaniquement la datation du Carton de Burlington House[61]. En 1989, Martin Kemp et Ernst Gombrich confirment cette datation par comparaison avec ces mêmes dessins et affirment que les études hydrauliques que le carton comporte sont liées à d'autres faites par Léonard dans la période 1506-1508[56]. Enfin, utilisant un argument identique aux tenants de l'autre théorie, Carlo Pedretti confirme la source d'inspiration de statues : il évoque celles représentant des matrones romaines assises conservées à cette époque au palais Madame à Rome[31].
Néanmoins, l'hypothèse souffre d'un certain nombre de faiblesses, au premier rang desquelles la datation trop tardive de certains documents que ses tenants entendent utiliser, comme le dessin conservé au British Museum (inv.1875,0612.17r)[N 9] ou le dessin de Michel-Ange
Conclusion partielle
Le débat demeure donc en suspens. La difficulté à trancher conduit ainsi certains auteurs à proposer une datation très large, comme Peter Hohenstatt qui donne « vers 1503-1510 »[35] ou au moins à poser ouvertement la question, tel Frank Zöllner qui, en 2017, indique « 1499-1500 ou vers 1508 (?) »
Les différences de vues entre chercheurs viennent du fait que l'ensemble des arguments sont presque exclusivement stylistiques, ce qui complique l'établissement d'une datation définitive
Commanditaire
Faute de documents et comme pour la datation de l'œuvre, son commanditaire est inconnu et les historiens de l'art en sont réduits à forger des hypothèses pour en connaître l'identité[19].
Une des hypothèses les plus anciennement retenues est la commande par les moines servites de Florence chez qui le peintre est hébergé en [63]. En effet, d'après Giorgio Vasari, biographe de Léonard, celui-ci reçoit effectivement une commande d'un retable représentant une Annonciation et destiné à décorer le maître-autel de l'église de la Santissima Annunziata[18]. De fait, Vasari décrit combien les Florentins sont impressionnés lorsque Léonard de Vinci expose ce tableau montrant « la Vierge à l'enfant avec sainte Anne et saint Jean-Baptiste - et un agneau »[64]. Néanmoins, Vasari n'indique pas si cette exposition est d'opportunité ou si elle correspond à une commande des Frères[18]. Cette hypothèse achoppe par ailleurs sur le fait que le carton que Vasari décrit ne correspond pas à celui de Burlington House, puisqu'il comporte un agneau et non pas saint Jean-Baptiste ; de plus, les dimensions du carton ne correspondent pas du tout à celles du tableau réceptionné par la suite et qui s'avère finalement « deux fois plus haut que celui de Léonard »[15].
Une seconde hypothèse avance que le tableau aurait été commandé par le roi de France Louis XII en honneur de son épouse, Anne de Bretagne. Elle est considérée comme l'hypothèse « la plus convaincante » pour Frank Zöllner
Troisième hypothèse explorée par les chercheurs, le carton résulterait d'une commande institutionnelle émanant de la République de Florence[19]. Cette possibilité est évoquée par la National Gallery au motif que sainte Anne est la protectrice de Florence depuis que ses habitants ont chassé Gautier VI de Brienne au milieu du XIVe siècle[64]. Néanmoins, cette hypothèse peine à convaincre parce que les archives ne portent pas trace d'une telle commande, ce qui est étonnant de la part de l'administration d'une telle ville ; de plus, ici aussi, les dimensions du carton ne correspondent pas aux salles dans lesquelles il est susceptible d'avoir été exposé[15].
Enfin, certains chercheurs suggèrent que le Carton de Burlington House correspondrait à une initiative personnelle du peintre afin, par exemple, de marquer son retour dans sa ville natale[19].
Cheminement de l'Ĺ“uvre
Hormis quelques lacunes aux XVIe siècle et XVIIe siècle, le cheminement de l'œuvre est bien documenté
Le carton Sainte Anne, la Vierge, l'Enfant Jésus et saint Jean-Baptiste enfant restera conservé jusqu'au premier quart du XVIIIe siècle dans la ville de Milan. Il appartient d'abord au peintre, ami et héritier de Léonard de Vinci Bernardino Luini qui, à cette occasion, reprend sur toile la composition du maître[25]. C'est son fils Aurelio Luini (v. 1530 - v. 1592) qui en hérite et le garde jusqu'en 1584. Il passe ensuite dans la collection du sculpteur et un médailleur italien Pompeo Leoni (1530 - 1608). Il est acheté en 1639 par le comte Galeazzo Arconati (1580 - 1649), propriétaire peu de temps auparavant du Codex Atlanticus, du Codex Trivulzianus ou du Codex sur le vol des oiseaux. C'est dans cette collection que le père oratorien Sebastiano Resta (1635-1714), amateur et grand collectionneur de dessins, témoigne l'avoir vu dans un courrier de la toute fin du XVIIe siècle adressé à Pietro Bellori. Il reste dans la famille Arconati jusqu'à 1720. En 1721, il gagne la famille Casnedi durant 5 ans. En 1726, il est acquis par le général vénitien Zaccaria Sagredo (1653-1729) qui le conserve, puis à sa suite, ses héritiers, à Venise jusqu'en 1762. Quittant l'Italie à Noël 1763[69], il est acquis par les Britanniques Robert Udny (1725 - 1802) et son frère John (1727-1800) qui l'amènent à Londres. En 1799, il passe dans les collections de la Royal Academy of Arts à Burlington House, dont il tient son nom et où il demeure jusqu'en 1962. À cette date, le Carton de Burlington House est acquis par la National Gallery pour 800 000 livres sterling grâce à une subvention spéciale et à des contributions du fonds d'art Pilgrim Trust[34] -
État de conservation et restaurations
- Papier de réparation comblant des déchirures.
- (Pointillés) Zones possibles de renfort avec papier.
- Perte de matière.
- Impact de la chevrotine (point) et sa zone de diffusion (cercles concentriques).
Le Carton de Burlington House a bénéficié de plusieurs restaurations au cours de son existence : en 1791, en 1826, en 1962 et entre 1987 et 1988
L'analyse scientifique et la documentation disponible indiquent qu'il a fait l'objet de grossières réparations avant la fin du XVIIe siècle[N 10] : en effet, il présente des tentatives de rapiéçage sur des déchirures et le fait qu'elles aient été réalisées avec des papiers différents pourrait indiquer qu'elles ont pu être conduites à des époques distinctes[71]. Par ailleurs, le carton a subi une opération de collage sur toile avant son transfert en Angleterre au cours du XVIIIe siècle, certainement dans le but de lui permettre d'endurer un voyage de longue distance. Deux dates sont retenues par les chercheurs pour cette opération : soit avant , lors de son passage à la collection Sagredo à Venise ; soit avant noël 1763, avant son transfert en Angleterre[69]. La présence d'un tampon au verso de la toile indique que le travail n'a pas été fait après son arrivée à Londres[69]. L'opération a été conduite de manière extrêmement maladroite : en effet, la colle a été appliquée sans hydratation préalable du papier — étape pourtant nécessaire pour préserver un papier aussi sec —, ce qui a provoqué des cloques à sa surface[72]. Par ailleurs celui-ci, en séchant, s'est brutalement rétracté : lors des tentatives pour l'aplanir, une grande partie du bord gauche a été arrachée puis grossièrement remise en place[71]. De fait, les cloques et les rides résultant de ses opérations demeurent toujours visibles en lumière rasante[73].
Arrivé à Londres, le carton bénéficie à partir de 1763 d'une restauration plus scientifique par des retouches sur le dessin, à la craie, au fusain, au blanc de plomb et à l'aquarelle. Puis deux séquences de restaurations ont lieu peu de temps après, en 1791 et en 1826, à la Royal Academy, où il bénéficie de nouvelles retouches par l'utilisation de pigments nouvellement créés[71].
Une nouvelle restauration, qualifiée de « mineure », a lieu en 1962 à l'occasion de l'acquisition du carton par la National Gallery[71]. Les experts réalisent lors de leurs analyses préalables qu'il est sensible à l'humidité, à la lumière et à la pollution. En outre, il apparaît que son papier souffre en son sein d'une acidité due tout à la fois à la pollution atmosphérique, au vieillissement naturel, à la colle et à la toile sur laquelle il est fixé : dès lors il est devenu cassant, très difficilement manipulable, et le dessin qu'il supporte souffre d'une légère décoloration. Il est donc décidé de le préserver en le plaçant dans une vitrine hermétique, au verre traité contre les ultraviolets et ventilée par un système de climatisation[74].
Le , le carton est touché par un tir de chevrotine commis par un ancien soldat au chômage
Dans un premier temps, sous la direction du restaurateur Eric Harding du British Museum[74], il est procédé à un retrait des débris de verre à l'aide d'une lumière à fibre optique et de minuscules pinces à succion[72]. Il est ensuite possible d'aplanir la surface déformée par le choc de l'explosion de la vitre grâce à un système d'aspiration sous vide couplé à un humidificateur ultrasonique[76]. Puis les restaurateurs retirent le châssis qui maintenait la toile sous tension : son bois était en effet trop vieux et fragile ; de plus, les clous qui tendaient la toile abîmaient le papier (déchirures, tensions et corrosion qui se reportaient sur le papier). L'opération permet en outre de faire apparaître des parties de dessin situés sur les bords extérieurs du cadre[77]. Après ce retrait, la question est de savoir si le papier doit être séparé de la toile sur laquelle il a été collé afin, notamment, de lui faire perdre de cette acidité. Mais son âge et l'attentat qu'il a subi l'ont rendu fragile : les experts estiment que « la probabilité de changements incontrôlables et irréversibles de l'apparence du carton l'emportait sur le gain qui aurait résulté de la baisse d'acidité »[78]. De plus ils confirment ce que leurs prédécesseurs avaient énoncé en 1962, à savoir que le carton ne pourrait être séparé de la toile, les deux « devant être considérés comme un seul[71] ». Finalement, le dessin est fixé sur une doublure totale faite de lin et de papier de chiffon susceptible d'absorber son acidité[79]. En fin d'opération, la partie de dessin détériorée est reconstituée à l'aide d'une combinaison de craie et de charbon de bois[80].
Selon les experts qui examinent le Carton de Burlington House lors de son acquisition en , « dans l'ensemble, l'état de conservation du carton [peut] être qualifié de bon, compte tenu de sa taille et des vicissitudes qu'il avait subies en plus de quatre siècles et demi »[81]. Autre élément positif, s'ils ne l'ont pas réduite, le travail de restauration et les conditions modernes de conservation ont tout de même permis une stabilisation de l'acidité qui rongeait le papier[74]. Toutefois, au fil du temps, celui-ci s'est assombri et décoloré, et le fusain d'origine s'est estompé, ne restituant plus tout à fait le dessin tel que le spectateur pouvait le voir au moment de sa création[71].
Création
Études et sources d'inspiration
La muse Clio, une des statues des Muses visibles à l'époque de Léonard dans la villa d'Hadrien de Tivoli (sculpteur anonyme, -, Madrid, musée du Prado, no inv. E-68). La pose de la Vierge à l'Enfant et la composition de cette conversation sacrée peuvent avoir inspiré le peintre (artiste anonyme, Pala Sforzesca ou Madonna con il Bambino, i dottori della Chiesa e la famiglia di Ludovico il Moro, 1494-1495, Milan, Pinacothèque de Brera).
Quels que soient leurs désaccords sur une datation de l'œuvre, les chercheurs s'accordent sur la connaissance approfondie de la statuaire antique qu'elle révèle et considèrent donc que cette dernière constitue une importante source d'inspiration pour le maître[25] - [31]. D'aucuns y voient l'influence des statues de muses de la villa d'Hadrien à Tivoli, que le peintre aurait pu étudier au printemps 1501
L'Adoration des mages (détail), v.1481, Florence, musée des Offices, no inv. 1594. La Vierge aux rochers (détail), 1483-1486, Paris, musée du Louvre, no inv. 777.
Par ailleurs, le Carton de Burlington House réemploie de précédents choix de compositions pour parfaire un geste, une attitude, ou signifier un sentiment. Ainsi le geste de bénédiction de Jésus est identique, quoiqu'en miroir, à celui que fait l'Enfant Jésus, toujours en direction de Jean-Baptiste, dans La Vierge aux rochers (1483-1486). De même, la représentation de l'index de sainte Anne pointé vers le ciel rappelle un mouvement déjà présent dans l'Adoration des mages (vers 1481)chap.
Léonard de Vinci, Étude de composition pour la Sainte Anne, v.1500 ou v.1505-1508, Londres, British Museum, n° inv. 1875,0612.17r. Verso de l'Étude de composition pour la Sainte Anne confirmant la composition et les personnages portés sur le dessin de l'autre côté de la feuille (no inv. 1875,0612.17v).
Enfin des études préparatoires au carton ont été identifiées par les chercheurs, en particulier une Étude de composition pour la Sainte Anne datée des alentours de 1500 et conservée au British Museum de Londres (inv. 1875.612.17r.). Concernant le plus grand dessin, placé au centre, une analyse du verso de la feuille visant à démêler les traits enchevêtrés confirme que la forme de droite correspond à un enfant et le rattache donc bien au carton[60] ; en outre le peintre y a tracé les contours approximatifs d'un cadre[29] ainsi que des picots dont l'écartement permet, par calcul de proportionnalité, de connaître la dimension de la base de l'œuvre projetée, soit entre 108 cm et 116 cm, ce qui coïncide à peu près avec celle du carton[85]. Dans un mouvement de crayon libre et créatif[N 11], le peintre y propose déjà la composition qui se retrouve dans le Carton de Burlington House[86] : toutefois, encore en recherche, il y présente la jambe gauche de la Vierge dans deux positions différentes. De nombreux détails se retrouvent déjà , notamment les coiffures des deux femmes. Quant aux petits dessins situés sous le plus grand, le maître se concentre sur les interactions entre deux personnages, tout en explorant des solutions alternatives : d'une part, en ne représentant que la Vierge et sainte Anne, les postures de femmes ; d'autre part les mouvements du Christ et son implication sur l'équilibre de la Vierge[85].
Processus de création
Le pied droit de la Vierge à peine esquissé. Hachures sur l'avant-bras gauche de sainte Anne pour le modelage.
Léonard de Vinci choisit de travailler sur un papier blanc crème sur lequel il crée par frottage[N 12] une couche de préparation constituée d'un mélange d'oxyde de fer rouge-brun, de noir de carbone et de sulfate de calcium[87].
Puis le maître exécute au fusain un premier dessin qui constituera la base de son œuvre dans un style libre[88] et assuré, en créant le contour de ses personnages. Les parties demeurées inachevées, comme la main au doigt pointé de sainte Anne, sont un bon moyen d'observer ce travail[10]. Ceci achevé, il en dessine les détails à l'aide de graphite qui pourrait être de la pierre noire mais sans certitude — en tout cas, la matière est plus dure que le fusain qui laisse un trait plus grossier : les zones concernées les plus notables sont les cheveux des deux enfants et le col de la robe de la Vierge[88]. Le modelage par ombrage est d'abord réalisé par des hachures, visibles sur le bras de sainte Anne ou sa jambe droite. Puis un travail d'estompage de la matière achève ces effets de clair-obscur et est complété par des rehauts de blancs[10] particulièrement visibles sur les visages et le haut des bustes des personnages et les drapés (notamment la manche de la Vierge et les robes des deux femmes)[64]. Le peintre aurait à cet effet utilisé un bâton de gypse et une craie de tailleur[89].
Enfin, le paysage environnant n'est dessiné qu'à la suite de la création des personnages comme l'atteste le fait qu'il n'est pas représenté au niveau du pied droit, inachevé, de la Vierge[10].
Analyse
Sfumato et non finito, deux caractéristiques de l'art léonardien
Le peintre s'intéresse dans un premier temps au rendu du volume grâce à un travail de clair-obscur, par l'estompe du noir du graphique et par des rehauts de blancs[10] - [64]. Poursuivant sa recherche d'illusion, il adoucit les lignes constituant le contour des formes puis fond ombres et lumière afin de créer un effet de sfumato, technique tout à fait caractéristique de son travail[N 13] - [64]. La technique varie selon les objets représentés : ainsi, selon Sarah Taglialagamba, « le sfumato se fait doux et délicat sur les visages et au contraire âpre et tranchant sur les concrétions rocheuses ». Quoi qu'il en soit, le procédé participe du dynamisme de la scène à travers celui donné au personnages[91].
Par ailleurs, le peintre a laissé le carton inachevé — certes selon un degré très inégal selon les zones considérées : alors que les visages des protagonistes sont terminés, les pieds des deux femmes, la main gauche de sainte Anne ou le paysage environnant demeurent à l'état d'ébaucheschap.
Composition
La composition du Carton de Burlington House est décrite par la majorité des chercheurs comme « horizontalechap.
Par ailleurs, la composition se construit sur de forts contrastes entre stabilité et mouvement. L'élément fondamental de fixité du groupe est la figure de sainte Anne dont la présence sereine « régit la scène »[91] : elle est le véritable pivot autour duquel les autres personnages tournent de façon « presque indépendante »[4]. Du côté de la dynamique, la composition de Sainte Anne, la Vierge, l’Enfant Jésus et saint Jean-Baptiste enfant est le lieu d'un complexe jeu interne de mouvements qui passe par les postures et la gestuelle des personnages[95]. Les deux du centre — la Vierge Marie et l'Enfant Jésus, décrits par Vincent Delieuvin comme « des figures serpentines tridimensionnelles »[4] — présentent ainsi chacun un fort mouvement de torsion qui implique le corps entier : le petit Jésus qui se retourne sur les genoux de sa mère pour bénir son cousin à l'opposé ; ou la vierge dont les pieds et les genoux d'une part et le haut du buste et la tête d'autre part sont orientés dans deux directions très divergentes. Une telle gestuelle se rencontre déjà avec les mêmes personnages dans L'Adoration des mages[95]. Ces mouvements sont soulignés par de fortes diagonales qui se croisent[91], induites notamment par les regards — celui de Marie sur son fils et celui de Jésus sur saint Jean-Baptiste[95]. De fait, en fonction de ces éléments, chacun tient son rôle : la stabilité se fait à travers la figure de sainte Anne tandis que le petit Jésus constitue un véritable lien vivant entre les différentes figures, insufflant la vie au tableau par son dynamisme[91].
Qu'elles soient statiques ou dynamiques, les forces mises en jeu se déploient selon un équilibre subtil emprunté à l'art de la sculpture, conférant à ses personnages une posture « ferme et monumentale »[91]. Cela apparaît ainsi dans le contrapposto des jambes et des hanches de la Vierge, lui offrant à la fois équilibre et dynamisme[91] — impression amplifiée par le mouvement des drapés[95]. De même, Léonard de Vinci construit l'œuvre selon la « loi mécanique de l’équilibre statique : un corps non assujetti à des forces qui en modifient les conditions de tranquillité tend à retrouver, après avoir été perturbé, sa position initiale »[66].
L'Ĺ“uvre d'un observateur de la nature
- Poids (poids de JĂ©sus).
- DĂ©placement de JĂ©sus.
- Pivot.
- Contrepoids (poids des jambes de Marie).
- DĂ©placement des jambes de Marie.
Même s'il comporte de rares erreurs de proportion, comme la main à l'index dressé qui paraît trop grande par rapport au reste du corps de sainte Anne[35], le Carton de Burlington House témoigne d'une grande connaissance de l'anatomie humaine. En effet, le peintre l'a étudiée au cours de sa vie, notamment en disséquant des cadavres[97]. Cette connaissance constitue ainsi une part intégrante de sa production artistique au même titre que l'étude des paysages ou des animaux[64] : dans Sainte Anne, la Vierge, l’Enfant Jésus et saint Jean-Baptiste enfant, mouvement des articulations et tonus musculaire se lisent sur chaque partie des corps des protagonistes[97].
L'œuvre atteste également que le peintre a étudié les principes physiques inhérents à la gravité qui entrent en jeu sur tout corps, qu'il soit immobile ou en mouvement[66]. Cette connaissance alliée à celle de l'anatomie humaine permet en premier lieu à Léonard de Vinci de rendre avec fidélité l'action qu'ont sur les muscles les lois du mouvement comme cela se voit sur le petit Jésus qui se retourne pour bénir saint Jean-Baptiste[97]. D'autre part, le peintre met en œuvre sa connaissance de la statique humaine selon laquelle à chaque mouvement du corps correspond un contre-mouvement afin que celui-ci puisse conserver son équilibre : c'est ce qui intervient lorsque la Vierge, assise sur le genou de sa mère, fait dynamiquement contrepoids avec son corps alors qu'elle tente de retenir son fils qui se dérobe dans un sens opposé[97] - [66]. Finalement, toutes les recherches, les études et observations scientifiques du peintre sont réinvesties dans le Carton de Burlington House : « La mise en scène théâtrale de ses sujets, qui souligne l'action, l'attitude et le geste, et aboutit à une disposition harmonieuse des figures dans l'espace, s'enrichit désormais d'une compréhension approfondie de l'interaction entre le mouvement, le centre de gravité et l'équilibre du corps humain »[97].
Les moti mentali
Dans chacune de ses œuvres, Léonard de Vinci accorde une importance fondamentale à traduire ce qu'il nomme les « mouvements de l'esprit » (en italien : moti mentali) des figures qu'il met en scène[64] - [N 14], que ce soit dans des œuvres profanes ou sacrées[25] — on trouve trace de ses réflexions à ce sujet dans ses manuscrits[98].
Selon Peter Hohenstatt, dans le Carton de Burlington House, « la justesse des mouvements, le naturel des attitudes et l'expression des sentiments de chaque personnage font de ce thème en vérité abstrait une narration picturale très vivante »[99]. De fait, chaque personnage fait l'objet de sentiments d'autant plus délicats qu'ils sont ambigus, comme, notamment, la Vierge prise entre son instinct maternel qui la pousse à vouloir arracher son fils à son destin et son acceptation de le voir partir. Or c'est cette ambiguïté qui a suscité nombre d'interprétations divergentes[25].
L'intensité du regard des personnages constitue le premier moyen utilisé par le peintre pour communiquer ces mouvements de l'âme : c'est celui, ambigu, de la Vierge sur son fils[17] ; ou celui, fixe, de sainte Anne, rendu profond par l'ombre dans laquelle ses yeux sont plongés et qui se porte avec une douceur encourageante sur Marie[64].
dans les Ĺ“uvres de LĂ©onard de Vinci.
L'ange Uriel de La Vierge aux rochers (détail, 1483-1486, Paris, musée du Louvre, no inv.777). La Joconde, 1503-1506 ou 1513-1516, musée du Louvre, no inv. 779. Saint Jean-Baptiste, 1513-1516, musée du Louvre, no inv. 775.
Le travail sur rendu de la physionomie et des traits du visage constitue le second procédé utilisé par Léonard de Vinci. Ainsi, le visage presque ingénu de la Vierge vient contraster avec la résolution portée par celui de son fils[35]. De surcroît, cette expression du visage peut introduire une certaine ambiguïté, comme le léger sourire d'Anne, qui, modulant l'aspect réconfortant de son regard, attribue à ses pensées, selon plusieurs observateurs, une part d'ironie qui peut déconcerter le spectateur[25] : le destin du Christ le conduit certes à la mort mais sa mère doit l'accepter[15].
Enfin, l'attitude, la gestuelle et la posture composent un troisième niveau de restitution des sentiments des personnages : c'est le mouvement dynamique, volontaire et résolu de Jésus qui se détourne de sa mère pour faire face à son cousin, métaphore de son destin[99] ; c'est aussi l'index pointé de sainte Anne qui en appelle au Ciel[35]. Finalement, « l'interaction, le rythme et la vie émanant de la succession des mouvements effectués par les personnages du Carton de la Burlington House, donnent à voir une harmonie naturelle qui reflète la dynamique des états d'âme de chacun d'entre eux, et fait de ce carton l'un des chefs-d'œuvre de la Renaissance[97]. »
Postérité
Les raisons d'un abandon
L'ensemble de la communauté scientifique s'accorde : le carton Sainte Anne, la Vierge, l’Enfant Jésus et saint Jean-Baptiste enfant ne se traduit pas en un tableau autographe et seules des versions d'atelier en ont été tirées[100] - [35]. En effet, comme le prouve son étude scientifique conduite lors de sa restauration après l'attentat de 1987, il ne présente aucune trace de transfert[35] : ni perforations ni encoches sur les contours du dessin et encore moins de trace de poudre de transfert[64] ; de même, aucun document n'a jamais été retrouvé indiquant un tel projet de report
Ce constat posé, les chercheurs ne parviennent néanmoins toujours pas à savoir pourquoi le peintre avait abandonné ainsi cette composition en faveur de celle portée sur le tableau du Louvre[66]. Vincent Delieuvin considère qu'elle constitue une œuvre tout à fait inhabituelle et profondément expérimentale dans la production du peintre[4] : une composition horizontale[83] qui renouvelle en partie l'iconographie de la Sainte Anne trinitaire, notamment lorsqu'il fait s'asseoir Marie à moitié sur le genou d'Anne[4] - [83]. De son côté, Frank Zöllner pointe dans le carton un « net manque de cohésion des figures en termes de composition » : constatant lui-même un écart, de ce point de vue, avec ses précédentes œuvres, Léonard de Vinci aurait abandonné ce projetchap.
Cette explication est très proche de celle donnée par Daniel Arasse selon qui le peintre aurait dû abandonner une composition « inaboutie » parce que « les deux figures féminines ne sont pas clairement articulées » et que « sainte Anne occupe [seulement] une place très secondaire plastiquement »[102]. De façon assez opposée, pour Renaud Temperini, le Carton de Burlington House est remarquable par le classicisme qui s'en dégage et, en tant que tel, ne peut satisfaire au caractère résolument novateur du maître : « Il s'agit indéniablement d’une des œuvres les plus classicisantes de Léonard, ce qui explique peut-être qu'il ait fini par l’abandonner, car il est rare de rencontrer chez lui une scène d’une telle sérénité, d’un tel équilibre »[25]. Enfin Sarah Taglialagamba suit volontiers une explication psychologisante dans la lignée de celle de Sigmund Freud et de son Souvenir d'enfance de Léonard de Vinci : peut-être aurait-il abandonné cette composition pour en élaborer une « moins simple », recherchant inconsciemment une correspondance avec son moi intime[66]. En effet, selon le fondateur de la psychanalyse, le peintre aurait cherché dans le thème de la « sainte Anne » à retrouver la figure de sa grand-mère, qui aurait joué dans son enfance le rôle maternel[103]. Or, l'intérêt de la comparaison du carton avec le tableau tient, selon Freud, au passage d'une « fusion quasi-onirique des deux femmes » à une séparation des deux, effectuée « en détachant la tête et le haut du corps de Marie de la figure maternelle et penchant Marie en avant », ce qui permet de dévoiler tout à fait la figure recherchée[104].
Copies et réutilisations
Bernardino Luini, La Sainte Famille, 1520-1530, Milan, pinacothèque Ambrosienne. Artiste anonyme, copie du carton, XVIe siècle, Suisse, coll. privée.
Si Léonard de Vinci n'a réalisé aucun tableau à partir de son carton, son élève Bernardino Luini (v.1481 - 1532), qui en hérite à sa mort, le met en peinture entre 1520 et 1530[105] - [25]. Or ce travail est à l'origine d'un questionnement sur les intentions du maître, car Luini a ajouté à la composition la figure de Joseph à gauche de sainte Anne et il n'est pas exclu que Léonard de Vinci ait imaginé en faire autantchap.
Néanmoins, la composition dans sa globalité n'obtient pas un grand succès auprès des suiveurs du peintre et, mise à part la version de Bernardino Luini, peu d'œuvres peintes en ont été tirées
RĂ©utilisation de plantes aquatiques dans LĂ©da et le Cygne par Cesare da Sesto (1505-1510, Wilton House). L'inclinaison de la tĂŞte et le sourire de la Vierge ont inspirĂ© Francesco Melzi pour crĂ©er sa Flore (v.1520, Saint-PĂ©tersbourg, musĂ©e de l'Ermitage, no inv. Đ“Đ-107). La nymphe Pomone adopte une pose identique Ă la Vierge du carton dans Vertumne et Pomone par Francesco Melzi (v.1518-1522, Berlin, Gemäldegalerie, no inv. 222). Dans La Vierge Ă l'Enfant avec les saints Ambroise, Paul et Georges, c'est tout le groupe formĂ© de la Vierge et de l'Enfant que Fernando de Llanos reprend (v.1515-1520, Gemäldegalerie).
Certes le carton est finalement abandonné par le maître mais il constitue bien un premier projet pour une sainte Anne qui aboutira au tableau du Louvre[17] : ainsi il en reprend certains des éléments comme autant de résultats de recherches, tels les cours d'eau évoqués près de l'épaule de la Vierge ou encore le sol rocheux recouvert d'eau à ses pieds[10].
Malgré le manque de succès de la composition entière, ses éléments constitutifs font l'objet d'une certaine reconnaissance de la part de ses suiveurs. Fait intéressant, l'ensemble de ces utilisations confirment la présence du carton à Milan au début du XVIe siècle
Une variation de la composition du carton dans La Sainte Famille par Raphaël (achevé par Giulio Romano, v.1518, Madrid, musée du Prado, no inv. P000301). Le groupe sainte Anne, la Vierge et Jésus inspire Francesco da Sangallo pour créer sa Vergine con Bambino e Sant'Anna (v.1526, Florence, église d'Orsanmichele).
De plus, la composition fait l'objet de variations notables. Ainsi Frank Zöllner note que le tableau La Sainte Famille de Raphaël, achevé par son élève Giulio Romano, constitue une « intéressante variation » de la composition entière du carton
Image externe | |
Deux œuvres de Jenny Saville appartenant à la série Mothers (sur artsandfood.com). | |
Enfin, l'art contemporain n'ignore pas le Carton de Burlington House : ainsi l'artiste britannique Jenny Saville s'en inspire dans une série d'œuvres intitulée Mothers où elle se représente enceinte, tenant deux bébés se tortillant dans les bras, et dans laquelle elle interroge l'acceptation de l'éventualité de la mort de l'enfant dans la société moderne[108] - [109].
Notes et références
Notes
- Il s'agit de maximales car le bord du carton est très irrégulier : par exemple, le bord inférieur est fortement incurvé vers l'intérieur, ce qui réduit d'autant la hauteur de certaines parties de l'œuvre[3].
- Néanmoins, le fait que le joint central ne soit pas parallèle aux bords latéraux du cadre, mais oblique, constitue une difficulté pour une estimation précise(Harding et al. 1989, p. 9).
- Elle n'a donc pas été corrompue par cette faute initiale qui fait que tout être humain connaît depuis une tendance à commettre le mal. Selon la définition donnée par l'Église Catholique, il s'agit du « privilège selon lequel, en vertu d’une grâce exceptionnelle, la Vierge Marie est née préservée du péché originel. Le dogme de l’Immaculée conception a été proclamé par Pie IX en 1854. À ne pas confondre avec la conception virginale de Jésus par Marie. », selon la définition de Conférence des évêques de France, « Immaculée Conception », sur eglise.catholique.fr, (consulté le ).
- Une représentation strictement horizontale comportant les deux femmes qui encadrent l'Enfant mais sans interaction entre elles existe également dans l'Italie médiévale mais de façon très minoritaire et appartient plutôt à l'aire rhénane[23].
- Un envoyé d'Isabelle d'Este en témoigne ainsi : « son existence est si instable et si incertaine qu'on dirait qu'il vit au jour le jour »[40].
- Cette note a été découverte en 2005 dans la bibliothèque universitaire de Heidelberg et a permis de faire avancer la recherche. Dans la marge d'un ouvrage de Cicéron, Epistulae ad familiares, l'ambassadeur note : « Apelle, après avoir mis toute la perfection de son art à polir la tête et le haut du sein de Vénus, laissa le reste de son corps à l'état d'une ébauche. […] Ainsi fait Léonard de Vinci dans toutes ses peintures. Comme la Tête de Lisa del Giocondo, et celle d'Anne, mère de la Vierge. […]. 1503. 8bre. ». Cité par Louis Frank, « Terreur et modernité », dans Vincent Delieuvin (commissaire), Louis Frank (commissaire), Gilles Bastian, Jean-Louis Bellec, Roberto Bellucci, Thomas Calligaro, Myriam Eveno, Cecilia Frosinini, Éric Laval, Bruno Mottin, Laurent Pichon, Élisabeth Ravaud, Thomas Bohl, Benjamin Couilleaux, Barbara Jatta, Ludovic Laugier, Pietro C. Marani, Dominique Thiébaut, Stefania Tullio Cataldo et Inès Villela-Petit (préf. Brian Moynihan ; Xavier Salmon ; Sébastien Allard), Léonard de Vinci (catalogue de l’exposition au musée du Louvre, du au ), Paris-Vanves, Louvre éditions - Hazan, , 455 p., 30 cm (ISBN 978-2-7541-1123-2, OCLC 1129815512), p. 216-234, p. 224-225.
- Néanmoins, en faveur de l'affirmation de Jack Wasserman, la recherche contemporaine confirme la datation 1501-1502 pour la création par Michel-Ange de son dessin, comme le fait Thomas Pöpper dans[51].
- Il faut noter que ces avis datent de 1989. En 2020, le site de la National Gallery s'accorde bien avec l'hypothèse opposée (The National Gallery 2020, onglet "Key facts").
- Ainsi, ces dessins sont porteurs de traits caractéristiques de dessins du peintre des années 1490 (Zöllner 2017, Catalogue critique des peintures, XX, p. 394).
- Comme en témoigne le fait que les papiers de réparation sont collés sous le papier d'origine, donc avant l'opération de collage sur toile réalisée au cours XVIIIe siècle (Harding et al. 1989, p. 13).
- Martin Kemp parle même d'un « enchevêtrement de protagonistes fantomatiques » (« a tangle of ghostly protagonists ») (Kemp 2003, p. 151).
- Comme l'indique le fait que le pigment n'a pas pénétré les fibres du papier mais est simplement déposé à sa surface (Harding et al. 1989, p. 22).
- Le sfumato est une technique picturale que Léonard de Vinci théorise ainsi dans ses écrits : « Veille à ce que tes ombres et lumières se fondent sans traits ni lignes, comme une fumée[90]. »
- À ce sujet, il est possible de se reporter à la contribution de Michael W. Kwakkelstein dans Leonardo's writings and theory of art[98].
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- chap.
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- Harding et al. 1989, p. 13 et 17.
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- Harding et al. 1989, p. 18.
- Harding et al. 1989, p. 19.
- « The probability of uncontrollable and irreversible changes in the appearance of the Cartoon outweighed the gain which would have resulted from de-acidification » (Harding et al. 1989, p. 16)
- Harding et al. 1989, p. 20.
- Harding et al. 1989, p. 21.
- « On the whole the Cartoon's state of preservation could even be described as good, considering its size and the vicissitudes it had undergone in more than four and a half centuries. » (Harding et al. 1989, p. 13).
- « The flow of the draperies and the grand ample movement of the figures has the quality of Greek art at the moment of its highest development […] Leonardo wanted to recapture the smoothness and perfection of the Greek ideal and add the sense of inner life » (Clark et Gould 1962, p. 6).
- Delieuvin 2019, catalogue, p. 280.
- chap.
VII ._Retour_à _Florence_par_Mantoue_et_Venise_-_1500-1503-94" class="mw-reference-text">Zöllner 2017, chap. VII. Retour à Florence par Mantoue et Venise - 1500-1503, p. 215-220. - Bambach 2003, p. 525.
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- chap.
VII ._Retour_à _Florence_par_Mantoue_et_Venise_-_1500-1503-105" class="mw-reference-text">Zöllner 2017, chap. VII. Retour à Florence par Mantoue et Venise - 1500-1503, p. 220. - Varena Forcione et Hélène Grollemund, « Portrait d'Isabelle d'Este », sur louvre.fr (consulté le ).
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Annexes
Ouvrages
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- Frank Zöllner (trad. Jacqueline Kirchner), Léonard de Vinci, 1452-1519, Köln, Taschen, coll. « La petite collection », , 96 p., 23 cm (ISBN 978-3-8228-6179-0, OCLC 468107428), « Les années d'itinérance 1499-150361-72 ».
- Frank Zöllner, Léonard de Vinci, 1452-1519 : Tout l'œuvre peint, Köln, Taschen, coll. « Bibliotheca universalis », , 488 p., 19,5 × 14 cm (ISBN 978-3-8365-6296-6).
Articles
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- (en) Sheila Rule, « Restoring a Leonardo Drawing That Was Hit by a Shotgun Blast » [« Restauration d'un dessin de Léonard touché par un coup de fusil »], The New York Times, vol. 53, no 3,‎ (lire en ligne, consulté le ).
- (en) Jack Wasserman, « The Dating and Patronage of Leonardo's Burlington House Cartoon » [« La datation et le commanditaire du Burlington House cartoon de Léonard »], The Art Bulletin, vol. 53, no 3,‎ , p. 312–325.
Sites internet
- (en) leonardodavinci.net, « The Burlington House Cartoon - by Leonardo Da Vinci », sur leonardodavinci.net, (consulté le ).
- (en) The National Gallery, « The Burlington House Cartoon », sur nationalgallery.org.uk, (consulté le ).