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RĂ©duction directe

La réduction directe est, en sidérurgie, un ensemble de procédés d'obtention de fer à partir de minerai de fer, par réduction des oxydes de fer sans fusion du métal. Le produit obtenu est du minerai de fer préréduit.

Photo aĂ©rienne de l'usine de New Zealand Steel oĂč on distingue 4 tambours.
Complexe sidĂ©rurgique de New Zealand Steel, alimentĂ© par des fours rotatifs de rĂ©duction directe (procĂ©dĂ© SL/RN)[1] (capacitĂ© de 650 000 t/an[2]).

Historiquement, la réduction directe concerne l'obtention d'une loupe au bas fourneau. Ce procédé a été abandonné, au début du XXe siÚcle, au profit du haut fourneau qui produit du fer en deux étapes (par réduction-fusion donnant une fonte, puis par affinage dans un convertisseur).

Mais divers procédés ont été mis au point au cours du XXe siÚcle et, depuis les années 1970, l'obtention de minerai de fer préréduit a connu un développement industriel remarquable avec l'essor, notamment, du procédé Midrex. Conçus pour remplacer le haut fourneau, ces procédés ne se sont jusqu'ici avérés rentables que dans certains contextes économiques particuliers, ce qui limite encore cette filiÚre à moins de 5 % de la production mondiale d'acier.

Histoire

Le bas fourneau

La réduction du minerai de fer sans fusion est, historiquement, le procédé le plus ancien d'obtention de l'acier. En effet, les bas fourneaux, incapables d'atteindre les températures de fusion des alliages de fer, produisent une loupe, un agglomérat hétérogÚne de fer métallique plus ou moins imprégné de carbone, de gangue et de charbon de bois. Ce procédé est remplacé progressivement, à partir du Ier siÚcle en Chine et du XIIIe siÚcle en Europe, par le haut fourneau, qui réalise simultanément la réduction et la fusion du fer[SF 1].

Des bas fourneaux élaborés survivent pourtant jusqu'au début du XIXe siÚcle, comme le tatara ou la forge catalane[3]. Face à la filiÚre indirecte (réduction-fusion au haut fourneau, puis affinage de la fonte), ces procédés ne survivent que lorsqu'ils bénéficient d'au moins un des deux avantages suivants :

  • une capacitĂ© Ă  traiter des minerais incompatibles avec le haut fourneau (comme les sables ferrugineux qui colmatent les hauts fourneaux, ou les minerais gĂ©nĂ©rant des laitiers trop pĂąteux pour ĂȘtre vidangĂ©s) ;
  • une taille plus « raisonnable » que les usines gĂ©antes et leurs contraintes (besoin en minerais et en capitaux, production Ă  Ă©couler, etc.).

La réduction directe moderne

Graphique temporel illustrant les parts des grands procédés d'élaboration/affinage
Part des différents procédés d'élaboration dans la production mondiale de l'acier.

Des procĂ©dĂ©s plus Ă©voluĂ©s de rĂ©duction directe se sont dĂ©veloppĂ©s dĂšs le dĂ©but du XXe siĂšcle, quand il devint possible de fondre les minerais prĂ©rĂ©duits avec le procĂ©dĂ© Martin-Siemens ou le four Ă  arc Ă©lectrique. Sur ce modĂšle technico-Ă©conomique, quelques procĂ©dĂ©s ont Ă©tĂ© industrialisĂ©s avant la Seconde Guerre mondiale (procĂ©dĂ© Krupp-Renn adoptĂ© notamment aux aciĂ©ries Shƍwa, procĂ©dĂ© Chenot[3], etc.). Ils restent cependant confidentiels, leur rentabilitĂ© Ă©tant gĂ©nĂ©ralement discutĂ©e[4].

Les procĂ©dĂ©s modernes de rĂ©duction directe, fondĂ©s sur l'utilisation de gaz naturel en remplacement du charbon, sont Ă©tudiĂ©s intensivement pendant les annĂ©es 1950[note 1]. Le , l'entreprise mexicaine Hylsa dĂ©marre Ă  Monterrey la premiĂšre unitĂ© de production industrielle de ce type, le prĂ©rĂ©duit obtenu Ă©tant destinĂ© Ă  la fusion au four Ă  arc Ă©lectrique[8] - [note 2]. La production de minerai prĂ©rĂ©duit avec du gaz naturel Ă©tant Ă©conomiquement viable, plusieurs usines sont construites Ă  la fin des annĂ©es 1960. Un approvisionnement en gaz naturel[note 3] bon marchĂ© Ă©tant essentiel Ă  leur rentabilitĂ©, la plupart des usines se situent dans des pays disposant de gisements de gaz, en AmĂ©rique latine (oĂč beaucoup ont Ă©tĂ© mis au point) et au Moyen-Orient[9].

En 1970, la production mondiale de minerai de fer prĂ©rĂ©duit atteint 790 000 tonnes. Les procĂ©dĂ©s alors opĂ©rationnels sont le procĂ©dĂ© HYL (680 000 tonnes produites), une unitĂ© SL/RN, une unitĂ© Purofer et la premiĂšre usine mettant en Ɠuvre le procĂ©dĂ© Midrex[8].

Quoique rentables et novateurs, les procĂ©dĂ©s inventĂ©s ne s'avĂšrent finalement pas ĂȘtre une rĂ©volution technologique capable de supplanter la filiĂšre traditionnelle fondĂ©e sur le haut fourneau[SF 1]. Mais la quantitĂ© d'acier produite Ă  partir de prĂ©rĂ©duits croĂźt de maniĂšre continue, et plus vite que la production mondiale d'acier :

  • en 1976, les installations en service totalisent moins de Mt[SF 1] ;
  • en 1985, la production annuelle est de 11 Mt pour une capacitĂ© installĂ©e de l'ordre de 20 Mt[note 4], cet Ă©cart s'expliquant par les fluctuations du coĂ»t de l'Ă©nergie[SF 2] ;
  • en 1991, la production reprĂ©sente 20 Mt[SF 1].
  • en 1995, la production mondiale de prĂ©rĂ©duits franchit la barre des 30 Mt pour la premiĂšre fois[SF 3].
  • en 2010, 70 Mt sont produites, 14 % issues des procĂ©dĂ©s HYL et 60 % du procĂ©dĂ© Midrex. Ce dernier assure l'essentiel de la croissance de la production au gaz naturel des prĂ©rĂ©duits, mĂȘme si, depuis 2005, les procĂ©dĂ©s au charbon effectuent un retour en force, essentiellement en Inde[10] - [note 5].
Photo de briquettes avec piĂšce de monnaie
Briquettes de minerai de fer préréduit.

Le conditionnement du minerai de fer préréduit se répartit de maniÚre équilibrée entre les éponges de fer et les briquettes. Les éponges correspondent à un produit métallique trÚs poreux, proche du minerai de départ mais trÚs pyrophorique, ce qui limite leur transport. On les soumet donc souvent à un compactage à chaud, qui améliore à la fois la densité du produit et la sécurité des manutentions[11]. En 2012, 45 % des préréduits ont été ainsi transformés en briquettes[10].

RĂ©actions chimiques

RĂ©duction des oxydes de fer

Les oxydes de fer se rĂ©duisent en suivant la sĂ©quence[C 1] : Fe2O3 → Fe3O4 → FeO[note 6]→ Fe
hĂ©matite → magnĂ©tite → wustite → fer

Chaque transition d'un oxyde au suivant est due à deux réactions simultanées, à haute température, de réduction par le monoxyde de carbone CO ou par le dihydrogÚne H2 :

Principales réactions de réduction[13]
Température Réduction par le monoxyde de carbone Réduction par l'hydrogÚne
900 °C < T < 1 000 °C 3 Fe2O3 + CO → 2 Fe3O4 + CO2
Fe3O4 + CO → 3 FeO + CO2
3 Fe2O3 + H2 → 2 Fe3O4 + H2O
Fe3O4 + H2 → 3 FeO + H2O
1 000 °C < T < 1 050 °C FeO + CO → Fe + CO2 FeO + H2 → Fe + H2O

Ces températures sont différentes de celles annoncées par le diagramme d'Ellingham[note 7]. En réalité, il existe un couplage entre la réduction par monoxyde de carbone et le dihydrogÚne[note 8], qui fait que ces réactions collaborent, l'hydrogÚne améliorant significativement l'efficacité de la réduction par le CO[15].

Procédés au charbon

Dans les procĂ©dĂ©s au charbon, une partie du combustible est d'abord brĂ»lĂ©e pour chauffer la charge. Le produit de cette combustion est du CO2[13]. Quand la tempĂ©rature atteint 1 000 °C, le CO2 rĂ©agit avec le carbone imbrĂ»lĂ© pour crĂ©er du CO[16] : CO2 + C 2 CO dĂšs que T > 1 000 °C (Ă©quilibre de Boudouard)

La production de H2 ne peut pas ĂȘtre obtenue par la dĂ©composition thermique d'eau, Ă©tant donnĂ© les trop faibles tempĂ©ratures mises en Ɠuvre. L'hydrogĂšne est en fait produit en mĂȘme temps que du monoxyde de carbone par la rĂ©action[16] : H2O + C → H2 + CO dĂšs que T > 1 000 °C

Ces deux réactions de production de gaz réducteur, qui consomment respectivement 172,45 et 131,4 kJ/mol[17], sont trÚs endothermiques et interviennent en limitant l'échauffement de la charge.

Procédés au gaz naturel

L'atmosphĂšre rĂ©ductrice, riche en CO et en H2, peut ĂȘtre crĂ©Ă©e Ă  partir du craquage Ă  haute tempĂ©rature, vers 1 100-1 150 °C du gaz naturel, en prĂ©sence des gaz oxydĂ©s (H2O et CO2) issus des rĂ©acteurs de rĂ©duction du minerai[5] : CH4 + CO2 → 2 CO + H2
CH4 + H2O → CO + 3 H2

L'installation générant les gaz réducteurs est appelée « reformeur ». Dans le procédé Midrex, elle consiste en des tubes chauffés par la combustion d'une partie (environ un tiers) du gaz issu du réacteur[5].

Procédés

Les installations de production de minerai de fer prĂ©rĂ©duit sont appelĂ©es usines de rĂ©duction directe. Le principe consiste Ă  exposer du minerai de fer Ă  l'action rĂ©ductrice d'un gaz Ă  haute tempĂ©rature (environ 1 000 °C). Ce gaz est composĂ© de monoxyde de carbone et de dihydrogĂšne, dont les proportions dĂ©pendent du procĂ©dĂ© d'obtention.

On distingue généralement deux grandes catégories[note 9] de procédés[13] - [5] :

  • les procĂ©dĂ©s oĂč le gaz rĂ©ducteur est obtenu Ă  partir de gaz naturel. La rĂ©duction du minerai est dans ce cas rĂ©alisĂ©e dans des cuves ;
  • les procĂ©dĂ©s oĂč le gaz rĂ©ducteur est obtenu Ă  partir de charbon. Le rĂ©acteur est alors gĂ©nĂ©ralement un four rotatif inclinĂ©, semblable Ă  ceux des cimenteries, dans lequel le charbon est mĂ©langĂ© avec du calcaire et du minerai, puis chauffĂ©.

Une autre classification consiste Ă  distinguer les procĂ©dĂ©s oĂč les gaz rĂ©ducteurs sont Ă©laborĂ©s dans des installations spĂ©cifiques et distinctes du rĂ©acteur de rĂ©duction, ce qui caractĂ©rise la plupart des procĂ©dĂ©s utilisant le gaz naturel, de ceux oĂč les gaz sont produits Ă  l'intĂ©rieur du rĂ©acteur de fusion : les procĂ©dĂ©s au charbon se rangent gĂ©nĂ©ralement dans cette catĂ©gorie[16]. Cependant, beaucoup des procĂ©dĂ©s « au gaz » peuvent ĂȘtre alimentĂ©s par des unitĂ©s de gazĂ©ification produisant un gaz rĂ©ducteur Ă  partir de charbon[20].

Par ailleurs, comme l'étape de fusion est nécessaire pour l'obtention d'alliages, il a été développé des procédés de réduction-fusion qui, comme les hauts fourneaux, produisent un métal liquide plus ou moins carburé. Enfin, beaucoup de procédés plus ou moins expérimentaux ont été développés[16].

Procédés de réduction directe
En gras les procédés techniquement et commercialement éprouvés
(c'est-Ă -dire fonctionnant de maniĂšre viable dans plusieurs contextes Ă©conomiques)[21]
Gaz naturel Charbon
Cuves Cycliques HYL I (le plus ancien procédé industriel de réduction directe au gaz naturel[22]) et HYL II Cornues (quelques procédés d'importance secondaire, n'ayant survécu que dans des productions spécialisées)
Continus Midrex (2/3 de la production mondiale de préréduits[22] - [10])

HYL III (procédé concurrent au Midrex)

Variantes des procĂ©dĂ©s au gaz naturel, oĂč le gaz peut ĂȘtre synthĂ©tisĂ© Ă  partir de charbon dans une unitĂ© supplĂ©mentaire.
Lits fluidisés Beaucoup de développements récents (FINMET, CIRCORED
) mais réalisations industrielles limitées[23] - [24]
Fours tournants Soles tournantes Occasionnellement utilisé en appoint du charbon Beaucoup de procédés développés dans les années 1990, sans succÚs commercial
Tambours rotatifs Krupp-Renn (développé dans les années 1930, 38 fours en 1945[25])

SL/RN (développé en 1964, 45 % de la production au charbon des préréduits en 1997[C 2])
Quelques autres procédés, efficaces mais plus confidentiels succÚdent au SL/RN : Kawasaki et Koho[C 3], Krupp-CODIR[C 4]


Procédés à cuves

Ces procédés consistent à mettre en contact, dans une enceinte fermée, le minerai de fer avec des gaz réducteurs produits et chauffés par une installation distincte. Par conséquent, ces procédés sont naturellement adaptés à l'utilisation de gaz naturel.

Procédés cycliques

Dans ces procédés, le minerai est enfourné dans une cuve, et y reste jusqu'à sa complÚte réduction. La cuve est alors vidée de son minerai préréduit, et remplie par une autre charge de minerai non traité. Il s'agit donc de procédés facilement extrapolables à partir d'expériences de laboratoire. De plus, leur principe, fondé sur le traitement par lot, facilite le contrÎle de l'élaboration.

Procédés au gaz naturel

Dans les procédés cycliques au gaz naturel, une unité produit un gaz réducteur chaud, qui est injecté dans le réacteur. Pour assurer une utilisation continue de l'unité transformant le gaz naturel en gaz réducteur, plusieurs cuves fonctionnent en parallÚle et avec un décalage dans le temps.

Le plus connu de ce type est HYL I et sa variante améliorée, le HYL II. Il s'agit du plus ancien procédé industriel de réduction directe au gaz, mis au point au Mexique en 1957 par l'entreprise Hylsa[22].

Cornues

Il s'agit exclusivement de procĂ©dĂ©s au charbon, dont les gaz rĂ©ducteurs sont gĂ©nĂ©rĂ©s Ă  l'intĂ©rieur de la cuve de rĂ©duction. Le minerai est chargĂ© avec le charbon dans une enceinte fermĂ©e. Celle-ci est alors chauffĂ©e jusqu'Ă  ce que l'oxygĂšne prĂ©sent dans le minerai se combine avec le carbone avant d'ĂȘtre Ă©vacuĂ©, essentiellement sous la forme de CO ou de CO2. Cette production de gaz par la chauffe d'un matĂ©riau solide fait que le rĂ©acteur appartient Ă  la catĂ©gorie des cornues.

Le principe est ancien : dans le nord de la Chine, la pénurie du charbon de bois amÚne, avant le IVe siÚcle, à la mise au point de procédés utilisant la houille. Pour éviter tout contact entre le soufre, élément fragilisant apporté par le charbon, et le fer, les Chinois mettent au point un procédé consistant à placer le minerai de fer dans des batteries de creusets tubulaires allongés et de recouvrir celles-ci d'une masse de charbon que l'on fait brûler[SF 4]. Ce procédé a survécu jusqu'au XXe siÚcle[26].

Plus récemment, d'autres procédés historiques ont débouché, comme celui d'Adrien Chenot, opérationnel dans les années 1850 dans quelques usines en France et en Espagne. Ses améliorations successives, par Blair, Yutes, Renton et Verdié[3] ne sont pas significatives[4] - [SF 5]. Parmi les procédés développés subsiste le procédé HOGANAS, mis au point en 1908. Trois petites unités sont encore opérationnelles (en 2010). Peu productif, il se limite à la production de fer en poudre mais, lent et opérant dans des cornues fermées, il permet d'atteindre facilement les puretés requises par la métallurgie des poudres[C 5].

D'autres procédés à la cornue ont vu le jour, comme le KINGLOR-METOR, mis au point en 1973. Deux petites unités ont été construites en 1978 (fermée) et 1981[16] (probablement fermée[C 6]).

Procédés continus

photo d'installation industrielle
UnitĂ© Lebeddinskv GOK-1 Ă  Goubkine (Russie) : procĂ©dĂ© HYL dĂ©marrĂ© en 1999, capacitĂ© 0,9 Mt/an[27].

FondĂ©s sur le principe de l'Ă©coulement piston fonctionnant Ă  contre-courant, ces procĂ©dĂ©s sont ceux qui se rapprochent le plus du haut fourneau ou, plus exactement, du stĂŒckofen. Les gaz rĂ©ducteurs chauds sont obtenus Ă  partir de gaz naturel, dans une unitĂ© distincte de la cuve, et injectĂ©s en bas de cuve, alors que le minerai est chargĂ© Ă  son sommet. Les prĂ©rĂ©duits sont extraits chauds, mais Ă  l'Ă©tat solide, en bas de la cuve. Cette similitude avec un haut fourneau privĂ© de son creuset en fait un des premiers procĂ©dĂ©s explorĂ©s par les mĂ©tallurgistes, mais les Ă©checs de l'Allemand Gurlt en 1857, et du Français EugĂšne Chenot (fils d'Adrien) vers 1862 ont menĂ© Ă  la conclusion que « la rĂ©duction de minerai de fer [
] n'est donc [pas] possible en grand par les gaz seuls[3] ».

Mis au point dans les annĂ©es 1970, le procĂ©dĂ© Midrex est le meilleur exemple des procĂ©dĂ©s continus de rĂ©duction directe. SuccĂšs technique autant que commercial, il reprĂ©sente depuis 1980 environ deux tiers de la production mondiale de prĂ©rĂ©duits. Sa similitude avec le haut fourneau fait qu'il partage quelques-uns de ses avantages, comme la forte capacitĂ© de production, et quelques inconvĂ©nients, comme la relative difficultĂ© Ă  maĂźtriser plusieurs rĂ©actions simultanĂ©es dans un seul rĂ©acteur (puisque la nature du produit change beaucoup au cours de son trajet dans la cuve). La stratĂ©gie de vente d'unitĂ©s clĂ© en main, combinĂ©e avec l'augmentation prudente des capacitĂ©s de production, a assurĂ© Ă  ce procĂ©dĂ© une bonne visibilitĂ© financiĂšre[note 5] et technique
 en comparaison des espoirs souvent déçus des procĂ©dĂ©s concurrents[22] - [10].

Son concurrent direct, le procédé HYL III, concrétise un effort de recherche du groupe Tenova (de), héritier des pionniers mexicains de Hylsa. Assurant prÚs de 20 % de la production de préréduits, il se distingue du Midrex par son unité de production des gaz réducteurs avec son reformage interne[28].

D'autres procĂ©dĂ©s ont Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©s sur ce principe d'un rĂ©acteur continu. Certains sont restĂ©s au stade d'Ă©tude, comme ULCORED[29]. La plupart n'ont connu qu'un dĂ©veloppement cantonnĂ© Ă  un seul pays, voire une seule entreprise. D'autres ont Ă©tĂ© des Ă©checs comme les procĂ©dĂ©s NSC dont une seule usine a Ă©tĂ© construite en 1984 puis convertie en HYL III en 1993[30], ARMCO (une seule unitĂ©[31] mise en service en 1963[C 7] et arrĂȘtĂ©e en 1982[32]) ou PUROFER (3 unitĂ©s opĂ©rationnelles de 1970 Ă  1979[16], petite production reprise depuis 1988[32]).

Les procĂ©dĂ©s au charbon sont des variantes des procĂ©dĂ©s au gaz naturel, oĂč le gaz peut ĂȘtre synthĂ©tisĂ© Ă  partir de charbon dans une unitĂ© supplĂ©mentaire. Parmi ces variantes, le MXCOL, dont une unitĂ© est opĂ©rationnelle depuis 1999[20] et deux en construction, est ainsi un Midrex alimentĂ© par une unitĂ© de gazĂ©ification du charbon[33]. Techniquement matures mais plus complexes, ils sont pĂ©nalisĂ©s vis-Ă -vis des procĂ©dĂ©s Ă©quivalents au gaz, qui nĂ©cessitent un peu moins d'investissement[C 8].

schéma du procédé Midrex
Schéma du procédé Midrex, qui assure les deux tiers de la production mondiale de minerai de fer préréduit.

Lits fluidisés

Schéma simplifié d'un réacteur à lit fluidisé
Schéma simplifié d'un réacteur à lit fluidisé.

La réduction directe étant un échange chimique entre gaz et solide, la fluidisation du minerai par les gaz réducteurs est une piste de recherche séduisante. Cependant les changements de nature des constituants, combinés avec la haute température et la difficulté à maßtriser le phénomÚne de fluidisation, compliquent singuliÚrement son adoption.

Sur ce principe, beaucoup de procĂ©dĂ©s ont Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©s. Certains ont Ă©tĂ© des Ă©checs techniques, comme le HIB (une seule[C 9] installation mise en service en 1972, convertie en Midrex en 1981[34]) ou Ă©conomiques, comme le procĂ©dĂ© FIOR (une seule installation mise en service en 1976, sous cocon depuis 2001[32], ancĂȘtre du FINMET[23]).

DĂ©veloppĂ© en 1991 Ă  partir du procĂ©dĂ© FIOR, le procĂ©dĂ© FINMET semble plus mature mais son expansion ne se concrĂ©tise pas (Deux usines construites[23], une seule en service en 2014[35]). Le procĂ©dĂ© CIRCORED, Ă©galement rĂ©cent[36], stagne de mĂȘme (une seule usine construite, mise en service en 1999, sous cocon en 2012[10]), malgrĂ© son adaptabilitĂ© au charbon (procĂ©dĂ© CIRCOFER, aucune rĂ©alisation industrielle)[24].

Procédés à fours tournants

La rotation du four de rĂ©duction peut ĂȘtre un choix de conception destinĂ© Ă  faire circuler le minerai dans un four. Elle peut aussi participer activement Ă  la rĂ©action chimique en assurant le mĂ©lange entre les rĂ©actifs en prĂ©sence. Les procĂ©dĂ©s Ă  sole tournante, oĂč le minerai repose sur un lit fixe et voyage dans un tunnel, font partie de la premiĂšre catĂ©gorie. Les procĂ©dĂ©s Ă  four rotatifs, oĂč le minerai est malaxĂ© avec du charbon Ă  haute tempĂ©rature, constituent la deuxiĂšme catĂ©gorie.

Soles tournantes

Ces procédés consistent en un four annulaire dans lequel circule le minerai de fer mélangé avec du charbon. Des gaz réducteurs chauds circulent au-dessus, et parfois au travers, de la charge. Le minerai est déposé sur un plateau, ou des chariots, tournant lentement dans le four. AprÚs une rotation, le minerai est réduit ; il est alors évacué et remplacé par du minerai oxydé.

Sur ce principe, un certain nombre de procĂ©dĂ©s ont Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©s. Dans les annĂ©es 1970-1980, le procĂ©dĂ© INMETCO n'a dĂ©montrĂ© que la validitĂ© de l'idĂ©e sans application industrielle[C 10]. Le procĂ©dĂ© MAUMEE (ou DryIron) s'est concrĂ©tisĂ© aux États-Unis avec la construction de deux petites unitĂ©s industrielles dans les annĂ©es 1990[C 11]. De mĂȘme, en Europe, un consortium de sidĂ©rurgistes du Benelux, a dĂ©veloppĂ© en laboratoire, de 1996 Ă  1998, le procĂ©dĂ© COMET. MalgrĂ© le retrait du consortium du programme de recherche en 1998, un dĂ©monstrateur industriel unique en est extrapolĂ©, le SIDCOMET, qui est arrĂȘtĂ© en 2002[C 12]. Le RedIron, dont la seule unitĂ© opĂ©rationnelle est inaugurĂ©e en 2010 en Italie[37], bĂ©nĂ©ficie aussi de ces recherches. Le Japon adopte le procĂ©dĂ© FASTMET, avec la mise en service de trois unitĂ©s dĂ©diĂ©es Ă  la valorisation de poudres riches en fer[C 13], et en propose une version amĂ©liorĂ©e, le procĂ©dĂ© ITmk3, dont une unitĂ© est opĂ©rationnelle aux États-Unis[38].

Schéma d'un procédé de réduction directe sur sole tournante
Schéma de principe d'un procédé de réduction directe sur sole tournante, le procédé ITmk3.

Cette Ă©numĂ©ration, non exhaustive, montre que malgrĂ© le vif intĂ©rĂȘt des sidĂ©rurgistes des pays dĂ©veloppĂ©s pendant les annĂ©es 1990, aucun procĂ©dĂ© n'a rencontrĂ© de succĂšs commercial.

Tambours rotatifs

Vue des 6 fours rotatifs de l'usine de réduction directe d'Essen-Borbeck, vers 1964.

Ces procédés utilisent le brassage à haute température de poudre de minerai de fer et de charbon, avec un peu de calcaire pour diminuer l'acidité du minerai. Des procédés apparaissent dÚs la fin du XIXe siÚcle, comme celui de Carl Wilhelm Siemens[39], fondé sur l'utilisation d'un court tambour[40]. L'outil employé évolue ensuite vers un long four tubulaire rotatif, inspiré de ceux utilisés en cimenterie, comme dans le procédé Basset, développé dans les années 1930[SF 6].

Un procédé d'importance historique est le Krupp-Renn. Développé dans les années 1930, il y eut jusqu'à 38 fours en 1945 qui, quoiqu'ils ne totalisaient alors qu'une capacité de Mt/an, ont été installés partout dans le monde[25]. Ce procédé a été amélioré[note 10] et a inspiré les fours allemands Krupp-CODIR[C 14] et les procédés japonais Kawasaki[C 15] et Koho. Les deux procédés japonais intÚgrent, en amont des fours rotatifs, une unité de bouletage de sous-produits sidérurgiques. Deux unités de chaque procédé ont été construites entre 1968 (Kawasaki) et 1975 (Koho)[C 3].

Schéma de principe du procédé Krupp-Renn
Schéma de principe d'un procédé de réduction directe dans un tambour rotatif, le procédé Krupp-Renn.

Le procédé ACCAR, développé à la fin des années 1960 et utilisé confidentiellement jusqu'en 1987[10], utilise un mélange de 80 % charbon et 20 % de pétrole ou de gaz : les hydrocarbures, quoique plus coûteux, enrichissent le gaz réducteur en hydrogÚne[13]. Le procédé allemand Krupp-CODIR, opérationnel en 1974, a connu à peine plus de succÚs : seules trois unités ont été mises en service[C 4]. Enfin, des sidérurgistes indiens sont à l'origine des procédés SIIL, Popurri, Jindal, TDR et OSIL qui ne sont que des variantes[note 5] développées pour répondre à des contraintes techniques et économiques spécifiques[13].

D'autres procĂ©dĂ©s, construits sur le mĂȘme principe, ont par contre Ă©chouĂ© Ă  se dĂ©velopper, comme le Strategic-Udy[25], consistant en une seule installation mise en service en 1963 et fermĂ©e en 1964[34].

Le procĂ©dĂ© SL/RN[2], dĂ©veloppĂ© en 1964, domine en 2013 les procĂ©dĂ©s au charbon. En 1997, il correspondait Ă  45 % de la production au charbon des prĂ©rĂ©duits[C 2]. Mais en 2012, les capacitĂ©s de production recensĂ©es pour ce procĂ©dĂ© ne correspondent plus qu'Ă  1,8 Mt/an pour une production de 17,06 Mt attribuĂ©e aux procĂ©dĂ©s au charbon[10] - [note 4].

Procédés de réduction directe par tambours rotatifs[41]
Dessin d'un tambour
1 2 3a 3b 4 5
Consistance du produit obtenu solide pĂąteux sol. (clinker)
liq. (fonte)
Teneur en fer idéale (%) 30-60 30-60 55-63 25-45 50-67
Granulométrie du minerai (mm) < 20 < 20 < 10 5-25[note 11] < 5 < 0,2
Basicité de la charge (CaO/Al2O3) quelconque 0,3 2,8-3,0
Température maxi (°C) 600-900 900-1100 1200-1300 1400-1500
Réduction (% de O2 retiré du Fe2O3) 12 % 20-70 >90 100
Exemples de procédés Lurgi (de) Highveld
Udy
Larco
RN SL/RN
Krupp
Krupp-
Renn
Basset

Procédés de réduction-fusion

L'étape de fusion étant nécessaire pour l'obtention d'alliages et la mise en forme du produit, les procédés de réduction directe sont fréquemment associés à un moyen de fusion aval.

La fusion au four Ă©lectrique concerne la majoritĂ© du minerai de fer prĂ©rĂ©duit : en 2003, sur 50 Mt produites, 49 sont allĂ©es au four Ă©lectrique[42]. L'intĂ©gration des processus est gĂ©nĂ©ralement trĂšs poussĂ©e, pour profiter de la haute tempĂ©rature (supĂ©rieure Ă  600 °C) du prĂ©rĂ©duit issu du rĂ©acteur de rĂ©duction directe[28].

Une idĂ©e consiste alors Ă  effectuer toute la rĂ©duction-fusion dans le four Ă  arc installĂ© en aval de l'installation de rĂ©duction. Plusieurs procĂ©dĂ©s au plasma, opĂ©rant au-delĂ  de 1 530 °C, ont Ă©tĂ© imaginĂ©s et parfois testĂ©s. Les fours peuvent ĂȘtre Ă  arc non transfĂ©rĂ© (Plasmasmelt, Plasmared) ou Ă  arc transfĂ©rĂ© (ELRED, EPP, SSP, The Toronto System, rĂ©acteur Ă  film plasma tombant)[18]. Tous ces procĂ©dĂ©s partagent l'avantage du four Ă©lectrique, qui est un faible coĂ»t d'investissement, et son inconvĂ©nient, qui est l'utilisation d'une source d'Ă©nergie chĂšre. Dans le cas de la rĂ©duction directe, ce handicap est rĂ©dhibitoire car la chaleur nĂ©cessaire est importante, tant Ă  cause de la rĂ©duction qu'Ă  cause de la prĂ©sence d'une gangue Ă  fondre.

Une alternative au four Ă©lectrique consiste Ă  fondre le prĂ©rĂ©duit avec un combustible. Le cubilot est parfaitement adaptĂ© Ă  cette tĂąche, mais une raison d'ĂȘtre des procĂ©dĂ©s de rĂ©duction directe Ă©tant la non-utilisation de coke, d'autres fours de fusion ont vu le jour. Le procĂ©dĂ© COREX (de), opĂ©rationnel depuis 1987, consiste en un rĂ©acteur de rĂ©duction directe Ă  cuve, alimentant un creuset de haut fourneau dans lequel le minerai prĂ©rĂ©duit est amenĂ© Ă  l'Ă©tat de fonte liquide, en ne consommant que du charbon. Ce procĂ©dĂ© produit Ă©galement un gaz rĂ©ducteur chaud, qui peut ĂȘtre valorisĂ© dans une unitĂ© de type Midrex[43]. Un Ă©quivalent du COREX, fondĂ© sur le lit fluidisĂ© FINMET au lieu de la cuve Midrex, est le procĂ©dĂ© corĂ©en FINEX (contraction de FINMET et COREX)[44]. Ces deux procĂ©dĂ©s fonctionnent de maniĂšre industrielle dans plusieurs usines dans le monde[35].

Enfin, certains fours de rĂ©duction-fusion dans un mĂȘme rĂ©acteur ont Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©s sans aboutir Ă  un dĂ©veloppement industriel. Par exemple, le procĂ©dĂ© ISARNA[29] et son dĂ©rivĂ© HISARNA (en) (combinaison des procĂ©dĂ©s ISARNA et HISMELT[45]), est un rĂ©acteur cyclonique qui rĂ©alise la fusion avant la rĂ©duction[29]. Ces procĂ©dĂ©s ont abouti Ă  un dĂ©monstrateur industriel testĂ© depuis 2011 aux Pays-Bas[45]. De mĂȘme, les sidĂ©rurgistes japonais se sont associĂ©s dans les annĂ©es 1990 pour dĂ©velopper le procĂ©dĂ© DIOS qui, Ă  l'instar de beaucoup de procĂ©dĂ©s de rĂ©duction-fusion, s'apparente aux convertisseurs Ă  l'oxygĂšne[46]. Le procĂ©dĂ© TECNORED, Ă©tudiĂ© au BrĂ©sil[19], rĂ©alise Ă©galement une rĂ©duction-fusion dans une mĂȘme cuve, mais s'apparente plutĂŽt Ă  un haut fourneau modifiĂ© pour s'adapter Ă  tout type de combustible solide[47]. De tous les procĂ©dĂ©s de ce type qui ont Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©s, une unique unitĂ© industrielle de type HISMELT construite en Australie, de capacitĂ© 0,8 Mt/an[48], a fonctionnĂ© de 2005 Ă  2008[49].

Importance Ă©conomique

MaĂźtrise des besoins en capital et en matiĂšres

Aux États-Unis, oĂč le procĂ©dĂ© Midrex a Ă©tĂ© mis au point, la rĂ©duction directe a Ă©tĂ© envisagĂ©e dans les annĂ©es 1960 comme capable de donner un second souffle aux aciĂ©ries Ă©lectriques. En effet, le modĂšle technico-Ă©conomique de la mini-mill, fondĂ© sur la flexibilitĂ© et la taille rĂ©duite des usines, Ă©tait menacĂ© par la pĂ©nurie de ferrailles, et donc la flambĂ©e de leur prix. Une mĂȘme pĂ©nurie affectant le coke mĂ©tallurgique, un retour Ă  la filiĂšre haut fourneau ne semblait pas une solution sĂ©duisante[25].

La réduction directe est théoriquement adaptée à l'utilisation des minerais peu compatibles avec les hauts fourneaux (comme les minerais fins qui colmatent les fours), qui sont moins chers. En mobilisant également des capitaux plus faibles, elle apparaßt alors comme une alternative pertinente aux deux filiÚres éprouvées, le four électrique et le haut fourneau[25].

Performances économiques et techniques comparées de quelques procédés de réduction ou réduction/fusion (données 2010)[50]
Haut fourneau
avec inj. charbon
Hismelt COREX Midrex HYL III Four Ă©lectrique
Produits d'entrée 9 % boulettes / 91 % aggloméré 100 % fines de minerai 50 % boulettes / 50 % aggloméré 100 % boulettes 100 % minerai préréduit
Produit de sortie Fonte brute en fusion Fonte brute en fusion / gaz réducteur Minerai de fer préréduit Acier non allié en fusion
CapacitĂ© de production (kt/an)[10] 300 Ă  4 200 ≈ 800 300 Ă  1 500 400 Ă  1 700 500 Ă  1 100
CoĂ»t d'investissement (€2010/(Mt/an))[note 12] 273 428 200 194 191 108
CO2 produit (tCO2/t) 1,5 1,57 2,9 0,65 0,53 0,058
Besoin en coke (GJ/t)[note 13] 9,3 0 3,1 0
Besoin en charbon (GJ/t)[note 13] 6,20 14,76 27 0
Besoin en électricité (kWh/t) 138 174,8 90 135,4 104,2 697,7
Besoin en gaz naturel (GJ/t)[note 13] 0 1,68 0 10,8 9 0,09
Production de gaz (GJ/t) 3,25
(gaz de haut fourneau)
0 10,9
(gaz COREX)
0

Le tableau comparatif permet de comprendre que la diversitĂ© des procĂ©dĂ©s se justifie aussi par les besoins en matiĂšres de qualitĂ©. La cokerie qui alimente une batterie de hauts fourneaux coĂ»te aussi cher que le haut fourneau, et demande un charbon de qualitĂ© spĂ©cifique[50] - [54]. À l'inverse, beaucoup de procĂ©dĂ©s de rĂ©duction directe sont pĂ©nalisĂ©s par la transformation du minerai en boulettes, qui est coĂ»teuse : celles-ci coĂ»tent en moyenne 70 % plus cher que le minerai brut[55]. Enfin, les besoins en gaz peuvent augmenter significativement le coĂ»t d'investissement : le gaz produit par un COREX est remarquablement adaptĂ© Ă  l'alimentation d'une unitĂ© Midrex[43], mais l’intĂ©rĂȘt du faible investissement s'estompe alors[56].

IntĂ©rĂȘt de la rĂ©duction directe en fonction du combustible

Graphique temporel illustrant les parts des principaux procédés de réduction directe
Évolution de la production[note 4] de minerai de fer prĂ©rĂ©duit selon les principaux procĂ©dĂ©s.

Bien que la manutention et le traitement des gaz soient bien plus économiques que la transformation du charbon en coke (sans compter les contraintes liées, comme la manutention du vrac, la grande sensibilité des cokeries aux fluctuations de production, l'impact environnemental, etc.), le remplacement du coke par du gaz naturel ne rend la réduction directe attractive que pour les sidérurgistes disposant de ressources en gaz bon marché. Ce point est essentiel, comme l'ont rappelé en 1998 les sidérurgistes européens :

« Pas de secret, pour ĂȘtre concurrentielle, la rĂ©duction directe doit disposer d'un gaz naturel Ă  2 dollars le gigajoule, la moitiĂ© des prix europĂ©ens[57]. »

— L'Usine nouvelle, septembre 1998, La rĂ©duction directe passe au charbon

Ce constat explique le dĂ©veloppement de certains procĂ©dĂ©s de rĂ©duction-fusion qui, Ă  cause des hautes tempĂ©ratures mises en Ɠuvre, sont excĂ©dentaires en gaz rĂ©ducteur. Les procĂ©dĂ©s de rĂ©duction-fusion, comme le COREX, capable d'alimenter une unitĂ© annexe de rĂ©duction directe Midrex[42], ou le Tecnored, se justifient par leur capacitĂ© Ă  produire un gaz riche en CO malgrĂ© leur coĂ»t d'investissement plus Ă©levĂ©[50]. En outre, le gaz de cokerie est un coproduit essentiel Ă  la stratĂ©gie Ă©nergĂ©tique d'un complexe sidĂ©rurgique : l'absence d'une cokerie doit alors ĂȘtre compensĂ© par une consommation plus importante de gaz naturel pour les outils en aval, notamment les fours des laminoirs Ă  chaud et de recuit.

DÚs lors, la répartition mondiale des usines de réduction directe est directement corrélée à la disponibilité en gaz naturel et en minerai. En 2007, elle se présente schématiquement ainsi[42] :

  • les procĂ©dĂ©s au gaz naturel se concentrent en AmĂ©rique latine (oĂč beaucoup ont Ă©tĂ© mis au point) et au Moyen-Orient ;
  • les procĂ©dĂ©s au charbon connaissent un succĂšs remarquable en Inde, assurant le maintien de la proportion d'acier Ă©laborĂ© en rĂ©duction directe en dĂ©pit du fort dĂ©veloppement de la sidĂ©rurgie chinoise[10].

La Chine, pays aux besoins gigantesques et dĂ©ficitaire en ferrailles, et l'Europe, dĂ©pourvue de minerai et de combustibles compĂ©titifs, n'ont jamais investi massivement dans ces procĂ©dĂ©s, et sont restĂ©s fidĂšles Ă  la filiĂšre haut fourneau. Les États-Unis, quant Ă  eux, ont toujours disposĂ© de quelques unitĂ©s mais, depuis 2012, l'exploitation des gaz de schiste y relance les procĂ©dĂ©s au gaz naturel[58].

Cependant, comme la rĂ©duction directe utilise beaucoup plus l'hydrogĂšne comme agent rĂ©ducteur que ne le fait le haut fourneau (ce qui est trĂšs net pour les procĂ©dĂ©s au gaz naturel), elle produit beaucoup moins de CO2, un gaz Ă  effet de serre[50]. Cet avantage a motivĂ© le dĂ©veloppement des procĂ©dĂ©s d'ULCOS dans les pays dĂ©veloppĂ©s, comme HISARNA, ULCORED, etc. L'apparition de technologies de traitement des gaz matures, comme l'adsorption par inversion de pression ou le traitement des gaz par les amines, relance aussi l'intĂ©rĂȘt des chercheurs[29]. Au-delĂ  de la rĂ©duction des Ă©missions de CO2, les procĂ©dĂ©s Ă  l'hydrogĂšne pur, comme Hybrit, sont activement Ă©tudiĂ©s dans la perspective de la dĂ©carbonation de la sidĂ©rurgie[59].

Notes et références

Notes

  1. Entre 1950 et 1975, on recense 1 200 brevets, 100 procĂ©dĂ©s sont analysĂ©s, 12 principes essentiels sont testĂ©s[5]. En 2014, Stanley Santos dĂ©nombre 70 dĂ©veloppements de procĂ©dĂ©s de rĂ©duction directes et 45 procĂ©dĂ©s de rĂ©duction-fusion[6]
 chiffre trĂšs sous-Ă©valuĂ© si on se souvient qu'en 1890, Marion Howe citait dĂ©jĂ , Ă  titre d'exemple, 35 procĂ©dĂ©s de rĂ©duction directe[7].
  2. Cette unitĂ© inaugure le procĂ©dĂ© HYL I. D'une capacitĂ© initiale de 75 000 tonnes annuelles, elle a produit du minerai prĂ©rĂ©duit jusqu'en 1991[8].
  3. En 2006, 92 % du minerai préréduit était issu de procédés utilisant le gaz naturel[9]. Mais, depuis 2010, cette proportion n'est plus que de 75 %[10].
  4. Il est essentiel de bien distinguer les capacités de production de la production réelle. En effet, de nombreuses unités n'ont jamais atteint leur capacité de production théorique, et beaucoup d'autres sont utilisées de maniÚre épisodique, lorsque la conjoncture rend leur fonctionnement rentable.
  5. Les variantes des procĂ©dĂ©s Midrex et HYL n'ont pas fait l'objet de dĂ©nominations spĂ©cifiques, les entreprises les commercialisant tenant Ă  rassurer sur la maturitĂ© technologique de leurs procĂ©dĂ©s. À l'inverse, les sidĂ©rurgistes indiens modifiant leurs fours rotatifs ont tenu Ă  souligner leur — trĂšs relatives — originalitĂ©s respectives.
  6. La wustite est en rĂ©alitĂ© un composĂ© non stƓchiomĂ©trique dont le taux d'oxydation est variable. Les mĂ©tallurgistes retiennent gĂ©nĂ©ralement la formule FeO1,0356[12].
  7. La rĂ©duction par le CO commencerait, selon le diagramme, Ă  de plus basses tempĂ©ratures : pour l'hĂ©matite et la magnĂ©tite, elle dĂ©bute Ă  partir de 690 °C, pour la wustite, Ă  partir de 830 °C. Quant Ă  la rĂ©duction par le H2, la rĂ©duction de l'hĂ©matite commence dĂšs 630 °C, alors qu'il faut atteindre 1 050 °C pour rĂ©duire la magnĂ©tite, et dĂ©passer 1 500 °C (tempĂ©rature de fusion du fer) pour rĂ©duire la wustite[14].
  8. Plus précisément, l'hydrogÚne favorise la réduction par le monoxyde de carbone grùce aux réactions suivantes[15] :
    Fe3O4 + H2 → 3 FeO + H2O
    H2O + CO → H2 + CO2
    soit : Fe3O4 + CO → 3 FeO + CO2
    Ainsi que :
    FeO + H2 → Fe + H2O
    H2O + CO → H2 + CO2
    soit : FeO + CO → Fe + CO2
  9. Si distinguer les procédés au gaz de ceux au charbon est une approche fréquente, on peut bien sûr envisager d'autres découpages, comme ceux fondés sur la température[18], le conditionnement du minerai avant sa réduction, le produit obtenu[19], etc.
  10. Un des intĂ©rĂȘts du procĂ©dĂ© Krupp-Renn rĂ©side dans sa capacitĂ© Ă  traiter des minerais siliceux, sans avoir besoin de diminuer l'aciditĂ© de leur gangue par un coĂ»teux ajout de chaux. Mais une gangue acide est peu fusible, ce qui gĂȘne la rĂ©duction du fer et donne un prĂ©rĂ©duit de qualitĂ© mĂ©diocre. Une solution, coĂ»teuse et partielle, consiste Ă  fonctionner Ă  de plus hautes tempĂ©ratures[16].
  11. Pour l'ilménite et les sables ferrugineux : granulométrie de 0,05 à 0,5 mm.
  12. Avec 1 $2000≈1,34 â‚Ź2010, si on retient un taux de change de 1 $2000≈1,07 â‚Ź2000 et une inflation de 1 â‚Ź2000≈1,23 â‚Ź2010[51].
  13. Avec 1 tonne de coke Ă©quivalente Ă  27,920 GJ, 1 tonne de charbon Ă©quivalente Ă  25,911 GJ[52], 1 000 Nm3 ou 800 kg de gaz naturel Ă©quivalents Ă  36 GJ[53].

Références

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  6. § Procédé Basset.

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

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