AccueilđŸ‡«đŸ‡·Chercher

Histoire du Panama

Cet article décrit l'histoire du Panama, de l'Antiquité jusqu'à nos jours.

Les civilisations précolombiennes

Les plus anciennes traces de cultures prĂ©colombiennes au Panama datent de 12 000 ans environ. À cette Ă©poque, les peuples autochtones vivaient de la cueillette et de la chasse. Puis, vers 3 000 avant notre Ăšre, les hommes se tournĂšrent progressivement vers l'agriculture. Les chasseurs et cueilleurs se sĂ©dentarisĂšrent vers 1 500 ans avant notre Ăšre, grĂące Ă  la culture du maĂŻs.

À l'arrivĂ©e des Espagnols, entre six cent mille et un million de personnes vivaient peut-ĂȘtre dans la rĂ©gion. DiffĂ©rentes tribus coexistaient, elles Ă©taient hiĂ©rarchisĂ©es (« clergĂ© », Ă©lite de l'armĂ©e, noblesse).

Période préhistorique

Avant l'arrivée des IbÚres, les territoires du Panama étaient habités par divers groupes ethniques qui étaient organisés en chefferies, ces peuples avaient en commun que leurs diverses langues provenaient d'une famille idiomatique connue aujourd'hui sous le nom de langues chibchanes. Cependant, ces peuples formaient des groupes divers et ne constituaient donc pas une unité politique unifiée.

À la suite des chroniques espagnoles du XVIe siĂšcle, il a Ă©tĂ© possible de dĂ©terminer l'extension des peuples qui existaient au Panama au moment de la conquĂȘte de l'AmĂ©rique. En plus des chroniques, l'historiographie panamĂ©enne et internationale a utilisĂ© la langue, l'orfĂšvrerie et d'autres aspects culturels pour Ă©tablir la zone d'influence territoriale des diffĂ©rentes nations autochtones.

Chefferies indigĂšnes de l'Est

Parmi les nations autochtones qui habitaient l'isthme, se distinguaient les Indiens Cuevas, dont le territoire comprenait le sud-ouest du Panama, à la fois sur les cÎtes des Caraïbes et du Pacifique, y compris le Darien. Le rio Atrato a été défini comme étant la limite orientale des domaines de grottes, tandis qu'à l'ouest, le territoire s'étendrait jusqu'à Chame sur la cÎte Pacifique et Quebore (Rio Indio (es)) sur la cÎte Caraïbes.

Les chefferies de cavernes les plus importantes étaient celles de Pocorosa, Comagre et Careta; dont les territoires occupaient la région actuelle des Guna Yala. Sur la cÎte Pacifique, la chefferie de Chochama se démarque, occupant une bonne partie du golfe de San Miguel, ainsi que la cÎte entre Chimån et la baie de Chame, l'Archipel des Perles et les ßles de Chepillo (es), Taboga, Taboguilla et Otoque.

Cependant, dans la partie orientale de l'isthme, il y avait des peuples qui ne parlaient pas la grotte. Parmi eux se trouvent les Chuchures, de langue nahua, qui se sont installĂ©s Ă  Nombre de Dios. D'un autre cĂŽtĂ©, « ceux de BirĂș » ont Ă©tĂ© rapportĂ©s par Pascual de Andagoya et localisĂ©s par Romoli dans le bassin supĂ©rieur du rio Tucuti (es), et ceux de « Quarequa » ou « Careca » qui « avaient conquis depuis l'arriĂšre de la Darien »

Chefferies autochtones dans la région centrale

Dans la partie centrale de l'isthme vivaient un certain nombre de nations autochtones qui ne partageaient pas la langue ou les caractéristiques phénotypiques communes. Les chroniques espagnoles soulignent que ces chefferies entretenaient des confrontations guerriÚres constantes entre elles pour le contrÎle territorial.

Parmi les manoirs trouvĂ©s par les Espagnols lors de la conquĂȘte, dans les territoires de l'actuelle province de CoclĂ©, on mentionne Periquete, Totonaga, Taracuru, PenonomĂ©. Cependant, il a Ă©tĂ© Ă©tabli que le chef Acherse, qui commandait tous ces territoires, vivait Ă  NatĂĄ de los Caballeros.

Dans la zone géographique de l'actuelle péninsule d'Azuero, les chefferies d'Escoria, Usagaña, Cerro Quema (es), Guararé, Pocri et Paris (es) ont été documentées. Cependant, on sait que le chef Cutatara de Paris avait dominé le reste des chefferies voisines pendant la guerre.

Dans la partie centrale de l'actuelle province de Veraguas, la chefferie de Tabraba a été établie; vers le nord se trouvait la chefferie d'Urraca qui se trouvait dans la région de l'actuelle Santa Fe (es); Avec l'avancée de la colonisation, ce territoire a abrité une importante résistance indigÚne.

Chefferies autochtones de la région de l'ouest

Dans les provinces actuelles de Bocas del Toro et Chiriquí, un certain nombre de tribus indigÚnes se sont développées, parmi lesquelles se distinguent les Guaymíes, les Dorasques et les Dolegas. Ces tribus étaient dispersées à la fois sur les cÎtes de l'océan Pacifique et de la mer des Caraïbes, comme dans la CordillÚre Centrale (es).

L'Ă©poque coloniale

La conquĂȘte

Rodrigo de Bastidas, premier espagnol Ă  aborder le Panama.

Le premier des colonisateurs espagnols à parcourir des terres panaméenne est Rodrigo de Bastidas. Accompagné du pilote basque Juan de la Cosa qui a participé aux trois premiers voyages de Christophe Colomb ainsi qu'à celui d'Alonso de Ojeda qui a reconnu les cÎtes de ce qui est actuellement le Venezuela et la Colombie, il quitte le port de Cadix en octobre 1501 avec deux navires[1], le "San Antón" et la "Santa María de Gracia", et débarque en mai 1502. Parti à la recherche des ßles antillaises, il parvient ainsi à parcourir les cÎtes qui vont du Cap Gracias a Dios (Grùce à Dieu) (Honduras) jusqu'à Cariari (Puerto Limón au Costa Rica).

Quatriùme voyage de Colomb : 3 mai 1502 – 7 novembre 1504.

Pendant son quatriÚme et dernier voyage, Christophe Colomb navigue le long des cÎtes du Honduras, du Veragua et du Panamå jusqu'à l'isthme de Panama[2]. Son expédition est composée de quatre caravelles pour cent quarante membres d'équipage dont une importante proportion de mousses : la Capitana, navire amiral, le Santiago, commandé par son frÚre Bartolomé, la Gallega et la Vizcaina[3]. Le fils de Colomb, Fernando fait également partie du voyage[2].

Le , Colomb fonde l'un des premiers établissements espagnols en territoire continental, Santa María de Belen, laissant la charge de cette derniÚre à son frÚre Bartolomé[2] tandis qu'il repart pour l'Espagne demander du renfort pour poursuivre la colonisation[2]. Les envahisseurs espagnols entrent par la suite en conflit avec les indiens, Bartolomé ayant ordonné l'arrestation du cacique Quibiån et de toute sa famille[2]. AprÚs plusieurs attaques victorieuses des indiens, Santa María de Belen est abandonnée par ses habitants qui s'embarquent pour l'Espagne[2].

L'expĂ©dition de Vasco NĂșñez de Balboa vers l'ocĂ©an Pacifique en 1513 (aller en rouge, retour en bleu).

En 1510, sur la cĂŽte occidentale du golfe d'UrabĂĄ, Vasco NĂșñez de Balboa fonde Santa MarĂ­a la Antigua del DariĂ©n, premiĂšre vĂ©ritable ville du continent, avec une administration, une Ă©glise et un couvent[4], qui durera une quinzaine d'annĂ©es (jusqu'Ă  ce qu'elle soit Ă©clipsĂ©e par Panama, fondĂ©e en 1519). Parvenant Ă  coexister plus ou moins pacifiquement avec les indiens locaux, Vasco NĂșñez de Balboa apprend l'existence d'une autre mer au sud de la rĂ©gion oĂč ils se trouvent. Le , aprĂšs trois ans d'exploration pĂ©nible, Balboa dĂ©couvre l'ocĂ©an Pacifique, longtemps appelĂ© « Mer du Sud »[4].

La fondation de la ville, toutefois, est illĂ©gale, Balboa n'ayant pas d'autorisation de la Couronne. Aussi celle-ci envoie une puissante flotte de deux mille hommes commandĂ©s par Pedro Arias DĂĄvila. Balboa est arrĂȘtĂ© et est exĂ©cutĂ© pour rĂ©bellion en 1519[4]. La mĂȘme annĂ©e, DĂĄvila fonde une nouvelle ville sur la cĂŽte Pacifique, Panama, Ă  l'endroit oĂč l'isthme est le plus Ă©troit, ce qui entraĂźne l'abandon progressif de Santa MarĂ­a, actĂ© en 1524. Rapidement, la ville de Panama devient un passage obligĂ© pour les conquistadors souhaitant explorer les cĂŽtes de l'ocĂ©an Pacifique.

Sur la cĂŽte Pacifique, l'exploration est lente. Elle se fait d'abord vers l'ouest et les terres dĂ©jĂ  connues du Mexique et de l'AmĂ©rique centrale. En 1522, le basque Pascual de Andagoya entend parler pour la premiĂšre fois d'une riche contrĂ©e appelĂ©e « BirĂș » (PĂ©rou), au sud. BlessĂ©, Andagoya laisse l'exploration de la rĂ©gion Ă  Diego de Almagro et Francisco Pizarro. Entre 1528 et 1532, ce dernier monte trois expĂ©ditions qui aboutiront Ă  la dĂ©couverte et Ă  la conquĂȘte de l'Empire Inca.

En 1526, Pedro Arias DĂĄvila est remplacĂ© Ă  la tĂȘte de la province par Pedro de los RĂ­os et devient gouverneur de la nouvelle province du Nicaragua, sans que soit dĂ©finie la frontiĂšre entre les deux entitĂ©s, ce qui provoque des disputes entre les deux hommes. Comme un peu partout dans le nouvel empire colonial espagnol, la situation politique est confuse et la Couronne peine Ă  imposer pleinement son autoritĂ©. La plupart des problĂšmes sont liĂ©s Ă  l'Ă©loignement de cette autoritĂ©. Le seul relai entre les territoires amĂ©ricains et le Conseil des Indes, Ă  Madrid, est la Real Audiencia de Saint-Domingue, crĂ©Ă©e en 1511, aux pouvoirs flous et au domaine de compĂ©tence beaucoup trop vaste (la totalitĂ© des Indes occidentales espagnoles).

Le est donc créée une nouvelle audiencia, la Real audiencia de Panama, avec une juridiction qui s'étend à toute la terre ferme d'Amérique, mais qui ne dure que jusqu'à la fondation de la Real audiencia de los Confines (Guatemala), en 1543[5]. Elle est recréée le , lorsque la real audiencia du Guatemala est intégrée à celle de Mexico[6].

Le , une real cedula du roi Philippe III place l’audiencia de Panama sous l'autoritĂ© du vice-roi du PĂ©rou.

Le régime colonial

Panama a fait partie de l'empire espagnol entre 1538 et 1821. Dans les colonies hispaniques on appliquait en gĂ©nĂ©ral deux types de lois : les pĂ©ninsulaires (appliquĂ©es Ă  l'Espagne, Ăźles adjacentes et l'Afrique) et les lois d'outre-mer ou coloniales. On appliqua premiĂšrement les lois de Castille et de LĂ©on, qui ont Ă©tĂ© les premiers États protecteurs des voyages de dĂ©couverte.

Il n'existait alors pas encore d'unité péninsulaire. Les Lois coloniales (aussi appelées Lois des Indes, selon Laurentino Díaz López, dans son ouvrage le Droit en Amérique durant la période hispanique) consistaient en « L'ensemble des normes juridiques ou dispositions légales qui apparaissent par volonté des monarques espagnols ou par les autorités légitimement constituées en Amérique, comme délégation des rois, et qui ont eu pour but de fixer et de régler les relations politiques, administratives, pénales, civiles, économiques et sociales entre les habitants des Indes Occidentales ».

On appliqua d'abord les lois appelĂ©es Lois de Burgos, approuvĂ©es le 27 dĂ©cembre 1512. Ces lois avaient pour origine la prĂ©occupation de la Couronne suscitĂ©e par les rapports des pĂšres dominicains sur le mauvais traitement des indiens. Ferdinand d'Aragon le Catholique ordonna la crĂ©ation d'une assemblĂ©e de thĂ©ologiens et juristes, afin de trouver une solution au problĂšme. Bien que les membres de l'assemblĂ©e plaidassent pour la libertĂ© et le traitement humain des Indiens, ils jugĂšrent aussi que ceux-ci devaient ĂȘtre soumis au rĂšglement espagnol, afin d'accĂ©lĂ©rer le processus d'Ă©vangĂ©lisation. AprĂšs la controverse lancĂ©e par BartolomĂ© de Las Casas, de nouvelles lois furent promulguĂ©es Ă  Barcelone le 20 novembre 1542, Ă  la demande de l'Empereur Carlos V.

L’audience royale de Panama

Elle incluait la province de Tierra Firme, c'est-Ă -dire l'actuel isthme de Panama.

Son installation a eu lieu au début de 1539, dans la ville de Panama, à l'arrivée des auditeurs Francisco Pérez de Robles, Lorenzo Pérez de la Serna, Pedro de Villalobos et du licencié Alonso de Montenegro. Son président fut Francisco Pérez de Robles, qui remplaça le gouverneur Pedro Våsquez d'Acuña. Il l'a administrée jusqu'en 1543, quand on a créé l'Audiencia des Confins (Guatemala) et ordonné la dissolution de l'Audiencia de Panama. Pendant son existence, diverses expéditions furent menées, à des fins exploratoires et de découverte de nouveaux territoires. Toutefois, l'administration de Pérez de Robles fut caractérisée par sa corruption, ce qui provoqua des situations désastreuses qui entraßnÚrent son jugement et sa destitution.

Pedro Ramirez de Quiñones, qui fut juge résident dans le procÚs de Pérez de Robles, prit sa succession. Il reçut le titre de corregidor de Panama et de Nombre de Dios, sous l'autorité de l'Audience des Confins. En 1563, la Couronne d'Espagne ordonne le transfert de l'Audiencia à Panama, fermant celle du Guatemala. Les tùches de transfert ont été à la charge de Lope García de Castro. L'Audiencia a été réinstallée le 15 mai 1565. Manuel Barrios de San Millån fut nommé président provisoire, jusqu'à l'arrivée du titulaire, Alonso Aryennes de Maldonado. La juridiction de l'Audiencia de Panama s'étendait du port de Buenaventura (Colombie) jusqu'au golfe de Fonseca (Nicaragua). Elle sera de nouveau dissoute en 1718, à cause de la mauvaise conduite de ses membres.

En 1621, le pays est secoué par un tremblement de terre qui détruisit la capitale.

L'isthme resta sous l'autoritĂ© de la vice-royautĂ© du PĂ©rou, ce qui provoqua des problĂšmes internes et une situation d'anarchie, puis conduit Ă  une nouvelle CĂ©dule Royale (21 juillet 1722), qui rĂ©tablit l'Audiencia. Finalement, par CĂ©dule Royale du 20 juin 1751, Ă©tant donnĂ© les problĂšmes Ă©conomiques de la province de Tierra Firme. La dissolution dĂ©finitive de l'Audience Royale de Panama est ordonnĂ©e. On crĂ©e un gouvernement militaire dĂ©pendant de la vice-royautĂ© de Nouvelle-Grenade (Colombie) et de l'Audiencia de Santa FĂ© de Bogota. À cet effet, on crĂ©e Ă  Panama le Commandement GĂ©nĂ©ral de Tierra Firme.

L’encomienda

Pour récompenser les services rendus par les colons, la Couronne a établi le systÚme des repartimientos et de l'encomienda, dont le nom représente à lui seul un systÚme global. Il s'agissait de l'octroi par la Couronne des indiens vivants sur les terres conquises au colon qui les avait « libérées ». En fait, c'était une réactivation du systÚme du fief et du servage qui avait disparu en Europe.

Cette distribution Ă©tait viagĂšre et transmissible sur une gĂ©nĂ©ration ; l'encomendero avait l'obligation de veiller sur les indigĂšnes, de les Ă©vangĂ©liser et de veiller Ă  leur bien-ĂȘtre. De mĂȘme, il devait dĂ©fendre le territoire qu'on lui confiait. C'est Vasco NĂșñez de Balboa qui introduisit le systĂšme de l'encomienda au Panama. Le Gouverneur Pedrarias DĂĄvila a distribuĂ© Ă  lui seul 27 chĂšferies parmi ses proches. Au Panama, le bilan de l'encomienda est de 9 964 indigĂšnes rĂ©partis en 83 octrois.

L'Empereur Charles Quint ordonna l'abolition de ce systĂšme en raison des abus et vexations auxquelles ils exposaient les indigĂšnes grĂące Ă  l'intervention de BartolomĂ© de Las Casas. Le Gouverneur de Panama, Sancho de Clavijo, Ă©mit une provision dans laquelle il rĂ©itĂ©rait les dispositions prises dans une CĂ©dule royale de 1549, oĂč on ordonnait mettre en pratique les Lois nouvelles, supprimant ainsi le systĂšme de l'encomienda au Panama. Cette abolition engendra par la suite de graves problĂšmes dans les colonies, principalement au PĂ©rou.

À l'arrivĂ©e du vice-roi Blasco NĂșñez, qui devait Ă©tablir l'Audience de Lima et exĂ©cuter la CĂ©dule royale d'abolition, Gonzalo Pizarro, le frĂšre de Francisco, dirigea le soulĂšvement des encomenderos contre la Couronne. Il s'agissait visiblement de soustraire le territoire du PĂ©rou Ă  l'autoritĂ© royale. CapturĂ© par les rebelles, le vice roi parvint Ă  s'Ă©chapper et Ă  se rĂ©fugier dans l'isthme, d'oĂč il organisa la rĂ©pression. Dans la guerre qui s'ensuivit, le contrĂŽle de l'isthme fut le principal enjeu stratĂ©gique dans la mesure oĂč il reprĂ©sentait la base logistique des royalistes, d'oĂč ils recevaient leurs renforts.

En 1671, le chef pirate Henry Morgan organise un raid sur Panama.

Les esclaves africains

Les premiers esclaves noirs sont arrivés à l'Isthme de Panama dans l'expédition du Gouverneur Diego de Nicuesa, ceux qui ont travaillé à édifier la colonie Nombre de Dios sur la cÎte Caraïbe.

De mĂȘme, quand Pedrarias DĂĄvila a fondĂ© la Ville de Panama le 15 aoĂ»t de 1519, il a utilisĂ© des esclaves noirs pour Ă©difier les premiers bĂątiments de cette derniĂšre. Quand la Couronne a sanctionnĂ© comme illĂ©gal le traitement des indigĂšnes comme esclaves, on a autorisĂ© le commerce d'esclaves noirs pour les remplacer dans les travaux, dans les propriĂ©tĂ©s et les mines. Panama devint un centre de distribution de la Traite.

Toutefois, par les caractéristiques commerciales de l'Isthme, les esclaves noirs ont été utilisés principalement pour le transport des marchandises qui passaient par le Camino Real ou le Chemin de Croisements.

Il est difficile d'indiquer et d'identifier les lieux d'origine des esclaves noirs Ă  Panama pendant l'Ă©poque coloniale. Certains historiens pensent qu’ils venaient de GuinĂ©e, d'autres du nord de l'Angola et du sud du SĂ©nĂ©gal. À cause de la cruautĂ© avec laquelle ils Ă©taient traitĂ©s, les esclaves s’enfuyaient et se cachaient dans les forĂȘts, ils recevaient le nom de Cimarrons. Ces derniers menĂšrent plusieurs attaques contre les autoritĂ©s coloniales. Ils attaquaient les routes du Panama, ce qui mit en grave danger le transport et la communication entre les deux ocĂ©ans. En 1548, se produit une fuite massive d'esclaves noirs qui s’organisent en royaume avec, Ă  leur tĂȘte, Bayano Ier.

Un autre royaume fut créé en 1549, lequel était dirigé par Felipillo Ier, dans le Golfe de San Miguel. Les autorités coloniales engagent alors le capitaine Francisco Carreño (es), pour combattre les cimarrones.

On a chargĂ© le capitaine Gil SĂĄnchez du commandement d'un contingent visant le village de Chepo, oĂč on trouvait Bayano. Les cimarrones ont activement collaborĂ© comme guides des pirates et corsaires qui sont arrivĂ©s Ă  Panama pendant l'Ă©poque coloniale.

Au Panama, on a officiellement maintenu l'esclavage des noirs jusqu'Ă  la pĂ©riode dite DĂ©partementale, c'est-Ă -dire, pendant l'Ă©poque oĂč Panama a Ă©tĂ© uni Ă  la Grande Colombie. Le GĂ©nĂ©ral JosĂ© Hilario LĂłpez ValdĂ©s, PrĂ©sident de la RĂ©publique de Nouvelle-Grenade (Colombie) a fait voter, le 21 mars 1851, la loi qui a aboli l'esclavage.

Les guerres d'indépendance

Au dĂ©but du XIXe siĂšcle, les guerres napolĂ©oniennes font rage en Europe. En 1805, l'Espagne, alliĂ©e de l'Empire français, subit la rude dĂ©faite de Trafalgar et, privĂ©e de flotte, perd tout contact avec ses colonies. En 1807, le Portugal refusant d'appliquer le blocus continental, NapolĂ©on dĂ©cide d'envoyer ses troupes dans la pĂ©ninsule, officiellement pour envahir le Portugal qui reprĂ©sente une faille notable dans son dispositif destinĂ© Ă  asphyxier l'Angleterre. L'invasion française dĂ©stabilise la Couronne espagnole, provoquant une guerre de succession entre Charles IV et son fils Ferdinand en 1808. L'empereur français en profite pour nommer son frĂšre Joseph Bonaparte sur le trĂŽne. Ces manƓuvres politiques et la guerre qui s'ensuit font vaciller l'autoritĂ© de la puissance coloniale, ce qui laisse la possibilitĂ© aux colonies d'AmĂ©rique de s'Ă©manciper.

L'isthme de Panama est alors constitué de deux provinces, celle de Panama et celle de Veragua. Bien qu'invitées à participer aux juntes de Quito, Santa Fe ou CarthagÚne afin d'adhérer au mouvement indépendantiste qui se forme à partir de 1810, elles refusent et restent loyales à l'Espagne[7].

Acte d'indépendance du Panama, .

Le a lieu le CongrĂšs d'Angostura, Ă  Angostura (aujourd'hui Ciudad BolĂ­var, dans l'est du Venezuela), inaugurĂ© par SimĂłn BolĂ­var. Vingt-six dĂ©lĂ©guĂ©s sont prĂ©sents reprĂ©sentant le Venezuela et la Nouvelle-Grenade (aujourd'hui la Colombie). Selon le souhait de BolĂ­var exprimĂ© dans sa Lettre de JamaĂŻque, ceux-ci sont amenĂ©s Ă  se regrouper au sein d'un vaste État, la RĂ©publique de Colombie, dont les frontiĂšres reposeraient sur le principe de l'Uti possidetis juris[8].

En 1819, la Nouvelle-Grenade est libĂ©rĂ©e par l'armĂ©e du Libertador SimĂłn BolĂ­var. À partir du et jusqu'au 3 octobre de la mĂȘme annĂ©e se rĂ©unit le CongrĂšs de CĂșcuta, assemblĂ©e constituante destinĂ©e Ă  donner vie Ă  ce projet[9]. InitiĂ© par Antonio Nariño[10], le CongrĂšs de CĂșcuta voit la participation de SimĂłn BolĂ­var, de Francisco de Paula Santander et d'autres personnages importants de l'indĂ©pendance. C'est dans le temple historique de CĂșcuta qu'est adoptĂ©e la constitution de CĂșcuta, acte de naissance de la Grande Colombie (alors simplement appelĂ©e « RĂ©publique de Colombie ») constituĂ©e de la Nouvelle-Grenade et du Venezuela[11]. BolĂ­var en est dĂ©signĂ© prĂ©sident et Santander vice-prĂ©sident.

Le , la ville de La Villa de Los Santos se dĂ©clare indĂ©pendante de l'Espagne (es). Cette premiĂšre dĂ©claration d'indĂ©pendance prĂ©cipite l'indĂ©pendance de la totalitĂ© de l'isthme. Le la province de Panama proclame son indĂ©pendance vis-Ă -vis de l'Espagne[12] et dĂ©cide de rejoindre la Grande Colombie. Elle est imitĂ©e le 1er dĂ©cembre de la mĂȘme annĂ©e par la province de Veragua[13], qui correspond alors Ă  la moitiĂ© occidentale de l'actuel Panama. L'isthme est alors intĂ©grĂ© au dĂ©partement de Cundinamarca, la partie centrale de la Grande Colombie.

La période colombienne

La Grande Colombie

De 1821, lors de son incorporation à la Grande Colombie, jusqu'en 1824, lors du redécoupage politico-administratif de celle-ci, l'isthme de Panama reste divisé en deux provinces, Panama à l'est et Veragua à l'ouest. Elles font alors partie du département de Cundinamarca regroupant tout le territoire des actuels pays de Colombie et Panama.

Carte de la Grande Colombie (1824-1830).

La Ley de DivisiĂłn Territorial de la RepĂșblica de Colombia du modifie en profondeur l'organisation du pays. À cette occasion les deux provinces de l'isthme sont regroupĂ©es au sein du dĂ©partement de l'Isthme, lui-mĂȘme faisant partie du District de Nouvelle-Grenade, ou "du Centre".

Le pays est de facto dirigĂ© par le vice-prĂ©sident Francisco de Paula Santander. En effet, BolĂ­var continue la lutte contre l'Espagne au PĂ©rou et en Bolivie[14] au cĂŽtĂ© de l'autre hĂ©ros de l'indĂ©pendance de l'AmĂ©rique du Sud espagnole, l'Argentin JosĂ© de San MartĂ­n qui a proclamĂ© l'indĂ©pendance du PĂ©rou le [15]. L'armĂ©e royaliste rĂ©siste jusqu'Ă  sa dĂ©faite lors de la bataille d'Ayacucho, la [16], aprĂšs quoi BolĂ­var prĂ©side le nouvel État pĂ©ruvien[14].

Durant l'absence de BolĂ­var, des tensions apparaissent au sein de la Grande Colombie, immense territoire regroupant des rĂ©gions fort disparates. Mises de cĂŽtĂ© lors de la lutte contre les royalistes, les divergences d'ordre idĂ©ologique qui Ă©taient apparues lors des premiĂšres indĂ©pendances colombiennes renaissent. Les partisans de Santander plaident pour un État plus fĂ©dĂ©ral et laĂŻc tandis que les partisans de BolĂ­var soutiennent l'idĂ©e initiale de BolĂ­var d'un Ă©tat centralisĂ© et catholique. En plus de ces dĂ©saccords, des vellĂ©itĂ©s d'indĂ©pendance se font sentir, notamment au Venezuela oĂč la rĂ©volution sĂ©paratiste, appelĂ©e La Cosiata et dirigĂ©e par le gĂ©nĂ©ral JosĂ© Antonio PĂĄez, pousse les municipalitĂ©s de Caracas et Valencia Ă  ignorer l'autoritĂ© du gouvernement central et demande une rĂ©forme de la constitution de 1821[17].

Le , BolĂ­var quitte le PĂ©rou (oĂč il ne reviendra plus) pour la Colombie et y trouve donc une situation explosive. Un premier congrĂšs est organisĂ© en 1827 afin de rĂ©flĂ©chir au futur de la constitution. ConsidĂ©rant qu'elle est la cause des maux de la RĂ©publique, celui-ci dĂ©cide de convoquer une convention de tous les reprĂ©sentants de toutes les provinces du pays pour le dans la ville d'Ocaña[18]. Mais la convention d'Ocaña est un Ă©chec, n'aboutissant Ă  aucun accord. Aussi, le , SimĂłn BolĂ­var adopte le dĂ©cret organique qu'il a appelĂ© « loi fondamentale » et par lequel il abolit la Constitution de CĂșcuta et assume la dictature[18].

Face Ă  l'impasse institutionnelle oĂč se trouve la Grande Colombie, cette dĂ©cision est plutĂŽt bien accueillie au dĂ©but, mais le gouvernement de BolĂ­var depuis son retour s'avĂšre n'ĂȘtre qu'une suite d'improvisations qui aboutissent Ă  rendre le Libertador encore plus impopulaire que Santander[M 1]. Le , une tentative de coup d'État manquĂ©e aboutit Ă  l'exĂ©cution de l'amiral Padilla et l'exil de Santander qui part pour l'Europe.

Ajoutant encore un peu plus d'instabilité, du au , la Grande Colombie est en guerre avec le Pérou, celui-ci revendiquant des territoires au sud. L'affrontement se termine sur un statu quo ante bellum.

Le , le district du Venezuela fait officiellement sĂ©cession. Le , BolĂ­var convoque le CongrĂšs Admirable afin de trouver une solution Ă  la crise institutionnelle, mais celui-ci ne peut Ă©viter la sĂ©cession du Venezuela. La santĂ© de BolĂ­var, qui souffre de tuberculose, se dĂ©tĂ©riore rapidement et le il donne sa dĂ©mission. Domingo Caicedo devient prĂ©sident par intĂ©rim. Le , le district de Quito dĂ©clare Ă  son tour son indĂ©pendance et devient l'Équateur, avec Ă  sa tĂȘte le gĂ©nĂ©ral vĂ©nĂ©zuĂ©lien Juan JosĂ© Flores.

Au Panama, le général José Domingo Espinar déclare l'indépendance du département en septembre 1830, ce qui reçoit la désapprobation de Bolívar, qui s'éteint le dans la quinta de San Pedro Alejandrino, à Santa Marta. Le a lieu la convention d'Apulo qui place ce qui reste de la Grande Colombie sous la vice-présidence provisoire de Domingo Caicedo. Espinar est vaincu en juillet 1831 par le général Juan Eligio Alzuru, qui entame à son tour une carriÚre de dictateur. Le contrÎle de l'isthme est finalement retrouvé par les autorités de Bogotå en août 1831, lorsqu'Alzuru est vaincu par les troupes du général Tomås Herrera.

Le , le pays devient une rĂ©publique appelĂ©e RĂ©publique de Nouvelle-Grenade (espagnol : RepĂșblica de la Nueva Granada), dont les provinces de Panama et Veragua font partie.

La RĂ©publique de Nouvelle-Grenade

Le traitĂ© Mallarino-Bidlack, signĂ© en 1846 entre les gouvernements colombien et amĂ©ricain, autorise l’intervention militaire des « marines » dans l’isthme de Panama afin de rĂ©primer les rĂ©voltes sociales. Quatorze interventions militaires amĂ©ricaines auront lieu entre 1850 et 1902[19]. L'Ă©meute de la pastĂšque, en 1856, illustre les tensions de l'Ă©poque entre AmĂ©ricains et autochtones.

Le , l'État fĂ©dĂ©ral de Panama est crĂ©Ă©[20], fĂ©dĂ©rĂ© Ă  la Nouvelle Grenade. Les autres provinces nĂ©o-grenadines sont Ă©galement regroupĂ©es en États fĂ©dĂ©raux, donnant naissance Ă  une toute nouvelle forme d'organisation Ă  tendance fĂ©dĂ©rale. Celle-ci est actĂ©e lors de l'adoption d'un changement constitutionnel en 1858 qui crĂ©e la ConfĂ©dĂ©ration grenadine[21].

La Guerre des Mille Jours et l'indépendance du Panama

Le 1er janvier 1880, le Français Ferdinand de Lesseps, commence les travaux du Canal de Panama, mais abandonne à la suite de pertes humaines dues à de trÚs nombreuses fiÚvres tropicales et à des pertes financiÚres gigantesques. Cette construction donna lieu, en France, à un scandale politico-financier, le Scandale de Panama.

Le projet avait aussitĂŽt rencontrĂ© aussitĂŽt l'opposition des États-Unis ; le prĂ©sident Rutherford Birchard Hayes rendant public son dĂ©saccord concernant le contrat franco-colombien : « Notre intĂ©rĂȘt commercial est supĂ©rieur Ă  celui de tous les autres pays, de mĂȘme que les relations du canal avec notre pouvoir et notre prospĂ©ritĂ© en tant que Nation. (...) Les États-Unis ont le droit et le devoir d’affirmer et de maintenir leur autoritĂ© d’intervention sur n’importe quel canal interocĂ©anique qui traverse l’isthme »[22].

Le 29 juin 1902, le CongrĂšs ratifie la dĂ©cision du prĂ©sident Theodore Roosevelt de reprendre les travaux. Toutefois, la Colombie refuse de concĂ©der aux États-Unis une souverainetĂ© quasi-totale sur le futur canal et la rĂ©gion environnante. L’ambassadeur amĂ©ricain Ă  BogotĂĄ avertit que si le traitĂ© n’était pas ratifiĂ©, « les relations amicales entre les deux pays s’en verraient si gravement compromises que le CongrĂšs des États-Unis pourrait prendre des mesures que regretterait tout ami de la Colombie ». Le 3 novembre, dans le contexte de la guerre des mille jours en Colombie, les sĂ©paratistes panamĂ©ens se dĂ©clarent indĂ©pendants de la Colombie, avec le soutien des troupes amĂ©ricaines. Les navires de guerre amĂ©ricains ancrĂ©s Ă  l’abord des cĂŽtes interdisent toute intervention de l’armĂ©e colombienne[22].

La république de Panama

Le , Ă  New York, est signĂ© le traitĂ© Hay-Bunau-Varilla, faisant du PanamĂĄ un protectorat. Les États-Unis reçoivent une frange de 10 milles (16,09 km) de large des deux cĂŽtĂ©s du canal, pour sa construction et son exploitation Ă  perpĂ©tuitĂ©. La souverainetĂ© dans la zone du canal leur revient, le PanamĂĄ Ă©tant « exclu de l’exercice de tels droits souverains, pouvoir ou autoritĂ© ». On leur concĂšde aussi un droit d’ingĂ©rence permanent dans les affaires intĂ©rieures panamĂ©ennes, et la possibilitĂ© d’intervenir militairement en cas d’atteinte Ă  l’ordre public. Cette clause prend force de loi lorsqu’on l’inclut dans la Constitution, promulguĂ©e le 20 fĂ©vrier 1904, et rĂ©digĂ©e avec la participation du consul amĂ©ricain William I. Buchanan. Le traitĂ© Victoria-VĂ©lez signĂ© le dĂ©limite la frontiĂšre terrestre entre la Colombie et le Panama. Le traitĂ© LiĂ©vano-Boyd dĂ©limite la frontiĂšre maritime entre la Colombie et le Panama[22].

Les États-Unis installent un complexe militaire constituĂ© de quatorze bases. Dans l'Ă©cole des AmĂ©riques, ils forment Ă  la contre-insurrection et Ă  l'anticommunisme des officiers latino-amĂ©ricains dont bon nombre seront impliquĂ©s dans des coups d’État ou prendront la tĂȘte de dictatures (Hugo Banzer, Luis GarcĂ­a Meza Tejada, Leopoldo Galtieri, etc). AdministrĂ© par le secrĂ©taire Ă  la DĂ©fense, que reprĂ©sente un gouverneur militaire Ă©galement prĂ©sident de la compagnie du canal, cet État dans l’État est entiĂšrement sous la juridiction des États-Unis. Environ douze mille soldats et cinquante mille civils y vivent. En janvier 1964, un groupe d'Ă©tudiants panamĂ©ens tente de hisser un drapeau panamĂ©en dans ce qu'ils considĂšrent ĂȘtre un « territoire occupĂ© » : interceptĂ©s, violemment battus et leur drapeau ostensiblement piĂ©tinĂ© par des civils du complexe, ils Ă©chouent dans leur entreprise mais la rĂ©action des Nord-AmĂ©ricains choque la population. Des manifestations d'indignation tournent Ă  l’émeute Ă  proximitĂ© du complexe et le gĂ©nĂ©ral Andrew P. O'Meara, chef du Southern Command, fait dĂ©ployer des troupes contre les manifestants. L’affrontement fait vingt-deux morts parmi les manifestants et environ cinq cents blessĂ©s[23].

Inquiet de la prĂ©caritĂ© de la situation, Henry Kissinger avertit qu'« un blocage des nĂ©gociations avec l’État panamĂ©en mĂšnera fatalement au surgissement d'une guerre de guĂ©rilla face Ă  laquelle la voie d'eau sera trĂšs vulnĂ©rable. » En 1965, Lyndon Johnson annonce son intention d'ouvrir prochainement des pourparlers afin de signer un traitĂ© plus Ă©quitable. Il ne les commencera pourtant jamais[23].

Omar Torrijos

Le 11 octobre 1968, des militaires menĂ©s par le colonel Omar Torrijos renversent Arnulfo Arias, proche de l'oligarchie terrienne et des secteurs Ă©troitement liĂ©s Ă  Washington. Devenu gĂ©nĂ©ral, Omar Torrijos gouverne le pays sans toutefois ĂȘtre officiellement prĂ©sident de la RĂ©publique, et justifie ce coup de force : « Le gouvernement Ă©tait un mariage entre les forces armĂ©es, l'oligarchie et les mauvais prĂȘtres ; le militaire portait son fusil pour faire taire le peuple et interdire "Ă  la canaille" de manquer de respect Ă  la classe gouvernante. » Expliquant que sa rĂ©volution agit « pour les dĂ©munis, non pour les possĂ©dants », il fait adopter une nouvelle Constitution, une rĂ©forme agraire, un Code du travail et reconnaĂźt les syndicats ouvriers et paysans[23].

Souverainiste, Torrijos fait expulser quatre cents Peace Corps, envoyĂ©s par Kennedy en 1961. Il affronte par ailleurs les multinationales nord-amĂ©ricaines, exigeant d'elles des hausses de salaires pour les travailleurs et redistribue 180 000 hectares de terres non cultivĂ©es. En fĂ©vrier 1974, sur le modĂšle de l'OPEP pour le pĂ©trole, il tente de constituer l'Union des pays exportateurs de bananes avec les autres États d’AmĂ©rique centrale pour rĂ©pondre Ă  l'influence de ces multinationales, mais n'obtient pas leur soutien. Sa politique favorise l'Ă©mergence d'une classe moyenne et la reprĂ©sentation des communautĂ©s indigĂšnes[23].

En politique internationale, Torrijos soutient le prĂ©sident chilien Salvador Allende et accueille des rĂ©fugiĂ©s aprĂšs le putsch d'Augusto Pinochet. Il aide les guĂ©rilleros sandinistes au Nicaragua et d'autres forces rebelles au Salvador, au Guatemala, et renoue les relations diplomatiques avec Cuba. Admirateur du dirigeant yougoslave Josip Broz Tito et inspirĂ© par la nationalisation du canal de Suez par Gamal Abdel Nasser, il se lance dans un combat contre les États-Unis pour obtenir la souverainetĂ© du Panama. En 1973, devant l'absence de progrĂšs dans les nĂ©gociations avec Washington, il tente de faire intervenir l'ONU : « Nous n'avons jamais Ă©tĂ©, ne sommes pas et ne serons jamais un État associĂ©, une colonie ou un protectorat, et nous n'entendons pas ajouter une Ă©toile au drapeau des États-Unis ». Mis en minoritĂ©, Washington appose son veto Ă  la rĂ©solution adoptĂ©e. Finalement, en 1977, il signe le traitĂ© Torrijos-Carter, avec Jimmy Carter, permettant Ă  Panama de retrouver la souverainetĂ© sur le canal de Panama[23].

Omar Torrijos meurt en 1981 dans un accident d'avion. Certains y verront un attentat orchestré par la CIA, Reagan étant farouchement hostile à la souveraineté panaméenne sur le canal de Panama.

Manuel Antonio Noriega

En 1984, Manuel Noriega, ex-agent de la CIA, devient gĂ©nĂ©ral des Forces armĂ©es du Panama, et entre 1987 et 1989 il est considĂ©rĂ© d'une certaine façon comme le chef d'État. MalgrĂ© une opposition massive civile, celui-ci tenait les rĂȘnes du pouvoir

AprĂšs que les Ă©lections prĂ©sidentielles de 1989 furent annulĂ©es, les États-Unis envahissent le pays en dĂ©cembre 1989, pour renverser Noriega, au cours de l'opĂ©ration nommĂ©e opĂ©ration Just Cause, selon des chiffres officiels, 650 personnes sont mortes entre civils et militaires pendant l'opĂ©ration. Guillermo Endara, son concurrent Ă  ces Ă©lections, devient prĂ©sident du pays.

Selon La Commission pour la défense des droits de l'homme en Amérique centrale (CODEHUCA), l'invasion du Panama a provoqué la mort de 2 500 à 3 500 personnes[24].

Human Rights Watch a estimé beaucoup moins à 300 morts civils lors de l'invasion, tandis que les Nations unies ont estimé à 500 morts civils[25] - [26]. Les chiffres estimant des milliers de victimes civiles ont été largement rejetés au Panama[27]. Human Rights Watch a décrit la réaction de la population civile panaméenne à l'invasion comme "généralement sympathique"[28].

Période récente

SuspectĂ© de corruption et confrontĂ© Ă  une dĂ©tĂ©rioration de la situation Ă©conomique, le prĂ©sident Guillermo Endara Galimany, au pouvoir depuis 1989, devient trĂšs impopulaire, ce qui conduit Ă  manifestations en mai et juin 1991 et Ă  une grĂšve des enseignants en octobre 1993. Les ex-partis noriĂ©guistes remportent les Ă©lections lĂ©gislatives partielles de 1991. Ernesto PĂ©rez-Balladares, candidat du Parti rĂ©volutionnaire dĂ©mocratique (qui avait soutenu le rĂ©gime de Manuel Noriega) est Ă©lu prĂ©sident en 1994. Cette mĂȘme annĂ©e, deux des principaux dirigeants de la junte haĂŻtienne, Raoul CĂ©dras et Philippe Biamby, se rĂ©fugient au Panama. En 1999, Mireya Moscoso, la veuve de l'ancien prĂ©sident Arnulfo Arias, est Ă©lue Ă  la prĂ©sidence. Son gouvernement est toutefois rapidement discrĂ©ditĂ© par les affaires[29].

Le , par le traitĂ© de Torrijos-Carter de 1977, les États-Unis redonnĂšrent le contrĂŽle du canal au Panama.

Dans les annĂ©es 2000, le pays s'est trouvĂ© impliquĂ© dans le conflit armĂ© colombien. La prĂ©sident Mireya Moscoso a remis en cause la tradition de neutralitĂ© de son pays face Ă  ce conflit en intensifiant sa coopĂ©ration avec les autoritĂ©s colombiennes, notamment dans le cadre du Plan Colombie impulsĂ© par le gouvernement amĂ©ricain. Cette politique a conduit des organisations de dĂ©fense des droits de l'homme et le Haut Commissariat des Nations unies pour les rĂ©fugiĂ©s Ă  dĂ©noncer les dĂ©portations, souvent de maniĂšre violente, de rĂ©fugiĂ©s colombiens vers la Colombie. Les autoritĂ©s colombiennes les rĂ©installent rĂ©guliĂšrement dans des zones dominĂ©es par les paramilitaires d’extrĂȘme droite, sans se prĂ©occuper de leur sĂ©curitĂ©[30].

Le , le nouveau prĂ©sident MartĂ­n Torrijos (coalition centriste « Parti nouvelle »), fils de l'ex-chef d'État Omar Torrijos est Ă©lu avec prĂšs de 20 points d'avance sur l'ex-prĂ©sident (1989-1994) Guillermo Endara (Parti SolidaritĂ©, droite), avec 80 % de participation aux Ă©lections.

Le , un tremblement de terre de magnitude 6,2 s'est produit Ă  la frontiĂšre entre le Panama et le Costa Rica[31].

Références

Références bibliographiques

  • Jean-Pierre Minaudier, Histoire de la Colombie de la conquĂȘte Ă  nos jours, Paris, L'Harmattan, coll. « Horizons AmĂ©riques latines », , 363 p. (ISBN 2-7384-4334-6, lire en ligne)
  1. Minaudier 1997, p. 121

      Autres références

      1. (es) Juan Bautista Sosa, Compendio de historia de Panamá — Época del descubrimiento y la conquista : Capitulo I, Bibliothùque Luis Ángel Arango, (lire en ligne)
      2. (es) Juan Bautista Sosa, Compendio de historia de Panamá — Época del descubrimiento y la conquista : Capitulo II, Bibliothùque Luis Ángel Arango, (lire en ligne)
      3. (fr) Samuel Eliot Morison, Christophe Colomb, Amiral de la Mer océane, Neuilly-sur-Seine, Saint-Clair, , 422 p., p. 358-360
      4. (es) Soledad Acosta de Samper, BiografĂ­as de hombres ilustres Ăł notables, relativas ĂĄ la Ă©poca del descubrimiento, conquista y colonizaciĂłn de la parte de AmĂ©rica denominada actualmente ee. uu. de Colombia — Vasco NĂșñez de Balboa
      5. (es) Juan Bautista Sosa, Compendio de historia de Panamá — Epoca de la colonia : Capitulo I, Bibliothùque Luis Ángel Arango, (lire en ligne)
      6. RecopilaciĂłn de las Leyes de Indias (es), Titulo Quince. De las Audiencias y Chancillerias Reales de las Indias, (lire en ligne)
      7. (es) Compendio de historia de PanamĂĄ, Movimientos polĂ­ticos en las colonias, Diario de PanamĂĄ, (lire en ligne)
      8. (es) Congreso de Angostura : libro de actas, BibliothÚque Luis Ángel Arango
      9. (es) Actas del congreso de Cucuta, 1821, sur www.bdigital.unal.edu.co
      10. Academia de Historia de Norte de Santander - Plaque commĂ©morative du CongrĂšs de CĂșcuta - Novembre 1982
      11. (es) Constitution de CĂșcuta, sur modern-constitutions.de
      12. (es) Acta de independencia del istmo de Panama de 1821
      13. (es) Acta de Independencia de Santiago de Veraguas 1 de diciembre de 1821 « Copie archivée » (version du 27 décembre 2011 sur Internet Archive)
      14. (es) ExpediciĂłn Libertadora Del PerĂș « Copie archivĂ©e » (version du 7 octobre 2012 sur Internet Archive), Historia Militar El Gran CapitĂĄn (enciclopedia.elgrancapitan.org)
      15. (es) Gobierno de don Jose de San Martin « Copie archivée » (version du 7 août 2013 sur Internet Archive), www.gobiernosdelperu.com
      16. (es) Gonzalo Bulnes, Ultimas campañas de la independencia del PerĂș (1822-1826)
      17. (es) Estalla movimiento de « La Cosiata », www.pgr.gob.ve
      18. (es) Convención de Ocaña, sur www.ufpso.edu.co
      19. La Colombie, Ă©ternelle tĂȘte de pont des États-Unis en AmĂ©rique du Sud, Le Vent se lĂšve, Jhair Arturo Hernandez, 21 juin 2020
      20. (es) « Constitución política del Estado de Panamå de 1855 », BibliothÚque nationale du Panama
      21. (es) ConstituciĂłn para la ConfederaciĂłn Granadina de 1858, BibliothĂšque virtuelle Miguel de CervantĂšs
      22. Hernando Calvo Ospina, « PanamĂĄ, un canal Ă  tout prix », Le Monde diplomatique,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
      23. Maurice Lemoine, Les enfants cachĂ©s du gĂ©nĂ©ral Pinochet. PrĂ©cis de coups d’État modernes et autres tentatives de dĂ©stabilisation, Don Quichotte, , p. 305-311
      24. (en) Central American Human Rights Commission, Report of Joint CODEHUCA–CONADEHUPA delegation, january–february 1990.
      25. John Lindsay-Poland, Emperors in the Jungle: The Hidden History of the U.S. in Panama, Duke University Press, (ISBN 0-8223-3098-9, lire en ligne), 118
      26. (en) « Manuel Noriega, Dictator Ousted by U.S. in Panama, Dies at 83 », The New York Times,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
      27. Larry Rohter, « Panama and U.S. Strive To Settle on Death Toll », The New York Times,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
      28. Human Rights Watch World Report 1989, Human Rights Watch, , « Panama »
      29. Les Essentiels d'Universalis volume 23, Le Monde, pages 417-419, 2009
      30. Aux frontiÚres du plan Colombie, Hernando Calvo Ospina, février 2005
      31. Puissant séisme de magnitude 6,2 entre le Panama et le Costa Rica

      Voir aussi

      Bibliographie

      Liens externes

      Articles connexes

      Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplĂ©mentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimĂ©dias.