Bolivarisme
Le bolivarisme est le nom d'un courant politique et des mouvements de pensĂ©e proche du panamĂ©ricanisme qui se fonde sur les idĂ©es de luttes anticoloniales du libĂ©rateur SimĂłn BolĂvar qui contribua de façon dĂ©cisive Ă l’émancipation des colonies espagnoles d’AmĂ©rique du Sud. Les personnes ou les idĂ©es regroupĂ©es sous le terme « bolivarianisme » expriment gĂ©nĂ©ralement une forme de nationalisme qui cherche Ă empĂŞcher la domination des pays Ă©trangers sur les nations bolivariennes.
Origines
Le précepteur du futur libérateur lui avait fait lire John Locke et Jean-Jacques Rousseau (en particulier l’âme sensible, qui explique la question des conditions de l’égalité entre les hommes, qui est un prologue des révolutions futures[1]). Il est épris de justice sociale, de liberté et d'égalité des droits, et surtout l'indépendance et d'unité nationale[2] - [3].
Les mouvements et la pensée bolivarienne existent en Amérique du Sud depuis le XIXe siècle, avec des accents et des formes différentes.
Le 6 août 1813, Bolivar entre dans Caracas et est sacré « Libertador[2]. Il ambitionne alors l’unification de l’Amérique latine, une ambition qui lui a survécu à travers le bolivarisme[4] ».
Ce courant politique est né à partir du Congrès de Panama qui s'est tenu en 1826 qui avait pour but de réunir les ambassades de pays sud américains libres (Mexique, Guatemala, Colombie, Chili, Pérou, Argentine…) dans ce que Bolivar lui-même appelait l'isthme de Panama (Panama actuel)[5]. Ce Congrès a également réuni un agent diplomatique qui représentait l'Empire Britannique[6].
Les bolivaristes se rĂ©clament de certains prĂ©ceptes formulĂ©s par SimĂłn BolĂvar dans la Lettre de JamaĂŻque, le Discours d'Angostura, Le Manifeste de Carthagène et d'autre Ă©crits. Plusieurs fois invoquĂ© en AmĂ©rique du Sud, il l'est Ă nouveau depuis la fin du XXe siècle.
L'historien allemand Michael Zeuske identifie JosĂ© Antonio Páez comme l'un des premiers militaires Ă utiliser et Ă vĂ©nĂ©rer clairement BolĂvar. Jusqu'au dĂ©but des annĂ©es 1840, une partie du congrès vĂ©nĂ©zuĂ©lien avait refusĂ© d'adorer Bolivar. Páez et ses partisans rĂ©ussirent finalement en avril 1842 Ă faire approuver par dĂ©cret la glorification de SimĂłn BolĂvar. Páez a Ă©galement promu l'exhumation du cadavre de BolĂvar de Santa Marta et son enterrement en grande pompe Ă Caracas[7].
SimĂłn BolĂvar, SimĂłn Rodriguez et Ezequiel Zamora sont les personnalitĂ©s de la constitution idĂ©ologique du mouvement bolivarien[3].
Interprétations du bolivarisme
C'est surtout Hugo Chávez, président du Venezuela de 1999 à 2013, qui reprend les idées du « Libertador » et prône le bolivarisme[8] dans le but de créer une véritable communauté de valeurs pour contrecarrer l’impérialisme américain[9].
Même si Chávez a également été influencé par les écrits de l'historien et anthropologue marxiste vénézuélien Federico Brito Figueroa[10], on peut retrouver les principaux traits du courant initial dans sa politique : une volonté d'indépendance plus grande vis-à -vis des puissances dominantes (des États-Unis en l'occurrence), mais aussi, comme Bolivar, des tentatives d'unification ou de rapprochement des ex-colonies lorsqu'il tente d'organiser les principales organisations régionales sud américaines[11].
C'est sa volonté d'apparaître comme le rassembleur des peuples dominés d'Amérique latine qui rapproche Chávez d'un « nouveau Bolivar ». Mais cette « appropriation » comme seul défenseur des idées de Simon Bolivar, est l'objet de contestations en Amérique Latine, notamment car Bolivar était issu de la très grande bourgeoisie vénézuélienne et son combat pour l'autonomie de l'Amérique du Sud ne se confondait aucunement avec une quête de justice sociale poussée. Ainsi sa famille possédait quelque 800 esclaves, qu'il a affranchis en 1816[12].
Selon Hugo Chavez, la révolution bolivarienne est un mouvement de masse pour mettre en place une « démocratie populaire participative », une indépendance économique du Venezuela, une distribution équitable des revenus et en finir avec la corruption du pays.
Les points centraux que la révolution bolivarienne adapte du bolivarisme à sa pratique sont[13] - [14] :
- autonomie nationale.
- Participation du peuple par le biais d'élections populaires, de référendums et d'autres moyens de démocratie participative.
- Ă©conomie autonome.
- Ethique du service au peuple.
- Répartition équitable des revenus pétroliers.
- Lutte contre la corruption et la pauvreté.
En dehors du Venezuela, il y a eu des présidents qui se sont déclarés bolivariens, parmi lesquels les présidents de la Bolivie Evo Morales, de Cuba Raúl Castro, de l'Équateur Rafael Correa et du Nicaragua Daniel Ortega. En Colombie, les idéaux du bolivarisme ont été réinterprétés vers le socialisme par des secteurs du Pôle Démocratique Alternatif et certains membres de la gauche du Parti Libéral Colombien comme Piedad Córdoba[15]. Les guérillas des Forces armées révolutionnaires de Colombie et de l’Armée de libération nationale se réclament du bolivarisme[16]. Les leaders de ce mouvement se reconnaissent dans une communauté de valeurs où la solidarité et la coopération ont représenté une alternative au néolibéralisme de ces pays dans les années 1980-1990[9].
Notes et références
- Evelyne Pieiller, « Les révolutions de Rousseau », sur Le Monde diplomatique, (consulté le )
- « Simon Bolivar, modèle paradoxal », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
- Maximiliano Durán, « La supuesta influencia de Rousseau en el pensamiento de SimĂłn RodrĂguez: la "tesis del Emilio" », Iberoamericana (2001-), vol. 11, no 42,‎ , p. 7–20 (ISSN 1577-3388, lire en ligne, consultĂ© le )
- Nils Solari, « De Bolivar aux Libertadors d'aujourd'hui. L'Amérique latine insoumise », sur Le Monde diplomatique, (consulté le )
- Dr J. M. Yepes, « Du projet de confédération perpétuelle de Bolivar à l'Organisation des Etats américains », sur Le Monde diplomatique, (consulté le )
- « Les Origines - Le Bolivarisme », sur sites.google.com (consulté le )
- (de) amerika21, « Michael Zeuske: "Kleine Geschichte Venezuelas" », sur amerika21, (consulté le )
- « Ministerio de la Cultura », sur www.mincultura.gob.ve (consulté le )
- « Le bolivarisme, fer de lance de l’intégration sud-américaine », sur L'Humanité, (consulté le )
- (es) Sergio Guerra Vilaboy, « Federico Brito Figueroa, precursor de la historiografĂa marxista venezolana », sur Informe Fracto, (consultĂ© le )
- Serge De Sousa, « Bolivar et le bolivarisme dans le discours d'Hugo Chávez (1999-2006) », América. Cahiers du CRICCAL, vol. 42, no 1,‎ , p. 103–115 (lire en ligne, consulté le )
- Nelly Schmidt, L'abolition de l'esclavage : cinq siècles de combats, XVIe – XXe siècles, Paris, Fayard, , 412 p. (ISBN 2-286-00995-3 et 978-2-286-00995-3, OCLC 470327726), p. 253
- (es) RevoluciĂłn BolivarianaCaricatura a favor de la victoria por parte de los seguidores de Chávez en el referĂ©ndum de 2004 Fecha:Siglo XX-Siglo XXIDescripciĂłn:La RevoluciĂłn Bolivariana de conjunto con la RevoluciĂłn cubana et ha sido uno de los procesos sociopolĂticos más profundos de la historia de nuestra regiĂłn Bajo la guĂa indiscutible de Hugo Chávez, « RevoluciĂłn bolivariana - EcuRed », sur www.ecured.cu (consultĂ© le )
- (es) JosĂ© A. Rangel A, « En Chávez está la IdeologĂa Bolivariana », sur Aporrea, (consultĂ© le )
- (es) VTV / YVKE Mundial, « Movimiento Bolivariano en Colombia », sur Aporrea (consulté le )
- (es) « Facción FARC pasa al clandestinaje como Movimiento Bolivariano por la Nueva Colombia (VIDEO) », sur Radio y Televisión Martà | RadioTelevisionMarti.com (consulté le )