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Fable de Venise

Fable de Venise (titre original italien : Favola di Venezia) est la 25e aventure de Corto Maltese. Écrite et dessinĂ©e par Hugo Pratt, elle se dĂ©roule du 10 au . La toile de fond en est la montĂ©e du fascisme en Italie, aprĂšs la PremiĂšre Guerre mondiale.

Fable de Venise
7e album de la série Corto Maltese
Corto : « C'est l'arsenal et les lions grecs dont Hipazia et Bepi Faliero m'ont parlĂ©... Â»(planche 17, case 9)
Corto : « C'est l'arsenal et les lions grecs dont Hipazia et Bepi Faliero m'ont parlĂ©... Â»
(planche 17, case 9)

Auteur Hugo Pratt
Dessin noir et blanc

Personnages principaux Corto Maltese
Gabriele D'Annunzio
Hipazia
Petit Pied d’argent
Louise Brookszowyc

Éditeur Casterman
Collection Les romans (À suivre)
PremiĂšre publication Drapeau de la France France : janvier 1981
ISBN 2-203-33405-3
Nb. de pages 80

Prépublication Drapeau de l'Italie Italie : Favola di Venezia,
hebdomadaire L’Europeo,
du n° 21-22, 3 juin 1977
au n° 51, 23 décembre 1977
Albums de la série

Sous la surveillance du dieu Abraxas, des loges maçonniques et des milices fascistes, Corto Maltese est sur la piste de la « Clavicule de Salomon Â». Tous les ingrĂ©dients d’un roman d'aventure sont prĂ©sents : une Ă©nigme, une Ă©meraude lĂ©gendaire, des femmes mystĂ©rieuses, des aristocrates dĂ©chus, des « Chemises noires », des loges maçonniques, des sociĂ©tĂ©s secrĂštes et les lieux magiques de Venise.
L'auteur apporte ici ses souvenirs de jeunesse et recrĂ©e un monde qui n'existe plus, composant une aventure qui finit dans un rĂȘve. « C’est le tĂ©moignage de mon amour pour Venise », disait-il[1].

Protagonistes

Pour son Ă©pisode, Pratt mĂȘle des personnages historiques avec des personnages fictifs, parfois inspirĂ©s de personnes rĂ©elles[1]:

Personnages historiques

Personnages de fiction

  • Raspoutine : apparaĂźt en songe sous l’apparence de Saud Khalula.
  • Petit Pied d’argent : vendeuse de graines, elle fait Ă©quipe avec Corto pour l’aider dans sa recherche.
  • Böeke : fils de Petit Pied d’argent, marin naĂŻf, secrĂštement amoureux de Hipazia.
  • Louise Brookszowyc : amie de Petit Pied d’argent, d'origine polonaise. Elle est plus connue sous le nom de « Belle de Milan »[alpha 4]. Partie par la suite pour l'Argentine, Corto partira Ă  son secours dans Tango.

Histoire en quatre chapitres

La Loge d’Hermùs

Abraxas, qui apparaßt sur un mur de la loge HermÚs Trismégiste et sur un de la demeure d'Hipazia

Poursuivi par la milice fasciste, Corto Maltese trouve refuge chez les francs-maçons. La nuit tombĂ©e, un de leurs membres, Bepi Faliero l’accompagne dans les rues de Venise. Chemin faisant, le Maltais lui fait savoir qu’il est dans la citĂ© pour chercher une Ă©meraude, appelĂ©e « Clavicule de Salomon ». Ils rencontrent alors un groupe de Chemises noires menĂ© par Stevani qui leur cherche noise. Passant par lĂ , le poĂšte Gabriele D'Annunzio intervient pour calmer le jeu.
Reprenant leur chemin, tous trois viennent Ă  parler de la philosophe nĂ©oplatonicienne, Hipazia et de l’écrivain Frederick Rolfe, dit le Baron Corvo. Voyant l’intĂ©rĂȘt de Corto Maltese pour ces deux personnages, Faliero l'invite Ă  rencontrer la philosophe. D’Annunzio, pour sa part, va tĂącher de le mettre en relation avec ce Stevani, car son pĂšre avait bien connu le Baron Corvo.

L’Énigme du Baron Corvo

TrĂŽne de saint Pierre, Basilique San Pietro di Castello

Bepi l’emmĂšne donc rencontrer Hipazia. Venant Ă  parler de l’émeraude magique, Corto rĂ©vĂšle que peu avant sa mort, le Baron lui a envoyĂ© une devinette : Le lion grec perd sa peau de serpent septentrional entre les brumes de Venise

Plus tard, Corto entre dans l’église de San Pietro di Castello examiner la chaire de l’apĂŽtre Simon Pierre dont le dossier est ornĂ© d’une stĂšle funĂ©raire. Ce sont les inscriptions arabes de cette pierre que le Baron Corvo voulait dĂ©chiffrer.
Il se rend ensuite jusqu’à l’arsenal pour examiner et relever les runes scandinaves gravĂ©es Ă  l’épaule du lion grec (ce qui correspond Ă  l'Ă©nigme) qui en garde l’entrĂ©e. Puis s’en va dans le « vieux ghetto », les soumettre Ă  son ami, le savant Melchisedech.
Le lendemain, pensant Ă  ce que lui a dit le poĂšte d’Annunzio au sujet du pĂšre de Stevani, il dĂ©cide de tenter de le voir malgrĂ© le temps pluvieux.
Bepi Faliero l’a devancĂ©. Il est dĂ©jĂ  chez Stevani pour lui rendre compte des recherches que fait Maltese. En lisant le journal du baron adressĂ© Ă  son pĂšre, Stevani raconte le pĂ©riple de l’émeraude dont la trace se perd finalement dans Venise.
En arrivant devant la maison, Corto entend deux dĂ©tonations. Il accourt Ă  l’intĂ©rieur et dĂ©couvre Stevani gisant blessĂ©. Les « Chemises noires » font irruption. Croyant le marin coupable, ils le poursuivent.
Dans la rue, deux carabiniers aperçoivent Corto qui s’enfuit sur les toits. Ils entrent dans la maison. Stevani innocente Corto Maltese. Alors qu’un des carabiniers s’élance vers le grenier, il est abattu d’une balle dans les escaliers.

L’Escalier des rencontres

Corto poursuit sa course sur les toits de la ville. Glissant sur des tuiles mouillĂ©es, il perd l’équilibre et tombe sur une terrasse
 RĂȘvant qu'il tombe vers le haut, il se retrouve au milieu de reflets d'eau formant des caractĂšres arabes et aperçoit une main de Fatima couverte de symboles des Gardes noires. Puis, il ouvre une sorte de lampe d'Aladin, d'oĂč sort Saud Khalula, sous les traits de son ami Raspoutine. Ce dernier, devenu libre, envisage de retrouver la clavicule dans la maison oĂč il l'avait cachĂ©. Mais il finit par se fĂącher et envoyer sa garde contre Corto, qui leur Ă©chappe en quittant ce rĂȘve.
Recueilli par Petit Pied d’argent et confiĂ© aux bons soins de Louise Brookszowyc, la « Belle de Milan », il se rĂ©veille au bout de trois jours. Elle lui rĂ©vĂšle que Stevani est hors de danger, qu’il l’a innocentĂ© mais refuse de rĂ©vĂ©ler le nom du coupable et que le journal du baron a Ă©tĂ© volĂ©. Pour couronner le tout, un des carabiniers a Ă©tĂ© abattu.
La nuit venue, Petit Pied d’argent, accompagnĂ©e de son fils Böeke, vient s’enquĂ©rir de la santé 
Maintenant sur pied, Corto se rend chez les francs-maçons pour s’entretenir de l’affaire Stevani avec le maĂźtre secret, qui n’est autre que Teone, le pĂšre d’Hipazia. Corto Maltese lui montre l’insigne maçonnique qu’il a trouvĂ© prĂšs du corps du milicien et qui le porte Ă  croire Ă  la culpabilitĂ© d’un des membres de leur institution.
Un maçon ne trahit pas ses frĂšres. Teone lui conseille de la dĂ©truire. De leur cĂŽtĂ©, ils se chargeront d’éliminer tous les soupçons qui pĂšsent sur lui.
Mais Corto ne veut pas s’en tenir là


Les Révélations de Saint-Marc

Dans ce dernier chapitre, notre hĂ©ros dĂ©couvre la cachette oĂč aurait Ă©tĂ© dissimulĂ©e l'Ă©meraude, Ă  « l'escalier des rencontres », dans la cour de la loge maçonnique. Mais au moment de l'ouvrir, il se fait attaquer par un des frĂšres, qui s'avĂšre ĂȘtre Bepi Faliero. Ce dernier, finalement neutralisĂ© et sur le point de mourir, confesse qu'il voulait se dĂ©barrasser de tous ceux cherchant la pierre, aidĂ© de sa complice Hipazia. Le marin se dĂ©cide Ă  ouvrir la cachette, mais il n'y trouve qu'une lettre de Corvo, datĂ©e du 1er avril, qui, comme lui, fut déçu de la trouver vide. Mais tout d'un coup, un incendie se dĂ©clenche. Hipazia, qui se croyait dans sa folie, la rĂ©incarnation de la philosophe Hipatia[alpha 3] et gardienne de la pierre, est coupable de tous les crimes et de toutes les trahisons. Elle mourra, assassinĂ©e par Stevani, qui a mis le feu aux lieux.

Une fois le drame passĂ©, Teone, le pĂšre d'Hipazia, finit Ă  l'hĂŽpital. Il avoue avoir entretenu la folie de sa fille pour la garder auprĂšs de lui, mais Ă  son grand regret, il ne fit qu'empirer son Ă©tat, ce qui conduisit Ă  sa perte. Le pauvre Böeke Quant Ă  Louise Brookszowyc, elle partira Ă  Buenos Aires, travailler pour l’association de la Warsavia[alpha 5].

Finalement, Corto Maltese dĂ©cide de retourner Ă  « l'escalier des rencontres » car c'est la nuit qui prĂ©cĂšde le 25 avril, jour de la saint-marc. Une lĂ©gende affirme que tous les ans Ă  ce moment-lĂ , on y fait d'Ă©tranges rencontres. En effet, le marin discute d'abord avec un puits de la cour, qui prĂ©tend ĂȘtre « Arlekin Batocio Â», soldat Ă  Kandia et masque vĂ©nitien[alpha 6]. Puis, il procĂšde Ă  une prĂ©sentation onirique et thĂ©Ăątrale des diffĂ©rents personnages de cette fable, qui se rĂ©unissent pour remercier le public[alpha 7]. Enfin, il se dirige vers « la porte de l’aventure » — chemin dĂ©jĂ  empruntĂ© pour entamer son pĂ©riple sibĂ©rien et qu'il suit cette fois pour partir Ă  Rhodes —, en se rendant dans un des lieux magiques et secrets de la ville oĂč il « demande Ă  entrer dans une autre histoire, dans un autre endroit ». Ce, non sans avoir auparavant trouvĂ©, mystĂ©rieusement apparue au fond de sa poche, la clavicule de Salomon. « Il n'y a qu'Ă  Venise que de telles choses arrivent... »

La clavicule de Salomon

Le terme "clavicule" (du latin clavis, la clé) peut désigner une formule magique (voir Clavicula Salomonis). Mais dans cette aventure, il désigne aussi un bareket émeraude (qui se dit en hébreu "Bāréqeth") trÚs pure et magique, enlacée par trois serpents, symbole de la connaissance hermétique. Dans la bande dessinée, de nombreux dialogues expliquent son histoire, dont on peut tirer le chapitre suivant.

Origines de la clavicule

Cet objet provient de la tribu de Ruben Satanas, qui la donna à Lilith. Selon la Kabbale, celle-ci fut la premiÚre femme d'Adam (avant Ève), pour ensuite devenir celle de Caïn. Ce dernier, fils d'Adam et Ève[alpha 8], lui prit la pierre lorsqu'il voulut reconquérir le Paradis perdu par ses parents.

L'émeraude fit ensuite partie des pierres précieuses du pectoral du roi Salomon (Urim et Thummim), qui la donna à son architecte Iram, en remerciement pour la construction de son Temple de Dieu (premier Temple de Jérusalem). Le roi magicien y avait gravé un message secret réservé aux initiés, menant à un des trésors du souverain et de la reine de Saba.

Le lion de saint Marc couronne le portail, surmontant la Basilique Ă  son nom, Venise

Entre les mains de Simon le Magicien, il la donna Ă  l'apĂŽtre Simon Pierre (saint Pierre) Ă  Antioche, aprĂšs avoir perdu un pari contre lui. Simon Pierre la confia alors Ă  saint Marc (Ă©vangĂ©liste, symbolisĂ© par un lion), futur saint patron de Venise. Ce dernier l'emporta avec lui lorsqu'il partit pour l'Égypte, afin de fonder l'Église d'Alexandrie. Mais il fut Ă©tranglĂ© par deux tueurs d'une secte gnostique, liĂ©e Ă  Simon le Magicien, qui la lui prirent. Ils la ramenĂšrent lĂ  oĂč celui-ci l'avait perdue, Ă  Antioche. Dans cette ville, elle fut remise au commanditaire de l’assassinat, Basilide (gnostique disciple de ce Simon), qui enseigna ensuite Ă  Alexandrie. Il la transforma en « gemme gnostique du genre Abraxas ».

Par la suite, la pierre passa de mains en mains : par des hĂ©rĂ©tiques caĂŻnites, des philosophes Ă©gyptiens
 jusqu'Ă  ce que les Arabes conquissent Alexandrie, en 641. Amr ibn al-As (compagnon de Mahomet, qui le nomma gĂ©nĂ©ral) la fit garder par des prĂȘtres. C'est alors que deux commerçants vĂ©nitiens (Buono de Malamocco et Rustico da Torcello) la dĂ©robĂšrent, avec la dĂ©pouille de saint Marc. Ils la cachĂšrent sous le corps du saint et sous de la viande de porc, puis l'emmenĂšrent dans leur ville, en 828.

À la recherche de la clavicule

Sirat Al-Bunduqiyyah (sourate de Venise), l'autre titre donnĂ© Ă  l'histoire, dĂ©signe le dossier concernant les tentatives d'agents secrets arabes – en contact avec des Al-Qadi alexandrins – pour rĂ©cupĂ©rer la pierre. Le premier d'entre eux, Ibn Farid, envoyĂ© en 830, fut Ă©tranglĂ©. En 893, Ibrahim Abu, Sarrasin sicilien, n'eut pas plus de chance, puisqu'il fut retrouvĂ© mort prĂšs du Rialto. En 904, Saud Khalula de Palerme, aidĂ© de sa Garde noire, faillit rĂ©ussir. Il la retrouva et la cacha au Fontego degli Arabi, Ă  San Marcilian (sans doute prĂšs de l'Ă©glise San Marziale). Dessinant son emplacement exact, il envoya le message secret au quadi (Al-Qadi) d'Alexandrie. Mais le bateau fut arraisonnĂ© par des gendarmes byzantins, qui s’emparĂšrent du document. Quant Ă  l'agent il se noya dans le canal de la Madonna dell'Orto en tentant de s'enfuir. Ce fut probablement le dernier Ă  ĂȘtre en possession de la pierre.

Lion du Pirée, à l'Arsenal de Venise et ses runes gravées

Vers 1040, des guerriers Varegs[alpha 9] partirent de Novgorod et arrivĂšrent Ă  Byzance, oĂč ils devinrent les « chiens de garde du BasilĂ©e ». L'un d'eux, Oleg, accompagnant son chef Asmund, fit partie de la garde de l'impĂ©ratrice ZoĂ© la PorphyrogĂ©nĂšte et de son mari Michel le Paflagon. Une nuit, un marin levantin raconta au guerrier l'histoire de la pierre, qui Ă©tait alors cachĂ©e sous le Sceau de Salomon, dans l'Escalier des rencontres du Fontego degli Arabi. Il tua le marin et, plus tard, l'Empereur l'envoya combattre ses ennemis en GrĂšce. Au PirĂ©e (principal port d'AthĂšnes), lui et son armĂ©e, menĂ©e par le futur Harald III de NorvĂšge, anĂ©antirent l'ennemi. Il grava alors sur la statue d'un lion gardant une fontaine les indications nĂ©cessaires pour trouver la Clavicule. Le guerrier mourut plus tard dans une conjuration. Quant au lion, il fut justement emmenĂ© par le doge Francesco Morosini en 1687 pour ĂȘtre installĂ© Ă  l'Arsenal de Venise. Cette histoire fut sĂ»rement inspirĂ©e par celle de ce mĂȘme Harald, qui grava lui-mĂȘme des runes sur la statue, peut-ĂȘtre originaire de DĂ©los (cf. Le PirĂ©e : Moyen Âge et domination ottomane).

En 1335, le gĂ©ographe arabe Ibn BattĂ»ta vint incognito Ă  Venise pour rĂ©cupĂ©rer la pierre, sans succĂšs. Il grava alors des caractĂšres arabes sur le cĂŽtĂ© gauche de la chaire de Simon Pierre (celle visible dans l’église de San Pietro di Castello)[alpha 10]. Le gĂ©ographe y laissa des indications de la maison de Hamir Ben R'yobah, dit le Chameau[alpha 11], supposant que la clavicule y Ă©tait cachĂ©e. Il s'agit sans doute du fameux Fontego degli Arabi, devenu depuis la loge maçonnique RL HermĂšs.

En , Corto Maltese s'y rend et un frÚre franc-maçon lui parle de l'Escalier des rencontres. Des sculptures y font figurer les chevaliers teutoniques qui luttÚrent aux cÎtés des Templiers et des Vénitiens contre les Génois, leurs rivaux de longue date. En remerciement, ces chevaliers reçurent le bùtiment. Quant à l'Escalier des rencontres, une légende dit que chaque année, la nuit du 24 au (jour de la Saint-Marc), d'étranges rencontres s'y produisent. Corto est ainsi bien décidé à vérifier si cet escalier lui fera rencontrer la Clavicule de Salomon[1].

La Venise d'Hugo Pratt

Exemple de Vera da pozzo (puits), situé à Campo San Boldo

Hugo Pratt, Ă  travers cette BD, rend hommage Ă  la ville oĂč il a passĂ© son enfance[alpha 12] et une partie de sa vie adulte : Venise. Dans Une grand-mĂšre vĂ©nitienne, prĂ©face signĂ©e par l'auteur et prĂ©sente dans certaines Ă©ditions, celui-ci raconte cette enfance dans cette ville, entourĂ©e de mysticisme. Ce rĂ©cit fournit aussi quelques clĂ©s de comprĂ©hension pour l'histoire, dĂ©taillant certains aspects de la culture vĂ©nitienne qui ont servi de source d'inspiration. C'Ă©tait la premiĂšre fois qu'il rĂ©digeait lui-mĂȘme la prĂ©face d'un de ses albums. Elle fait partie depuis de morceaux choisis, employĂ©s dans les Ă©coles italiennes.

Une enfance vénitienne

Durant son enfance, sa grand-mĂšre lui demandait de l'accompagner dans le vieux ghetto chez une de ses amies, Mme Bora Levi, dont la maison Ă©tait accessible par un escalier extĂ©rieur, "l'escalier fou" (ou celui "des rats d'Ă©gouts", ou le "turc"). Ă€ l'intĂ©rieur, pendant que les dames discutaient, le jeune garçon s'ennuyait et observait attentivement la centaine de mĂ©daillons sur le mur, dont les personnages en uniforme de Habsbourg ou tenue de rabbins semblaient sĂ©vĂšrement le fixer. Pour passer le temps, il regardait alors par la fenĂȘtre de la demeure, donnant sur une cour. AppelĂ©e par l'auteur la Corte sconta detta Arcana (Cour secrĂšte dite de l’Arcane), il la dĂ©crit comme herbeuse et au puits vĂ©nitien couvert de lierre. On y accĂ©dait en passant sept portes, chacune d'elles Ă©tant gravĂ©e du nom d'un shed (dĂ©mon de la caste des Shedim, descendants d'Adam et Lilith), qu'il fallait prononcer pour l'ouvrir. Lorsque la dame juive l'y emmena, elle tenait un "menorah", dont elle soufflait une bougie chaque fois qu'elle ouvrait une porte. Dans la cour, il y dĂ©couvrit des sculptures et de curieux graffitis, figurant par exemple une vache Ă  un seul Ɠil, un cercle tracĂ© sur le sol pour y faire danser une jeune fille nue, des anges dĂ©chus (SataĂ«l, SamaĂ«l et Amabiel), un papillon nommĂ© Aurelia, etc. Cette cour est peut-ĂȘtre la Corte Botera, situĂ©e prĂšs de la Basilique San Zanipolo. Elle est accessible par un passage le long de la Fondamenta Felzi, actuellement fermĂ© par une grille, situĂ© aprĂšs le pont[2].

Dans le rĂ©cit, la dame fit ensuite sortir le jeune Hugo par une porte du fond, conduisant Ă  une ruelle aux herbes hautes. La longeant, elle lui fit dĂ©couvrir une autre place merveilleuse[alpha 13]. Dedans s'y trouvait une trĂšs belle dame entourĂ©e d'enfants, qui jouaient autour d'un gigantesque papillon en morceaux de verre colorĂ©s : AurĂ©lia (papillon gnostique). Le bĂ©dĂ©iste souligne que ces deux placettes, reliĂ©es par une ruelle cachĂ©e (qu'il nomme "Passage Étroit de la Nostalgie"), reprĂ©sentent deux mondes secrets. Ce sont respectivement les disciplines talmudiques et les disciplines philosophiques Ă©sotĂ©riques judĂ©o-grĂ©co-orientales.

Quant aux enfants juifs jouant dans ces cours, ils lui apprirent diverses choses, dont certaines furent utilisées dans la conception de cette histoire. Il découvrit ainsi Abraxas de Basilide, Simon le Magicien, Hypatie, la Clavicule de Salomon, l'émeraude de Satan[alpha 14], etc. en plus de connaßtre les noms de Carpocrate, OrigÚne, Tertullien, Menander ou Saturninos.

Palazzo Mastelli del Cammello, au bord du Rio de la Madona de l'Orto. Ses murs sont ornés des statues de trois frÚres arabes et de celle d'un chameau.

En revenant chez lui, Ă  la Bragora (peut-ĂȘtre prĂšs de l'Église San Giovanni in Bragora), Ă  l'autre bout de la ville, il passait par le Rio della Sensa[alpha 15]. LĂ , Ă  cĂŽtĂ© du Campo dei Mori, il scrutait la façade du "Fontego des Maures ou des Sarrasins" (visiblement le Palais Mastelli del Cammello). Il pouvait voir sur les murs les statues des trois frĂšres arabes Ă  qui appartenaient la maison - El Rioba, Sandi et Afani - en plus de celle d'un chameau (ayant donnĂ© son nom Ă  la demeure). Cette demeure n'est autre que le Fontego degli Arabi, oĂč sera cachĂ©e la pierre dans l'histoire. Posant des questions sur cette maison Ă  sa grand-mĂšre, celle-ci, trĂšs embarrassĂ©e, lui rĂ©pondit que ce n'Ă©tait pas des questions Ă  poser. Ces silences au sujet des Arabes et autres peuples qualifiĂ©s de Sarrasins attisaient la curiositĂ© de l'auteur au point de lui faire questionner sa famille. Il dĂ©couvrit alors que du cĂŽtĂ© de sa mĂšre, il avait des origines espagnoles par les Genero[alpha 16], venant de TolĂšde. Ceux-ci Ă©taient auparavant des SĂ©fardo-marrane, convertis au catholicisme lors des persĂ©cutions de 1390 en Espagne, durant la Reconquista. Une autre partie de sa famille[alpha 17] avait des liens de parentĂ© avec les Azim, souffleurs de verre byzantins Ă  Murano.

Toujours dans sa famille, un sujet de conversation rĂ©current concerne les marchands et espions arabes, venus chercher dans cette ville ce que les pirates vĂ©nitiens leur avaient pillĂ©. C'est ainsi qu'un de ses oncles le mena prĂšs de San Marsial (voir Église San Marziale) et lui montra, sur une placette, une chauve-souris en marbre vert dans une niche d'albĂątre. Il lui dit que c'Ă©tait le symbole d'une secte d'aventuriers sarrasins, alliĂ©e des Templiers et des Chevaliers teutoniques.

De Venise à l'Éthiopie

Bien plus tard, le futur auteur partit pour l'Éthiopie, oĂč il rencontra une communautĂ© grĂ©co-armĂ©no-judĂ©o-Ă©gyptienne, oĂč il retrouvait l'ambiance vĂ©nitienne. Dans les bibliothĂšques de Debra Markos, Debra Ghiorghis (peut-ĂȘtre nom italien donnĂ© Ă  Bahir Dar), Debra Mariam, il trouva des livres et des reprĂ©sentations coptes du Roi Salomon et de la Reine de Saba. Ces ouvrages lui apprirent que dans la vie des hommes qui veulent savoir, il y a toujours les sept portes secrĂštes. Il y retrouva ainsi plus ou moins ce qu'il avait dĂ©couvert dans la fameuse cour. Et des amis d'Afrique orientale lui racontaient des histoires, telles que les voyages d'Enoch et les Jardins de l'Eden. Lors de la guerre, il alla en Dankalie et en Ogaden. Un chamelier lui expliqua que, pour entrer dans le Al-Jannah al-Adn (le Jardin d'Eden), il faut ouvrir sept portes dans le dĂ©sert, nĂ©cessitant d'apprendre le nom d'autant d'anges terribles de la tribu des Shaitans (Satan). Ou bien, il fallait se faire accompagner d'un poĂšte ayant une clĂ© d'or sous la langue. Enfin, un Arabe d'ÉrythrĂ©e lui dit que dans sa langue, Giun Al-Banadiqin (Golfe des VĂ©nitiens) dĂ©signe l'Adriatique et Al-Bunduqiyyah, Venise. Ce nom figure dans le second titre de l'aventure, Sirat Al-Bunduqiyyah (sourate de Venise).

À la recherche de souvenirs d'enfance

De retour dans la ville de son enfance avant la fin de la guerre, Hugo Pratt dĂ©couvrit que les maisons du ghetto Ă©taient fermĂ©es, les Juifs qui les avaient fuies se cachaient chez les VĂ©nitiens. La nuit, il entendait parler Ă  nouveau d'anciennes histoires arabo-espagnoles, ainsi que de la ville cabalistique de Safed (Palestine). C'est lĂ  oĂč se trouvait la tombe de Simon Ben Yohai, auteur prĂ©sumĂ© du Zohar, le "Livre des Splendeurs" (ouvrage fondamental de la Kabbale).

Sinagoga spagnola, avec la plaque commémorative (visible sur ce lien de Wikimedia Commons)

AprĂšs la guerre, bien qu'errant autour du monde, il revint sans cesse dans la CitĂ© des doges. Mais marchant Ă  travers les ruelles et les canaux, il dĂ©couvrit sa ville changĂ©e. Il n'y avait plus les crabes sur les rives qui paressaient au soleil l'aprĂšs-midi, ni les personnes qui ont accompagnĂ© son enfance, comme Mme Bora Levi, ni encore "l'escalier fou". Il ne reconnut pas les lieux qu'il avait connus, ayant alors changĂ©. Et on ne sait pas quoi rĂ©pondre Ă  ses questions, des jeunes ne savant pas ou des vieux ne voulant pas se souvenir. Il retrouva quand mĂȘme la trace de l'amie de sa grand-mĂšre, en dĂ©couvrant son nom gravĂ© sur une plaque de marbre Ă  cĂŽtĂ© de l'entrĂ©e de la Schola Española[alpha 18]. Cette plaque mentionne le nom des Juifs dĂ©portĂ©s qui ne sont pas revenus aprĂšs la guerre. Ils n'Ă©taient pas nombreux, la ville ayant cachĂ© ses Juifs dans ses "Cours SecrĂštes", ses "Arcanes".

Finalement, en cherchant bien, l'auteur retrouve des traces de la Venise de son enfance. De l'autre cĂŽtĂ© du Ponte Ebreo, dans les bistrots, on joue encore avec de vieilles cartes arabes, Ă  la Sarrasine, la MahomĂ©tane ou la Belle Juive, jeux d'Orient et d'Espagne. Ainsi, les Juifs marranes avaient conservĂ© leurs cartes et les vieilles clĂ©s des maisons espagnoles sur l'huisserie des portes vĂ©nitiennes. Sa grand-mĂšre lui avait d'ailleurs lĂ©guĂ© les deux : un jeu de cartes arabes (sĂ»rement magiques) et une clĂ© de TolĂšde, en mĂȘme temps que son fatalisme ironique. Sur la Fondamenta conduisant Ă  la Madonna dell'Orto et San Marcilian, un palais (le Palais Mastelli del Cammello ?) est ornĂ© d'une croix teutonique, d'une rose et d'un chameau de pierre. Si cela ne dira rien au premier venu, un VĂ©nitien de cƓur comprendra que le symbole teutonique cache une Ă©nigme, tout comme la rose s'enroulant autour d'une croix et le chameau.

Venise cosmopolite

À travers le rĂ©cit de son enfance et l'aventure de son hĂ©ros, l'auteur nous brosse le portrait d'une Venise mĂ©connue, trĂšs cosmopolite, au cƓur de l'Europe et de la mer MĂ©diterranĂ©e. Dans son rĂ©cit s'y croisent ainsi Italiens, Anglais, Espagnols, Juifs, Arabes, Byzantins, Scandinaves, Grecs, Égyptiens, Polonais... Ces descriptions prĂ©cises de Venise, vues par quelqu'un qui y a vĂ©cu, montre que cette ville rĂ©sulte donc du mĂ©lange de nombreuses cultures s'y cĂŽtoyant, riche de trĂšs multiples influences. Tout comme Hugo Pratt lui-mĂȘme[1] - [3].

Anecdotes

Venise comporte une villa nommée Jardin d'Eden, justement fréquentée par le baron Corvo, parmi tant d'autres artistes. Elle apparaßt également dans le roman de Gabriele D'Annunzio Il fuoco (Le Feu, 1900)[1].

GenÚse du récit

Hugo Pratt devait rĂ©aliser quelque chose sur Venise avec Alberto Ongaro, artiste italien avec qui il avait l'habitude de travailler. Mais comme ils ne s'Ă©taient pas mis d'accord sur leur Ɠuvre commune, ils ont rĂ©alisĂ© la leur chacun de leur cĂŽtĂ© : le second a Ă©crit La taverna del doge Loredan (1980), alors que le premier a rĂ©alisĂ© une bande dessinĂ©e.

La franc-maçonnerie Ă©tant au cƓur du rĂ©cit, le bĂ©dĂ©iste a consultĂ© plusieurs frĂšres, afin d'Ă©viter de dires des bĂȘtises Ă  leur sujet. Il a bien sĂ»r pris ses prĂ©cautions. Mais lorsque le scandale Ă©clata en 1981 Ă  propos de la loge clandestine P2, il lui a Ă©tĂ© demandĂ© s'il Ă©tait lui-mĂȘme franc-maçon. Il a dĂ» rĂ©pondre « ni oui ni non » : bien qu'il ne le fĂ»t pas encore Ă  l'Ă©poque, il lui aurait semblĂ© commettre une trahison en rĂ©pondant non aprĂšs que des frĂšres l'avaient aidĂ©.

Hommages et popularité de l'épisode

  • Cet Ă©pisode est considĂ©rĂ© par beaucoup de lecteurs comme une des meilleures histoires de son auteur. L'album qui en est tirĂ© a d'ailleurs Ă©tĂ© Ă  plusieurs reprises Ă©puisĂ© dans les magasins.
  • Dans HP et Giuseppe Bergman (1980), Ă©pisode de la sĂ©rie de bande dessinĂ©e Les Aventures de Giuseppe Bergman, Milo Manara rend hommage plusieurs fois Ă  Hugo Pratt, en particulier en utilisant ses initiales dans le titre. De plus, le hĂ©ros y dĂ©couvre le manuscrit de la prĂ©face de l'album.
  • Cette mĂȘme prĂ©face a Ă©tĂ© enregistrĂ©e, avec en accompagnement musical SchĂ©hĂ©razade, de NikolaĂŻ Rimski-Korsakov[1].

Prépublications

  • Italie : Favola di Venezia (Sirat Al-Bunduqiyyah), paraĂźt en couleurs[alpha 19] dans le supplĂ©ment hebdomadaire de L'Europeo, du no 21-22 du au no 51 du .
  • France : Fable de Venise (Sirat Al-Bunduqiyyah), paraĂźt en noir et blanc dans les no 12 Ă  15, du mensuel (À suivre) en 1979.

Albums édités en France

ScĂ©nario et dessins de Hugo Pratt avec la collaboration de Guido Fuga pour les dessins concernant l’architecture de la citĂ© vĂ©nitienne.

Album brochĂ© – noir et blanc

  • Fable de Venise (Sirat Al-Bunduqiyyah)[alpha 20]A∎ L∎ G∎ D∎ G∎ A∎ D∎ L∎ U∎[alpha 21] (prĂ©face de Hugo Pratt : Une grand-mĂšre vĂ©nitienne), Ă©d. Casterman, coll. « Les romans (À SUIVRE) Â», 1981 (ISBN 2-203-33405-3)

Album brochĂ© – noir et blanc

  • Fable de Venise (nouvelle couverture), Ă©d. Casterman, 2001 (ISBN 2-203-33490-8)
  • Fable de Venise, Casterman 2011, coll. "Corto Maltese en noir et blanc", couverture souple Ă  rabats, format 23,5/29,5 (ISBN 978-2-203-03365-8).

Albums reliĂ©s – couleurs

  • Fable de Venise (Sirat Al-Bunduqiyyah) A∎ L∎ G∎ D∎ G∎ A∎ D∎ L∎ U∎ (format 27x31, introductions illustrĂ©es de documents et aquarelles de Hugo Pratt : Une grand-mĂšre vĂ©nitienne, La Franc-Maçonnerie, Manifeste maçonnique), Ă©d. Casterman, 1984 (ISBN 2-203-33604-8)
  • Fable de Venise (format 23.5x30.5 avec jaquette, documents et aquarelles de Hugo Pratt), Ă©d. Casterman, 1998 (ISBN 2-203-34414-8)
  • Autour de Corto - Fable de Venise, Une lecture guidĂ©e Ă  travers l'Ɠuvre de Pratt (format 29,5x30), Ă©d. Casterman, 2007 (ISBN 978-2-203-38301-2)
  • Fable de Venise (format 21.5x29, prĂ©face de Marco Steiner, photos de Marco d'Anna : RosĂ©e, rosace, chevaliers et secrets), Ă©d. Casterman, sĂ©rie Corto Maltese, tome 10, 2009 (ISBN 978-2-203-02448-9)

Petits formats brochés - couleurs

  • Fable de Venise, Ă©d. Casterman, sĂ©rie Corto, tome 25, paru le (ISBN 978-2-203-00793-2)
  • Fable de Venise, Ă©d. Magnard/Casterman, coll. Classiques & Contemporains & Bande DessinĂ©e[alpha 22], no 2, paru le (ISBN 978-2-210-76151-3)

Notes et références

Notes

  1. Nombre d'Ă©lĂ©ments de l'Ă©pisode font rĂ©fĂ©rence Ă  Gabriele D'Annunzio. D'abord ses Abruzzes natales, une des rĂ©gions d'Italie. Mais aussi Ă  son roman Forse che sĂŹ, forse che no (it), paru en 1910. MĂȘme sa façon de parler est reprise dans l'histoire. Bien que dans l'Ă©pisode, il s'oppose aux jeunes fascistes, l'artiste lui-mĂȘme commençait alors Ă  s'y intĂ©resser, Ă  l'Ă©poque oĂč celle-ci se dĂ©roule. Il devint par la suite trĂšs ami avec Benito Mussolini et inventa pour le mouvement des formules, des slogans et mĂȘme des chansons.
  2. Les jeunes fascistes montrés dans l'histoire ont réellement existés et l'auteur les connaissait. Stevani était amoureux de sa tante, tandis que Boselli était un de ses oncles. D'ailleurs, nombre des membres de la famille de Hugo Pratt étaient des fascistes, dont la plupart de ses oncles (excepté Lello, un marin anarchisant, comme Corto). Ils étaient membres de la Serenissima, faisceau fasciste vénitien fondé par son grand-pÚre.
  3. Hipatie fut une philosophe qui dirigea l'Ă©cole nĂ©oplatonicienne d'Alexandrie, fut disciple de Ammonios Saccas, de Plotin et de Proclos. Plusieurs chrĂ©tiens refusant sa pensĂ©e entrĂšrent en conflit avec elle, en particulier Cyrille, Ă©vĂȘque d'Alexandrie. Celui-ci fut le commanditaire de l'assassinat de la philosophe par ses hommes de main, les parabalani. Enfant, Pratt avait lu Hypatia (1853), roman historique de Charles Kingsley dĂ©diĂ© Ă  la philosophe, Sonzogno (it). Il avait trouvĂ© formidable cette histoire de peuples et de croyances qui se mĂȘlent. Ce rĂ©cit farfelu et un peu Ă©rotique, avait notamment pour objet de rechercher une libĂ©ration sexuelle, un peu morbide, Ă  l'encontre des interdits victoriens et religieux. Le bĂ©dĂ©iste avait depuis rĂ©alisĂ© beaucoup de recherches personnelles pour Ă©crire son ouvrage, surtout sur la philosophe.
  4. Pour le personnage de Louise Brookszowyc, Hugo Pratt lui a donnĂ© les traits de Louise Brooks, star du cinĂ©ma muet des annĂ©es 1920. Il la rencontra plus tard, Ă  Rochester, dans l’État de New-York, lors d'un voyage aux États-Unis en 1983 avec une Ă©quipe de la RAI. Elle avait trĂšs peu de livres, mais elle possĂ©dait Fable de Venise. Celui-ci lui avait Ă©tĂ© envoyĂ© par Guido Crepax, qui s'est Ă©galement inspirĂ© de son physique, pour son personnage de Valentina.
  5. FondĂ©e en 1906, la Warsavia organisait la prostitution en Argentine (Hugo Pratt, entretiens avec Dominique Petitfaux, De l’autre cĂŽtĂ© de Corto, Ă©d. Casterman, 1996.)
  6. Le Duché de Candie a été de 1212 à 1669 une colonie de la république de Venise situé sur l'ßle de CrÚte, en GrÚce. Il nommé d'aprÚs Candie, nom médiéval de la ville d'Héraklion.
  7. Cette fin thĂ©Ăątrale rappelle plusieurs citations cĂ©lĂšbres de William Shakespeare. D'abord quand Corto dĂ©clare que la clavicule pourrait bien ĂȘtre faite de la mĂȘme matiĂšre que les rĂȘves. Ce qui renvoie Ă  la citation de Prospero dans La TempĂȘte, Ă  laquelle il a dĂ©jĂ  fait allusion Ă  la fin de TĂȘtes de champignons : "Nous sommes de l'Ă©toffe dont les rĂȘves sont faits, notre petite vie est cerclĂ©e d'un sommeil." Ensuite, le rappel au thĂ©Ăątre Ă©voque la citation issue de Comme il vous plaira "Le monde entier est un thĂ©Ăątre, et tout le monde, hommes et femmes y sont acteurs."
  8. Ce fils, qui tua son frĂšre Abel, est adorĂ© par la religion des CaĂŻnites. Corto Maltese se revendique d'ailleurs de ce mouvement gnostique, comme il l'a expliquĂ© dans Les Éthiopiques.
  9. Vikings de SuĂšde qui ont gouvernĂ© l’État mĂ©diĂ©val de la Rus’.
  10. Dans l'histoire, cette stĂšle funĂ©raire juive Ă©tait dĂ©jĂ  gravĂ©e de caractĂšres nabathĂ©ens, datant de l'an 300 aprĂšs JĂ©sus Christ. Elle fut utilisĂ©e plus tard par les Arabes. Il s’agit en fait d'un siĂšge en marbre construit Ă  partir d'une ancienne stĂšle funĂ©raire islamique, portant des sculptures ornementales en kufi des versets du Coran. Il fut donnĂ© au doge Pietro Tradonico par l'empereur d'Orient Michel III dit « l'ivrogne », au IXe siĂšcle.
  11. Située à la Madonna dell'Orto, dans le Campo dei Mori
  12. Voir aussi pour ce chapitre ce lien.
  13. Cour qu'il revit bien plus tard, en fleur, dans une maison de la Juderia de Cordoue. Les organisateurs de l'exposition qui s'est tenu en cette ville supposent l'avoir localisée : http://cortoencordoba.com/.
  14. Émeraude qui se serait dĂ©tachĂ©e de son front pour devenir le symbole de la "Science maudite" parmi les hommes, d'aprĂšs la tradition hermĂ©tique.
  15. À la Madonna dell'Orto, oĂč se situe aussi l'Ă©glise du mĂȘme nom.
  16. De par la famille de sa mĂšre, Evelina Genero.
  17. Du cÎté de son pÚre Rolando Pratt qui, comme le dit l'auteur, est un "mélange de Byzantins, de Turcs, de Vénitiens souffleurs de verre à Murano, mais aussi des jacobites anglais partisans des Stuart qui ont fui en Méditerranée".
  18. Celle-ci se situe dans le Calle Ghetto Vecchio, sur la placette Campiello delle Scuole (voir le plan sur la section Histoire du Ghetto de Venise).
  19. Par Mariolina Pasqualini.
  20. Sirat : Sourate, en arabe. Al-Bunduqiyyah : nom Ă©gyptien, de Venise = la sourate de Venise.
  21. AbrĂ©viation maçonnique de À La Gloire Du Grand Architecte De L’Univers.
  22. Collection, avec notes et documents pĂ©dagogiques d’accompagnement, destinĂ©e aux enseignants (collĂšge, lycĂ©e professionnel et lycĂ©e gĂ©nĂ©ral).

Références

  1. Hugo Pratt, entretiens avec Dominique Petitfaux, De l’autre cĂŽtĂ© de Corto, p. 102, Ă©d. Casterman, 1996.
  2. « Cour secrĂšte dite de l’Arcane (Corte sconta detta Arcana). »
  3. Hugo Pratt, Fable de Venise, « Une grand-mÚre vénitienne (introduction) »

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