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Émeraude

L’émeraude est un minĂ©ral, du groupe des silicates, sous-groupe des cyclosilicates, variĂ©tĂ© de bĂ©ryl, dont la couleur verte provient de traces de chrome, de vanadium et parfois de fer. L'Ă©meraude est, avec le diamant, le saphir et le rubis, l'une des quatre gemmes qualifiĂ©es de pierres prĂ©cieuses.

Émeraude
Catégorie IX : silicates[1]
Image illustrative de l’article Émeraude
Émeraude - Mine de Muzo[3] - Colombie (XX 2 cm)
Général
Numéro CAS 12415-33-7
Classe de Strunz
Classe de Dana
Formule chimique Al2Be3O18Si6 Be3(Al,M)2(SiO3)6
(M = Cr, Fe, V)
Identification
Masse formulaire[4] 537,5018 ± 0,0072 uma
Al 10,04 %, Be 5,03 %, O 53,58 %, Si 31,35 %,
Couleur verte
Classe cristalline et groupe d'espace dihexagonale dipyramidale
P6/mmc
SystĂšme cristallin hexagonal
Clivage clivage basal faible
Cassure conchoĂŻdale
Échelle de Mohs 7,5 - 8,0
Trait blanc
Éclat vitreux
Propriétés optiques
Indice de réfraction Ne=1,560 à 1,596
No= 1,566 Ă  1,602
Pléochroïsme bleu-vert / jaune-vert
BirĂ©fringence Δ=0,004-0,007 ; uniaxe nĂ©gatif
Dispersion 2 vz ~ 0,014
Transparence translucide,opaque,transparent
Propriétés chimiques
Densité 2,7 - 2,9
Température de fusion 2477 à 2519 °C
Fusibilité fusible
Solubilité soluble dans HF
Comportement chimique donne une perle vert clair quand on la chauffe
Propriétés physiques
Magnétisme aucun
Radioactivité aucune

Unités du SI & CNTP, sauf indication contraire.

Historique de la description et appellations

Inventeur et Ă©tymologie

Le mot Ă©meraude proviendrait du grec ÏƒÎŒÎŹÏÎ±ÎłÎŽÎżÏ‚ / smĂĄragdos, dĂ©formation du mot perse zamarat qui veut dire « cƓur de pierre ». Comme pour d’autres mĂ©taux et pierres prĂ©cieuses, mythes et lĂ©gendes se mĂȘlent Ă  la rĂ©alitĂ© historique lorsqu’on parle d’émeraude. On en Ă©voque dĂ©jĂ  la prĂ©sence Ă  Babylone, au IIe millĂ©naire av. J.-C., oĂč elle servait de monnaie d’échange. À la pĂ©riode antique de l’Égypte, prĂšs de la mer Rouge, se trouvaient des mines d’émeraude, dont on a fabriquĂ© des bijoux pour les grands de l'empire. Ces mines de Djebel Zabarah, redĂ©couvertes en 1816 par l'explorateur français FrĂ©dĂ©ric Cailliaud, ont Ă©tĂ© abusivement surnommĂ©es mines de ClĂ©opĂątre. Elles Ă©taient dĂ©jĂ  Ă©puisĂ©es, mais elles ne contenaient probablement que des gemmes de piĂštre qualitĂ©.

Dans l’AntiquitĂ©, des auteurs comme ThĂ©ophraste, HĂ©rodote ou Pline l'Ancien mentionnent la prĂ©sence d’émeraudes et dĂ©crivent parfois des statues, voire des colonnes ou obĂ©lisques taillĂ©es dans cette pierre. On sait maintenant qu’il ne s’agissait pas de vĂ©ritables Ă©meraudes. À ces Ă©poques reculĂ©es, d’autres pierres aux reflets verts pouvaient facilement donner le change, et il existait dĂ©jĂ  des imitations, notamment en verre. En revanche, il est concevable que des statuettes aient Ă©tĂ© taillĂ©es dans des blocs de minĂ©raux Ă  l’état brut, de moindre qualitĂ©.

À l’époque romaine, on Ă©voque une lame d'Ă©meraude utilisĂ©e comme instrument optique par l’empereur NĂ©ron, qui s’en serait servi pour corriger sa myopie lorsqu’il regardait les combats de gladiateurs[5]. À cette Ă©poque, on connaissait principalement une mine en Europe, celle d’Habachtal (de) en Autriche. DĂ©couverte par des tribus celtes, elle a Ă©galement Ă©tĂ© exploitĂ©e par les Romains.

Au XVIe siÚcle, CortÚs apporte un lot d'émeraudes qui disparaßt en transit des cÎtes nord-africaines. Les Espagnols découvrent en Amérique du Sud de nouveaux gisements, principalement en Colombie. La mine de Chivor sera exploitée à partir de 1545[6] et celle de Muzo, en 1594[6].

En Inde, la pierre du « Grand Moghol », dĂ©couverte en 1695, pĂšse 217,80 carats et mesure environ 10 cm. Elle porte des inscriptions religieuses. Elle a Ă©tĂ© achetĂ©e pour 2,2 millions de dollars par un anonyme.

Jusqu’au dĂ©but du XXe siĂšcle, on appelait Ă©galement « Ă©meraude orientale » une pierre radicalement diffĂ©rente : le corindon vert, dont la composition s’apparente Ă  celle du rubis et du saphir.

Nomenclature de l'Ă©meraude

  • Émeraude sans remplissage constatĂ© : Ă©meraude sans traitement
  • Émeraude avec prĂ©sence d’huile ou de rĂ©sine : Ă©meraude traitĂ©e. Selon la quantitĂ© de remplissage ; insignifiante, mineur, modĂ©rĂ©, signifiante, trĂšs signifiante
  • Émeraude fortement imprĂ©gnĂ©e de rĂ©sines durcies facilement visibles en surface Ă  la loupe : Ă©meraude traitĂ©e
  • Émeraude imprĂ©gnĂ©e de colorant : bĂ©ryl traitĂ© ou Ă©meraude traitĂ©e
  • Morillon : Ă©meraude brute qui se vend au poids[7]. « Morillon, les Lapidaires nomment ainsi des Ă©meraudes brutes qu’on vend au marc. Il y a aussi des demi-morillons. » Denis Diderot[8]

Caractéristiques physico-chimiques

CritÚres de détermination

L’émeraude est composĂ©e de silicate d'aluminium et de bĂ©ryllium, auquel s’ajoutent du chrome, du vanadium et du fer. Sa duretĂ© varie entre 7,5 et 8 sur l'Ă©chelle de Mohs. L’émeraude est lĂ©gĂšrement dichroĂŻque (vert-jaune ou vert-bleu). Sa cassure est conchoĂŻdale et son trait est blanc. Sa densitĂ© varie de 2,7 Ă  2,9.

L’identification des Ă©meraudes, notamment pour Ă©tablir les liens entre les gisements connus (62 gisements dans 19 pays) et les anciennes pierres, se fait par spectromĂ©trie de masse, en mesurant la proportion de ses isotopes d’oxygĂšne. Le rapport 18O/16O varie de 7 Ă  25 selon les gisements.

L'Ă©meraude est soluble dans l'acide fluorhydrique. Elle donne une perle vert clair quand on la chauffe.

Cristallographie

Le systĂšme cristallin de l’émeraude est hexagonal, son groupe d'espace est P6/mmc. Sa structure est trĂšs similaire Ă  celle du bĂ©ryl, les atomes Al et M (M = Cr, Fe, V) Ă©tant situĂ©s sur les sites d'occupation mixte octaĂ©driques reliant les anneaux Si6O18.

Croissance des minéraux

Les émeraudes sont rares, car leur formation nécessite des conditions géologiques exceptionnelles :

  • le bĂ©ryllium, composant principal du bĂ©ryl, se trouve en effet surtout dans le magma de la croĂ»te terrestre ;
  • le chrome, le vanadium et le fer, qui transforment le bĂ©ryl en Ă©meraude, sont plutĂŽt situĂ©s dans le manteau terrestre.

Entre deux types de gisements connus, Brésil et Colombie, on remarque des différences marquées :

  • au BrĂ©sil, les Ă©meraudes se sont formĂ©es, pour certaines, il y a deux milliards d’annĂ©es, et d’autres, il y a environ 600 millions d’annĂ©es. Les cristaux se sont solidifiĂ©s en se mĂ©langeant Ă  un mica noir et possĂšdent des inclusions minĂ©rales. Elles manquent souvent de puretĂ© ;
  • en Colombie, la formation remonte Ă  65 millions d’annĂ©es, quand des mouvements tectoniques ont amenĂ© des minĂ©raux Ă  300 °C au contact d’une couche sĂ©dimentaire datant du dĂ©but du CrĂ©tacĂ©, environ 135 millions d’annĂ©es avant notre Ăšre. Cette couche contenait des fossiles aquatiques, dont les coquilles de calcaire s’étaient dissoutes, et offrait ainsi des cavitĂ©s qui ont permis au magma de former des cristaux extrĂȘmement purs.

Exploitation des gisements

Carte des principaux pays producteurs d'Ă©meraudes dans le monde.

Utilisations

Collier d'émeraudes romain, IIIe siÚcle, trésor de Lyon-Vaise.

En joaillerie, on la taille principalement en « Ă©meraude » (rectangle Ă  pans coupĂ©s), en « cabochon », en « poire » ou en « ovale ». L’émeraude est une des pierres prĂ©cieuses les plus chĂšres. La prĂ©sence trĂšs frĂ©quente d’inclusions, gracieusement appelĂ©es « givres » ou poĂ©tiquement « jardin », n’est pas un handicap, car elle peut attester de l'origine de la pierre ; certaines originalitĂ©s cristallographiques sont trĂšs recherchĂ©es par des collectionneurs (Ă©toile Ă  six branches, appelĂ©e Ă©meraude trapiche).

La plupart des émeraudes sont traitées avec des huiles ou des résines, c'est pourquoi il est déconseillé de les nettoyer par la technique des ultrasons, surtout aussi à cause de leur fragilité (inclusions ou fractures).

Extraction et production

La Colombie est le plus important producteur mondial (60 % de la production mondiale, 6 millions de carats pour l’annĂ©e 1995) : mines de Chivor, Muzo, Peñas Blancas et de Coscuez appelĂ©es le triangle d'or. Non seulement la Colombie est championne de la quantitĂ©, mais Ă©galement de la qualitĂ©. Ses Ă©meraudes sont gĂ©nĂ©ralement plus pures que celles ayant d’autres provenances. La banque de la RĂ©publique de Colombie possĂšde une collection de magnifiques pierres.

La répartition entre les principaux pays producteurs est la suivante[9] :

PaysGisements% production
ColombieChivor, Muzo, Peñas Blancas, Coscuez60 %
ZambieMiku, Kufubu, Mufulira15 %
BrésilSanta Terezinha de Goïas, Belmont, Carnaïba12 %
RussieOural4 %
ZimbabweSandawana3 %
MadagascarAnkadilalana3 %
Autres : 3 %

Taille

Le plus important centre de taille est situĂ© en Inde, Ă  Jaipur, oĂč le nombre de lapidaires est estimĂ© Ă  100 000. La taille d'Ă©meraudes s'y est dĂ©veloppĂ©e du fait de la grande prĂ©dilection du maharadjah pour les pierres prĂ©cieuses et notamment les Ă©meraudes provenant du monde entier. La taille est pratiquĂ©e en recherchant le minimum de pertes, comme au BrĂ©sil. Les pierres taillĂ©es en Colombie Ă©taient taillĂ©es suivant le mĂȘme principe jusqu'Ă  ce que les principes de taille europĂ©ens, favorisant la qualitĂ© plutĂŽt que le rendement, soient adoptĂ©s par les tailleries de Bogota. Les plus belles pierres sont gĂ©nĂ©ralement retaillĂ©es Ă  Paris. En outre, IsraĂ«l a dĂ©veloppĂ© un centre de taille ultra-moderne Ă  Ramat Gan.

Les plus belles Ă©meraudes

Le Devonshire, un cristal brut d'un vert soutenu de 1 384 carats, est peut-ĂȘtre l'Ă©meraude la plus cĂ©lĂšbre. Extraite dans la mine de Muzo (Colombie), elle fut offerte en 1831 Ă  William Cavendish, le 6e duc de Devonshire par l'empereur Pierre Ier du BrĂ©sil. En 1956, on a trouvĂ© une Ă©meraude de 11 000 carats, en Afrique du Sud. Les Ă©meraudes les plus connues (et exposĂ©es) sont dans les villes suivantes :

Galerie

  • Émeraude Ă  l'Ă©tat brut, BrĂ©sil.
    Émeraude Ă  l'Ă©tat brut, BrĂ©sil.
  • Émeraude, Colombie,4,5×4,5×2,5 cm.
    Émeraude, Colombie,
    4,5×4,5×2,5 cm.
  • Émeraude, Colombie,3,1×1,7×1 cm.
    Émeraude, Colombie,
    3,1×1,7×cm.

Notes et références

  1. La classification des minéraux choisie est celle de Strunz, à l'exception des polymorphes de la silice, qui sont classés parmi les silicates.
  2. (en) Joseph E. Pogue et Ph. D. Evanston, The Emerald Deposits of Muzo, Colombia, Illinois, vol. LV, 1917 (Arizona Meeting, September, 1916).
  3. (en) Joseph E. Pogue et Ph. D. Evanston, The Emerald Deposits of Muzo, Colombia, Illinois, vol. LV, 1917 (Arizona Meeting, September, 1916).
  4. Masse molaire calculĂ©e d’aprĂšs « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
  5. Pline l'Ancien dans https://www.persee.fr/doc/numi_0484-8942_1998_num_6_153_2195 / page 128.
  6. (fr) Historique des gisements d'Ă©meraude et identification des Ă©meraudes anciennes, sur www.crpg.cnrs-nancy.fr.
  7. Paul Rouaix, Dictionnaire des arts dĂ©coratifs Ă  l'usage des artisans, des artistes, des amateurs et des Ă©coles
 (1850-19..), Édition Librairie illustrĂ©e (Paris), 1 vol. (VII-1043 p.) : fig. ; gr. in-8, Droits : domaine public.
  8. Denis Diderot, Encyclopédie, 1re éd., tome 10, p. 714.
  9. Statistiques du ministĂšre des Mines et de l’Énergie colombien, donnĂ©es 2000.
  10. « Médiums au secours du trésor aztÚque », dans Plongée magazine, no 16, p. 18.
  11. (en) The Isabella Emerald, Cortes Treasure.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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