Ammonios Saccas
Ammonios Saccas (en grec ancien áŒÎŒÎŒÏÎœÎčÎżÏ ÎŁÎ±ÎșÎșÎŹÏ) (IIIe siĂšcle) est un philosophe Ă©gyptien d'Alexandrie, souvent considĂ©rĂ©, en tant que maĂźtre de Plotin de 232 Ă 242[1], comme le fondateur de l'Ă©cole nĂ©oplatonicienne de Rome.
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áŒÎŒÎŒÏÎœÎčÎżÏ ÎŁÎ±ÎșÎșÎŹÏ |
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Biographie
Selon le tĂ©moignage digne de foi dâAmmien Marcellin[2], Ammonios Saccas (en grec ancien : áŒÎŒÎŒÏÎœÎčÎżÏ ÎŁÎ±ÎșÎșÎŹÏ) est nĂ© de parents chrĂ©tiens Ă Alexandrie, dans le quartier riche du Brucheion. Son nom doit sâentendre comme Ammonios le Sace ou le Scythe. Selon Jean-Michel Charrue, « le redoublement [de la consonne k] semble plutĂŽt avoir Ă©tĂ© utilisĂ© Ă propos des Scythes indiens. Ammonios Ă©tait probablement par ses origines un Scythe perse ou indien, nous dirons plutĂŽt perse[3]. » Le mĂ©tier de « porteur-de-sacs » quâon a cru dĂ©celer dans son nom Ă la suite de ThĂ©odoret de Cyr, dont lâapologĂ©tique prend une allure polĂ©mique, est philologiquement fausse et fantaisiste.
D'aprÚs Porphyre, il aurait renié sa foi chrétienne[4]. En revanche, d'aprÚs EusÚbe de Césarée et saint JérÎme, il aurait gardé sa foi chrétienne[5].
AprĂšs une longue pĂ©riode d'Ă©tudes et de mĂ©ditation, Ammonios Saccas ouvrit une Ă©cole de philosophie Ă Alexandrie. Ses principaux Ă©lĂšves furent Herennius, OrigĂšne le Platonicien (et peut ĂȘtre aussi le fameux chrĂ©tien OrigĂšne v. 185-v. 254), Longin et Plotin. Plotin suivit son enseignement plus de 10 ans, de 232 Ă 242, Ă Alexandrie.
« Un ami l'amena [Plotin] chez Ammonius, qu'il ne connaissait pas encore. DĂšs qu'il fut entrĂ© et qu'il l'eut Ă©coutĂ©, il dit Ă son ami : âVoilĂ l'homme que je cherchais (ÏοῊÏÎżÎœ áŒÎ¶ÎźÏÎżÏ Îœ)â. De ce jour, il frĂ©quenta assidĂ»ment Ammonius [âŠ]. Herennius, OrigĂšne et Plotin Ă©taient convenus ensemble de tenir secrets les dogmes d'Ammonius, que leur maĂźtre leur avait expliquĂ©s en toute clartĂ© dans ses leçons. Plotin tint sa promesse ; il Ă©tait en relation avec quelques personnes qui venaient le trouver ; mais il conservait, ignorĂ©s de tous, les dogmes qu'il avait reçus d'Ammonius. HĂ©rennius rompit le premier la convention, et OrigĂšne le suivit [âŠ] Pendant fort longtemps, Plotin continua Ă ne rien Ă©crire ; il faisait des leçons d'aprĂšs l'enseignement d'Ammonius. Ainsi fit-il pendant dix ans entiers ; il avait quelques auditeurs mais n'Ă©crivait rien. »
â Porphyre, Vie de Plotin, § 3, trad. Ămile BrĂ©hier.
Philosophie
Comme il n'a rien Ă©crit, et, avec l'aide de ses Ă©lĂšves, garda ses enseignements secrets, Ă la maniĂšre des pythagoriciens, sa philosophie doit essentiellement ĂȘtre dĂ©duite des Ă©crits de Plotin. Comme Eduard Zeller l'indique cependant, il y a des raisons de croire que sa doctrine Ă©tait plus proche de celle des platoniciens que de celle de Plotin. HiĂ©roclĂšs, Ă©crivant au Ve siĂšcle, affirme que sa doctrine fondamentale Ă©tait un Ă©clectisme ou syncrĂ©tisme, dĂ©rivĂ© d'une Ă©tude critique de Platon et d'Aristote. Ses admirateurs affirment qu'il avait Ă©tĂ© capable de rĂ©concilier les querelles des deux grandes Ă©coles de pensĂ©e.
« Enfin brilla la sagesse dâAmmonios, quâon cĂ©lĂšbre sous le nom dââinspirĂ© de Dieuâ. Ce fut lui, en effet, qui, purifiant les opinions des anciens philosophes et dissipant les rĂȘveries Ă©closes de part et dâautre, Ă©tablit lâharmonie entre les doctrines de Platon et dâAristote dans ce quâelles ont dâessentiel et de fondamental... Ce fut Ammonios dâAlexandrie, lâinspirĂ© de Dieu, qui le premier, sâattachant avec enthousiasme Ă ce quâil y a de vrai dans la philosophie et sâĂ©levant au-dessus des opinions vulgaires qui rendaient la philosophie un objet de mĂ©pris, comprit bien la doctrine de Platon et dâAristote, les rĂ©unit en un seul et mĂȘme esprit, et livra ainsi la philosophie en paix Ă ses disciples Plotin, OrigĂšne et leurs successeurs[6]. »
Sur l'union de lâĂąme et du corps, Ammonios Saccas est platonicien :
« Ammonios, maĂźtre de Plotin, expliquait ainsi la difficultĂ© qui nous occupe [lâunion de lâĂąme et du corps]. Lâintelligible est de telle nature quâil sâunit Ă ce qui peut le recevoir, aussi intimement que sâunissent les choses qui sâaltĂšrent mutuellement en sâunissant, et quâen mĂȘme temps, dans cette union, il demeure pur et incorruptible, comme le font les choses qui ne sont que juxtaposĂ©es. En effet, pour les corps, lâunion altĂšre les parties qui se rapprochent, puisquâelles forment dâautres corps ; câest ainsi que les Ă©lĂ©ments se changent en corps composĂ©s, la nourriture en sang, le sang en chair et en dâautres parties du corps. Mais, pour lâintelligible, lâunion se fait sans quâil y ait dâaltĂ©ration, car il rĂ©pugne Ă la nature de lâintelligible de subir une altĂ©ration dans son essence. Il disparaĂźt ou il cesse dâĂȘtre, mais il nâest pas susceptible de changement. Or lâintelligible ne peut ĂȘtre anĂ©anti, autrement il ne serait pas immortel ; et, comme lâĂąme est la vie, si elle changeait dans son union avec le corps, elle deviendrait autre chose et elle ne serait plus la vie. Que procurerait-elle donc au corps si elle ne lui donnait pas la vie ? LâĂąme ne subit donc pas dâaltĂ©ration dans son union[7]. »
Ćuvres
- (it) G. Bruni, Ammonios Saccas e i suoi frammenti, Rome, 1959.
- fragments conservĂ©s par NĂ©mĂ©sios d'ĂmĂšse : trad. par J.-B. Thibault NumĂ©nius : traitĂ© du Bien, trad. par M.-N. Bouillet (1857) Les EnnĂ©ades de Plotin ...: Tr ... - Plotinus, Porphyry - Google Livres
Notes et références
- Porphyre, Vie de Plotin, 3.
- Ammien Marcellin, Histoires, XXII, XVI, 16.
- Jean-Michel Charrue 2004, p. 73-74.
- Porphyre, Contre les chrétiens, in EusÚbe, Histoire ecclésiastique, VI, 19.
- EusÚbe, Histoire ecclésiastique (IVe s.), VI, 19 ; Saint JérÎme, Les hommes illustres (392), § 55.
- HiéroclÚs d'Alexandrie, cité par Photius, BibliothÚque, p. 127, 461.
- NĂ©mĂ©sius d'ĂmĂšse, De la nature de lâhomme, ch. II, p. 69 de la trad. de M. Thibault.
Sources
- Porphyre, « Vie de Plotin § 3 » : Contre les chrétiens, fragment 39 (= EusÚbe, Histoire ecclésiastique, VI, 9).
- EusÚbe, Histoire ecclésiastique (IVe s.), VI, 9.
- RĂ©pertoires de sources philosophiques antiques :
Bibliographie
- Jean-Michel Charrue, « Ammonius et Plotin », Revue philosophique de Louvain, t. 102, QuatriĂšme sĂ©rie, no 1,â , p. 72-103 (lire en ligne, consultĂ© le ). .
- Henri Crouzel, « OrigĂšne et Plotin, Ă©lĂšves dâAmmonios Saccas », Bulletin de LittĂ©rature ecclĂ©siastique, Toulouse, 57, 1956, p. 193-214. (lire en ligne)
- EncyclopĂ©die Philosophique Universelle, vol. III : Les Ćuvres philosophiques, t. 1 : Philosophie occidentale, PUF, 1992, p. 21 : "Ammonios Sakkas" (Luc Brisson).
- Richard Goulet, Dictionnaire des philosophes antiques, C.N.R.S. Ăditions, t. I, 1989.
- (de) H.-R. Schwyzer, Ammonios Sakkas, der Lehrer Plotins, Opladen, 1983.
- (en) Smith, Dictionary of Greek and Roman Biography and Mythology, vol. 1, p. 146 [lire en ligne]
- (de) Th. A. Szlezåk, "Plotin und die geheimen Leheren des Ammonius", in Esotrik und Exoterik Philosophie. BeitrÀge zur Geschichte und Sinn philosophische Selbstbestimmung, éd. H. Holzhey et W . Ch. Zimmerli, Bùle/Stuttgart, 1977, p. 52-69.
- (de) W. Theiler, Forschungen zum Neuplatonismus, Berlin, 1966. Tentative de reconstitution de l'enseignement d'Ammonios Saccas (peu convaincante selon Pierre Hadot).
Articles connexes
Liens externes
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :