Essence forestiĂšre
Dans le jargon des forestiers, une essence forestiĂšre dĂ©signe gĂ©nĂ©ralement une espĂšce d'arbre qui prĂ©sente un intĂ©rĂȘt en sylviculture et qui a des exigences biologiques ou des emplois particuliers, mais ce terme peut parfois faire rĂ©fĂ©rences Ă une sous-espĂšce ou variĂ©tĂ©, ou bien Ă plusieurs espĂšces.
En 2017, Le rĂ©seau international de jardins botaniques BGCI[1] en a rĂ©pertoriĂ© plus de 60 000 (60 065 en ), principalement situĂ©es entre les deux tropiques et en particulier en Amazonie (BrĂ©sil/Colombie) et l'IndonĂ©sie (BornĂ©o, Java, Sumatra). 58 % des espĂšces dâarbres sont endĂ©miques dâun seul pays et ne poussent que dans celui-ci.
Typologie des essences
Les forestiers distinguent ainsi :
- selon la classification botanique, les feuillus, espÚces généralement à feuillage caduc, qui sont des angiospermes, et les conifÚres (à feuillage persistant, à l'exception des mélÚzes), qui sont des gymnospermes ;
- selon leur origine, les essences indigÚnes ou spontanées, par opposition aux essences introduites ou exotiques ;
- selon la morphologie de leur systÚme racinaire : les essences à enracinement pivotant (qui réclament des sols profonds) de celles à enracinement superficiel ou traçant ;
- selon leur biologie :
- les essences rustiques ou non rustiques, selon leur degré de résistance aux gelées hivernales et printaniÚres ;
- les essences d'ombre ou de lumiÚre, selon leur capacité à croßtre sous le couvert ou non (avec des coupes dites sombres, claires ou à blanc ou dans le cas de la méthode prosilva pied à pied ou en bouquet qui favoriseront plus ou moins les essences d'ombres ou de lumiÚre[2]) ;
- les essences calcifuges ou calcicoles, acidiphiles ou neutrophiles, selon leurs exigences par rapport Ă la nature du sol ;
- les essences hygrophiles ou xérophiles, selon leur exigence en humidité ou leur adaptation à la sécheresse;
- selon leur durée de vie utile, les essences longévives (250 à 300 ans) ou peu longévives ;
- selon leur comportement en association : les essences dominantes, appelées aussi essences sociales car elles sont capables de former des peuplements importants, et les essences subordonnées, souvent rencontrées en peuplement disséminés.
Essences en France
Environ 190 espĂšces dâarbres sont prĂ©sentes dans les forĂȘts françaises, regroupĂ©es par lâinventaire forestier en 70 essences forestiĂšres[3] (cf. tableau ci-dessous). Parmi celles-ci, 17 essences reprĂ©sentent 87% du volume de bois vivants de mĂ©tropole[4]. Ces essences principales sont :
Feuillus
ConifĂšres
- Pin maritime
- Pin sylvestre
- Pin laricio
- Pin noir
- Sapin pectiné
- ĂpicĂ©a commun
- Douglas
Composition, diversité et diversification des essences
La composition ou la diversitĂ© en essences d'un peuplement forestier est la proportion de chacune des essences d'un peuplement forestier exprimĂ©e en pourcentage d'un total. Ce total peut ĂȘtre le couvert, la surface terriĂšre, le nombre de tiges ou le volume[5].
En France, l'inventaire forestier national utilise le taux de couvert libre relatif (TCLR) pour catégoriser les peuplements.
Concernant la composition d'un peuplement sont qualifiés de[6] :
- peuplement conifÚre, un peuplement dans lequel le TCLR des conifÚres est supérieur à 75 % ;
- peuplement feuillu, un peuplement dans lequel le TCLR des feuillus est supérieur à 75 % ;
- peuplement mixte, un peuplement dans lequel ni le TCLR des conifĂšres, ni le TCLR des feuillus, nâest supĂ©rieur Ă 75 %.
Concernant la diversité d'un peuplement sont qualifiés de :
- peuplement pur de telle essence, un peuplement oĂč une essence Ă elle seule Ă un TCLR supĂ©rieur Ă 75% ; par exemple type « Peuplement pur de chĂątaignier » ;
- peuplement mĂ©langĂ© de telle et telle essence, un peuplement Ă au moins deux essences dont aucune n'a un TCLR supĂ©rieur Ă 75% (non pur) et dont le TCLR de chacune est supĂ©rieur Ă 15% ; les essences prĂ©sentes sont classĂ©e par ordre dĂ©croissant de TCLR ce qui permet de nommer des types Ă©lĂ©mentaires : par exemple, « MĂ©lange de HĂȘtre et Pin sylvestre », « MĂ©lange de Pin sylvestre et de HĂȘtre » ou « MĂ©lange de Pin sylvestre, de HĂȘtre et un autre feuillu ». Le nombre d'essences participant au mĂ©lange va de 2 Ă 5 et plus, est appelĂ© « complexitĂ© du mĂ©lange ». La forĂȘt française se rĂ©partit Ă 50% de peuplements purs et 50% de peuplements mĂ©langĂ©s. La diversitĂ© des forĂȘts françaises Ă©tant la plus Ă©levĂ©e dâEurope, la combinaison de plusieurs essences mĂȘme limitĂ©e Ă 5 aboutit Ă plusieurs milliers de types Ă©lĂ©mentaires (de 1000 Ă 5000 suivant le nombre de campagnes d'inventaires). Afin d'obtenir une Ă©valuation quantitative exploitable il est nĂ©cessaire pour l'inventaire forestier national de distinguer les combinaisons dominantes et de regrouper les combinaisons minoritaires[7].
Ainsi la diversité des peuplements français de métropole (peuplements purs et mélangés) est traduite par l'inventaire forestier national en 117 types fondamentaux, réductibles à 32 types synthétiques et encore réductibles à 18 types agrégés[8].
Enjeux
La diversitĂ© biologique (spĂ©cifique, gĂ©nĂ©tique et Ă©copaysagĂšre...) des essences et leur caractĂšre autochtone sont des Ă©lĂ©ments importants de la biodiversitĂ© et de la naturalitĂ© qui sont considĂ©rĂ©s comme des facteurs importants d'adaptation et de rĂ©silience Ă©cologique des forĂȘts naturelles ou semi-naturelles.
Dans la perspective d'une gestion sylvicole et de l'arbre agricole dite raisonnée et durable, une meilleure connaissance de l'autécologie des essences issues de la régénération naturelle ou de la régénération artificielle peut aider le forestier et l'agrosylviculteur (ou un pépiniériste) à mieux « installer chaque essence à sa place »[9], dont en fonction des besoins de chaque arbre et des capacités d'enracinement de l'essence à laquelle il appartient[10], tout en limitant les risques de générer des phénomÚnes d'invasivité végétale par introduction d'une essence étrangÚre à un milieu[11].
Notes et références
- Botanic Gardens Conservation International, qui maintient une base de données et un moteur de recherche : GlobalTreeSearch
- Roussel L (1972) Une technique nouvelle au service de la sylviculture, la photologie forestiĂšre. Masson. (PDF)
- « Annexe 2 - Correspondance entre essences et espÚces d'arbres dans les données de l'inventaire forestier de l'IGN », sur inventaire-forestier.ign.fr, (consulté le )
- « Mémento de l'inventaire forestier », sur inventaire-forestier.ign.fr, (consulté le )
- Yves Bastien et Christian Gauberville (coord.), Vocabulaire forestier : Ăcologie, gestion et conservation des espaces boisĂ©s (dictionnaire), Paris, CNPF-IDF, , 608 p. (lire en ligne), p. 119
- « Définition de la composition d'un peuplement », sur inventaire-forestier.ign.fr (consulté le )
- « Les forĂȘts mĂ©langĂ©es », L'IF, la feuille de l'inventaire forestier de l'IGN, no 36,â (lire en ligne, consultĂ© le )
- Jean-Daniel Bontemps, Jean-Christophe HervĂ© et AnaĂŻs Denardou (respectivement pp.45-47, p. 20 et p. 24), « Partition idĂ©alisĂ©e et rĂ©gionalisĂ©e de la composition en espĂšces ligneuses des forĂȘts françaises », Ecoscience, vol. 26, no 4,â (lire en ligne, consultĂ© le )
- Masson G (2005) Autécologie des essences forestiÚres: comment installer chaque essence à sa place. Ed. Tec & Doc
- Lebourgeois F & Jabiol B (2002) Enracinements comparĂ©s des chĂȘnes (sessile et pĂ©donculĂ©) et du hĂȘtre sur diffĂ©rents matĂ©riaux. RĂ©flexions sur lâautĂ©cologie des essences. Rev. For. Fr, 54, 17-42.
- Tassin J & Balent G (2004) Le diagnostic d'invasion d'une essence forestiÚre en milieu rural: Exemple d'Acacia mearnsii à La Réunion. Revue forestiÚre française, 56(2), 132-142.
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- Ranger, J., Andreux, F., BienaimĂ©, S., Berthelin, J., Bonnaud, P., Boudot, J. P., etc. & Zeller, B. (2001) Effet des substitutions dâessence sur le fonctionnement organo-minĂ©ral de lâĂ©cosystĂšme forestier, sur les communautĂ©s microbiennes et sur la diversitĂ© des communautĂ©s fongiques mycorhiziennes et saprophytes (cas du dispositif expĂ©rimental de Breuil-Morvan). Rapport final du contrat INRA-GIP Ecofor, 24, 1-202.
- Roussel L (1972) Photologie forestiĂšre. Masson.