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Elpistostege

Elpistostege watsoni

Elpistostege
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
MHNM 06-2067, le seul squelette complet connu d'Elpistostege watsoni, exposé au parc national de Miguasha, Québec (Canada).

Famille

† Elpistostegidae
Romer, 1947

Genre

† Elpistostege
Westoll, 1938

EspĂšce

† Elpistostege watsoni
Westoll, 1938

Elpistostege (littĂ©ralement « crĂąne de l'espoir ») est un genre Ă©teint de grands sarcoptĂ©rygiens ayant vĂ©cu durant le dĂ©but du DĂ©vonien supĂ©rieur (Frasnien), entre 380 et 375 millions d'annĂ©es avant notre Ăšre, dans ce qui est aujourd'hui l'AmĂ©rique du Nord. Une seule espĂšce est connue, Elpistostege watsoni, dĂ©crite en 1938 par le palĂ©ontologue et gĂ©ologue britannique Thomas Stanley Westoll Ă  partir de restes dĂ©couverts dans la formation d'Escuminac, dans le parc national de Miguasha, situĂ© au sud-est du Quebec (Canada), et nommĂ© en l'honneur de David Meredith Seares Watson.

Les premiers fossiles d'Elpistostege n'étaient connus par des restes mineurs découverts tout au long du XXe siÚcle, et incluaient des parties fragmentaires de crùnes, de vertÚbres ainsi que d'écailles, ce qui rendait sa description anatomique et phylogénétique trÚs incertaine. Depuis la découverte officialisée de Tiktaalik, il est souvent classé comme étant le taxon frÚre de ce dernier, notamment en raison de sa morphologie partageant un bon nombre de points communs.

En 2010, un imposant squelette complet est mis Ă  jour au sein de la mĂȘme formation et la dĂ©couverte est par la suite officialisĂ©e en 2013 via plusieurs mĂ©dias, principalement quĂ©bĂ©cois. L'Ă©tude publiĂ©e en 2020 par Richard Cloutier et son Ă©quipe rĂ©vĂšlent que les nageoires appariĂ©es de l'animal contiennent des os comparables aux phalanges aux doigts des tĂ©trapodes, ce qui fait d'Elpistostege le tĂ©trapodomorphe le plus basal connu pour possĂ©der ce type d'os. En raison de ces caractĂ©ristiques, l'Ă©tude place Elpistostege dans une position plus dĂ©rivĂ©e que Tiktaalik, et le considĂšre comme Ă©tant le taxon frĂšre de tous les vertĂ©brĂ©s disposant de membres, incluant des animaux tels Acanthostega, Ichthyostega, Tulerpeton et le groupe-couronne des tĂ©trapodes.

Tous les restes actuellement connus d'Elpistostege ont été découverts dans la formation d'Escuminac, au sein du parc national de Miguasha, un site fossilifÚre connu pour la préservation d'un important nombre de fossiles de poissons, d'invertébrés et de végétaux datant du début du Dévonien supérieur. Les sédiments présents sur le site semblent indiquer que l'endroit aurait été semblable à celui d'un estuaire.

DĂ©couverte et fossiles

En 1938, le paléontologue et géologue britannique Thomas Stanley Westoll décrit l'arriÚre d'un toit crùnien partiel découvert au sein de la formation d'Escuminac, au sein du parc national de Miguasha, situé au Québec (Canada). Le fossile, catalogué BMNH P.50063, sert d'holotype pour un nouveau genre ainsi que pour une nouvelle espÚce d'amphibiens dont Westoll le désigne sous le nom d'Elpistostege watsoni[1]. Un second spécimen est décrit en 1985, contenant cette fois-ci un toit crùnien plus complet (catalogué MHNM 538) et de restes postcrùniens fragmentaires, tels que des écailles et une partie d'une colonne vertébrale (catalogués MHNM 537), qui permet sa reclassification en tant que tétrapodomorphe plus basal[2].

Le nom de genre Elpistostege vient du grec ancien áŒÎ»Ï€ÎŻÏ‚ / elpĂ­s, qui signifie « espoir » et ÏƒÏ„Î­ÎłÎ· / stegi, signifiant « toit », en rĂ©fĂ©rence au toit crĂąnien de l'animal, l'ensemble pouvant donner littĂ©ralement « crĂąne de l'espoir »[1]. L'Ă©pithĂšte spĂ©cifique est nommĂ© en l'honneur de David Meredith Seares Watson, palĂ©ontologue et gĂ©ologue du XXe siĂšcle, ayant notamment dĂ©crit d'autres tĂ©trapodomorphes basaux[1].

En 2010, un spĂ©cimen complet est trouvĂ© dans la mĂȘme formation et sa dĂ©couverte sera officialisĂ©e trois ans plus tard dans divers mĂ©dias, principalement francophones. Par la suite, le fossile cataloguĂ© MHNM 06-2067 est dĂ©crit plus en dĂ©tail dans un article publiĂ© dans la revue scientifique Nature par Richard Cloutier et ses collĂšgues sept ans plus tard, en 2020. Le spĂ©cimen mesure 1,57 mĂštre de long et est aplati dorso-ventralement (Ă  l'exception de la nageoire caudale qui est prĂ©servĂ© de maniĂšre latĂ©ral). Il conserve la quasi-totalitĂ© du squelette postcrĂąnien, incluant notamment des Ă©lĂ©ments non visibles sur la surface extĂ©rieure du fossile, leur prĂ©sence ayant Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ©e via des tomodensitomĂštres[3] - [4].

Description

Description simplifié

Le fossile d'Elpistostege cataloguĂ© MHNM 06-2067 est l'un des restes de proto-tĂ©trapodes parmi les plus complets ayant Ă©tĂ© dĂ©couverts Ă  ce jour. Mesurant 1,57 mĂštre de long, il conserve la quasi-totalitĂ© du squelette postcrĂąnien et montre la prĂ©sence d'Ă©lĂ©ments rarement gardĂ©s dans les fossiles de tĂ©trapodomorphes dĂ©rivĂ©es, Ă  savoir la prĂ©sence d'Ă©cailles. Elpistostege a une tĂȘte courte, un tronc allongĂ© et mince avec une partie caudale raccourcie ainsi qu'une nageoire anale relativement petite. Le crĂąne reprĂ©sente environ 14 % de la longueur totale de l'animal, partageant une morphologie similaire Ă  celui de Tiktaalik[3].

CrĂąne

MHNM 538, le second crĂąne connu d'Elpistostege watsoni[2].

Le crùne d'Elpistostege est de forme triangulaire, occupant une partie importante du corps de l'animal[3]. Ce dernier est de forme aplatie et on peut supposer à partir d'une coupe transversale qu'il aurait été similaire à celui de Panderichthys, à savoir peu arqué (courbé en forme d'arc). Les orbites oculaires sont élevées au-dessus du toit crùnien avec un dépression profonde entre eux, formées par des bosses bombées situées entre les os frontal et pariétal. Les orbites sont plus larges de maniÚre dorsale d'avant en arriÚre et sont recouvert d'os mosaïque dont les sutures ne sont pas complÚtement distinguables. La cambrure principale se produit prÚs de la mùchoire supérieure ; les maxillaires et les prémaxillaires reposant sur la face ventrale. Le frontal est l'os le plus large du toit crùnien, s'élargissant vers l'avant et s'incrustant derriÚre le rostre et l'os nasal. Le nasal entoure les postrostrum postérieures, médianes et antérieures appariées ; formant ensemble le toit du museau qui est élevé au-dessus des éléments environnants par les dents de la partie antérieur de la mandibule. Dans l'ensemble, le crùne ressemble beaucoup à celui d'un tétrapode primitif, comparable aux « labyrinthodontes »[2].

Classification

Historique

La position taxonomique d'Elpistostege a changĂ© durant maintes reprises en raison du fait que l'animal n'Ă©tait connu que par des fossiles incomplets avant 2010. Dans l'article publiĂ© par Westoll en 1938, Elpistostege fut placĂ© parmi divers vertĂ©brĂ©s Ă  membres primitifs dans l'ordre des Stegocephalia, au sein de la classe Amphibia[N 1] - [1]. Cette classification sera contestĂ©e dans l'article publiĂ© en 1985 concernant la dĂ©couverte du second spĂ©cimen, qui le reclasse dans la famille des Panderichthyidae. Cette proposition est notamment due au fait que les auteurs mentionnent la possibilitĂ© que le crĂąne aurait pu ĂȘtre similaire Ă  celui de Panderichthys[2]. Cependant, diverses analyses phylogĂ©nĂ©tiques publiĂ©es ultĂ©rieurement le classent dans une position plus dĂ©rivĂ©e que ce dernier[7]. Le nom du taxon Elpistostegalia vient d'ailleurs du genre Elpistostege et rĂ©unit notamment Panderichthys et le groupe-couronne des tĂ©trapodes[8]. Le taxon Stegocephalia, le groupe d'amphibiens oĂč fut autrefois placĂ© Elpistostege, sera redĂ©fini en 1998 par le palĂ©ontologue quĂ©bĂ©cois Michel Laurin comme « tous les animaux plus Ă©troitement liĂ©s aux temnospondyles qu'Ă  Panderichthys »[6]. Avec la publication officielle de la dĂ©couverte de Tiktaalik en 2006, Elpistostege fut placĂ© rĂ©guliĂšrement en tant que taxon frĂšre de ce dernier, notamment en raison de leur structure crĂąnienne[9] - [10]. Depuis la publication de l'Ă©tude publiĂ©e par Cloutier et al. en 2020, il est classĂ© comme taxon frĂšre de tous les vertĂ©brĂ©s Ă  quatre membres, en raison de la disposition des os homologues aux doigts[3] - [11].

Phylogénie

Ci-dessous, une analyse menĂ©e par Brian Swartz en 2012 considĂ©rant Elpistostege comme Ă©tant le taxon frĂšre de Tiktaalik, tous deux s'avĂ©rant ĂȘtre des membres primitifs du clade Elpistostegalia[10].

Ci-dessous, la classification basée d'aprÚs l'étude menée par Cloutier et al. en 2020, plaçant Elpistostege en tant que taxon frÚre de tous les vertébrés à membres, dans une position plus dérivée que Tiktaalik[3], selon Stewart et al. (2022)[11]:

Paléoécologie

Le parc national de Miguasha, situĂ© au QuĂ©bec (Canada), est un site fossilifĂšre particuliĂšrement connu pour ses fossiles ayant fourni un assemblage aquatique diversifiĂ©, comprenant notamment plusieurs espĂšces de poissons datant du DĂ©vonien supĂ©rieur, tels que divers agnathes, placodermes, actinoptĂ©rygiens et sarcoptĂ©rygiens. Certains fossiles prĂ©servĂ©s sont d'ailleurs suffisamment complets pour ĂȘtre articulĂ©s et mĂȘme prĂ©server des tissus mous[12].

La formation d'Escuminac, d'oĂč Elpistostege a Ă©tĂ© dĂ©couvert, est connu pour avoir livrĂ© plus de 18 000 spĂ©cimens de poissons et contient de nombreux fossiles de vĂ©gĂ©taux (notamment l'arbre primitif Archaeopteris ou encore Barinophyton)[12] - [13]. Les analyses de sĂ©diments suggĂšrent un milieu marin ou de transition plutĂŽt qu'une origine lacustre pour la formation d'Escuminac. L'excellente qualitĂ© de prĂ©servations des fossiles de poissons et de coprolithes indique que la zone se situait en eau saumĂątre[13].

Notes et références

Notes

  1. Durant le début du XXe siÚcle, le taxon Stegocephalia était autrefois utilisé pour regrouper des amphibiens considérés comme primitifs[5]. Il faudra attendre 1998 pour que le paléontologue québécois Michel Laurin le rétablisse comme un clade contenant le groupe-couronne des tétrapodes ainsi que tous les vertébrés à membres qui sont placés à l'extérieur de ces derniers comme Ichthyostega ou Acanthostega[6].

Références

  1. (en) T. S. Westoll, « Ancestry of the Tetrapods », Nature, vol. 141, no 3559,‎ , p. 127–128 (DOI 10.1038/141127a0, Bibcode 1938Natur.141..127W, S2CID 4086668)
  2. (en) Hans-Peter Schultze et Marius Arsenault, « The panderichthyid fish Elpistostege: a close relative of tetrapods ? », Palaeontology, vol. 28, no 2,‎ , p. 293-309 (S2CID 134153900, lire en ligne [PDF])
  3. (en) R. Cloutier, A. M. Clement, M. S. Y. Lee, R. NoĂ«l, I. BĂ©chard, V. Roy et J. A. Long, « Elpistostege and the origin of the vertebrate hand », Nature, vol. 579, no 7800,‎ , p. 549–554 (PMID 32214248, DOI 10.1038/s41586-020-2100-8, Bibcode 2020Natur.579..549C, S2CID 213171029, lire en ligne)
  4. (en) Laura Geggel, « Fish sprouted fingers before they ventured onto land, fossil shows », livescience.com,‎ (lire en ligne)
  5. (en) E. D. Cope, « Synopsis of the extinct Batrachia of North America », Proceedings of the Academy of Natural Sciences of Philadelphia,‎ , p. 208-221 (JSTOR 4059894)
  6. (fr + en) Michel Laurin, « L'importance de la parcimonie globale et du biais historique pour la comprĂ©hension de l'Ă©volution des tĂ©trapodes. Partie I. SystĂ©matique, Ă©volution de l'oreille moyenne et suspension mandibulaire », Annales des Sciences Naturelles - Zoologie et Biologie Animale, Paris, vol. 19, no 1,‎ , p. 1–42 (DOI 10.1016/S0003-4339(98)80132-9, S2CID 84192988)
  7. (en) Marcello Ruta, Jonathan E. Jeffery et Michael I. Coates, « A supertree of early tetrapods », Proceedings of the Royal Society of London B: Biological Sciences, vol. 270, no 1532,‎ , p. 2507–2516 (ISSN 0962-8452, PMID 14667343, PMCID 1691537, DOI 10.1098/rspb.2003.2524, S2CID 22867564, lire en ligne [PDF])
  8. (en) Gordon, M.S. et Long, J.A., « The Greatest Step In Vertebrate History: A Paleobiological Review of the Fish-Tetrapod Transition », Physiological and Biochemical Zoology, vol. 77, no 5,‎ , p. 700–719 (PMID 15547790, DOI 10.1086/425183, S2CID 1260442, lire en ligne [PDF])
  9. (en) Edward B. Daeschler, Neil H. Shubin and Farish A. Jenkins Jr., « A Devonian tetrapod-like fish and the evolution of the tetrapod body plan », Nature, vol. 440, no 7085,‎ , p. 757–763 (PMID 16598249, DOI 10.1038/nature04639 AccĂšs libre, Bibcode 2006Natur.440..757D)
  10. (en) B. Swartz, « A marine stem-tetrapod from the Devonian of Western North America », PLOS ONE, vol. 7, no 3,‎ , e33683 (PMID 22448265, PMCID 3308997, DOI 10.1371/journal.pone.0033683 AccĂšs libre, Bibcode 2012PLoSO...733683S)
  11. (en) Thomas A. Stewart, Justin B. Lemberg, Ailis Daly, Edward B. Daeschler et Neil H. Shubin, « A new elpistostegalian from the Late Devonian of the Canadian Arctic », Nature,‎ (ISSN 0028-0836, PMID 35859171, DOI 10.1038/s41586-022-04990-w AccĂšs libre, S2CID 250730904)
  12. (en + fr) Richard Cloutier, « Great Canadian LagerstĂ€tten 4. The Devonian Miguasha Biota (QuĂ©bec): UNESCO World Heritage Site and a Time Capsule in the Early History of Vertebrates », Geoscience Canada, vol. 40, no 2,‎ , p. 149-163 (DOI 10.12789/geocanj.2013.40.008 AccĂšs libre, S2CID 55424276)
  13. (en) Richard Cloutier, Stanislas Loboziak, Anne-Marie Candilier et Alain Blieck, « Biostratigraphy of the Upper Devonian Escuminac Formation, eastern QuĂ©bec, Canada: a comparative study based on miospores and fishes », Review of Palaeobotany and Palynology, vol. 93, nos 1-4,‎ (DOI 10.1016/0034-6667(95)00126-3, S2CID 129830803, lire en ligne)

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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