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Nanotechnologie

Les nanosciences et nanotechnologies (d’aprĂšs le grec ÎœÎŹÎœÎżÏ‚, « nain »), ou NST, peuvent ĂȘtre dĂ©finies au minimum comme l’ensemble des Ă©tudes et des procĂ©dĂ©s de fabrication et de manipulation de structures (physiques, chimiques ou biologiques), de dispositifs et de systĂšmes matĂ©riels Ă  l’échelle du nanomĂštre (nm), qui est l'unitĂ© la plus proche de la distance entre deux atomes[1].

Les NST prĂ©sentent plusieurs acceptions liĂ©es Ă  la nature transversale de cette jeune discipline. En effet, elles utilisent, tout en permettant de nouvelles possibilitĂ©s, des disciplines telles que l’optique, la biologie, la mĂ©canique, microtechnologie. Ainsi, comme le reconnaĂźt le portail français officiel des NST, « les scientifiques ne sont pas unanimes quant Ă  la dĂ©finition de nanoscience et de nanotechnologie »[2].

Les nanomatĂ©riaux ont Ă©tĂ© reconnus comme toxiques pour les tissus humains et les cellules en culture[3] - [4] - [5] - [6] - [7]. La nanotoxicologie Ă©tudie les risques environnementaux et sanitaires liĂ©s aux nanotechnologies. La dissĂ©mination Ă  large Ă©chelle de nanoparticules dans l’environnement est sujette Ă  des questions Ă©thiques.

Les nanotechnologies bĂ©nĂ©ficient de plusieurs milliards de dollars en recherche et dĂ©veloppement[8]. L’Europe a accordĂ© 1,3 milliard d’euros pendant la pĂ©riode 2002-2006[9] et 3,5 milliards d'euros pendant la pĂ©riode 2007-2013[10]. Au dĂ©but des annĂ©es 2000, certains organismes prĂ©disaient que le marchĂ© mondial annuel pourrait ĂȘtre de l’ordre de 1 000 milliards de dollars amĂ©ricains dĂšs 2015 (estimation de la National Science Foundation en 2001), jusqu'Ă  3 000 milliards de dollars (estimation Lux Research Inc de 2008)[11].

ReprĂ©sentation d’un nanotube de carbone (cliquer pour voir l’animation)

Historique

Vision de Feynman

Dans son discours donnĂ© le [12] Ă  la SociĂ©tĂ© amĂ©ricaine de physique, Richard Feynman Ă©voque un domaine de recherche possible alors inexplorĂ© : l’infiniment petit; Feynman envisage un aspect de la physique « dans lequel peu de choses ont Ă©tĂ© faites, et dans lequel beaucoup reste Ă  faire »[13].

Se fondant sur la taille minuscule des atomes, il considĂšre comme possible d’écrire de grandes quantitĂ©s d’informations sur de trĂšs petites surfaces : « Pourquoi ne pourrions-nous pas Ă©crire l’intĂ©gralitĂ© de l’EncyclopĂŠdia Britannica sur une tĂȘte d’épingle ? »[14]. Une affirmation qui n’avait pas Ă©tĂ© spĂ©cifiquement relevĂ©e, et qui est aujourd’hui abondamment citĂ©e (de fait, ce qui Ă  l’époque Ă©tait infaisable, semble aujourd’hui parfaitement rĂ©alisable, grĂące aux progrĂšs en microtechnologies). Feynman veut aller au-delĂ  des machines macroscopiques avec lesquelles nous vivons : il imagine un monde oĂč les atomes seraient manipulĂ©s un par un et agencĂ©s en structures cohĂ©rentes de trĂšs petite taille.

Microscope Ă  effet tunnel

Le dĂ©veloppement des nanosciences et nanotechnologies s’appuie sur l’invention de deux instruments permettant d’observer et d’interagir avec la matiĂšre Ă  une Ă©chelle atomique ou subatomique. Le premier est le microscope Ă  effet tunnel qui a Ă©tĂ© inventĂ© en 1981 par deux chercheurs d’IBM (Gerd Binnig et Heinrich Rohrer), et qui permet de parcourir des surfaces conductrices ou semi-conductrices en utilisant un phĂ©nomĂšne quantique, l’effet tunnel, pour dĂ©terminer la morphologie et la densitĂ© d’états Ă©lectroniques des surfaces qu’il explore. Le second est le microscope Ă  force atomique qui est un dĂ©rivĂ© du microscope Ă  effet tunnel, et qui mesure les forces d’interactions entre la pointe du microscope et la surface explorĂ©e. Cet outil permet donc, contrairement au microscope Ă  effet tunnel, de visualiser les matĂ©riaux non conducteurs. Ces instruments combinĂ©s avec la photolithographie permettent d’observer, de manipuler et de crĂ©er des nanostructures.

FullerĂšnes et nanotubes

En 1985, trois chercheurs, Richard Smalley, Robert F. Curl (de l’universitĂ© Rice de Houston) et Harold W. Kroto (universitĂ© du Sussex) dĂ©couvraient une nouvelle forme allotropique du carbone, la molĂ©cule C60 constituĂ©e de 60 atomes de carbone rĂ©partis sur les sommets d’un polyĂšdre rĂ©gulier formĂ© de facettes hexagonales et pentagonales. Chaque atome de carbone a une liaison avec trois autres. Cette forme est connue sous le nom de buckminsterfullerĂšne ou buckyball et doit son nom Ă  l’architecte et inventeur amĂ©ricain Richard Buckminster Fuller qui a crĂ©Ă© plusieurs dĂŽmes gĂ©odĂ©siques dont la forme est analogue au C60[15].

Plus gĂ©nĂ©ralement, les fullerĂšnes dont fait partie le C60, sont une nouvelle famille de composĂ©s du carbone. Non Ă©quilatĂ©raux, leur surface se compose d’une combinaison d’hexagones et de pentagones Ă  l’instar des facettes d’un ballon de football. Cette disposition leur confĂšre des structures toujours fermĂ©es en forme de cage de carbone. Il fallut nĂ©anmoins attendre 1990, pour que Huffman et Kramer de l’universitĂ© de Heidelberg, mettent au point un procĂ©dĂ© de synthĂšse permettant l’obtention de ces molĂ©cules en quantitĂ©s macroscopiques. Les nanotubes ont Ă©tĂ© identifiĂ©s six annĂ©es plus tard dans un sous-produit de synthĂšse des fullerĂšnes[16].

Prophéties de Drexler

En 1986, Eric Drexler publie un ouvrage sur l’avenir des nanotechnologies, Engines of Creation, dans lequel il dĂ©livre sa vision des progrĂšs faramineux possibles avec l’essor des nanotechnologies. Ainsi les lois physiques paraissant insurmontables aujourd’hui pourraient ĂȘtre dĂ©passĂ©es, les produits crĂ©Ă©s pourraient ĂȘtre moins coĂ»teux, plus solides, plus efficaces grĂące Ă  la manipulation molĂ©culaire. Mais Drexler a Ă©galement prĂ©vu ce qu’on pourrait appeler le revers de la mĂ©daille, en effet de telles technologies capables de se reproduire ou du moins de se rĂ©pliquer par elles-mĂȘmes pourraient ĂȘtre tout simplement cataclysmique puisque, par exemple, des bactĂ©ries crĂ©Ă©es dans un quelconque intĂ©rĂȘt commun pourraient se rĂ©pliquer Ă  l’infini et causer des ravages sur la flore mais aussi sur la faune et mĂȘme sur l’humanitĂ©.

Drexler Ă©crit que si l’essor des nanotechnologies, apparemment inĂ©luctable dans le processus d’évolution, devait nous apporter Ă©normĂ©ment dans des domaines trĂšs vastes, il est Ă©galement fort probable que ces technologies deviennent destructrices si nous ne les maĂźtrisons pas entiĂšrement.

À ce sujet, une des questions qui peuvent ĂȘtre posĂ©es est la forte capacitĂ© pĂ©nĂ©trante qu’ont les nanoparticules Ă  l’égard des tissus cellulaires. Effectivement, du fait de leur taille infĂ©rieure aux cellules, dĂšs lors que ces derniĂšres sont Ă  l’état de particules, elles peuvent outrepasser certaines barriĂšres naturelles. Cette propriĂ©tĂ© est d’ailleurs dĂ©jĂ  exploitĂ©e dans l’industrie cosmĂ©tique.

Nanophysique

À l’échelle nanomĂ©trique, la matiĂšre prĂ©sente des propriĂ©tĂ©s particuliĂšres, justifiant une approche spĂ©cifique. Il s’agit notamment des propriĂ©tĂ©s quantiques, mais aussi d’effets de surface, de volume, ou encore d’effets de bord. L’enjeu des nanosciences est de comprendre les phĂ©nomĂšnes nanomĂ©triques, au profit des nanotechnologies (conception et utilisation de systĂšmes nanomĂ©triques). De nombreux laboratoires dans le monde y travaillent[17].

Aspects quantiques

Ainsi, conformĂ©ment aux lois de la mĂ©canique quantique, une particule adoptera au niveau nanomĂ©trique un comportement ondulatoire aux dĂ©pens du comportement corpusculaire que nous lui connaissons au niveau macroscopique. Cette dualitĂ© onde-corpuscule est particuliĂšrement visible dans l’expĂ©rience des fentes de Young. Un faisceau de particules (lumiĂšre, Ă©lectrons, etc.) interfĂšre avec une sĂ©rie de fentes peu espacĂ©es et crĂ©e une figure d’interfĂ©rences, caractĂ©ristique d’un phĂ©nomĂšne ondulatoire. Cette dualitĂ© onde-particules de la matiĂšre, qui reste Ă  ce jour une des grandes interrogations de la physique va provoquer divers phĂ©nomĂšnes au niveau nanomĂ©trique, par exemple :

  • quantification de l'Ă©lectricitĂ© : dans les nanofils (ou nanowire) on a remarquĂ© que le courant Ă©lectrique n’est plus constituĂ© d’un flux continu d’électrons mais qu’il est quantifiĂ©, c’est-Ă -dire que les Ă©lectrons circulent par « paquets » dans le circuit ;
  • quantification de la chaleur : de mĂȘme dans un circuit de taille nanomĂ©trique, on a observĂ© que la chaleur se propage de maniĂšre quantifiĂ©e.

Ces phĂ©nomĂšnes ont Ă©tĂ© constatĂ©s pour la premiĂšre fois de visu en 2001, avec le « chapelet conducteur d’électricitĂ© »[18] (electrically conductive string) par son inventeur, le thermodynamicien Hubert Juillet, ce qui a permis de confirmer cet aspect des thĂ©ories de la mĂ©canique quantique. Ce comportement quantique nous oblige Ă  revoir notre façon de penser : Pour dĂ©crire une particule, on ne parle plus en termes de position en un temps donnĂ©, mais plutĂŽt en termes de probabilitĂ© que la particule soit dĂ©tectĂ©e Ă  un endroit plutĂŽt qu’à un autre.

Aspects physicochimiques

Les nanoparticules et matériaux offrent de trÚs fortes proportions d'atomes de surface par rapport aux atomes intérieurs qui leur donne une forte réactivité de surface. Ils sont en outre sujet à des changements considérables de propriétés selon leur taille et forme (en lien avec leur réactivité mais aussi avec des effets de confinement quantique)[19]. Leur croissance, agrégation, dissolution ou évaporation sont spécifiques, et jouent un rÎle clé dans leur durée ou cycle de vie, leurs comportements avec d'autres nano-objets, des molécules du vivant, des organes ou organismes vivant dans les environnements de laboratoire ou dans la nature, avec des conséquences globales qu'on commence seulement à évaluer[19].

Émergence des nanotechnologies

DerriĂšre l’effet d’annonce, plusieurs Ă©tudes ont Ă©tĂ© menĂ©es pour apprĂ©hender l’évolution des nanotechnologies et des nanosciences. Ainsi, en considĂ©rant le fait que les dĂ©finitions ne sont pas stabilisĂ©es, la composante commune des diffĂ©rentes mĂ©thodes utilisĂ©es est de mesurer l’activitĂ© nanotechnologique sous trois angles : publications scientifiques (plutĂŽt pour les connaissances fondamentales), brevets (plutĂŽt pour les aspects technologiques), et Ă©ventuellement institutions et entreprises concernĂ©es ou encore les capitaux investis (pour mesurer l’activitĂ© Ă©conomique et industrielle rĂ©elles). Qu’il s’agisse des brevets ou des publications scientifiques, les valeurs prĂ©sentĂ©es dans les tableaux suivant Ă©taient nĂ©gligeables avant les annĂ©es 1990.

Évolution technologique de 1995 à 2003 dans le monde

Au regard de l’article paru dans la revue Nature Nanotechnology[20] en 2006, on note l’évolution suivante pour les brevets dĂ©posĂ©s Ă  l’Office europĂ©en des brevets (EPO):

Année 1995 2000 2003
Nombre de brevets pour l’annĂ©e 950 1 600 2 600

Si ces chiffres représentent une forte évolution, on note également une relative stabilité pour ces deux périodes. Néanmoins cette évolution ne prend pas en compte les croissances plus rapides (1997-1999) et les diminutions (2000-2001).

Vers 2005 de nombreux centres de recherches se sont lancĂ©s dans l’étude des nanofils (nanowire) pour essayer de produire pour l’industrie, par divers procĂ©dĂ©s dont majoritairement par croissance, un nanofil suffisamment long et solide et qui prĂ©senterait, notamment, les mĂȘmes effets quantiques que le chapelet conducteur d’électricitĂ©.

Évolution des connaissances fondamentales entre 1989 et 2000 dans le monde

Nous prendrons pour caractĂ©riser l’évolution des publications scientifiques, un article[21] utilisant une mĂ©thode plus englobante que celle utilisĂ©e dans Nature Nanotechnology et qui permet de caractĂ©riser l’évolution des publications nanotechnologiques :

PĂ©riodes 1989-1990 1991-1992 1993-1994 1995-1996 1997-1998 1999-2000
Publications cumulĂ©es 1 000 10 000 20 000 35 000 55 000 80 000
Nouvelles publications 1 000 9 000 10 000 15 000 20 000 25 000

Périodes de créations des entreprises concernées par les NST

En suivant un rapport[22] Ă©mis par la commission europĂ©enne Ă  propos de l’estimation du dĂ©veloppement Ă©conomique des NST, nous pouvons regarder les dates de crĂ©ations d’entreprises concernĂ©es par cette activitĂ©.

Périodes de création Avant 1900 1900-1950 1951-1980 1981-1990 1991-2000
Nombre d’entreprises concernĂ©es 20 60 45 75 230

Ces chiffres sont Ă©tablis sur un rĂ©pertoire d’entreprises particulier qui semble sous-Ă©valuer les effectifs rĂ©els. Ils montrent bien une nette accĂ©lĂ©ration des entreprises concernĂ©es par les nanotechnologies depuis les annĂ©es 1990, mais d’autres sources, plus complĂštes, font des estimations bien au-dessus de ces chiffres. Le site NanoVIP estimait qu’en 2005 plus de 1 400 entreprises Ă©taient identifiĂ©es comme Ă©tant concernĂ©es par les nanotechnologies. Plus rĂ©cemment, des recherches[23] font Ă©tat d’un nombre d’entreprises supĂ©rieur Ă  6 000 en 2006. Ces recherches s’appuient sur une mĂ©thode visant Ă  combiner les sources d’informations[24] en ajoutant plusieurs marqueurs de l’activitĂ© nanotechnologique, comme les brevets. En 2006, Ă  partir de ces rĂ©sultats, les États-Unis accueillent 48 % des entreprises qui investissent dans les nanotechnologies, alors que l’Europe (des 27 et des pays associĂ©s) totalise 30 % et l’Asie 20 %.

Disciplines fondamentales

Le développement actuel des nanosciences et nanotechnologies mobilise et recouvre un large spectre de domaines et de disciplines scientifiques.

Principaux champs scientifiques concernés

Du point de vue de la connaissance scientifique mobilisĂ©e, plusieurs sous-disciplines sont particuliĂšrement utiles aux dĂ©veloppements des connaissances fondamentales des NST. En effet, des analyses dĂ©taillĂ©es[25] de la maniĂšre dont sont publiĂ©s et construits les articles scientifiques concernant les nanotechnologies et les nanosciences, montrent l’émergence de trois sous-champs spĂ©cifiques :

  • biosciences et pharma : autour de la biologie, des laboratoires pharmaceutiques et des biotechnologies. Ce champ peut ĂȘtre qualifiĂ© comme celui de la nanobiologie ;
  • nanomatĂ©riaux et synthĂšse chimique : autour de la chimie et des nanomatĂ©riaux. Ce champ peut ĂȘtre qualifiĂ© comme celui des nanomatĂ©riaux ;
  • supraconductivitĂ© et ordinateur quantique : essentiellement issue de la microĂ©lectronique, ce champ peut ĂȘtre qualifiĂ© comme celui de la nanoĂ©lectronique.

L’ensemble de ces trois champs s’articulent les uns aux autres avec plus ou moins d’intensitĂ© et de distance. Ils ont un impact important sur les modalitĂ©s d’organisation de l’activitĂ© industrielle qu’ils mobilisent dans la zone concernĂ©e. En effet, la nanobiologie est essentiellement structurĂ©e autour de nombreuses petites entreprises et des grands groupes pharmaceutiques, alors que les activitĂ©s industrielles concernĂ©es par la nanoĂ©lectronique s’organisent, pour l’essentiel, autour de trĂšs grands groupes, quelques petites entreprises et des grands Ă©quipements partagĂ©s.

Ingénierie moléculaire

Engrenage molĂ©culaire issu d’une simulation de la NASA

L’ingĂ©nierie molĂ©culaire, rendue possible grĂące Ă  l’invention d’un instrument comme le microscope Ă  effet tunnel, consiste Ă  construire et dĂ©velopper des molĂ©cules « à façon »[26].

MĂ©dicales

Les communautĂ©s biologiques et mĂ©dicales exploitent les propriĂ©tĂ©s des nanomatĂ©riaux pour des applications variĂ©es (des agents contrastants pour l’imagerie de cellules, des thĂ©rapeutiques pour la lutte contre le cancer).

On regroupe sous le terme de nanobiologie et de nanomédecine les applications dans ce domaine. En France, Patrick Couvreur est le plus ancien représentant des chercheurs de ce courant des NST.

On peut ajouter des fonctions aux nanomatĂ©riaux en les interfaçant avec des structures ou des molĂ©cules biologiques. Leur taille est en effet assez proche. Les nanomatĂ©riaux sont donc utiles Ă  la recherche et aux applications in vivo et in vitro. Cette intĂ©gration permet l’émergence d’outils de diagnostic ou d’administration de mĂ©dicaments.

ÉnergĂ©tiques

On peut voir des avancĂ©es dans le domaine du stockage, de la production d’énergie ainsi que dans celui des Ă©conomies d’énergie :

  • des structures empilĂ©es de semi-conducteurs permettent d’atteindre de bien meilleurs rendements pour les cellules photovoltaĂŻques ;
  • des rĂ©ductions de la consommation d’énergie sont rendues possible par des systĂšmes d’isolation thermique, une amĂ©lioration des matĂ©riaux conducteurs. Dans le domaine de la production de lumiĂšre, l’utilisation de matĂ©riaux issus des nanotechnologies tels que les LED permettent d’obtenir un rendement trĂšs intĂ©ressant ;
  • l’utilisation de matĂ©riaux nano-poreux pour le stockage de l’hydrogĂšne pourrait enfin permettre de dĂ©mocratiser son utilisation, actuellement limitĂ©e par la faible quantitĂ© d’hydrogĂšne stockĂ© dans les rĂ©servoirs conventionnels qui par ailleurs prĂ©sentent de nombreux dĂ©fauts (fuites, rendements mĂ©diocres, lourds, chers, etc.).

Cet hydrogĂšne pourrait alors ĂȘtre utilisĂ© dans des moteurs Ă  combustion ou par des piles Ă  combustible :

  • l’utilisation des nanotubes de carbone dans le domaine du stockage de l’électricitĂ© pourrait permettre de crĂ©er une pile, nommĂ©e supercondensateur, qui se rechargerait en quelques secondes, tout en Ă©tant plus lĂ©gĂšre qu’une batterie chimique et en ayant une durĂ©e de vie d’environ 3 000 ans[27].

Électroniques

Les structures des puces Ă©lectroniques ou des circuits intĂ©grĂ©s sont dĂ©jĂ  Ă  l’échelle du nanomĂštre et utilisent intensivement les nanotechnologies. Les avancĂ©es sont constantes dans les domaines des communications, du stockage d’information et du calcul.

Il n’y a guĂšre longtemps, on considĂ©rait qu’intĂ©grer des composants de deux microns, soit 2 Ă— 10−6 m, serait le seuil de miniaturisation absolu pour des dispositifs Ă  semi-conducteurs (l’épaisseur du trait sur les circuits des premiers processeurs d’Intel Ă©tait de l’ordre de 10 microns. À cette Ă©poque, on pensait qu’il serait bien difficile de dĂ©passer la barriĂšre d’un micron).

En 2004, des architectures de 90 nanomĂštres (0,09 microns) constituent l’état de l’art et les processeurs sont produits en masse avec une finesse de 65 nanomĂštres dĂšs le premier semestre 2006. Des puces gravĂ©es en 45 nanomĂštres sont sorties mi-2007, des puces en {{unitĂ©[32 nanomĂštres}} sont sorties en 2009, la gravure en 22 nanomĂštres est sortie en 2012 et le nanomĂštres est prĂ©vue pour 2022. Mais il y a une limite absolue, tout du moins pour une technologie hĂ©ritĂ©e des procĂ©dĂ©s conventionnels de photolithographie, y compris les Ă©volutions des technologies actuelles, telles que la photolithographie « extrĂȘme-UV », la lithographie Ă  rayon X durs, la gravure par faisceau d’électrons, etc. Les nanotechnologies suggĂšrent une nouvelle approche plus radicale lorsque les voies classiques auront atteint leurs limites.

Deux difficultĂ©s majeures prĂ©dominent dans la construction de circuits Ă©lectroniques Ă  base de nanotechnologie, et donc dans l’émergence de la nano-informatique :

  • Ă  l’échelle du nanomĂštre, tout objet n’est qu’un assemblage des mĂȘmes briques Ă©lĂ©mentaires : les atomes. À cette Ă©chelle du millioniĂšme de millimĂštre, les propriĂ©tĂ©s physiques, mĂ©caniques, thermiques, Ă©lectriques, magnĂ©tiques et optiques dĂ©pendent directement de la taille des structures et peuvent diffĂ©rer fondamentalement de celles du matĂ©riau au niveau macroscopique, tel qu’on l’exploitait jusqu’à prĂ©sent. Cela est dĂ» Ă  un ensemble de raisons qui incluent le comportement quantique, mais Ă©galement l’importance croissante des phĂ©nomĂšnes d’interface ;
  • on est Ă  ce jour incapable de maĂźtriser l’assemblage coordonnĂ© d’un trĂšs grand nombre de ces dispositifs de commutation (par exemple transistor Ă  nanotubes de carbone - CNFET pour « Carbon Nanotube Field Effect Transistor » ou encore circuits Ă©lectroniques mono-molĂ©culaires hybrides, etc.) sur un circuit et encore moins de rĂ©aliser cela sur un plan industriel.

DĂ©finitions des NST

La diversitĂ© des recherches engagĂ©es dans le domaine des NST ainsi que la variĂ©tĂ© des savoirs mobilisĂ©s, a amenĂ© la constitution de plusieurs dĂ©finitions des NST dans la littĂ©rature. Ce constat peut s’appuyer sur deux idĂ©es centrales qui ont un impact important sur notre capacitĂ© Ă  trouver une dĂ©finition unique et stable :

  • le taux de croissance Ă©levĂ© (nombre d’articles et nombre de brevets par exemple) de cette discipline par rapport Ă  des sciences Ă©tablies (en incluant les biotechnologies qui sont en train de se stabiliser) ;
  • la nature floue des frontiĂšres de cette jeune discipline qui assemble et rĂ©organise des savoirs jusqu’alors (en partie) cloisonnĂ©s.

Définition par les propriétés de la matiÚre

Les NST peuvent ĂȘtre caractĂ©risĂ©es par l’étude de nouvelles propriĂ©tĂ©s de la matiĂšre[28] apparaissant Ă  l’échelle nanomĂ©trique, en particulier avec les effets de surface et les effets quantiques.

En effet, Ă  l’échelle nanoscopique, le rapport entre les diffĂ©rentes forces d’interactions est diffĂ©rent du rapport Ă  l’échelle macroscopique. Les forces de surface deviennent prĂ©pondĂ©rantes face aux forces d’inertie, en effet :

  • les forces d’inertie et le poids varient avec le cube de la longueur caractĂ©ristique des objets manipulĂ©s (forces volumiques) ;
  • les forces de surface telles que les forces de van der Waals ou les forces Ă©lectromagnĂ©tiques varient avec le carrĂ© de la longueur caractĂ©ristique de l’objet ;
  • la force de Casimir est souvent non nĂ©gligeable, et les axes frottent davantage que si elle n’existait pas.

De surcroĂźt, les faibles dimensions permettent de faire intervenir des effets quantiques tels que l’effet tunnel, le transport balistique et l’émission de champs. Il existe des applications directes dans le domaine des semi-conducteurs qui ouvrent des perspectives pour les supraconducteurs.

Pour des tailles de l’ordre du nanomĂštre, les caractĂ©ristiques Ă©lectriques, mĂ©caniques ou optiques des matĂ©riaux changent. D’autre part, les rapports de surfaces devenant prĂ©pondĂ©rants, les nanotechnologies ouvrent des perspectives en chimie, en particulier pour la catalyse.

DĂ©finition par l’approche d’en bas

Il est également possible de définir les nanosciences et nanotechnologies par la nouvelle démarche qui les caractériserait.

Historiquement, le processus de fabrication d’une machine, ou d’un objet manufacturĂ© simple, relĂšve de manipulations et d’agencements essentiellement macroscopiques. Les matĂ©riaux sont produits, mis en forme par enlĂšvement de matiĂšre[29] ou dĂ©formation, puis assemblĂ©s Ă  l’échelle de grands agrĂ©gats de matiĂšre. Plus rĂ©cemment, l’exemple de la microĂ©lectronique montre que nous sommes en mesure de produire sur une surface Ă©quivalente, un nombre toujours plus Ă©levĂ© d’élĂ©ments constituants. Ainsi, le nombre de transistors des microprocesseurs sur une puce de silicium double tous les deux ans (vĂ©rifiant la loi de Moore). Cette augmentation illustre le phĂ©nomĂšne de miniaturisation qui prĂ©domine en microĂ©lectronique et plus largement en Ă©lectronique.

Par opposition, la nanotechnologie s’appuie sur le procĂ©dĂ© inverse : elle consiste Ă  partir du plus petit pour aller vers le plus grand. Elle va de l’intĂ©rieur (des atomes) vers l’extĂ©rieur (les machines et les produits manufacturĂ©s). C’est pour cela que nous la qualifierons de technologie « ascendante ». La nanotechnologie est donc la discipline qui vise Ă  Ă©tudier, manipuler et crĂ©er des groupes d’atomes puis des objets manufacturĂ©s par le contrĂŽle individuel des atomes, « du bas vers le haut ».

Dans cette perspective, le terme gĂ©nĂ©rique « nanotechnologies » concerne l’assemblage contrĂŽlĂ© d’atomes et de molĂ©cules en vue de former des composants de taille supĂ©rieure caractĂ©risĂ©s parfois par de nouvelles propriĂ©tĂ©s physico-chimiques.

Nanotechnologies et applications

Nanoparticules, nanomatériaux et applications commercialisées

MĂȘme s’il y a eu un engouement sur les applications potentielles des nanotechnologies, une grande partie des applications commercialisĂ©es se limitent Ă  l’utilisation d’une « premiĂšre gĂ©nĂ©ration » de nanomatĂ©riaux passifs. Cela inclut les nanoparticules de dioxyde de titane dans les crĂšmes solaires, cosmĂ©tiques et certains produits alimentaires ; des nanoparticules de fer dans le packaging alimentaire ; des nanoparticules d’oxyde de zinc dans les crĂšmes solaires et les cosmĂ©tiques, dans les enduits extĂ©rieurs, peintures, et dans les vernis d’ameublement ; et des nanoparticules d’oxyde de cĂ©rium intervenant comme un catalyseur de carburant. Des nano-aimants, Ă©galement appelĂ©s aimants molĂ©culaires, sont Ă©galement en cours de dĂ©veloppement depuis 1993.

Un projet, The Project on Emerging Nanotechnologies, recense les diffĂ©rents produits contenant des nanoparticules et fondĂ©s sur des nanotechnologies. En 2007, ce projet identifie plus de 500 produits de consommation fondĂ©s sur des nanotechnologies. En 2008, le rapport issu de ce projet nous indique que le principal secteur concernĂ© par les produits de consommation nanotechnologiques est celui de la santĂ© et des sports (vĂȘtements, accessoires de sport, cosmĂ©tiques, soins personnels, crĂšme solaire, etc.) avec 59 % des produits, suivi de l’électronique et de l’informatique qui en rassemblent 14 % (audio et vidĂ©o ; camĂ©ra et pellicules ; matĂ©riel informatique ; dispositifs mobiles et communication).

Approche bottom up et perspectives

De plus, les applications exigeant la manipulation ou l’arrangement des composants Ă  une Ă©chelle nanomĂ©trique (atome par atome) nĂ©cessitent l’approfondissement des recherches en cours avant d’aboutir Ă  leur commercialisation. En effet, les technologies actuellement marquĂ©es avec le prĂ©fixe « nano » sont parfois peu liĂ©es et Ă©loignĂ©es des objectifs finaux annoncĂ©s par les nanotechnologies, en particulier dans le cadre de la fabrique molĂ©culaire qui est une idĂ©e toujours suggĂ©rĂ©e par le terme. Ainsi, il peut y avoir un danger qu’une « bulle nano » se forme (ou soit en train de se former), issue de l’utilisation du terme par les scientifiques et les entrepreneurs afin de recueillir des moyens financiers supplĂ©mentaires, aux dĂ©pens de l’intĂ©rĂȘt rĂ©el que reprĂ©sentent les possibilitĂ©s des transformations technologiques Ă  long terme[30].

David M. Berube, dans un livre sur la bulle nanotechnologique[31], conclut Ă©galement dans ce sens en rappelant qu’une partie de ce qui est vendu en tant que « nanotechnologies » est en fait un remaniement de la science des matĂ©riaux. Ce phĂ©nomĂšne pourrait mener au fait que les nanotechnologies soient reprĂ©sentĂ©es par une industrie fondĂ©e essentiellement sur la vente de nanotubes et de nanowires (fils unidimensionnels mesurĂ©s en nanomĂštres), ce qui aurait pour effet de limiter le nombre de fournisseurs Ă  quelques entreprises vendant des produits Ă  faibles marges avec des volumes trĂšs importants.

Organisation

Financements

La recherche scientifique requiert un investissement souvent important. Dans le cas des nanotechnologies, oĂč l’objet d’étude se spĂ©cialise et qui nĂ©cessite des Ă©quipements spĂ©cifiques et coĂ»teux, les investissements nĂ©cessaires ne peuvent ĂȘtre supportĂ©s par une seule Ă©quipe. Pour continuer leurs recherches, les scientifiques et les ingĂ©nieurs sont financĂ©s par une grande diversitĂ© d’acteurs qui peuvent ĂȘtre regroupĂ©s en trois catĂ©gories[32] :

  • les organisations publiques (États) : les gouvernements soutiennent fortement Ă  la fois la recherche appliquĂ©e et la recherche fondamentale. En effet, certains pays ont un systĂšme de validation des brevets qui leur sont propres, ainsi qu’un grand nombre d’agences et de dĂ©partements, qui permettent de favoriser l’obtention de contrats ou la protection de la propriĂ©tĂ© intellectuelle. Les organisations publiques jouent donc un rĂŽle important dans le dĂ©ploiement des moyens de coordination, permettant d’amĂ©liorer la circulation des connaissances dans la communautĂ© scientifique, ainsi que de favoriser la rencontre entre les chercheurs, organisations, universitĂ©s et institutions ;
  • les organisations Ă  but non lucratif : les universitĂ©s constituent le cƓur de cette catĂ©gorie, bien que pour leurs recherches elles reçoivent souvent des financements de sources extĂ©rieures, comme le gouvernement mais aussi les secteurs industriels concernĂ©s. Dans cette catĂ©gorie interviennent aussi une multitude d’organisations de bases privĂ©es et d’autres organismes qui soutiennent, sans objectifs directement financiers, la recherche en sciences ;
  • entreprises et secteur privĂ© : dans la plupart des pays dĂ©veloppĂ©s, le secteur privĂ© est Ă  l’initiative d’environ les trois quarts des dĂ©penses nationales de recherches et de dĂ©veloppement. Cette importance du secteur privĂ© est Ă  nuancer avec des situations comme celles des États-Unis ou de l’Union europĂ©enne, qui ont des gouvernements qui investissent dans les NST en proposant une politique de recherche et d’innovation forte, en particulier dans les premiĂšres phases de dĂ©veloppement de secteurs industriels nouveaux, comme l’est celui des NST.

En prenant en compte Ă  la fois les investissements privĂ©s et publics de recherche et dĂ©veloppement concernant les nanotechnologies, il est possible de positionner les pays les uns par rapport aux autres en fonction du volume des investissements rĂ©alisĂ©s. Toutefois, cette opĂ©ration nĂ©cessite des prĂ©cautions dans la mesure oĂč, d’une part la taille des entitĂ©s comparĂ©es intervient et d’autre part, pour le fait que chaque gouvernement a souvent un appareil ainsi que des modalitĂ©s de financements de la recherche spĂ©cifiques. Ainsi, en 2005, la recherche et dĂ©veloppement des NST Ă©tait financĂ©e Ă  la hauteur de 48,1 % par les gouvernements, de 46,6 % par les entreprises et 5,2 % par du capital risque pour un total investi sur l’annĂ©e de 9,57 milliards de dollars[33]. En suivant cette rĂ©partition, le pays arrivant en tĂȘte est les États-Unis (1,606 milliard de dollars), suivi du Japon (1,1 milliard de dollars), de l’Allemagne (413 millions de dollars), de l’Union europĂ©enne (269 millions de dollars), et de la Chine (250 millions de dollars). La France, quant Ă  elle, arrive en 8e position, en cumulant un total de 103 millions de dollars allouĂ© Ă  la recherche et dĂ©veloppement des nanotechnologies[33].

Structuration institutionnelle et institutions concernées

En Europe, le 7e PCRD joue un rĂŽle important dans l’organisation des recherches en NST Ă  l’échelle du continent. Le 7e Programme Cadre de Recherche et DĂ©veloppement est issu de la stratĂ©gie de Lisbonne, dont les objectifs gĂ©nĂ©raux ont Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©s en 2000, qui dĂ©finit les orientations Ă©conomiques et politiques afin de doter l’Union europĂ©enne d’une Ă©conomie de la connaissance compĂ©titive et dynamique : « Les objectifs gĂ©nĂ©raux du 7e PC ont Ă©tĂ© regroupĂ©s en quatre catĂ©gories : CoopĂ©ration, IdĂ©es, Personnes et CapacitĂ©s. Pour chaque type d’objectif, il existe un programme spĂ©cifique correspondant aux domaines principaux de la politique de recherche de l’UE. Tous les programmes spĂ©cifiques Ɠuvrent en commun pour promouvoir et encourager la crĂ©ation de pĂŽles europĂ©ens d’excellence (scientifique) »[34]. L’Union europĂ©enne annonce plus d’un doublement des budgets allouĂ©s aux programmes cadres qui passeraient d’environ 20 milliards d’euros (entre 2002 et 2006) Ă  53,2 milliards (pour la pĂ©riode 2007 Ă  2013)[35]. À ce titre, les nanotechnologies figurent en bonne position dans la catĂ©gorie CoopĂ©rations du 7e PCRD, qui visent essentiellement Ă  favoriser la crĂ©ation de partenariats entre diffĂ©rentes Ă©quipes de recherche europĂ©ennes (et les pays partenaires), ainsi qu’à dĂ©velopper des recherches pluridisciplinaires et transversales[35].

En symĂ©trie avec le Programme cadre de l’Union europĂ©enne, les États-Unis ont dĂ©fini la National Nanotechnology Initiative (NNI) qui a dĂ©butĂ© en 2001. Contrairement Ă  l’Union europĂ©enne, ce programme fĂ©dĂ©ral de Recherche et DĂ©veloppement est spĂ©cifiquement consacrĂ© aux nanotechnologies, mais vise Ă©galement Ă  coordonner les efforts des multiples agences qui travaillent Ă  une Ă©chelle nanomĂ©trique en science et technologie[36]. En 2008, le budget allouĂ© Ă  la NNI serait de 1,5 milliard de dollars, soit plus du triple des dĂ©penses estimĂ©es pour l’annĂ©e 2001 (464 millions de dollars)[37].

Au regard des sommes investies, ce type de programme influe fortement sur la structuration des espaces de la recherche scientifique et sur la nature des collaborations engagĂ©es. En effet, c’est Ă  partir d’axes initiaux de dĂ©veloppement que sont dĂ©finis des objectifs concrets qui amĂšnent Ă  construire des appels Ă  projets.

À noter en matiĂšre de nanotechnologies, l’importance de la technopole grenobloise qui reprĂ©sente un bassin de recherche et d’ingĂ©nieurs unique en Europe dans ce domaine. Des pays Ă©mergents, notamment le Maroc, ont crĂ©Ă© des zones prioritaires consacrĂ©es Ă  la recherche en nanotechnologies.

Inconvénients

Dangers

De nombreux nanomatĂ©riaux sont reconnus comme toxiques pour les tissus humains et les cellules en culture[38]. Ils induisent un stress oxydant, des inflammations Ă  la cytokine et la nĂ©crose cellulaire[3]. Contrairement aux particules plus larges, les nanomatĂ©riaux peuvent ĂȘtre absorbĂ©s par les mitochondries[4] et par le noyau cellulaire[6] - [5]. Des Ă©tudes ont dĂ©montrĂ© la possibilitĂ© pour les nanomatĂ©riaux de causer des mutations de l’ADN[5] et d’induire des changements majeurs Ă  la structure mitochondriale, pouvant conduire Ă  la mort de la cellule[4] - [7]. Les nanoparticules peuvent ĂȘtre mortelles sur le cerveau des truites avec des effets comparable Ă  un empoisonnement au mercure[39].

Un projet dit « Nanogenotox » projet Nanogenotox , coordonnĂ©e par l’Afsset mais impliquant plusieurs pays europĂ©ens vise sur 3 ans Ă  offrir Ă  la Commission europĂ©enne « une mĂ©thode alternative, robuste et fiable de dĂ©tection du potentiel gĂ©notoxique des nanomatĂ©riaux susceptibles d’engendrer un risque de cancer ou de reprotoxicitĂ© chez l'Homme ». Dans ce cadre, 14 nanomatĂ©riaux manufacturĂ©s (classĂ©s en trois groupes : dioxyde de titane, dioxyde de silicium et nanotubes de carbone choisis car dĂ©jĂ  utilisĂ©s dans des produits tels que cosmĂ©tiques, aliments, produits de consommation courante) seront Ă©tudiĂ©s dont du point de vue des risques d’exposition (orale, cutanĂ©e, inhalĂ©e, avec test in vivo) et de leur production en Europe[40]. Selon Bruno Bernard, « Les nanoparticules sont comme l’amiante dans les annĂ©es 1960 une rĂ©volution dangereuse si pas encadrĂ©e »[41].

Tous les deux ans depuis 2008, la plateforme nano-sécurité[42] (PNS) installée prÚs de Minatec sur le polygone scientifique de Grenoble, organise la conférence internationale Nanosafe[43] à la maison Minatec. Des centaines de scientifiques y abordent la question de l'utilisation des nanoparticules dans notre société et les conséquences sur la santé humaine[44].

Problématiques de recyclage

MĂȘme si les nanotechnologies sont censĂ©es Ă©conomiser de la matiĂšre en favorisant la miniaturisation ou la substitution, dans l’immense majoritĂ© des cas, les applications conduisent Ă  des usages dispersifs, en incorporant des particules de mĂ©taux dans des produits sans espoir de recyclage. Cela est particuliĂšrement gĂȘnant pour des mĂ©taux comme le zinc, le titane et l’argent. Les volumes en jeu ne sont pas anecdotiques. Par exemple, la production de nano-argent reprĂ©sentait 500 tonnes en 2008, soit prĂšs de 3 % de la production mondiale d’argent mĂ©tal[45].

Sociologie

Dans les sciences sociales, les NST se prĂ©sentent encore comme des objets Ă©mergents. En France, le CNRS a crĂ©Ă© une commission interdisciplinaire « Impacts sociaux des nanotechnologies » qui a fonctionnĂ© entre 2004 et 2007, mais n’a pas Ă©tĂ© renouvelĂ©e. Les travaux sur les usages effectifs sont inexistants, puisque les gens, pour la plupart dans l’ignorance de ce que sont les nanotechnologies, n’ont rien Ă  en dire, qui fourniraient matiĂšre Ă  des entretiens et des questionnaires. Les sociologues se concentrent pour le moment sur l’analyse des discours qui sont tenus par les scientifiques et les hommes politiques (Ă  l’exception des Ă©tudes de laboratoire, qui portent leur attention sur les changements de pratiques et d’organisation liĂ©s Ă  l’émergence des nanotechnologies[46] - [47]).

Projet de société des rapports scientifiques

Les NST impliquent une ingĂ©nierie d’assemblage qui associe Ă©troitement science et technologie : elles permettent donc d’envisager les applications technologiques futures, lesquelles reprĂ©sentent des enjeux Ă©conomiques considĂ©rables. Tous les laboratoires affichant leur appartenance au domaine des NST n’ont pas nĂ©cessairement inflĂ©chi leurs thĂ©matiques de recherche. Certains ont « re-labellisé » leur travaux en ajoutant le prĂ©fixe « nano » Ă  l’intitulĂ© de leur programme, sans rien changer sur le fond. Les NST alimentent ainsi un discours de la promesse, avec ses retombĂ©es Ă©conomiques, mais aussi institutionnelles, politiques et idĂ©ologiques[48]. Les sociologues analysant le contenu des rapports des institutions de la recherche constatent que depuis le dĂ©but des annĂ©es 2000 ceux-ci ne sont plus seulement diagnostiques : ils formulent un vĂ©ritable projet de sociĂ©tĂ©[49]. Le dĂ©veloppement de ces nouvelles techniques est prĂ©sentĂ© comme irrĂ©sistible et conduisant naturellement au progrĂšs social, selon une vision scientiste, c’est-Ă -dire mĂ©canique, rationnelle et programmable de l’évolution des connaissances. Les dĂ©veloppements technologiques sont prĂ©sentĂ©s comme inĂ©vitables par des experts, qui sont suivis par les responsables politiques, induisant un dĂ©veloppement tout aussi inĂ©luctable de la sociĂ©tĂ©. Une science prĂ©dictive de la sociĂ©tĂ© permet de justifier les politiques Ă  mettre en Ɠuvre, y compris les actions correctives destinĂ©es aussi bien Ă  limiter les risques qu’à rĂ©duire les rĂ©sistances.

DĂ©bat sur les risques

Les nanotechnologies sont l’objet d’un dĂ©bat de sociĂ©tĂ©, qui a d’abord Ă©tĂ© limitĂ© au milieu scientifique. Le dĂ©bat est entrĂ© dans l’arĂšne mĂ©diatique en 2000 avec l’article de Bill Joy « Pourquoi le futur n’a pas besoin de nous » dans la revue Wired, l’un des titres les plus connus de la cyberculture[50]. Dans les pays industrialisĂ©s le dĂ©bat public Ă©merge Ă  peine alors que de nombreux nanoproduits sont fabriquĂ©s et diffusĂ©s. C’est le cas aux États-Unis notamment[51] ou au Royaume-Uni[52].

Les enjeux et les risques induits par l’incorporation de matĂ©riaux nanotechnologiques[53] (en particulier avec les nanoparticules[54]) ainsi que les nouvelles applications qui seront permises par le biais de la maĂźtrise de la fabrication Ă  l’échelle atomique, suscitent des inquiĂ©tudes et mĂȘme des alertes[55].

Nanotoxicology, une revue scientifique publiĂ©e depuis 2007 par Taylor & Francis, est consacrĂ©e spĂ©cifiquement Ă  l’étude de la toxicitĂ© des nanotechnologies[56].

En France

En France, aprĂšs une premiĂšre manifestation contre les nanotechnologies les 2 et [57] - [58] - [59] lors de l'inauguration du complexe Minatec, un dĂ©bat public national sur les nanotechnologies est organisĂ© en 2009-2010[60] mais tourne court. Depuis, le site de veille d’information citoyenne[61] permet de suivre les diffĂ©rents enjeux.

En Belgique

, le Conseil SupĂ©rieur de la SantĂ© a publiĂ© un avis sur un projet d’ArrĂȘtĂ© Royal (AR) relatif Ă  la mise sur le marchĂ© des substances manufacturĂ©es et la crĂ©ation d’un registre officiel de dĂ©claration de ces produits. Pour la Belgique, le Conseil recommande donc pour l’instant :

  • de poursuivre l’initiative du projet d’AR en tenant compte des remarques gĂ©nĂ©rales et spĂ©cifiques formulĂ©es dans l’avis ;
  • de prĂ©voir dans l’AR une publication rĂ©guliĂšre (annuelle) des donnĂ©es ;
  • de prĂ©voir l’élargissement de l’AR aux mĂ©dicaments, aux cosmĂ©to et Ă  l’alimentation ;
  • de prĂ©voir la mise en place d’un Laboratoire National de RĂ©fĂ©rence ;
  • de garantir la fiabilitĂ© des donnĂ©es Ă  collecter par un contrĂŽle de qualité ;
  • de tenir compte dans l’analyse et la gestion du risque d’une source d’exposition qui n’est pas reprise par ce projet d’AR et qui rĂ©sulte des achats via internet par des particuliers. La difficultĂ© de rĂ©guler ce type d’activitĂ© est bien connue. Les autoritĂ©s doivent donc ĂȘtre bien conscientes du problĂšme et relayer cette prĂ©occupation Ă  d’autres niveaux de pouvoir comme la Commission EuropĂ©enne (CE), l’Organisation Mondiale de la SantĂ© (OMS), l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), etc. ;
  • de prĂ©ciser les aspects concernant la gestion des dĂ©chets pour les substances, mĂ©langes et articles concernĂ©s. Nous ne trouvons malheureusement pas d’informations relatives Ă  la gestion des dĂ©chets. Or il semble impĂ©ratif de pouvoir opĂ©rer une distinction entre usages confinĂ©s (avec Ă©ventuellement une filiĂšre spĂ©cifique de traitement des dĂ©chets) et usages en milieu ouvert avec impact potentiel plus important sur les travailleurs, l’environnement (eaux, sols, atmosphĂšre), la chaĂźne alimentaire, etc. ;
  • de tenir compte des dangers potentiels pour l’environnement (accumulation dans la chaĂźne alimentaire, migration dans le sol et risques de pollutions des eaux, types d’organismes particuliĂšrement sensibles, etc.). Cette importante tĂąche semble au CSS hors de portĂ©e de beaucoup d’entreprises, il faut donc prĂ©voir un organisme capable d’effectuer ces prestations et de conseiller l’entreprise selon les recommandations internationale (par exemple l’EFSA en matiĂšre d’alimentation).

Pour plus d’informations sur le projet d’AR en cours de discussions et les recommandations spĂ©cifiques du CSS sur ce projet[62].

RĂ©actions militantes

Aux États-Unis, la critique portĂ©e par l’informaticien Bill Joy dans son article Pourquoi le futur n’a pas besoin de nous (2000) a Ă©tĂ© l’une des plus mĂ©diatisĂ©es. Elle insiste sur la nĂ©cessitĂ© d’un principe de prĂ©caution[63].

En France, les réactions au phénomÚne des nanotechnologies vont du questionnement à la dénonciation.

RĂ©alisĂ© en 2007, le documentaire Le Silence des Nanos de Julien Collin se veut « une mise en questionnement critique et nĂ©anmoins rationnelle de l’activitĂ© scientifique et du dĂ©veloppement technologique d’un point de vue anthropologique, philosophique et politique »[64].

Plus engagĂ©, le groupe Marseille-Aix[65] de l’Association internationale Jacques Ellul[66] recadre les recherches sur les nanotechnologies dans le contexte du transhumanisme, phĂ©nomĂšne qu’il explique[67] lui-mĂȘme selon les thĂšses exprimĂ©es dĂšs le milieu du XXe siĂšcle par le sociologue Jacques Ellul. Celui-ci considĂšre que la technique a changĂ© de statut : elle a cessĂ© d’ĂȘtre « un vaste ensemble de moyens assignĂ©s chacun Ă  une fin » et s’est muĂ©e en « milieu environnant Ă  part entiĂšre » pour devenir « un phĂ©nomĂšne complĂštement autonome (...) Ă©chappant de plus en plus au contrĂŽle de l’homme et faisant peser sur lui un grand nombre de dĂ©terminations »[68]. Ellul prĂ©cise qu’on ne peut critiquer la technique sans se rĂ©fĂ©rer Ă  des considĂ©rations mĂ©taphysiques : « Ce n’est pas la technique qui nous asservit mais le sacrĂ© transfĂ©rĂ© Ă  la technique »[69] tandis que la politique, face Ă  ce sacrĂ©, ne peut ĂȘtre qu’impuissante et mĂȘme « illusoire »[70].

Plus ancrĂ© dans le champ politique, misant sur une rĂ©action citoyenne mais se dĂ©fendant d’ĂȘtre technophobe, le collectif grenoblois PiĂšces et main d’Ɠuvre voit dans les nanotechnologies l’expression d’un nouveau totalitarisme[71].

Dans la culture

En littérature

La nanotechnologie dans la fiction (en) a contribué à populariser le sujet. Depuis les années 1980, de nombreux textes de science-fiction abordent les nanotechnologies. Parmi les exemples notoires, on peut citer :

Chronologie

  • 1911 : premiĂšre utilisation du prĂ©fixe « nano » par un scientifique, qui veut dire nain en grec.
  • 1956 : choix du prĂ©fixe « nano » par le BIPM comme une sous unitĂ© du mĂštre
  • 1959 : Richard Feynman tient son discours au Caltech oĂč il dĂ©clare « There is Plenty of Room at the Bottom » (Il y a beaucoup d’espace en bas, sous-entendu : Ă  Ă©tudier)
  • 1974 : premiĂšre mention du terme nanotechnologie, forgĂ© par Norio Tanigushi
  • 1974 : invention de la diode molĂ©culaire par A. Aviram et M. Ratner
  • 1981 : invention du microscope Ă  effet tunnel
  • 1983 : invention du chapelet conducteur d’électricitĂ©.
  • 1985 : dĂ©couverte des fullerĂšnes
  • 1986 : invention du microscope Ă  force atomique par des chercheurs d’IBM Ă  Zurich
  • 1986 : parution de Engines of Creation: The Coming Era of Nanotechnology, de Kim Eric Drexler
  • 1987 : la pointe du microscope Ă  effet tunnel est utilisĂ©e par des chercheurs d’IBM pour faire commuter un seul interrupteur molĂ©culaire
  • 1990 : des chercheurs d’IBM Ă©crivent le nom de leur sociĂ©tĂ© avec 35 atomes de xĂ©non Ă  l’aide d’un microscope Ă  effet tunnel
  • 1991 : dĂ©couverte des nanotubes
  • 1995 : premier contact Ă©lectrique sur une seule molĂ©cule
  • 1997 : premier amplificateur rĂ©alisĂ© avec une seule molĂ©cule
  • 1998 : premiĂšre observation de la rotation d’une molĂ©cule rotor de 1 nm de diamĂštre
  • 2001 : premier transistor rĂ©alisĂ© avec un nanotube
  • 2001 : invention de la molĂ©cule brouette par des chercheurs toulousains
  • 2003 : Millipede, prototype de systĂšme de stockage d'information, rĂ©alisĂ© par IBM, et utilisant des perforations nanomĂ©triques
  • 2004 : premiers microprocesseurs gravĂ©s avec une finesse de 0,09 ”m, soit 90 nm, chez Intel et AMD
  • 2005 : Intel construit des transistors de 65 nm
  • 2006 : Ouverture de Minatec
  • 2006 : Intel est en phase de test pour la gravure en 45 nm qui devrait arriver en 2007
  • 2007 : invention du premier dispositif mĂ©canique molĂ©culaire : un pignon le long d’une crĂ©maillĂšre
  • 2011 : Intel et AMD commercialisent respectivement les Sandy Bridge et Llanos gravĂ©s en 32 nm
  • 2012 : Intel commercialise les Ivy Bridge gravĂ©s en 22 nm

Notes et références

  1. (qui est de l'ordre de 0.1 nm) (en) The Royal Society & The Royal Academy of Engineering, « Nanoscience and nanotechnologies: opportunities and uncertainties », , p5.
  2. CEA, « Nanoscience-nanotechnologie », MinistÚre de la Recherche (consulté le ).
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Annexes

Articles connexes

Livres

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Articles

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  • Jean-Pierre Dupuy, « Le risque inouĂŻ des nanotechnologies », L’Écologiste, no 10, , p. 70-72. L’un des articles clefs du premier dossier critique de la presse française sur les nanotechnologies.

Liens externes

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